Joyce Cimper – Morsures de lignes en terre aride – Le Pays fertile

Transcription

Joyce Cimper – Morsures de lignes en terre aride – Le Pays fertile
Morsures de lignes
en terre aride
Joyce CIMPER
Guess, who’s back ?
Back again…
Max is back.
Tell your friend : Max is back and
nd he’s
he’ mad !
Comme
omme tous les autres. Comme toi bientôt. Puisque la folie, filmée par Miller, se communique
communique.
Tant et si bien que lorsqu’elle prend les armes en même temps que la route, se frayant, entre
le fracas des tôles et les effusions de sang, un chemin vers la liberté,
liberté on cavale avec elle.
On fonce à toute allure sur Fury Road. Deux heures durant. Le cœur battant.
Et puis, les lumières se rallument ; l’adrénaline, la poussière retombent. Certains
rtains quittent alors la
salle de cinéma quand d’autres s’époussettent encore,
ore, tentant de déloger quelque grain de sable qui
ce serait glissé sous leur peau. Ceux
C
là ont tout le désert de Miller dans les veines
veines. Ils devront se les
entailler pour s’en purger. Alors incisons : j’ai grand besoin d’une hémorragie.
Qui sera sonore ou ne sera pas.
Car riffs de guitare. Car crissement de pneus et moteur qui vrombit. Car explosions et percussions.
Mad Max est un tumulte.
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Des métaux qui s’entrechoquent. Rugissement de tronçonneuses. Détonations. Un hurlement
accompagne celles des pistolets-mitrailleurs : « J’orchestre la partition de la mort ». « Oui,
chantez, mes frères, chantez » tonne le Meunier, s’adressant à ses fusils qui tirent en rafale.
Coups de feu pour toutes notes, des clameurs en guise de refrain.
La chamade effrénée des cœurs donne la mesure : c’est la polyphonie de la démence.
Le nom à donner à ce concerto ? The sound of silence. A human one.
A bien tendre l’oreille, on se rend en effet compte que, somme toute, le vacarme est mécanique.
Ce sont les machines qui se montrent volubiles. Les hommes, eux, se taisent.
A peine les entendra-t-on parler quarante-cinq minutes en deux heures. Dialogues réduits à
l’essentiel dans ce quatrième volet. De voix-off en proclamations, les personnages ne s’expriment
jamais que brièvement et toujours pour communiquer une information capitale. Quand elles ne
s’ouvrent pas pour laisser passer un cri de rage, de douleur, de détresse, les bouches font un état
des lieux ; elles avertissent, indiquent une position géographique, le statut d’un tel, la direction à
suivre, l’objet de la quête.
En quelques phrases, à chaque fois, car Fury Road, c’est une course poursuite. Le temps presse.
Bien trop précieux, le temps n’est pas perdu à discourir inutilement.
Expression de l’urgence par l’aphonie. L’acmé de ce mutisme ? La musique.
C’est bien cela : la musique, oui, qui «est elle-même une sorte de silence parce qu’elle impose silence
aux bruits, et d’abord au bruit insupportable par excellence qui est celui des paroles. » Oscillant
entre rock, métal et électro, la bande son de Mad Max donne raison à Jankélévitch. La musique
détrone ici les mots. C’est elle qui articule, qui renseigne dans un dialecte qui s’adresse aux
instincts ; avec ces tambours, par exemple, tambours de la guerre qui en battant annoncent cette
dernière. Des tam-tam qui enfièvrent aussitôt lesWar-Boys, exaltant leur envie de carnage.
Aussi, à la question ‘’à quel genre musical l’opus Fury Road appartient-il ?’’, répondre : ‘’nul doute
possible… Fury Road, loin des vocalises, est un instrumental’’.
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Mad Max s’écoute. Quoi qu’on en dise, c’est avec les tympans que Mad Max se regarde.
Film à saisir par l’ouïe. Qui n’a pas assez des oreilles. Les yeux devront à leur tour se faire organes
auditifs. Il faudra bien cela : deux sens pour capter l’ensemble des sons, bon nombre se voyant dans
la mesure où les couleurs parlent.
