Le droit des institutions sociales et médico-sociales
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Le droit des institutions sociales et médico-sociales
Chapitre 5 Le droit des institutions sociales et médico-sociales Un secteur social et médico-social confronté aux vents de la dérégulation et de la libéralisation Le secteur social et médico-social doit faire face en 2005 à plusieurs tentatives de dérégulation et de libéralisation. Ainsi, en cette rentrée sociale, il n’était toujours pas assuré que les établissements et services sociaux et médico-sociaux seraient exclus du champ d’application de la future directive européenne de libéralisation des services. Une ordonnance du 30 juin dernier a par ailleurs supprimé une garantie offerte aux gestionnaires en cas de fermeture d’un établissement ou service pour enfants et adolescents. Désormais, le Préfet de département et le Président du Conseil général n’ont plus à consulter la commission départementale de protection de l’enfance. Une autre ordonnance, qui devrait être publiée au Journal Officiel d’ici la fin de l’année, devrait prévoir la même chose pour les établissements pour adultes. Au nom de la simplification administrative, un système qui visait à limiter, à titre préventif, les risques d’arbitraire est déconstruit. Au nom de la création d’emplois, les règles d’encadrement des services d’aide à domicile seraient par ailleurs mises à mal ainsi que la protection des publics fragiles qui en est le corollaire. Dans ce paysage tourmenté, quelques points positifs doivent cependant être relevés. La DGAS a manifesté sa volonté d’entrer en concertation pour trouver une solution à certaines difficultés objectives de mise en oeuvre du conseil de la vie sociale et des autres formes de participation des personnes accueillies ou suivies. Un décret sur le sujet devrait paraître à la fin du mois de septembre ou au début du mois d’octobre. De même, une ordonnance devrait sécuriser le volet financier de l’amendement Creton et intégrer sans ambiguïté les services de prévention spécialisée et les services mettant en œuvre des mesures d’investigation dans la liste des établissements et services sociaux et médico-sociaux dressée par la loi du 2 janvier 2002. Malheureusement, cette intégration dans la loi-cadre du secteur ne sera que partielle. Ces points positifs ne peuvent néanmoins faire oublier les graves difficultés de financement auxquelles sont confrontés de nombreux établissements et services sociaux et médico-sociaux et les risques de déconstruction en matière de contentieux de la tarification sanitaire et sociale. Voici le panorama détaillé d’une actualité à nouveau très chargée. Le droit des institutions sociales et médico-sociales 51 1. Les droits des usagers : la mobilisation demeure nécessaire Plus de trois ans après l’adoption de la loi du 2 janvier 2002, comment les associations de solidarité se sont-elles appropriées son volet consacré aux droits des usagers ? Quelles sont les évolutions des textes législatifs et réglementaires à prendre en compte dans les mois à venir ? 1.1 État des lieux de l’application des droits des personnes par les associations de solidarité : des progrès qui demandent à être consolidés La meilleure affirmation des droits des personnes accueillies ou accompagnées par les établissements et services sociaux et médico-sociaux a constitué l’un des axes forts de la réforme de la loi du 30 juin 1975 sur les institutions sociales et médico-sociales. Trois ans après l’adoption de la loi 2002-2, où en sont les associations de solidarité dans la mise en œuvre de ce texte ? C’est pour tenter de répondre à cette interrogation que le réseau Uniopss-Uriopss a mené, avec l’appui de l’Uriopss Pacac, une enquête auprès de ses adhérents. Celle-ci, conduite auprès de 12 Uriopss entre novembre et décembre 2004, a permis de mesurer l’état d’avancement des outils, la démarche retenue pour leur élaboration, les principales difficultés rencontrées et les besoins exprimés. Même s’il est nécessaire de faire preuve de précaution quant aux résultats, du fait notamment du nombre limité de régions participantes et de questionnaires exploitables, il est cependant possible de noter l’influence de la loi dans l’élaboration et la mise en œuvre de certains outils à destination des personnes accueillies. Sur les 299 réponses exploitables, il ressort que pour l’ensemble des secteurs (« handicap », « personnes âgées », « enfance », « lutte contre les exclusions », « aide à domicile »), 54 % avaient mis en œuvre les outils ou étaient en train de les élaborer. L’influence de la loi 2002-2 est significative puisque le livret d’accueil, le règlement de fonctionnement et le contrat de séjour ou document individuel de prise en charge ont été élaborés majoritairement après l’adoption de cette loi contrairement au projet d’établissement ou de service qui connaît une antériorité plus importante dans son élaboration et ce, tous secteurs confondus. Il existe cependant quelques particularités propres à certains outils ou secteurs. Pour le livret d’accueil, ce sont dans les secteurs « aide à domicile » et « personnes âgées » que l’on retrouve les taux les plus importants d’élaboration avant 2002. C’est dans le secteur « lutte contre les exclusions » que l’on semble trouver le plus de règlements de fonctionnement élaborés et mis en œuvre. Les outils manquants sont majoritairement le contrat de séjour, le document individuel de prise en charge, le conseil de la vie sociale et les autres formes de participation. 60 % des associations qui ont répondu ont déclaré avoir diffusé la charte des droits et libertés de la personne accueillie, mais il est difficile de vérifier si, au-delà de cette remise, son contenu a été explicité à chacune des personnes concernées. Quant aux personnes qualifiées, pour la majorité des répondants, aucune information précise n’était délivrée aux usagers, notamment parce que peu d’entre-elles ont été désignées par les Préfets et les Présidents de Conseils généraux. Les structures en cours d’élaboration ou ayant élaboré les outils semblent, de manière générale, avoir opté pour une démarche participative importante (soit de l’ensemble des salariés, soit d’une partie du personnel). Seuls 6,5 % des interrogés ont répondu n’avoir pas associé le personnel. Pour la majorité, le travail d’écriture a été fait collectivement, en équipe pluridisciplinaire, intégrant notamment (mais pas pour la majorité) des administrateurs voir des usagers. Les principales difficultés évoquées sont le manque de temps, la complexité de la démarche d’élaboration, la coordination des actions et le passage de la théorie à la pratique dans l’application concrète de la loi. De plus, il semble que pour beaucoup, la motivation principale pour rentrer dans la démarche d’élaboration soit liée à une obligation légale. 52 Uniopss/Uriopss Rentrée sociale 2005-2006 Cependant, l’obligation légale est appréhendée de deux façons différentes. Pour un peu plus de la moitié, l’élaboration est liée à la crainte d’éventuels contrôles et en prévision de budgets ou conventions à négocier. Pour l’autre moitié, l’obligation légale n’a pas été vécue comme une contrainte mais au contraire comme un moyen supplémentaire permettant de revisiter les pratiques institutionnelles. Les autres motivations qui reviennent régulièrement sont : la possibilité de réinterroger les pratiques, placer l’usager au centre des interventions, mettre en place une démarche participative, donner un sens collectif à l’action, améliorer le service rendu et respecter les droits des personnes accueillies. Enfin, de manière générale, lorsqu’au moins un des outils est mis en œuvre, les usagers apprécient et s’y intéressent. Cet intérêt est fortement lié à la manière dont les professionnels ont appréhendé ces outils. En conclusion, cette enquête montre qu’une partie non négligeable des associations qui ont répondu se sont impliquées dans la mise en œuvre de ce volet fondamental de la loi 2002-2. Toutefois, toutes les associations ne l’ont pas fait et il convient maintenant pour ces dernières de se hâter dans la mesure où elles sont en infraction avec la loi. En effet, les délais légaux de mise en œuvre des différents outils sont désormais tous expirés et des contrôles pourraient être opérés par les autorités administratives dans un avenir proche141. 