Partie 3 : la procédure prud`homale - CFE

Transcription

Partie 3 : la procédure prud`homale - CFE
Partie 3 : la procédure prud'homale
Guide CFE-CGC de la prud’homie
Cette partie, sur la procédure prud’homale, n’a pas vocation à l’exhaustivité
tant celle-ci est riche et complexe, mais
à dresser un panorama des grands principes de la procédure devant le conseil
des prud’hommes et par la même occasion, tenter de vous apporter quelques
éclairages de conseillers prud’homaux
aguerris qui officient depuis plusieurs
années.
A.Les grands principes procéduraux applicables devant le
conseil de prud’hommes
Certaines exceptions à ce principe sont
fixées par le Code de procédure civile : le
juge peut décider que les débats auront
lieu ou se poursuivront en chambre du
conseil s’il doit résulter de leur publicité
une atteinte à l’intimité de la vie privée,
ou si toutes les parties le demandent, ou
s’il survient des désordres de nature à
troubler la sérénité de la justice230.
L’audience de conciliation se fait quant
à elle à huis-clos.
1.Les principes d'oralité
et de publicité
Le prononcé des décisions contentieuses
s’effectue en audience publique231.sous
réserve de dispositions particulières à
certaines matières.
Une des spécificités de la procédure
devant le conseil des prud’hommes est
que celle-ci est orale227.
2.Le principe du contradictoire
Les parties doivent donc développer
leurs prétentions, à l’oral, pendant l’audience. Les conclusions d’une partie ne
peuvent pas être retenues, si elle est
absente. Par conséquent, les plaidoiries
sont obligatoires, même si cela conduit
à répéter les conclusions écrites.
Les débats devant le bureau de jugement
et la formation de référé des conseils de
prud’hommes sont publics228. Il s’agit
d’un principe général du droit et sa violation entraîne la nullité qui devra toutefois être invoquée avant la clôture des
débats, la nullité, dans ce cas ne pouvant pas être relevée d’office229. Tous
227 Article R. 1453-3 du Code du travail
228 Article 433 du Code de procédure civile
229 Article 446 du Code de procédure civile
72
ceux qui le souhaitent peuvent assister
aux débats, dès lors qu’ils respectent la
police de l’audience (p 94).
De manière générale, les conseillers
prud’homaux sont tenus de faire respecter le principe du contradictoire afin de
garantir la régularité du procès.
Dès lors, le conseiller doit obéir à certaines règles :
• il ne peut juger sans avoir entendu,
à tout le moins appelé, les parties
au litige ;
• il ne peut retenir dans sa décision les
moyens, les explications et les documents invoqués et produits par les
parties que si ces dernières ont pu
en débattre contradictoirement. Si
le conseil des prud’hommes prend
230 Article 435 du Code de procédure civile
231 Article 451 du Code de procédure civile
une décision sur une demande
dont la partie adverse n’a pas eu
connaissance, ce jugement est nul ;
• il ne peut fonder sa décision sur des
moyens relevés d’office sans avoir
invité les parties à présenter leurs
observations ;
• il doit s’assurer que les parties se
sont fait connaître mutuellement, en
temps utile, les moyens de fait sur
lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de fait qu’elles
produisent et les moyens de droit
qu’elles invoquent232.
Toutes les pièces versées au débat, y
compris celles qui sont censées être
déjà en possession de l’adversaire,
comme les bulletins de paie, doivent
être communiquées.
Les pièces rédigées en langue étrangère doivent être accompagnées de
leur traduction en français.
• il doit écarter du débat les pièces
qui n’ont pas été communiquées en
temps utile233. Le bureau de conciliation peut fixer ce délai de communication des pièces entre les parties. Il est préférable d’envoyer ces
documents par lettre recommandée
avec accusé réception234.
La procédure prud’homale étant orale,
les documents produits au débat sont
présumés avoir été débattus contradictoirement, jusqu’à preuve contraire235.
232
233
234
235
Article 15 du Code de procédure civile
Article 135 du Code de procédure civile
Article R. 1454-18 du Code du travail
Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 12 mars 1999, n° 95-42.101
Bien qu’il n’y ait pas d’obligation
légale de communiquer la convention collective applicable*, il est vivement recommandé de demander à
tout le moins les extraits de convention collective visée dans les moyens
des parties. En effet, une fois le
délibéré commencé, les conseillers
prud’hommes ne peuvent pas sortir pour aller chercher les éléments
conventionnels dont ils ont besoin
pour statuer sur l’affaire.
La Cour de cassation a de plus estimé que « si le juge n’est pas tenu
de rechercher s’il existe un accord
d’entreprise applicable au contrat
de travail qui lui est soumis, il
doit, lorsqu’une partie invoque un
accord d’entreprise précis se procurer par tous moyens ce texte qui
contient la règle de droit éventuellement applicable au litige, au besoin en invitant les parties à lui en
faire parvenir un exemplaire »**
--------------------------------------------------------------------* Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 5 octobre 1993, n° 89-41.644
** Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 3 mai 2007, n° 05-43.863
73
Guide CFE-CGC de la prud’homie
Il est important de préciser que comme
corollaire à ce principe d’oralité, l’immunité est accordée aux discours prononcés et aux écrits produits devant les tribunaux236, dès lors qu’ils ne dépassent
pas les limites d’une défense légitime237.
3.Le principe de gratuité
a) La gratuité des actes judiciaires Les frais de procédure devant le
conseil de prud'hommes, comme
devant les autres juridictions, étaient
jusqu'en octobre 2011 gratuits. Désormais, depuis le décret n° 2011-1202
du 28 septembre 2011 qui fixe les
modalités de mise en œuvre du « droit
au timbre » prévu par l’article 54 de
la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011
de finances rectificative pour 2011, le
justiciable qui désire intenter une action devant le conseil de prud’hommes
devra s’acquitter d’une contribution de
35 euros. Le texte rappelle que son
paiement est une condition de recevabilité de la demande.
236 Article 41 de la loi du 29 juillet 1881
237 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 15 novembre 1990, n° 87-45.862
74
Pour la CFE-CGC, cette taxe de
35 euros entrave l’accès au juge
et est source d’inéquité en pesant
uniformément sur l’ensemble des
justiciables, sans tenir compte ni de
la nature des droits qu’ils cherchent
à faire valoir ni de la situation des
citoyens « moins égaux que les
autres » lorsqu’ils sont placés en
situation d’infériorité objective dans
certains contentieux.
C'est une taxe injuste pour le justiciable qui doit se défendre dans sa
vie professionnelle :
• Est-il équitable que les salariés,
demandeurs dans 99 % des
contentieux devant les conseils
de prud’hommes, soient désormais contraints d’acquitter
une taxe dissuasive dont les
employeurs, pour leur part,
n’auront pas à faire l’avance ?
• Est-il admissible que le projet
de décret fasse du juge le collecteur de l’impôt en confiant
à lui seul le soin de soulever
d’office cette irrecevabilité,
condamnant définitivement le
salarié à renoncer à tous ses
droits, quels qu’ils soient ?
• Est-il sensé d’exiger le règlement de ces 35 euros dans les
procédures de référé, pour des
demandes de communication
de bulletins de paye ou de
documents de fin de contrat ?
Guide CFE-CGC de la prud’homie
N’est-il pas anti-démocratique de
faire payer aux électeurs 35 euros
le droit de contester les résultats
d’une élection professionnelle devant le tribunal d’instance ?
Cette taxe se cumulera avec
une autre taxe de 150 euros
qui devra être payée devant les
cours d’appel dans le cadre des
contentieux soumis à la représentation obligatoire pour financer,
cette fois, la suppression de la
profession d’avoué et son indemnisation : là encore les pouvoirs
publics n’entendent pas assumer
les réformes du monde judiciaire
et se déchargent de leur financement sur les justiciables.
La CFE-CGC a donc saisi les parlementaires pour que des amendements soient déposés en vue de
l’annulation de ce décret.
Notre action syndicale commence
à porter ses fruits. En effet, la commission des finances du Sénat,
réunie le 16 novembre 2011, a
examiné les crédits de la mission
« justice » et a adopté à cette occasion un amendement de suppression de la contribution pour l’aide
juridique qui a été instauré par
l’article 54 de la loi n°2011-900
du 29 juillet 2011 de finances rectificatives pour 2011.
Nous vous tiendrons bien évidemment informés des suites de notre
action via notamment notre site
Internet
En revanche, aucun frais d'enregistrement et de timbre n'a à être payé par le
justiciable pour les actes de procédure,
les jugements et les actes nécessaires à
leur exécution238.
Par ailleurs, une copie certifiée
conforme, un extrait ou un certificat,
ainsi que, si besoin est, une copie certifiée conforme, revêtue de la formule
exécutoire, surnommée « grosse», sont
délivrés gratuitement à chacune des
parties concernées pour toute décision
rendue et pour tout acte établi par le
secrétariat-greffe.
b) Les frais sont, en principe, à la
charge des parties
Si les fonctions de conseiller prud'homme
sont gratuites vis-à-vis des parties239, certains frais peuvent rester néanmoins à la
charge de celles-ci tels que :
• les honoraires d’avocats ;
• les frais d’huissier de justice240 ;
• les frais d’expert241 ;
• les
indemnités
témoins242;
versées
aux
• les amendes civiles pour abus de
procédure et dommages et intérêts
éventuels243.
238 Articles 1089 A et 1089 B du Code général
des impôts
239 Article L. 1442-8 du Code du travail
240 Article R. 1423-53 du Code du travail
241 Articles 724 et 725 du Code de procédure
civile
242 Article R. 1423-54 du Code du travail
243 Articles 32-1, 559 et 581 du Code de procédure civile
75
Guide CFE-CGC de la prud’homie
c) Les dépens 244
Les frais d’huissier, d’experts et les
indemnités des témoins, constituant les
dépens, peuvent être payés par la partie adverse, dès lors que la partie gagnante le demande, sauf si le juge met
la totalité ou une fraction des dépens
à la charge de la partie ayant obtenu
gain de cause245.
De plus, le Code de procédure civile246 prévoit que dans toutes les
instances, le juge peut condamner la
partie tenue aux dépens ou, à défaut,
la partie perdante, à payer à l’autre
partie la somme qu’il détermine, au
titre des frais exposés et non compris
dans les dépens. Il s’agit notamment
des frais d’avocat engagés du fait de
la procédure.
Dans ce cas, le juge tient compte de
l’équité ou de la situation économique
de la partie condamnée. Il peut, même
d’office, si la situation économique le
légitime, dire qu’il n’y a pas lieu à cette
condamnation.
La personne condamnée, au titre de
l’article 700 du Code de procédure
civile pourra notamment être amenée
à payer les honoraires d’avocats de la
partie adverse.
d) L’aide juridique
La loi du 18 décembre 1998 a réformé
le dispositif d’aide juridique mis en
place par la loi du 10 juillet 1991 afin
244 Article 700 du Code de procédure civile 245 Articles 695 et 696 du Code de procédure
civile
246 Article 700 du Code de procédure civile
76
de favoriser la résolution amiable des
litiges.
Elle comprend :
• une aide « à l’accès au droit » qui
permet de bénéficier de consultations juridiques ou d’assistance en
dehors de tout procès. Les modalités
de mise en œuvre de cette aide sont
déterminées dans chaque département par un conseil départemental
de l’aide247 ;
• l’aide juridictionnelle, qui s’est substituée à l’aide judiciaire créée par
une loi de 1972, permet aux personnes dont les ressources sont inférieures à certains plafonds légaux,
de faire valoir leurs droits en justice
en étant partiellement ou totalement
exonérées des frais de justice, à
savoir des frais de procédure et
des honoraires ou émoluments des
différentes personnes intervenant en
cours d’instance.
On notera que le décret du
15 mars 2011 et la circulaire du
11 avril 2011248 ont également réformé
l’aide juridictionnelle en supprimant de
la prise en charge par l’État les droits
de plaidoirie pour les missions d’aide
juridictionnelle, et sont donc désormais
à la charge des justiciables (cette taxe
s’élevait en 2011 à 8,84 euros).
247 Circulaire du 12 mars 1992, publié au JO
du 8 avril 1992
248 Circulaire du 11 avril 2011 relative à la
présentation des dispositions de la loi de
finances pour 2011 et du décret du 15 mars
2011 relatives à l’aide juridictionnelle
Guide CFE-CGC de la prud’homie
Qui peut bénéficier de l’aide juridictionnelle ?
• Les demandeurs ou défendeurs, personnes physiques :
--
de nationalité française ;
--
ressortissant d’un État-membre de
l’Union européenne ;
--
non-ressortissants de l’Union européenne, dès lors qu’ils résident
habituellement et régulièrement en
France ;
--
étrangers bénéficiant d’une convention internationale sur l’aide juridictionnelle ;
--
de nationalité étrangère, sans
condition de résidence, lorsqu’ils
sont mineurs, témoins assistés, inculpés, prévenus, accusés, condamnés
ou parties civiles ainsi qu’aux personnes faisant l’objet de l’une des
procédures prévues par le code de
l’entrée et du séjour des étrangers et
du droit d’asile.
• Les demandeurs ou défendeurs personnes morales à but non lucratif
ayant leur siège en France.
Quelles sont les conditions pour
bénéficier de cette aide ?
Des conditions liées aux ressources
L’aide juridictionnelle est accordée sous
condition de ressources.
Cette aide peut être accordée pour
toutes les actions intentées devant toute
juridiction qu’elles aient pour but d’attaquer ou de défendre ou encore de faire
exécuter un jugement déjà rendu.
Le bénéfice de l’aide juridictionnelle est
soumis à une condition de ressources,
qui déterminera si l’aide est totale ou
partielle. Pour calculer les ressources
du demandeur de l’aide juridictionnelle, une moyenne des ressources
mensuelles de la dernière année civile
est effectuée, afin de déterminer si ce
montant dépasse ou non les plafonds légaux. Dans ces ressources sont compris
les revenus du travail, les loyers, rentes,
retraites et pensions alimentaires du
demandeur ainsi que celles du conjoint
et des personnes vivant habituellement
à son foyer
Afin d’apprécier les ressources du prétendant à l’aide juridictionnelle, les ressources du conjoint, du concubin ou du
partenaire lié par un pacte civil de solidarité (PACS) ainsi que celles des autres
personnes vivant habituellement au foyer
du demandeur sont prises en compte.
Pour une personne seule, en 2011, les
revenus mensuels 2010 devaient être
inférieurs ou égaux à 929 euros. Par
contre, cette aide juridictionnelle est partielle pour des revenus mensuels 2010
compris entre 930 et 1 393 euros. À
noter que ces plafonds de ressources
sont majorés en fonction du nombre de
personnes à charge (167 euros pour
chacune des 2 premières personnes à
77
Guide CFE-CGC de la prud’homie
charge et 106 euros pour la troisième
personne à charge et les suivantes).
Les prestations familiales, l’aide personnalisée au logement (APL), l’allocation
de logement sociale (ALS) et certaines
prestations sociales ne sont pas prises
en considération pour ce calcul.
Néanmoins, par exception, il arrive que
le bureau d’aide juridictionnelle, accorde l’aide judiciaire à des requérants
dont les ressources dépassent les plafonds mentionnés ci-dessus lorsque leur
situation apparaît particulièrement digne
d’intérêt au regard de l’objet du litige ou
des charges prévisibles du procès.
Des conditions liées à l’action en justice
intentée
Le bureau d’aide juridictionnelle est compétent pour se prononcer sur les demandes
présentées devant les juridictions du premier et second degré. En revanche, les
demandes concernant un procès engagé
devant la Cour de cassation ou le Conseil
d’État sont instruites par les bureaux d’aide
juridictionnelle spécifiques à ces instances.
Le requérant à l’aide juridictionnelle
doit joindre à sa requête les pièces justifiant de ses ressources.
Le bénéficiaire de l’aide juridictionnelle a le droit de choisir son avocat.
Cependant, si l’avocat refuse ou que
le demandeur n’a pas fait de choix, la
désignation est faite par le bâtonnier.
Pour bénéficier de l’aide juridictionnelle,
il ne faut pas que l’action en justice soit
irrecevable ou dénuée de fondement.
B.Comment se déroule l’action
en justice devant le conseil de
prud’homme ?
Elle peut être refusée devant la Cour de
cassation si le demandeur ne se prévaut
d’aucun moyen de cassation sérieux.
1.Les parties au litige
À qui s’adresser pour obtenir
l’aide juridictionnelle ?
La demande d’aide juridictionnelle est
instruite par le bureau d’aide juridictionnelle établi au siège du tribunal de
grande instance dans le ressort duquel
se situe le domicile du demandeur de
l’aide. Sa décision peut faire l’objet
d’un recours.
Il est important de noter que cette demande d’aide juridictionnelle peut être
introduite à tout stade de la procédure.
L’action est le droit, pour l’auteur d’une
prétention, d’être entendu sur le fond de
celle-ci afin que le juge la dise bien ou
mal fondée. Pour l’adversaire, l’action
est le droit de discuter le bien-fondé de
cette prétention249.
Qui sont les auteurs de ces actions devant le conseil des prud’hommes ?
a) Les personnes physiques
Les salariés et les employeurs
Les litiges traités par le conseil de
prud’hommes concernent des salariés
249 Article 30 du Code de procédure civile
78
Guide CFE-CGC de la prud’homie
et des employeurs ou les représentants
de ces derniers. Les litiges peuvent aussi être nés entre salariés250.
Que se passe-t-il en cas de décès
d’une des parties ?
En cas de décès de l’employeur, son
héritier peut être convoqué devant le
conseil de prud’hommes et devoir assumer les obligations nées du contrat
de travail antérieurement au décès251
(S’agissant en l’espèce du droit à l’indemnité compensatrice de préavis restant due par son légataire universel au
salarié après le décès de l’employeur).
En cas de décès du salarié, ses ayantsdroits peuvent agir en justice et devenir
créanciers de l’employeur.
b) Les personnes morales
L’entreprise
Lorsque l’entreprise est une personne
morale, l’employeur est son représentant légal. Il s’agit par exemple du gérant de la SARL (Société à Responsabilité Limitée). Le représentant légal d’une
SA (Société Anonyme) est son PDG
(Président Directeur Général), voire son
directeur général ou son président du
conseil d’administration252.
Dans tous les cas, les statuts d’une
société peuvent prévoir quels membres
250 Articles L. 1411-1 et L. 1411-3 du Code du
travail
251 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 10 février 1982, n° 80-40.044
252 Arrêt de l’assemblée plénière de la Cour de cassation du 18 novembre 1994, n° 90-44.754
de la direction sont habilités à agir en
justice au nom de l’entreprise253.
Les organisations syndicales
En principe, les syndicats professionnels ne sont pas autorisés à agir en défense de leurs intérêts devant le conseil
de prud’hommes.
En revanche, ils peuvent intervenir à un
procès dans lequel des salariés sont engagés, dès lors qu’il a été porté atteinte
à l’intérêt collectif de la profession
(cf. infra inapplication d’une convention ou d’un accord collectif)254.
De plus, si le salarié ne s’y oppose pas,
une organisation syndicale représentative peut agir en justice en ses lieux et
place, sans avoir à justifier d’un mandat, dès lors que certains sujets sont
concernés255.
Ainsi, les organisations syndicales représentatives peuvent saisir le conseil
de prud’hommes :
• contre un employeur qui a procédé à un licenciement pour motif
économique256 ;
253 Articles L. 1411-1 et R. 1453-2 du Code du
travail
254 Article L. 2132-3 du Code du travail
255 Notamment le travail à domicile (article R.
7423-2 du Code du travail), le travail temporaire (articles L. 1247-1, L. 1251-59, L. 82331 et L. 8242-1 du Code du travail), travailleurs
étrangers en situation irrégulière (article L.
8255-1 du Code du travail), discrimination
(article L. 1134-2 du Code du travail), le harcèlement moral et sexuel dans les relations de
travail (article L. 1154-2 du Code du travail).
256 Article L. 1235-8 du Code du travail
79
Guide CFE-CGC de la prud’homie
• pour demander la requalification
d’un contrat à durée déterminée en
contrat à durée indéterminée257 ;
• pour contester une inégalité professionnelle entre les hommes et les
femmes258 ;
• pour contester l’inapplication d’une
convention ou d’un accord collectif,
même non étendu259 ;
• en raison de la violation de dispositions légales ou conventionnelles260 ;
• en se prévalant d’un préjudice contre
l’intérêt collectif de la profession ;
• en cas de prêt de main-d’œuvre
illicite261.
Les délégués du personnel
Les délégués du personnel peuvent saisir directement le bureau de jugement
dans certaines hypothèses mais selon
une procédure particulière.
Tout d’abord, le délégué du personnel
doit constater, notamment par l’intermédiaire d’un salarié, qu’il existe une
atteinte aux droits des personnes, à leur
santé physique et mentale ou aux libertés individuelles dans l’entreprise qui ne
serait pas justifiée par la nature de la
tâche à accomplir, ni proportionnée au
but recherché.
Il doit, dès lors, en saisir immédiatement l’employeur.
