TVA et location immobilière

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TVA et location immobilière
TVA et location immobilière : une synthèse des règles
applicables par la Cour de Justice de l’UE (21 février 2015)
(CJUE, 22 janvier 2015, aff. C-55/14, Régie communale autonome du stade Luc
Varenne)
Christian Amand, Avocat Xirius
Une régie communale avait acquis un stade de football neuf, avec TVA. Elle avait conclu avec
le Royal Football Club de Tournai une convention selon laquelle le RFTC l'utilise contre
rémunération. La régie communale avait déduit entièrement la TVA sur l'acquisition et
l'aménagement du stade.
La mise à disposition d'un stade football en état de marche serait-il une location immobilière
exemptée de TVA ?
L'administration de la TVA avait rejeté la déduction d'une partie de la TVA pour le motif que
la régie effectuait des opérations hors du champ d'application de la taxe (mise à disposition
gratuite de certaines installations) et des opérations de location immobilière exemptées de
TVA.
Le litige avait été porté devant le tribunal de première instance de Mons qui avait conclu à
une location immobilière exemptée de TVA. En appel, la Cour d'appel de Mons pose une
question préjudicielle à la Cour de Justice de l'UE. Dans un arrêt du 22 janvier 2015, celle-ci
estime qu'il s'agissait simplement d'une mise à disposition d'un immeuble, à titre onéreux, en
vertu d'un contrat réservant certains droits et prérogatives au propriétaire et lui imposant
des obligations de maintenance, de nettoyage, d'entretien représentant 80 % de
l'indemnisation contractuellement prévue. Selon la Cour, ce n'est donc pas d'une location
immobilière.
Synthèse des principes applicables à l'application de la TVA sur la location immobilière
La Cour procède à une synthèse de sa jurisprudence concernant les principes applicables en
matière de TVA sur la location immobilière.
La location immobilière est une convention donnant le droit :
o d'occuper un immeuble comme une propriétaire et d'exclure toute autre
personne,
o pendant une durée convenue,
o et contre rémunération.
Avertissement important : ces informations ne sont pas destinées à appuyer ou provoquer une prise de décision ou un avis définitif
mais ont pour seule vocation, et pour seul pouvoir, de susciter une réflexion préalable à une information individualisée
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Si une seule de ces conditions manque, il n'y a pas de location immobilière (Aff. C-270/09,
Mc Donalds Resorts ; Aff. C-210-11, Medicom) et l'opération est toujours taxée ;
- la durée de la jouissance peut être limitée, pour autant que celle-ci n'ait pas un
caractère seulement occasionnel et temporaire (Aff. C-150/99, Stockholm Lindöpark ;
Aff. C-532/11, Leichenich) ;
- l'élément décisif pour qualifier une prestation de location immobilière est la nature
objective de l'opération et non la lettre du contrat (Aff. C-270/09, Mc Donalds
Resorts) ;
- concernant la qualification de l'utilisation d'installations sportives, il convient de
considérer dans leur ensemble les prestations liées à la pratique du sport et ce qui
est prépondérant (Aff. C-150/99, Stockholm Lindöpark ; Aff. C-425/06, Part Services);
En l'espèce, le rôle de la régie est bien plus actif que celui qui résulterait d'une simple
location d'un immeuble, puisqu'il inclut différents services de gestion, de maintenance et de
nettoyage. Ces prestations sont nécessaires pour assurer que les installations permettent le
déroulement de manifestations sportives, conformément à la réglementation sportive
applicable (par analogie avec Aff. C-425/06, Part Services; C-392/11, Field Fisher Waterhouse ;
Aff. C-155/12, RR Donelly Global Turnkey Solutions Poland). En l'espèce, ceci constitue la
prestation caractéristique de l'opération de la Régie Communale.
Une plus grande clarté et sécurité juridique
Cet arrêt Régie Communale autonome du Stade Luc Varenne ne se réfère plus qu'incidemment
à la notion de « rôle actif » que l'on retrouve dans l'affaire C-284/03 Temco Europe. Pour
rappel, par une heureuse coïncidence, l'interprétation tirée de l'arrêt Temco avait suivi de
quelques mois les innovations juridiques du Service des Décisions Anticipées (SDA). Ceci
avait permis d'exempter de TVA la location d'immeubles soumis à la domanialité publique
(ce qui aurait été impossible selon l'interprétation administrative antérieure qui considérait
que la notion location immobilière était celle du Code Civil) et ainsi de procéder à une
grande opération de sale and lease back d'immeubles publics. Cette opération de sale and
lease-back ambitionnait de procurer de substantielles rentrées financières pour les pouvoirs
publics, juste au moment où les statistiques budgétaires à communiquer aux autorités
européennes avaient une mauvaise apparence.
Depuis 2004, cette notion « d'activité relativement passive » avait été utilisée par
l'administration belge pour contester l'application de la TVA - ou plus précisément rejeter le
droit à déduction de de la taxe - sur toute une série de conventions. Au nom du respect du
Avertissement important : ces informations ne sont pas destinées à appuyer ou provoquer une prise de décision ou un avis définitif
mais ont pour seule vocation, et pour seul pouvoir, de susciter une réflexion préalable à une information individualisée
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droit communautaire, une grande partie de la jurisprudence s'était immédiatement et
uniformément ralliée à cette notion pour le moins confuse. Il était devenu très difficile de
savoir quand une opération consistait ou non en une location immobilière exemptée de TVA
(voir étude : Location immobilière en TVA belge - Approche formelle, historique et
prospective de l'arrêt de la Cour de cassation du 4 juin 2010, ‘Mons Expo', Tijdschrift voor
Fiscaal Recht, novembre 2011, n° 410 p. 851).
L'arrêt Régie communale autonome du Stade Luc Varenne qui s'inscrit dans la ligne d'autres
affaires perdues par l'Etat belge, les arrêts C-210/11 et C-211/11 Médicom et Maison Patrice
Allard du 18 juillet 2013. Il met en perspective les différentes notions, ce qui permet
désormais de mieux prévoir quand une prestation est une prestation peut être qualifiée de
location immobilière.
Il convient toutefois d'avoir à l'esprit que nombre de conventions de location immobilières
au sens de la TVA sont soumises à la TVA et que les exemptions sont d'interprétation
stricte. Ceci ressort bien d'un arrêt de la Cour d'appel de Bruxelles du 2 avril 2014
concernant les prestations hôtelières et assimilées.
Ensuite, cet arrêt met fin à une absurdité juridique, à savoir que pour une même convention
et un même terme, celui de location immobilière, les assujettis faisaient face à des contenus
différents pour d'une part en droit civil, droit d'enregistrement, impôts directs et, d'autre
part, en TVA. L'abandon du critère d'activité relativement passive, critères qui avait parfois
des conséquences comiques, permet d'unifier les notions de TVA européenne et de droit
civil.
Cet arrêt Stade Luc Varenne peut utilement être opposé à l'administration dans les litiges en
cours. En effet, l'interprétation qu'il fait de la directive est applicable à partir du 1er janvier
1978 et non à partir de la date d'un arrêt de la Cour.
Christian Amand
Avenue Tedescolaan 7
1160 Bruxelles - Brussel
Tél. : + 32 2 663.14.55
Fax : + 32 2 663.30.78
E-mail: [email protected]
Website: http://www.xirius.be
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