1.2 Les évolutions législatives et réglementaires à prendre en compte : des évolutions contrastées La fin de l’année 2004 et le début de l’année 2005 ont vu la parution de plusieurs textes portant sur les droits des usagers. L’ordonnance de simplification du droit, qui devrait être publiée au Journal Officiel d’ici la fin de l’année, devrait également avoir un impact sur les établissements et services concernés. Enfin, un décret est encore attendu sur le conseil de la vie sociale et les autres formes de participation afin d’ajuster celui du 25 mars 2004. a) Le contrat de séjour et le document individuel de prise en charge Afin d’individualiser la réponse apportée aux personnes accueillies ou suivies, la loi du 2 janvier 2002 impose aux gestionnaires d’établissements et de services sociaux et médico-sociaux et de lieux de vie et d’accueil d’élaborer soit un contrat de séjour, soit un document individuel de prise en charge (CASF, article L. 311-4). Près de trois ans après la parution de la loi, le décret du 26 novembre 2004142 est venu préciser les catégories d’établissements et services devant appliquer l’un ou l’autre de ces instruments. Il a également défini leur contenu et les modalités de leur élaboration. L’attention des associations de solidarité est notamment attirée sur les points suivants : La réglementation prévoit plusieurs temps d’élaboration : un contrat ou document initial lors de l’admission de la personne, un avenant individualisant les prestations dans les 6 mois et une réactualisation des objectifs et des prestations tous les ans. L’articulation avec le projet individualisé. Les professionnels s’interrogent aujourd’hui sur l’articulation entre l’avenant (ou le document) d’individualisation et ce qui est le plus souvent appelé « projet individuel » ou « projet personnalisé » : est-ce le même document ou doit-on au contraire les séparer ? Rien n’est précisé ni dans la loi ni dans le décret d’application. La réponse sera à trouver dans la pratique des institutions. Il nous semble cependant important de souligner que tout ce qui figurera dans l’avenant aura une valeur contractuelle, au même titre que le contrat initial, et ne pourra être modifié que selon les règles posées pour le contrat. Or il semble que le projet personnalisé soit souvent pour les personnes accueillies ou suivies, comme pour les équipes, un outil plus évolutif, plus souple, utile à l’évaluation continue des besoins, des attentes, des évolutions dans l’accompagnement. L’enjeu est donc de trouver un bon équilibre entre ce qui serait contractualisé dans le cadre de l’avenant et ce qui relèverait davantage du suivi individualisé, sans pour autant vider de sa substance le champ contractuel. 141 Pour plus d’information : Uriopss Pacac, Uniopss – Enquête du réseau Uniopss-Uriopss sur la mise en œuvre des droits des usagers dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux associatifs – Associations informations, juin 2005, n°2 hors série – fiche 34975 base de données en ligne Uniopss/Uriopss – http://www.uniopss.asso.fr 142 Décret n°2004-1274 du 26 novembre 2004 – Journal officiel, 29 novembre 2004. Ce texte est codifié à l’article D. 311 du code de l’action sociale et des familles. Le droit des institutions sociales et médico-sociales 53 La participation de la personne et, si nécessaire, de sa famille ou de son représentant légal, est obligatoirement requise pour l’élaboration du contrat ou document, sous peine de nullité de celuici. Cette participation doit être effective. La signature du contrat ou du document individuel par le gestionnaire nécessite au préalable de vérifier qui est habilité à le faire. Ainsi, dans le cas d’une association, il est souvent prévu dans les statuts que le Président la représente dans tous les actes de la vie civile. C’est donc lui qui est habilité à signer le contrat ou le document dans ce cas de figure. S’il délègue ce pouvoir, par exemple au directeur de l’établissement ou du service, cette délégation doit au préalable être formalisée. Du côté de l’usager, il convient de vérifier qui peut également signer le contrat. En particulier, les dispositions générales du code civil liées aux incapacités (mineurs et majeurs protégés) trouvent ici à s’appliquer. Pour les établissements et services d’aide par le travail, la loi pour l’égalité des droits et des chances des personnes handicapées du 11 février dernier a renommé le contrat de séjour en contrat de soutien et d’aide par le travail. Il doit être conforme à un modèle qui sera fixé par décret. En cette rentrée sociale, il était difficile d’anticiper la date de publication de ce texte réglementaire qui n’avait pas encore donné lieu à concertation. En attendant, les gestionnaires doivent tout de même se conformer aux dispositions du décret du 26 novembre 2004 et conclure ce contrat avec les travailleurs handicapés, quitte à l’adapter une fois que l’autre décret sera paru au Journal Officiel. Toutes les personnes accueillies ou suivies par les établissements et services sociaux et médicosociaux et les lieux de vie et d’accueil doivent actuellement bénéficier de ces dispositions143. b) Le projet d’établissement ou de service La loi du 2 janvier 2002 a précisé ce qui devait figurer obligatoirement dans le projet d’établissement ou de service (CASF, article L. 311-8). Ce contenu obligatoire vient d’être étoffé par la loi nº 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie. Les institutions sociales et médicosociales qui dispensent des soins palliatifs devront désormais identifier dans ce projet les services concernés et, le cas échéant, les mesures qui doivent être prises en application des dispositions des conventions tripartites. c) La future ordonnance de simplification du droit et son impact sur les droits des usagers Un projet d'ordonnance de simplification du droit prévoit de faire figurer explicitement les services de prévention spécialisée ainsi que les services mettant en œuvre des mesures d’investigation ordonnées par l’autorité judiciaire (services d’investigation et d’orientation éducative et services d’enquêtes sociales) dans la liste des équipements couverts par la loi du 2 janvier 2002. Ceci fait suite aux interprétations de la Direction Générale de l’Action Sociale et du ministère de la Justice qui considéraient l’ensemble de ces services comme étant « hors champ » de la loi 2002-2, interprétations contestées par le réseau Uniopss-Uriopss. L’intégration de ces services ne serait toutefois pas totale, puisque le même projet d’ordonnance prévoit qu’ils ne seraient pas tenus de mettre en œuvre la plupart des instruments censés garantir la mise en œuvre des droits des usagers : seul le projet d’établissement devrait être obligatoirement élaboré. Le groupe de réflexions et d’échanges qu’anime l’Uniopss144, a marqué son opposition à cette proposition. Il défend l’idée selon laquelle, si des adaptations tenant compte des spécificités de ces services doivent en effet être recherchées, on ne saurait les exonérer de la mise en œuvre effective des droits affirmés dans la loi comme étant le socle commun de tous les équipements sociaux et médico-sociaux. 143 Pour plus d’information : VINSONNEAU Arnaud – Document individuel de prise en charge – Uniopss, 15 décembre 2004 – fiche n°33751 base de données en ligne Uniopss/Uriopss – http://www.uniopss.asso.fr 144 Ce groupe comprend, outre l’Uniopss, l’Admr, l’Apf, la Fehap, la Fnars, l’Unassad, l’Unapei et les Uriopss Ile-de-France, Nord-Pas-de-Calais et Pacac. 54 Uniopss/Uriopss Rentrée sociale 2005-2006 Par ailleurs, ce texte propose des évolutions pour les services d’aide à domicile qui choisiraient de ne pas relever de l’autorisation de création mais d’un simple agrément. Ceux-ci ne seraient plus tenus que de mettre en œuvre le livret d’accueil et un contrat avec les personnes bénéficiaires des prestations, dispositions également contestées par l’Uniopss. Ce texte devrait faire l’objet d’une publication au Journal Officiel d’ici la fin de l’année. d) Le conseil de la vie sociale et les autres formes de participation Parmi les outils devant servir à une meilleure participation des usagers au fonctionnement des établissements et des services figurent le conseil de la vie sociale (CVS) et les autres formes de participation (enquêtes de satisfaction, groupe d’expression). Au lendemain de sa parution tardive en mars 2004145, le décret d’application a fait couler beaucoup d’encre : nombre de responsables en ont dénoncé le caractère rigide et complexe, qui risquait de freiner plus que de favoriser la participation au sein des institutions. Certaines contraintes posées ont souvent été analysées comme étant inadaptées à la réalité des institutions, pour des raisons au demeurant variables et liées à des publics ainsi qu’à des prestations parfois très différents. L’Uniopss a donc défendu auprès de la DGAS des propositions visant à assouplir ce décret et à préciser certaines de ses dispositions, difficiles à interpréter. La DGAS a ouvert ce chantier de l’adaptation du décret de mars 2004 en présentant un projet de décret contenant un certain nombre de propositions. Elle a témoigné à cette occasion d’une grande qualité d’écoute et l’ensemble des demandes de l’Uniopss ont été acceptées. Ceci a permis d’aboutir à un texte réglementaire qui devrait être publié à la fin du mois de septembre ou au début du mois d’octobre, dont voici les principales nouvelles dispositions par rapport au texte initial du 25 mars 2004. - Le champ d’application du CVS et des autres formes de participation (modification de l’actuel article D-311-3 du CASF) Le décret modificatif viendra éclairer un point sujet à des interprétations divergentes : il précisera que le CVS n’est pas obligatoire pour les établissements et services qui accueillent majoritairement des mineurs faisant l’objet de mesures éducatives ordonnées par l’autorité judiciaire, en application des dispositions relatives à l’enfance délinquante (ordonnance de 1945) ou à l’assistance éducative (Code Civil), par rapport aux autres mineurs placés, eux, sur décision administrative. Pour les établissements et services intervenant dans le domaine de l’exclusion sociale ou en direction de personnes confrontées à des difficultés spécifiques146 (CHRS, CSST, CCAA, ACT…) : lorsque les durées de prise en charge sont inférieures à un an – c'est-à-dire la durée minimale du mandat des membres du CVS – ce dernier ne sera plus obligatoire et d’autres formes de participation pourront être prévues. Il en ira de même quand ces établissements et services accueillent majoritairement des personnes pouvant prétendre à être assistées d’un tiers ou d’un organisme d’aide à la traduction. Sont ici visées les personnes de nationalité étrangère ne pratiquant pas la langue française, en particulier dans les CHRS spécialisés dans l’accueil des demandeurs d’asile. - La représentation des familles au sein du CVS (actuel article D 311-5). Les familles seront dorénavant rattachées au collège des représentants « indirects », c'est-à-dire des titulaires de l’autorité parentale et représentants légaux. Si en application de l’ancienne version du décret, un collège « ad hoc » des représentants des familles avait déjà été créé, l’association pourra décider de maintenir cette composition du Conseil jusqu’au renouvellement. Ceci signifie que l’organisme gestionnaire devra, le cas échéant, délibérer afin de régulariser la composition du Conseil. À noter que le décret précisera que tout parent, même allié, jusqu’au 4ème degré, pourra être représentant des familles (article D-311-11 modifié). 