257 Article L. 1247-1 du Code du travail
258 Article L. 1144-2 du Code du travail
259 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 16 janvier 2008, n°07-10.095
260 Articles L. 2262-9, L. 2262-10, L. 2262-11
du Code du travail
261 Article L. 8233-1 du Code du travail
80
Cette atteinte peut notamment résulter
de toute mesure discriminatoire en matière d’embauche, de rémunération, de
formation, de reclassement, d’affectation, de classification, de qualification,
de promotion professionnelle, de mutation, de renouvellement de contrat, de
sanction ou de licenciement.
L’employeur doit alors procéder sans
délai à une enquête avec le délégué
du personnel et prendre les dispositions nécessaires pour remédier à cette
situation.
En cas de carence de l’employeur ou
de divergence sur la réalité de cette
atteinte, et à défaut de solution trouvée
avec l’employeur, le salarié, ou le délégué du personnel si le salarié intéressé
averti par écrit ne s’y oppose pas, saisit
le bureau de jugement du conseil de
prud’hommes qui statue selon la forme
des référés.
Le juge peut ordonner toutes mesures
propres à faire cesser cette atteinte
et assortir sa décision d’une astreinte
civile qui sera liquidée au profit du
Trésor262.
Les autres personnes morales Dès lors qu’un organisme, par exemple
l’Association pour la gestion du régime
d’assurance des créances des salariés
(AGS), se substitue régulièrement aux
obligations légales de l’employeur, il
peut être mis en cause aux côtés de
ce dernier, en cas de litige entre l’employeur et les salariés qu’il emploie.
262 Article L. 2313-2 du Code du travail Guide CFE-CGC de la prud’homie
2.La saisine du
prud’hommes
conseil
de
de la séance de conciliation verbalement lors de la présentation de la demande ou par lettre266.
Le conseil de prud’hommes est saisi soit
par une demande, soit par la présentation volontaire des parties devant le
bureau de conciliation263.
À la suite de cette saisine, le greffe
convoque le défendeur devant le bureau de conciliation par lettre recommandée avec accusé de réception267.
La demande peut être déposée au greffe
du conseil de prud’hommes ou lui être
adressée par lettre recommandée.
3.La demande en justice
La demande précise :
• l’identité du demandeur et du
défendeur ;
• tous les chefs de demande ;
• pour les personnes physiques : l’indication des nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et
lieu de naissance du demandeur ;
• pour les personnes morales : l’indication de leur forme, leur dénomination, leur siège social et de l’organe
qui les représente légalement ;
• l’indication des nom, prénoms et
domicile de la personne contre
laquelle la demande est formée, ou,
s’il s’agit d’une personne morale,
de sa dénomination et de son siège
social ;
• l’objet de la demande ;
• la date ;
• la signature du demandeur264.
Un récépissé est délivré ou envoyé
immédiatement au demandeur265. Le
greffe l’informe des lieu, jour et heure
263 Article R. 1452-1 du Code du travail
264 Article 58 du Code de procédure civile
265 Article R. 1452-2 du Code du travail
a) La demande initiale
La demande initiale introduit l’instance268. C’est par cette demande que
le plaideur prend l’initiative d’un procès
en soumettant au juge ses prétentions.
La jurisprudence est venue apporter une
condition supplémentaire : elle doit être
suffisamment précise269. En effet, la Cour
a été amenée à juger dans cette affaire
que l’énoncé, dans la saisine d’un conseil
de prud’hommes, des termes : « litige
entre licenciement et démission », ne
constituait pas une prétention et que, dès
lors, l’action intentée devant le conseil de
prud’hommes était irrecevable.
b) La demande reconventionnelle et
les demandes incidentes
La demande reconventionnelle fait partie des demandes dites « incidentes »
prévues par l’article 63 et suivants
du Code de procédure civile. Il existe
également la demande additionnelle et
l’intervention.
266
267
268
269
Article R. 1452-3 du Code du travail
Article R. 1452-4 du Code du travail
Article 53 du Code de procédure civile
Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 10 juillet 1996, n°93-40.392
81
Guide CFE-CGC de la prud’homie
La demande reconventionnelle est selon les dispositions du code, celle par
laquelle le défendeur originaire prétend
obtenir un avantage autre que le simple
rejet de la prétention de son adversaire270. C’est-à-dire que le défendeur à
l’instance se porte lui-même demandeur
contre le requérant.
La demande additionnelle est celle par
laquelle une partie modifie ses prétentions antérieures.
Enfin, l’intervention est constituée par
une demande dont l’objet est d’introduire un tiers au procès engagé par les
deux parties en présence.
Cette intervention peut être volontaire
si elle émane du tiers désirant intervenir, ou forcée, lorsque le tiers est mis en
cause par une partie.
c) La modification des demandes
Les demandes devant le conseil de
prud’hommes et la Cour d’appel
peuvent être modifiées, à tout moment,
dès lors que le principe du contradictoire est respecté271.
Dans cette hypothèse, il n’est pas nécessaire de passer à nouveau devant le
bureau de conciliation272.
De plus, le demandeur ou le défendeur
peuvent ajouter de nouvelles demandes,
appelées demandes additionnelles.
Les parties doivent reprendre dans leurs
nouvelles conclusions toutes les demandes
270 Article 64 du Code de procédure civile
271 Article R. 1452-7 du Code du travail
272 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 17 décembre 1992, n° 89-41.346
82
sur lesquelles elles veulent se fonder, sinon
elles sont présumées y avoir renoncé273.
d) L’influence de la demande
sur la décision du conseil de
prud’hommes
Le conseil de prud’hommes est lié par
la demande : en effet, les conseillers
prud’hommes ne peuvent pas statuer
ultra petita, c’est-à-dire décider de donner plus que ce qui est demandé, et
doivent examiner tous les chefs de la
demande274, sans les modifier275.
Les conseillers prud’hommes ne peuvent
donc pas condamner une partie, contre
laquelle aucun reproche n’a été fait
dans la demande.
e) En pratique
Dans 95 % des litiges, le salarié est
demandeur (dans plus de huit cas sur
dix à l’issue de la rupture du contrat de
travail). 50% des affaires concernent la
rupture du contrat de travail et 40% le
règlement des salaires.
Souvent, afin de hiérarchiser les chefs
de demande, la présentation de la
demande d’une partie est formulée de
la manière suivante : À titre principal ;
À titre subsidiaire ; À titre plus subsidiaire ; À titre plus subsidiaire encore ;
À titre infiniment plus subsidiaire.
273 Arrêt de la première chambre civile de la
Cour de cassation du 17 octobre 2007,
n° 06-15.565
274 Article 4 du Code de procédure civile et
l’arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 17 mars 1996, n° 93-42.660
275 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 23 février 2005, n° 02-42.552
Guide CFE-CGC de la prud’homie
4.Les conditions d’exercice de l’action
a) La capacité d’agir en justice
Seules les personnes majeures peuvent
librement ester en justice.
Le mineur
Le mineur est normalement incapable
d’agir en justice, sauf s’il a été émancipé.
Cependant, les mineurs qui ne peuvent
être assistés de leur père, mère ou tuteur
peuvent être autorisés par le conseil de
prud’hommes à agir devant lui276.
Le majeur incapable
La liberté d’agir en justice d’une
personne majeure peut être limitée
lorsque l’état de santé ou l’altération
de ses facultés mentales nécessite une
protection spécifique. Trois mesures
peuvent être mises en place par le juge
des tutelles :
Il existe trois régimes principaux
destinés à assurer la protection des
majeurs :
• La sauvegarde de justice, instituée à
titre provisoire préalablement à l’organisation d’un régime de protection durable ou mise en œuvre pour
le majeur atteint d’une altération provisoire de ses facultés personnelles ;
• La tutelle, pour le majeur qui doit
être représenté de façon continue
dans la plupart des actes de la vie
civile ;
276 Article L. 1453-1 du Code du travail
• La curatelle, pour le majeur qui a
seulement besoin d’être assisté
et contrôlé dans les actes les plus
importants de la vie civile.
Pour des informations plus précises
sur les différents actes que peuvent
notamment accomplir les majeurs incapables sous curatelle et sous tutelle, il
convient de se reporter au décret du
22 décembre 2008277 qui précise en
annexe les actes qui nécessitent l’aide
du curateur, ceux que le tuteur peut
faire seul, et ceux qui nécessitent l’autorisation du juge des tutelles.
Les dispositions communes aux
incapables
Les incapables (mineurs non émancipés
ou majeurs incapables) ne peuvent pas
agir en justice mais bénéficient de la
capacité de jouissance des droits.
Seuls les représentants des incapables
peuvent agir en justice.
Les autres hypothèses d’interdiction d’agir en justice
Certaines peines s’accompagnent de
l’interdiction d’agir en justice.
Par ailleurs, l’employeur soumis à une
liquidation judiciaire perd le droit
d’agir en justice, cette capacité étant
dévolue au liquidateur judiciaire.
277 Décret n° 2008-1484 du 22 décembre 2008
relatif aux actes de gestion du patrimoine des
personnes placées en curatelle ou en tutelle,
et pris en application des articles 452, 496
et 502 du code civil
83
Guide CFE-CGC de la prud’homie
Les conséquences de l’incapacité
sur la validité de la demande en
justice
La validité de la demande en justice est
remise en cause lorsque la personne
qui agit n'a pas la capacité de le faire
ou est atteinte d’une incapacité d'exercice, ou lorsque le représentant d'une
partie, qui a agit en son nom, n'avait
pas le pouvoir de le faire278.
b) La qualité pour agir
L'action est ouverte à tous ceux qui ont
un intérêt légitime au succès ou au rejet
d'une prétention.
Le législateur a prévu des cas spécifiques en attribuant le droit d’agir à
certaines personnes pouvant élever ou
combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé279.
La qualité permet d'exiger du juge qu'il
statue sur le litige. Elle appartient uniquement à celui qui a un droit.
Toute prétention émise par ou contre
une personne dépourvue du droit
d'agir est irrecevable280.
c) L'intérêt à agir
Un ancien adage disait « pas d'intérêt,
pas d'action ». Cet intérêt qui peut être
pécuniaire, matériel (par exemple, délivrance d'un document) ou moral doit
être, selon l'article 31 du Code de procédure civile, légitime. La jurisprudence
est venue apporter des précisions com278 Article 117 du Code de procédure civile
279 Article 31 du Code de procédure civile
280 Article 32 du Code de procédure civile
84
plémentaires en précisant que cet intérêt
devait également être personnel, concret,
né et actuel. Concernant le caractère
d’actualité de l’intérêt à agir, la jurisprudence a par exemple considéré que celui
qui n’exerce plus son activité professionnelle et a cédé son cabinet est sans intérêt à demander la fermeture du cabinet
qu’a ensuite ouvert un ancien salarié au
mépris d’une clause de non concurrence.
La saisine du juge est justifiée par une
violation d’une disposition du Code du
travail, de la convention collective ou
du contrat de travail. Elle ne doit pas
être contraire à l'ordre public et aux
bonnes moeurs, et nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude (« nemo
auditur propriam turpitudinem allegans »). Cela signifie que nul ne peut
réclamer justice si le dommage qu’il subit est le produit de ses actions menées
illicitement ou illégalement.
La violation du droit doit être réellement
intervenue et ledit droit ne doit pas être
éventuel. Cependant, la formation de
référé du conseil de prud'hommes peut
agir pour prévenir un trouble imminent281.
L’action en justice est, en général, facultative et libre. Cela signifie que celui
qui a un droit n'est pas obligé de s'en
prévaloir en justice et que le fait d'agir
en justice n'est pas une faute, même
lorsque la personne perd son procès.
Cependant, celui qui commet une faute
caractérisée dans l'utilisation des voies
de droit se verra appliquer la théorie de
l'abus de droit. Ainsi, la sanction d'un
tel abus, en cas de manoeuvres dila281 Article R. 1455-6 du Code du travail
Guide CFE-CGC de la prud’homie
toires ou abusives, qui causent un préjudice à l'adversaire, est une amende civile d’un maximum de 3 000 euros (en
2011), sans préjudice des dommagesintérêts qui peuvent être réclamés 282.
Attention : l’envoi d’une mise en demeure avec accusé de réception à
l’employeur ne suffit pas à interrompre
la prescription, seule la saisine de la
juridiction peut l’interrompre.
5.Les conditions de recevabilité de
l'action
Bien que la prescription quinquennale
soit le principe en matière prud’homale, il existe quelques exceptions, et
notamment :
Pour qu’une demande soit recevable,
elle ne doit pas avoir été jugée en dernier recours.
a) La prescription
La Loi n°2008-561 du 17 juin 2008
portant réforme de la prescription en
matière civile a uniformisé les délais
d’action en matière prud’homale.
Ainsi, la prescription est de cinq ans en
matière de salaires283 et de ses accessoires. Se prescrivent par cinq ans les
actions visant tout ce qui est payable
par année ou à des termes périodiques
plus courts.
Le point de départ de la prescription
commence à courir au « jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû
connaître les faits »284.
La prescription est acquise lorsque le
dernier jour du terme est accompli285.
La saisine d’un conseil de prud’hommes
interrompt la prescription, même si cette
juridiction est incompétente.
282
283
284
285
Article 32-1 du Code de procédure civile
Article L. 3245-1 du Code du travail
Loi 2008-561 du 17 juin 2008
Art. 2229 du Code de procédure civile
• l’action en remboursement de l’allocation d’assurance chômage indûment versée se prescrit par trois
ans. En cas de fraude ou de fausse
déclaration, elle se prescrit par dix
ans286 ;
• en matière de contestation sur
la régularité d’un licenciement
économique287 :
--
délai de quinze jours pour une
action en référé portant sur la régularité de la procédure de consultation des instances représentatives
du personnel ;
--
délai de douze mois pour toute
contestation portant sur la régularité
ou la validité du licenciement.
b) Les exceptions de procédures
Les exceptions de procédures sont des
moyens soulevés par la défense, visant
à faire déclarer la procédure engagée
irrégulière ou éteinte ou à la faire suspendre. Il peut s’agir :
• d’une exception d’incompétence288 :
en cas d’exception d’incompétence
286 Article L. 5422-5 du Code du travail
287 Article L. 1235-7 du Code du travail
288 Articles 75 et suivants du Code de procédure civile
85
Guide CFE-CGC de la prud’homie
soulevée avant toute plaidoirie
lors de l’audience de jugement, si
possible, le président fera joindre
l’incident au fond. Le délibéré commencera par décider si le conseil
de prud’hommes, et la section en
cause, sont ou non compétents ;
• d’une exception de nullité289 ;
• d’une exception de connexité,
lorsqu’une autre juridiction est saisie d’un litige ayant des liens très
étroits avec l’affaire en cours.
Les exceptions doivent être soulevées
avant toute demande au fond ou
fin de non-recevoir, sinon elles sont
irrecevables290.
Cependant, l’exception de connexité
est recevable à tout stade de la procédure291.
c) La fin de non-recevoir
La fin de non-recevoir est un moyen de
défense permettant au défendeur de demander à ce que la demande soit jugée
irrecevable, sans que la demande au
fond soit directement contestée292.
Elle peut notamment être invoquée en
cas de forclusion, de défaut de qualité,
de défaut d’intérêt, de prescription, de
méconnaissance d’un délai préfix, et en
cas d’autorité de la chose jugée.
289 Articles 112 et suivants du Code de procédure civile
290 Articles R. 1451-2 du Code du travail, 73 et
74 du Code de procédure civile
291 Articles 100 et suivants du Code de procédure civile
292 Articles 122 et suivants du Code de procédure civile
86
Les fins de non-recevoir peuvent être
invoquées en tout état de cause, sauf
intention dilatoire293. Cela signifie,
qu’à l’inverse des exceptions de nullités
qui doivent être invoquées « in limine
litis » (dès le commencement du procès)
les fins de non recevoir peuvent être
invoquées :
• soit lorsque la procédure est écrite,
jusqu’à la clôture de la mise en
état ;
• soit, lorsque la procédure est orale,
jusqu’au moment où le juge déclare
que l’affaire est mise en délibéré.
Elles ne nécessitent pas la démonstration d’un grief et relèvent de la seule
compétence du juge du fond.
6.Les situations de renvois et radiations
a) Le renvoi de l’affaire Les parties à l'instance ou leurs représentants peuvent demander le renvoi de
l'affaire.
En raison du principe d'oralité et du
contradictoire, la demande de renvoi
ne peut être effectuée qu'à l'audience.
Les conseillers se prononcent immédiatement ou après une suspension
d'audience.
Cet acte d’administration judiciaire ne
peut faire l’objet d’aucun recours294.
293 Article 123 du Code de procédure civile
294 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 13 décembre 1994, n°9342.301
Guide CFE-CGC de la prud’homie
fait représenter, ou lorsque, les parties
n’ont pas accompli les injonctions qui
leur ont été faites par le juge.
Le choix d'accepter ou de refuser
le report de l'audience est une décision discrétionnaire des juges. Il
s'agit obligatoirement d'une décision collégiale majoritaire. C'est
pourquoi il est conseillé d'interrompre l'audience après l'appel
des causes pour que les conseillers
prud'hommes puissent statuer sur
la demande de renvoi.
Cette demande de renvoi doit être
justifiée. L'absence du demandeur, du
défendeur ou de l'un des représentants
ou leur négligence dans la transmission
des pièces peuvent ne pas justifier pas,
par exemple, la demande de renvoi.
Si le renvoi est accepté, la date de renvoi est immédiatement communiquée
aux parties. Si la date ne peut être fixée
immédiatement, le renvoi est effectué à
la première date disponible.
b) La radiation de l’affaire du rôle
La radiation est également une mesure
d’administration judiciaire non susceptible de recours. En cas de radiation
prononcée par le président d’audience,
l’affaire est retirée du rôle, pour être
ensuite replacée au rôle d’une autre
audience En effet, la radiation ne met
pas fin au procès.
La radiation peut être prononcée par le
juge par exemple lorsque les parties n’y
comparaissent pas ou ne s’y sont pas
7.La convocation des parties
Immédiatement après le dépôt de sa demande, le demandeur reçoit un récépissé
qui indique le numéro du dossier, la section compétente et la convocation pour
l’audience du bureau de conciliation ou
de jugement, ces documents lui étant remis par le greffe soit directement soit par
lettre simple. Dans la majorité des cas,
les parties sont convoquées en premier
lieu devant le bureau de conciliation.
Le greffe invite le demandeur à se munir
de toutes les pièces utiles
Le défendeur est ensuite convoqué devant le bureau de conciliation par lettre
recommandée avec accusé de réception, avec copie par lettre simple295. Les
mentions obligatoires suivantes doivent
être indiquées :
• les nom, profession et domicile du
demandeur ;
• les lieu, jour et heure de la séance
du bureau de conciliation à laquelle
l’affaire sera appelée ;
• les chefs de la demande ;
• le fait que des décisions exécutoires
à titre provisoire pourront même en
son absence, être prises contre lui par
le bureau de conciliation au vu des
éléments fournis par son adversaire...
Dans cette lettre, le défendeur est invité
à se munir de toutes les pièces utiles.
295 Article R. 1452-4 du Code du travail
87
Guide CFE-CGC de la prud’homie
Cette convocation, ou un document qui
lui est joint, reproduit les dispositions
des articles R. 1453-1, R. 1453-2,
R. 1454-10 et R. 1454-12 à R. 145418296 du Code du travail.
Si le défendeur ne récupère pas la lettre
recommandée, pour quelque raison que
ce soit, le demandeur doit demander à
un huissier de signifier la convocation.
La convocation du défendeur devant le
bureau de conciliation équivaut à une
citation en justice297.
La convocation fixe le point de départ
des intérêts moratoires sur les sommes
contractuellement dues réclamées en
justice.
Un principe important à ne jamais
oublier est que « Nulle partie ne peut
être jugée sans avoir été entendue ou
appelée »298.
En l’absence de conciliation ou en cas
de conciliation partielle, le bureau de
conciliation renvoie l’affaire au bureau
de jugement299 lorsque le demandeur
et le défendeur sont présents ou représentés et que l’affaire est en état d’être
jugée sans que la désignation d’un ou
deux conseillers rapporteurs ou le recours à une mesure d’instruction soient
nécessaires.
Les parties peuvent être convoquées
devant le bureau de jugement verbalement avec émargement au dossier.
Dans ce cas, un bulletin mentionnant la
296
297
298
299
88
Article R. 1452-4 du Code du travail
Article R. 1452-5 du Code du travail
Article 14 du Code de procédure civile
Articles R. 1454-17 et R. 1454-19 du Code
du travail
date de l’audience leur est remis par le
greffier.
La convocation indique :
• Les nom, profession et domicile des
parties ;
• Les lieu, jour et heure de l’audience ;
• Les points qui demeurent en litige.
La convocation des parties n’est pas
nécessaire lorsqu’elles se présentent
volontairement et de façon spontanée
en vue d’être conciliées.
8.La comparution personnelle, sauf
motif légitime
Les parties comparaissent en personne300. Cette exigence de comparution personnelle est fondamentale et
s’applique à tous les stades de la procédure (bureau de conciliation, bureau
de jugement, formation de référés) au
demandeur et au défendeur.
Cependant, si elles ont un motif reconnu comme légitime par les juges,
elles peuvent être représentées. Il peut
s’agir d’une impossibilité physique
ou morale301. La justification peut être
donnée à l’oral302 ou par écrit. Il faut
néanmoins préciser qu’en l’absence
d’écrit pour justifier de la légitimité de
l’absence, il semble difficile d’accepter
celle-ci sur la seule bonne foi de la partie qui le demande.