Comme ici… 64ième minute.
Au second plan, les anciennes épouses d’Immortan Joe, serrées les unes contres autres, visages
juvéniles éclairés par la lueur d’une flamme. Personnages regroupés autour d’une lanterne,
symbole de leur optimisme qui pourrait s’éteindre mais arde encore. La métaphore est
lumineuse : on comprend d’emblée grâce à cette bougie que malgré ce qu’elles ont subi, malgré
les viols, ces femmes demeurent porteuses d’un irréductible espoir.
Assise sur la banquette avant, plongée tout comme Max dans l’obscurité, Furiosa a l’air las, accablé.
Elle se perd dans cette nuit d’un bleu froid ; bleu oscillant entre roi et électrique. Bleu mélancolique.
C’est le blues. Avec ce seul plan, Miller chuchote au spectateur que Furiosa qui a connu la guerre et y a
perdu un bras, Furiosa qui porte le titre honorifique d’Imperator -le même que l’on attribuait durant
l’Antiquité aux généraux romains revenant triomphants de leur campagne militaire-, cette Furiosa là,
combattante émérite, est un protagoniste sombre. Elle est minée par les atrocités et la mort qu’elle a
côtoyée. Au cœur de cette course poursuite éperdue, elle cherche la rédemption, rongée par la culpabilité
de ce qu’il lui a fallu accomplir au nom d’Immortan Joe.
Et devant cette scène, c’est l’épiphanie : Dag, Splendid, Toast, Capable et Cheedo sont, seront le salut de
Furiosa. Au-delà même du fait que les arracher à leur bourreau permettrait à cette dernière de se
racheter, il y a qu’à plusieurs reprises, elles se font la voix de sa conscience. Elles lui crient à la quarantecinquième minute de ne pas tuer Nux. « Pas de meurtre sans raison ! ». Que le War-Boy ait essayé
d’étrangler Furiosa ne sauraient pour elles justifier son envie de lui trancher la gorge.
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Le feu entre les mains des ex-« épouses » symbolise tout cela à la fois : la flamme de la paix, la fonte de la
barbarie sans oublier la chaleur humaine qu’elle redonne à leur sauveuse.
Et ce sont encore les couleurs qui nous révèlent les changements s’opérant en Furiosa.
La graisse de moteur avec laquelle elle se noircissait le front au commencement de l’aventure s’estompe.
Peau à nu, elle montre plus de sentiments. Peine, doute, inquiétude, douleur, parfois même un
sourire. Elle s’éclaircit à mesure que les vêtements blancs des cinq « épouses » se tachent. Les
tissus s’encrassent, suggérant que c’est dans la sueur et la saleté que l’on s’endurcit.
Que l’on devient plus forte qu’on ne l’était déjà.
Un syllogisme nécessaire, à présent.
C’est, à en croire Baudelaire, user de magie que de réussir à faire parler la couleur « comme une
voix profonde et vibrante ».
Or Miller fait parler les couleurs comme autant de voix profondes et vibrantes.
Donc Miller est un sorcier.
Il pratique cette sorcellerie mentionnée dans les Curiosités esthétiques, « sorcellerie évocatoire »
que seuls ceux qui manient « savamment la langue » peuvent accomplir. Il est vrai que virtuose
de la langue chromatique, Miller ensorcèle.
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Azur clair contre sable ocre, il vous livre, en deux teintes, l’infini des espaces.
Et « j’en ferai bien mon horizon ».
Oui, devant ce paysage, devant cette antithèse entre ciel et terre me reviennent en mémoire ces
paroles de Marguerite, vieille chanson de Saez dans laquelle la femme est aimée parce qu’elle
est déraison faite chair. C’est l’ensemble du morceau qui finalement est à propos avec cet
amour de l’insensé. Fury Road est la Marguerite du jardin de la cinématographie. Ce n’est
même pas exagérer, au fond...