145 Décret n°2004-287 du 25 mars 2004 – Journal Officiel, 27 mars 2004. Ce texte est codifié aux articles D. 311-3 à D. 311-22 du code de l’action sociale et des familles. 146 Article L312-1 8° « établissements et services comportant ou non un hébergement assurant l’accueil, notamment dans les situations d’urgence, le soutien ou l’accompagnement social, l’adaptation à la vie active ou l’insertion sociale et professionnelle des personnes ou des familles en difficulté ou en situation de détresse ». Article L312-1 9° « établissements ou services qui assurent l’accueil et l’accompagnement de personnes confrontées à des difficultés spécifiques en vue de favoriser l’adaptation à la vie active et l’aide à l’insertion sociale et professionnelle ou d’assurer des prestations de soins et de suivi médical, dont les centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie et les appartements de coordination thérapeutique ». Le droit des institutions sociales et médico-sociales 55 - Certaines situations peuvent rendre la représentation des usagers ou de leurs « représentants » difficile voire impossible. Le décret modificatif contiendra des dispositions visant à mieux les préciser ou les prendre en compte. Ainsi, là où était évoqué le jeune âge des bénéficiaires qui rendait impossible leur représentation, l’article D-311-7 précisera désormais que c’est « le très jeune âge » qui peut rendre « impossible leur représentation directe », auquel cas seul le collège des représentants indirects est pourvu. C’est l’instance délibérante compétente de l’organisme gestionnaire qui doit l’apprécier, et donc délibérer sur ce point, comme d’ailleurs pour le cas où la représentation des familles ou des représentants légaux n’est pas justifiée en raison de la catégorie des personnes accueillies ou de la nature de la prise en charge. Si le siège de l’un ou de l’autre des collèges ne peut être pourvu, notamment en raison des difficultés de représentation, un constat de carence devra être dressé par le représentant qualifié de l’organisme gestionnaire. - L’élection ou la désignation des bénéficiaires au conseil. Il sera précisé que le mandat des membres du Conseil est renouvelable. Pour les établissements qui interviennent dans le domaine de l’exclusion sociale ou en direction de publics confrontés à des difficultés spécifiques146, le remplacement des membres cessant leur mandat avant le terme (et pour la durée restante) pourra être assuré par une procédure de désignation, avec l’accord de la personne concernée, et selon des modalités qui devront être précisées. D’une façon plus générale, dans ces structures, les personnes accueillies pourront être désignées au Conseil avec leur accord sans avoir à procéder à des élections. Le règlement de fonctionnement devra en préciser les modalités. - La présidence du CVS a été une des dispositions les plus discutées du décret paru en mars 2004. Pour des raisons à la fois proches (les difficultés rencontrées par certains usagers pour tenir ce rôle de président) et éloignées (des difficultés de nature très différentes dans le champ du handicap mental, des personnes âgées, de l’enfance inadaptée et même de l’hébergement social), le fait que la Présidence du conseil doive toujours être assurée par une personne accueillie a été pointé comme a minima en décalage avec certaines réalités de terrain. C’est pourquoi l’article D-311-9 prévoira qu’en cas d’impossibilité ou d’empêchement, la présidence sera assurée par une famille ou un représentant légal. Notons que pour ces mêmes motifs, le secrétaire de séance pourra lui aussi être désigné par et parmi les représentants des familles ou des représentants légaux. Dans ces deux cas, la question de l’appréciation de cette impossibilité ou de cet empêchement reste posée : de quel ordre sont-ils ? Estce l’instance délibérante de l’organisme gestionnaire qui en décidera ? - Le champ de l’enquête de satisfaction sera précisé. Elle devra porter sur les mêmes questions que celles dévolues au CVS uniquement si la réglementation impose le recours à cette forme particulière de participation. Dans le cas où le gestionnaire y a recours sur une base volontaire, il sera libre d’en déterminer les thèmes. - Enfin, si le décret de mars 2004 renvoyait déjà pour bon nombre de ses dispositions à la compétence de l’association ou autre personne morale gestionnaire, le décret modificatif confirmera cette tendance et modifiera même l’article D-311-25 afin d’indiquer que les modalités des autres formes de participation seront précisées par « l’instance compétente de l’organisme gestionnaire », et figureront dans le règlement de fonctionnement. 2. L’autorisation de création, de transformation et d’extension : un cadre menacé Le système de l’autorisation est actuellement menacé en tout ou partie par le projet de directive européenne de libéralisation des services et par un projet d’ordonnance de simplification du droit. Les lieux de vie et les centres de soins spécialisés aux toxicomanes doivent par ailleurs intégrer pour les premiers les incidences du décret du 23 décembre 2004 définissant leurs conditions de fonctionnement, et pour les seconds la prochaine expiration de leurs premières autorisations de création. Enfin, les services de prévention spécialisée et les services mettant en œuvre des mesures d’investigation ordonnées par le juge pourraient à l’avenir relever de ce régime d’autorisation. 56 Uniopss/Uriopss Rentrée sociale 2005-2006 2.1 Les risques de déconstruction du régime de l’autorisation L’autorisation de création, de transformation ou d’extension des établissements et services est un mécanisme de protection des publics fragiles qui vise notamment à s’assurer que les publics pris en charge ou accompagnés le seront dans de bonnes conditions. Même s’il s’agit d’une « contrainte », notamment pour les gestionnaires associatifs, cette « contrainte » a été acceptée au nom de l’intérêt général. Il s’agit ainsi d’éviter que des gestionnaires peu scrupuleux profitent de la fragilité des personnes concernées pour offrir des réponses inadaptées ou au rabais. Le contrôle de la qualité des locaux des établissements, des catégories et du nombre de personnels qui devront être employés dans la structure, de leur qualification… sont autant de points qui sont vérifiés avant la délivrance des autorisations. Une visite de conformité préalable à l’ouverture de l’équipement permet de vérifier que les éléments annoncés par le gestionnaire ont bien été mis en œuvre dans les faits. Ce régime de l’autorisation est confronté à plusieurs attaques. Attaque au niveau européen avec le projet de directive de libéralisation des services. Ainsi, en cette rentrée sociale, il n’était toujours pas assuré que les établissements et services sociaux et médico-sociaux seraient exclus du champ d’application de ce texte (cf. infra chapitre 1, partie 2.1). De même, au niveau national, un projet d’ordonnance de simplification du droit propose d’exclure les foyers de jeunes travailleurs d’une grande partie des dispositions de la loi 2002-2, dont le régime d’autorisation. Ce régime d’autorisation risque également d’être mis à mal si l’article 5 de ce projet d’ordonnance restait en l’état. En effet, cet article prévoit que les services d’aide à domicile qui le voudront, dès lors qu’ils ne souhaiteraient pas être tarifés par le Président du Conseil général, pourraient se voir appliquer un simple système d’agrément en lieu et place de l’autorisation de création. Au vu du projet de décret qui doit définir les contours de cet agrément, on ne peut qu’être inquiet pour la protection des publics fragiles (cf. chapitre 7). 2.2 La situation particulière des lieux de vie et des centres de soins spécialisés aux toxicomanes a) Les lieux de vie et d’accueil Le décret du 23 décembre 2004 a défini les missions, les publics et les conditions de fonctionnement des lieux de vie et d’accueil147. Les gestionnaires doivent se conformer à ce texte. Plusieurs hypothèses doivent être envisagées : - Le lieu de vie était déjà autorisé au titre de la loi du 30 juin 1975 ou au titre de la loi du 2 janvier 2002 (hypothèse qui semble rarissime). Le gestionnaire n’a pas, dans ce cas, à déposer une nouvelle demande d’autorisation de création. Il doit cependant adapter ses modalités de fonctionnement aux prescriptions du décret. Cette mise en conformité devra être réalisée au plus tard à la fin de l’année 2006. - Le lieu de vie n’est pas titulaire d’une autorisation de création mais a été habilité par le Préfet ou le Président du Conseil général ou a passé une convention avec ces autorités ou avec un établissement de santé ou un établissement ou service social ou médico-social. Le gestionnaire a jusqu’à la fin de l’année 2006 pour déposer une demande d’autorisation de création en bonne et due forme respectant ce décret. - Le lieu de vie ne se situe pas dans une des deux hypothèses précédentes, il doit alors déposer sans tarder une demande d’autorisation de création respectant les prescriptions du décret du 23 décembre 2004, si ce n’est déjà fait. 147 Décret n°2004-1444 du 23 décembre 2004 – Journal Officiel, 30 décembre 2004. Ce texte est codifié aux articles D. 316-1 à D. 316-4 du code de l’action sociale et des familles. Le droit des institutions sociales et médico-sociales 57 b) Les CSST La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2003 a prévu que la première autorisation des centres de soins spécialisés aux toxicomanes leur serait délivrée pour une durée de trois ans. Les premières autorisations ayant été délivrées dès le début de l’année 2003, l’attention des gestionnaires est donc attirée sur leur prochaine expiration et leur nécessaire renouvellement (CASF, article L. 313-1). 