300 Article R. 1453-1 du Code du travail
301 Cette dernière option a été reconnue par
l’arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 14 mai 1987, n° 85-46.483
302 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 8 janvier 1981, n°79-40.307
Guide CFE-CGC de la prud’homie
Si les juges acceptent qu’une partie soit
représentée par leur avocat, de facto,
ils reconnaissent que son absence est
légitime303.
Il faut préciser que si en vertu de l’article 416 du Code de procédure civile,
l’avocat est dispensé de justifier d’un
mandat pour assister ou représenter
son client, les dispositions de l’article
R. 1454-13 du Code du travail tempère
ce principe.
En effet, cet article précise que si le
défendeur a justifié en temps utile d’un
motif légitime d’absence, il peut être représenté par un mandataire muni d’un
écrit l’autorisant à concilier pour son
nom et pour son compte.
Donc devant le bureau de conciliation,
même l’avocat doit justifier d’un écrit de
son client pour pouvoir concilier. À défaut, il sera convoqué à une prochaine
séance du bureau de conciliation.
Le bureau de jugement peut rendre un
jugement contradictoire dès lors que les
parties, bien que régulièrement convoquées, n’ont pas comparu. Il n’a pas à
rechercher s’il existe un motif légitime
de non comparution304.
Il peut aussi radier l’affaire d’office
après un dernier avis aux parties.
Cette décision n’est pas susceptible de
recours305.
303 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 26 juin 1986, n° 84-41.719
304 Articles 467 et suivants du Code de procédure civile
305 Article 470 du Code de procédure civile
9.L’assistance ou la représentation
des parties
Les employeurs et les salariés peuvent
se faire assister ou représenter par les
salariés ou les employeurs de la même
branche ou par les délégués des organisations syndicales salariées ou patronales ou par le conjoint, concubin ou
partenaire lié par un pacte civil de solidarité (PACS) ou par les avocats306.
Exception faite des avocats307, la personne qui assiste ou représente l’employeur ou le salarié doit bénéficier
d’un pouvoir spécial de la part de la
personne intéressée308. Aucun formalisme n’est exigé, mais le pouvoir doit
être précis309.
306 Article R. 1453-2 du Code du travail
307 La loi n° 2011-94 du 25 janvier 2011 portant réforme de la représentation devant les
Cours d’appel a supprimé la fonction et la
profession d’avoué. Ce texte s’applique à
compter du 1er janvier 2012.
308 Articles 414 et 416 du Code de procédure
civile
309 Arrêt de la première chambre civile de la
Cour de cassation du 23 novembre 2000,
n°99-04.183
89
Guide CFE-CGC de la prud’homie
Si la personne assurant la représentation n’a pas le pouvoir pour ce faire, il
s’agit d’une irrégularité de fond et, par
conséquent, les actes qu’elle effectue
sont nuls310.
Un conseiller prud’homme peut également représenter une partie. Toutefois
cette mission d’assistance ou de représentation ne peut pas être exercée devant la chambre, ou devant la section
lorsque cette dernière n’est pas divisée
en chambres, à laquelle il appartient.
Il ne peut pas assister ou représenter
une des parties devant la formation de
référés s’il a été désigné pour tenir des
audiences de référés311.
Le président et le vice-président du
conseil de prud’hommes ne peuvent pas
assister ou représenter les parties312.
a) Les dispositions spécifiques à
l’assistance ou la représentation
du salarié
La chambre sociale de la Cour de cassation a posé plusieurs règles concernant
l’assistance des salariés par les délégués syndicaux en estimant notamment
dans un arrêt du 16 novembre 1995
« qu’il n’est pas nécessaire que la partie assistée ou représentée soit membre
de la même organisation syndicale que
le délégué, ou même membre d’un syndicat, ni que le délégué appartienne
à la même branche d’activité que la
partie qu’il assiste ou représente ;
qu’en outre, aucune limite territoriale
310 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 5 mars 1992, n° 88-45.188
311 Article L. 1453-2 du Code du travail
312 Article L. 1453-3 du Code du travail
90
n’est fixée par l’article R. 516-5 (actuel
article R. 1453-2) du Code du travail
pour l’activité des délégués313 ».
La Haute juridiction a également indiqué que le salarié assisté ou représenté
par un délégué d’une organisation syndicale peut ne pas être syndiqué314.
Les unions régionales et les unions
départementales doivent s’assurer
que le mandat qu’elles donnent
à leurs défenseurs syndicaux
est précis (cf. annexe 10 p 153
modèle de mandat CFE-CGC) et
qu’un pouvoir a été donné par le
salarié à l’organisation syndicale
ou à l’un de ses membres pour
représenter le salarié à l’audience
(cf. annexe 11 p 154 modèle de
pouvoir).
b) Les dispositions spécifiques à l’assistance ou la représentation de
l’employeur L’employeur peut aussi se faire assister
ou représenter par un membre de l’entreprise ou de l’établissement315.
313 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 16 novembre 1995, n°94-40.381
314 Article R. 1453-2 du Code du travail
315 Article R. 1453-2 du Code du travail
Guide CFE-CGC de la prud’homie
C.Comment se déroule l’audience de conciliation ?
xième cas les points résolus et ceux restants
en suspens, ainsi que si l’exécution partielle ou totale de la décision a eu lieu319.
1.La procédure de conciliation
Si l’une des parties ne respecte pas
l’accord de conciliation, sa responsabilité civile peut être engagée devant le
bureau de jugement. En l’absence de
conciliation, le procès-verbal indique
les prétentions qui restent contestées et
les déclarations des parties320.
Cette partie reprend et complète les développements de la partie 1 du guide
sur la conciliation que vous trouverez
en page 33 et suivantes.
La procédure de conciliation, spécificité
du conseil de prud’hommes, est fondamentale car elle permet d’essayer de résoudre le différend par le dialogue plutôt
que par une procédure judiciaire visant
à aboutir à la condamnation d’une des
parties. Le bureau de conciliation essaie
de concilier les parties après avoir
entendu leurs explications316. Il s’agit
d’un acte judiciaire317. Les juges doivent
notamment vérifier que les parties sont
informées de leurs droits respectifs.
Lorsque ce n’est pas le cas, le procès-verbal est nul et le conseil de prud’hommes
peut être saisi par la partie qui s’estime
lésée318.
L’audience de conciliation peut aboutir à
une conciliation totale ou partielle ou à une
absence de conciliation. Si les parties parviennent à un accord total, la conciliation
met fin au litige. Mais si la conciliation n’est
que partielle, les points restants en conflit
doivent être soumis au bureau de jugement.
Le procès-verbal précise s’il y a eu conciliation totale ou partielle, et dans ce deu316 Article R. 1454-10 du Code du travail
317 Articles L. 1411-1, R. 1454-10 et R. 1454-11
du Code du travail
318 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 28 mars 2000, n° 97-42.419
Il est particulièrement utile que le
procès-verbal de conciliation partielle ou de non conciliation indique
les dates de dépôt des conclusions
du demandeur, du défendeur et
éventuellement des conclusions responsives des parties, afin d’éviter
les reports d’audience (cf. annexes
3 p 146 et 4 p 147).
De plus, les conseillers prud’hommes
doivent s’assurer que les parties
ont bien signé le procès-verbal de
conciliation totale ou partielle ou
de non-conciliation afin d’éviter
toute contestation ultérieure.
Si l’affaire est en état d’être jugée immédiatement et que les circonstances
le permettent, le bureau de conciliation
peut, avec l’accord de toutes les parties, les faire comparaître immédiatement devant le bureau de jugement321.
319 Article R. 1454-10 du Code du travail
320 Article R. 1454-10 du Code du travail
321 Article R. 1454-17 du Code du travail
91
Guide CFE-CGC de la prud’homie
2. Les pouvoirs du bureau
de conciliation
Le bureau de conciliation peut, en dépit de toute exception de procédure et
même si le défendeur ne se présente
pas, prendre quatre mesures provisoires par ordonnance.
Il peut ainsi :
• ordonner la délivrance de documents au salarié (certificats de travail, bulletins de paie, attestation
d’assurance chômage et toutes
pièces que l’employeur est tenue
légalement de délivrer). Cette
ordonnance peut être prononcée
sous peine d’astreinte civile, c’està-dire accompagnée d’une sanction
pécuniaire en général par jour de
retard au delà des délais fixés par
le juge pour exécuter l’ordonnance.
La Cour de cassation a d’ailleurs
décidé que l’employeur ne pouvait
pas se prévaloir d’une contestation
sérieuse à l’encontre d’une décision du
bureau de conciliation ordonnant la
délivrance d’un certificat de travail322 ;
• ordonner, lorsque l’existence de
l’obligation n’est pas sérieusement
contestable :
-
le versement de provisions sur les
salaires323 et accessoires du salaire
ainsi que les commissions,
-
le versement de provisions sur les
indemnités de congés payés, de
préavis et de licenciement,
322 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 10 octobre 1985, n°83-45.693
323 Article R. 1454-14 du Code du travail
92
-
le versement de l’indemnité compensatrice et de l’indemnité spéciale de
licenciement en cas d’inaptitude
médicale consécutive à un accident du travail ou à une maladie
professionnelle324,
-
le versement de l’indemnité de fin
de contrat à durée déterminée325 et
de l’indemnité de fin de mission de
travail temporaire326 ,
• ordonner toutes mesures d’instruction, même d’office ;
• ordonner toutes mesures nécessaires à la conservation des preuves
ou des objets litigieux.
Le bureau de conciliation peut également, afin de mettre l’affaire en l’état
d’être jugée, désigner des conseillers
rapporteurs327.
En cas d’ordonnance de versement de
provisions, le bureau de conciliation
fixe le montant de celui-ci qui ne peut
excéder six mois de salaire, calculé sur
324
325
326
327
Article
Article
Article
Article
L. 1226-14 du Code du travail
L. 1243-8 du Code du travail
L. 1251-32 du Code du travail
R. 1454-1 du Code du travail
Guide CFE-CGC de la prud’homie
la moyenne des trois derniers mois328.
Dans cette limite, le bureau de conciliation peut fixer le montant de la provision à celui de la demande329.
Cependant, la Cour de cassation admet
l’appel immédiat de certaines décisions
et mesures335.
Si l’employeur n’exécute pas l’ordonnance du bureau de conciliation, c’est
ce même bureau qui doit être saisi par
le salarié pour obtenir le paiement330.
3.L’absence des parties Certaines mesures prises par le bureau
de conciliation331 sont exécutoires immédiatement, soit dès leur notification
aux parties, soit immédiatement après
la prise de décision (notamment en ce
qui concerne le versement de provisions
qui est souvent fait lors de l’audience).
Ces mesures sont également provisoires, le bureau de jugement pouvant
revenir sur la décision du bureau de
conciliation, qui n’a pas l’autorité de
la chose jugée au principal332. Ces
mesures sont dîtes exécutoires « par
provision ».
Ces décisions ne peuvent pas faire l’objet d’opposition. Elles ne peuvent être
frappées d’appel ou de pourvoi en cassation que concomitamment à la remise
en cause du jugement au fond333, cette
solution étant appliquée strictement par
la Cour de cassation334.
328 Articles R. 1454-14 et R. 1454-15 du Code
du travail
329 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 16 décembre 1982, n° 80-41.664
330 Article R. 1454-15 du Code du travail
331 Articles R. 1454-14 et R. 1454-15 du Code
du travail
332 Article R. 1454-16 du Code du travail
333 Article R. 1454-16 du Code du travail
334 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 2 mai 2001, n°98-45.541
Si le demandeur ne comparaît pas sans
motif légitime, le bureau de conciliation
peut déclarer la demande et la citation
caduques336.
Cependant, cette sanction n’est pas
encourue si le demandeur, absent pour
un motif légitime, est représenté par un
mandataire habilité.
Le demandeur ne pourra réitérer sa
demande qu’une seule fois, sauf si le
bureau de conciliation, constate qu’il
n’a pas pu comparaître ou être représenté lors de sa deuxième demande du
fait d’un cas fortuit.
En ce qui concerne la présence du
défendeur, si ce dernier ne comparaît
pas, le bureau de conciliation peut
ordonner la délivrance de documents
sous astreinte civile, le versement de
provisions, la conservation des preuves
et des mesures d’instructions337.
De plus, en l’absence du défendeur, le
bureau de conciliation peut, lorsqu’aucune mesure d’information ou d’instruction n’est nécessaire, renvoyer l’affaire
au bureau de jugement338.
335 Celles ne respectant pas les conditions des
articles R. 1454-14 et R. 1454-15 du Code
du travail
336 Article R. 1454-12 du Code du travail
337 Articles R. 1454-13 et R. 1454-14 du Code
du travail
338 Articles R. 1454-13 et R. 1454-17 du Code
du travail
93
Guide CFE-CGC de la prud’homie
Si le défendeur a justifié en temps utile
d’un motif légitime d’absence, il peut
être représenté. À défaut, il est convoqué par lettre simple à une autre séance
de conciliation339.
Si le défendeur n’a pas reçu la première convocation, sans que cela soit
lié à une faute de sa part, le bureau
de conciliation le convoque à une prochaine audience de conciliation par
lettre recommandée avec accusé de
réception envoyée par le greffe ou par
acte d’huissier de justice, selon le souhait du demandeur. Cet acte doit arriver au défendeur dans les six mois de
la décision du bureau de conciliation à
peine de caducité de la demande.
4.Les dispenses de conciliation liées
à certaines procédures
• des oppositions ;
• des tierce-oppositions ;
• des affaires jugées sur renvoi après
cassation ;
• des rectifications d’omission ou
d’erreur matérielle ;
• des
requêtes
de statuer ;
en
omission
• des requêtes en retranchement ;
• des référés ;
• des affaires en liquidation judiciaire.
Pour tout refus par l’employeur d’autorisation d’absence du salarié pour des
congés de représentation et les congés
pour création d’entreprise, l’affaire est
portée directement devant le bureau de
jugement.
Certaines demandes ne font pas l’objet
de procédure de conciliation, il en est
ainsi pour :
D.Comment se déroule l’audience de jugement ?
• des demandes nouvelles dérivant
du même contrat de travail qui sont
recevables à tout moment de la procédure, même en appel ;
1.Le déroulement de la procédure340
• des demandes reconventionnelles
se rattachant à la demande principale par un lien suffisant ;
• des demandes en intervention ;
• des demandes en liquidation d’astreinte civile ;
Le président ouvre l’audience, le greffier
appelle ensuite les affaires. Les affaires
qui ne sont pas en état d’être plaidées
sont éventuellement renvoyées.
Le président donne ensuite la parole
au premier plaidant. Le demandeur
plaide, puis le défendeur fait de même.
Les parties remettent les dossiers.
• des moyens et exceptions que les
parties font valoir au soutien de
leurs prétentions respectives ;
339 Article R. 1454-13 du Code du travail
94
340 Articles 430 et suivants du Code de procédure civile
Guide CFE-CGC de la prud’homie
2.Les exceptions de procédure
Le président d’audience a intérêt
à demander au greffier de noter
les demandes du demandeur et
du défendeur car seul le registre
d’audience (ou plumitif) fait foi. Il
convient donc, à cette occasion,
de bien s’assurer que les parties
ont exprimé à la barre toutes les
demandes comprises dans leurs
conclusions car, la procédure étant
orale, seul ce qui est dit lors de
l’audience compte.
La juridiction fixe ensuite la date du prononcé du jugement.
L’instance correspond aux actes de procédure allant de la demande en justice
jusqu’au prononcé du jugement.
Les exceptions de procédure sont des
moyens invoqués notamment par le défendeur en vue de faire échec provisoirement ou définitivement à la demande,
sans qu’il soit besoin de statuer sur le fond.
Elles doivent, à peine d’irrecevabilité,
être soulevées « in limine litis », avant
toute défense au fond, avant toute fin
de non-recevoir. Elles peuvent, sous
cette réserve, être soulevées devant le
bureau de jugement341.
a) L’exception d’incompétence
(cf. partie 1)
L’incompétence matérielle ou territoriale
du conseil de prud’hommes est normalement soulevée par le défendeur ou,
en l’absence de ce dernier, elle peut
être soulevée d’office par le juge.
341 Article R. 1451-2 du Code du travail
95
Guide CFE-CGC de la prud’homie
Si elle est demandée par le défendeur,
cette demande doit être motivée et préciser la juridiction estimée compétente342.
La partie qui souhaite contester la compétence du conseil de prud’hommes
doit le faire avant d’aborder le fond
de l’affaire et d’exposer d’éventuelles
irrecevabilités343. Ces deux règles sont
impératives.
Cependant, dès lors que ces conditions
sont respectées, si l’exception d’incompétence n’a pas été soulevée devant le
bureau de conciliation, elle peut l’être
devant le bureau de jugement344.
Le conseil de prud’hommes peut
se déclarer d’office incompétent,
c’est-à-dire sans que l’une des parties ait pris l’initiative de le lui suggérer dans deux hypothèses :
• en cas de violation d’une règle de
compétence d’attribution d’ordre
public (par exemple tous les litiges
concernant le contrat de travail) ;
• ou si le défendeur ne comparaît
pas345.
Par exemple, si un demandeur saisit un
conseil de prud’hommes territorialement
incompétent et que le défendeur ne comparaît pas, ce dernier ne pouvant pas
soulever l’incompétence du conseil de
prud’hommes, celui-ci a la possibilité de
se déclarer d’office incompétent ou de
juger l’affaire par défaut.
Attention, l’incompétence territoriale du
342 Article 75 du Code de procédure civile
343 Articles R. 1451-2 du Code du travail et 74
du Code de procédure civile
344 Article R. 1451-2 du Code du travail
345 Article 92 du Code de procédure civile
96
conseil de prud’hommes ne peut être
soulevée d’office que si le défendeur
est absent.
C’est la juridiction saisie (et dont la
compétence est remise en cause) qui
statue sur la recevabilité346 puis le bien
ou le mal-fondé de l’exception.
Lorsque le juge se prononce sur sa
compétence, sans statuer sur le fond
du litige, sa décision ne peut être attaquée que par la voie du contredit. Le
contredit est une procédure qui permet
au défendeur qui a argué de l’incompétence du conseil de prud’hommes et
qui n’est pas satisfait de sa position,
de demander à la Cour d’appel de vérifier si cette décision est conforme aux
dispositions du Code de procédure
civile et au Code de l’organisation
judiciaire. Il est important de préciser
que cette procédure suspend l’affaire
au fond jusqu’à la décision de la Cour
d’appel.
La compétence de la section peut également être contestée dans le cadre des
dispositions prévues par les articles
R. 1423-6 et R. 1423-7 du Code du
travail.
Ce dernier article prévoit, en effet,
qu’en cas de difficulté de répartition
d’une affaire ou de contestation sur la
connaissance d’une affaire par une section, et quel que soit le stade de la procédure auquel survient cette difficulté ou
contestation, le dossier est transmis au
président du conseil de prud’hommes,
qui, après avis du vice-président, ren346 Articles 74 et 75 du Code de procédure
civile
Guide CFE-CGC de la prud’homie
voie l’affaire à la section qu’il désigne
par ordonnance.
Cette ordonnance constitue un acte
d’administration judiciaire non susceptible de recours.
b) L’exception de saisine simultanée
de deux juridictions compétentes
pour un même litige (cf. partie 1)
Cette exception est nommée litispendance. Il y a litispendance quand deux
juridictions différentes ont à connaître
de deux instances identiques, alors
qu’elles sont toutes les deux compétentes. Ce cas se produit notamment
lorsque les parties ont une option leur
permettant de choisir entre plusieurs
juridictions celle qu’elles veulent saisir.
Le conseil de prud’hommes saisi en second doit se dessaisir au profit du premier, si l’une des parties le demande
ou, à défaut, d’office347.
Lorsque les juridictions saisies ne sont
pas de même degré, l’exception doit
être soulevée devant la juridiction du
degré inférieur348.
Les recours contre les décisions rendues en la matière sont formés et jugés
comme en matière d’exception d’incompétence.
c) L’exception de connexité et d’unicité de l’instance
Il y a connexité quand deux juridictions
différentes et compétentes sont saisies
de demandes qui présentent des rap347 Article 100 du Code de procédure civile
348 Article 102 du Code de procédure civile
ports étroits et nécessitent d’être instruites et jugées ensemble dans l’intérêt
d’une bonne justice.
Toutes les demandes liées au contrat de
travail entre les mêmes parties doivent
faire l’objet d’une seule instance, que
ces demandes émanent du demandeur
ou du défendeur349.
Ce principe ne s’applique que si le
fondement des prétentions est né ou
révélé avant la saisine du conseil de
prud’hommes.
Par conséquent, si un même conseil de
prud’hommes ou plusieurs sont saisis
de différentes demandes relatives à un
même contrat de travail, les instances
sont jointes350.
De plus, une fois le procès terminé, ni le
demandeur, ni le défendeur ne peuvent
intenter un deuxième procès au sujet de
demandes qui auraient été omises lors
du premier procès, l’adversaire pouvant
alors opposer une fin de non-recevoir,
sauf si le fondement de ces demandes
est né ou révélé postérieurement351.
