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Les cahiers
Nationale des
Services Vétérinaires
de l’Ecole
Numéro 3 - 2015
Les cahiers
Nationale des
Services Vétérinaires
de l’Ecole
Numéro 3 - 2015
École Nationale des Services
Vétérinaires
VetAgro Sup
1, avenue Bourgelat
69280 Marcy l’Etoile
Tel +33 (0)4 78 87 25 45
Fax +33 (0)4 78 87 25 48
Directeur de publication : François DARRIBEHAUDE
Conception graphique : Mélodie Burkhardt
Imprimé à Lyon par SEVEN
Toute reproduction ou transmission, même partielle, sous quelque forme que ce soit est interdite
sans autorisation écrite du détenteur des droits.
ISSN 2271-4723
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Sommaire
Editorial
Actualités
Conférence de rentrée : « Nouvelle approche de la santé animale. Enjeu et conséquences
pour les acteurs »
Gouvernance territoriale et enjeux de développement autour des politiques de gestion de l’eau
dans les territoires ruraux
Des poulaillers en ville, une nouvelle mode pour de nouvelles problématiques de santé
publique ?
Questionner le vivant en ville à partir du cas des basses-cours urbaines.
Formations et carrières des acteurs de la santé publique vétérinaire
Contributions
Décision, Complexité, Risque(s) : Gouverner les risques sanitaires
L’activité agricole sur le territoire de la métropole de Lyon : de l’enjeu à la stratégie.
Thèses d’Université
Aspects sanitaires et environnementaux de l’encadrement juridique de l’alimentation des
animaux producteurs de denrées alimentaires comparé avec celui de l’alimentation humaine
Variabilité des pratiques en antibiothérapie dans la filière poulet de chair label
Autres thèses d’Université en cours
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Thèses d’exercice vétérinaire soutenues
La nouvelle gouvernance sanitaire en france : exemple de l’élaboration du schéma régional de
maîtrise des dangers sanitaires en Midi-Pyrénées
Reconnaissance des statuts indemnes des maladies animales par l’OIE et conséquences sur
le commerce mondial (exemple du statut de la France en peste porcine classique)
Toxi-infections alimentaires (TIAC) en région Rhône-Alpes : bilan et analyse des causes.
Gestion opérationnelle d’une suspicion de TIAC par une Direction Départementale de la
(Cohésion Sociale et de la) Protection des Populations (DD(CS)PP) : exemple dans le
département de la Loire
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Tentative d’amélioration des contrôles officiels protection animale en élevage chez les bovins
par l’introduction de mesures effectuées sur les animaux
Pratiques et représentations sur les usages des antibiotiques et sur les possibilités de les
réduire en élevage porcin et bovin
Mémoires de stages ingénieur
Etude des corrélations entre les données d’exposition aux pollens et les données d’impacts
sanitaires du Journal Pollinique
Optimisation des processus d’inspection dans le cadre de la démarche qualité de la Direction
Générale de l’Alimentation
Elaboration d’une méthode d’évaluation des coûts engendrés par un dispositif de surveillance
d’une maladie animale e
n prenant l’exemple de la brucellose bovine
Mémoires soutenus dans le cadre du Master PAGERS
Etude sociologique de la place de l’obligation normative dans la mission du bénévole. Le cadre
de la mise en place de l’habilitation préfectorale concernant les associations effectuant du don
alimentaire dans le Rhône
Manger dans le Nord-Pas-de-Calais. Quelle gouvernance alimentaire pour la région ?
L’inspection en pharmacie vétérinaire dans le Finistère : un exemple de relations inspecteurs –
inspectés
La modernisation du secteur de l’abattage au Maroc : une politique publique à l’épreuve du
terrain
Influence du problème de l’Encéphalopathie Spongiforme Bovine sur les politiques publiques
liées à l’utilisation des protéines animales transformées en France et en Asie du Sud-Est
Evolution de la réglementation relative aux biocides au sein du ministère de l’agriculture et son
transfert au ministère de l’environnement
L’action publique dans un contexte de conflit. Biodiversité et élevages. Illustration par l’exemple
du loup
Collaboration des services de l’Etat du Morbihan sur la déclinaison des dispositions ORSEC
spécifiques des épizooties
Aménagement de la lutte contre la flavescence dorée de la vigne en Bourgogne. Regards sur
les plans de lutte 2013-2014 : une enquête auprès des viticulteurs et des techniciens viticoles
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Construction d’une politique de gestion des risques sanitaires dans le domaine alimentaire
- Prise en compte de l’acceptabilité sociale dans la mise en place de techniques de
décontamination microbienne des viandes fraîches
L’ESB comme entrave au commerce entre la France et la Chine : Etude de l’accession de la
viande bovine à l’agenda des négociations sanitaires bilatérales
Analyse sociologique d’une négociation communautaire – Illustration à travers l’exemple de la
révision du règlement (CE) n°882/2004 sur les contrôles officiels
Essai de coopération autour des astreintes
Y aurait-il un Globodera français et un Globodera belge ?
Les autorités fédérales belges en charge de la gestion officielle de la santé animale. Etude
sociologique sur la perception de leur fonctionnement par les partenaires
Le concept One Health Instrument d’action publique internationale en Asie du Sud-Est
Le bureau de la diplomatie agricole
Stage au sein du Bureau Exportation Pays Tiers de la DGAL
De L’Union douanière à l’Union eurasiatique, quelles perspectives ?
Tuberculose bovine : maladie du passé ou maladie d’avenir ? Analyse de la lutte contre la
tuberculose bovine en France en tant que problème public.
La Direction Départementale de la Protection des Populations du Bas-Rhin forme-t-elle un
ensemble cohérent ?
Les indicateurs de performance nous font-ils tourner en rond ?
Analyse par les instruments
du dispositif de performance de budget opérationnel du programme « Sécurité et qualité
sanitaires de l’alimentation »
La brucellose chez les bouquetins du massif du Bargy : Carrière d’un problème public, outils
de gestion du foyer et controverses, le cas complexe d’une maladie affectant une espèce
protégée
La gestion des risques de santé publique impliquant la faune sauvage : L
e cas de la brucellose
chez les bouquetins du Bargy
Traçabilité : Instrument du gouvernement vietnamien pour la mise en place de sa politique
sanitaire
Mémoires soutenus dans le cadre du CEAV - SPV
Anticiper l’arrivée du loup dans les élevages ovins laitiers : Proposition de protocole d’étude sur l’impact du stress des troupeaux sur la production laitière
Biocides utilisés pour la désinfection après un épisode de danger sanitaire
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L’inspection en pharmacie vétérinaire dans le Finistère : un exemple de relations inspecteurs –
inspectés.
La lutte contre le gaspillage alimentaire en restauration collective dans la région Nord-Pas-deCalais. Initiation de la démarche dans les EPLEFPA de la région
Impact économique de l’infection par Leptospira interrogans dans les cheptels bovins laitiers
en France
Plan d’urgence contre les épizooties majeures dans le Rhône
La brucellose chez les ongulés sauvages de montagne : épidémiologie descriptive du foyer du
Bargy et estimation des risques pour l’arc alpin
Lutte contre la flavescence dorée de la vigne en Bourgogne : aménagement de la lutte en
2014
La Nouvelle Gouvernance Sanitaire Régionale en France, exemple de l’élaboration de la trame
du schéma régional de maîtrise des dangers sanitaires en Midi Pyrénées
Etude de l’offre d’éducation One Health en Asie du sud-est
Réalisation du dossier OIE pour la reconnaissance du statut indemne de la France en peste
porcine classique
Mise en place de procédures internes pour la gestion des suspicions de toxi- infections
alimentaires collectives (TIAC) et des non-conformités d’origine alimentaire à la Direction
Départementale de Protection des Populations de la Loire
Etat des lieux et perspectives d’évolution de la filière volaille dans le Bas-Rhin
Analyse des plans de maitrise sanitaire du fromage AOP SAINT NECTAIRE fermier a lait cru
Organisation des contrôles applicables aux échanges intracommunautaires d’animaux vivants
et de denrées alimentaires d’origine animale
Mesures de gestion lors de non conformité dans un plan de surveillance et de contrôle des
résidus de médicament vétérinaires et de substances interdites
Elaboration des dispositions spécifiques ORSEC relatives aux épizooties majeures pour le
département du Morbihan
Gestion officielle de la santé animale en Belgique : Etat des lieux, analyse SWOT et
proposition d’organisation idéale
Globodera sp. français et Globodera sp. belges : des parasites différents ? Comparaison de la
gestion des nématodes à kystes de la pomme de terre entre la région Nord-Pas-de-Calais et la
Belgique
Limite des contrôles actuels sur le bien-être animal et intérêt de l’intégration des mesures de
type « animal based »
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L’organisation des astreintes à la direction départementale de la protection des populations du
Rhône
Mise en place d’un questionnaire pour la caractérisation de la consommation d’intrants dans
les filières animales et sur les perceptions des éleveurs
Le dispositif de performance de la LOLF, i
llustration par le programme 206 « Sécurité et qualité
de l’alimentation ». Propositions d’évolution de la maquette de performance de BOP et étude
de la gouvernance du dispositif
Élaboration, mise en place et test d’une méthode pour la préparation de l’expertise de la
saisine « alternative » à partir de l’exemple des produits et substances entrant dans la
catégorie des « plantes et extraits de plantes » utilisés chez les animaux producteurs de
denrées alimentaires et administrés per os
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Groupes d’études scientifiques et techniques
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Groupes d’étude des politiques publiques
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La nouvelle gouvernance sanitaire en Bourgogne : des stratégies de réorganisation aux enjeux
professionnels et territoriaux
Les métiers de la santé publique vétérinaire en question. Le cas de la socialisation
professionnelle des inspecteurs de santé publique vétérinaire
La lutte contre le campagnol terrestre en région Auvergne, étude d’un difficile problème public
Les basses cours urbaines : il faut trouver une règle pour le jeu de la poule !
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Publications et communications
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Appel à projets
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Groupes d’étude des politiques publiques (GEPP)
Groupes d’études scientifiques et techniques (GEST)
Stage de fin d’études du CEAV-SPV
215
215
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Stage de fin d’études du master PAGERS
Thèses d’exercice vétérinaire ou mémoires de fin d’étude d’ingénieur agronome
Autres études ou expertises
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Lexique
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Fiche de proposition d’étude
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Editorial
L’Ecole Nationale des Services Vétérinaires est une entité un peu particulière dans les paysages :
- de l’administration des services vétérinaires comme Ecole d’application du corps des Inspecteurs de la Santé Publique
Vétérinaire (ISPV) ;
- et de l’enseignement supérieur agricole français comme Ecole interne de VetAgro Sup.
Créée en 1973, elle s’attache ainsi, depuis plusieurs années à concilier :
-
ses missions historiques et tout à fait actuelles :
o
assurer la promotion et le développement des compétences des personnels de conception et d’encadrement
des services de l’Etat en charge des politiques publiques de l’alimentation, de santé animale et végétale, par un offre de
formation statutaire et de formation continue, reposant sur les sciences du vivant, les sciences juridiques, les sciences
sociales et les fondamentaux du management des hommes et des projets,
o
accompagner la modernisation de l’action publique dans ces domaines, en conduisant travaux et études
nécessaires pour préparer l’évolution des pratiques, et en déployant des activités de recherche et de diffusion des savoirs,
o
et de manière générale servir la stratégie internationale du ministère de l’agriculture par une offre de coopération en
matière de formation.
-
son insertion au sein d’un établissement d’enseignement supérieur agricole, VetAgro sup, dont elle adopte les
logiques :
o
développer la diplomation et l’accueil d’étudiants et auditeurs d’horizons diversifiés, qui ne se destinent pas
au service de l’Etat, mais souhaitent devenir, au sein d’autres structures, des acteurs des politiques publiques dans les
domaines de l’alimentation, de la santé animale et végétale,
o
renforcer les partenariats régionaux, nationaux et internationaux, tant avec des structures d’enseignement qu’avec
des opérateurs de ces politiques publiques,
o
étendre l’offre de formation continue en direction des partenaires publics et privés impliqués dans la mise en œuvre
de ces politiques publiques,
o
internationaliser son activité, en particulier en accueillant des étudiants et stagiaires de pays partenaires de la
France, y compris dans le cadre « d’universités d’été » en langue anglaise.
L’Ecole Nationale des Services Vétérinaires contribue ainsi à une meilleure gouvernance sanitaire mondiale, prônée par
l’organisation mondiale de la santé animale (OIE), ce qui lui vaut le statut de centre collaborateur de l’OIE pour la formation
des vétérinaires officiels.
Les cahiers de l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires participent à faire connaître ces activités, notamment en
présentant toute l’étendue des travaux de ses élèves, dont l’effectif croissant en 2015 explique notamment le volume de
productions universitaires présentées dans les présents cahiers.
Bonne lecture,
Olivier FAUGERE, directeur de l’ENSV
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Actualités
Conférence de rentrée : « Nouvelle approche de la santé animale.
Enjeu et conséquences pour les acteurs »
Le séminaire de rentrée officielle de l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires, organisé le 25 septembre dernier et consacré
à un dialogue autour du thème de la future « loi de santé animale » européenne, participe une fois encore de la volonté de
l’ENSV d’étudier, rechercher, et faire connaître la santé publique agronomique et vétérinaire.
Après une rentrée 2012 consacrée au concept de santé publique agronomique et vétérinaire et un évènement déjà recentré
en 2013 sur des problématiques plus opérationnelles (24 septembre 2013 : de l’action publique à l’action collective, l’exemple
de la santé publique vétérinaire), le thème du séminaire de rentrée 2014 annonçait des réflexions avant tout opérationnelles.
Les intervenants du séminaire représentaient d’ailleurs exclusivement les acteurs publics et privés de la santé animale.
La journée a été déclinée en trois temps :
Dans un premier temps, la nouvelle approche de la santé animale au sein de l’Union européenne et en France a été mise en
perspective. Après un état des lieux de la négociation de la loi de santé animale par Fabien SCHNEEGANS (Représentation
permanente de la France auprès de l’Union Européenne), Didier GUERIAUX (sous-directeur de la santé et de la protection
animale à la Direction Générale de l’Alimentation du Ministère chargé de l’Agriculture (DGAl) en a présenté la déclinaison
française.
Le deuxième temps a permis d’illustrer la « nouvelle approche en hygiène » et les modifications profondes qu’ont induites
les règlementations communautaires sur ce thème, dites « paquet hygiène », dans l’idée d’identifier dans ces évolutions et
les modifications induites des facteurs d’expériences à la mise en place de la future nouvelle approche de la santé animale.
A cette fin, Sandrine AYRAL, chef du service produits et services agroalimentaires de la Direction départementale de la
protection des populations (DDPP) de la Loire puis Frédéric DURIEUX, Directeur Général de la Laiterie du Forez, ont tour à
tour évoqué l’expérience vécue respectivement dans et par les services vétérinaires et l’industrie agroalimentaire.
Enfin, le troisième temps était, comme désormais de coutume lors des séminaires de rentrée de l’ENSV, consacré à une
grande table ronde rassemblant des représentants des acteurs publics comme parapublics et privés de la santé animale.
Cette table ronde était destinée à identifier les enjeux et conséquences pour les acteurs publics et privés de la nouvelle
approche de la santé animale.
Les participants à la table ronde ont été interrogés par Anne-Marie VANELLE (Inspectrice Générale de la Santé Publique
Vétérinaire, présidente de la section l’Alimentation et Santé, Conseil Général de l’Alimentation, de l’Agriculture et des Espaces
Ruraux (CGAAER)) sur les évolutions attendues du «paquet santé animale», sur le positionnement des structures concernées
en général, et de celle qu’ils représentent en particulier, en identifiant les clés de cette évolution d’une action publique à une
action collective.
Tour à tour, Pierre BUISSON, Président du Syndicat National des Vétérinaires d’Exercice Libéral (SNVEL), Marc-Henri
CASSAGNE, Directeur de la Fédération nationale des Groupements de Défense Sanitaire (GDS France), Didier GUERIAUX
(DGAl, mentionné plus haut), Pascal HENDRIKX, équipe de coordination de la Plateforme Nationale d’Epidémiosurveillance
en santé animale (ANSES) et Olivier LAPÔTRE, CGAAER, ex. chef du service régional de l’alimentation de la Direction
régionale de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt de Bourgogne ont pu s’exprimer sur ce point.
Comme chaque année, ces interventions ont permis d’initier un débat riche avec le public, majoritairement composé
d’étudiants et d’agents des services centraux et déconcentrés du ministère en charge de l’agriculture.
François DARRIBEHAUDE
Gouvernance territoriale et enjeux de développement autour
des politiques de gestion de l’eau dans les territoires ruraux
Ce projet de recherche-action est financé par la Fondation Terre d’initiatives solidaires et associe l’unité IRSTEA Metafort et
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l’équipe ACSPAVE (ENSV) de VetAgro Sup. Il propose de rassembler chercheurs, experts techniques et acteurs institutionnels,
pour mieux comprendre les enjeux actuels de la gestion de l’eau dans les territoires ruraux. L’évolution des politiques liées
à l’eau (passage d’une approche « curative » à une démarche préventive de protection de la ressource ; intégration des
enjeux environnementaux (eau, biodiversité) dans la politique de développement rural) ainsi que les réformes de l’organisation
territoriale induisent une transformation des activités des gestionnaires locaux et des usagers (notamment agriculteurs) ainsi
que le développement de nouvelles formes d’action collective dans les territoires ruraux.