2.3 La future intégration des services de prévention spécialisée et des services mettant en œuvre les mesures d’investigation ordonnées par l’autorité judiciaire Le projet d’ordonnance de simplification du droit, déjà évoqué, propose de faire entrer les services qui gèrent des équipes de prévention spécialisée ainsi que ceux qui mettent en œuvre des mesures d’investigation, dans le champ d’application de la loi du 2 janvier 2002 et, par conséquent, dans le régime de l’autorisation qu’elle définit. Les membres du groupe de réflexions et d’échanges animé par l’Uniopss approuvent cette intégration. Ils regrettent toutefois qu’elle ne soit pas totale en ce qui concerne le volet droit des usagers (cf. partie1.2-c du présent chapitre). 3. La planification sociale et médico-sociale et la programmation des moyens financiers : création des PIAHPA Depuis le 1er janvier de cette année, les conseils généraux sont seuls compétents pour arrêter les schémas départementaux après prise en compte des orientations des Préfets de départements et avis des CROSMS (cf. : Document conjoncturel, n°180, octobre 2004, pages 66 et 67). Par ailleurs, un outil de programmation financière vient de faire son apparition. En effet, la loi pour l’égalité des droits et des chances des personnes handicapées du 11 février 2005 a créé les programmes interdépartementaux d’accompagnement des handicaps et de la perte d’autonomie (PIAHPA ou PRIAC). Ils concernent les établissements et services sociaux et médico-sociaux destinés aux personnes âgées et aux personnes handicapées. Ces programmes sont établis par le représentant de l’État dans la région, en liaison avec les Préfets de départements concernés et après avis de la section compétente du CROSMS. Ils dressent, au niveau régional, les priorités de financement pour les créations, extensions ou transformations d’établissements ou services. Il convient toutefois de noter que cela ne concerne que les prestations financées par l’État ou les organismes de Sécurité sociale. Les PIAHPA n’ont donc pas vocation à établir les priorités de financement des départements. Les priorités des PIAHPA sont établies et actualisées sur la base des schémas nationaux, régionaux et départementaux d’organisation sociale et médico-sociale. Elles veillent en outre à garantir : - 58 la prise en compte des orientations communiquées par le Préfet de département au Président du conseil général à l’occasion de l’élaboration des schémas départementaux ; un niveau d’accompagnement géographiquement équitable des différentes formes de handicap et de dépendance ; l’accompagnement des handicaps de faible prévalence, au regard notamment des dispositions des schémas nationaux d’organisation sociale et médico-sociale ; l’articulation de l’offre sanitaire et de l’offre médico-sociale au niveau régional, pour tenir compte notamment des services de soins de longue durée. Uniopss/Uriopss Rentrée sociale 2005-2006 Enfin, notons que ces programmes deviennent un des critères de délivrance des autorisations de création, d’extension ou de transformation des établissements et services sociaux et médico-sociaux. Chaque année, ils doivent être actualisés, après avis de la section compétente du CROSMS. Ils sont transmis pour information aux Présidents de conseils généraux. Tout en étant favorable à une telle programmation, l’Uniopss s’inquiète des risques d’allongement des délais de transmission des crédits de la CNSA aux établissements et services, du fait de la complexité du dispositif ainsi mis en place. 4. Coopération des établissements et services : un mouvement qui devrait s’amplifier Dans un souci de favoriser la coordination des actions sociales et médico-sociales, la loi pour l’égalité des droits et des chances des personnes handicapées prévoit différentes formules auxquelles pourront avoir recours les gestionnaires (comme par exemple les groupements de coopération sociale et médico-sociale). Au début de cette année, la DGAS a soumis à la concertation un projet de texte visant à préciser ce nouveau dispositif. Ce texte a reçu un accueil plutôt favorable. L’Uniopss a milité pour que les associations ne soient pas exclues de certains modes de coopération (comme les GIE). Elle a également suggéré un certain nombre de simplifications, dont une grande partie a pu être acceptée. Le texte définitif devrait être publié d’ici la fin de cette année. Il nous semble que les associations doivent prendre la mesure de l’intérêt d’outils comme ceux-là pour inscrire leur action avec d’autres acteurs en lien avec les territoires. 5. L’habilitation justice : une expérimentation à venir La loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales prévoit, en son article 59, l’extension des compétences des départements dans la mise en œuvre des mesures d’assistance éducative ordonnées par l’autorité judiciaire, et ce, à titre expérimental (cf. : Document conjoncturel, n°180, octobre 2004, pages 128 et 129). Les départements volontaires ont jusqu’à la fin de l’année pour se porter candidats. C’est le gouvernement qui doit arrêter la liste de ceux qui seront retenus. Une convention passée entre le préfet et chaque département concerné définira les modalités de cette extension de compétences et précisera les moyens qui l’accompagnent en crédits et/ou en personnels148. 6. Les contrats et conventions : une volonté politique forte de développement Le développement de la contractualisation apparaît comme une priorité importante des pouvoirs publics tant au niveau des conventions tripartites des EHPAD qu’au niveau des contrats d’objectifs et de moyens. 148 Circulaire DGCL n°1074 C – 10 septembre 2004. Le droit des institutions sociales et médico-sociales 59 6.1 Le conventionnement tripartite des EHPAD : vers un nouveau report de délai Les établissements qui hébergent des personnes âgées ne peuvent continuer à accueillir des personnes dépendantes qu’à la condition d’avoir passé une convention pluriannuelle avec le Président du conseil général et l’autorité compétente de l’État avant le 31 décembre 2005 pour les établissements qui ne sont pas des logements foyers ou le 31 décembre 2006 pour ces derniers. La circulaire du 18 février 2005 relative à la campagne budgétaire 2005 des établissements et services médico-sociaux et sanitaires accueillant des personnes âgées149 annonce un report de la date butoir de signature de ces conventions tripartites, du 31 décembre 2005 au 31 décembre 2007. Ce report est justifié, selon les pouvoirs publics, par le fait que la CNSA doit financer la médicalisation des EHPAD sur la durée du plan « Vieillissement et Solidarités », soit jusqu’à fin 2007. Il s’explique aussi et surtout par le fait que les 9 000 conventions tripartites prévues sont loin d’avoir toutes été conclues. Au 31 décembre 2004, seules 3 732 conventions avaient été signées, dont 1 238 pour la seule année 2004. Pour 2005, un objectif de 1 500 nouvelles conventions a été assigné par le ministère à ses services déconcentrés. Par ailleurs, la loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie150 complète le contenu possible des conventions tripartites dans l’objectif de promouvoir et de développer les soins palliatifs. Ainsi, cette convention « identifie, le cas échéant, les services au sein desquels sont dispensés des soins palliatifs et définit, pour chacun d’entre eux, le nombre de référents en soins palliatifs qu’il convient de former ainsi que le nombre de lits qui doivent être identifiés comme des lits de soins palliatifs ». 6.2 Le développement des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens : pour des contrats gagnant gagnant La loi du 2 janvier 2002 a créé les contrats d’objectifs et de moyens (COM). Ces contrats ont notamment pour objet de permettre la réalisation des objectifs retenus par le schéma d’organisation sociale et médico-sociale, la mise en œuvre du projet d’établissement ou de service ou la coopération des actions sociales et médico-sociales. Ils doivent fixer les obligations respectives des parties signataires et les moyens mobilisés pour la réalisation des objectifs retenus (CASF, article L. 313-11). Les ministères veulent promouvoir le recours à cette démarche contractuelle. C’est ainsi que la circulaire du 22 mars 2005 relative à la campagne budgétaire 2005 des établissements et services médicosociaux accueillant des personnes handicapées et des personnes confrontées à des difficultés spécifiques151 fait une place particulière aux contrats d’objectifs et de moyens (COM). Elle prévoit en effet qu’afin « de mieux garantir la « vérité des prix » (coûts d’investissement et de fonctionnement réalistes, taux d’encadrement compatible avec la nature du public accueilli) lors de l’autorisation initiale, l’autorisation est assortie de la signature d’un contrat objectifs-moyens pluriannuel (...) qui fixe le montant de la recette que le financeur s’engage à apporter chaque année ». À ce titre, il faut rappeler que la signature d’un COM n’est en aucun cas une obligation pour les gestionnaires d’établissements ou de services sociaux et médico-sociaux. Le recours à ce mode de relation entre gestionnaires et autorités ne peut se concevoir que dans le cadre d’intérêts mutuels et dans une logique du ‘‘donnant-donnant’’ 149 Circulaire n°DHOS-F2/DSS-1A/DGAS-2C/n°113 du 18 février 2005 – Bulletin Officiel du Ministère de la Solidarité et de la Santé – n°2005-05. Loi n°2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie – Journal Officiel, 23 avril 2005. 