La fin de non-recevoir est un moyen qui
tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen
au fond, pour défaut de droit d’agir352.
La fin de non-recevoir n’étant pas
d’ordre public, seul le demandeur ou le
défendeur peuvent l’invoquer.
349 Article R. 1452-6 du Code du travail
350 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 20 novembre 1975, n° 75-40.112
351 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 5 mars 1992, n° 89-40.680
352 Article 122 du Code de procédure civile
97
Guide CFE-CGC de la prud’homie
Par exception, la fin de non-recevoir
tirée de l’unicité de l’instance n’est pas
opposable lorsque le jugement de première instance se contente d’annuler la
procédure353.
Les recours contre les décisions rendues
en la matière sont formés et jugés comme
en matière d’exception d’incompétence.
Devant le conseil des prud’hommes
des demandes nouvelles peuvent être
formées à tout moment de la procédure, ce qui est un atout considérable,
notamment pour le salarié. L’unicité de
l’instance apparaît dès lors comme le corollaire à cette possibilité de demandes
nouvelles que la Cour de cassation ne
cesse d’ailleurs de faciliter contrairement à l’unicité de l’instance qui connaît
quant à elle une forte limitation (cf. arrêt
du 16 novembre 2010). Par ailleurs,
le demandeur comme le défendeur
peuvent, à tout moment de la procédure,
modifier ou compléter leurs demandes et
déposer de nouvelles demandes, même
en appel, dès lors qu’elles sont issues du
même contrat de travail. Cela vaut aussi
pour les demandes reconventionnelles,
à savoir celles présentées par le défendeur, afin d’obtenir un avantage autre
que le simple rejet de la prétention de
son adversaire354.
98
Attention : La jurisprudence traditionnelle de la Cour de cassation ne faisait pas de différence entre les actes
mettant fin à l’instance pour appliquer
ce principe d’unicité d’instance. Cette
jurisprudence posait problème au regard de l’article 6§1 de la Convention
européenne de sauvegarde des droits
de l’Homme et des libertés fondamentales et le droit au procès équitable, de
l’article 30 du Code de procédure civile
qui affirme que les auteurs d’une prétention ont le droit d’être entendu sur le
fond de celle-ci afin que le juge la dise
bien ou mal fondée et enfin de l’article
4 du Code civil, qui dispose que « le
juge qui refusera de juger, sous prétexte
du silence, de l’obscurité ou de l’insuffisance de la loi, pourra être poursuivi
comme coupable de déni de justice. »
En effet, si l’instance se terminait sans
qu’une décision ait été prise au fond et
que les plaideurs ne pouvaient plus saisir une juridiction, en raison du principe
d’unicité d’instance, le litige ne pouvait
être tranché.
C’est pourquoi un revirement de jurisprudence a eu lieu en 2010, qui précise que la règle de l’unicité de l’instance n’est applicable que lorsque
l’instance précédente s’est achevée par
un jugement au fond355.
Lorsqu’elles sont présentées pour la première fois après l’audience de conciliation, les demandes sont examinées
directement par le bureau de jugement,
sans faire l’objet d’une tentative préalable de conciliation.
Cette décision est justifiée, selon le communiqué de la première présidence,
joint à cet arrêt, par la volonté de
mettre fin au déni de justice auquel se
trouvaient confrontés les salariés.
353 Arrêt de la chambre sociale du
16 novembre 2010, n° 09-70.404
354 Article R. 1452-7 du Code du travail
355 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 16 novembre 2010 n° 09-70404
Guide CFE-CGC de la prud’homie
La CFE-CGC vous conseille d’éviter
de joindre les affaires connexes. En
effet, si l’une des parties seulement
fait appel, cela évite que le juge soit
influencé par le jugement du conseil
de prud’hommes sur les autres affaires et cela permet également de
mieux respecter la confidentialité.
Dans certains cas néanmoins, cela
s’avère nécessaire pour une meilleure administration de la justice. La
CFE-CGC met donc à votre disposition un exemple de jonction d’instance et un modèle d'imprimé de
jonction d'affaire (annexe 7 p 150) :
tement le cours d’une instance, pendant
le délai nécessaire pour accomplir un
acte juridique, susceptible d’influencer
l’issue du litige.
MOTIVATION
Attendu que les affaires inscrites
sous les n°… sont dirigées contre
la même société ou ont le même
objet et qu’il convient pour une
bonne administration de la justice
de les juger ensemble.
Un des plaideurs peut aussi invoquer
une décision frappée de tierce opposition, de recours en révision ou de pourvoi en cassation357.
PCM
Vu les articles 367 et suivants du
Code de procédure civile ;
Ordonne la jonction des affaires
n° …
Dit qu’elles porteront le n° unique
(le numéro de RG le premier
enregistré).
d) L’exception dilatoire
L’exception dilatoire constitue un moyen
de défense, ouvrant au défendeur la
possibilité de faire suspendre immédia-
Ainsi, par exemple, un délai peut être
reconnu à un héritier pour faire un inventaire et pour délibérer356.
e) L’exception de nullité
L’exception de nullité est un moyen de
défense qui permet au défendeur de se
fonder sur une violation de dispositions
légales pour demander la nullité de la
procédure.
Elle doit être présentée à l’ouverture des
débats.
356 Article 108 du Code de procédure civile : « Le
juge doit suspendre l’instance lorsque la partie qui le demande jouit soit d’un délai pour
faire inventaire et délibérer soit d’un bénéfice
de discussion ou de division, soit de quelque
autre délai d’attente en vertu de la loi. »
357 Article 110 du Code de procédure civile
99
Guide CFE-CGC de la prud’homie
Elle peut être demandée pour vice
de forme, en cas de violation de certaines règles de forme, ou de violation
d’une règle de fond. Par exemple, une
convention est nulle si le consentement
donné par l’une des partie à l’acte a
été vicié par dol.
Concernant les exceptions de nullité nées
d’un vice de forme, ces dernières doivent
être soulevées « in limine litis », c’est-àdire avant toute défense au fond358.
Ainsi, les vices de forme doivent être
invoqués dès l’accomplissement de l’acte
contesté, avant toute autre défense359.
L’irrégularité de fond peut, quant à elle,
être invoquée en tout état de cause,
c’est-à-dire à tout moment de la procédure. Attention : l’exception soulevée
tardivement peut engager la responsabilité de celui qui agit notamment au
paiement de dommages et intérêts en
cas d’intention dilatoire de celui qui a
voulu exciper l’exception de nullité360.
3.Les incidents d’instance
Il s’agit d’événements qui entraînent
des changements dans le déroulement
de l’instance par son interruption, sa
suspension ou son extinction. La juridiction devant laquelle l’instance se
déroule doit les trancher.
a) L’unicité d’instance
La jonction et la disjonction d’instance
en font partie (cf. infra principe d’unicité d’instance).
358 Article 113 Code de procédure civile
359 Article 112 du Code de procédure civile
360 Article 118 du code de procédure civile
100
b) L’intervention
L’intervention correspond à l’arrivée au
procès d’une nouvelle partie, dans le
cadre d’une intervention volontaire ou
forcée (lorsqu’elle a été appelée)361.
Elle n’est recevable que si le motif qui la
lie au procès est suffisant.
L’intervention ordonnée par le bureau de
jugement donne lieu à une suspension
d’instance, afin que la partie concernée
puisse être convoquée et pour respecter
le principe du contradictoire.
c) Le changement de juge Le changement de juge peut intervenir
par abstention, récusation ou suspicion.
Le conseiller prud’homme peut décider
de s’abstenir ou acquiescer à une demande de récusation.
La
récusation
des
conseillers
prud’hommes, émanant d’un justiciable362, n’est admise que dans les cas
légalement prévus363, notamment la violation du principe d’impartialité.
La décision du premier président de la
Cour d’appel désignant la juridiction
de renvoi en cas de suspicion légitime
ou d’abstention de plusieurs conseillers
prud’hommes, s’impose aux parties et
au juge de renvoi364.
La suspicion est légitime lorsque le plaideur a des raisons sérieuses de penser
361 Articles 325 et suivants du Code de procédure civile
362 Articles 342 et suivants du Code de procédure
civile
363 Article L. 1457-1 du Code du travail 364 Article 358 du Code de procédure civile
Guide CFE-CGC de la prud’homie
que les conseillers prud’hommes chargés
de l’affaire ne sont pas en mesure de se
prononcer avec impartialité, en raison
de leurs tendances ou de leur intérêt.
L’affaire est alors transmise à un autre
conseil de prud’hommes.
Les conditions de recevabilité et de
forme sont identiques à celles nécessaires en cas de récusation.
d) L’interruption d’instance
L’interruption se produit de plein droit et
automatiquement :
• lorsqu’un plaideur mineur devient
majeur,
• en cas de jugement déclaratif de redressement ou de liquidation judiciaire.
• l’effet du jugement qui prononce le
règlement judiciaire ou la liquidation des biens dans les causes où
il emporte assistance ou dessaisissement du débiteur365.
L'événement ou sa notification doit avoir
lieu avant l’ouverture des débats367.
L’interruption d’instance arrête le délai
de prescription.
e) La suspension d’instance
La suspension d’instance est liée à un
obstacle temporaire à la poursuite de
l’instance.
Elle survient soit à la demande des
parties, soit lorsque les circonstances
l’exigent, soit lorsqu’une question préjudicielle doit être tranchée.
Il s’agit du sursis à statuer et de la
radiation, cette dernière sanctionnant
le défaut de diligence des parties et
entraînant le retrait de l’affaire du rôle.
Dans ce dernier cas, cet acte d’administration judiciaire n’est susceptible
d’aucun recours.
4.Les règles de preuve
Dans certains cas, l’interruption d’instance est subordonnée à une notification adressée à l’autre partie.
Devant les juridictions françaises, les
juges instruisent les dossiers à charge
et à décharge.
À compter de la notification qui en est
faite à l’autre partie, l’instance est interrompue par :
Chacun des arguments avancés
par les parties devant le conseil des
prud’hommes, notamment, (salariés
et employeurs) devra donc être étayé
pour que le juge puisse remplir au
mieux son office, ce dernier ne pouvant
fonder sa décision sur des faits qui ne
sont pas dans le débat368. Les éléments
de preuve ainsi apportés détermineront
l’issue du procès.
• le décès d’une partie dans les cas où
l’action est transmissible aux héritiers ;
• la cessation de fonctions du représentant légal d’un incapable ;
• le recouvrement ou la perte par
une partie de la capacité d’ester
en justice366.
365 Article 369 du Code de procédure civile
366 Article 370 du Code de procédure civile
367 Article 371 du Code de procédure civile
368 Article 7 du Code de procédure civile
101
Guide CFE-CGC de la prud’homie
a) La charge de la preuve
Les règles de la preuve en matière
prud’homale ne sont que très exceptionnellement issues du Code du travail,
ce sont en général les règles du Code
civil et du Code de procédure civile qui
s’appliquent.
Par principe, la charge de la
preuve incombe au demandeur
La charge de la preuve incombe, en
principe, au demandeur au procès en
vertu de la règle « Actori incumbit probatio ».
Les parties ont la charge d’alléguer les
faits propres à fonder leurs prétentions 369.
Il incombe, dès lors, à chaque partie de
prouver, conformément à la loi, les faits
nécessaires au succès de sa prétention370.
Par ailleurs, celui qui réclame l’exécution
d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré,
doit justifier le paiement ou le fait qui a
produit l’extinction de son obligation371.
Ainsi, par exemple, c’est celui qui prétend qu’il existe un contrat de travail
qui doit le prouver.
C’est également au salarié qui explique
qu’il exerce en fait une autre profession
que celle mentionnée dans le contrat de
travail de le prouver372.
Les fonctions occupées doivent être
369
370
371
372
102
Article 6 du Code de procédure civile
Article 9 du Code de procédure civile
Article 1315 du Code civil
Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 11 décembre 1990, n° 87-45.544
prouvées par le salarié demandeur,
lorsqu’il demande que son certificat de
travail mentionne certaines fonctions.
Cependant, certaines preuves
doivent être apportées par les deux
parties à l’instance prud’homale
Concernant le nombre d’heures travaillées, l’employeur doit fournir au juge les
éléments de nature à justifier les horaires
effectivement réalisés par le salarié.
Au vu de ces éléments et de ceux fournis
par le salarié à l’appui de sa demande,
le juge forme sa conviction après avoir
ordonné, en cas de besoin, toutes les
mesures d’instruction qu’il estime utiles.
Si le décompte des heures de travail
accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement
automatique, celui-ci doit être fiable et
infalsifiable373.
Ainsi, en matière de preuve des heures
supplémentaires, la jurisprudence est
venue apporter de nombreuses précisions en la matière, se fondant sur les
dispositions de l’article L. 3171-4 du
Code du travail.
La tendance actuelle de la Cour de
cassation est de considérer qu’en cas
de litige relatif à l’existence ou au
nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié d’étayer
sa demande par la production de tous
éléments de preuve, une simple allégation ne suffisant pas, pour permettre à
l’employeur de répondre en apportant,
le cas échéant, ses propres éléments sur
les horaires effectivement réalisés.
373 Article L. 3171-4 du Code du travail
Guide CFE-CGC de la prud’homie
Une fois que le salarié a apporté ces
éléments, il incombe à l’employeur de
démontrer que ces heures n’ont pas été
effectuées.
Ainsi, la Cour de cassation a estimé que
ne peut pas être rejetée la demande du
salarié, au seul motif que les preuves
qu’il apporte sont insuffisantes374, la
charge de la preuve des horaires effectués par le salarié devant également
incomber à l’employeur.
La Haute juridiction a ajouté dans cet
important arrêt que « toutefois celui-ci
ne peut rejeter une demande en paiement d'heures supplémentaires aux
motifs que les éléments produits par le
salarié ne prouvent pas le bien-fondé
de sa demande ».
Dans un arrêt du 24 novembre 2010375,
elle censure l’arrêt de la Cour d’appel
pour ne pas avoir retenu que « la salariée
avait produit un décompte des heures
qu'elle prétendait avoir réalisé auquel
l'employeur pouvait répondre » et qui
constitue un élément suffisamment précis
pour étayer sa demande et faire peser la
charge de la preuve sur l'employeur.
En matière de rupture du contrat de
travail, la lettre de licenciement fixe
les limites du litige. En la matière, le
juge prend sa décision en fonction des
éléments fournis par les deux parties,
après avoir ordonné, si besoin est,
toutes les mesures d’instructions qu’il
estime utiles. Si un doute subsiste, il
profite au salarié377.
La Cour de cassation estime, par ailleurs, que « l’accord implicite de l’employeur à l’accomplissement d’heures
supplémentaires suffit au salarié pour
en obtenir le paiement »376.
En matière disciplinaire, l’employeur
fournit au conseil de prud’hommes
les éléments retenus pour prendre la
sanction.
374 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 28 septembre 2010, n° 08-45.522
375 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation en date du 24 novembre 2010,
n°09-40.928
376 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation en date du mardi 22 mars 2011,
n°10-18821
Au vu de ces éléments et de ceux qui
sont fournis par le salarié à l’appui
de ses allégations, le conseil de
prud’hommes va former sa conviction.
À nouveau, il peut ordonner, en cas
de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Évidemment, si
377 Article L. 1235-1 du Code du travail
103
Guide CFE-CGC de la prud’homie
un doute subsiste, il profitera une fois
encore au salarié378.
été ou ne le sera dans une situation
comparable et pour un motif prohibé.
C’est également le cas pour les conflits
concernant les salariées enceintes379,
le doute profitant tout naturellement
toujours à ces salariées. L’employeur
doit ici être particulièrement vigilant.
Si un litige survient avec une salariée
enceinte, il devra communiquer au juge
tous les éléments justifiant sa décision,
tout en démontrant que l’éventuelle
sanction n’a aucun rapport avec la situation de grossesse de la salariée.
La discrimination indirecte est une disposition, un critère ou une pratique
neutre en apparence mais susceptible
d’entraîner, pour des motifs discriminatoires, un désavantage particulier pour
des personnes par rapport à d’autres,
à moins que cette disposition, ce critère
ou cette pratique ne soit objectivement
justifié par un but légitime et que les
moyens pour réaliser ce but ne soient
nécessaires et appropriés381.
En matière de discrimination, la situation de grossesse faisant partie des
critères de discrimination prévus par le
Code du travail, s’agissant d’un candidat à un emploi, à un stage ou à une
période de formation en entreprise ou
un salarié qui présente des éléments de
faits laissant supposer l’existence d’une
discrimination directe ou indirecte, les
règles en matière de preuve suivent un
régime spécifique.
Attention à bien distinguer la discrimination, fondée sur un motif prohibé, de
la rupture d’égalité : une différence de
traitement entre salariés d’une même
entreprise ne constituant pas, en ellemême, une discrimination illicite382.
En effet, des différences de traitement peuvent être licites, lorsqu’elles
répondent à une exigence professionnelle essentielle et déterminante et pour
autant que l’objectif soit légitime et
l’exigence proportionnée383.
Au vu des éléments présentés par la
partie demanderesse s’estimant discriminée, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision
est justifiée par des éléments objectifs
étrangers à toute discrimination. Le
juge forme sa conviction après avoir
ordonné, en cas de besoin, toutes
les mesures d’instruction qu’il estime
utiles380.
La discrimination directe consiste à
traiter une personne de manière moins
favorable qu’une autre ne l’est, ne l’a
378 Article L. 1333-1 du Code du travail
379 Article L. 1225-3 du Code du travail
380 Article L. 1134-1 du Code du travail
104
La procédure concernant la preuve
d’une discrimination est applicable en
cas de harcèlement moral ou sexuel384.
Parfois, la charge de la preuve
incombe à l’employeur
Il incombe à l’employeur, qui prétend
avoir payé le salaire, de le prouver385.
La délivrance de la feuille de paie et
381 Loi 2008-496 du 27 mai 2008
382 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 18 janvier 2006, n° 03-45.422
383 Article L. 1133-1 du Code du travail
384 Article L. 1154-1 du Code du travail
385 Article 1315 du Code civil
Guide CFE-CGC de la prud’homie
son acceptation sans protestation ni
réserve ne suffisent pas. En effet, un
chèque n’a valeur libératoire que s’il
est effectivement encaissé.
De plus, la charge de la preuve de l’existence d’une faute grave, privative de l’indemnité légale de licenciement, ou d’une
faute lourde incombe à l’employeur386.
C’est encore à l’employeur de prouver
qu’un salarié est gréviste387.
L’employeur doit aussi démontrer l’existence du terme et la date de rupture du
CDD de remplacement388.
b) La recevabilité de la preuve
La nécessité pour les moyens de preuve
de respecter le principe du contradictoire. Les modes de preuve utilisés doivent
respecter le principe du contradictoire.
La Cour de cassation a été amenée a
considérer sur la base de ce principe et
au visa de l’article 1315 du Code civil
que le simple « silence opposé à l'affirmation d'un fait ne vaut pas à lui seul
reconnaissance de ce fait »389.
Les moyens de preuves devant le
Conseil des prud’hommes
En matière prud’homale, la preuve est
libre mais les éléments de preuve soumis
au juge ne doivent pas avoir été obtenus
386 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 28 octobre 1998, n°96-43.413
387 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 6 février 2001, n°98-46.427
388 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 13 mai 2003, n°01-40.809
389 Arrêt de la 1e chambre civile de la Cour de
cassation du 18 avril 2000, n°97-22.421
de manière frauduleuse ou déloyale.
Si depuis 1998, la chambre sociale de
la Cour de cassation estime qu’un salarié peut valablement produire devant
le juge, pour assurer sa défense dans
le procès prud’homal l’opposant à son
employeur, les documents de l’entreprise dont il a eu connaissance à l’occasion de l’exercice de ses fonctions,
la chambre criminelle a attendu deux
arrêts du 11 mai 2004 pour privilégier
les droits de la défense du salarié sur le
droit de propriété de l’employeur.
La Haute juridiction a ainsi décidé
qu’un salarié poursuivi pour un délit
de vol pour avoir photocopié des
documents de l’entreprise puisse être
relaxé dès lors que deux conditions
sont remplies :
• le salarié doit avoir eu connaissance de ces documents à l’occasion de l’exercice de ses fonctions
au sein de l’entreprise ;
• les documents appréhendés doivent
être strictement nécessaires à la
défense du salarié dans le litige
l’opposant à son employeur.
Récemment, la chambre criminelle a
conforté sa position en considérant que
le salarié qui, avisé du projet de son
employeur de rompre son contrat de
travail, appréhende des documents dont
il a eu connaissance à l’occasion de
l’exercice de ses fonctions, ne commet ni
un vol, ni un abus de confiance, dès lors
que la production de ces documents est
strictement nécessaire à l’exercice de sa
défense dans la procédure prud’homale
105
Guide CFE-CGC de la prud’homie
qu’il a engagée peu après390.
exemples de preuves licites et illicites :
On distingue donc devant le conseil
des prud’hommes les moyens de
preuve classiques constitués de divers
écrits (contrat de travail, bulletin de
paie, correspondance…) des nouveaux moyens de preuve (enregistrements vidéo, audio, informatiques…).
Ces derniers ne peuvent être utilisés
comme moyen de preuve que lorsque
l’employeur a préalablement averti
ses salariés de la mise en place d’un
moyen de surveillance.