Sur le plan méthodologique, notre démarche de recherche repose sur des ateliers de travail associant chercheurs, acteurs
des politiques publiques et habitants/usagers/riverains. Cette recherche vise à mettre en lumière le jeu des différents acteurs
dans la prise en charge des enjeux de la gestion de l’eau dans les territoires ruraux : des agriculteurs, des habitants, des
usagers, aux acteurs politiques locaux et aux services de l’État, qui se saisissent différemment des mutations à l’œuvre dans
les politiques de l’eau et les intègrent par le biais de dispositifs variés.
L’objectif de ce projet est d’analyser la mise en œuvre des politiques liées à l’eau dans les territoires ruraux (directive cadre
sur l’eau, protection des aires d’alimentation de captage, mesures agri-environnementales territorialisées) à partir d’une
compréhension large des contextes d’action dans lequel évoluent les parties prenantes. En faisant le pari de s’appuyer sur
des « moments » d’échanges interactifs entre acteurs, il s’agit d’esquisser des premiers éléments de réflexions à mettre au
débat et de premières recommandations à destination des acteurs locaux impliqués dans la mise en œuvre de ces politiques.
Les ateliers interactifs réunissent des chercheurs en sociologie de l’action publique, droit, économie et agronomie, des
experts du MAFF et du MEDDE, et des acteurs locaux (élus, entreprises, agriculteurs, exploitants, gestionnaires de l’eau,
vétérinaires, membres de collectivités locales, ou d’agences publique ou para-publique) concernés par les enjeux du
développement durable des territoires ruraux. L’objectif est de croiser les points de vue de ces acteurs autour d’axes de
travail et de questionnement en favorisant l’échange, la discussion à partir des problématiques préalablement identifiées qui
concernent les enjeux de gestion de l’eau sur les territoires concernés. Cette démarche offre un espace de dialogue entre
praticiens et chercheurs et permet aux acteurs locaux de tirer parti des résultats de ce projet de recherche à partir de leur
implication dans la mise en œuvre des politiques liées à l’eau dans les territoires ruraux et de leur retour réflexif.
Le terrain d’enquête choisi a été celui du territoire d’Issoire comprenant notamment le périmètre d’intervention du SIVOM de
la région d’Issoire, et intégrant en partie les Parcs Naturels Régionaux des Volcans et du Livradois-Forez.
Un premier atelier (27 avril 2015) a permis de préciser la démarche de recherche. Le questionnement du deuxième atelier a
porté sur les enjeux de gouvernance territoriale de l’eau (15 juin 2015). Ces deux rencontres se sont déroulées dans la salle
du Pays d’Issoire. Puis un troisième atelier sera organisé le 10 novembre 2015 pour poursuivre les réflexions engagées sur
les enjeux de répartition des compétences et au niveau des évolutions institutionnelles de la gestion territoriale de l’eau. Enfin
un séminaire de restitution aura lieu en janvier 2016 et réunira l’ensemble des participants au projet.
Sébastien GARDON
Des poulaillers en ville, une nouvelle mode pour de nouvelles
problématiques de santé publique ?
Les étudiants de l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires se sont lancés cette année dans une étude sur les basses
cours-urbaines. Ce travail réalisé dans le cadre du MASTER PAGERS (SciencesPo Lyon VetAgro Sup) a consisté en une
étude sur les possibilités de mise en œuvre d’une politique de réintroduction de poules (subventionnement, réglementation,
information, recensement) sur le territoire de la Métropole de Lyon. Yacine BACHA, Hélène BRIEN, Éric DURAND, AnneCharlotte DUROUX, Anaïs FLEMING, Candice VENTE ont participé à cette étude qui a donné lieu à deux manifestations.
Une première conférence débat organisée le 28 janvier 2015 sur le campus de Vetagro Sup autour d’une table-ronde
sur la thématique de l’agriculture et de l’alimentation en ville, puis la restitution du travail des étudiants sous forme de
conférence suivi d’un débat entre acteurs dans la salle du conseil de l’Hôtel de la Métropole le 25 mars de 9h à 13h. Dans
un premier temps était organisé la restitution de leur étude intitulée Il faut trouver une règle pour le jeu de la poule, suivi d’une
table ronde d’experts. Émeline BAUME, conseillère communautaire à la Métropole de Lyon, déléguée à la prévention des
déchets, a ouvert cette conférence en félicitant les étudiants pour leur travail de recherche qui répond directement à des
questionnements qui interrogent les habitants.
En partant du constat relayé ces derniers temps par plusieurs articles de presse (Le Nouvel Obs ou Le Monde notamment)
: « élever des poules en ville c’est plutôt cool!? », le travail mené par les étudiants a permis de mettre en avant plusieurs
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enjeux (problèmes sanitaires, sociabilité au contact des animaux, plus-values environnementales, bien-être animal, désir
de nature en ville ambivalent entre difficile acceptation des nuisances et sensibilité extrême des citadins par rapport aux
animaux de compagnie, etc.). Des pistes de recommandations ont ensuite été soulignées visant notamment un meilleur
accompagnement et une meilleure information des usagers et particuliers détenteurs ou futurs détenteurs de poules
(sensibilisation des usagers au risque, problématiques d’alimentation des poules) ou consistant à la mise en place de fermes
et poulaillers collectifs ou temporaires (expérience déjà réalisée à Genève). Des pistes de prolongement sont apparues très
clairement à l’issue de ce travail et de ces deux conférences : la prise en compte d’un retour des animaux « familiaux » dans
un milieu pollué et spécifique comme la ville ; la question de la cartographie et du recensement des animaux de production
chez les particuliers en ville ; ou le problème des limites des réglementations comme frein à l’initiative citoyenne. Elles seront
reprises notamment par les services techniques de la Ville de Lyon ou de la Métropole et dans le cadre d’un groupe de
réflexions sur le vivant en ville animé par Bernard Lensel de la Métropole de Lyon.
Sébastien GARDON
Questionner le vivant en ville à partir du cas des basses-cours
urbaines.
Cet article restitue le compte-rendu d’un séance qui s’est déroulée sous forme de conférence dans la salle du conseil de
l’Hôtel de la Métropole le 25 mars de 9h à 13h. Tout d’abord était prévue la restitution des étudiants du master PAGERS
2 (ENSV Vétagro Sup.) sur leur étude intitulée « il faut trouver une règle pour le jeu de la poule », suivie d’une table ronde
d’experts.
Vous trouverez ci-dessous le verbatim du compte-rendu de cette conférence établi par Marie-Anne Caroline PAUGET
Émeline BAUME, conseillère communautaire à la Métropole de Lyon, déléguée à la prévention des déchets, a ouvert
cette conférence en félicitant les étudiants pour leur travail de recherche qui répond directement aux questionnements qui
interrogent les habitants.
Ensuite Gwenola LE NAOUR, maître de conférence en sciences politiques (sciences politique Lyon - ENSV Vétagro sup.)
a présenté les recherches de ses étudiants, sur un sujet peu traité et peu documenté, effectuées en seulement trois mois.
Olivier FAUGERE, directeur de l’ENSV VétAgro Sup, a remercié à la fois la Métropole et Sciences Po Lyon pour cette
association dans le cursus PAGERS, qui traduit ce besoin de transversalité pour traiter les contraintes sociétales et
économiques actuellement répertoriées.
Restitution du travail des étudiants
Cette étude fait suite à une commande conjointe de la Métropole de Lyon et de l’ACSPAVE de l’ENSV.
Yacine BACHA, Hélène BRIEN, Éric DURAND, Anne-Charlotte DUROUX, Anaïs FLEMING, Candice VENTE ont participé à
ces recherches.
Constat: « élever des poules en ville c’est plutôt cool!? »
3 grands enjeux: 1) La santé publique, 2) la question environnementale, 3) Le bien-être animal.
Les maladies transmissibles: la grippe aviaire, les poux rouges, la salmonellose, les TIACS…
L’autoconsommation: 200 œufs environs par poule/an, mangés directement, vendus ou troqués.
La poule en milieu urbain ou périurbain devient un animal de compagnie: « Le retour à la nature »?
Lyon: nouveau statut de Métropole, récupère les compétences du département sur son territoire. (loi MAPAM du 27 janvier
2015).
Nécessité d’ENCADREMENT et de SENSIBILISATION pour le particulier vis à vis de la détention de poules: être INCITATIF
/ COERCITIF ?
Recommandations et ouverture: RECENSER et ACCOMPAGNER (notamment avec la mise en place de stages transversaux
(géographes, vétérinaires etc.), que faire de la poule en fin de vie?
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> Bilan: Les bonnes questions ont été posées et le risque a été bien cerné. Les réponses apportées par les étudiants étaient
pertinentes et avec du bon sens. Le niveau de cette restitution était très élevé. La pluridisciplinarité et la transversalité du
cursus mais aussi des différentes formations de l’ENSV traduisent une réalité professionnelle qui se met en place.
Les enjeux/ les questionnements/ les chantiers.
Utilité d’un service métropolitain d’hygiène: faut-il qu’il existe en plus des SCHS?
Études à mener sur les nuisances: où (dans quels quartiers, sur quels territoires de la Métropole, quelle répartition), comment
(quels animaux: poules, moutons, lapins?), qui (qui sont ces usagers qui achètent des poules, sont ils préparés à recevoir
des animaux?
Table ronde
Renaud PAYRE: Animation, Directeur adjoint de Sciences Po Lyon, professeur, directeur du laboratoire triangle.
Élisabeth CHAMPALLE: Directrice départementale de la protection des populations du Rhône.
Lise BOURDEAU LEPAGE: Professeur de géographie, Université Lyon 3.
Mickaël DA ROCHA: Direction de l’écologie urbaine, section animaux, ville de Lyon.
Christophe DARFEUIL: Directeur de l’association Naturama.
Patrick CHABROL: Docteur vétérinaire libéral aviaire, membre de la commission de la SNGTV.
Bruno MILBERGUE: Direction de l’écologie urbaine, section animaux, ville de Lyon.
Durant cette table ronde, 10 thèmes ont été abordés.
1. La direction de l’écologie urbaine de la ville de Lyon, la Métropole, et le Département: qui fait quoi?
Le Département/ L’État : Quand le risque sanitaire est connu et maitrisé dans les exploitations professionnelles, il est souvent
ignoré des particuliers. Les principaux risques viennent des animaux de compagnie, des nouveaux animaux de compagnie
et du retour des animaux familiaux d’autant: poules, lapins, moutons:
Nécessité de mise en place de nouveaux chantiers notamment pour faire face à la réintroduction de la poule en ville par les
particuliers.
Grande difficulté à mettre en place une réglementation: par qui, pour qui, comment?
Beaucoup de plaintes sont déjà reçues pour des poules sur des balcons, en centre-ville.
Vu les moyens de l’État, plus que la France, cela concerne l’ensemble des États d’Europe. L’État est producteur de normes
que les départements font appliquer. Il pointe les problèmes de santé publique.
La Métropole : La politique de la Métropole influe beaucoup sur la politique du département. Elle doit maintenant aussi gérer
ce qui sort du cadre strict de l’urbain.
La Mairie de Lyon : La Mairie s’occupe surtout de problèmes en lien avec les chats et les chiens. Le service de l’écologie
urbaine est souvent sollicité pour des nuisances, des problèmes sanitaires et de santé publique avec environ 5 à 10 plaintes
par an. Il fait aussi face à une demande des particuliers d’informations sur les poules : poulailler, alimentation, maladies.
Tout l’enjeu réside dans le fait qu’au niveau local il est très difficile de quantifier et de réglementer ce genre de pratiques. Il
suffit qu’un citoyen tombe malade (salmonelle, tuberculose etc. pouvant mener à des décès.) et porte plainte pour que le
problème suivant se pose: Qui sera juridiquement responsable? De nombreuses écoles primaires/maternelles ainsi que
des maisons de repos se dotent de jardins potagers, avec quelques fois des poules mais aussi, de plus en plus souvent,
des composteurs. La pratique du compostage s’apprend ou se réapprend afin de minimiser au maximum les risques de
contamination (germe, bactérie.), notamment lorsqu’il s’agit d’un public fragile (enfants et personnes âgées.)
2. Ruralité et urbanité: les rurbains découvrent le milieu rural et ses nuisances.
Face à la perte du lien rural/urbain, l’urbanité provoque un désir de nature de plus en plus fort depuis la seconde guerre
mondiale chez l’urbain. Les premières préoccupations environnementales modernes feront évoluer ce désir de nature en
véritable prise de position citoyenne.
Les urbains partent à la campagne mais ne sont pas pour autant familiers avec ce milieu et peuvent vivre cela comme un
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désagrément:
Partage de route avec des tracteurs ou véhicules agricoles.
Passage de bétail sur la voie.
Bruits, odeurs.
Pollens.
Les rurbains reviennent pour certain en ville avec un peu de nature, qui s’exprime quelque fois par la détention de poules.
L’association Naturama existe sur ce constat: régler les problèmes de voisinage entre ruraux et néo ruraux.
=> L’angle d’étude des conflits d’usage ruraux/néo ruraux est un angle d’étude et de recherche très pertinent pour
comprendre et commencer à encadrer ces nouvelles pratiques.
3. La sensibilisation des usagers au risque.
Les risques sanitaires ne sont ni connus ni maitrisés par la plupart des usagers. Il faut travailler sur la responsabilité du citoyen
en l’accompagnant et l’informant sans procéder trop rapidement ou trop radicalement (réglementation). Naturama à mis en
place beaucoup d’initiatives pour faire face à cette demande. Cela rend possible l’introduction « en bonne intelligence » des
animaux en ville: poules, moutons etc.
On observe de plus en plus de consultations vétérinaires pour des poules notamment, mais les propriétaires ne comprennent
pas toujours le prix des consultations ou des soins « juste pour une poule ». De plus consulter un vétérinaire permet une
sensibilisation sur l’usage et les effets d’un traitement sur la poule, sur ses œufs ou sur les végétaux et insectes alentours; il
doit impacter le moins possible. La préoccupation que l’on peut avoir pour la santé de ces animaux ne doit pas se faire au
détriment de la notion de santé publique. L’accent sur cette notion doit se faire dès l’école vétérinaire.
=> Cela concerne t’il des catégories sociales particulières comme les classes moyennes ou moyennes supérieur?
L’homogénéisation des centres villes avec une catégorisation sociale (CSP+) deviendra t’elle un facteur aggravant en cas de
généralisation de possession d’animaux dits « producteurs » (type poules, moutons, lapins, lamas, etc.) ?
4. Les jardins collectifs et partagés: vers une forme d’inégalités socio-spatiales?
La présence des jardins partagés pose la question « des inégalités socio-spatiales ». En effet les habitants d’un quartier ou
immeuble, ayant accès à un jardin pouvant être vecteur de liens sociale, où ils pourront jardiner, apprendre, redécouvrir et
consommer leur production, s’opposent aux usagers ne bénéficiant pas d’une telle aménité (par choix: désintérêt; ou subit:
absence).
Le jardin devient aussi un espace de « nuisances » pour certains riverains: odeurs du composte, présence de poules,
perception négative d’une campagne « imposée » etc.
La diversité des habitudes de chaque utilisateur peut provoquer une complexification des règles et droits de chacun dans le
jardin: ouverture jour/nuit, accès contrôlé/libre, implication régulière/libre etc.
=> La présence de plus en plus répandue des jardins partagés en ville va t’il générer des inégalités ou au contraire les
gommer (intégration, mixité sociale.). Cela concerne quel type de territoire?
5. Le pastoralisme urbain.
La demande de location de moutons afin de tondre des espaces verts ou bien pour profiter d’un contact avec un animal
encore peu présent en ville, augmente de plus en plus. Ce sont les particuliers qui recourent le plus à ce genre de service.
La location se fait sur trois mois au minimum auprès d’association comme Naturama, afin d’éviter un stress inutile à l’animal.
Les évasions de moutons sont courantes mais cela participe aussi à la formation et à la responsabilisation du détenteur.
6. La détention de poules en milieu urbain ou périurbain: une traduction de la méfiance du consommateur pour les œufs
industriels?
Les raisons de posséder une poule diffèrent selon les usagers: besoin de nature en ville, manière de se débarrasser des
déchets alimentaires ou encore pour la consommation des œufs ou de la viande. Chez la plupart des détenteurs de poules,
l’assurance de consommer des œufs « meilleurs » que ceux achetés dans le commerce ou d’avoir des poules toujours
saines et en bonne santé est forte et répandue.
Mais le risque de présence de salmonelle dans les œufs de poules de particuliers est grand puisqu’il est ignoré (signes avant
coureurs non détectés) et qu’il n’y a pas de contrôle ni de traçabilité sur la production.
En France, les 54 millions de poules appartenant à des élevages de plus de 200 individus sont contrôlées tous les 15 jours.
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La traçabilité mise en place sur les œufs permet d’arriver à un résultat proche de 0 pour les TIAC et de retrouver si besoin
des lots contaminés à l’autre bout de la France (*).
Une sensibilisation par les professionnels de santé, sanitaires ou vétérinaires pourrait permettre une meilleure appréhension
de ces risques par l’usager, à défaut de pouvoir s’appuyer sur un « mode d’emploi ».
L’expérience genevoise montre que les particuliers possédant des poules consomment leurs œufs dans des conditions
précises et ont aussi recourt à des œufs industriels.
(*) Chiffres indiqués par le Docteur Vétérinaire Patrick Chabrol.
7. L’alimentation des poules.
Patrick Chabrol, vétérinaire aviaire et l’ENSV Vetagro Sup rappellent qu’une poule ne mange ni viande, ni déchets alimentaires.
Cet animal se nourrit exclusivement de céréales sous forme de « grains » ou de vers et d’insectes trouvés en fouillant le sol.
La poule permet la mise en place d’une lutte biologique contre les limaces et les escargots bien qu’elle puisse consommer
à tort les plantations du jardin.
