En Caroline du Nord, les Libanais relatent leur histoire

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En Caroline du Nord, les Libanais relatent leur histoire
Les Libanais dans le monde
lundi 6 août 2012
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En Caroline du Nord, les Libanais relatent
leur histoire grâce au programme Khayrallah
Recherche Plus de 15 000 Libano-Américains vivent actuellement en Caroline du Nord. L’un d’eux,
Moïse Khayrallah, a créé un programme de recherche centré sur l’étude de l’histoire de la communauté
installée dans cet État du Sud-Est des États-Unis.
ILLINOIS, propos recueillis
par Pauline M. KARROUM
Akram Khater est directeur du
programme Khayrallah dédié
aux études libano-américaines.
Il est également professeur
agrégé d’histoire à l’Université
de Caroline du Nord et directeur du Programme d’études
sur le Moyen-Orient. Le programme Khayrallah, premier
de ce genre aux États-Unis, a
été créé en 2010. Ci-dessous
un entretien qu’il a accordé à
L’Orient-Le Jour.
OLJ – Dans quelles circonstances le programme at-il été établi ?
Akram Khater – Il a été
fondé grâce au soutien financier de Moïse Khayrallah. Arrivé du Liban dans les années
90 pour poursuivre un docto-
Akram Khater, directeur du projet Khayrallah.
rat en psychologie, il a travaillé
par la suite au sein de plusieurs
entreprises et a vraiment réussi
dans les affaires. Nous nous
connaissons depuis des années
et nous étions très inquiets
par ce qui s’est passé après le
11 septembre 2001. En effet,
après cette date, l’image des
Libanais s’est beaucoup dégradée aux États-Unis. Nous
n’étions connus que pour notre taboulé ou parce que nous
étions considérés comme des
terroristes ! Il y avait donc une
véritable méconnaissance de
« qui nous sommes ». Moïse
Khayrallah m’a demandé en
2009 d’établir un projet pilote
dédié à la recherche, la préservation et la publication de données portant sur l’histoire des
Libanais vivant en Caroline du
Nord. Un tel programme nous
permet de démontrer que nous
avons activement participé à la
construction de l’histoire de la
Caroline du Nord au fil des ans
dans tous les domaines, économique, politique et social.
Le programme nous donne la
possibilité également de préserver notre histoire, afin que
les données dont nous disposons ne se perdent pas. Ce premier projet pilote sera suivi par
d’autres du même type dans
d’autres États américains. Il
s’agira donc d’un programme
national. Une fois ce travail finalisé, nous allons créer le centre Khayrallah dédié à l’étude
de la diaspora libanaise.
Comment votre travail de
recherche est-il effectué sur
le terrain ?
Nous avons commencé à
mener une série d’entretiens
avec plus de 100 membres de
notre communauté et à enregistrer ces interviews. Nous
n’avons pas établi de critères
de sélection dans le choix des
personnes à interroger. Notre
but n’est pas de faire parler
les plus aisés ou ceux qui ont
le plus réussi, mais de raconter l’histoire de tout le monde.
Nous avons également re-
Publication De l’océan Indien, vient de paraître un nouvel ouvrage
de Michel Saad, libanais résidant à l’ile de La Réunion, intitulé :
« Le Secret du poisson opalin. Conte de l’océan Indien ».
OLJ – Michel Saad, votre
ouvrage « Le Secret du poisson opalin » vient de paraître
aux éditions Édilivre. Que
pouvez-vous nous en dire ?
Michel Saad – Je ne sais
comment définir ce livre. Il
n’est pas tout à fait un conte,
puisque le merveilleux se réduit à une question posée
par un poisson : « Quelle est
la huitième couleur de l’arcen-ciel ? » À mon avis, il
faut plus que cela pour faire
un conte... En fait, tout au
long de l’histoire, le poisson
de Maï ne parle qu’à Maï,
rien qu’à Maï... A-t-il jamais
parlé ? Comment savoir ?
À quels lecteurs destinezvous votre livre ?
Aux jeunes et aux moins
jeunes de tous les pays. Dans
un monde où l’on entend parler de guerre, de crise, de violence et d’argent, feuilleter un
conte-couleur-fraîcheur apporte un certain apaisement.
Avez-vous un message
à faire passer à travers ce
conte ?
Quand j’écris, je le fais
pour moi : je m’isole pour
écrire ce qui me plaît ou me
déplaît, me chante ou me déchante, avec mes soucis, mes
joies, mes souvenirs. Si les
lecteurs trouvent dans mes
écrits un message qui leur
apporte un peu de bonheur,
je m’en réjouirais.
Vous avez écrit des romans
traitant de poésie, de théâtre,
de science-fiction et... de mathématiques ! Que manque-til encore à votre collection ?