Parmi les modes de preuves licites, on
trouve :
Il y a les preuves incontestables ; ce
sont des écrits non contestés par la partie adverse.
Exemple : un original de lettre d’embauche, une attestation faite en la
forme avec copie de la carte d’identité
quand les faits rapportés ne sont pas
contestés par une attestation en sens
inverse émanant de l’employeur.
Il y a les preuves simples ; ce sont celles
que la partie adverse conteste, comme par
exemple l’existence du contrat de travail.
Certaines preuves sont dites « d’ordre
public » ; le contrat à durée déterminée
doit être écrit. On ne peut prétendre
qu’un engagement oral était prévu pour
une durée déterminée, il est réputé, de
par la loi, d’une durée indéterminée.
Certaines preuves sont illicites ; ce sont
celles qui contreviennent à un principe
fondamental du droit comme l’atteinte
au droit à la vie personnelle.
Pour illustrer ces propos, voici quelques
390 Arrêt de la chambre criminelle de la Cour de
cassation du 16 juin 2011, n° 10-85.079
106
• Les constats d’huissier, dès lors qu’ils
se contentent de réaliser des constatations purement factuelles391. Ils ne
nécessitent aucune information préalable du salarié.
• Les relevés téléphoniques du poste
du salarié ;
• Les écoutes, dès lors qu’elles sont justifiées par la nécessité de se conformer aux directives boursières ;
• Les procédés de surveillance de
locaux dans lesquels les salariés ne
travaillent pas392 ;
• La simple surveillance par un supérieur hiérarchique393 ;
• Les SMS394 (contrairement à l’enregistrement d’une conversation téléphonique privée, à l’insu de son
auteur).
Sont en revanche des modes de preuve
illicites :
• L’enregistrement d’images ou de
paroles à l’insu des salariés ;
• La mise en place d’un système de
vidéosurveillance sans consultation
du comité d’entreprise395 ;
391 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 19 janvier 2005, n°02-44.082
392 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 31 janvier 2001, n°98-44.290
393 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 26 avril 2006, n°04-43.582
394 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 23 mai 2007, n°06-43.209
395 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 7 juin 2006, n°04-43.866
Guide CFE-CGC de la prud’homie
• L’organisation d’une filature par
l’employeur, cette dernière portant
atteinte à la vie privée du salarié396.
Un focus sur l’aveu judiciaire
L’aveu judiciaire est défini par l’alinéa
premier de l’article 1356 du Code civil
comme « la déclaration que fait en justice la partie ou son fondé de pouvoir
spécial » (son avocat en règle générale).
L’aveu judiciaire est chose courante
devant les tribunaux et mérite donc que
l’on s’y arrête quelque peu, et ce pour
au moins deux raisons.
D’une part, la première raison est la
force probante de l’aveu judiciaire, le
même article précisant que l’aveu judiciaire fait pleine foi contre celui qui l’a
fait, ce dernier ne pouvant être divisé
contre lui. Il ne peut être révoqué à
moins qu’on ne prouve qu’il a été la
suite d’une erreur de fait. Il ne peut être
révoqué sous prétexte d’une erreur de
droit.397 D’autre part, ce mode de preuve est assez prisé devant la juridiction prud’homale en raison de l’absence de formalisme, l’aveu judiciaire pouvant être
écrit ou oral. Il peut émaner des parties
ou de leurs représentants. Il peut être
reconnu devant toutes les juridictions
et à toutes les étapes de la procédure.
La procédure orale se prête d’ailleurs
particulièrement bien à la production
d’aveux judiciaires, les déclarations
396 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 26 novembre 2002, n°00-42.401
397 Article 1356 du Code civil
pouvant être retenues à ce titre398, sans
qu’il soit besoin de les confirmer par
écrit399.
Lorsque les conseillers prud’homaux
demandent au greffier d’audience de
noter les propos des parties sur des
faits conditionnant la solution du litige,
ils procèdent ainsi à l’enregistrement
d’un aveu judiciaire.
Lorsque les parties formulent leurs prétentions et moyens par écrit, le juge
peut, avec leur accord, prévoir qu’elles
seront réputées avoir abandonné les
prétentions et moyens non repris dans
leurs dernières écritures communiquées400. Cela signifie que si les parties sont d’accord, seuls les arguments
invoqués dans les dernières conclusions
des parties peuvent être utilisés lors du
procès.
En effet, depuis le décret du
1er octobre 2010, l’alinéa 2 de l’article 446-2 du Code de procédure
civile prévoit que « lorsque les parties
formulent leurs prétentions et moyens
par écrit, le juge peut, avec leur accord, prévoir qu’elles seront réputées
avoir abandonné les moyens et prétentions non repris dans leurs dernières
écritures communiquées ».
Pour autant même si une déclaration
pouvant valoir aveu n’est pas reprise
dans des conclusions ultérieures, elle
398 Arrêt de la 1e chambre civile de la Cour de
cassation du 3 février 1993, n°91-12.714
399 Arrêt de la 1e chambre civile de la Cour de
cassation du 29 avril 2004, n°02-20.249
400 Article 446-2 du Code de procédure civile
107
Guide CFE-CGC de la prud’homie
est quand même maintenue401. Les parties pourront donc reprendre l’aveu de
la partie adverse dans leurs propres
conclusions ou se référer aux déclarations actées par le greffier de la juridiction et figurant au dossier.
Enfin, la Cour de cassation est venue rappeler des règles importantes concernant
l’aveu judiciaire au mois de mars 2011.
Dans un premier arrêt, la Haute juridiction a rappelé que l’aveu était un
moyen de preuve, et qu’il ne pouvait
porter que sur des faits et non sur une
règle juridique, dont l’interprétation est
réservée au juge402. Cette décision se
place sur le terrain du « pur droit » ce
qui démontre que certaines données,
qui peuvent sembler factuelles, comme
les dates d’envoi ou de réception d’une
lettre, ont une portée juridique si elles
sont prévues dans des textes légaux ou
conventionnels. Elles ne peuvent donc
pas faire l’objet d’un aveu mais sont
soumises à l’interprétation du juge.
La Haute juridiction, dans un autre arrêt
du mois de mars 2011, a précisé que
la seule mention figurant dans les motifs
du jugement, selon laquelle « le salarié
reconnaît et ne conteste plus les faits »,
ne pouvait valoir aveu judiciaire403
alors qu’aucune note d’audience
contenant les déclarations précises qui
avaient été faites par le salarié devant
le bureau de jugement n’était produite.
401 Arrêt de la première chambre civile de
la Cour de cassation du 20 mai 2003,
n° 00-18.295
402 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 30 mars 2011, 09-41.583
403 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 22 mars 2011, 09-72.323
108
Un aveu oral n’existe que s’il est
retranscrit par le greffe dans le
plumitif. Cet aveu pourra alors
être considéré comme un aveu
judiciaire. Il convient donc d’être
particulièrement vigilant et de faire
transcrire soigneusement les dires
des parties par le greffier.
Cette décision s’explique par la force
probatoire de l’aveu, ce dernier pouvant entraîner une dispense de preuve
écrite pour la partie adverse404. C’est cette même force juridique qui justifie que l’aveu exige de la part de son
auteur une manifestation non équivoque
de sa volonté de reconnaître pour vrai
un fait de nature à produire contre lui
des conséquences juridiques405.
L’audience de conciliation est, par
exemple, découpée en plusieurs étapes,
seule la dernière phase pouvant donner
lieu à un aveu judiciaire de la part de
l’une des parties :
• Le bureau de conciliation entend les
explications des parties. Les conseillers prennent connaissance des faits,
pour pouvoir informer les parties sur
l’étendue de leurs droits. Il n’est pas
possible à ce niveau de transcrire les
déclarations des parties.
404 Arrêt de la 1e chambre civile de la Cour de
cassation du 15 juin 2004, n° 02-10.700
405 Arrêt de la 2e chambre civile de la Cour de
cassation 11 février 1998, n° 96-19.106
Guide CFE-CGC de la prud’homie
• Le bureau de conciliation essaie de
concilier les parties. Cette étape est
confidentielle. Lors de cette phase
d’écoute, le greffier ne prend pas
de notes.
• À défaut de conciliation totale, les
prétentions qui restent contestées et
les déclarations faites par les parties sur ces prétentions sont notées
au dossier ou au procès-verbal par
le greffier sous le contrôle du président406. C’est seulement à partir
de cette étape que des déclarations
peuvent être actées et retenues
comme aveu judiciaire.
La distinction entre l’aveu
judiciaire et l’acquiescement
Attention à bien distinguer l’aveu
l’acquiescement à la demande :
dernier acte judiciaire, exprès ou
plicite407, émane nécessairement
défendeur.
de
ce
imdu
L’acquiescement emporte reconnaissance du bien-fondé des prétentions de
l’adversaire et renonciation à l’action et
n’est admis que lorsque l’acquiesçant a
la libre disposition de ses droits408. Les
parties ont la libre disposition de leurs
droits lorsque la règle en cause n’est
pas d’ordre public.
En cas d’acquiescement, les déclarations du défendeur peuvent être retenues contre lui à condition de ne pas
être équivoques.
406 Article R1454-10 du Code du travail
407 Article 410 du Code de procédure civile
408 Article 408 du Code de procédure civile
5.Les mesures d’instructions Tout intéressé, ayant un motif légitime
pour ce faire, peut demander, avant tout
procès, une mesure d’instruction visant
à conserver ou établir la preuve de faits
dont pourrait dépendre l’issue du litige409.
Entre l’audience de conciliation et
l’audience de jugement, le demandeur constitue son dossier de plaidoirie. S’il ne dispose pas de tous
les éléments de preuve à l’appui
de ses prétentions et qu’il souhaite
que l’affaire puisse quand même
être examinée à la date retenue, il
a la possibilité de saisir la formation de référé pour obtenir une mesure d’instruction en vue d’établir
la preuve des faits pour l’audience
de jugement.
Attention, une mesure d’instruction ne
peut pas suppléer la carence des parties.
Par ailleurs, le juge doit choisir la mesure qui est suffisante pour la solution
du litige, la plus simple et la moins onéreuse410. Le recours aux conseillers rapporteurs est donc recommandé.
Le juge peut exécuter lui-même la mesure d’instruction ou en demander l’exécution sous son contrôle411.
409 Article 145 du Code de procédure civile
410 Article 147 du code de procédure civile
411 Article 155 du code de procédure civile
109
Guide CFE-CGC de la prud’homie
Sauf exceptions, la décision qui ordonne
ou modifie une mesure d’instruction n’est
pas susceptible d’opposition, d’appel ou
de pourvoi en cassation indépendamment du jugement sur le fond.
Ce sont donc les conseillers rapporteurs
qui sont ici en charge de recueillir les
informations (cf. Partie I, B.).
Les faits peuvent faire l’objet de vérifications personnelles du juge, de la
comparution personnelle des parties,
de déclaration de tiers et de recours à
un expert412.
La comparution personnelle est obligatoire à toutes les étapes de l’instance
prud’homale414.
a) Les vérifications personnelles du
juge
Le juge peut, afin de les vérifier lui-même,
prendre en toute matière une connaissance personnelle des faits litigieux.
Il procède aux constatations, évaluations, appréciations ou reconstitutions
qu’il estime nécessaires, en se transportant si besoin est sur les lieux413.
Attention, en matière prud’homale, il y
a quelques spécificités.
En effet, les articles R. 1454-1 et suivants
du Code du travail relatifs à la mise en
l’état de l’affaire devant le conseil des
prud’hommes précisent les règles propres
à cette juridiction notamment par la nomination de conseillers rapporteurs.
Ainsi, afin de mettre l’affaire en état
d’être jugée, le bureau de conciliation
ou le bureau de jugement peut, par
une décision non susceptible de recours, désigner un ou deux conseillers
rapporteurs en vue de réunir sur cette
affaire les éléments d’information nécessaires au conseil de prud’hommes
pour statuer.
412 Article 143 du Code de procédure civile
413 Article 179 du Code de procédure civile
110
b) La comparution personnelle
Si le justiciable est absent et qu’il a un
motif légitime, les conseillers peuvent
renvoyer l’affaire à une date ultérieure
s’ils souhaitent l’entendre.
Ils peuvent aussi l’obliger à comparaître415.
De plus, si le justiciable est présent, le
président peut lui poser directement des
questions416.
c) Les attestations des tiers
Les attestations des tiers peuvent être
écrites ou orales. En principe, les tiers
sont entendus à l’audience. Néanmoins
des déclarations écrites sont aussi possibles417.
Ces témoignages doivent remplir les
conditions suivantes418 :
• L'attestation contient la narration
des faits auxquels son auteur a
assisté ou qu'il a personnellement
constatés.
• Elle mentionne les nom, prénoms,
date et lieu de naissance, demeure
et profession de son auteur ainsi que
414
415
416
417
418
Article R. 1453-1 du Code du travail
Article 184 du Code de procédure civile
Article 20 du Code de procédure civile
Article 201 du code de procédure civile
Article 202 du code de procédure civile
Guide CFE-CGC de la prud’homie
son lien de parenté ou d'alliance
avec les parties, de subordination à
leur égard, de collaboration ou de
communauté d'intérêts avec elles.
• Elle indique en outre qu'elle est
établie en vue de sa production en
justice et que son auteur a connaissance qu'une fausse attestation de
sa part l'expose à des sanctions
pénales.
• L'attestation est écrite, datée et
signée de la main de son auteur.
Celui-ci doit lui annexer, en original
ou en photocopie, tout document
officiel justifiant de son identité et
comportant sa signature.
Cependant, même si ces conditions ne
sont pas toutes respectées, les juges
peuvent tout de même retenir ces attestations, c’est à la discrétion du juge.
Il faut noter que le conseil de
prud’hommes apprécie souverainement la valeur et la portée des
attestations des témoins.
En revanche, le conseil de
prud’hommes ne peut pas dénaturer les termes clairs et précis d’un
constat d’huissier.
Vous trouverez en annexe et en
téléchargement sur l’intranet confédéral (rubriques : « Analyses et arguments » puis « Prud’hommes »)
un modèle d’attestation des témoins
(annexe 2 p 145).
d) L’enquête
L’enquête permet au juge d’entendre
des témoins, à la demande d’une des
parties419 ou d’office, c’est-à-dire de
sa propre initiative, sans demande des
parties.
Il incombe à la partie qui demande une
enquête d’indiquer les nom, prénoms et
demeure des personnes dont elle sollicite l’audition.
La même charge incombe aux adversaires qui demandent l’audition de témoins sur les faits dont la partie prétend
rapporter la preuve.
La décision qui prescrit l’enquête
énonce les nom, prénoms et demeure
des personnes à entendre420.
Le juge est libre d’accepter ou de refuser d’auditionner un témoin.
Toute personne peut être entendue
comme témoin, sauf si elle est frappée d’une incapacité de témoigner en
justice. Ces personnes peuvent néanmoins être entendues mais sans prêter
serment421.
La loi prévoit que certaines personnes
sont obligées de témoigner422. Ainsi, le
juge peut convoquer ou entendre toute
personne dont l’audition lui paraît utile à
la manifestation de la vérité423. De plus,
ceux qui ont vu écrire ou signer l’écrit
contesté ou dont l’audition paraît utile
419
420
421
422
Article 223 du Code de procédure civile
Article 223 du Code de procédure civile
Article 205 du Code de procédure civile
Article 206 du Code de procédure civile :
« est tenu de déposer quiconque en est légalement requis. »
423 Article 218 du Code de procédure civile
111
Guide CFE-CGC de la prud’homie
à la manifestation de la vérité peuvent
être entendus comme témoins424.
En revanche, les parents ou alliés en
ligne directe de l’une des parties ou le
conjoint d’une des parties425 peuvent
légitimement refuser de témoigner.
Les témoins sont convoqués par le
greffe au moins huit jours avant la date
de l’enquête426. La convocation est
envoyée par lettre recommandée avec
accusé de réception et par lettre simple.
Les convocations mentionnent les nom
et prénoms des parties et reproduisent
les dispositions suivantes : « Les témoins défaillants peuvent être cités à
leurs frais si leur audition est jugée
nécessaire427 » .
Les témoins défaillants et ceux qui,
sans motif légitime, refusent de déposer ou de prêter serment peuvent être
condamnés à une amende civile d'un
maximum de 3 000 euros (montant fixé
pour 2011)428.
Les parties sont avisées de la date de
l’enquête verbalement ou par lettre
simple429.
Lors de l’audience, le président demande au témoin de dire son nom,
ses prénoms, ses date et lieu de naissance, son domicile, sa profession, s’il
est parent ou allié de l’une ou l’autre
des parties, s’il a un lien quelconque
424
425
426
427
428
Article 293 du Code de procédure civile
Article 206 du Code de procédure civile
Article 228 du Code de procédure civile
Article 207 du Code de rocédure civile
Articles 229 et 207 du Code de procédure
civile
429 Article 230 du Code de procédure civile
112
de collaboration ou de communauté
d’intérêts avec l’une ou l’autre des
parties430.
Le président lui demande ensuite de prêter serment comme suit : « Vous jurez de
dire la vérité, toute la vérité, rien que la
vérité, veuillez levez la main droite et
déclarer –je le jure ». Ensuite, le président indique au témoin qu’il encourt
des sanctions pénales en cas de faux
témoignage et l’invite à déposer431.
Le juge peut confronter des témoins
entre eux432.
Les témoins ne peuvent pas lire de
notes433 et les parties ne doivent ni l’interrompre, ni l’interpeller, ni chercher à
l’influencer434.
Le greffier prend des notes. À la fin de
la déposition, le président demande au
témoin de signer la déposition.
Si un témoin qui a été appelé à témoigner ne comparaît pas, il peut avoir à
payer les frais de la seconde citation à
comparaître qui lui sera envoyée ainsi
qu’une amende civile435.
430
431
432
433
434
435
Article
Article
Article
Article
Article
Article
210
211
215
212
214
207
du
du
du
du
du
du
Code de procédure civile
Code de procédure civile
Code de procédure civile
Code de procédure civile
code de procédure civile
Code de procédure civile
Guide CFE-CGC de la prud’homie
Le juge autorise le témoin, sur sa demande, à percevoir les indemnités auxquelles il peut prétendre436.
e) La commission rogatoire
Une commission rogatoire, dans un
procès civil ou commercial, est une
délégation de pouvoir utilisée lorsque
dans le cadre de la mise en état, le juge
estime qu’il est nécessaire d’ordonner
une mesure d’instruction en dehors du
siège de la juridiction. C’est une délégation de pouvoir par laquelle un juge
charge un autre juge de rechercher, par
exemple, des preuves dans une affaire
déterminée.
Elle est notamment utilisée, lorsque
l’éloignement des parties ou des
personnes qui doivent apporter leur
concours à la justice, ou l’éloignement
des lieux, rend le déplacement trop difficile ou trop onéreux. Le juge peut alors,
à la demande des parties ou d’office,
saisir la juridiction de degré égal ou
inférieur qui lui paraît la mieux placée
sur le territoire de la République, afin
de procéder à tous les actes judiciaires
qu’il estime nécessaires437.
Des commissions rogatoires peuvent
être envoyées à un juge étranger, soit
en exécution d’une convention internationale, soit en vertu d’un traité de
coopération judiciaire, soit en utilisant
la voie diplomatique.
La consultation et la constatation
Les conseillers prud’homaux peuvent
demander à une personne de leur four436 Article 221 du Code de procédure civile
437 Article 730 du Code de procédure civile
nir une consultation sur une question
purement technique, qui ne requiert pas
d’investigations complexes438.
Ils peuvent aussi demander à une personne de réaliser une constatation439.
La décision de faire appel à un technicien est notifiée par lettre recommandée avec accusé de réception
aux parties et au technicien consultés.
Ce dernier doit indiquer dans les plus
brefs délais s’il accepte le travail. Dès
qu’il accepte, les parties doivent consigner entre ses mains la provision à
valoir sur sa rémunération.
f) L’expertise
Lorsqu’une consultation ou une constatation ne seraient pas suffisantes, le
bureau de conciliation, le bureau de
jugement ou les conseillers rapporteurs
peuvent demander une expertise.
L’expertise est notifiée par lettre recommandée avec accusé réception aux
parties et à l’expert.
Les juges peuvent par exemple
demander le concours d’un expertcomptable.
Ce dernier doit indiquer dans les plus
brefs délais s’il accepte le travail.
438 Article 256 du Code de procédure civile
439 Article 249 du Code de procédure civile
113
Guide CFE-CGC de la prud’homie
La provision sur sa rémunération est
consignée, par la ou les partie(s)
désignée(s) par le juge, au greffe du
conseil de prud’hommes.
Sa rémunération est fixée par le président
de la formation qui a ordonné l’expertise.
Attention : l’expert ne peut pas être
chargé de vérifier les droits des parties
car il éclaire le juge sur une question
de fait.
Le juge doit respecter le principe du
contradictoire et convoquer les parties440. L’expert doit notifier son rapport à chacune des parties avant de
le déposer au greffe du conseil des
prud’hommes dans le délai imparti.
Les parties doivent lui remettre tous les
documents dont il a besoin.
L’expert doit remplir lui-même sa mission mais il peut solliciter l’avis d’un
autre technicien disposant d’un matériel
spécifique441.