Si l’usager donne ses déchets alimentaires à ses poules il devra veiller à ce qu’il n’y ait aucun pourrissement pouvant devenir
un vecteur de maladies mortelles pour l’animal voire transmissibles à l’Homme.
8. Le retour des animaux « familiaux » dans un milieu pollué et spécifique: la ville.
Il a été observé que globalement les usagers ignorent l’étendue de la pollution des sols, provoquée par les activités d’une
ville: rejets industriels, artificialisation des sols etc. Cela se traduit par de l’autoconsommation de leur production issue d’une
terre non dépolluée. Si des poules picorent cette terre, une concentration en éléments chimiques sera aussi présente dans
les œufs et la viande.
La terre des jardins collectifs financés par les collectivités ainsi que celle de la majorité des jardins associatifs est remplacée
par de la terre saine apportée de l’extérieur. Ce genre d’action est nécessaire afin de contrôler les risques de présence de
métaux lourds et d’hydrocarbures dans les fruits et légumes.
9. Des solutions pour une situation nouvelle et en expansion: Les fermes et poulaillers collectifs ou temporaires.
Face à une situation qui est difficilement quantifiable, la mise en place de solutions simples et conviviales pourrait aider à
contrôler le phénomène, où la poule est présentée comme un outil générateur de lien social et intergénérationnel.
Tout d’abord construire son poulailler « hors-sol » peut être envisagé même pour les particuliers possédant peu de poules
car il permet de mieux nettoyer le poulailler et ainsi de réduire les risques sanitaires.
La mise en place de poulaillers collectifs pourrait offrir aux détenteurs de poules « urbaines » un espace dédié à la manière
des jardins collectifs, avec une gestion associative. Cela permettrait aussi d’appréhender plus précisément le nombre de
poules présentes en milieu urbain. L’association Naturama propose des poulaillers en kit ainsi qu’un jardin expérimental avec
des ruchers, des moutons et des poules afin d’illustrer l’accompagnement pédagogique mis en place.
10. Les limites de la réglementation: un frein à l’initiative citoyenne?
Une réglementation pourrait freiner l’initiative citoyenne mais elle reste nécessaire notamment pour définir la responsabilité à
engager en cas de contaminations diverses liées à la présence aviaire. Une prise en compte de la poule dans les politiques
publiques doit être envisagée et cela doit inciter l’élu à réfléchir à la faisabilité du vivant en ville, avec ses points positifs et
négatifs (mise en situation).
=> Comment cela va t’il se traduire dans les politiques publiques? Quel sera le rôle de l’État, des collectivités ou des tissus
associatifs? Doit-on être dans la prévention ou dans l’éducation?
Conclusion et perspectives
La poule, un animal de compagnie ou de production?
Désir de nature: la poule et les jardins collectifs.
Moyen pour mettre en place des projets d’éducation à la nature et au vivant.
Recréer du lien social.
Production alimentaire.
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Glossaire des acronymes
PAGERS : Politiques de l’Alimentation et Gestion des Risques Sanitaires
ENSV : École Nationale des Services Vétérinaires
ACSPAVE : Action Collective en Santé Publique : Animal, Végétal et Environnement (Droit et Sciences Politiques)
Loi MAPAM : loi de Modernisation de l’Action Publique territoriale d’Affirmation des Métropoles (27 janvier 2014)
SNGTV : Société Nationale des Groupements Techniques Vétérinaires
TIAC : Toxi-Infections Alimentaires Collectives
Marie-Anne Caroline PAUGET
Formations et carrières des acteurs de la santé publique
vétérinaire
Le jeudi 26 mars 2015 se tenait sur le campus de VetAgro Sup (Marcy-l’Etoile, 69) la restitution des travaux des étudiants
de l’École Nationale des Services Vétérinaires (ENSV) dans le cadre de leur Master de Politiques de l’Alimentation et Gestion
des Risques Sanitaires (VetAgro Sup SciencesPo Lyon). L’un des groupes concernés a présenté son travail d’enquête sur les
métiers de la santé publique vétérinaire, commencé en novembre 2014 et terminé en mars 2015. Une table-ronde a ensuite
été organisée pour prolonger les échanges sur cette thématique. Cette table-ronde animée par François Darribehaude
(directeur adjoint de l’ENSV, coordonnateur de l’équipe de recherche ACSPAVE ) réunissait Philippe Dubourget (ancien
collaborateur chez MERIAL), Loïc Gouello (chef du corps des Inspecteurs de la Santé Publique Vétérinaire (ISPV)), AnneClaire Lomellini-Dereclenne (ISPV, doctorante en sciences du vivant, UMR 1213 INRA-VetAgro Sup, équipe ACSPAVE),
Luc Mounier (DVM, Maître de conférences, directeur des formations à VetAgro Sup) et Patrick Perrin (vétérinaire-général
inspecteur, inspecteur technique des services vétérinaires des armées).
Cette restitution s’inscrit dans le cadre plus large d’un projet d’étude sur les enjeux de la formation et des métiers en santé
publique vétérinaire, portée d’une part par l’ENSV et d’autre part par l’équipe ACSPAVE. A cette fin, deux études avaient
déjà été conduites par les étudiants de l’ENSV (l’une sur l’école, l’autre sur les anciens élèves de l’école) et une rencontre
avait été organisée sous forme de conférence-débat le 26 février 2015 à l’ENSV1 . D’autres séminaires et conférences
seront également organisés dans les mois à venir par l’équipe ACSPAVE sur ces thématiques, associant des sociologues
spécialistes des professions et des représentants de celles-ci.
Ces questionnements, qui rejoignent les préoccupations de l’école d’application notamment chargée de la formation
statutaire des ISPV qu’est l’ENSV, témoignent également d’un intérêt finalement beaucoup plus large de la part des acteurs
et des structures au cœur de ce champ d’action publique. Ainsi la Société Vétérinaire Pratique de France a construit ses
rencontres (séminaires et colloque) de l’année 2015 autour de cette thématique quand le Syndicat National des Inspecteurs
en Santé Publique Vétérinaire (SNISPV) et le Réseau de Santé Publique Vétérinaire (RSPV) s’inscrivent eux aussi naturellement
dans une dynamique d’échanges sur ce sujet. Plusieurs membres de ces réseaux étaient justement présents jeudi dernier.
L’étude présentée par les étudiants portait ainsi sur Les métiers de la santé publique vétérinaire en question : Le cas de la
socialisation professionnelle des inspecteurs de la santé publique vétérinaire. Si le rapport s’est finalement recentré sur le rôle,
le positionnement et les enjeux du corps des inspecteurs de la santé publique vétérinaire, il a permis de décrire tout d’abord
le contexte de transformation de l’action publique (gouvernance multi-niveaux, repositionnement de la puissance publique
face aux acteurs privés) et d’émergence de nouvelles problématiques de gestion du sanitaire (nouvelle gouvernance du
sanitaire, Loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, enjeux européens). Le corps des ISPV, qui participe à ces
politiques a ainsi vu une évolution de ses champs de compétences et de son environnement de travail. L’objectif de l’étude
était donc de mieux comprendre comment les logiques de formation des professionnels de la santé publique vétérinaire
pouvaient être impactées par l’évolution de leurs profils de poste et de leurs missions.
Dans l’étude présentée et la discussion qui a suivi, le corps des ISPV a été identifié et reconnu comme un corps de haut
niveau technique en charge des questions de santé publique vétérinaire. Les crises sanitaires et alimentaires des années
1990 et 2000, et la publicisation des questions touchant à la santé publique vétérinaire, ont en effet contribué à accroître la
visibilité du corps au sein de l’appareil administratif du ministère de l’Agriculture. Le décret statutaire par lequel le corps a
Action Collective en santé Publique : Animal, Végétal Environnement. Droit et Science Politique.
Avec une table-ronde animée par Anne-Claire Lomellini-Dereclenne, susmentionnée, et regroupant : Hélène Chardon (DVM,
Centre d’Information des Viandes), Marie-Frédérique Charenton (ISPV Directrice adjointe de France Vétérinaire International),
Michel Chouvellon (PDG d’Echange Formation), Jean-Pascal Fayolle (ICPEF, Directeur de l’Institut National de Formation des
Personnels du Ministère de l’Agriculture (INFOMA)), Déborah Infante-Lavergne (ISPV, représentante du SNISPV) et André Klein
(ISPV, Directeur de la DDPP de Saône-et-Loire).
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été réformé en 2002 a consacré cette évolution en redéfinissant leurs missions : des fonctionnaires dont le haut niveau de
technicité est reconnu ; des fonctionnaires polyvalents avec une double valence, technique et managériale, mais aussi un
corps polyvalent, où coexistent ceux qui font du technique et ceux qui font du management.
L’un des enjeux soulevé par l’enquête menée par les étudiants et repris ensuite dans les discussions au cours de la tableronde consistait justement à questionner l’équilibre dans la formation, dans les carrières comme dans l’affichage et le
positionnement vis-à-vis des autres acteurs, des compétences techniques ou vétérinaires et des savoirs et expériences
managériaux. Ces compétences ne semblent pas être partagées de façon égale par tous les ISPV selon les postes occupés
(services déconcentrés, administration centrale, international). Il apparaît cependant que les premières constituent un
dénominateur commun qui cimenterait une identité collective du corps. Les secondes, perçues alors comme une double
compétence, justifieraient la place grandissante de ce corps tout en lui apportant une plus grande visibilité. Ainsi les ISPV ne
seraient plus assimilables à la seule profession vétérinaire.
Au-delà de cette ambivalence assumée et reconnue comme nécessaire du fait de l’évolution des enjeux de la santé publique
vétérinaire, c’est finalement l’entrée par les métiers, du fait de son caractère jugé archaïque et enfermant, qui a suscité le
plus d’interrogations et de débats chez les participants à la table-ronde. En dehors de la santé publique vétérinaire, ces
interrogations peuvent rejoindre celles du monde de la santé publique -du côté des acteurs comme des formateurs- où la
place des compétences scientifiques et médicales a été là aussi largement repensée ces dernières années, en particulier au
sein de l’École des Hautes Études en Santé Publique.
Sébastien GARDON
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Contributions
Décision, Complexité, Risque(s) : Gouverner les risques
sanitaires
Ce texte reproduit la version écrite d’une séquence du MOOC3 enregistrée par François Darribehaude et Sébastien Gardon
dans le cadre du Cours « Décision, Complexité, Risque(s) » organisé par le CHELs4 au cours de l’année universitaire
2014-2015. Des cours en présentiel étaient organisés et enregistrés tous les jeudis soirs au cours du premier semestre à
SciencesPo Lyon et retransmis en visio-conférence sur d’autres campus. Puis au second semestre un MOOC a été préparé,
enregistré puis diffusé à partir de la plate-forme France Université Numérique.
Appréhender la lutte contre les risques sanitaires, c’est accepté de faire un grand écart entre des crises sanitaires au
retentissement international, telles que les crises de grippe aviaire asiatique, et les cas d’intoxications alimentaires des
cantines de quartier. C’est ce grand écart que nous tenterons ensemble ! On estime aujourd’hui que 60 % des agents
pathogènes pour l’Homme sont d’origine animale. Il en serait de même de 75 % des maladies émergentes, c’est-à-dire
les infections nouvelles causées par l’évolution ou la modification d’un agent pathogène ou d’un parasite existant. Nous
pouvons citer quelques exemples :
- VIH, responsable du SIDA
- SRAS
- Virus Ebola, dont des chauves-souris frugivores constituent vraisemblablement le réservoir naturel
- Grippe H5N1, virus responsable de la grippe aviaire transmise à l’homme
Or, le commerce des animaux, des végétaux et des denrées qui en sont issues est désormais complètement internationalisé.
L’accélération des échanges aboutit à ce que les pathogènes puissent être transportés plus vite que leur période d’incubation.
Or certaines maladies animales ou végétales peuvent avoir un impact réel, y compris sur le modèle économique de certains
Etats ou régions. Par ailleurs, l’impact des maladies animales sur la production animale mondiale excèderait 20%. Et ce
sont 1 milliard d’agriculteurs pauvres qui survivent grâce à l’activité d’élevage, sans parler de la problématique plus large de
suffisance et de disponibilité alimentaire.
Plus près de nous, que faut-il penser des intoxications alimentaires collectives parfois graves qui peuvent résulter de défauts
sanitaires dans les chaînes de production, de transformation ou au stade de la distribution ? Qui n’a jamais entendu parler
de E. coli ou de salmonelloses, responsables de gastro-entérites ou d’affections plus graves…
Les enjeux d’une lutte efficace contre les risques sanitaires sont ainsi multiples :
- assurer un approvisionnement en denrées en quantité suffisante et de qualité adéquate
- sécuriser les échanges et les productions locales
- réduire les perturbations des marchés agroalimentaires,
- réduire les coûts et charges afférents à la lutte contre les risques sanitaires pour les producteurs et les distributeurs
- protéger la santé des citoyens, des animaux et des végétaux
Pour ce faire, de tous temps, les Etats ont appliqué des mesures unilatérales afin d’assurer l’innocuité des produits alimentaires
pour le consommateur et d’empêcher la dissémination de parasites ou de maladies parmi les animaux et les végétaux. Ces
mesures peuvent revêtir de nombreuses formes :
- exiger que les produits proviennent d’une zone exempte d’une maladie donnée, qu’ils soient préalablement inspectés,
qu’ils subissent un traitement ou une transformation spécifique, etc.
Cependant, l’émergence d’un « nouvel ordre mondial » bâti autour de l’internationalisation et de la libéralisation des échanges
a abouti à une réorganisation des acteurs internationaux et nationaux de la lutte contre les risques sanitaires et à une évolution
de leurs méthodes d’action. La survenance de crises sanitaires importantes, telles que la crise de l’ESB, a également favorisé
la transition vers un modèle de gouvernance à distance et de responsabilisation des acteurs privés, individuels ou collectifs.
Partant de ces différents problèmes et enjeux soulevés, cette séance a pour objectif de poursuivre les réflexions engagées
dans le cadre de ce cours sur Décision, complexité, risques. Les crises sanitaires illustrent parfaitement les termes du cours
Massive Open Online Course : Formation en ligne ouverte à tous.
Collège des Hautes Etudes Lyon Sciences réunissant les établissements d’enseignement supérieur lyonnais suivants :
Ecole Normale Supérieure, Ecole Centrale de Lyon, SciencesPo Lyon, Conservatoire National Supérieur Musique et Danse, et
VetAgro Sup.
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auquel nous participons : décision, bien sûr, en partant des acteurs et des méthodes qui y aboutissent ; mais également
complexité, démontrée tant par la compréhension de la multiplicité de contraintes juridiques comme politiques, internationales
comme nationales, qui impactent la capacité de décision du gouvernant ; risque enfin, comme élément fondateur, justificatif
et générateur de cette décision, élément lui-même profondément complexe dans sa conceptualisation et sa constatation.
Plusieurs temps fort guideront cette intervention :
1. Nous poserons le décor avec une brève histoire du temps sanitaire
2. Sera ensuite décrite la transformation des modes d’action publique autour du passage du gouvernement à la gouvernance
3. Puis nous reviendrons en pratique sur les formes de gouvernance sanitaire
4. Enfin nous conclurons sur la manière de gouverner autrement en gouvernant à distance les risques sanitaires.
Notre contribution est à deux voix, nous allons donc alterner les points de vue. Cet exercice nous permettra de confronter, à
partir d’un même objet, le regard du juriste publiciste, de celui d’un politiste, qui analyse des politiques publiques.
Une brève histoire du temps sanitaire
Pendant des siècles, l’appréhension des maladies animales renvoyait à certaines formes de croyances ou de fatalité. Les
enjeux économiques (en termes de production agricoles) et militaires (qui concernent notamment la santé des chevaux) ont
poussé à la recherche de savoirs scientifiques. Cela s’est traduit par la création des premières écoles vétérinaires en France,
à Lyon en 1761, puis à Paris en 1765.
La véritable mise à l’agenda de la lutte sanitaire s’organise à l’échelle des Etats modernes à la fin du 19ème siècle. En
1881 avec la création d’un service sanitaire aux frontières, puis en 1884 avec l’obligation d’organisation l’inspection sanitaire
des marchés, des abattoirs et en 1893, la création du premier service vétérinaire départemental de la Seine. Cette mise en
administration du sanitaire s’intègre en France dans un jeu complexe d’organisations agricoles locales où sont fortement
représentés les syndicats, les coopératives et les chambres d’agriculture.
En termes de politiques agricoles, on parle alors d’une co-gestion, déjà ancienne, qui s’incarne aussi au niveau de la gestion
des maladies animales avec le fameux « trépied sanitaire » composé de l’éleveur, du vétérinaire et de l’Etat. On a d’un côté,
un éleveur qui connaît déjà bien les problématiques de son troupeau et de son élevage, dans toutes ses composantes,
qui fonctionne parfois en autarcie (avec de l’autoconsommation, y compris pour la nourriture du bétail). De l’autre côté, la
profession vétérinaire monte en puissance pour accompagner les mutations du monde agricole. Et cela fonctionne avec
des rouages administratifs bien huilés pour l’organisation de prophylaxies et de campagnes de vaccination. Les directions
départementales des services vétérinaires sont les relais administratifs de cette organisation et assurent un maillage territorial
efficace.
Cette période qui va jusqu’aux années 1980, est marquée par un Etat fortement interventionniste et tout puissant. En cas de
problème, on a recours à une intervention rapide et radicale des services administratifs : ce qui peut conduire à la mise en
quarantaine ou à l’abattage massif de troupeau. Il n’y a pas encore de contestation de l’expertise et des décisions de l’Etat.