151 Circulaire n°DGAS/DSS/DGS/2005/154 du 22 mars 2005 – Bulletin Officiel du ministère de la Solidarité et de la Santé – n°2005-04. 150 60 Uniopss/Uriopss Rentrée sociale 2005-2006 7. L’évaluation des établissements et services : vers un report de la date limite de réalisation Le 2 juin dernier, la DGAS transmettait à l’Uniopss pour avis un projet de texte visant à reporter la date limite de réalisation des évaluations internes et externes des établissements et services sociaux et médico-sociaux et des lieux de vie et d'accueil. L'actuel article L 312-8 du code de l'action sociale et des familles prévoit que ces structures doivent procéder tous les 5 ans à des évaluations internes. Deux évaluations externes doivent par ailleurs être réalisées dans le cycle des 15 ans de l'autorisation de création. La première doit avoir lieu au plus tard la 7ème année et la seconde au plus tard la 13ième. Les évaluations internes comme externes doivent être réalisées sur la base notamment de procédures, de références et de recommandations de bonnes pratiques professionnelles validées ou, à défaut en cas de carence des acteurs, élaborées par le Conseil national de l'action sociale et médico-sociale (CNESMS). Le CNESMS ne s'est installé que très récemment et n'a, à ce jour, validé aucun référentiel. Le report de la date limite de réalisation des évaluations internes et externes s'impose donc. Plusieurs membres du CNESMS l'avaient d’ailleurs demandé. La DGAS a accédé à cette demande et proposé de reporter les dates limites d'un an. Dans un courrier commun avec l'Apf, l'Admr, la Fnars, la Fehap et l'Unassad, l'Uniopss a souhaité que ce délai soit allongé, afin de permettre aux acteurs en présence de mettre en œuvre dans de bonnes conditions ce volet essentiel de la loi du 2 janvier 2002. La DGAS a accepté en grande partie cette proposition qui devrait figurer dans la future ordonnance de simplification du droit, à paraître d’ici la fin de l’année. La date limite pour réaliser la première évaluation interne serait ainsi reportée au 3 janvier 2009 et celle pour réaliser la première évaluation externe au 4 janvier 2010152. (Voir également sur ce sujet, le chapitre 2, point 3.2). 8. Le contrôle et la fermeture des établissements et services : des risques de déconstruction Le contrôle et la fermeture des établissements et services ont donné lieu à une actualité abondante. Un projet de décret sur les pouvoirs de saisie des inspecteurs de l’action sanitaire et sociale a été soumis à la concertation. La loi pour l’égalité des droits et des chances des personnes handicapées, deux arrêts du Conseil d’État et un projet d’ordonnance ont apporté des précisions, introduit des changements ou en préparent d’autres sur la fermeture des établissements et services et ses conséquences. 8.1 Les pouvoirs de saisie des inspecteurs de l’action sanitaire et sociale : concertation en cours L’article L. 313-3 du code de l’action sociale et des familles prévoit que, dans le cadre du contrôle des établissements et services sociaux et médico-sociaux, les inspecteurs des affaires sanitaires et sociales « dûment assermentés à cet effet (...) constatent les infractions par des procès-verbaux [et] peuvent effectuer des saisies dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État ». Le projet de décret d’application de cet article a été soumis à concertation début janvier. Dans ce cadre, l’Uniopss et les membres du groupe de réflexions et d’échanges qu’elle anime ont fait part de leurs observations et de leurs propositions complémentaires. Elles visent notamment à renforcer les garanties dans la mise en œuvre de ces pouvoirs de saisie en rappelant que les inspecteurs n’ont pas accès, lors de leurs visites, aux locaux des sièges sociaux des associations, en insistant sur le caractère contradictoire de cette procédure et sur le rôle du juge ayant autorisé la saisie. 152 Ce report au 3 janvier 2010 ne jouerait cependant que pour les établissements et services autorisés avant le 4 janvier 2002. Pour les équipements créés après cette date, la première évaluation externe devrait être réalisée dans les 7 ans qui suivraient la délivrance de l’autorisation de création. Le droit des institutions sociales et médico-sociales 61 8.2 La procédure et les modalités de fermeture des établissements et services : une tendance inquiétante à la déconstruction La loi pour l’égalité des droits et des chances des personnes handicapées du 11 février 2005 a modifié la liste des autorités habilitées à fermer un établissement ou un service au titre de l’ordre public : c’està-dire lorsque la santé, la sécurité ou le bien être des personnes sont compromis ou lorsque les conditions techniques minimales d’organisation et de fonctionnement ne sont pas respectées. Jusqu’à cette loi, seul le Préfet de département disposait de ce pouvoir. Désormais, le Président du Conseil général se voit également reconnaître cette prérogative pour les établissements et services qu’il a autorisés. L’Uniopss et les membres du groupe de réflexions et d’échanges se sont déclarés défavorables à une telle évolution. Ils ont considéré que ce pouvoir devait rester dans les mains du seul Préfet de département au titre des fonctions régaliennes de l’État et des responsabilités particulières que ce dernier assume, selon les termes de la Constitution, en matière de protection des publics fragiles et de la santé de nos concitoyens. Ils n’ont malheureusement pas été entendus par le Gouvernement et le législateur. Le Conseil d’État s’est par ailleurs prononcé sur la problématique de la fermeture des établissements et services sociaux et médico-sociaux à l’occasion de deux recours qui lui avaient été soumis. En premier lieu, il a jugé légale, dans le cadre du recours intenté contre le décret budgétaire et tarifaire du 22 octobre 2003, la dévolution d’un certain nombre d’actifs prévue par l’article R. 314-97 du code de l’action sociale et des familles. Cette dévolution doit être opérée par le gestionnaire en cas de cessation de l’activité d’un établissement ou service, ou en cas de transformation importante entraînant une diminution de l’actif du bilan de cet établissement ou service « eu égard à l’origine de [ces] avoirs »153. Le Conseil d’État valide ainsi les dispositions de l’article R. 314-97 qui devraient être portées au niveau législatif par voie d’ordonnance154. L’Uniopss et les membres du groupe de réflexions et d’échanges ont rappelé à cet égard qu’il était anormal de prévoir le reversement des amortissements si le bien en cause a été acquis grâce à des fonds privés. De même, lorsque le bien a été acquis en partie grâce à des fonds publics, le reversement des amortissements ne devrait se faire qu’au prorata de l’apport public par rapport à la valeur totale du bien. Toute autre solution serait excessive et confiscatoire selon l‘Uniopss et les membres du groupe de réflexions. Cette position n’est pas partagée par la DGAS, et en l’état actuel de sa rédaction, le projet d’ordonnance maintiendrait de tels reversements. Le Conseil d’État a, en second lieu, rappelé l’importance du caractère contradictoire de la procédure de fermeture d’un établissement ou service social ou médico-social. Il a en effet jugé que la fermeture définitive ne peut intervenir « qu’après que le responsable a été informé du projet de décision de fermeture définitive et mis à même de présenter des observations »155. Ce principe doit s’appliquer quels que soient les motifs de la décision de fermeture définitive. Le Conseil d’État rappelle par ailleurs qu’une décision de fermeture, provisoire ou définitive, fondée sur la protection de la santé, de la sécurité ou du bien-être physique ou moral des personnes bénéficiaires ne peut être légale que s’il existe une réelle menace. Cette volonté du Conseil d’État de renforcer les garanties du gestionnaire dans la procédure de fermeture d’un établissement ou service contraste malheureusement avec celle affichée par les pouvoirs publics. Une ordonnance du 30 juin dernier a en effet supprimé une garantie offerte aux gestionnaires en cas de fermeture d’un établissement ou service pour enfants et adolescents. Désormais, le Préfet de département et le Président du Conseil général n’ont plus à consulter la commission départementale de protection de l’enfance. Une autre ordonnance, qui devrait être publiée au Journal Officiel d’ici la fin de l’année, devrait prévoir la même chose pour les établissements pour adultes. Au nom de la simplification administrative, un système qui visait à limiter, à titre préventif, les risques d’arbitraire est déconstruit. L’Uniopss et les membres du groupe de réflexions et d’échanges ont fait part de leur désaccord avec ces évolutions. 153 er Conseil d’État, 1 avril 2005, Arseaa, Synerpa et Unifed, requêtes n°262907, 263052 et 263053. Projet d’ordonnance précité. 155 Conseil d’État, 2 février 2005, Ministre de la Santé et des Personnes handicapées c/ Association Orchidée, requête n°263948. 