Une décision ordonnant l’expertise peut
être frappée d’appel si le premier président de la Cour d’appel l’autorise442.
6.L’absence des parties • soit renvoyer l’affaire
audience ultérieure ;
à
une
• soit déclarer la citation caduque443.
Si le défendeur ne comparaît pas, le bureau de jugement statue sur le fond444.
Il est convoqué à une prochaine audience du bureau de jugement par
lettre recommandée445.
Si le jugement est rendu en dernier ressort et que la citation n’a été délivrée à
personne (c’est-à-dire que le défendeur
n’a pas été convoqué devant le bureau
de jugement par émargement au procèsverbal de l’audience de conciliation), le
jugement est rendu par défaut et peut
faire l’objet d’une opposition446.
Si aucune des parties n’accomplit les
actes de la procédure dans les délais
requis, le juge peut, d’office, radier
l’affaire par une décision non susceptible de recours, après un dernier avis
adressé aux parties elles-mêmes et à
leur mandataire si elles en ont un447.
7.Le rôle du président d’audience
Les présidents de section et de chambre
président les audiences.
Si le demandeur ne comparaît pas,
sans motif légitime, le bureau de jugement peut :
• soit statuer sur le fond à l’initiative
du défendeur ;
440 Arrêt de la 2e chambre civile de la Cour de
cassation du 18 juin 1997, n°95-20.959
441 Arrêt de la 2e chambre civile de la Cour de
cassation du 16 mai 2002, n°00-20.050
442 Article 272 du code de procédure civile
114
443
444
445
446
Article 468 du Code de procédure civile
Article R. 1454-20 du Code du travail
Article R. 1454-20 du Code du travail
Articles 473 et 476 du Code de procédure
civile 447 Article 470 du Code de procédure civile
Guide CFE-CGC de la prud’homie
Il est vivement conseillé, lors des assemblées générales annuelles, de
prévoir des remplaçants aux présidents de section et de chambre.
En effet, si aucun remplaçant n’a
été désigné à cette occasion et que
le président veut se faire remplacer
en tant que président d’audience,
l’accord du président et du vice-président du conseil de prud’hommes
sera nécessaire.
Le président d’audience est responsable des dossiers judiciaires. Il
doit arriver suffisamment tôt avant
l’audience pour s’assurer qu’il n’y
a pas de difficultés particulières
(demande de report de renvoi, demande de sursis à statuer…).
Le président dirige les débats. Il fixe
l’ordre d’examen des affaires et peut
modifier ce qui a été prévu sur le rôle,
s’il estime que la justification des parties est légitime.
Il vérifie la qualité, l’identité des parties
et de leurs représentants, le pouvoir des
représentants et l’existence d’un motif
légitime d’absence lorsque les parties
ne comparaissent pas.
Le président d’audience n’est pas obligé de redonner la parole au demandeur suite à l’intervention du défendeur
mais doit laisser le défendeur intervenir
en dernier lieu.
Le président d’audience est chargé
du maintien de l’ordre public pendant
l’audience. Tout ce qu’il décide doit être
immédiatement exécuté448.
Généralement les troubles à l’ordre public sont liés aux contestations émises
à l’occasion de la plaidoirie adverse
ou d’une remarque d’un conseiller
prud’hommes.
Les personnes présentes à l’audience
doivent conserver une attitude digne
et le respect dû à la justice. Toute prise
de parole, sans y avoir été invité, signe
d’approbation ou de désapprobation
ou désordre est à proscrire449.
L’utilisation d’un appareil permettant
d’enregistrer, de fixer ou de transmettre
la parole ou l’image est interdite et le
matériel peut être confisqué.
Lorsqu’une personne trouble la tenue
de l’audience le président peut lui
enjoindre de cesser ses agissements,
décréter une suspension d’audience
et/ou faire noter l’incident au registre
d’audience (aussi appelé plumitif) aux
fins de poursuites pénales ultérieures
ou encore faire expulser le fauteur de
trouble par la force publique.
8.Le pénal tient le civil en l’état
En principe, le conseil de prud’hommes
doit attendre que la justice pénale ait
statué sur des plaintes concernant le
litige prud’homal avant de prendre sa
propre décision450 .
448 Article 438 du Code de procédure civile
449 Article 439 du Code de procédure civile
450 Article 4 du Code de procédure pénale
115
Guide CFE-CGC de la prud’homie
Si l’action civile en réparation du dommage causé par l’infraction peut être
exercée devant une juridiction civile,
séparément de l’action publique, il est
toutefois sursis au jugement de cette action tant qu’il n’a pas été prononcé définitivement sur l’action publique lorsque
celle-ci a été mise en mouvement.
La mise en mouvement de l’action publique n’impose pas la suspension du
jugement des autres actions exercées
devant la juridiction civile, de quelque
nature qu’elles soient, même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d’exercer, directement ou indirectement, une influence sur la solution du
procès civil.
L’action civile dont il est question ici, exercée parallèlement à l’action publique
devant une juridiction pénale, est celle
exercée contre l’auteur (ou le complice)
présumé de l’infraction, visant à obtenir
la réparation des dommages causés par
les faits pénalement répréhensibles.
Le juge civil ne peux condamner l’auteur présumé de l’infraction à payer des
dommages-intérêts au demandeur que
s’il a été reconnu coupable des faits qui
lui sont reprochés par une décision pénale définitive. Il doit donc attendre que
le juge pénal ait prononcé sa décision
avant de statuer.
La CFE-CGC attire votre attention
sur le fait que ce principe doit
se limiter aux cas où un lien fort
existe entre les deux instances et
dans lesquels la décision au civil
est dépendante de celle de la juridiction pénale.
Attention : Le conseil de prud’hommes
n’a plus à attendre la décision du
juge pénal sur l’infraction invoquée pour apprécier le caractère
réel et sérieux du licenciement disciplinaire. Il peut choisir de statuer
ou d’attendre que la juridiction
pénale se soit prononcée*.
De plus, si cette exception est soulevée devant le bureau de conciliation, elle ne produit aucun effet.
Devant le bureau de jugement, elle
doit être exposée avant de plaider.
La CFE-CGC met à votre disposition
un modèle de sursis à statuer en annexe 6 p 149, directement téléchargeable sur l'intranet confédéral…
-----------------------------------------------------
* Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 17 septembre 2008, n°07-43.211
116
Guide CFE-CGC de la prud’homie
Seule l’action civile exercée en même
temps que l’action publique et devant
la même juridiction451 est obligatoirement suspendue, dans l’attente de la
décision pénale452. Dans les autres cas,
le droit commun s’applique et c’est le
juge civil qui détermine la nécessité et
la durée du sursis à statuer453.
L’obligation pour le conseil de
prud’hommes de surseoir à statuer,
dans l’attente de la décision sur l’action publique, ne vaut que si les deux
instances concernent les mêmes faits
et que l’action publique est engagée
devant le tribunal compétent. Le sursis
ne vaut que pour les demandes qui découlent de la qualification pénale.
Dès lors que le juge prud’homal estime
que la procédure pénale n’aura aucune influence sur le litige prud’homal
ou qu’elle constitue une manœuvre
dilatoire, il peut refuser de surseoir à
statuer.
Lorsque le conseil de prud’hommes
sursoit à statuer, s’il y a condamnation
pénale, le conseil de prud’hommes est
lié par cette condamnation.
En revanche, s’il y a relaxe, non lieu
ou acquittement, le juge prud’homal est
libre de prendre la décision qu’il estime
opportune.
9.Le délibéré
La mise en délibéré
Après l’audition des parties, les débats
sont clos et le conseil des prud’hommes
doit délibérer.
En théorie, la décision peut être prononcée sur le siège, c’est-à-dire immédiatement. Mais, elle est le plus souvent mise
en délibéré et rendue postérieurement
à l’audience.
La mise en délibéré est préférable dès lors qu’elle permet aux
conseillers d’analyser le dossier
avec recul et de prendre leur décision en toute connaissance de
cause.
Si le président décide de renvoyer le
prononcé du jugement à une date ultérieure, il est tenu d’en informer les parties par tous moyens. Cette information
doit expliquer les raisons de la prorogation ainsi que la date à laquelle la
décision sera rendue454.
Les quatre conseillers devant lesquels
l’affaire a été débattue se retrouvent
donc pour prendre une décision sur
l’affaire. Ils sont tenus d’en délibérer.
451 Article 3 du Code de procédure pénale
452 Dernier alinéa de l’article 4 du Code de procédure pénale
453 Articles 378 et 379 du Code de procédure
civile
454 Article 450 du Code de procédure civile
117
Guide CFE-CGC de la prud’homie
• définitif, lorsque la juridiction statue
sur le fond du litige459 ;
La feuille de délibéré doit être remplie soigneusement. Elle comprend
les moyens et les textes juridiques et
jurisprudentiels retenus ainsi que la
décision détaillée ligne par ligne.
Le principe du secret des délibérations
est fondamental455. Ainsi, la feuille de
délibéré ne précisera que la décision
prise et restera silencieuse sur le déroulement des discussions et les positions
respectives des conseillers.
Les décisions du bureau de jugement sont
prises à la majorité absolue des voies.
Si la majorité n’est pas atteinte, le juge
départiteur devra trancher456 (cf. I) A) 2)). Le prononcé du jugement
Le jugement est prononcé en audience
publique.
Il doit respecter les dispositions du
Code de procédure civile457.
Il peut être :
• avant dire droit, lorsque le conseil
des prud’hommes ordonne une
mesure d’instruction, sans statuer
sur le fond, le jugement n’étant
alors pas susceptible d’appel, sauf
en matière d’expertise458 ;
455 Article D. 1442-13 du Code du travail
456 Article R. 1454-23 du Code du travail
457 Articles 450 et suivants du Code de procédure civile
458 Articles 27, 482 et 483 du Code de procédure civile
118
• prononcé par défaut contre le
défendeur qui n’a pas comparu
ou ne s’est pas fait régulièrement
représenter devant le bureau de
jugement.
Le jugement doit exposer les prétentions
des parties et être motivé460.
La notification du jugement aux
parties
Les décisions du conseil de prud’hommes
sont notifiées aux parties ; elles sont
envoyées par lettre recommandée avec
accusé réception aux parties par le
greffe du conseil de prud’hommes du
lieu de leur domicile.
Les parties peuvent faire signifier les
jugements par huissier461.
La notification du jugement est indispensable pour pouvoir exiger l’exécution
du jugement et fait courir les délais de
recours.
L’acte de notification d’un jugement à
une partie doit indiquer de manière
très apparente le délai d’opposition,
d’appel ou de pourvoi en cassation
dans le cas où l’une de ces voies de
recours est ouverte, ainsi que les modalités selon lesquelles le recours peut
être exercé ; il indique, en outre, que
l’auteur d’un recours abusif ou dilatoire
peut être condamné à une amende
459 Articles 480 et 481 du Code de procédure
civile
460 Article 455 du Code de procédure civile
461 Article R. 1454-26 du Code du travail
Guide CFE-CGC de la prud’homie
civile et au paiement d’une indemnité
à l’autre partie.
Lorsque le recours peut être formé sans
le ministère d’un avocat et est assujetti
à l’acquittement de la contribution pour
l’aide juridique, l’acte de notification
rappelle cette exigence, ainsi que l’irrecevabilité encourue en cas de non-respect et les modalités selon lesquelles la
partie non représentée doit justifier de
cet acquittement462.
En cas de changement survenu dans la
composition de la juridiction, il y a lieu
de reprendre les débats. Cette situation
se présente notamment en cas de survenance de faits nouveaux ou d’apparition de pièces nouvelles.
E.Quelles sont les décisions du
conseil de prud’hommes ?
1.Les différentes décisions judiciaires Le cas de réouverture des débats
Lorsque le président du bureau de
jugement estime que les juges ont suffisamment d’éléments pour statuer, il
prononce la clôture des débats. Aucune
pièce ou argument nouveau ne peut
être présenté.
Cependant, il existe une exception463 :
Le président doit ordonner la réouverture des débats chaque fois que les
parties n’ont pas été à même de s’expliquer contradictoirement sur les éclaircissements de droit ou de fait qui leur
avaient été demandés.
a) Les procès-verbaux Les procès-verbaux
permettent de
constater une situation ou d’acter les
dires des parties.
Il s’agit notamment :
• du procès-verbal de conciliation
totale ou partielle ;
• du procès verbal de
liation ;
• du procès-verbal
témoin ;
non-conci-
d’audition
de
• du procès-verbal contenant le rapport des conseillers rapporteurs.
La CFE-CGC met à votre disposition un modèle de procès-verbal,
directement téléchargeable sur
l’intranet confédéral (rubriques :
« Analyses et arguments » puis
« Prud’hommes ») …
462 Article 680 du Code de procédure civile
463 Article 444 du Code de procédure civile
119
Guide CFE-CGC de la prud’homie
b) Les ordonnances
Les différentes ordonnances émanent
principalement :
Les jugements doivent préciser les faits
et prétentions des parties466.
• du bureau de conciliation464 ;
• de la formation de référé ;
• du président de la juridiction désignant la section compétente ou
affectant provisoirement un conseiller dans une autre section.
Les ordonnances du bureau de conciliation et de la formation de référé doivent
être motivées.
c) Les jugements
Certaines mentions doivent impérativement figurer dans les jugements465 :
• la juridiction dont il émane ;
Les jugements doivent impérativement
être motivés en référence à une règle
de droit.
• la date ;
Le juge ne peut pas statuer en des termes
injurieux manifestement incompatibles
avec l’exigence d’impartialité467.
• le nom du représentant du ministère
public s’il a assisté aux débats ;
2.L’exécution des décisions judiciaires
• le nom des juges qui ont délibéré ;
• le nom du greffier ;
• les nom, prénoms ou dénomination
des
parties
ainsi
que de leur domicile ou siège
social ;
• le cas échéant, le nom des
avocats ou de toute personne
ayant
représenté
ou
assisté
les parties ;
• en matière gracieuse, le nom des personnes auxquelles il doit être notifié ;
• la signature du président et du
greffier.
464 Article R 1454-14 du Code du travail
465 Articles 454 et 456 du Code de procédure
civile
120
La CFE-CGC vous recommande
pour plus de clarté et de compréhension de faire référence aux
conclusions visées par les parties
en application de l’article 455 du
Code de procédure civile, ce qui
évite de recopier leurs conclusions.
Pour être exécutoires, les décisions
judiciaires doivent remplir certaines
conditions :
• il faut que le document soit revêtu
de la formule exécutoire, sauf si la
loi en dispose autrement468 ;
• sauf exécution volontaire, la décision doit être notifiée à la partie
débitrice469 ;
466 Article 455 du Code de procédure civile
467 Arrêt de la 2e chambre civile de la Cour
de cassation du 14 septembre 2006, n°0420.524
468 Article 502 du Code de procédure civile
469 Article 503 du Code de procédure civile
Guide CFE-CGC de la prud’homie
• pour les jugements, ils doivent avoir
force de chose jugée, c’est-à-dire ne
pas être susceptibles d’un recours
suspensif d’exécution. Seul l’appel
et l’opposition ont un effet suspensif ;
• attention en ce qui concerne l’ordonnance de référé, elle est exécutoire à titre provisoire ;
• l’ordonnance du bureau de conciliation470, quant à elle, est toujours
provisoire et n’a pas autorité de la
chose jugée au principal ;
• il en va de même des décisions des
conseillers rapporteurs, à la différence près qu’elles sont exécutoires.
a) Les modalités d’exécution des
décisions judiciaires
L’exécution volontaire ou forcée
L’exécution du jugement peut être volontaire ou forcée. Si la partie condamnée
décide d’exécuter volontairement la
décision rendue, parfois même avant
la notification du jugement, elle évite
d’avoir à payer les frais de poursuite.
Trois conditions doivent être réunies
pour recourir à l’exécution forcée d’un
jugement :
• le jugement doit avoir été notifié ou
signifié par huissier ;
• la partie gagnante doit remettre à
l’huissier une copie certifiée revêtue
de la formule exécutoire ;
• le jugement ne doit être susceptible
d’aucun recours suspensif471.
470 Article R. 1454-14 du Code du travail
471 Articles 500 et suivants du Code de procédure civile
Les difficultés d’exécution relèvent du
tribunal de grande instance, voire du
président de ce tribunal statuant en
référé472.
La partie qui veut obtenir l’exécution
forcée de la décision doit remettre à
l’huissier territorialement compétent une
expédition de la décision revêtue de la
formule exécutoire et un certificat de
non recours ou de notification.
L’exécution provisoire
L’exécution provisoire permet à la
partie gagnante d’obtenir l’exécution
immédiate du jugement dès sa notification, sans attendre l’expiration des
délais de recours.
--
L’exécution provisoire de plein droit
Les ordonnances de référé et les décisions qui prescrivent des mesures provisoires ou conservatoires sont provisoirement exécutoires de plein droit473.
Le même régime s’applique à d’autres
décisions prises par la juridiction
prud’homale474.
--
L’exécution provisoire facultative
Lorsque l’exécution provisoire est facultative, elle peut être ordonnée d’office
par le conseil de prud’hommes ou à la
demande de l’une des parties475. Elle
doit être motivée.
472 Article R. 1454-27 du Code du travail
473 Article 514 du Code de procédure civile
474 Celles prises en application des articles
R. 1454-14, R. 1454-15, R. 1454-16, R.
1454-28, R. 1454-6 et R. 1245-1 du Code
du travail
475 Article 515 du Code de procédure civile
121
Guide CFE-CGC de la prud’homie
--
Les dispositions communes à l’exécution provisoire de droit et facultative
Le montant de l’astreinte civile est librement fixé par le juge.
Une exécution provisoire, une fois ordonnée, ne peut être arrêtée que par le
premier président de la Cour d’appel
qui statue en référé pour l’interdire
dans deux cas seulement : soit si elle
est interdite par la loi, soit lorsqu’elle
risque d’entraîner des conséquences
manifestement excessives476.
Si le débiteur n’exécute pas le jugement, le président du tribunal de
grande instance, juge de l’exécution,
liquide l’astreinte civile480 c’est-à-dire
qu’il en détermine le montant avant de
procéder au règlement.
Attention : le danger avec une exécution provisoire, est qu’elle peut être
remise en cause par une décision ultérieure. Le risque est donc que la partie
qui a demandé cette exécution provisoire doive, si le juge ne confirme pas
celle-ci, remettre les choses en l’état où
elles étaient avant l’exécution de cette
exécution provisoire et donc à réparer
le dommage subi par le débiteur de
l’exécution477.
Lorsque l’exécution provisoire a été
ordonnée, elle ne peut être suspendue,
en cas d’appel, par le premier président
de la Cour d’appel statuant en référé,
que si elle constitue une violation manifeste du principe du contradictoire ou de
l'article 12 du Code de procédure civile
ou qu’elle risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives481.
L’astreinte civile
L’astreinte civile est une mesure de
contrainte, que le juge peut décider de
mettre en place, afin d’assurer l’exécution des décisions de justice478.
L’astreinte civile correspond à une
condamnation à payer une somme
d’argent à raison d’une certaine somme
par jour (ou semaine ou mois) de retard.
Elle est prononcée par le juge du fond
ou le juge des référés, contre un débiteur
récalcitrant, en vue de l’amener à exécuter son obligation479.
476 Article 524 du Code de procédure civile
477 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 28 octobre 1981, n°79-42.537
478 Article 33 de la loi du 9 juillet 1991, n° 91-650
479 Lexique Dalloz « Termes juridiques » 10e édition
122
b) La suspension de l’exécution
Des pouvoirs identiques appartiennent
au juge qui a rendu la décision, en cas
d’opposition.
c) L’extinction de l’instance
L’extinction de l’instance peut être causée par plusieurs phénomènes.
L’acquiescement à la demande
L’acquiescement à la demande correspond à la reconnaissance volontaire,
expresse ou tacite, par le défendeur
de l’exactitude des prétentions du
demandeur482.
Cet acquiescement doit toujours être
certain, même s’il peut être implicite.
480 Article 35 de la loi du 9 juillet 1991, n° 91-650
481 Article 524 du Code de procédure civile
482 Article 408 du code de procédure civile
Guide CFE-CGC de la prud’homie
L’acquiescement au jugement
L’acquiescement au jugement est la renonciation à exercer une voie de recours483.
Le désistement d’instance
Le désistement d’instance correspond à
l’abandon par le demandeur de l’instance engagée ou de l’action, c’est-àdire de son droit d’agir en justice.
Il permet au demandeur de renoncer
à sa demande en vue de mettre fin à
l’instance, avec l’accord du défendeur,
ce qui entraîne extinction de l’instance
mais pas renonciation à l’action484.
Le désistement d’instance prive la juridiction saisie de tout pouvoir juridictionnel485.
La péremption d’instance
La péremption d’instance intervient
lorsque les parties s’abstiennent d’accomplir, pendant deux ans, les diligences qui ont été expressément mises
à leur charge par la juridiction486.
La péremption peut être demandée par
l’une des parties et elle est alors de
droit. En revanche, elle ne peut pas être
relevée d’office par le juge487.