Mais depuis une trentaine d’années, les modalités de gestion des risques sanitaires ont beaucoup évolué. Les politiques
agricoles ont été transformées sous l’effet de la construction européenne. Les élevages se sont spécialisés, il y a eu un
développement de filières, une structuration autour d’industries agro-alimentaires. D’autres acteurs sont apparus, les
échelles de gestion et de décision se sont multipliées. Aujourd’hui, le système de décision est plus horizontal et collégial. Il
s’agit davantage de faire accepter la décision, d’accompagner les professionnels. Le rôle des consommateurs, des usagers
a beaucoup évolué. Dans un contexte où émergent d’autres préoccupations : hygiène, alimentation, le bio, etc.
La période contemporaine est marquée par trois phénomènes principaux :
Premier phénomène, l’internationalisation de la lutte contre les risques sanitaires et des normes de référence. Il s’explique
d’abord par l’existence d’organisations ou de structures internationales spécialisées.
- L’OIE est la plus ancienne. Du haut de ses 90 ans, composée de plus de 170 membres, l’un de ses buts est la lutte contre
les risques sanitaires d’origine animale, notamment en adoptant de véritables manuels de procédure à l’attention des Etats
et en évaluant la qualité et les capacités de leurs services vétérinaires.
- La CIPV est quant à elle entrée en vigueur en 1952. Son objet est comparable à celui de l’OIE, mais en matière végétale.
- Quant à la commission du codex alimentarius, elle a été créée en 1962 par la FAO et l’OMS. Elle a pour objet de définir des
normes alimentaires internationales, afin de protéger la santé des consommateurs tout en assurant des pratiques loyales
dans le commerce mondial. Avec ses 185 Etats membres, elle couvre 99 % de la population mondiale.
L’internationalisation de la lutte contre les risques sanitaires s’explique également par la prise en compte de cet objectif par
v. « Colloque sur la gestion et la protection des ressources en eau potable », p. 14 et « Colloque sur le Bien-être animal.
Pratiques et perceptions », p. 16.
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v. http://acspave.wordpress.com/2014/05/19/debats-autour-dun-projet-de-sociologie-filmee/
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des organisations internationales devenues désormais incontournables dans les relations internationales. Tel est le cas de
l’OMC. Si son objet fondamental reste celui de la libéralisation des échanges internationaux, des restrictions y sont possibles
pour des motifs sanitaires justifiés scientifiquement et proportionnés. Et l’on retrouve ici l’OIE, le codex alimentarius et la CIPV
(surnommées pour cette raison « les trois sœurs ») : les normes nationales qui sont conformes à leurs prescriptions sont
présumées l’être également aux réglementations internationales de l’OMC. Cela permet d’ailleurs aux Etats dont la capacité
d’expertise scientifique est insuffisante de s’en remettre à l’expertise internationale.
En ce qui concerne l’Union européenne, la crise de l’ESB en 1996 a été l’élément déclencheur de la mise en place d’une
véritable politique alimentaire. La recherche d’un niveau élevé de protection de la santé humaine est désormais posée en
dénominateur commun de l’ensemble des politiques et actions de l’Union européenne.
Deuxième phénomène, la mise en avant de l’expertise scientifique. Les crises sanitaires modernes ont démontré la nécessité
d’une réponse assise sur des bases scientifiques solides. Les mesures de lutte contre les risques sanitaires doivent être
justifiées par une évaluation scientifique préalable de ces risques. Les mesures de gestion de ces risques devront elles-mêmes
être scientifiquement justifiées. Or, cette expertise, pour être indiscutable, doit être indépendante, objective et transparente.
Ces conditions ont pu justifier la mise en place d’agences en charge de l’évaluation des risques, tandis que l’Etat conservait
la compétence de leur gestion. Ainsi, au niveau français, le choix a été fait d’externaliser l’évaluation et l’expertise du risque
par la création de l’AFSSA, devenue aujourd’hui ANSES. Cette agence indépendante malgré son statut public fournit à l’Etat
une expertise scientifique relative tant à l’évaluation du risque sanitaire qu’aux mesures de gestion appropriées. Elle a été
dans le cadre de la crise de l’ESB un appui scientifique notable aux décisions nationales. On a d’ailleurs vu émerger à cette
occasion d’intéressantes confrontations d’experts des deux côtés de la Manche.
Enfin, troisième phénomène qui marque les nouvelles formes de gouvernance sanitaire au sein de l’Union européenne, et en
France en particulier, le transfert de « charge » de la lutte contre les risques sanitaires de la sphère publique à la sphère privée.
Nous reviendrons dans un instant plus en détail sur cet aspect, qui occupe une place particulière dans notre intervention.
Du gouvernement à la gouvernance des risques sanitaires
Ce contexte de lutte et cette évolution dans la gestion des dangers sanitaires nous conduit à nous poser la question du
gouvernement et cette interrogation constitue l’une des trames de notre intervention. Qu’est-ce donc que gouverner ? Selon
le politiste Jean Leca : « Gouverner c’est prendre des décisions, résoudre des conflits, produire des biens publics, coordonner
des comportements privés, réguler les marchés, organiser les élections, extraire des ressources, affecter des dépenses »
(J. Leca, 2003). Gouverner consiste donc à décider, organiser, gérer, prévoir. Dans ce cadre, parler de gouvernement, c’est
décrire le type d’autorité, hiérarchique et contraignante qui s’exerce par une puissance publique, en principe un Etat. Or cela
fonctionne dans un contexte où les autorités publiques sont légitimes à agir et où l’action publique renvoie essentiellement
aux interventions des acteurs publics. Et comme on l’a vu, les contextes d’action dans lesquels sont conçues et produites
les politiques publiques, ont beaucoup changé depuis trois ou quatre décennies. Ces changements résultent de plusieurs
transformations.
Premièrement, la transversalité des enjeux qui nécessite de dépasser les approches sectorielles. Auparavant le
fonctionnement des politiques publiques était organisé en tuyau, par secteur. Par exemple, le ministère de l’agriculture
s’occupait des politiques d’agriculture dédiées au fonctionnement de ce secteur. Aujourd’hui, les politiques agricoles sont
plus transversales, elles renvoient à des enjeux d’alimentation, de santé, d’environnement, de développement économique,
de tourisme.
Deuxièmement, la multiplication des niveaux de gestion pousse à un repositionnement de l’Etat dans un contexte de
mondialisation, de construction européenne et de décentralisation, que nous avons également décrit. Cela contribue à
l’augmentation du nombre d’échelle de décision et de gestion.
En parallèle, un troisième facteur de transformation provient de la multiplication des acteurs amenés à participer l’action
publique, bien au-delà de la sphère publique classique. Il s’agit ici de prendre en compte les institutions non gouvernementales,
les acteurs privés et associatifs, voire les usagers et les consommateurs.
Certains auteurs parlent ainsi de démographie galopante des acteurs des politiques publiques. Enfin, un 4ème enjeu apparaît
8
V. infra p. 23.
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du fait de l’évolution des modes de gouvernement. Cette transformation se matérialise dans l’introduction de nouvelles
démarches : de qualité, d’évaluation, de participation, la prise en compte des usages, etc.
Ces différentes transformations nous poussent donc à penser la régulation des politiques publiques non plus en termes
de gouvernement, dans une logique verticale et hiérarchique, mais plutôt en termes de gouvernance. Patrick Le Galès
définit ainsi la gouvernance « comme un processus de coordination d’acteurs, de groupes sociaux et d’institutions, en
vue d’atteindre des objectifs définis et discutés collectivement (…) (elle résulte de l’) interaction d’une pluralité d’acteurs «
gouvernants » qui ne sont pas tous étatiques ni mêmes publics » (P. Le Galès, Dictionnaire des politiques publiques, 2004).
Cette nouvelle conception de l’action publique renvoie donc à une ouverture du jeu politique, à une augmentation du nombre
d’acteurs participant à l’action publique et conduit à un brouillage des frontières publiques-privées.
L’étude de la gestion des crises sanitaires témoigne bien de ces évolutions. D’où l’intérêt, après nous être interrogés sur la
définition du gouvernement, de nous poser la question de comment on gouverne ?
Formes et modalités d’action de la lutte
Comme nous l’avons évoqué tout à l’heure, le modèle de gouvernance des risques sanitaires mis en place au sein de l’Union
européenne est marqué par une implication croissante des propriétaires ou opérateurs. Ces derniers sont en effet identifiés
comme les mieux à même de gérer les risques sanitaires. Parallèlement, l’implication de l’Etat sera variable, en fonction du
niveau de risque sanitaire estimé.
Le risque de survenance d’un danger sanitaire va déterminer le niveau d’implication de l’Etat. Trois catégories de dangers
sont ainsi définies : les dangers sanitaires de première catégorie regroupent les dangers les plus graves pour la santé
publique animale ou végétale, voire pour l’Homme. Nous mentionnerons par exemple la rage, la tuberculose ou la brucellose.
Peuvent également relever de cette catégorie des dangers sanitaires susceptibles d’impacter gravement l’économie d’une
filière animale ou végétale. Ainsi de la fièvre aphteuse ou de la chrysomèle du maïs. Ces dangers appellent des mesures de
lutte déterminées et rendues obligatoires par l’Etat. L’implication étatique face à ces dangers n’est pas optionnelle.
Au contraire, les dangers de deuxième catégorie appellent des mesures de prévention ou de réaction que l’Etat a la possibilité
de prendre mais qui peuvent également être d’initiative privée. Enfin, les dangers sanitaires de troisième catégorie, c’est-àdire tous les autres, n’appellent que des mesures laissées à l’initiative privée.
Parallèlement à cette implication de l’Etat à géométrie variable, les opérateurs doivent s’approprier le risque. Ils sont chargés
d’assurer la traçabilité des produits à toutes les étapes de la production jusqu’à la distribution. Les opérateurs restent
libres de l’organiser à leur guise, seul le résultat compte. Les opérateurs sont également dans l’obligation de s’assurer que
les conditions d’hygiène sont respectées à toutes les étapes de la filière. A cette fin, ils doivent organiser des procédures
d’autocontrôles dites « HACCP ». A nouveau, peu importent les modalités de contrôle et de prévention des risques retenues,
dès lors qu’elles aboutissent aux résultats attendus. En troisième lieu, une obligation d’information tant des services de l’Etat
que des autres opérateurs de la filière et du consommateur pèse sur les opérateurs professionnels.
Le nouveau dispositif mis en place en France à l’issue des Etats généraux du sanitaire de 2010 conforte la régionalisation du
pilotage de la politique sanitaire. Ceci passe par la possibilité pour l’Etat de déléguer des missions qui, de la surveillance et
de la prévention des dangers sanitaires, peuvent aller jusqu’aux mesures de lutte elles-mêmes. Cette délégation se fait au
bénéfice d’organismes de dimension régionale reconnus par l’Etat. Nous pouvons les percevoir comme un renforcement
de l’effectivité de la sécurité sanitaire et de la coordination entre les acteurs de celle-ci. Nous pouvons également y voir un
report sur la sphère privée de la capacité de l’Etat à lutter contre les risques sanitaires. Autre exemple d’externalisation de
missions qui relevaient initialement de l’Etat : celui du vétérinaire sanitaire. Il est chargé de différentes opérations sanitaires,
expressément mises à la charge des détenteurs d’animaux. Seuls les vétérinaires sanitaires peuvent procéder à ces
opérations, mais ils ne le peuvent qu’après y avoir été habilités par les services de l’Etat.
Ainsi, nous constatons une évolution des formes de l’implication de l’Etat avec un recours accru à la délégation en fonction
du danger sanitaire concerné, associé à une implication plus forte des acteurs privés, en particulier des producteurs,
transformateurs et distributeurs.
Gouverner à distance les risques sanitaires ?
Cette transformation des modes de gouverner les politiques sanitaires nous conduit à conclure sur le constat que les acteurs
gouvernent autrement les risques sanitaires. Nous considérons qu’il s’agit d’une stratégie de gouvernement à distance.
Dans la gestion du sanitaire, ce gouvernement à distance renvoie à plusieurs dispositifs mis en place : d’un côté le processus
d’agencification décrit plus haut ; d’autre part la mise en place de réseaux d’épidémio-surveillance (avec l’ANSES), avec des
collaborations entre les niveaux international, national, régional ou local ; ou par la mise en place de schémas régionaux de
maîtrise des dangers sanitaires, qui associent différents acteurs à la définition et à la gestion des risques sanitaires, dans le
21
cadre d’une nouvelle gouvernance du sanitaire.
Ce gouvernement à distance signifie bien qu’il s’agit de gouverner autrement : d’une part par des processus d’agrément,
d’habilitation, ou le contrôle de délégation ; puis par des logiques de territorialisation avec une recomposition de l’Etat territorial
et la montée en puissance des collectivités territoriales et des espaces de coordination professionnelle infra-nationaux ; enfin
par une évolution des positions du fait de la déresponsabilisation des agents et de la responsabilisation des professionnels.
Le producteur/professionnel devient responsable de la lutte contre les dangers sanitaires. La tutelle s’éloigne, l’autonomie
est recherchée, le pouvoir est partagé.
Nous assistons donc à la transformation d’une action « vraiment » publique vers une action collective avec la prise en compte
d’autres acteurs notamment privés. Cela correspond à ce fameux passage d’une logique de gouvernement (hiérarchique
et sectorielle, fondée sur la légitimité des autorités publiques) à une logique de gouvernance (posant la question de la
coordination des acteurs, et de la transversalité des enjeux).
Que faut-il en conclure en termes d’efficacité de l’action publique ? D’un côté, nous sommes face à des évènements de
plus en plus médiatisés mais qui ne correspondent pas à de véritables crises. Les exemples de ces dernières années,
comme l’affaire des graines germées en 2011, ou lors de l’affaire des lasagnes à la viande de cheval en 2013 ne sont pas
des exemples de crises sanitaires malgré leur surmédiatisation. La première renvoie à un événement sanitaire ciblé, certes
difficilement identifié au départ (on se rappelle des multiples légumes coupables !) mais qui fut rapidement circonscrit. La
seconde renvoie en fait à une fraude aux compositions et à l’étiquetage, sans conséquence sanitaire. Faut-il en conclure à
un abaissement du niveau de surveillance ou au contraire à un renforcement et une meilleure efficacité dans la gestion de
ces problèmes ? Nous retiendrons pour notre part la seconde option.
Cela ne doit cependant pas masquer la persistance de situations à risque sanitaire (réémergence de foyers de tuberculose
bovine sur le territoire européen, etc.) ou de situations de crise localisées (grippe aviaire dans certains pays d’Asie). Mais
force est de constater que les dispositifs tant internationaux que nationaux mis en place permettent de prévenir, d’alerter et
de circonvenir ces risques sanitaires.
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Décret n°2012-842 du 30 juin 2012 relatif à la reconnaissance des organismes à vocation sanitaire, des organisations
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les dangers sanitaires de première et deuxième catégorie, JORF, 1 juill. 2012, p. 10850.
Arrêté du 4 janvier 2013 relatif au contenu des dossiers de reconnaissance d’un organisme à vocation sanitaire, d’une
organisation vétérinaire à vocation technique et d’une association sanitaire régionale conformément aux articles R. 201-14,
R. 201-20 et R. 201-26 du code rural et de la pêche maritime, JORF, 15 janv. 2013, p. 988.
François DARRIBEHAUDE
Sébastien GARDON
L’activité agricole sur le territoire de la métropole de Lyon : de
l’enjeu à la stratégie.
Il aura fallu un demi-siècle pour que l’agriculture redevienne la préoccupation des agglomérations et des métropoles en
France (Prendre en compte l’agriculture dans les SCoT5 , rapport rédigé par Terres en ville et Certu6 , 2012). Dans un
contexte où des villes engagées dans un processus métropolitain comme Rennes, Lille et même Paris, se familiarisent, voire
5
6
Schéma de Cohérence territoriale.
Ex Centre d’Études sur les Réseaux, les Transports et l’Urbanisme nouvellement CEREMA.
24
s’approprient les enjeux de demain comme la construction d’une économie plus locale, l’amélioration du système urbain, du
cadre de vie et de la cohésion sociale. Quelles sont les possibilités d’une politique au cœur des territoires ?
L’agriculture, véritable enjeu de demain (gouvernance alimentaire, dynamisme économique des territoires, adaptation aux
changements climatiques), n’est pas compatible avec la ville du 20ème siècle qui s’étale, ignorant les caractéristiques et
richesses naturelles de son territoire. Apparaît alors la nécessité de formuler un vrai projet territorial sur le long terme à travers
l’application de la règlementation et la rédaction de documents de planification.
Quelle est la position de la métropole lyonnaise vis-à-vis de son territoire, quels sont ses enjeux et comment cela se traduit-il
dans les documents prospectifs ?
Vers un « verdissement » des documents prospectifs.
De plus en plus s’observe dans les documents de planification en France, l’importance du développement durable (suite au
rapport Brundtland de la commission des Nations Unies sur l’environnement et le développement durable en 1991 puis au
Grenelle de l’environnement). Cela oblige à formuler de manière concrète un état des lieux mais aussi des objectifs à atteindre
sur le long terme au-delà de la durée d’un mandat politique ou des documents de planification type PLU7 et SCoT.
Planification et verdissement : quels enjeux pour demain ?
Dans le cadre règlementaire des documents d’urbanisme, l’angle d’attaque retenu est la préservation des espaces naturels
et agricoles, avec notamment la mesure sur la consommation d’espace et la densification. On observe que globalement les
documents se sont saisis de la question agricole en allant plus loin que les obligations règlementaires sur le territoire de la
Métropole de Lyon.