154 62 Uniopss/Uriopss Rentrée sociale 2005-2006 9. Les instances de concertation : des CROSMS renforcés, une section sociale du CNOSS recomposée La loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances des personnes handicapées et un décret du 6 mai dernier ont élargi les compétences des CROSMS. Ce dernier texte a par ailleurs revu la composition de la section sociale du CNOSS. 9.1 Des CROSMS renforcés En vertu de la loi pour l’égalité des droits et des chances des personnes handicapées156, les CROSMS doivent être saisis, pour avis, du programme interdépartemental d’accompagnement des handicaps et de la perte d’autonomie. Depuis un décret du 6 mai 2005157, ils doivent également se prononcer sur le projet de schéma régional d’organisation sanitaire. L’articulation entre l’action sanitaire et l’action sociale et médico-sociale est également renforcée par le fait que deux membres du CROSMS doivent désormais siéger au sein du comité régional de l’organisation sanitaire. 9.2 Une section sociale du CNOSS recomposée Le décret du 6 mai dernier, précédemment évoqué157, récapitule également les différentes missions de la section sociale du CNOSS et revoit sa composition. Les représentants des institutions sociales et médico-sociales voient leur représentation renforcée (passage de 15 à 20 sièges) tout comme les organisations syndicales et les représentants des usagers. A contrario, la section sociale ne comprend plus de représentants des administrations centrales et de l’Igas. 10. La tarification sociale et médico-sociale : une mobilisation qui demeure importante face à l’ampleur des enjeux Pour la troisième année consécutive, les gestionnaires d’établissements et services sociaux et médico-sociaux vont devoir élaborer leurs propositions budgétaires en respectant le cadre fixé par le décret du 22 octobre 2003, désormais codifié aux articles R. 314-1 et suivants du code de l’action sociale et des familles. Les gestionnaires vont notamment devoir prendre en compte la poursuite de la construction du mécanisme de convergence tarifaire avec la fixation de nouvelles listes d’indicateurs médicosocio-économiques. L’insuffisance de financement d’un grand nombre d’établissements et services ne facilite pas la négociation budgétaire et met en grandes difficultés certaines associations comme l’illustre la situation des CHRS. Enfin, des évolutions législatives et réglementaires sont en préparation qui auront une incidence sur la tarification sociale et médico-sociale. 156 157 Loi n°2005-102 du 11 février 2005 – Journal Officiel, 12 février. Décret n°2005-434 du 6 mai 2005 – Journal Officiel, 8 mai. Le droit des institutions sociales et médico-sociales 63 10.1 Quelques conseils pratiques pour la construction des propositions budgétaires 2006 Dans les semaines qui viennent, les gestionnaires vont élaborer puis transmettre leurs propositions budgétaires aux autorités de tarification ainsi qu’à la CRAM et à la caisse pivot pour ceux financés par l’assurance maladie. Dans ce cadre, l’attention des associations de solidarité est attirée notamment sur les points suivants : 64 Le rapport budgétaire, qui sert à justifier les moyens demandés et à préciser les hypothèses retenues, est un document fondamental qui requière toute l’attention des gestionnaires. Certaines associations n’ont pas mesuré l’ampleur du changement intervenu avec la sortie du décret du 22 octobre 2003 et ont continué depuis cette date à construire ce document comme si de rien n’était. C’est une grave erreur qui pourrait amener le juge de la tarification à considérer que les propositions budgétaires sont incomplètes avec toutes les conséquences préjudiciables qui en résulteraient pour l’association. Pour mémoire, la nouvelle réglementation prévoit que ce rapport est établi par une personne ayant qualité pour représenter l’établissement ou le service et qu’il justifie les prévisions de dépenses et de recettes. À ce titre, il précise les hypothèses retenues en matière d’évolution des prix, des rémunérations et des charges sociales et fiscales relatives à la reconduction des moyens autorisés dans le cadre du budget exécutoire de l’année précédente. Il retrace également, dans un tableau, l’activité et les moyens de l’établissement ou du service au cours des trois années précédentes, en faisant notamment apparaître, pour chaque année, le nombre prévisionnel et le nombre effectif de personnes prises en charge. Il effectue par ailleurs le bilan, sur les deux derniers exercices et l’exercice en cours, des promotions et augmentations individuelles et catégorielles des rémunérations au sein de l’établissement ou du service. Il justifie le montant prévisionnel global de la rémunération du personnel, en détaillant les hypothèses retenues en matière de promotion et d’avancement, et leur incidence sur le nombre de points d’indice qui en résultent, par application des conventions collectives ou des dispositions statutaires applicables à l’établissement ou au service. Il indique enfin, le cas échéant, les éléments du projet d’établissement qui justifient les dépenses proposées. Le réseau Uniopss-Uriopss a élaboré avec le concours des sociétés informatiques Apologic et Alfa un nouveau CD-Rom pour aider les associations à construire les propositions budgétaires de leurs établissements et services. Ce CD-rom permet notamment d’identifier les principaux points qui doivent figurer dans ce rapport budgétaire. Avant leur transmission, les propositions budgétaires et tarifaires doivent être approuvées par l’organe délibérant compétent de l’organisme gestionnaire. En effet, l’établissement ou le service privé n’a pas en tant que tel de personnalité morale. Celle-ci appartient à l’association gestionnaire de l’établissement ou du service. Il convient donc de se référer aux statuts de l’association pour identifier, d’une part, l’organe qui doit approuver les propositions budgétaires portant sur les établissements et services sociaux et médico-sociaux et, d’autre part, la personne habilitée à signer les documents remis aux différentes étapes de la procédure budgétaire. Il est nécessaire que les statuts, comme le règlement intérieur qui leur est souvent associé, soient précis sur ces questions et que les délégations de pouvoirs aux professionnels soient formalisées, précises et régulièrement confirmées ou réajustées. Les propositions doivent indiquer le nom de la ou des personnes qui représenteront l’association au cours des différentes étapes de la négociation budgétaire. Comme indiqué précédemment, il convient de vérifier que ces personnes sont bien habilitées à le faire. Les indicateurs médico-socio-économiques doivent être renseignés pour les EHPAD, les SSIAD, les CHRS, les CMPP, les MAS, les CAT, les ITEP et les autres établissements et services relevant des anciennes annexes 24 (à l’exception des annexes quater et quinquies). De nouvelles listes d’indicateurs sont en effet parues au cours de l’été (cf. point 10.2). Il convient de rappeler que la transmission, par voie électronique, des indicateurs dûment renseignés constitue une obligation dans le cadre du dépôt par les gestionnaires des propositions budgétaires. Uniopss/Uriopss Rentrée sociale 2005-2006 Enfin, les propositions budgétaires doivent être transmises à leurs différents destinataires au plus tard le 31 octobre 2005. Si les gestionnaires transmettent leurs propositions budgétaires par voie postale, la date à prendre en compte est celle de remise aux services postaux (et non la date de réception par l’administration)158. En d’autres termes, les propositions devront être postées par lettre recommandée avec accusé de réception au plus tard le lundi 31 octobre 2005159. 10.2 La poursuite de la construction du mécanisme de convergence tarifaire Dans l’objectif affiché de comparer les coûts des établissements et services sociaux et médico-sociaux et de réduire les écarts injustifiés, la loi du 2 janvier 2002 et le décret budgétaire et tarifaire du 22 octobre 2003 ont généralisé le mécanisme de convergence tarifaire qui avait été introduit en 1999 pour les seuls EHPAD (cf. document conjoncturel 2005). Pour entrer en vigueur, ce mécanisme nécessite la détermination de listes d’indicateurs dits indicateurs médico-socio-économiques. Ils existent depuis 1999 pour les EHPAD. Pour les autres catégories d’établissements et services, la situation était la suivante au début du mois de septembre 2005 : MAS, CAT, ITEP et autres établissements et services qui relèvent des anciennes annexes 24 au décret du 27 octobre 1989 (à l’exception des annexes quater et quinquies) : l’arrêté du 26 octobre 2004 fixant les premiers indicateurs vient d’être remplacé par un arrêté du 20 juillet 2005. Ce dernier texte dresse une liste d’indicateurs plus complète. 10 indicateurs sont à renseigner à l’appui des propositions budgétaires 2006. Les 9 premiers sont les mêmes que ceux issus de l’arrêté du 26 octobre 2004. Le 10ième relatif au transport de personnel a été modifié afin de prendre en compte l’ensemble des choix de gestion de ce poste (achats de véhicule, location, remboursement de frais) ce qui n’était pas le cas de sa version issue de l’arrêté du 26 octobre 2004. Par ailleurs, l’arrêté du 20 juillet complète ce dispositif en y adjoignant 5 nouveaux indicateurs. Les données relatives au calcul de ces indicateurs doivent être collectés à partir du 1er janvier 2006 en vue d’une transmission à l’appui des propositions budgétaires 2007160. CHRS : les indicateurs ont été fixés par un arrêté du 5 novembre 2004161. SSIAD : ces indicateurs viennent d’être fixés par un arrêté du 27 juillet 2005. Tous les indicateurs ne devront cependant pas être renseignés dès les propositions budgétaires 2006 mais seulement une partie d’entre eux. Les données relatives aux autres indicateurs devront être collectés à partir du 1er janvier 2006 en vue d’une transmission à l’appui des propositions budgétaires 2007162. CMPP : la liste des indicateurs devant être renseignés dès les propositions budgétaires 2006 a été déterminée par un arrêté du 20 juillet 2005163. 