Les Belges en Normandie : en quête de terre et de racines

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Les Belges en Normandie : en quête de terre et de racines
Les Belges en Normandie : en quête de terre et
de racines
n°3.433 du 19/07/2013
Sonia Ringoot a publié aux éditions OREP En quête de terre,
des Belges en Normandie. La Canycaise Rose-Lyne Isaac et sa
mère Antoinette y témoignent...
La préface de Florence Descamp est parlante : « En quête de terre
est un mémorial élevé en l'hommage aux hommes et aux femmes
de Flandres. Ceux-là qui, après les destructions et les pertes
humaines de la Grande Guerre, sont venus défricher les terres et
peupler les campagnes de Normandie laissées vides... Les paroles
qu'a recueillies Sonia Ringoot laissent s'échapper des fragments de
mémoire, des miettes de souvenirs, des confettis de récit de vie,
celle des Flamands de Normandie sur bientôt trois générations ».
La chanson de Debrabandère
La Canycaise Rose-Lyne Isaac et sa mère Antoinette figurent en bonne place dans le
livre. Leur témoignage commun ouvre l'ouvrage. Encore bon pied bon œil malgré ses
98 ans, Antoinette Isaac interprète, sans papier, la chanson de la famille Debrabandère.
C'est son nom de jeune fille. Celui de son père et de sa mère qui ont eu la fantaisie de
baptiser leurs douze enfants avec des prénoms commençant par la lettre A.
Celle qui deviendrait Mme Isaac en sourit encore. Sa mère Alphonsine ne devait pas
afficher le même visage lors d'un voyage de reconnaissance, en 1922. Son mari et elle ont
couvert les 6 km qui séparaient la gare de Cany de la ferme de Bertreville à pied et sous la
pluie. Bienvenue en pays de Caux ! Voilà qui ne pouvait pas la ravir et elle a dit à son
époux Rémi-André Debrabandère : « on ne viendra jamais ici ». Et la famille a fait sa vie
en Normandie.
70 entretiens
Rose-Lyne Isaac, fille d'Antoinette, est présidente de l'Amicale Normandie Flandres pour
le secteur de Dieppe. C'est ainsi qu'elle a été contactée par l'auteur et son équipe. « Sonia
Ringoot est réalisatrice à Bruxelles. Mais elle est franco-belge. Elle a réalisé
préalablement un CD, un témoignage où elle demande à son père de raconter l'arrivée de
sa famille en France », indique l'habitante de Cany-Barville. « Elle a obtenu le prix PierreSchaeffer en 2011 et s'est laissé convaincre de poursuivre sa démarche à travers un
livre ». L'ouvrage compte en tout soixante-dix entretiens.
Celui de Rose-Lyne et Antoinette Isaac se situe dans le chapitre intitulé Partir. Clin d'œil
de la vie, les Debrabandère ont déjà été interviewés pour évoquer leur arrivée en France.
C'était en 1932 et l'entretien avait été réalisé par un journaliste d'Ypres, ville de la Belgique
flamande. « C'est émouvant, ça fait revivre ma grand-mère », souligne Rose-Lyne Isaac
qui a conservé deux copies (en français et en flamand) de ce reportage.
Une photo avant de partir
La famille, originaire de Zwevegem, à côté de Courtrai, s'est installée à Bertreville le 20
juillet 1922. Rémi Debrabandère avait déjà neuf enfants (dont Antoinette) quand toute la
troupe a déménagé. L'homme succédait à son cousin Jules Talpe dont la femme Irma
n'avait pu se faire à la vie cauchoise. Avant de partir, les Debrabandère ont fait une photo
avec les neuf enfants vêtus de blanc. Le cliché se trouve encore chez les Isaac tout à côté
de celui pris en France, avec les douze progénitures du couple...
Les études à Courtrai
« Nous n'étions pas totalement coupés de la Belgique. Nous sommes tous allés faire nos
études à Courtrai », rappelle Antoinette. « Ma grand-mère avait une sœur qui était
professeur dans une école religieuse de cette ville », complète Rose-Lyne. Cette dernière
tente de faire parler sa mère, afin qu'elle raconte ses souvenirs, son enfance, comme elle
les avait couchés sur papier il y a une trentaine d'années.
La dame, rattrapée par son âge, ne parvient à démêler les fils de sa mémoire. Comment
lui en vouloir, elle en a déjà beaucoup raconté et nous a accueillis avec un sourire à
réchauffer le cœur. « Ma mère s'occupait de ses douze ans mais aussi des pauvres. Elle
avait la chance d'avoir un mari qui accepte cela », nous glisse-t-elle au passage.
La ferme des murs, si chère à son père, appartient encore à la famille.
Ghislain ANNETTA
En quête de terre, des Belges en Normandie, Sonia Ringoot avec Pauline Ringoot, Sophie
Lecluse et Nicolas Didier, aux Éditions OREP, 34,50 euros.
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