Deux documents stratégiques dans l’aménagement et l’urbanisme sont établis pour répondre à ces obligations : le PLU et
le SCoT. Tous les deux impulsés par la loi SRU8 du 13 décembre 2000 remplaçant le POS9 et le SDAU10 , elle permet aux
collectivités territoriales de « développer leur vision de développement au delà du simple cadre règlementaire » (Art. 122-1-3).
La loi Grenelle 2 du 12 juillet 2010 elle, prévoit l’orientation du SCoT vers un SCoT Grenelle (prenant en compte la maîtrise de
la consommation d’espace naturel, d’énergies, d’émissions de GES11 , d’eau, ainsi que la protection des paysages naturels
et agricoles). Le SCoT Lyonnais en accord avec la loi dispose d’un délai pour adapter ces documents d’urbanisme et se
mettre en conformité vis-à-vis des objectifs de la loi Grenelle. Cela dit, son niveau d’avancement est très proche des attendus
afin de protéger et valoriser dès maintenant un territoire à fort potentiel.
Si le SCoT identifie et définit des entités naturelles et d’urbanisation, il permet aussi de mettre en place une véritable vision
d’ensemble du territoire qui doit être applicable à l’ensemble des communes qui composent cet espace. Il comporte trois
documents : un rapport de présentation qui présente le territoire et établit son diagnostic, le PADD12 qui fixe les orientations
stratégiques sur 20 ans, et le DOO13 qui rassemble les prescriptions règlementaires (opposables au SCoT) qui guideront les
rédactions du PLU, PLUh, PLUi14 et est soumis aux articles L110 et L121-1 du code de l’urbanisme.
Plan Local d’Urbanisme.
Loi Solidarité et Renouvellement Urbain.
9
Plan Occupation des Sols remplacé par le PLU.
10
Schéma Directeur d’Aménagement et d’Urbanisme remplacé par le SCoT.
11
Gaz à Effet de Serre.
12
Projet d’Aménagement et de Développement Durable, découlant du rapport Brundtland, c’est un outil de prospective territoriale mais aussi un document exprimant une vision politique jusqu’à 20 ans, non opposable juridiquement.
13
Document d’Orientations et d’Objectifs, anciennement le DOG (Document d’Orientations Générales).
14
Désigne les PLU intercommunaux et habitat.
7
8
25
Le SCoT de l’agglomération lyonnaise couvre le territoire de la Métropole de Lyon et englobe aussi la communauté de
communes de l’Est lyonnais ainsi que la communauté de communes des pays de l’Ozon (voir figure 2). Le SCoT est dit
opposable au PLU. Cela signifie que ce dernier doit intégrer les prescriptions énoncées par le DOO afin d’être en conformité.
Au delà, le SCoT accompagne et conseille les communes dans la rédaction de leur PLU : accompagnement des projets
d’extension urbaine et valorisation des espaces naturels et agricoles faisant partie de l’armature verte. Le SCoT laisse
effectuer aux PLU des zonages plus précis car le DOG ne formule pas d’objectifs quantifiés. Il donne une orientation ainsi que
des objectifs : Par exemple faire baisser l’étalement urbain par l’augmentation et le remembrement des surfaces naturelles. Il
ne précise pas de chiffres à atteindre mais les obligations législatives sont rappelées, comme les articles à prendre en compte
dans le code de l’urbanisme, de l’environnement, de la loi Grenelle 2 ou SRU.
Quand le SCoT est prévu pour une durée de vingt ans, le PLU lui est un document d’urbanisme d’échelle communale ou
intercommunale formulé pour 10 ans. Composé d’un rapport de présentation, d’un PADD et d’un DOPA15 , il est régi par les
articles L.123-1 et R-123-1 du code de l’urbanisme.
L’organisation dès 1969 en communauté urbaine puis en métropole, a permis la rédaction d’un PLUi à l’échelle de 59
communes du Grand Lyon (figure 1). Cela permet d’avoir une vraie vision d’ensemble, la prise en compte des dynamiques
territoriales ainsi qu’une concertation, en cas de désaccord.
Une politique commune concernant les espaces naturels et agricole permet de :
1. Maintenir une activité économique : valoriser l’agriculture périurbaine en lien avec un développement des économies
locales (circuits-courts, vente directe), économiser les espaces agricoles afin de permettre l’accueil d’activités agricoles
diversifiées, veiller « au maintien d’outils de productions agricoles cohérant » sur le territoire (extrait du PLU Grand Lyon).
2. Structurer le territoire : en contenant et limitant l’étalement urbain, en limitant l’artificialisation des terres par l’intermédiaire
de la mise en continuité de l’armature verte de chaque commune, combiné à une faible consommation du foncier naturel et
agricole (- 700 ha entre 2000 et 2010 = - 5,4% d’espaces agricoles, agence d’urbanisme, 2013)16 .
3. Impulser une identité paysagère et augmenter la qualité environnementale : Analyse de l’impact de l’extension urbaine à
proximité des terres agricoles (dans le rapport de présentation), valorisation des terroirs et des paysages naturels, mise en
réseau des espaces naturels périurbains, des parcs, des terres agricoles et de tous les espaces non-bâtis pour former une
armature verte qui couvrira 50% du territoire à l’horizon 203017 (extrait du PLU Grand Lyon).
Le PLU ou le SCoT sont des documents prospectifs pour l’aménagement des territoires. Ils permettent à des échelles
différentes de planifier une occupation des sols pour une période donnée et donc de protéger et valoriser certains espaces.
Le DOO identifie les enjeux, le SCoT indique et le PLU trace. Ils n’ont par contre pas pour vocation de règlementer l’activité
agricole. Des documents comme les chartes d’agricultures, les ZAP18 ou encore les PSADER PENAP19 sont plus pertinents
quand à l’orientation à donner à l’activité agricole.
La politique agricole de la métropole de Lyon
Mais qu’est ce que l’agriculture ? « Sont réputées agricoles toutes les activités correspondant à la maîtrise et à l’exploitation
d’un cycle biologique de caractère végétal ou animal et constituant une ou plusieurs étapes nécessaires au déroulement de
ce cycle ainsi que les activités exercées par un exploitant agricole qui sont dans le prolongement de l’acte de production ou
qui ont pour support l’exploitation. (Art L311-1 du code rural) »
Document d’Orientations Particulières d’Aménagement.
http://www.polemetropolitain.fr/fileadmin/user_upload/Minisite_PoleMetropolitain/Fichiers/Domaines-dintervention/DI_Amenag_agriculture_dans_le_Pole.pdf
17
Contre 30% aujourd’hui.
18
Zones Agricoles Protégées.
19
Projet Stratégique Agricole et de Développement Rural et de Protection des Espaces Naturels et Agricoles Périurbains.
15
16
26
Ici nous parlerons d’une agriculture périurbaine et locale. Sur le territoire de la métropole elle représente 25% de la surface
totale (entretien avec Laurence Berne, Agence d’urbanisme de Lyon). Les conclusions du rapport de l’agriculture sur le pôle
métropolitain rédigées par l’agence d’urbanisme de Lyon et Saint Etienne font état d’une « baisse du potentiel agricole » entre
2000 et 2010 sur les territoires de la Métropole de Lyon et de Saint Etienne. Il précise que cela est dû à une artificialisation
des sols, à un secteur économique « fragilisé » où le nombre d’hectares de surfaces agricoles baisse, faisant face au
vieillissement des exploitants. Cela dit, ce rapport met en lumière les points forts du territoire. Il y a déjà au minimum une
exploitation agricole par commune sur le territoire de la métropole de Lyon et ce secteur est particulièrement pourvoyeur
d’emplois. L’importance de la présence des circuits-courts (40% de commercialisation) incite à réfléchir à la structuration
de « filières d’approvisionnement de proximité » tout en incluant les territoires limitrophes dans la démarche afin de compter
sur un territoire riche, varié et diversifié. C’est donc une activité présente, à valoriser et à prendre en compte notamment
parce c’est « un projet fédérateur » et essentiel pour l’horizon 2030 (L’agriculture dans le pôle métropolitain, 2013, Agence
d’urbanisme Lyon et Saint Etienne).
Des outils à différentes échelles
Le PRAD20 : en application de la loi de modernisation du 27 juillet 2010, chaque préfet de région doit mettre en place un
PRAD. Fixant « les orientations stratégiques de l’État en région » (Document de synthèse du PRAD21, mars 2012), ce plan est
sensé répondre à trois défis : l’alimentation, l’environnement et l’économie. Pour une durée de sept ans, il indique la volonté
de l’Etat, notamment pour les communautés de communes et communes qui doivent en tenir compte dans leur révision/
modification des PLU. Le PRAD Rhône-Alpes se décline autour de trois objectifs majeurs :
- Améliorer le revenu et les conditions de travail des exploitations agricoles.
- Contribuer à un développement durable des territoires.
- Consolider la nouvelle gouvernance des politiques agricoles et agroalimentaire de l’Etat.
Ce document est produit par le préfet de région sur le mode de la concertation (avec les responsables du monde agricole
local, rural, citoyens, responsables politiques etc.), organisé en groupe de travail. Le PRAD indique les grands enjeux auquel
les régions doivent faire face concernant la politique agricole. Au niveau départemental le PRAD se décline en PAD . Ce
document bien que mettant en place un cadre réglementaire et des orientations, n’est pas suffisant pour maintenait une
activité agricole sur le territoire Rhône-Alpes. D’autres outils politiques ou de prospective territoriale existent, prenant en
compte le PRAD, et proposant des programmes de subvention et d’accompagnements pour les agriculteurs.
Les ZAP (Zones Agricoles Protégées) : Mises en place avec la loi d’orientation du 9 juillet 1999 (Art 108) modifiée en 2006, se
présentent comme des outils de protection du foncier par arrêté préfectoral. Les ZAP concernent « les zones agricoles dont
la préservation présente un intérêt général en raison soit de la qualité de leur production, soit de leur situation géographique
» (loi d’orientation 2006). Une ZAP ne peut être mise en place que sur des zones naturelles et agricoles (A et N sur le PLU)
après une enquête publique et une délibération du conseil de la métropole. Cela peut être une initiative citoyenne, d’un maire
ou du préfet voulant protéger une zone à risque en milieu périurbain (freiner l’artificialisation des sols) rejoignant les intérêts
des agriculteurs. Une ZAP se superpose donc au zonage des zones A et N, à annexer au PLU et SCOT pour une durée
indéterminée mais modifiable et révisable par arrêté préfectoral afin notamment de permettre « le changement d’affectation
des sols des terres agricoles » pour la mise en constructibilité ou l’extension des ces zones. Une ZAP n’assure donc pas la
20
21
Plan Régional d’Agriculture Durable.
Plan d’Agriculture Départemental.
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viabilité de l’activité agricole, c’est un dispositif législatif qui tente de limiter l’artificialisation des sols et protéger les paysages
naturels plus que l’activité agricole en elle même.
Le PSADER PENAP : Outil de politique agricole mis en place depuis la loi sur le développement des territoires ruraux en
2005, il a deux objectifs : protéger les espaces non-bâtis et réaffirmer et soutenir les projets agricoles et le développement
en milieu rural sur le territoire du SCOT (agglomération lyonnaise). Il devient même dès ses débuts un outil réglementaire
intégré au SCoT (Art L143-1 du code de l’urbanisme). D’abord d’initiative départementale le PSADER PENAP est devenu un
programme bénéficiant du soutien (financier et structurel) de la Région, ne prenant pas en compte dans son zonage toute
l’enveloppe urbaine (en blanc sur la carte de la figure 2). Malgré les efforts les ZAP, SCoT et PLU pour fixer et conserver les
SAU22 , le PSADER PENAP permet de :
- Créer des conditions favorables au maintien d’une agriculture périurbaine.
- Gérer les liens entre l’urbain et le rural.
- Participer au maintient d’une qualité environnementale.
Sur le territoire de la métropole ont été identifiées comme site à enjeux les terres agricoles dans les monts d’or. En effet c’est
un espace de terres de qualités mais qui fait face à un vieillissement et un non renouvellement des exploitants couplés à des
terrains en pente difficilement praticables avec des machines. L’Est lyonnais est un espace sensible du fait de la présence
de nappes phréatiques qu’il faut protéger de la pollution, notamment en favorisant l’agriculture biologique aux alentours. A
Jons, une « halle fermière » a été subventionnée par la Région (construction du bâtiment et installation), à Meyzieu, c’est un
programme de culture pollinique hors saison qui a été subventionné, afin de permettre aux abeilles locales de trouver plus de
ressources mellifères, avant la mauvaise saison. Un des enjeux principaux est aussi de veiller à la diversité des exploitations
agricoles. En effet, de plus en plus l’activité équestre, considéré par le code rural comme une activité agricole (élevage
et activités exercées avec l’animal), prend de l’importance du fait de la forte valorisation (touristique : équitation sportive,
ballades etc.) possible, en occupant des SAU qui pourraient être utilisées pour des cultures diversifiées (maraîchage et
élevage par exemple).
Ce programme permet donc un accompagnement pour les agriculteurs en leur favorisant l’accès au foncier et en les
accompagnant dans leur installation. Il participe à l’augmentation de l’offre en produits locaux à travers l’identification et la
valorisation de la ceinture maraichère en prévision de la hausse de la population sur ce territoire afin de maintenir une activité
prometteuse en termes d’emplois qui propose des solutions pour le développement et l’alimentation de demain.
Cette présentation des différents outils politiques et législatifs en faveur de l’agriculture a permis de mettre en lumière
l’emboitement d’échelles ainsi que leurs rôles différents sur l’agriculture du territoire de la Métropole de Lyon. Le PRAD est un
outil qui fait le lien entre l’État et la région afin de fixer des orientations agricoles stratégiques à faire appliquer sur les différents
territoires. Il est rédigé par le préfet de région après une concertation avec la société civile. Les départements doivent décliner
le PRAD en PAD en s’appropriant les grandes orientations voulues par l’État sur leur territoire.
Les ZAP, elles sont mises en place de manière ponctuelle afin de protéger par arrêté préfectoral un espace agricole menacé
par l’étalement urbain. Le maire ou le citoyen peut formuler une demande d’inscription d’un territoire agricole en ZAP au
préfet de département, qui décidera ou non de classer la zone.
Pour influer sur l’activité agricole en elle-même, c’est le PSADER PENAP qui s’avère l’outil le plus efficace. Ses deux missions
sont de protéger l’espace agricole non bâtit et de soutenir le développement agricole sur toute la région Rhône-Alpes. Par
l’intermédiaires de subventions (travaux de rénovation, aide à la construction, aide à l’installation de jeunes exploitants,
accession au foncier agricole), et de mise à disposition d’experts par la région, ce programme permet réellement de maintenir,
appuyer et développer l’activité agricole.
Les moyens déployés par la Métropole et le portage politique.
Le thème de l’agriculture, en lien avec la santé, l’alimentation, l’économie (du local) est un sujet très porteur en ce moment
et investi par beaucoup d’acteurs et notamment politiques. Comment les questions d’agriculture d’alimentation et de santé
sont elles traitées par les vice-présidents et les conseillers permanents ?
Les Vice-présidents et les conseillers permanents.
Le conseil de la métropole de Lyon est présidé par Gérard Collomb (président de la métropole et maire de Lyon), et
composé de 24 vice-présidents et 23 conseillers permanents organisés en commissions permanentes de travail (autant de
commissions que de vice-présidents ou conseillers), auxquelles s’ajoutent sept commissions thématiques. Les commissions
travaillent aux côtés de maires d’arrondissement, de divers élus communaux, ainsi que de Vice-Présidents et de conseillers
permanents dans des thématiques en général proches de leur intitulé. Ces commissions travaillent en collaboration avec les
22
Surfaces Agricole Utiles.
28
commissions permanentes pour faire remonter et traiter les enjeux de demain, des communes à la métropole.
Si l’on s’intéresse aux vice-présidents et à leur intitulé on remarque que le premier vice-président est en charge de l’économie,
viennent ensuite les Ressources Humaines et les Universités. C’est en neuvième position qu’apparaît l’environnement, la
santé et le bien-être en ville. Arrivent ensuite le développement durable, la biodiversité et les trames vertes et bleues gérées
par le quinzième vice-président.
Si maintenant l’on s’intéresse aux missions des conseillers permanents, c’est le logement social qui a été confié au premier
conseiller. Viennent ensuite les mobilités urbaines (2ème) et la coopération décentralisée (3ème). La politique agricole, le
foncier et la production agricole sont à la charge du quatorzième conseiller tandis que le développement des synergies
métropolitaines est à la charge du vingt-et-unième conseiller.
Mais est-ce la thématique ou bien la personne qui porte cette thématique, qui est stratégique dans cette distribution ?
Des missions et des moyens qui se superposent ?
Forte de ce portage politique nouveau, l’agriculture urbaine ou périurbaine est un thème qui est repris par les services de la
Métropole de Lyon.
Plusieurs entrées existent pour cette prise en charge et compte-tenu de l’évolution de l’organigramme des services, la
lisibilité instantanée de cette thématique n’est pas aisée : Nous pouvons répertorier principalement trois domaines suivants
avec la planification et la stratégie, l’écologie et les services techniques liés notamment à la propreté.
Les démarches ne sont pas totalement coordonnées et elles peuvent créer quelques doublons ou quelques hiatus ; une
vision transversale plus marquée va s’avérer nécessaire, qui s’appuiera logiquement sur le passage du global au local, de la
stratégie urbaine au domaine de l’applicatif sur le terrain.
Comme pour toutes les thématiques émergentes et innovantes, les motivations sont fortes à traiter ce domaine ; reste
à rationaliser en facilitant plutôt les complémentarités et une vision transversale pas évidente à mettre en place dans les
services de la taille de ceux de la Métropole, mais néanmoins absolument nécessaire.