158 En vertu de l’article 16 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l’administration – Journal Officiel, 13 avril. 159 Pour aller plus loin : VINSONNEAU Arnaud – Guide du budget – fiche d’actualité complémentaire à la seconde mise à jour – Uniopss, 17 juin 2005 – fiche n°34838 base de données en ligne Uniopss/Uriopss – http://www.uniopss.asso.fr 160 Pour plus de renseignements : Arrêté du 20 juillet 2005 fixant les indicateurs et leur mode de calcul pris en application du 5° du I de l’article R. 314-17 et des articles R. 314-28 à R. 314-33 du code de l’action sociale et des familles – Journal Officiel Lois et décrets, 13 août 2005 – fiche n°35481 base de données en ligne Uniopss/Uriopss – http://www.uniopss.asso.fr 161 Pour plus de renseignements : Arrêté du 5 novembre 2004 fixant les premiers indicateurs applicables aux CHRS ainsi que leurs modes de calcul pris en application du 5° du I de l’article R. 314-17 du code de l’action sociale et des familles – Journal Officiel Lois et décrets, 24 novembre 2004 – fiche n°33498 base de données en ligne Uniopss/Uriopss – http://www.uniopss.asso.fr Circulaire DGAS n°5B/2004/592 du 10 décembre 2004 relative à l’arrêté du 5 novembre 2004 fixant les premiers indicateurs des CHRS et leurs modes de calcul – DGAS, 10 décembre 2004 – fiche n°33824 base de données en ligne Uniopss/Uriopss – http://www.uniopss.asso.fr 162 Pour plus de renseignements : Arrêté du 27 juillet 2005 fixant le rapport d’activité des services de soins infirmiers à domicile et comprenant les indicateurs mentionnés au 5° de l’article R. 314-17 du code de l’action sociale et des familles – Journal Officiel Lois et décrets, 14 août 2005 – fiche 35490 base de données en ligne Uniopss/Uriopss – http://www.uniopss.asso.fr 163 Pour plus de renseignements : Arrêté du 20 juillet 2005 fixant pour les CMPP les premiers indicateurs et leurs modes de calcul pris en application du 5° de l’article R. 314-17 et des articles R. 314-28 et suivants du code de l’action sociale et des familles – Journal Officiel Lois et décrets, 13 août 2005 – fiche n°35491 base de données en ligne Uniopss/Uriopss – http://www.uniopss.asso.fr Le droit des institutions sociales et médico-sociales 65 Comme elle l’avait fait en 2004, l’Uniopss a continué à demander que la première année de mise en œuvre des indicateurs soit considérée comme une année de test grandeur nature qui permette de vérifier la pertinence des indicateurs retenus, leur mode de calcul… Les Cabinets ministériels ont fait preuve d’ouverture en direction des CHRS, mais une certaine ambiguïté demeurait cependant. En effet, si la DGAS invitait ses services déconcentrés à faire preuve de prudence dans l’utilisation et l’interprétation des indicateurs, pour ne pas faire de l’année 2005 une année de réallocation massive des ressources, elle n’entendait pas pour autant en faire une année blanche. 10.3 Les difficultés de financement des CHRS Le 27 juillet 2004, l’Inspection générale des finances (IGF) et l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) étaient saisies par le Gouvernement d’une mission d’enquête portant sur l’analyse des causes et conséquences des difficultés financières des CHRS. L’Uniopss a été entendue par cette mission. Elle a appelé à une remise à niveau des bases budgétaires de ces centres, constatant qu’au cours de ces dernières années, il y avait eu un décalage important entre les besoins des CHRS et les taux de reconduction des moyens, fixés eux à un niveau très faible, très largement en dessous de l’inflation. L’Uniopss a également souligné que les difficultés de financement des centres sont accrues par le fait qu’ils ne disposent que de faibles réserves de trésorerie contrairement à d’autres établissements et services et qu’il convenait également d’y remédier. Le rapport de l’Igas et de l’IGF, rendu public en mars 2005, reconnaît que la situation financière des CHRS est globalement très dégradée même si ce constat est inégal entre les régions, les départements et les établissements. Le financement des CHRS serait, selon l’Igas et l’IGF, mal réparti à tous les niveaux et le pilotage du dispositif par l’administration serait insuffisant. À partir de ces constats, la mission préconise un rebasage sous condition des crédits destinés aux CHRS. L’insuffisance est estimée en base 2004 entre 10 et 12 millions d’euros auxquels il faudrait ajouter entre 15 à 20 millions au titre de la reprise des déficits des années antérieures. La mission préconise également de réduire les inégalités de financement entre régions, d’améliorer les outils de connaissances des CHRS et de se doter des moyens d’un véritable pilotage du dispositif à tous les niveaux. À partir de ce rapport, les Ministères ont élaboré un plan d’action articulé autour des thèmes suivants : améliorer le contrôle de gestion, améliorer le pilotage du dispositif et améliorer l’allocation des ressources. Ainsi, il est proposé d’élaborer un référentiel de coûts des CHRS ; d’améliorer le chiffrage des conventions et avenants soumis à agrément national ; de déconcentrer la procédure d’agrément des accords locaux ou d’établissement afin de mieux apprécier leur impact et de responsabiliser les services déconcentrés de l’État ; de redéfinir le tableau de bord des CHRS et son périmètre ; de répartir les 8 millions d’euros prévus en loi de finances rectificatives pour 2004 en fonction des excédents et des déficits 2003 etc. Le rebasage général n’interviendrait pas avant 2006. Lors d’une rencontre avec un membre du Cabinet de Madame Vautrin au cours du mois de juillet, l’Uniopss a demandé à ce que d’importants crédits soient débloqués dès cette année compte tenu de l’urgence de la situation. Au début du mois de septembre, ce constat semble se confirmer avec beaucoup de remontées de CHRS faisant état de la diminution de leurs crédits par rapport à l’année précédente. 10.4 Les évolutions législatives et réglementaires a) Les évolutions déjà intervenues La loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances des personnes handicapées a redéfini le périmètre des enveloppes limitatives de crédits d’assurance maladie consacrées aux établissements et services sociaux et médico-sociaux, ainsi que les autorités compétentes pour arrêter les dotations régionales et départementales. Cette loi a involontairement supprimé l’opposabilité des enveloppes limitatives de crédits pour les établissements intervenant en direction de publics confrontés à des difficultés spécifiques (CSST, CCAA, ACT). Il est fort probable que le Gouvernement cherchera à remédier à cette situation dès la prochaine loi de financement de la Sécurité sociale. Par ailleurs, c’est désormais la CNSA qui a vocation à arrêter les dotations régionales et départementales limitatives de crédits d’assurance maladie destinées aux établissements et services pour personnes âgées et pour personnes handicapées, à partir d’un montant national fixé par le Gouvernement. 66 Uniopss/Uriopss Rentrée sociale 2005-2006 Enfin, le décret tant attendu sur la tarification des soins dans les petites unités de vie et les accueils de jour autonomes est paru au Journal Officiel du 13 février dernier (cf. infra chapitre 11, point 3.6.1). b) Les évolutions à venir Le décret budgétaire et tarifaire du 22 octobre 2003 a été contesté devant le Conseil d’État par l’Unifed, le Synerpa et l’Arseaa. Les recours de ces organisations ont été rejetés. La Haute juridiction administrative a en effet jugé légales les dispositions qui étaient contestées devant elles164. Bien qu’ayant eu gain de cause, la Direction générale de l’action sociale a poursuivi la concertation sur d’éventuels ajustements du décret budgétaire et tarifaire. Le projet de texte soumis au CNOSS en mars dernier contient de très nombreuses propositions comme par exemple : mettre fin à la double présentation des propositions budgétaires des EHPAD (groupes fonctionnels-sections d’imputation tarifaire) ; exonérer les petits établissements et services de l’obligation de produire le programme pluriannuel d’investissement ; permettre au gestionnaire de répondre en une seule fois aux différents courriers de l’administration au cours de la procédure budgétaire contradictoire (alors qu’aujourd’hui le gestionnaire doit répondre à chacun des courriers) ; maintenir le budget exécutoire tout en laissant au gestionnaire un délai d’un mois pour le produire ; permettre le financement pluriannuel pour un ensemble d’établissements et services ; mieux reconnaître les missions des sièges sociaux ; réorganiser la tarification des services de prévention spécialisée et des services mettant en œuvre des mesures d’investigation ; d’organiser le financement des lieux de vie et d’accueil ; préciser le volet financier de l’accueil temporaire. Par ailleurs, le projet d’ordonnance de simplification du droit contient plusieurs dispositions tarifaires comme par exemple : sécuriser le volet financier de l’amendement Creton ; la tarification par le Président du Conseil général de certains services d’aide à domicile en direction des familles ; généraliser le recours à la dotation globale dépendance dans les EHPAD ; permettre à une fédération, avec