Beaucoup (rires) ! Politique,
policier, philosophie, astronomie, théologie et métaphysique... Mon épouse insiste pour
que j’écrive mes Mémoires afin
que la jeune génération libanaise repense la misère qu’ont
vécue nos parents dans les
champs, les labours, les moissons, le froid, la chaleur... j’attends des encouragements !
Avez-vous une préférence
pour l’un de vos livres ?
On a demandé à une Libanaise lequel de ses nombreux
enfants elle aimait le plus, elle
a répondu : « Le petit jusqu’à
ce qu’il grandisse, le malade
jusqu’à ce qu’il guérisse, l’absent
jusqu’à ce qu’il revienne... ». Je
dirais autant de mes livres : le
manuscrit jusqu’à ce qu’il paraisse, l’oublié jusqu’à ce qu’on
le reconnaisse, le publié jusqu’à
ce qu’il soit best-seller (rires) !
On en vient justement à la
question : qu’y a-t-il de libanais dans ce conte de l’océan
Indien ?
D’abord le conteur, puis l’héroïne Maï qui porte un prénom
libanais, ensuite cette histoire
racontée par mes parents : un
garçon qui passe sous un arcen-ciel deviendrait fille, et une
fille deviendrait garçon... Finalement, les personnages que
Maï a consultés : sa maman, la
maîtresse, le photographe, le
curé, le sorcier... n’ont pas de
nationalité.
Comment définissez-vous
votre style ?
Tout style est une fusion
de culture. Mon professeur de
français (un vrai Libanais de la
famille Shlink, ah ! s’il m’entendait !), nous parlait « d’innutrition », provenance plurielle de
nos pensées, de nos lectures, de
nos écrits, enfin de notre personnalité. Il m’arrive parfois de
traduire quelques expressions
de ma langue maternelle, le
libanais. Cependant, loin de
nuire à la beauté du texte de ma
langue d’adoption, mes traductions le comblent d’un parfum
exotique.
Cette page (parution les premier et troisième lundis de chaque
mois) est réalisée en collaboration avec l’Association RJLiban.
E-mail : [email protected] – www.rjliban.com
core, toutes les informations
seront accessibles grâce à un
site web qui sera disponible
en août prochain. Enfin, nous
allons concevoir et organiser
une exposition à la Bibliothèque D.H Hill de l’Université
de Caroline du Nord l’année
prochaine.
En mars dernier, vous avez
organisé la projection d’un
documentaire retraçant l’histoire des Libano-Américains
en Caroline du Nord. Comment le public a-t-il réagi ?
Deux projections ont déjà
été organisées. À chaque fois,
le succès était au rendez-vous.
Plus de 700 Libano-Américains appartenant à plusieurs
générations ont répondu présent. Leur émotion était vive
car ils ont senti qu’ils étaient
unis grâce à leur histoire commune. Ce documentaire est
actuellement mis à la disposition des écoles, des organisations civiques et des membres
de notre communauté.
Une bannière avec le logo du projet.
« Le Secret du poisson opalin » :
Michel Saad raconte l’océan Indien
Une jeune Réunionnaise,
Maï, sauve des filets de son
père un vieux poisson, qui lui
pose une question étrange.
Elle mènera alors inlassablement son enquête afin de
trouver la réponse. Telle est
l’histoire du nouveau roman
de Michel Saad, finaliste
au prix Chronos, et Jacques
Lacouture, mention spéciale
du ministère français de la
Jeunesse et des Sports. Cet
ouvrage mêle avec virtuosité théâtre et poésie dans ses
opéras et publie plusieurs romans humanistes à l’intention
de la jeunesse de La Réunion,
de Madagascar et du ProcheOrient (voir également nos
éditions du 6 février 2012, 18
juillet 2011, 7 juin 2010 et 18
février 2008).
cueilli des photographies, des
lettres, des revues et d’autres
souvenirs appartenant à des
familles libano-américaines.
Nous avons recherché des
données officielles et des résultats de recensements. Tout
ce travail a été accompli dans
divers objectifs. D’abord, nous
comptons publier un livre qui
sera dédié aux enseignants. Ce
livre sera un outil éducatif qui
leur permettra d’intégrer l’histoire de notre communauté à
celle de l’État de la Caroline
du Nord. Pour cela, nous allons organiser des ateliers
pour former ces enseignants et
répondre à toutes leurs questions. Nous comptons par
ailleurs développer une bibliothèque numérique qui devra
contenir tous les témoignages
recueillis (audio et vidéo), les
photos, les lettres et les autres
objets. Grâce à ces données,
nous formerons la mémoire
électronique de la communauté qui sera renouvelée en
continu. Plus important en-
L’écrivain Michel Saad dans son île de La Réunion.
Avez-vous des projets littéraires en préparation ?