La Cour de cassation a donné quelques
précisions sur cette question en décidant que « le délai de péremption ne
pouvait commencer à courir à compter
483 Article 410 du Code de procédure civile
484 Articles 394 et suivants du Code de procédure civile
485 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 3 mars 2010, n°09-40.283
486 Article R. 1452-8 du Code du travail
487 Articles 387 et 388 du Code de procédure civile
de l'appel mais seulement à compter de
la date impartie pour la réalisation de
diligences, que les diligences prescrites
par le greffe n'émanaient pas de la juridiction et qu'une décision de radiation,
qui n'a pour conséquence que le retrait
de l'affaire du rang des affaires en
cours, ne met expressément à la charge
des parties aucune diligence (…) 488.
L'instance s'éteint évidemment par
le prononcé du jugement. Deux
cas particuliers méritent d'être
mentionnés :
La caducité
La caducité est encourue lorsque
le demandeur ne comparaît pas,
sans avoir justifié d’un motif légitime, en temps utile. Il s’agit d’une
simple possibilité.
Dans le cas où le bureau de jugement déclare la citation caduque, la
demande peut être renouvelée une
fois. Elle est alors portée directement
devant le bureau de jugement*.
La résiliation judiciaire et la prise
d'actes
Pour des raisons pratiques ces
modes de rupture du contrat méritent un développement particulier
que vous trouverez sur l'intranet
(rubriques : « Analyses et arguments » puis « Prud’hommes »).
----------------------------------------------------------------------* Article R. 1454-21 du Code du travail
488 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 28 octobre 1998, n°96-44.066
123
Guide CFE-CGC de la prud’homie
3.Les recours contre les jugements
des conseillers prud’homaux
Lorsqu’un acte ou une formalité doit
être accompli avant l’expiration d’un
délai, celui-ci a pour origine la date de
l’acte, de l’événement, de la décision
ou de la notification qui le fait courir489.
a) L’appel490 Quand peut-on faire appel ?
Ce recours permet de faire réformer
ou annuler, par une Cour d’appel,
le jugement rendu par le conseil de
prud’hommes. Le jugement prud’homal
mis en cause doit être définitif.
L’appel est une voie ordinaire de recours
Le délai dont dispose la partie qui souhaite interjeter appel est d’un mois. En
revanche, des délais spécifiques sont
prévus en matière de référé. Il est ainsi
de quinze jours en matière de référé491.
Le délai court à compter de la notification du jugement, à compter de la
réception de cette notification par la
partie désirant interjeter appel.
Par exception, le premier président de
la Cour d’appel peut autoriser l’appel
d’une décision non définitive, s’il y a un
motif grave et légitime, dans trois cas :
124
• s’il a affaire à un jugement ordonnant une expertise ;
• s’il a affaire à un jugement prononçant un sursis à statuer.
Le taux de compétence est de
4 000 euros (en 2011), ce qui signifie que seuls les jugements des
prud’hommes dont la valeur totale des
demandes est supérieure à ce montant
peuvent faire l’objet d’un appel492.
Le jugement en dernier ressort n’est pas
susceptible d’appel. Il s’agit des situations dans lesquelles :
• soit lorsque la valeur totale des prétentions d’aucune des parties ne
dépasse le taux de compétence fixé
par décret (4 000 euros en 2011) ;
• soit lorsque la demande tend à
la remise de documents que l’employeur est tenu de délivrer au
salarié493.
Quelle est la procédure en appel ?
Seules les parties au procès en première instance peuvent interjeter appel,
dès lors qu’elles ont un intérêt à agir et
qu’elles n’ont pas renoncé à leur droit
de faire appel494.
L'appel est porté devant la chambre
sociale de la Cour d'appel.
• s’il a affaire à une ordonnance de
référé ;
Il est formé, instruit et jugé suivant la procédure sans représentation obligatoire495.
489 Article 640 du Code de procédure civile
490 Articles L. 1462-1, R. 1452-7, R. 1461-1, R.
1461-2, R. 1462-1, R. 1462-2, D. 1463-3
du Code du travail, 542 à 570 et 931 à 949
du Code de procédure civile
491 Article R. 1455-11 du Code du travail
492 Articles L. 1462-1, R. 1462-1 et D. 1462-3
du Code du travail
493 Article R. 1462-1 du Code du travail
494 Arrêt de la 2e chambre civile de la Cour de
cassation du 6 mars 2008, n°07-12.538
495 Article R. 1461-2 du Code du travail
Guide CFE-CGC de la prud’homie
La déclaration d’appel se fait au greffe
de la Cour d’appel, par déclaration ou
par lettre recommandée496. Cette déclaration, datée et signée, doit contenir à
peine de nullité les mentions suivantes :
• pour les personnes physiques : l'indication des nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et
lieu de naissance du demandeur ;
• pour les personnes morales : l’indication de leur forme, leur dénomination, leur siège social et de l’organe
qui les représente légalement ;
• l’indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la
demande est formée, ou, s’il s’agit
d’une personne morale, de sa dénomination et de son siège social ;
• l’objet de la demande ;
• le jugement dont il est fait appel ;
• les chefs de celui-ci auxquels se
limite l’appel ;
• le nom et l’adresse du représentant
de l’appelant devant la Cour.
Elle est accompagnée d’une copie de
la décision497.
L’appel peut porter sur tout le jugement
ou être limité à certains chefs de demande et peut introduire de nouvelles
demandes.
l’appel principal a expiré498. Attention,
il ne sera toutefois pas reçu si l’appel
principal n’est pas lui-même recevable.
Le recours doit être fait dans le délai
d’un mois, ce délai étant suspensif. Il
court à compter de la signification de
la décision par huissier ou de sa notification par le greffe. La décision devient
définitive une fois le délai expiré. Tant
que le délai n’a pas expiré, le jugement
ne peut pas, en principe, être exécuté.
Ce délai d’un mois court à compter
de la notification de la décision de
première instance. Ce délai expire à
24 heures le jour du mois qui porte
le même quantième que le jour qui
fait courir le délai. Le délai qui expire
normalement un samedi, dimanche
ou un jour férié ou chômé est prorogé
jusqu’au premier jour ouvrable suivant.
Exemple : Si la notification du jugement
du conseil de prud’hommes a lieu le
mercredi 3 août 2011, l’appel devrait
avoir lieu avant le 3 septembre 2011.
Or il se trouve que le 3 septembre 2011
tombe un samedi. L’appel pourra avoir
lieu jusqu’au lundi 5 septembre 2011,
à 24 heures.
L’appel incident est celui par lequel l’intimé demande à la Cour d’appel de réformer les dispositions du jugement qui
lui sont défavorables. Il peut être formé
même après que le délai pour former
496 Article R. 1461-1 du Code du travail
497 Article 58 du Code de procédure civile et
R1461-1 du Code du travail
498 Article 550 du Code de procédure civile
125
Guide CFE-CGC de la prud’homie
L’opposition499 Le délai court à compter de la
réception, signée par le destinataire, de la notification de la décision par lettre recommandée AR,
envoyée par le secrétariat greffe
du conseil des prud’hommes.
Ainsi, la Cour de cassation a jugé
que la simple connaissance d’un jugement par le destinataire, un tiers
ayant signé l’AR à sa place, ne faisant pas courir le délai d’un mois.
En ce qui concerne la date de
l’appel, deux situations peuvent
être envisagées, que la Haute juridiction a tranché :
--
--
si l’appel est formé par lettre
simple, la date de prise en
considération est celle à
laquelle l’appel a été enregistré par le greffe. Il est en de
même en cas de déclaration ;
si l’appel est formé par lettre
recommandée, la date d’appel
est alors celle de l’expédition de la lettre figurant sur le
cachet du bureau d’émission.
L’opposition vise, pour le défendeur
qui n’a pas comparu à l’audience de
jugement ou de référé à faire rétracter
le jugement rendu par défaut par une
juridiction500. Elle remet en question les
points jugés par défaut devant la même
juridiction, afin qu’il soit à nouveau statué en fait et en droit501.
Il faut donc que le défendeur n’ait pas
comparu, que la décision ait été rendue
en dernier ressort et que la citation n’ait
été délivrée à personne (c’est-à-dire que
le défendeur n’ait pas été convoqué devant le bureau de jugement par émargement au procès-verbal de l’audience
de conciliation).
L’opposition est portée devant le bureau
de jugement du conseil de prud’hommes
qui a pris la première décision502.
Le délai de recours est d’un mois et il est
suspensif. Les ordonnances de référé
rendues en dernier ressort peuvent également faire l’objet d’une opposition
dans un délai de quinze jours503.
La déclaration d’opposition doit être
déposée au greffe du conseil de
prud’hommes.
----------------------------------------------------------------* Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation, 4 mai 1993, n°88-45.634
** Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation, 7 janvier 1992, n°89-42.336
*** Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation, 14 mai 1992, n° 89-42.821
126
499 Articles R. 1463-1 du Code du travail, 476,
540 et 571à 578 du Code de procédure
civile
500 Article 571 du Code de procédure civile
501 Article 572 du Code de procédure civile
502 Articles R. 1463-1, R. 1452-1, R. 1452-2,
R. 1452-3, R. 1452-4 du Code du travail et
articles 490, 571 à 578 du Code de procédure civile
503 Article 490 du Code de procédure civil
Guide CFE-CGC de la prud’homie
b) La tierce-opposition504
La tierce-opposition vise à faire rétracter ou réformer un jugement au profit du
tiers qui l’attaque. Elle remet en question les points jugés que le tiers critique,
afin que la juridiction statue à nouveau
en fait et en droit505. Le tiers peut être
assisté ou représenté dans les mêmes
conditions qu’une des parties.
Il s’agit d’une voie de recours extraordinaire506, ce qui signifie qu’elle n’est ouverte que lorsqu’un texte le prévoit507.
Elle est très rarement invoquée en
matière prud’homale, même si elle est
parfois utilisée par l’AGS (l’Association
pour la gestion du régime d’assurance
des créances des salariés).
Toute personne qui y a intérêt peut former une tierce-opposition à la condition
de n’avoir été ni partie, ni représentée
au jugement qu’elle attaque508.
Elle est formée comme l’opposition.
Le jugement initial conserve ses effets entre
les parties, même sur les chefs annulés509.
c) Le contredit
Lorsque le juge se prononce sur la
compétence sans statuer sur le fond du
litige, sa décision peut faire l’objet d’un
contredit d’incompétence, c’est-à-dire
d’un recours devant la Cour d’appel.
504 Articles 582 à 592 du Code de procédure
civile
505 Article 580 du Code de procédure civile
506 Article 527 du Code de procédure civile
507 Article 580 du Code de procédure civile
508 Article 583 du Code de procédure civile
509 Article 591 du Code de procédure civile
Ce contredit doit être motivé et remis
au secrétariat de la juridiction qui a
rendu la décision dans les quinze jours
du prononcé du jugement, sinon il est
irrecevable510.
Le greffe du conseil de prud’hommes
notifie immédiatement à la partie adverse une copie du contredit, par lettre
recommandée avec accusé de réception et en informe son représentant, si
la partie est représentée.
Il transmet concomitamment le dossier
de l’affaire avec le contredit et la copie
du jugement au greffier en chef de la
Cour d’appel511.
Le premier président de la Cour d’appel fixe la date de l’audience, qui doit
avoir lieu le plus rapidement possible
et le greffier de la Cour d’appel en
informe les parties par lettre recommandée avec accusé de réception512.
Dès lors que le conseil des prud’hommes
s’est déclaré compétent, l’audience est
suspendue jusqu’à ce que la Cour d’appel ait statué513.
La Cour d’appel peut faire droit à l’exception d’incompétence et renvoyer
l’affaire à la juridiction qu’elle estime
compétente, cette décision s’imposant
alors aux parties et au juge de renvoi514.
Si le conseil de prud’hommes compétent se trouve dans le ressort de la Cour
d’appel, cette dernière peut décider de
510 Articles 80 à 91 du
civile
511 Article 83 du Code de
512 Article 84 du Code de
513 Article 81 du Code de
514 Article 86 du Code de
Code de procédure
procédure
procédure
procédure
procédure
civile
civile
civile
civile
127
Guide CFE-CGC de la prud’homie
statuer sur le fond, en ayant au besoin
préalablement ordonné les mesures
d’instruction nécessaires515.
--
s’il a été jugé sur des pièces reconnues ou judiciairement déclarées
fausses depuis le jugement ;
Si la Cour d’appel aurait dû être saisie
d’un appel et non d’un contredit, elle
reste saisie et elle statue comme s’il
avait été interjeté appel de la décision
du conseil des prud’hommes516.
--
s’il a été jugé sur des attestations,
témoignages ou serments judiciairement déclarés faux depuis le jugement.
d) Le recours en révision517
Lorsque un jugement est passé en force
de chose jugée, il est possible de faire
un recours en révision pour qu’il soit de
nouveau statué en fait et en droit.
Le Code de procédure civile restreint
cette possibilité en édictant plusieurs
conditions cumulatives :
• d’une part, seules les personnes qui
ont été parties ou représentées au
jugement peuvent demander cette
révision ;
• d’autre part, l’article595 du Code
de procédure civile prévoit que le
recours en révision ne peut être
ouvert que pour l’une des causes
suivantes :
--
--
128
s’il se révèle, après le jugement,
que la décision a été surprise par
la fraude de la partie au profit de
laquelle elle a été rendue ;
Dans tous ces cas, le recours n’est recevable que si son auteur n’a pu, sans
faute de sa part, faire valoir la cause
qu’il invoque avant que la décision ne
soit passée en force de chose jugée.
e) Le pourvoi en cassation518 Le pourvoi en cassation permet de faire
censurer par la Cour de cassation la
non-conformité d’un jugement ou d’un
arrêt attaqué aux règles de droit. En
effet, La Cour de cassation ne rejuge
pas les faits.
Pour être valable, il faut que le pourvoi soit effectué pour violation de la
loi, excès de pouvoir, incompétence,
manque de base légale, vice de forme
ou contrariété de motifs.
Il n’est pas possible, en principe, de
faire valoir des moyens nouveaux devant cette Haute Juridiction.
Le délai de recours est de deux mois et
il n’est pas suspensif.
si, depuis le jugement, il a été recouvré des pièces décisives qui avaient
été retenues par le fait d’une autre
partie ;
Le recours est effectué par une déclaration écrite remise ou envoyée par lettre
recommandée avec accusé de réception
au greffe de la Cour de cassation519.
515 Article 89 du Code de procédure civile
516 Article 91 du Code de procédure civile
517 Article 593 à 603 du code de procédure
civile
518 Articles L. 1462-1, R. 1462-1, R. 1462-2, D.
1462-3 du Code du travail et 604 à 639,
974 à 982 et 1009 à 1037 du Code de
procédure civile
519 Article 974 du Code de procédure civile
Guide CFE-CGC de la prud’homie
Cette déclaration doit contenir, à peine
de nullité, les mentions suivantes :
• pour les personnes physiques : l’indication des nom, prénoms, domicile du demandeur en cassation ;
• pour les personnes morales : l’indication de leur forme, leur dénomination, leur siège social ;
• l’indication des nom, prénoms et
domicile du défendeur, ou, s’il s’agit
d’une personne morale, de sa dénomination et de son siège social ;
• la constitution de l’avocat au
Conseil d’État et à la Cour de cassation du demandeur ;
• l’indication de la décision attaquée ;
• les chefs de la décision auxquels le
pourvoi est limité ;
• la date et la signature de l’avocat
au Conseil d’État et à la Cour de
cassation520. Elle précise, si besoin
est, les chefs de compétence
contestés.
Le greffe prévient immédiatement le
défendeur par lettre simple, en lui envoyant une copie de la déclaration, et
lui indique que s’il veut se défendre, il
doit constituer avocat à la Cour de cassation. En effet, le recours à un avocat
à la Cour de cassation est obligatoire,
sauf disposition contraire521.
Si la lettre ne parvient pas à son expéditeur, le greffe doit demander à l’avocat
du demandeur de procéder par voie de
signification d’huissier522.
520 Article 975 du Code de procédure civile
521 Article 973 du Code de procédure civile
522 Article 977 du Code de procédure civile
Le demandeur en cassation doit, sous
peine de déchéance, remettre au greffe
de la Cour de cassation un mémoire
contenant les moyens de droit invoqués
contre la décision attaquée, et ce dans
un délai maximum de quatre mois.
Ce même délai et la même sanction
s’appliquent concernant la notification
de ce pourvoi à l’avocat de la partie
adverse523. Cette dernière dispose alors
de deux mois pour rédiger un mémoire
en réponse, signé par son avocat, et
le communiquer au greffe de la Cour
de cassation et à l’avocat de la partie
adverse524.
Les documents suivants doivent être
remis au greffe dans le délai de quatre
mois sous peine d’irrecevabilité du
pourvoi, prononcée d’office :
• une copie de la décision attaquée
et de ses actes de signification ;
• une copie de la décision confirmée
ou infirmée par la décision attaquée525.
Le demandeur doit également joindre
les pièces invoquées à l’appui du pourvoi et une copie des dernières conclusions que les parties au pourvoi ont
déposées devant la juridiction dont
émane la décision attaquée526.
Les pourvois contre les décisions rendues en matière prud’homale sont portés devant la chambre sociale de la
Cour de cassation.
523
524
525
526
Article
Article
Article
Article
978 du Code de procédure civile
982 du Code de procédure civile
979 du Code de procédure civile
979-1 du Code de procédure civile
129
Guide CFE-CGC de la prud’homie
Signalons qu’aucun recours national
n’est possible contre un arrêt de Cour
de cassation (sauf peut-être à envisager un conflit de décisions entre le
Conseil d’État et la Cour de cassation
devant être traité par le tribunal des
conflits mais cette hypothèse est relativement rare).
F.Procédures spéciales devant
le conseil de prud’hommes
« Le référé », la requalification du
contrat à durée déterminée et du contrat
de mission, le licenciement économique
et les garanties des créances salariales.
1.La procédure de référé527
a) Le déroulement de la procédure
de référé
La demande en référé est formée par
le demandeur ou par son représentant
soit par acte d’huissier de justice, soit
dans les modalités normales de saisine
du conseil de prud’hommes528. Dans ce
second cas, le conseil de prud’hommes
est saisi soit par une demande, soit par
la présentation volontaire des parties
devant le bureau de conciliation529.
Lorsque la demande est formée par
acte d’huissier de justice, une copie de
l’assignation est remise au greffe, au
plus tard la veille de l’audience.
527 Articles R. 1455-9 à R1. 455-11 du Code
du travail et 484, 486 et 488 à 492 du
Code de procédure civile
528 Article R. 1455-9 du Code du travail
529 Article R. 1252-1 du Code du travail
130
La demande est formée au greffe du
conseil de prud’hommes, celle-ci pouvant être adressée par lettre recommandée. Outre les mentions prescrites
par l’article 58 du code de procédure
civile, la demande mentionne chacun
des chefs de demande. Le greffe délivre
ou envoie immédiatement un récépissé
au demandeur. Ce récépissé, ou un
document qui lui est joint, reproduit
les dispositions des articles R. 1453-1,
R. 1453-2, R. 1454-10 et R. 1454-12
à R. 1454-18530 du Code du travail.
Le greffe informe le demandeur des
lieu, jour et heure de l’audience de
référé à laquelle l’affaire sera appelée :
• soit verbalement lors de la présentation de la demande ;
• soit par lettre simple531.
La convocation du demandeur, établie
sur le même formulaire que le récépissé
indique :
• les nom prénom ou raison sociale,
profession et domicile du demandeur ;
• les nom, prénom ou raison sociale,
profession et domicile du défendeur ;
• la date du dépôt de la demande ;
• le numéro de dossier (le n° de RG) ;
• la date et l’heure de l’audience ;
• la date d’émission de la convocation ;
• le nom et la signature de l’agent qui
établit le document ;
• les chefs de la demande.
530 Article R. 1452-2 du Code du travail
531 Article R. 1452-3 du Code du travail
Guide CFE-CGC de la prud’homie
Le greffe invite le demandeur à se munir
de toutes les pièces utiles.
Les articles 484, 486 et 488 à 492 du
Code de procédure civile sont applicables au référé prud’homal532. Cela a
notamment pour conséquence que les
ordonnances de référé sont exécutoires
à titre provisoire, n’ont pas autorité de
la chose jugée au principal, ne peuvent
être modifiées ou rapportées en référé
qu’en cas de circonstances nouvelles,
ne sont pas susceptibles d’opposition,
peuvent prononcer des astreintes civiles
et statuer sur les dépens.
L’appel est possible contre les ordonnances de référé qui n’ont pas été
prises en dernier ressort. Le délai d’appel est alors de quinze jours533.
Seules les demandes
de la compétence du
prud’hommes au fond
soumises à la formation
conseil de prud’hommes.
qui relèvent
conseil des
peuvent être
de référé du
Ainsi, dans tous les cas d’urgence,
la formation de référé peut, dans la
limite de la compétence des conseils
de prud’hommes, ordonner toutes les
mesures qui ne se heurtent à aucune
contestation sérieuse ou que justifie
l’existence d’un différend534.
De plus, la formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures
conservatoires ou de remise en état
qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un
532 Article R. 1455-10 du Code du travail
533 Article R. 1455-11 du Code du travail
534 Article R. 1455-5 du Code du travail
trouble manifestement illicite535.