Après tout, « Marguerite elle est belle comme un accident d’bagnole, comme un poids lourd qui
a plus les freins, Marguerite, elle est folle », dit Saez, la voix pleine d’adoration, et Fury Road
l’est tout autant. La rationalité y fait des tonneaux et c’est de toute beauté. « C’est mes coups de
jus », ces embardées ; ni plus ni moins « mes coups de foudre ».
Fury Road, « c’est dans le mille à tous les coups ».
C’est des frissons même après quinze, seize, dix-sept visionnages. Surtout à l’instant où Furiosa
est frappée au visage. Le nez, la bouche en sang, elle riposte, furibonde ; se jette sur son
adversaire avec un hurlement dément et là, invariablement, c’est la synesthésie. Sous mon
crâne, la voix d’Eminem retentit. C’est que la rage de vaincre, il connait. Il la rappe : « I get
excited at the sight of my own blood, you’re are in a fight with a nut cause Imma fight till I die
or win. Biting the dust, it’ll just make me angrier ». C’est une promesse de mise à mort.
C’est extrait de Survival of the fittest (littéralement la loi du plus fort).
On pourrait faire de cette chanson l’hymne de Mad Max. Il est certain que seuls les forcenés
survivront dans ce désert. On y risque sa vie, on y souffre perpétuellement.
38ième minute.
_ Ça fait quoi ?s’enquiert Furiosa, désignant d’un geste de la tête la jambe blessée de Splendid.
_ C’est douloureux, répond la jeune femme.
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_ Comme tout le reste ici.
Car c’est un monde sans merci. Où il faut se battre pour survivre.
Un monde violent où, en vérité, il faut lutter pour seulement être considéré comme un être
humain.
Les biens d’Immortan Joe, ses esclaves sexuelles, ses précieux « trésors » de luxure gardés
dans un coffre-fort, à l’abri des convoitises, les « épouses » n’étaient que cela à la Citadelle.
Désormais en fuite et en révolte, elles verbalisent cette dernière.
« Nous ne sommes pas des choses !» : elles l’écrivent en capital sur le sol.
« Nous ne sommes pas des choses ! » : elles le crient avec hargne.
« Nous ne sommes pas ce à quoi nous réduisent nos noms », leur faudrait-il également hurler.
Car portrait grossier de chacun, les prénoms des personnages sont déjà une négation de leur
humanité. Celui de Splendid, fait de sa beauté, la prétendue quintessence de son être. L’autre
prénom qu’elle porte –Angharad -signifie « la plus aimée » en gallois et c’est bien ce qu’elle est
pour Immortan Joe : sa favorite, la préférée.
Rictus.
Capable.
Organic, le médecin.
Dag (« sacré numéro » en anglais)
Equipage (l’un des membres du convoi)
Les dénominatifs se voudraient l’abrégé de l’individu.
Le résumant soit à la fonction qu’il/elle occupe dans le microcosme qu’est la Citadelle, soit à
quelque trait de caractère ou de personnalité saillant.
Appellation péril : Furiosa est en la preuve. Son prénom ne saurait, pour l’ennemi, être symbole
de ténacité, de farouche obstination à vivre. Il suggère sa férocité, fait d’elle une carnassière, un
danger. Dès lors, elle n’est plus qu’une bête enragée à abattre comme telle.
Et que dire de Max ?
Etant donneur universel, le personnage principal est rebaptisé « Globulard » par les War-Boys
et leur sert tout bonnement de poche de sang. Le sien, sain, est transfusé aux soldats malades.
A Nux notamment qui se réjouit d’avoir « des globules de sauvage indice 98 plein les veines ».
Max n’est qu’un animal. Un fauve à qui on mettra une muselière autant pour le contraindre au
silence que pour l’empêcher de mordre. Marqué au fer rouge, tenu en laisse au bout d’une
chaine, Max se conduit comme le chien auquel on l’associe. Il grogne souvent, aboie des ordres.
« Tenaille ! » « Eau ! ».
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Et puis… à mesure que l’histoire avance, la sauvagerie recule. « Je m’appelle Max » seront ses
derniers mots. Lui qui à la quarante-huitième minute avait rétorqué« quelle importance ?»,
quand on lui avait demandé « c’est quoi ton nom ?», se réapproprie sur le tard son identité.