De surcroît, un lien solide avec l’Université permettra de sous-tendre les démarches de recherche et d’innovation dans un
contexte de valorisation réciproque.
Webographie/Bibliographie :
- Plan régional de l’agriculture durable de Rhône-Alpes, 2012, Direction régionale de l’alimentation de l’agriculture et de la
forêt de Rhône-Alpes.
- Agriculture périurbaine : Portrait du territoire du pôle métropolitain, 2013, Agence d’urbanisme de Lyon et Saint Etienne.
- Prise en compte de la dimension agricole dans les PLUi en milieu rural, 2013, Certu
- L’agriculture dans les SCoT témoins, 2003, Certu
- Prendre en compte l’agriculture dans les SCoT, 2006-2012, terres en ville et Certu.
- SCoT et dynamiques de territoires, 2013, Ministère de l ‘égalité des territoires et du logement.
- http://www.grandlyon.com/services/plu-sur-internet.html
- http://www.grandlyon.com/metropole/le-conseil-de-la-metropole.html
- http://www.scot-agglolyon.fr
- http://www.psader-penap.org/introduction.php
-http://www.psader-penap.org/
-http://draaf.rhone-alpes.agriculture.gouv.fr/Le-Plan-regional
Personnes ressources :
S Levesque : chef de projet planification et mise en œuvre, Cerema
L. Berne : chargée d’étude à l’Agence d’urbanisme de Lyon, Coordination de l’observatoire partenarial des espaces agricoles
et naturels.
Marie-Anne Caroline PAUGET 23
Etudiante en maitrise de géographie et aménagement du territoire à l’Université Jean Moulin Lyon 3, mémoire en cours sur
les questions d’agriculture locale et d’accessibilité alimentaire ; [email protected].
23
29
Thèses d’Université
Aspects sanitaires et environnementaux de l’encadrement
juridique de l’alimentation des animaux producteurs de denrées
alimentaires comparé avec celui de l’alimentation humaine
Caroline VISTE-MARTIN a débuté en 2014 cette thèse de droit dans le cadre du programme de formation complémentaire
par la recherche (Institut de Recherches Juridiques (IRJS) – Paris 1 Panthéon-Sorbonne / AgroParisTech) sous la codirection
de François Guy TREBULLE (Paris 1 Panthéon-Sorbonne) et de Philippe SCHMIDELY (AgroParisTech), à soutenir en 2017
Présentation du projet de thèse :
Ces 20 dernières années, les crises sanitaires ont suscité de nombreux travaux scientifiques, en France et à l’étranger,
consacrés à la sécurité sanitaire des aliments pour animaux. Ils ont démontré l’importance d’une approche globale intégrative
dans l’analyse des risques de la chaîne alimentaire :
- « Globale », car l’analyse de ces risques s’effectue dorénavant de « la fourche à la fourchette » en décloisonnant les
différents secteurs d’activité dans une approche transversale s’appliquant aux filières végétales et animales ;
- « Intégrative », puisque par l’étude des interactions entre les différents domaines, cette approche vise à préserver la santé
de l’Homme, celle des animaux et de l’environnement, dans le concept « One Health, une seule Santé ».
C’est dans le cadre de cette approche que la réglementation des aliments pour animaux, qui bénéficiait auparavant
d’une existence autonome, a été intégrée dans la législation alimentaire de l’Union européenne, notamment par son texte
fondateur, le règlement (CE) n° 178/2002 du 28 janvier 2002. Toutefois, son intégration n’est pas totale puisque le législateur
européen a fait le choix, contrairement à des législateurs d’autres pays, de définir de façon différente les aliments destinés
à la consommation humaine d’une part, dénommés « aliments » (ou « denrées alimentaires »), et les aliments destinés à la
consommation animale d’autre part, les « aliments pour animaux ».
Cette particularité, associée à l’histoire de la construction européenne et de son droit, fait qu’aujourd’hui le cadre législatif de
l’alimentation, tant animale qu’humaine, est touffu. D’un côté le paquet hygiène donne les grandes lignes. Puis, un ensemble
de règlements européens, ou de directives transposées dans le droit national, ainsi que des textes nationaux persistants,
encadrent différentes catégories d’aliments. Ces catégories peuvent être identiques entre aliments pour animaux et denrées
alimentaires. On peut citer les catégories similaires suivantes : « matières premières », « aliments (pour animaux) contenant
ou issus des OGM », « additifs ». Mais les catégories peuvent également différer entre les aliments pour animaux et les
denrées alimentaires. Par exemple, il n’existe pas de « compléments alimentaires » ni de « novel feed » dans les aliments
pour animaux. De même qu’il n’y pas « d’aliments complémentaires » pour l’homme. Dans le cas de catégories identiques,
l’encadrement juridique peut également être similaire (« OGM »), comparable mais avec des différences (allégations), ou
inexistant pour l’un des 2 (novel food). Parmi les différences constatées, la place de l’évaluation scientifique au cours du
processus d’élaboration des règlements peut également être relevée (allégations de santé).
Si de nombreuses études ont été publiées pour l’alimentation humaine, à ce jour, peu se sont penchées sur le droit de
l’alimentation des animaux.
La thèse s’intéresse à ce dernier, compte tenu de la place de ces aliments en tant que maillon essentiel de la sécurité sanitaire
de la chaîne alimentaire (pour les animaux qui les consomment, mais également et surtout pour l’Homme, consommateur
final des produits relevant du dernier maillon de cette chaîne) et de ses interactions avec l’environnement. L’alimentation des
animaux est en effet tributaire, en amont, de la qualité des ressources, végétales et animales, elles-mêmes dépendantes de
l’environnement (pollutions), et peut avoir, en aval, des répercussions directes ou indirectes sur l’environnement (rejets de
méthane, de matières organiques, d’azote, de phosphore, de médicaments....).
Déroulement de la formation complémentaire par la recherche :
Au préalable, un temps indispensable d’acquisition d’outils et de méthodes de recherche spécifiques du domaine du
droit, ainsi qu’un approfondissement des connaissances en droit de l’alimentation, en droit des médicaments humains et
30
vétérinaires ainsi qu’en responsabilités civile, administrative et pénale du domaine sanitaire ont été nécessaires. Le premier
temps de recherche est consacré à la comparaison fine des réglementations relatives aux aliments pour animaux avec celles
régissant les denrées alimentaires. Les objectifs similaires de ces réglementations (notamment garantir un haut niveau de
sécurité sanitaire des produits concernés tout en observant des pratiques respectueuses de l’environnement et du bienêtre animal) ayant souvent été traduits de façon non « symétrique » selon qu’elles visaient les aliments pour animaux ou
les denrées alimentaires. Ainsi, pour plusieurs thématiques communes, le régime juridique et les dispositions en vigueur
sont parallèles (cas de la réglementation OGM) tandis que pour d’autres ils divergent (additifs, compléments alimentaires
et aliments complémentaires, aliments diététiques). Enfin, pour une dernière catégorie de thématiques, cette comparaison
s’avère impossible du fait d’un encadrement minime ou inexistant dans le cas des aliments pour animaux (novel food
mais pas de « novel feed »). Cette comparaison inclut les mesures de police administrative sans négliger le volet pénal,
compte tenu des conséquences sanitaires possibles des fraudes alimentaires. Cette comparaison permettra de dresser
un panorama critique de l’encadrement législatif actuel des aliments pour animaux producteurs de denrées alimentaires
en France, cet encadrement résultant des choix opérés par le législateur européen, éventuellement complétés par ceux du
législateur et du gestionnaire nationaux.
La thèse a pour objectif de proposer, lorsque c’est possible, une simplification de cet encadrement juridique. Ces pistes
d’amélioration devront préserver une garantie équivalente, voire accrue, de l’atteinte des objectifs fixés dans le règlement
socle du droit de l’alimentation, notamment l’atteinte d’un haut niveau de sécurité en ce qui concerne la santé de l’Homme,
celle des animaux ainsi que la protection de l’environnement, d’une part, la protection des intérêts du consommateur, d’autre
part, cela dans la perspective du commerce international et de son droit.
Des discussions avec des professionnels de l’alimentation des animaux (fabricants, vendeurs, éleveurs), ainsi que des
rencontres régulières avec les administrations centrales concernées (la DGAl, mais aussi la DGCCRF, la DGS, des directions
du ministère de l’environnement), la DG Santé et sécurité alimentaire (ex DG Sanco) de la Commission européenne et
l’évaluateur des risques (Anses, Efsa) viendront enrichir l’analyse des textes.
Les structures de rattachement :
Cette thèse nécessite un dialogue permanent entre droit et sciences, entre l’évaluateur du risque et le législateur. Ce dialogue
s’est naturellement matérialisé en une direction originale, associant d’une part l’Institut de Recherches Juridiques de la
Sorbonne (IRJS) et l’UFR de « nutrition animale, qualité des produits et bien-être » d’AgroParisTech, dans les personnes de
François Guy Trébulle, directeur de l’Ecole Doctorale de droit de la Sorbonne et Professeur de droit de l’environnement à
l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et Philippe Schmidely, Professeur de nutrition animale à AgroParisTech et Président
du Comité d’Experts Spécialisé en alimentation animale (CES Alan) à l’Anses.
Le pourquoi de ce projet de FCPR :
Il apparaît nécessaire que le cadre juridique « colle » aux évolutions scientifiques et technologiques afin de ne pas freiner
inutilement l’innovation, tout en protégeant au mieux le citoyen et l’environnement par anticipation des risques / déviances.
Ce dialogue entre droit et science se trouve facilité par l’existence « d’interprètes », c’est-à-dire de personnes ayant à la fois
des compétences juridique et scientifique de par l’importance des mots, des concepts juridiques et des termes scientifiques
et techniques. Cette évidence m’est apparue alors que j’étais en poste à AgroParisTech, avant mon année de formation
statutaire à l’ENSV. J’étais alors responsable d’une formation de niveau post-master accueillant des étudiants de formation
scientifique (ingénieurs agronomes, vétérinaires, pharmaciens...) et de formation juridique (étudiants juristes inscrits en master
2 de droit), et j’ai eu la chance d’encadrer des travaux de groupe « mixtes » et d’assister à des soutenances de qualité de
travaux mêlant sciences du vivant et sciences juridiques en réponse à une commande nécessitant une approche intégrative
de questions complexes, notamment dans le domaine de l’alimentation. J’ai alors appris l’importance et la richesse de
l’interdisciplinarité. Attirée par les similitudes que présentent les raisonnements juridique et scientifique, telles que la logique,
la rigueur et la finesse, j’ai suivi avec intérêt différentes formations continues en droit pendant ces années, ainsi que celles
dispensées pendant la présente année à l’ENSV. Ces formations ont confirmé mon attrait pour cette discipline prégnante
dans les missions des ISPV. J’ai alors souhaité consolider et approfondir mes connaissances dans ce domaine de manière
à acquérir une double compétence scientifique et juridique.
31
Variabilité des pratiques en antibiothérapie dans la filière poulet
de chair label
Cécile ADAM réalise cette thèse au titre du programme de formation complémentaire par la recherche, au sein de l’UMR
INRA/ENVT IHAP 1225 et des UR INRA 0346 Epidémiologie animale (Theix) et Ritme depuis début octobre 2014.
Elle est encadrée par Christian Ducrot (INRA). Sa soutenance est prévue en 2017.
Présentation du projet de thèse
« Il est difficile d’élaborer un programme de santé publique sans prendre en considération la manière dont les individus
perçoivent, interprètent et se comportent à l’égard de cette maladie. (…) Il ne faut pas perdre le point de vue que les
populations constituent le point de départ et le point d’arrivée de toute action en santé publique. Ce constat manque
encore cruellement de traduction sur le terrain. Il est peut-être temps de passer véritablement à une approche globale des
problèmes de santé point final » (Perrey and DeThé, 2009) 24
Au cours de l’année de formation à l’ENSV en 2013, j’ai construit un projet de recherche qui s’est concrétisé par l’obtention
d’une FCPR de trois ans. Sous la direction de deux unités de recherche INRA (unité EpiA et unité Ritme) et d’une unité mixte
de recherche INRA/ENVT (unité IHAP 1225), j’ai pour objectif d’étudier la variabilité des pratiques en antibiothérapie dans
la filière poulet de chair label. L’objectif de la communication suivante est de présenter le projet, son contexte ainsi que ses
enjeux, la première phase de collecte de données n’étant au moment de sa rédaction pas terminée.
L’antibiorésistance : quels enjeux ?
Si l’antibiorésistance est connue depuis longtemps – en fait de manière quasi contemporaine à la découverte des
antibiotiques25 – elle ne s’est construite comme un problème public que récemment (interdiction en 2006 des facteurs
de croissance dans l’UE). A ce titre, elle fait en France l’objet d’une politique publique, le Plan EcoAntibio 2017, visant à
améliorer et diminuer l’usage des antibiotiques chez les animaux, mis en place en 2011 et géré par le Ministère en charge
de l’Agriculture.
Les animaux reçoivent en effet des traitements antibiotiques à titre préventif26 , métaphylactique ou curatif, avec des molécules
pour la plupart identiques à celles utilisées en médecine humaine27 . La participation des antibiotiques d’usage vétérinaire à
la sélection de gènes et de plasmides de résistance chez les bactéries, puis leur transmission ensuite à l’homme n’est à ce
jour pas bien comprise, et dépend des bactéries considérées28 . La sélection d’entérocoques résistants à la vancomycine
parallèlement à l’utilisation d’avoparcine comme facteur de croissance en élevage illustre ce problème. En revanche dans
le cas des salmonelles, il a été montré par séquençage que la souche multirésistante de Salmonella Typhimurium DT104
n’était pas issue d’un réservoir animal, et qu’il n’y a pas eu de transfert de bactérie et de ses résistances entre les populations
humaines et animales29 . Quoiqu’il en soit la transmission directe est très difficile à mettre en évidence et à quantifier, comme
l’illustrent bien les résultats contradictoires des différentes études sur les bactéries productrices d’ESBL30 .
L’antibiorésistance est avant tout un enjeu de santé publique, le développement de résistances chez les animaux pouvant se
transmettre à l’homme de manière directe ou indirecte, par l’environnement ou l’aliment. Le principal danger est la sélection
d’un - ou de plusieurs – gène(s) de résistance chez les bactéries commensales des animaux. Le schéma de diffusion de
résistance le plus efficace est celui du gène porté par un élément mobile, le plasmide, plutôt que par un chromosome
bactérien. Le plasmide est ensuite facilement échangé entre les bactéries, permettant ainsi la diffusion très rapide d’une
résistance dans différents écosystèmes bactériens via l’environnement ou l’alimentation. Le deuxième danger est celui
du développement d’une résistance chez une bactérie zoonotique, donc pathogène pour l’homme – Campylobacter,
Salmonella et E.coli -, qui peut le contaminer par contact direct, ou via l’alimentation. Deux autres dangers sont à signaler : la
Perrey C, DeThé G. Le souple et le dur. Les sciences humaines au secours des sciences biomédicales. CNRS Editions,
2009. 221 p.
25
« Dès 1945, le bactériologiste britannique Alexander Fleming, découvreur du médicament, lança un avertissement dans un
article publié par le New York Times ». Page 21 ; Levy SB. Le paradoxe des antibiotiques. Comment le miracle tue le miracle
1999. 240 p.
26
L’article II du Projet de décret relatif à la prescription et à la délivrance des médicaments contenant une ou plusieurs
substances antibiotiques prévoit une limitation de l’usage des antibiotiques critiques aux usages métaphylactiques et curatifs.
Copil EcoAntibio novembre 2014.
27
Moulin G, Cavalié P, Pellanne I, Chevance A, Laval A, Millemann Y, et al. A comparison of antimicrobial usage in human and
veterinary medicine in France from 1999 to 2005. Journal of Antimicrobial Chemotherapy. 2008(62):9.
28
Laxminarayan R, Duse A, Wattal C, Zaidi AKM, Wertheim HFL, Sumpradit N, et al. Antibiotic resistance—the need for global
solutions. The Lancet Infectious Diseases 2013;13:1057-98.
29
Mather AE, Reid SWJ, Maskell DJ, Parkhill J, Fookes MC, Harris SR, et al. Distinguishable Epidemics of Multidrug-Resistant
Salmonella Typhimurium DT104 in Different Hosts. Science. 2013;341:1514-7.
30
Extended spectrum beta lactamase : béta lactamase à spectre étendu. v. Laxminarayan R, Duse A, Wattal C, Zaidi AKM,
Wertheim HFL, Sumpradit N, et al., ibid.
24
32
présence d’antibiotiques actifs dans l’environnement et celle de résidus d’antibiotiques dans les aliments d’origine animale.
La baisse d’efficacité des antibiotiques menace également à terme la sécurité alimentaire, la sécurité des aliments et le bienêtre animal. L’antibiorésistance est par ailleurs un enjeu économique pour les différentes filières de l’élevage.
Les usages d’antibiotiques chez les animaux de production
La consommation des antibiotiques vétérinaires est suivie en France depuis 1999 : l’ANSES enregistre les déclarations
des ventes d’antibiotiques des laboratoires qui les commercialisent. La loi du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture,
l’alimentation et la forêt prévoit un enregistrement complémentaire des ventes d’antibiotiques, par la déclaration des ventes
d’antibiotiques par les ayants droit (pharmaciens et vétérinaires). En fonction des AMM et de l’effectif des populations
animales, l’ANSES estime l’exposition aux antibiotiques par espèces ; différents types d’indicateurs d’exposition ont été
développés au cours du temps à cet effet31 . Selon les mesures faites pour l’ALEA32 , un de ces indicateurs, les espèces
les plus exposées aux antibiotiques en 2013 étaient les lapins, les veaux et les volailles. Parvenir à estimer l’exposition par
espèce et type de production est un problème particulièrement saillant dans la filière volaille française qui présente une
très grande hétérogénéité d’espèces et de pratiques. Des études ponctuelles ont été conduites auprès des prescripteurs
ou des éleveurs, afin de connaître plus précisément les usages d’antibiotiques par espèce. Chauvin a ainsi montré qu’en
poulet de chair standard, qui représentait en 2013 plus de 80% des volailles abattues en France33 , la moitié des usages
des antibiotiques était le fait de 10% des lots34 . L’ANSES a par ailleurs mis en place en 2003 un observatoire avicole des
consommations antibiotiques en volailles de chair35 .