Le juge des référés peut aussi accorder une provision au créancier lorsque
l’obligation n’est pas sérieusement
contestable536. Le montant de la provision n’ayant d’autre limite que le montant non sérieusement contestable de la
dette alléguée, elle peut couvrir l’intégralité de la demande537.
La formation des référés peut également
délivrer une injonction538. Il s’agit d’« ordonner l'exécution de l'obligation même
s'il s'agit d'une obligation de faire ».
La formation de référé, si elle estime que
la demande excède sa compétence, peut
renvoyer directement l’affaire devant le
bureau de jugement, à condition :
• qu’elle présente une urgence particulière ;
• que toutes les parties soient d’accord ;
• que la formation de référé ait essayé
au préalable de concilier les parties
en audience non publique539.
La conciliation n’est pas obligatoire
devant la formation de référé.
Les règles relatives à la comparution,
l’assistance et la représentation s’appliquent au référé prud’homal. Les
règles applicables devant le bureau de
jugement sont aussi concernées540.
535 Article R. 1455-6 du Code du travail 536 Article R. 1455-7 du Code du travail
537 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 9 décembre 1987, n°86-43.504
538 Article R. 1455-7 du Code du travail
539 Article R. 1455-8 du Code du travail
540 Article 486 du Code de procédure civile
131
Guide CFE-CGC de la prud’homie
La Cour de cassation est venue apporter
quelques précisions utiles qui découlent
de la particularité des décisions rendues
par cette formation. Ainsi, l’ordonnance
de référé étant une décision provisoire
qui n’a pas au principal l’autorité de la
chose jugée, une demande portée devant
la juridiction des référés ne peut rendre
irrecevable une demande dont est saisi
le juge du principal par l’introduction de
l’instance au fond541. Ces deux actions
sont indépendantes542. En effet, le désistement d’une instance introduite devant la
formation de référé prud’homal, lorsqu’il
n’est pas accompagné d’un désistement
d’action clair et non équivoque, laisse
intact le droit d’agir devant la formation
de jugement du conseil de prud’hommes.
Les ordonnances de référé peuvent
faire l’objet d’un appel dans un délai
de quinze jours, sauf si elles ont été
rendues en dernier ressort. Ce recours
n’interrompt pas l’exécution de la décision provisoire546.
Il est possible de faire opposition contre
une ordonnance rendue en dernier ressort dans un délai de quinze jours547.
Même si cela n’est pas précisé par le
Code du travail, en pratique, l’exception
d’incompétence peut aussi être soulevée
devant la formation de référé, dès lors
que cela est fait avant d’aborder le fond
de l’affaire, c’est-à-dire in limine litis.
Vous trouverez en annexe 8 p 151
et sur l'intranet de la CFE-CGC
(rubriques : « Analyses et arguments » puis « Prud’hommes »), un
modèle d'ordonnance de référé
des différents cas.
Par exception, certains recours doivent
être portés directement devant le bureau de jugement statuant en la forme
des référés543. Ces recours sont jugés
en dernier ressort544.
2.La requalification du contrat à
durée déterminée (CDD) ou du
contrat d’intérim
b) Les ordonnances de référé Les ordonnances de référé sont provi541 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 19 mai 1988, n° 85-43.243
542 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 12 janvier 1993, n° 88-43.754
543 Articles L. 3142-97, L. 3142-13, L. 314234, L. 3142-54, R. 3142-28 du Code du
travail et L 225-33 du Code de commerce
544 Articles R. 3142-4, R. 3142-29, D. 3142-16
et D. 3142-52 du Code du travail
132
soires, exécutoires immédiatement par
provision, avec éventuellement prononcé d’une astreinte civile545.
a) La requalification du contrat à
durée déterminée (CDD)
Tout contrat de travail conclu en méconnaissance des dispositions du
545 Article R. 1455-10 du Code du travail
546 Article R. 1455-11 du Code du travail et arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 5 novembre 1987, n°84-42.899
547 Article 490 du Code de procédure civile
Guide CFE-CGC de la prud’homie
Code du travail relatives aux cas de
recours aux CDD548 est réputé à durée
indéterminée549.
Un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut
avoir ni pour objet ni pour effet de
pourvoir durablement un emploi lié à
l’activité normale et permanente de
l’entreprise550.
Lorsqu’aucun contrat écrit n’a été
conclu, le contrat de travail est présumé
à durée indéterminée551. Cependant,
le salarié peut, s’il le souhaite, prouver
l’existence d’un contrat à durée déterminée, institué verbalement552.
La Cour de cassation a, par ailleurs,
décidé que toutes les demandes formulées en même temps que la demande
de requalification font l’objet d’une
saisine directe du bureau de jugement.
Ainsi, le salarié qui porte sa demande
de requalification du contrat à durée
déterminée en contrat à durée indéterminée directement devant le bureau de
jugement peut présenter devant cette
formation toute autre demande qui
dérive du contrat de travail553, sans
passer par la conciliation.
548 Articles L. 1242-1 à L. 1242-4, L. 1242-6
à L. 1242-8, L. 1242-12, alinéa premier,
L. 1243-11, alinéa premier, L. 1243-13,
L. 1244-3 et L. 1244-4 du Code du travail
549 Article L. 1245-1 du Code du travail
550 Article L. 1242-1 du Code du travail
551 Article L. 1221-2 du Code du travail
552 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 10 juillet 2002, n° 00-44.534
553 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de Cassation du premier avril 2003, n° 00-44593
Le déroulement de la procédure --
L’action par le salarié
Par principe, seul le salarié peut se
prévaloir de la requalification de son
contrat de travail à durée déterminée
ou de son contrat d’intérim en contrat à
durée indéterminée554.
Ainsi, le juge ne peut pas requalifier
d’office, c’est-à-dire de sa propre initiative, le contrat en contrat à durée indéterminée555.
L’AGS (Association pour la gestion du
régime d’assurance des créances des
salariés) n’est pas recevable non plus,
sauf fraude dûment établie qu’il lui appartient de démontrer, à demander la
requalification d’un contrat de travail à
durée déterminée en contrat de travail
à durée indéterminée556.
Mais les syndicats ont en la matière,
sous certaines conditions, un rôle important à jouer.
--
L’action par le syndicat
Les organisations syndicales représentatives dans l’entreprise peuvent exercer
en justice toutes les actions, qui résultent
du titre IV du Code du travail sur le CDD,
en faveur d’un salarié, sans avoir à justifier d’un mandat de l’intéressé.
Le salarié en est averti dans des conditions déterminées par voie réglemen554 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 16 janvier 1991, n° 87-43.827
555 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 30 octobre 2002, n° 00-45.572
556 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 4 décembre 2002 n° 00-43.750
133
Guide CFE-CGC de la prud’homie
taire et ne doit pas s’y être opposé dans
un délai de quinze jours à compter de
la date à laquelle l’organisation syndicale lui a notifié son intention.
d’un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée561,
sa décision est exécutoire de droit à
titre provisoire562.
D’autres conditions sont fixées par les
textes législatifs et réglementaires557.La
saisine directe du bureau de jugement
du conseil de prud’hommes
Cette procédure s’applique même si la
demande est faite après l’échéance du
terme du contrat563. Grâce à ce principe, lorsque le contrat à durée déterminée d’un salarié se prolonge au-delà
du terme initialement prévu, ledit salarié pourra bénéficier d’une indemnité
de requalification.
Lorsqu’un salarié réclame la requalification de son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée,
l’affaire est portée directement devant
le bureau de jugement, qui statue, par
une procédure accélérée, dans le délai
d’un mois suivant sa saisine.
L’inobservation de ce délai n’est pas
une fin de non-recevoir et n’entraîne
pas la nullité du jugement558.
Ce mode de saisine est également ouvert lorsque la question de la qualification du contrat se pose à l’occasion de
la rupture du contrat de travail559.
Toutes les demandes qui dérivent du
contrat de travail (indemnités de rupture, rappels de salaire, rappels de
congés payés) sont comprises dans
cette procédure accélérée560.
La décision est exécutoire de droit à
titre provisoire
Lorsqu’un conseil de prud’hommes est
saisi d’une demande de requalification
557 Articles L. 1247-1 et D1247-1du Code du
travail
558 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 8 décembre 2004, n° 02-40.513
559 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 2 mai 2000, n° 98-41.557
560 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 4 décembre 2002, n° 00-40.255
134
--
Les effets de la requalification
Il faut prendre en compte les heures supplémentaires faisant partie du salaire
dans le calcul de cette indemnité564.
Si le juge reconnaît le bien-fondé de la
demande d’un salarié, visant à voir son
contrat à durée déterminée requalifié
en contrat à durée indéterminée, il doit
condamner l’employeur à verser au
salarié une indemnité, au moins égale
à un mois de salaire565.
L’action en paiement de l’indemnité de
requalification est soumise à la prescription quinquennale566.
Le juge peut, sans réaliser un cumul
illicite d’indemnités, accorder, outre
l’indemnité de requalification d’un
contrat de travail à durée déterminée
561 Article L. 1245-2 du Code du travail
562 Article R. 1245-1 du Code du travail 563 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 9 mars 1999, n° 96-41.586
564 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 10 juin 2003, n° 01-40.779
565 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 28 novembre 2000, n° 98-42.999
566 Article 2224 du Code civil
Guide CFE-CGC de la prud’homie
en contrat à durée indéterminée567, les
sommes qu’il estime dues au titre des
salaires impayés568.
L’indemnité de précarité qui compense
pour le salarié la situation dans laquelle
il est placé du fait de son contrat à durée déterminée, lorsqu’elle est perçue
par le salarié à l’issue de son contrat,
lui reste acquise et ce malgré une requalification ultérieure de ce contrat en
contrat à durée indéterminée569.
b) La requalification du contrat de
mission
La Cour de cassation pratique depuis
quelques années déjà les requalifications-sanctions à l’encontre des entreprises utilisatrices qui, par exemple,
continuent de faire travailler un salarié
temporaire après la fin de sa mission
sans avoir conclu avec lui un contrat de
travail ou sans nouveau contrat de mise
à disposition. Ce salarié est alors réputé lié à l’entreprise utilisatrice par un
contrat de travail à durée indéterminée.
Lorsque le conseil de prud’hommes est
saisi d’une demande de requalification
d’un contrat de mission en contrat de
travail à durée indéterminée, l’affaire
est directement portée devant le bureau
de jugement qui statue au fond dans le
délai d’un mois suivant sa saisine570.
Si le conseil de prud’hommes fait droit à
la demande du salarié, il lui accorde une
567 Article L. 1245-2 du Code du travail
568 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 8 juillet 2003, n° 02-45.092
569 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 9 mai 2001, n° 98-46.205
570 Article L. 1251-42 du Code du travail
indemnité, à la charge de l’entreprise
utilisatrice, ne pouvant être inférieure
à un mois de salaire. Cette disposition
s’applique sans préjudice de l’application des dispositions du Code du travail
relatives aux règles de rupture du contrat
de travail à durée indéterminée571.
De plus, la décision du conseil de
prud’hommes saisi d’une demande de
requalification d’un contrat de mission en
contrat de travail à durée indéterminée
est exécutoire de droit à titre provisoire572.
3.Le licenciement pour motif économique
a) Qui statue sur le licenciement
pour motif économique ? Toute section d’un conseil de
prud’hommes comportant plusieurs
chambres doit comprendre une
chambre compétente pour connaître
des litiges relatifs aux licenciements
économiques573.
Les sections n’ayant pas de chambre
peuvent constituer une chambre spé571 Article L. 1251-41 du Code du travail 572 Article D. 1251-3 du Code du travail
573 Article R. 1423-9 du Code du travail
135
Guide CFE-CGC de la prud’homie
ciale, dès lors qu’elles ont suffisamment
de conseillers et que le premier président de la Cour d’appel accepte la
proposition de l’assemblée générale du
conseil de prud’hommes concerné.
S’il n’y a pas de chambre spéciale, la
section reste compétente574.
La section ou la chambre statue en
urgence575.
Le conseil des prud’hommes peut
ordonner la jonction des instances de
demandeurs qui contestent le motif économique d’un même licenciement.
b) Quelle est la procédure à suivre ?
L’employeur doit fournir aux juges tous
les éléments d’information communiqués aux représentants du personnel
ou, s’il n’y a pas de représentants du
personnel dans l’entreprise, tous les éléments fournis à l’administration, lors de
la procédure de licenciement ainsi que,
pour les licenciements économiques collectifs, les procès-verbaux des réunions
au cours desquelles les représentants
du personnel ont discuté du projet de
licenciement économique.
La communication de ces documents
doit se faire dans les huit jours suivant la
date de réception de la convocation devant le bureau de conciliation par dépôt
au greffe du conseil de prud’hommes ou
par envoi par lettre recommandée avec
accusé de réception576.
Le greffe informe le salarié, verbalement ou par lettre simple, qu’il peut
consulter les éléments transmis pas
l’employeur577.
La séance de conciliation doit avoir
lieu dans le mois qui suit la saisine du
conseil de prud’hommes578.
Le bureau de conciliation détermine les
mesures et délais nécessaires à l’instruction de l’affaire et fixe le délai de communication des pièces.
Les mesures d’instruction et d’information
sont exécutées dans un délai n’excédant
pas trois mois. Ce délai ne peut être prorogé par le bureau de jugement que sur
la demande motivée du technicien ou du
conseiller rapporteur désigné579.
Si la conciliation échoue, le bureau de
conciliation fixe la date d’audience du
bureau de jugement, dans un délai maximum de six mois à compter de la date
à laquelle l’affaire lui a été envoyée580.
4.La garantie des créances salariales En cas de redressement ou de liquidation judiciaire, une procédure accélérée, dépourvue du préalable de la
conciliation, est applicable.
a) Les parties en présence Lorsqu’il est question d’un redressement
judiciaire :
• le demandeur est le salarié ;
574 Articles L. 1456-1 et R. 1423-10 du Code
du travail
575 Article L. 1456-1 du Code du travail
576 Article R. 1456-1 du Code du travail
136
577
578
579
580
Article
Article
Article
Article
R.
R.
R.
R.
1456-1
1456-2
1456-3
1456-4
du
du
du
du
Code
Code
Code
Code
du
du
du
du
travail
travail
travail
travail
Guide CFE-CGC de la prud’homie
• le défendeur est :
--
l’entreprise,
--
l’administrateur judiciaire,
--
le représentant des créanciers (mandataire judiciaire) et/ou l’AGS
(Association pour la gestion du
régime d’assurance des créances
des salariés)581.
Lorsqu’il s’agit d’une liquidation, le
demandeur est un salarié et il s’oppose
au liquidateur judiciaire (qui représente
les intérêts de l’entreprise en difficulté)
et à l’AGS.
En effet, tout employeur de droit privé
assure ses salariés contre le risque de
non-paiement des sommes qui leur
sont dues en exécution du contrat de
travail, en cas de procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire582.
b) La compétence du conseil de
prud’hommes
En principe, les poursuites sont suspendues, à partir du jugement prononçant un redressement ou une liquidation judiciaire. Pourtant, le conseil
de prud’hommes reste compétent pour
fixer le montant des créances salariales,
lorsqu’il est contesté.
Seul le bureau de jugement du conseil
de prud’hommes est compétent et non
pas la formation de référé583.
581 Article L. 3253-14 du Code du travail
582 Article L. 3253-6 du Code du travail
583 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de
cassation du 17 juin 1992, n° 89-43.338
Les contestations
salariales
des
créances
Le salarié peut contester soit le relevé
de créances établi par le représentant
des créanciers, soit le refus par l’AGS
de lui payer les sommes qui lui sont
dues, au vu dudit relevé de créances.
L’AGS couvre :
• les sommes dues aux salariés à la
date du jugement d’ouverture de
toute procédure de redressement
ou de liquidation judiciaire, ainsi
que les contributions dues par l’employeur dans le cadre du contrat de
sécurisation professionnelle ;
• les créances résultant de la rupture
des contrats de travail intervenant :
--
pendant la période d’observation ;
--
dans le mois suivant le jugement qui
arrête le plan de sauvegarde, de
redressement ou de cession ;
--
dans les quinze jours suivant le
jugement de liquidation ;
--
pendant le maintien provisoire de
l’activité autorisé par le jugement
de liquidation judiciaire et dans
les quinze jours suivant la fin de ce
maintien de l’activité.
• les créances résultant de la rupture
du contrat de travail des salariés
auxquels a été proposé le contrat
de sécurisation professionnelle,
sous réserve que l’administrateur,
l’employeur ou le liquidateur, selon
le cas, ait proposé ce contrat aux
intéressés au cours de l’une des
périodes précitées y compris les
contributions dues par l’employeur
dans le cadre de ce contrat et les
137
Guide CFE-CGC de la prud’homie
salaires dus pendant le délai de
réponse du salarié ;
• les sommes dues, pendant les
périodes précitées, lorsque le tribunal prononce la liquidation judiciaire, dans la limite d’un montant
maximal correspondant à un mois
et demi de travail.
Sont également couvertes les créances
résultant du licenciement des salariés
bénéficiaires d’une protection particulière relative au licenciement, au cours
des mêmes périodes, dès lors que
l’administrateur, l’employeur ou le liquidateur a manifesté, son intention de
rompre le contrat de travail584.
Sont également couvertes, lorsqu’elles
revêtent la forme d’un droit de créance
sur l’entreprise, les sommes dues aux
titres de l’intéressement, de la participation des salariés aux fruits de l’expansion ou d’un fonds salarial585.
Certaines créances sont garanties sous
des conditions énumérées par l’article L.
3253-12 du Code du travail notamment
celles dues au titre de l’intéressement :
• lorsqu’elles sont exigibles à la date
du jugement d’ouverture de la procédure ;
• lorsque, si un plan organisant la
sauvegarde ou le redressement
judiciaire de l’entreprise intervient
à l’issue de la procédure, elles
deviennent exigibles du fait de la
rupture du contrat de travail, dans
les délais prévus au 2° de l’article
L. 3253-8 ;
584 Article L. 3253-9 du Code du travail
585 Article L. 3253-10 du Code du travail
138
• lorsqu’un jugement de liquidation
judiciaire ou un jugement arrêtant
le plan de cession totale de l’entreprise intervient 586.
En revanche, l’AGS ne couvre pas les
sommes qui concourent à l’indemnisation du préjudice causé par la rupture
du contrat de travail dans le cadre
d’un licenciement pour motif économique, en application d’un accord
d’entreprise ou d’établissement ou de
groupe ou d’une décision unilatérale
de l’employeur, lorsque l’accord a été
conclu et déposé ou la décision notifiée
moins de dix-huit mois avant la date du
jugement d’ouverture de la procédure
de sauvegarde, de redressement ou de
liquidation judiciaire587.
c) Les contestations de l’AGS
La
CFE-CGC
vous
rappelle
quelques règles essentielles en
matière d’AGS :
• L’AGS ne peut être condamnée
qu’au versement d’une avance
et ce, qu’entre les mains du
représentant des créanciers ou
du liquidateur ;
• Le bureau de jugement a une
compétence exclusive : la
formation de référé est incompétente ;
586 Article L. 3253-12 du Code du travail
587 Article L. 3253-13 du Code du travail
Guide CFE-CGC de la prud’homie
L’AGS, tiers intervenant forcé
• La survenance de la procédure
collective arrête le cours des
intérêts légaux ;
• L’AGS est mise en cause par
le représentant des créanciers
ou, à défaut, par le demandeur ;
• Le représentant des salariés
peut venir assister ou représenter un salarié lors de l’audience
prud’homale ;
• L’AGS dispose d’un droit
propre pour demander et
obtenir la requalification d’un
contrat à durée déterminée en
contrat à durée indéterminée ;
• Le Conseil de prud’hommes ne
peut condamner l’administrateur ou le liquidateur à payer
les sommes dues au salarié ;
• Les salaires afférents à la poursuite d’exploitation suivant le
jugement d’ouverture ne sont
pas avancés par l’AGS sauf en
cas de survenance d’une liquidation judiciaire ;
• Les salariés français expatriés
bénéficient de la garantie des
salaires.
• Vous trouverez de plus en
annexe 9 p 152 et sur l'intranet confédéral
Lorsque la créance ne figure pas sur le
relevé de créances, le salarié doit saisir
le conseil de prud’hommes en mettant
en cause le représentant des créanciers, l’employeur (ou l’administrateur)
et l’AGS. Dans ce cas, l’AGS est un
tiers intervenant forcé.
L’AGS ne peut pas être condamnée
à verser directement au salarié les
créances salariales qui lui sont dues
par l’employeur. Ces créances doivent
être payées par le représentant des
créanciers, leur avance n’étant faite par
l’institution de garantie qu’en cas d’insuffisance des fonds disponibles, à la
demande du mandataire de justice588.
--
L’AGS, partie défenderesse
Lorsque l’AGS refuse, pour une raison
ou une autre, de régler une créance
figurant sur un relevé de créances résultant d’un contrat de travail, le salarié
concerné peut alors saisir le conseil de
prud’hommes en mettant en cause le représentant des créanciers : l’employeur
ou l’administrateur. Dans ce cas, l’AGS
est partie défenderesse et la décision
prud’homale est soit un débouté soit
une condamnation à faire l’avance de
la somme au titre de la garantie.
588 Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 20 novembre 2002, n° 00-45.373
139

Documents pareils