Il revendique, affirme son statut d’homme. Que rien, pas même son intrinsèque comportement
de loup solitaire, ne saurait contredire.
Max, sans être misanthrope, aime à rester à l’écart d’autrui. Il y a cette scène au début du film où
il court dans un dédale de couloirs, poursuivi de toutes parts. Il a derrière lui une horde de WarBoy voulant faire de lui un esclave et devant lui, les fantômes de son passé qui lui reprochent de
les avoir laissé mourir. « Je suis celui qui fuis autant les morts que les vivants », jamais les mots
de Max n’ont été aussi vrais. De mots, cette cavalcade en rappelle d’autres. Ceux d’Emily
Dickinson : « pour être hanté nul besoin de chambre, nul besoin de maison, le cerveau regorge
de corridors, plus tortueux les uns que les autres ». Avec ces lignes d’Une âme en incandescence
en tête, difficile de considérer ces galeries trop étroites pour que Max évite les spectres qui
surgissent, voulant lui barrer le chemin, autrement que comme la manifestation physique de sa
psyché torturée. Hors des murs de la Citadelle, sur la route, l’esprit au supplice s’apaise. Un peu.
Cesse le blâme des fantômes. A présent, ils encouragent Max à protéger celles qu’il vient de
rencontrer. Nouvelle citation de rigueur. Du Hitchcock, cette fois. « Pour rouler au hasard, il faut
être seul. Dès qu’on est deux, on va toujours quelque part ». Il est vrai qu’avec Furiosa et les
« épouses », Max chemine vers le rachat de son âme.
Il n’erre plus à bord de l’Interceptor, en huis-clos avec ce qu’il y a de pire en lui.
Il va vers un soi meilleur pourrait-on dire et l’on aurait ainsi trouvé la solution à l’interrogation
qui clôture Mad Max ; blanc sur noir :
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Impression de boucle bouclée.
« La terre est acide ».
« La moelle de nos os est empoisonnée ».
« On tue pour de l’essence ».
« C’est la guerre de l’eau ».
Mad Max s’ouvre sur d’inquiétants aveux, des survivants racontant comment –suite à ce qui
semble être une catastrophe nucléaire – le monde a sombré dans l’amok, le manque de
ressources poussant la population dans ses pires retranchements.
« Où devons-nous aller…
Nous qui errons dans cette désolation à la recherche du meilleur de nous-mêmes ? ».
Cette phrase conclusive inventée par Miller et prêtée au premier homme de l’histoire suggère
qu’au commencement, il n’y avait rien. Et après l’apocalypse, époque à laquelle se déroule Mad
Max, il ne reste rien. La civilisation est revenue au point de départ. En régression, l’homme
comme ses ancêtres déambule, sans destination, puisque tout demeure à reconstruire.
« Au cœur de cette désolation », c’est précisément là qu’il faut aller : vers l’ordre nouveau.
Ordre à bâtir. Le mouvement est nécessaire. Et quoi de mieux pour symboliser le fait d’aller de
l’avant, qu’une voiture ? Leur profusion est somme toute logique. Dans Mad Max, plus que nulle
part ailleurs, l’immobilité renvoie à la mort. Alors que la vitesse soit une véritable religion à la
Citadelle, on ne s’en étonne guère. A peine sourcillera-t-on en voyant les War-Boys se recueillir
devant des autels de volants.
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Prosternations. Actes de foi.
« Dans toutes mes actions, je l’honorerai, V8 ».
Les soldats récitent ce credo, les doigts croisés, quatre de chaque main pour former un V, sacré,
en hommage au moteur à explosion. Nux s’en est tatoué un sur le torse. Sa peau crayeuse porte
les reliefs d’un bloc-cylindres.
Crâne rasé, le corps rongé de tumeurs, les War-Boys ont déjà un pied dans la tombe.