Je garde espoir que Le Secret du poisson opalin ne soit
pas mon chant du cygne et
que mes écrits suscitent une
vague d’inspiration auprès des
lecteurs et des musiciens. Il ne
faut pas croire au silence d’un
auteur, le plus souvent, il cache un rendez-vous secret avec
l’inspiration.
Propos recueillis
par Roberto KHATLAB
Pour en savoir plus :
www.edilivre.com –
http ://michelsaad.com
Une affiche datant de 1937, annonçant le « mahrajan », un
grand rassemblement des Libanais de Caroline du Nord.
Les rassemblements sociaux,
une habitude qui se maintient
Dès son installation en
Caroline du Nord à partir
de 1890, la communauté
libanaise a organisé des
rassemblements sociaux
sous forme de pique-niques
familiaux ou de réunions
rassemblant des milliers de
participants. Le plus grand
de ces rassemblements était
appelé « mahrajan » ou « festival » (voir l’affiche datant de
1937).
Ces fêtes s’étalaient sur une
journée. C’était une occasion
pour les familles dispersées
sur le territoire américain de
se rassembler et de préserver
leur patrimoine. Cette tradition se poursuit aujourd’hui
sous le nom de « haflé »
(« fête » en arabe). De plus,
un festival libanais se tient
chaque année durant le mois
d’avril à Raleigh, capitale de
la Caroline du Nord.
Les visiteurs émigrés du Liban
sur les lieux de pèlerinage chrétiens
Tourisme Beaucoup d’émigrés libanais et de touristes étrangers
marchent sur les pas du Christ au Liban. À Cana notamment.
Le Liban est certes une destination privilégiée pour les descendants de ses émigrés dans
le monde, qui s’y ressourcent
en prélevant de la terre et des
fruits de leur village d’origine,
enrichis des photos de leur
maison familiale et des sites
environnants.
Un autre aspect concerne
aussi les amis du Liban venant, dans une région en effervescence, découvrir le pays
du Cèdre et la richesse de sa
culture aux visages multiples.
En effet, dans le bus transportant nos touristes de toutes
nationalités, Français, Biélorusses, Allemands, Mexicains, Argentins, Italiens,
Hollandais et Espagnols, un
point commun attire l’attention, à savoir la curiosité
manifestée lors de la visite du
sud du Liban où a séjourné
Jésus-Christ : Sarafand, Sidon, Tyr, Cana, Marjeyoun
et le mont Hermon (lieu de
la Transfiguration).
C’est l’occasion de faire découvrir l’un des volets les plus
passionnants de l’histoire du
Liban, que tous les Libanais
gagneraient à connaître. En
effet, Jésus a révélé sa nature
divine à la demande de sa
mère, en transformant l’eau
en vin lors d’un mariage à
Cana. Il existe une théorie
selon laquelle cette localité,
sacrée depuis l’époque phénicienne, se trouve au Liban, à
12 kilomètres à l’est de la ville
Rocher sculpté à Cana datant du 1er siècle ap. J-C représentant
la cène du Christ.
de Tyr, dans un village appelé justement Cana. Ce n’est
donc pas un hasard si le patriarche maronite Béchara Raï
a tenu à y effectuer une visite
symbolique il y a un an.
Une rapide analyse permet
d’obtenir les recoupements
suivants, qui sont loin d’être
exhaustifs :
– La tradition orale est
conservée par les habitants,
chrétiens comme musulmans,
qui donnent à leur ville le nom
de « Cana en Galilée ».
– Sur le chemin de la grotte, dans la magnifique vallée
de Cana, sont scupltées dans
les rochers des statues à l’effigie de Jésus et de ses disci-
ples, datant du 1er siècle ap.
J-C, preuve de la présence des
premiers chrétiens dans cette
région.
– Le village voisin, précédant Cana à partir de la
côte méditerranéenne, est
Hanaway, ou le chemin de
« Hanneh » (Anne en arabe),
la mère de la Sainte Vierge.
– C’est à Hanaway que se
trouve le tombeau du roi Hiram de Tyr, trônant au bord
de la route principale et représenté dans les gravures des
orientalistes. Il démontre une
étroite relation entre la religion phénicienne pacifique et
le christianisme.
– À deux kilomètres à vol
composé de l’archimandrite
Jamil Nassib Abib, du
président du Club Monte
Libano de Campinas – São
Paulo, Abrão Jose Andery,
d’hommes d’affaires et
d’étudiants, a visité l’USEK
le 30 juin. Au cours de cette
visite, organisée par le père
Silouanos, directeur du
Cecal, Roberto Khatlab, leur
a fait une présentation sur
les activités du centre, qui a
pour objectif de resserrer les
relations entre l’Université
et les Libanais d’Amérique
latine. Durant ce voyage,
six diacres ont été ordonnés
prêtres par Mgr Edgar Madi,
archevêque maronite au
Brésil.
mondiale s’est tenu le jeudi
2 août à l’hôtel Le Royal
à Dbayé, en présence de
nombreuses personnalités
dont le président mondial
de l’ULCM, Michel
Doueihi, et son secrétaire
général, Toni Kaddissi. Un
hommage a été rendu à tous
les organismes œuvrant
pour le rapprochement entre
le monde de l’émigration
libanaise et le Liban, et
plus particulièrement
la Fondation maronite
mondiale créée à l’initiative
de l’ancien ministre Michel
Eddé et représentée par
l’industriel Neemat Frem.