l’accord de ses adhérents, de gérer directement les autorisations, habilitations et tarifications des services d’aide à domicile ; une disposition plus conflictuelle concernant la tarification des EHPAD qui reçoivent moins de 50 % de bénéficiaires de l’aide sociale. Sur la base d’un double accord du gestionnaire et du Président du conseil général, les établissements concernés basculeraient vers le système suivant de tarification des prestations hébergement : pour les non bénéficiaires de l’aide sociale, ce serait la liberté des prix qui s’appliquerait la première année et une évolution encadrée par Bercy les années suivantes. Pour les bénéficiaires de l’aide sociale, les tarifs seraient fixés par convention. Ils ne pourraient être inférieurs à ceux qui s’appliquaient avant le basculement dans ce système et qui avaient été fixés par le président du conseil général. Un pourcentage de revalorisation, fixé par Bercy, s’appliquerait d’une année sur l’autre. L’Uniopss et les membres du groupe de réflexions et d’échanges ont considéré que si certaines dispositions du projet de décret allaient dans le bon sens, ce texte ne répondait pas de manière satisfaisante à plusieurs points conflictuels du décret du 22 octobre 2003 : le déséquilibre des droits et obligations des gestionnaires et des autorités de tarification demeurerait et la régulation resterait trop comptable. Ce texte ne devrait pas être publié d’ici le 31 octobre prochain. En effet, au début du mois de septembre, il était toujours en phase d’arbitrage et n’avait donc pas encore été soumis au Conseil d’État pour avis. Sa publication était plutôt attendue pour la fin de l’année. S’agissant du projet d’ordonnance de simplification du droit, l’Uniopss a notamment demandé le retrait de l’article sur la tarification des EHPAD même si elle a relevé la volonté de la DGAS d’essayer d’entourer ce mécanisme de certaines garanties comme celles du volontariat des établissements et des niveaux minimums des tarifs hébergement pris en charge par l’aide sociale. L’Uniopss avait contesté en 2001 une disposition qui instituait, dans le même établissement, des tarifs hébergement différents pour les personnes âgées pauvres et pour les autres résidents, avec le risque bien réel d’avoir deux 164 Conseil d’État, 1 avril 2005, requêtes n°262907, 263052, 263053 – Arseaa et autres. er Le droit des institutions sociales et médico-sociales 67 catégories de prestations selon le tarif applicable. Elle ne pouvait bien évidemment pas accepter une disposition qui vise à élargir le champ d’application de ce système à d’autres EHPAD. De même, le risque de déconnecter les tarifs d’aide sociale des coûts réels de prise en charge, bien que la DGAS ait cherché à l’atténuer, peut cependant exister. Rien ne garantit en effet que le pourcentage fixé nationalement par Bercy correspondra aux besoins de chaque établissement concerné. Dans ce cas de figure, les établissements pourraient être incités financièrement à n’accueillir que des personnes disposant d’un certain niveau de revenus, pour obtenir une meilleure rémunération des prestations dispensées, et a contrario à délaisser les bénéficiaires de l’aide sociale. Devant l’ensemble de ces enjeux, l’Uniopss continue à demander le retrait de cette disposition. Enfin, un projet de décret sur l’agrément des conventions collectives est actuellement examiné par la section sociale du Conseil d’État. Il vise notamment à préciser les modalités de définition des paramètres d’évolution de la masse salariale que doivent respecter les partenaires sociaux dans leurs négociations collectives en vue de l’agrément. 11. Le contentieux de la tarification sanitaire et sociale : des risques de déconstruction Les associations de solidarité qui décident de contester un arrêté de tarification devant le juge du tarif doivent être vigilantes quant au respect de certaines règles de forme. Par ailleurs, la composition de ces juridictions vient d’être réformée du fait des exigences posées par la Convention européenne des droits de l’Homme. Enfin, l’Uniopss est mobilisée face aux risques de déconstruction de certains aspects de ce contentieux. 11.1 La forme des recours devant le juge du tarif Lorsqu’un gestionnaire décide de contester un arrêté de tarification devant le juge, il doit rédiger une requête introductive d’instance qui respecte certaines formes. Ces exigences de forme ont été accrues avec le décret budgétaire et tarifaire du 22 octobre 2003165. Les gestionnaires doivent s’attacher à exposer dans leur requête introductive d’instance les raisons pour lesquelles il ne leur était pas possible d’adapter leurs propositions budgétaires aux montants approuvés par l’autorité tarifaire, sous peine de voir déclarer leur requête irrecevable par le Tribunal. Cet argumentaire doit donc figurer de manière détaillée dans la requête si l’association veut que son recours soit jugé au fond. Ces nouvelles exigences n’ont pas été remises en cause par le Conseil d’État lorsqu’il s’est prononcé sur la légalité du décret budgétaire et tarifaire166. Depuis cet arrêt, les TITSS semblent appliquer plus strictement cet article. La vigilance des associations s’impose donc sur ce point. 11.2 La réforme de la composition des juridictions de la tarification sanitaire et sociale La composition des juridictions de la tarification sanitaire et sociale, telle qu’elle résultait d’une loi du 23 janvier 1990, n'était pas conforme aux exigences posées par la Convention européenne des droits de l'Homme. Bien qu'il n'y ait pas encore eu d'arrêt du Conseil d'État sur cette question, cette appréciation est largement partagée (rapport du Conseil d'État sur l'avenir des juridictions spécialisées dans le domaine social, conclusions du Commissaire du Gouvernement Denis Piveteau lors de la dernière séance de la CNTSS...). Le Parlement a donc autorisé le Gouvernement à prendre une ordonnance sur le sujet, qui vient d’être publiée au Journal Officiel du 2 septembre dernier167. Un groupe de travail, composé de représentants des administrations centrales concernées et d'un membre du Conseil d'État, a été chargé par le ministre de la Santé de préparer ce texte. Ce groupe a auditionné l'Uniopss. Notre Union a proposé, à cette occasion, de maintenir le principe de l'échevinage tout en modernisant sa traduction pour tenir compte des exigences de la convention européenne des droits de l'Homme. 165 Article 63-II codifié à l’article R. 351-18 du code de l’action sociale et des familles. er Conseil d’État, 1 avril 2005, Arseaa, Synerpa et Unifed, requêtes n°262907, 263052 et 263053. 167 Ordonnance n°2005-1088 du 1er septembre 2005 – Journal Officiel, 2 septembre 2005. 166 68 Uniopss/Uriopss Rentrée sociale 2005-2006 L’ordonnance, qui vient d’être publiée, prévoit que les TITSS sont présidés par un magistrat professionnel et comprennent également 4 personnes qualifiées titulaires et 4 personnes qualifiées suppléantes, contre 13 titulaires et 13 suppléants actuellement. Ces personnes qualifiées seront désignées par le Président de la Cour administrative d’appel à partir de listes établies par le Préfet de région, une partie des membres du CROSMS et du comité régional de l’organisation sanitaire. Une réforme analogue est prévue pour la CNTSS. Au cours de la courte concertation qui a précédée la parution de ce texte, l’Uniopss avait fait part de son accord quant à la nécessité de réformer les TITSS et la CNTSS. Elle avait cependant demandé des aménagements par rapport à ce qui était proposé. Ainsi, elle a notamment souhaité que la diminution du nombre de juges soit moins importante et que les organisations représentatives des gestionnaires qui siègent actuellement dans ces juridictions puissent continuer à le faire, ces dernières n’ayant pas démérité dans l’exercice de leur fonction juridictionnelle. La concertation n’a pas permis de faire évoluer ces points fondamentaux, pas plus que les avis négatifs des sections sanitaire et sociale du CNOSS. Le gouvernement a donc choisi de publier un texte en grande partie inchangé (à l’exception de l’instauration de membres suppléants et des profils des rapporteurs). Cette réforme entrera en vigueur au plus tard en mars 2006. 11.3 Un risque de recul sur l’exécution des décisions du juge du tarif L’article 19 du projet d’ordonnance de simplification du droit contient une disposition qui suscite beaucoup d’inquiétudes du côté de l’Uniopss. Cet article prévoit que les décisions des TITSS et de la CNTSS ne prennent effet qu’à compter de leur date de notification. Dans l’état actuel des textes, les décisions du juge de la tarification prennent effet à compter de la date d’entrée en vigueur de l’arrêté de tarification contesté. La différence est de taille. Dans le premier cas, la décision ne vaut que pour l’avenir. Dans l’autre, elle vaut également pour le passé. L’Uniopss a donc demandé la réécriture de cet article dans un sens qui ne lèse pas les intérêts des gestionnaires tout en simplifiant les modalités d’exécution des décisions du juge de la tarification. La DGAS a récemment indiqué que sa volonté n’était pas de limiter dans le temps la portée des décisions du juge et qu’en conséquence elle s’engageait à réécrire l’article en question. L’Uniopss reste vigilante et se réserve le droit de contester cette disposition devant le Conseil d’État et la Cour européenne des droits de l’homme si nécessaire. (Pour les évolutions du contentieux de la tarification sanitaire et sociale concernant les établissements de santé, se reporter au point n°2-3 du chapitre 10 du présent document conjoncturel). Le droit des institutions sociales et médico-sociales 69