L’autre demeure, lui, rivé au plancher. Ces hommes vivent littéralement en toute hâte le peu de
temps qu’ils leur restent et rêvent de « mort historique », glorieuse, pour atteindre
« les autoroutes du Valhalla ». Là-bas, leur assure Immortan Joe, élevé au rang de dieu, ils
rouleront à jamais des véhicules chromés. Adieu vergers du jardin d’Eden, le Paradis postapocalyptique est une route sans fin que l’on sillonne dans une voiture rutilante.
La nature est tombée en désuétude dans la dystopie de Miller.
_ Il y a une butte juste après ce truc là, bafouille Nux.
_ Il veut dire l’arbre, clarifie Capable.
_ Oui…l’arbre, fait Nux et sa voix est encore hésitante.
Les noms des végétaux sont oubliés. Ils importent peu. Cet arbre que Nux ignorait comment
désigner sera le seul que l’on verra dans Fury Road et utilisé pour tracter le porte-guerre enlisé
dans la boue, il finira déraciné.
C’est une image forte. La machine renverse la nature, la supplante. Cela se perçoit jusque dans le
langage. La formule consacrée « avoir la main verte » est détournée, Max demandant à Nux s’il a
« les pouces noirs », couleur de la suie. Dans un siècle où rien ne pousse, savoir jardiner est
superflu. Il s’agit d’être doué en mécanique, d’être capable de s’occuper d’un véhicule, de
l’entretenir, le réparer et comprendre ses besoins. Car la voiture est organisme vivant. « Les
moteurs ont soif ». La voiture est un bijou du désert. Admirée, elle est à même de déchainer les
passions, muse comme l’était la nature auparavant. Il n’y a guère plus de reverdie désormais,
plus d’ode à la gloire du printemps : la poésie de la nature est une poésie assassine, Angharad
surnommant les balles des fusils les « anti-graines ». « T’en plante une, y’a quelque chose qui
meurt ».
Une contre-utopie, Fury Road ? Sans conteste.
Toutefois… « Nos bébés ne seront pas des War-Boys ». Les épouses le martèlent : elles ne
donneront pas la vie à d’autres destructeurs.
Miller ne signe pas ici une œuvre pessimiste : la hargne et la cupidité des hommes ont peut-être
« tué le monde » mais la raison des femmes saura le faire renaitre.
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Coda
C’est en ces mots que se consolait Giscard d’Estaing : « En France, on n’a pas de pétrole mais on a
des idées ». En y repensant, en novembre, je me suis dit : «t’as pas d’idées alors il ne te reste plus
qu’à sortir ta pioche et trouver un gisement ».
Au fond, tous ceux qui grattent le papier cherchent ainsi leur or noir.
C’est la musique qui aura fait couler l’encre à flot ici.
Paradoxal quand même que pour écrire le silence, il faille du bruit. A moins que ce ne soit
logique : il fallait ce bruit pour donner leur cadence aux mots, mots traquant le silence et la
violence de ces non-dits. Il aura fallu s’essouffler pour trouver le bon rythme, faire haleter
chaque phrase. Ça semblait simple mais dans les faits, il aura fallu batailler.
Priver d’air un texte, c’est contre nature…
Pourtant…pourtant, le texte n’a jamais aussi bien respiré.
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Refrain doux pour couplets agressifs : Stan.
De la rage, une folie presque animale : Survival of the fittest.
Sérieusement, ça donne envie de gronder, de montrer les crocs.
Autant que When I’m gone fait se serrer la gorge.
C’est ainsi avec les chansons d’Eminem, avec ces textes courts, tout en vice et vérité, on est dans
l’émotion brute. On reprend sa respiration aux césures impromptues, pauses brèves au cœur du
survoltage de sa prose.
« Il faudrait écrire comme celui-là rappe », se surprend-t-on à penser.
Mai 2015, Miller l’a fait.
Le dernier Mad Max a la même intensité que la musicalité d’Eminem.
Ça prend au corps.
On a le souffle haché, les yeux qui s’écarquillent.
Pensée soudaine : « il faudrait écrire comme il filme ».
En attendant de rafler feuille et stylo, on admire les chefs-d’œuvre.
Car devant l’Art, quel qu’il soit, nous sommes Petits Princes, demandant non « dessine moi un
mouton » mais « bouleverse-moi ! ».

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