Participaient à ce dîner un
groupe de jeunes venus de
tous les continents ainsi que
les candidates à l’élection de
Miss Liban émigrés,
prévue le 11 août à Dhour
Choueir.
d’oiseau, dans le village de
Qleilé, se trouve le mausolée
du prophète Omran (Joachim
en arabe), le père de la Sainte
Vierge, à l’intérieur duquel
sont présentés, près d’une
photo du Christ, des versets
du Coran louant le prophète
Omran, en tant que père de
la Vierge Marie et grand-père
du prophète Issa (Jésus en
arabe).
– En 1996, lors du bombardement du Liban-Sud, une
bombe israélienne tombant à
10 mètres de ce mausolée musulman a permis de découvrir
les vestiges chrétiens d’une
église byzantine !
Symboles et coïncidences
s’ajoutent aux études scientifiques, comme celle menée
récemment par le professeur
italien Martiniano Pellegrino
Roncaglia, et publiée sous
le titre Sur les pas de Jésus, le
Messie, en Phénicie / Liban (en
anglais et en arabe) par l’Institut arabe des études orientales
et occidentales à Beyrouth.
Ce livre de référence est doté
d’une foule de notes historiques et biographiques, apportant de nouvelles preuves
quant au rôle sacré du pays
des cèdres millénaires.
Une excursion est d’ailleurs
organisée à Cana et à Tyr, le
jeudi 9 août, par l’association
RJLiban. Pour tout renseignement, appeler le 03/345528.
Naji FARAH
Brèves du monde
Nouveaux membres de
l’Annuaire RJLiban des
amis du Liban
Le cercle des descendants
de Libanais et des amis
du Liban dans le monde
s’agrandit, grâce aux
efforts multiples visant à
promouvoir le Liban. Tel
est le cas de l’Annuaire
RJLiban – www.rjliban.
com – qui enregistre plus
de 150 inscriptions, avec un
système de communication
directe entre les membres.
Cet annuaire est consultable
en français, anglais, espagnol
et bientôt portugais. Il est
ouvert à toute association à
but socioculturel.
Parmi les nouveaux membres
amis du Liban, figurent :
Michel Leclercq, auteurjournaliste à Bruxelles
(Belgique) ; Konstantin
Kalchev, entrepreneur
bulgare résidant à Kolodishti
(Biélorussie) ; Fausto
Gonzales-Taveras, financier
dominicain résidant à New
York (États-Unis) ; Pierre
Devoluy, journaliste et
enseignant à Cap-d’Ail
(France) ; Alain Pellegrini,
ancien commandant en chef
de la Finul à Carqueiranne
(France).
Cecal-USEK reçoit deux
groupes d’Argentine et
du Brésil
Le Centre des études et
cultures de l’Amérique latine
(Cecal) de l’Université SaintEsprit de Kaslik (USEK)
a reçu, le 26 juin dernier,
la visite de sept jeunes
Argentins, étudiants et cadres
d’origine libanaise, venus
au Liban pour découvrir
les villages de leurs grandsparents et rencontrer leurs
familles. Ils sont membres
de la Jucal (Juventud
Unión Cultural ArgentinoLibanesa – www.jucal.org.
ar) et certains font partie de
« Firqat al-Arz » (http ://
firqatalarz.com), troupe de
danse traditionnelle libanaise
fondée depuis plus de dix ans
à Rosario. Le coordinateur
du groupe, Munir Nellmeldin
(Najmeddine) et les autres
jeunes, qui ont participé
à la rencontre des jeunes
émigrés libanais le 13 juillet,
étaient accompagnés du
secrétaire général de l’Union
libanaise culturelle mondiale
(ULCM), Toni Kaddisi, et
du président de l’association
RJLiban, Naji Farah.
À l’occasion de l’ordination
sacerdotale du diacre
Silouanos Chamoun, résidant
au Brésil, un groupe de 20
Brésiliens d’origine libanaise,
Au dîner de gala de
l’ULCM
Le dîner de gala annuel de
l’Union libanaise culturelle
Lors du dîner de gala annuel
de l’ULCM : Cynthia Anis
Tabet, représentant la France,
aux côtés de la représentante
de l’île de Chypre, candidates
à l’élection de Miss Liban
émigrés le 11 août à Dhour
Choueir.