Etant donné l’importance de la filière poulet de chair, nous avons décidé dans le cadre du projet de thèse de nous intéresser
plus particulièrement à la filière poulet de chair label, qui a fait l’objet de peu d’études jusqu’à présent. Cette filière, qui
représente 60% de la consommation des poulets prêts à cuire des ménages français, dite de qualité, est principalement
destinée au marché français. Elle représente un débouché économique important pour les deux principaux bassins de
production que sont le grand Ouest – qui représente la moitié de la production nationale - et le Sud-Ouest -région où
elle constitue la majeure partie de la production de volailles. Les conditions d’élevage sont plus extensives en label qu’en
standard : 81 jours d’élevage contre une trentaine en standard, une densité maximale de 11 poulets au mètre carré contre
une vingtaine en standard, accès à un parcours extérieur. Tous ces critères nous ont donc conduits à nous interroger sur les
usages en antibiotiques de la filière poulet de chair label, et sur leurs déterminants zootechniques, sociaux et économiques.
Existe-t-il, comme dans la filière poulet de chair standard, des faibles et forts utilisateurs ? Quand et comment les antibiotiques
sont-ils utilisés ? Quels sont les facteurs qui expliquent l’utilisation des antibiotiques ? Comment les différents acteurs de la
filière - accouveur, abatteur, groupement de producteurs, certificateur, organisation de production, organisme de défense et
de gestion, éleveur, technicien, vétérinaire, distributeur, consommateur – influent-ils sur la prise de décision finale de traiter
aux antibiotiques ? Quelles relations les différents acteurs entretiennent-ils entre eux ?
Une approche interdisciplinaire
Pour répondre à ces questions, nous avons choisi de travailler selon une approche interdisciplinaire combinant épidémiologie
et sociologie. La littérature met en évidence que pour améliorer l’observance des mesures de biosécurité en élevage, il
est nécessaire de travailler sur la façon de présenter et de délivrer l’information36 aux éleveurs, plutôt que de considérer
uniquement le contenu de l’information . Il existe en effet un décalage entre ce que l’éleveur applique dans son élevage, et la
perception qu’il en a. Il est important de comprendre les perceptions de l’éleveur : une mesure de biosécurité jugée contraire
à la perception qu’il se fait de son métier37 ou chronophage ne sera pas appliquée38 .
Par ailleurs, il est courant de mettre l’éleveur au centre du processus décisionnel aboutissant in fine au traitement antibiotique.
Pourtant, l’éleveur est au sein d’un réseau dense d’acteurs, le premier de ces réseaux étant le trinôme éleveur-vétérinairetechnicien. Il convient donc d’intégrer cet aspect relationnel à notre interrogation.
De même, les particularités économiques et organisationnelles des filières sont indissociables des pratiques du trinôme
éleveur-vétérinaire-technicien, cet aspect étant plus ou moins prégnant en fonction du degré d’intégration de la filière. L’atelier
Chevance A, Moulin G. Suivi des ventes de médicaments vétérinaires contenant des antibiotiques en France en 2013.
ANSES-ANMV, 2014.
32
L’ALEA (Animal Level of Exposure to Antimicrobials) est le rapport du poids vif traité par la masse potentiellement consommatrice d’antibiotiques.
33
Chiffres FranceAgriMer.
34
Chauvin C, LeBouquin S, Sanders P. Usage des antibiotiques en filières porcine, avicole et cunicole en France – résultats
d’enquêtes. Bulletin épidémiologique, santé animale et alimentation Spécial Antibiotiques et Antibiorésistances. 2012;53:12-5.
35
Chauvin C, LeBouquin S, Hardy A, Haguet D, Orand J-P, Sanders P. Mise en place d’un observatoire avicole des consommations antibiotiques Epidémiologie et santé animale. 2005;48:63-8.
36
Garforth C. Effective communication to improve udder Health: can social science help? Udder Health and Communication.
Wageningen, The Netherlands: Wageningen Academic Publishers; 2011.
37
Burton RJF. Seeing Through the ‘Good Farmer’s’ Eyes: Towards Developing an Understanding of the Social Symbolic Value
of ‘Productivist’ Behaviour. Sociologia Ruralis. 2004;44(2):195-215.
38
Alarcon P, Wieland B, Mateus ALP, Dewberryc C. Pig farmers’ perceptions, attitudes, influences andmanagement of
information in the decision-making processfor disease control. Preventive Veterinary Medicine. 2014;116:223-42; Gunn GJ,
Heffernan C, Hall M, McLeod A, Hovi M. Measuring and comparing constraints to improved biosecurity amongst GB farmers,
veterinarians and the auxiliary industries. Preventive Veterinary Medicine. 2008;84:310-23.
31
33
poulet label ne constitue que très rarement l’orientation économique principale de l’exploitation, et représente de manière
ambiguë un atelier à la fois secondaire et indispensable à la viabilité économique de l’exploitation toute entière. Comprendre
l’histoire de l’atelier label et comment il s’intègre dans l’exploitation est primordial. La sociologie nous permettra donc de
prendre en compte ces dimensions.
Bien que les disciplines restent relativement compartimentées dans la recherche, un nombre croissant d’études sont menées
avec succès dans un cadre interdisciplinaire . De plus en plus d’ouvrages et d’articles scientifiques incitent les chercheurs à
travailler en interdisciplinarité39 dans le domaine de la santé animale40 .
Notre thèse s’articule en trois étapes. La première, qui se déroulera de mars 2015 à septembre 2015, vise à comprendre
le fonctionnement global de la filière, et à détailler le travail des vétérinaires, des éleveurs et des techniciens, ainsi que leurs
relations entre eux. Afin de tenir compte de la potentielle variabilité inhérente à la diversité des organisations de production
(OP) et des bassins de production, nous avons choisi de mener cette première étape qualitative dans trois OP de trois
régions de France. Reposant sur une méthode sociologique – conduite d’entretiens semi-directifs-, la première étape nous
aidera par ailleurs à concevoir le protocole de la suivante. La deuxième étape, quantitative, prévue entre octobre 2015 et
août 2016, reposera sur une étude épidémiologique, et visera à quantifier l’usage des antibiotiques dans la filière poulet de
chair label (antibiotiques utilisés, posologie, durée de traitement, etc.). Elle permettra également de mesurer des indicateurs
permettant d’expliquer les déterminants sociaux, économiques et zootechniques de l’usage d’antibiotiques. La sociologie
nous permettra donc à la fois de concevoir le protocole de la deuxième étape, et également d’en interpréter les résultats.
Enfin la troisième étape – entre septembre 2016 et le premier semestre 2017-, fera également appel à la sociologie pour
comprendre l’articulation de la décision de traiter aux antibiotiques entre les différents maillons de la filière.
Notre travail mobilisera des références de sociologie rurale, mais également de sociologie du travail : comprendre la
signification des pratiques de travail des éleveurs de poulets label, mais aussi le choix de l’orientation de l’éleveur vers la
production label. Il permettra in fine à la fois de produire des données sur et pour la filière, mais également de dégager des
leviers d’action pour le gestionnaire du risque.
Autres thèses d’Université en cours
La caractérisation des paramètres génétiques de la résistance à certains agents infectieux chez l’huître creuse, Crassostrea
gigas, dans le cadre des surmortalités estivales
Patrick AZEMA a débuté en 2012, dans le cadre du dispositif de formation complémentaire par la recherche, cette thèse
en génétique quantitative (Laboratoire de génétique et pathologie - Ifremer - La Tremblade - École Doctorale Sciences pour
l’Environnement Gay Lussac (GL) – Université de La Rochelle) pour une soutenance programmée en 2015.
Son projet de thèse a été présenté dans l’édition 2013 des présents cahiers.
Surveillance des avortements chez les bovins : évaluation du dispositif actuel et analyse des données démographiques et de
reproduction à des fins d’élaboration d’un outil complémentaire de surveillance syndromique.
Anne BRONNER a débuté en 2012 cette thèse dans le cadre du programme de formation complémentaire par la recherche
(ANSES de Lyon, Unité épidémiologie - École Doctorale « Évolution Écosystèmes Microbiologie Modélisation », Université
Claude Bernard – Lyon 1), à soutenir en 2015.
Son projet de thèse a été présenté dans l’édition 2013 des présents cahiers.
Protéger les consommateurs, libéraliser le commerce, affirmer des modèles politiques : les confrontations transatlantiques
de l’affaire du «bœuf aux hormones», 1980-2015
Louise DANGY a débuté en 2013 cette thèse de sociologie/science politique dans le cadre du programme de formation
complémentaire par la recherche (Laboratoire TRIANGLE – Sciences Po Lyon) sous la codirection de Renaud PAYRE
(Sciences Po Lyon) et de David DEMORTAIN (INRA SenS), pour une soutenance fin 2016.
Son projet de thèse a été présenté dans l’édition 2014 des présents cahiers.
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La santé au travail des agents de l’État en abattoir. De l’émergence publique du problème à la mise en place d’une politique
de prévention.
Amandine GAUTIER a débuté cette thèse de sciences politiques en juillet 2012 grâce au co-financement de l’Ecole Nationale
des Services Vétérinaires (ENSV) et du Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de travail (CHSCT) du Ministère en
charge de l’Agriculture. Sa thèse est réalisée au sein du Laboratoire Triangle (UMR 5206) et dirigée par Christine Dourlens,
maître de conférences en sociologie et en sciences politiques (Laboratoire Triangle).
Son projet de thèse a été présenté dans l’édition 2013 des présents cahiers.
Clés de réussite de plans bien-être animal : exemple des vaches laitières
Anne-Claire LOMELLINI-DERECLENNE réalise cette thèse (Ecole Doctorale Sciences de la Vie et de la Santé de l’université
Blaise Pascal de Clermont-Ferrand) au titre du programme de formation complémentaire par la recherche, au sein de l’unité
mixte de recherche sur les herbivores de l’INRA de Theix depuis début octobre 2013. Sa soutenance est prévue en 2016.
Son projet de thèse a été présenté dans l’édition 2014 des présents cahiers.
35
Thèses d’exercice vétérinaire soutenues
La nouvelle gouvernance sanitaire en France : exemple de
l’élaboration du schéma régional de maîtrise des dangers
sanitaires en Midi-Pyrénées
Hélène BRIEN, Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2015
Cadre de réalisation
Cette étude a été réalisée par Hélène BRIEN au titre de sa thèse soutenue le 21 novembre 2014
devant la Faculté de
Médecine de Toulouse pour l’obtention du diplôme d’Etat de Docteur Vétérinaire (Ecole Nationale Vétérinaire de Toulouse),
et dirigée par Dominique-Pierre PICAVET (Pr.Vét., Ecole Nationale Vétérinaire de Toulouse).
Questions abordées par l’étude
Suite aux Etats Généraux du Sanitaire tenus en 2010, la réforme de la Nouvelle Gouvernance Sanitaire a vu le jour. Elle
accentue le rôle de l’échelon régional qui devient prépondérant dans l’orientation de la politique sanitaire régionale, au travers
de diverses instances, consultatives ou opérationnelles. Une des missions de l’Association Sanitaire Régionale (ASR) est de
constituer le schéma régional de maîtrise des dangers sanitaires. Il définit un plan stratégique de surveillance, de prévention
et de lutte contre les dangers sanitaires reconnus comme prioritaires pour la région et en décline les modalités de mise en
place et de financement.
La conception du schéma régional a débuté en Midi-Pyrénées avant même la constitution des ASR. La mise au point d’une
méthode de hiérarchisation des dangers sanitaires et l’organisation de réunions de groupes d’experts ont permis d’aboutir à
une liste hiérarchisée des dangers sanitaires pour chacune des 17 filières agricoles d’importance régionale. Midi-Pyrénées se
place en région pilote quant à la mise en place de la Nouvelle Gouvernance régionale. L’élaboration du schéma régional de
maîtrise des dangers sanitaires est un travail de grande ampleur, qui permet la coopération de nombreux acteurs du sanitaire,
décidant ensemble de l’orientation de la politique sanitaire dans leur région, et ceci est une innovation majeure.
La mise en place de cette réforme est dépendante de nombreux facteurs : techniques, logistiques, mais aussi relationnel et
politique. Communiquer sur les modalités de la réforme et sur les enjeux auprès des acteurs du sanitaire et des professionnels
est indispensable. C’est ici que le rôle de l’Etat est primordial, dans l’accompagnement de la transition vers cette nouvelle
organisation du sanitaire afin que le changement soit accepté et que la réforme s’installe correctement. Malgré ces quelques
difficultés, les réformes sont nécessaires afin que la gestion des risques sanitaires reste efficiente et adaptée aux contraintes
actuelles, qui tendent à se diversifier et à s’intensifier dans le domaine sanitaire.
Reconnaissance des statuts indemnes des maladies animales
par l’OIE et conséquences sur le commerce mondial (exemple
du statut de la France en peste porcine classique)
Anne-Charlotte DUROUX, Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2015
Cadre de réalisation
Cette étude a été réalisée par Anne-Charlotte DUROUX au titre de sa thèse soutenue le 12 décembre 2014
devant la
36
Faculté de Médecine de Lyon pour l’obtention du diplôme d’Etat de Docteur Vétérinaire (VetAgro Sup – campus vétérinaire
de Lyon), et dirigée par Marc ARTOIS (Prof. Vét., VetAgro Sup – campus vétérinaire de Lyon).
Questions abordées par l’étude
Les pays reconnus indemnes de certaines maladies animales par l’O.I.E ont la possibilité d’alléger leurs procédures
d’exportation. En effet, chacun des 180 pays membres de l’O.I.E. reconnait, dans le cadre de l’Accord S.P.S. de l’O.M.C.,
les statuts indemnes des autres pays membres. Ils sont alors tenus de ne pas mettre en place de barrières sanitaires lors
de l’importation de produits animaux provenant des pays indemnes. Dans ce contexte, le rôle de l’O.M.C. est de veiller
à la bonne application et au bon respect de cette réglementation internationale. Cette organisation règle également les
différends commerciaux entre les pays lorsque le non-respect de cette réglementation entraîne des barrières injustifiées au
libre échange.
La procédure de reconnaissance de statut indemne par l’O.I.E. existe pour sept maladies animales dont la peste porcine
classique qui a fait l’objet d’une demande de statut indemne par la France. Cette demande se fonde sur le questionnaire
spécifiquement élaboré par l’O.I.E. et apporte des éléments prouvant l’éradication de la peste porcine classique du territoire
français ainsi que la capacité des services vétérinaires du pays à gérer une éventuelle réémergence de la maladie.
La reconnaissance d’un statut indemne pose cependant des questions tant sur le plan scientifique (épidémiologie de la
maladie sur le territoire donné, résultats des bilans de surveillance de la maladie, de la vaccination, définition même du
statut indemne), que sur le plan interdisciplinaire (conséquences commerciales de l’expertise scientifique, place des enjeux
politiques par rapport aux enjeux sanitaires).
Toxi-infections alimentaires (TIAC) en région Rhône-Alpes :
bilan et analyse des causes. Gestion opérationnelle d’une
suspicion de TIAC par une Direction Départementale de la
(Cohésion Sociale et de la) Protection des Populations (DD(CS)
PP) : exemple dans le département de la Loire41
Anaïs FLEMING, Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2015
Cadre de réalisation
Cette étude a été réalisée par Anaïs FLEMING au titre de sa thèse soutenue le 12 décembre 2014
devant la Faculté de
Médecine de Lyon pour l’obtention du diplôme d’Etat de Docteur Vétérinaire (VetAgro Sup – campus vétérinaire de Lyon), et
dirigée par Alain GONTHIER (MCF, VetAgro Sup – campus vétérinaire de Lyon).
Questions abordées par l’étude
42
Les toxi-infections alimentaires collectives (Tiac), généralement définies comme «l’apparition d’au moins deux cas similaires
d’une symptomatologie, en général gastro-intestinale, dont on peut rapporter la cause à une même origine alimentaire »
sont la conséquence de la consommation d’une denrée alimentaire contaminée, le plus souvent, par un agent pathogène
biologique : bactérie, virus voire parasite. Dans nos sociétés modernes, l’idée que l’alimentation puisse être vectrice de
maladies est devenue inacceptable. Les Tiac constituent donc un réel enjeu de santé publique. Une enquête cherchant à
mettre en évidence l’origine de la Tiac afin de pouvoir envisager la mise en place de mesures visant à protéger d’autres
consommateurs est nécessaire : il s’agit de la gestion opérationnelle. Les Tiac étant des maladies humaines transmises par
les denrées alimentaires, cette gestion est une mission de service public relevant à la fois du ministère chargé de la santé
et du ministère chargé de l’agriculture et de l’agroalimentaire. Un ensemble d’acteurs est mobilisé par cette gestion, parmi
A consulter sur : www2.vetagro-sup.fr/bib/fondoc/th_sout/dl.php?file=2014lyon106.pdf
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction sans modification du résumé de thèse établi par son auteur et
déposé avec ladite thèse.
41
42
37
lesquels les Directions départementales (de la cohésion sociale et) de la protection des populations (DD(CS)PP), pour la
gestion du volet alimentaire, et les Agences régionales de santé (ARS), pour la gestion du volet santé humaine. Ces deux
administrations ont une place centrale.
L’objectif du travail était de mettre en place des procédures formalisées pour la gestion des suspicions de Tiac par la DDPP
de la Loire (42), lors des jours ouvrés d’une part, et lors des astreintes d’autre part, afin d’optimiser la gestion des suspicions
de Tiac dans le département.
Tentative d’amélioration des contrôles officiels protection
animale en élevage chez les bovins par l’introduction de
mesures effectuées sur les animaux 43
Anne-Cécile MEYER-WARNOD, Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2015
Cadre de réalisation
Cette étude a été réalisée par Anne-Cécile MEYER-WARNOD au titre de sa thèse soutenue le 5 décembre 2014
devant la
Faculté de Médecine de Lyon pour l’obtention du diplôme d’Etat de Docteur Vétérinaire (VetAgro Sup – campus vétérinaire
de Lyon), et dirigée par Luc MOUNIER (MCF, VetAgro Sup – campus vétérinaire de Lyon).
Questions abordées par l’étude 44
Le bien-être des animaux est au cœur des considérations des citoyens européens et français. Le bien-être joue un rôle
important, avec une dimension éthique et anthropomorphique, pour fournir des produits de qualité en quantité. C’est ainsi
que les réglementations ont évolué, aux niveaux national et européen, imposant des choses aux acteurs des filières, en
particulier aux éleveurs. Pour vérifier que cette réglementation est respectée, les Etats Membres de l’UE ont mis en place des
contrôles. Pour le bien-être animal, il s’agit du contrôle Protection Animale. Il semble intéressant d’objectiver ce contrôle, en
utilisant des mesures concrètes et reproductibles suivant les grilles d’inspection. Cependant, le domaine Protection Animal
n’étant pas le seul domaine contrôlé par les DD(CS)PP, les contrôles prennent beaucoup de temps aux contrôleurs. Il ne faut
donc pas que les mesures sélectionnées soient trop chronophages. Ainsi, 25 mesures différentes ont été sélectionnées pour
être testées en élevage lors des contrôles, dont 12 basées sur les animaux. Certaines de ces mesures sont citées par des
contrôleurs qui déplorent leur absence du système actuel. Trois mesures se sont révélées non faisables lors des contrôles,
dont deux animal-based. Les 17 mesures, dont huit animal-based, utiles aux contrôles actuels ont été compilées dans un
Guide Pratique, destiné aux contrôleurs. Les cinq mesures restantes, dont deux animal-based, sont facilement réalisables
lors des contrôles en élevage mais ne correspondent à aucun item des grilles. Il faudrait maintenant établir des normes dans
les textes correspondant à ces mesures si elles sont effectivement pertinentes aux yeux des législateurs.
Pratiques et représentations sur les usages des antibiotiques
et sur les possibilités de les réduire en élevage porcin et bovin
Axelle POIZAT, Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2015
Cadre de réalisation
Cette étude a été réalisée par Axelle POIZAT au titre de sa thèse soutenue le 25 novembre 2014
devant la Faculté de
A consulter sur : www2.vetagro-sup.fr/bib/fondoc/th_sout/dl.php?file=2014lyon098.pdf
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, du résumé de thèse établi par son auteur et
déposé avec ladite thèse.
43
44
38
Médecine de Nantes pour l’obtention du diplôme d’Etat de Docteur Vétérinaire (Ecole Nationale vétérinaire, agroalimentaire
et de l’alimentation Nantes Atlantique – Oniris) et dirigée par Christine FOURICHON (MCF, Ecole Nationale vétérinaire,
agroalimentaire et de l’alimentation Nantes Atlantique – Oniris).
Questions abordées par l’étude
L’antibiorésistance est aujourd’hui une préoccupation mondiale qui touche la santé humaine et vétérinaire. Faire une utilisation
raisonnée de l’antibiothérapie paraît être incontournable pour préserver l’efficacité de cet arsenal thérapeutique. Une enquête
par questionnaire a permis de montrer qu’il existait des pistes d’amélioration pour conduire les éleveurs de vaches laitières à
utiliser moins d’antibiotiques en lactation et au tarissement. En effet, ces derniers utilisent parfois les antibiotiques à mauvais
escient pour traiter des mammites non cliniques. En outre, peu d’éleveurs mettent en place des traitements sélectifs au
tarissement, ce qui semble pourtant possible au vu des situations sanitaires des troupeaux. Une série d’entretiens semidirectifs a permis d’étudier les trajectoires de changement d’éleveurs de porcs très faibles utilisateurs d’antibiotiques. Ces
entretiens mettent en évidence l’importance du contexte de la filière et de la confiance réciproque existant entre les éleveurs
et les vétérinaires. Les trajectoires de changement étudiées s’inscrivent dans la durée et nécessitent un appui technique,
notamment concernant l’usage des pompes doseuses.
39
Mémoires de stages ingénieur
Etude des corrélations entre les données d’exposition aux
pollens et les données d’impacts sanitaires du Journal Pollinique
Louis BONHEME, Inspecteur Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2014-2016
Questions abordées par l’étude 45
Chez les Gymnospermes et les Angiospermes, le grain de pollen se définit comme le gamétophyte mâle qui produit les
gamètes mâles au niveau des anthères. L’allergie au pollen, ou pollinose, est causée par la présence ou non d’allergènes
dans le cytoplasme ou, plus rarement, dans la paroi pollinique. Ces allergènes sont libérés par les grains de pollens. La
quantité libérée et la nature de ces allergènes conditionnent les allergies.
Les réactions allergiques apparaissent chez les individus au niveau des zones de contact avec les pollens c’est-à-dire
principalement les muqueuses respiratoires et oculaires. Cela se traduit par des rhinites allergiques, voir des rhinoconjonctivites, et de l’asthme allergique. La rhinite allergique liée aux pollens est saisonnière, et est souvent appelée « rhume
des foins », bien que cette dernière appellation fasse plus particulièrement référence à l’allergie aux pollens de graminées.
On estime qu’en France, et plus généralement en Europe, une personne sur cinq souffre d’allergies aux pollens. Sur cette
population, les trois quarts sont allergiques aux pollens de Graminées et la moitié aux pollens d’arbres. Les pollinoses
représentent un véritable problème de santé publique. Le Réseau National de Surveillance Aérobiologique (RNSA) a pour
mission d’analyser le contenu de l’air en particules biologiques (pollens et moisissures) ayant un effet sur la santé.
I. Présentation du RNSA et de ses missions.
Le Réseau National de Surveillance Aérobiologique (RNSA) est une association loi de 1901, créée en 1996 pour poursuivre
les travaux réalisés depuis 1985 par le Laboratoire d’Aérobiologie de l’Institut Pasteur à Paris. Il est dirigé depuis sa création
par M. Michel THIBAUDON, pharmacien qui travaillait déjà sur ce dispositif lorsqu’il était à l’Institut Pasteur.
Le RNSA a pour objet principal l’étude du contenu de l’air en particules biologiques pouvant avoir une incidence sur le risque
allergique pour la population, c’est-à-dire l’étude du contenu de l’air en pollens et en moisissures ainsi que du recueil des
données cliniques associées. Cette partie métrologie est le poste le plus important de cette structure.
Le centre de coordination du RNSA est chargé de l’animation d’un réseau de partenaires et de la centralisation des données
générées par les différents acteurs (analyses et bulletins cliniques) en vue de leur exploitation et de leur diffusion dans un
but d’information, auprès de ceux qui en ont besoin (pouvoirs publics, scientifiques, politiques, professionnels de santé,
grand public et patients concernés par les pollinoses). Cette information prend la forme de bulletins allergo-polliniques
hebdomadaires nationaux et régionaux (67bulletins), de bulletins moisissures nationaux, de bulletins phénologiques, d’une
carte de vigilance nationale...
Les activités de formation initiale et complémentaire des analystes à la lecture des pollens sont hébergées par le centre
de coordination (2 semaines pour la formation initiale, 3 jours pour la formation complémentaire). Un contrôle qualité est
également effectué chaque année afin de vérifier les compétences des différents analystes.
Enfin, le RNSA poursuit des activités scientifiques en participant à des colloques nationaux et internationaux, à des projets
de recherches français et européens (mesure des allergènes dans l’air, étude de nouveaux types de capteurs de pollens,...).
La structure publie également des articles scientifiques et réalise des posters. Chaque année sont organisées les Journées
d’Etudes Scientifiques (JES) du RNSA pour communiquer sur ce type d’activités.
II. Les pollinoses, véritable problème de santé publique.
Il est habituellement reporté qu’en France, 20 à 25 % de la population générale souffre d’une maladie allergique, que les
allergies respiratoires sont au premier rang des maladies chroniques de l’enfant, et que plus de 10 % de la population
française serait concernée par des allergies aux pollens notamment la rhinite allergique. Les pollinoses sont en progression
constante, leur prévalence en France a triplé en 25 ans.
Si le risque de rhinite allergique due aux pollens (« rhume des foins ») est naturellement présent à la campagne, son ampleur
augmente en ville. En effet, certains polluants vont fragiliser les parois des pollens, facilitant ainsi la libération des allergènes
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction sans modification du résumé de mémoire établi par son auteur et
déposé avec ledit mémoire.
45
40
qu’ils contiennent.
L’impact de l’allergie aux pollens, et en particulier de la rhinite allergique, sur la qualité de vie est aujourd’hui reconnu. La
gestion de la rhinite allergique génère des coûts pour la société. Un certain nombre d’études a été conduit pour les estimer.
En France, des études basées sur l’association à court terme entre la consommation de médicaments antiallergiques
dans la population générale et l’exposition aux pollens ont permis d’obtenir une estimation des coûts des pollinoses : 12
millions d’euros en moyenne par an dans le Languedoc-Roussillon et de 10 à 20 millions d’euros par an pour les allergies à
l’ambroisie en Rhône-Alpes.
III. Présentation de l’étude
1. Objectifs
La présente étude s’intéresse principalement aux espèces végétales dont les pollens présentent un potentiel allergisant
élevé: le bouleau, les Poacées (Graminées) et l’ambroisie. Cette étude se concentre sur deux régions de France, la région
lyonnaise et la région parisienne. L’objectif principal de cette étude est de comparer les données d’exposition aux pollens
aux données d’impact sanitaire afin d’établir l’existence d’une éventuelle corrélation entre ces deux phénomènes et, si elle
existe, d’en évaluer le degré. Cette étude évalue également le système actuellement en place pour comparer ces données
afin d’évaluer sa pertinence et proposer des pistes d’amélioration.
2. Récupération des données
Les données d’exposition aux pollens sont issues de comptes polliniques journaliers de capteurs volumétriques répartis
sur l’ensemble du territoire. Les données d’impact sanitaire sont issues du Journal Pollinique ou Pollen Hayfever Diary
(PHD) en anglais, qui permet à ses utilisateurs d’établir quotidiennement un indicateur du ressenti de leur état de santé : le
score-symptôme. Les utilisateurs du PHD ont la possibilité de comparer ce score avec la quantité moyenne de pollen dans
leur région. Ces données sont stockées dans deux bases de données européennes différentes, EAN database (European
Aeroallergen Network) pour les pollens et la base de données PHD pour les données d’impact sanitaire. L’extraction des
données, leur organisation et leur sélection ont demandé un certain temps.
3. Données polliniques
J’ai établi la PP (période de pollinisation : entre 5% et 95% du pollen émis sur l’ensemble de l’année) de 12 espèces végétales
différentes (ambroisie, armoise, aulne, bouleau, cyprès, frêne, noisetier, olivier, platane, Poacées (Graminées), Urticacées et
total-pollen) chaque année de 2009 à 2013.
Figure 1 : Durée de la période de pollinisation pour différents taxons dans la région lyonnaise
J’ai réalisé la moyenne quotidienne de la quantité de pollen par taxon pour la région. Cette donnée est la donnée à laquelle
les utilisateurs ont accès en passant par le PHD. On constate sur la figure 2 que les enregistrements dans les différentes villes
suivent en général la tendance de la moyenne sur la région.
Cependant, on peut noter deux
problèmes : les quantités de
pollen trouvées sont différentes et les événements exceptionnels n’apparaissent pas.
Figure 2 : Quantité de pollens d’ambroisie dans différentes villes pendant sa période de pollinisation dans la région lyonnaise
41
4. Données du PHD
Un grand nombre de données sont inutilisables car la localisation n’est pas renseignée. J’ai recalculé le score symptôme
pour chaque donnée et je me suis rendu compte d’une erreur dans le traitement automatique des données par le PHD, que
j’ai aussitôt signalée aux personnes en charge du système. J’ai associé à chaque donnée les trois capteurs les plus proches
ainsi que leur distance afin d’évaluer la qualité des données disponibles. J’ai également réalisé ce travail pour toutes les
communes France dans l’éventualité d’une utilisation future.
Je me suis concentré sur le capteur de Lyon. Pour avoir assez de données, j’ai sélectionné quelques utilisateurs lyonnais
ayant remplis leur PHD régulièrement en 2012 et 2013. Il ne se dégage pas de tendance générale des scores-symptômes
des différents utilisateurs. Ceci pourrait être expliqué par la sensibilité différente de chaque personne aux différents pollens
5. Comparaison données polliniques et données PHD
Pour cette partie, j’ai utilisé les données des personnes sélectionnées précédemment. J’ai traité les données des différents
utilisateurs de manière indépendante. Je les ai comparées aux données polliniques fournies par le capteur de Lyon dans un
premier temps, puis à la moyenne des données polliniques des capteurs de la région. On constate que chaque utilisateur
possède sa propre sensibilité vis-à-vis des différents taxons.
6. Difficultés rencontrées
L’absence de requêtes personnalisables pour les deux bases de données entraîne une perte de temps considérable dans
la récupération des données.
Dans cette étude, j’ai accès à un très grand nombre de données. Il est donc primordial de choisir une direction pour l’étude
et de s’y tenir. Le tri des données doit être pertinent. De plus, il faut faire face au problème de discontinuité des séries de
données, que ce soit pour les données polliniques ou pour les données du PHD. Au début de mon étude, j’ai surement
sous-estimé l’importance de l’analyse de la qualité des données. La réalisation de tableaux croisés dynamiques m’a permis
de m’orienter vers des séries de données pertinentes et utilisables.
IV. Poursuite de l’étude
1. Propositions pour les bases de données
- modifier leur organisation ou créer une base de données interne au RNSA pour faciliter l’extraction des données.
-y ajouter le fichier qui associe les communes de France aux trois capteurs les plus proches
2. Recommandations concernant le PHD
- Obligation de renseigner le lieu de saisie.
- Lors de l’inscription d’un nouvel utilisateur, insister sur l’importance de remplir régulièrement le PHD
- Communiquer sur le PHD, son principe d’utilisation et ses avantages pour les personnes allergiques afin de faire augmenter
le nombre d’utilisateurs.
3. Perspectives
. -Lancement d’une application smartphone qui confère de nombreux avantages : possibilité de remplir le PHD n’importe où,
géolocalisation possible et possibilité de comparer ses scores à ceux des autres utilisateurs dans la région.
-Eventuelle mise en place d’un système de surveillance humain des pollens, à partir du PHD.
Conclusion
La réalisation de cette étude et plus généralement des études comparatives entre les données d’exposition aux pollens et les
données d’impact sanitaire est primordiale. En effet, une avancée dans ce domaine de recherche permettrait une plus grande
compréhension du phénomène de pollinose et de sa prévision. L’appréhension de ce type d’allergies permettrait surement
de développer contre lui des techniques de lutte efficaces. Bien sur, le phénomène en lui-même ne peut être combattu. On
peut cependant réduire la gravité des symptômes qui l’accompagnent en réalisant des prévisions du phénomène. Si les
populations sensibles sont prévenues à l’avance, elles pourront prendre des médicaments spécifiques avant l’exposition, ce
qui réduira considérablement les effets néfastes des pollinoses. Ainsi, ces personnes traverseront de manière plus agréable
les périodes de pollinisation et les dépenses de santé publiques associées à ce phénomène seront largement réduites.
42
Optimisation des processus d’inspection dans le cadre de la
démarche qualité de la Direction Générale de l’Alimentation
Violette CHEVILLOT, Ingénieur de l’Agriculture et de l’Environnement 2014
Cadre de réalisation
Cette étude a été réalisée par Violette CHEVILLOT au titre de son mémoire de fin d’étude d’ingénieur option santé publique
vétérinaire. La mission sur laquelle l’étude s’appuie a été effectuée du 3 mars 2014 au 25 Juillet 2014 à la Direction
Départementale de la Protection des Populations de l’Ain, sous la responsabilité de Marie-Madeleine Richer, chef de service
environnement et responsable qualité.
Questions abordées par l’étude 46
L’inspection est définie dans la norme ISO/CEI 17020 comme l’examen d’un produit, d’un processus, d’un service ou d’une
installation, ou de leur conception, et la détermination de leur conformité à des exigences spécifiques ou, sur la base d’un
jugement professionnel, à des exigences générales. Un processus est un ensemble d’activités corrélées ou interactives qui
transforme des éléments d’entrée en éléments de sortie (norme ISO 9000-2005). Dans le cas de l’inspection par exemple,
les éléments d’entrée sont les ordres de service, les produits ou installation inspectés et les éléments de sortie sont le
rapport, le certificat ou la sanction.
Le processus d’inspection est l’élément principal et le cœur de métier de la direction départementale de la protection des
populations de l’Ain. Il permet au consommateur d’être confiant en la qualité et la sécurité sanitaire et phytosanitaire des
activités et produits inspectés, qu’il retrouve partout dans son quotidien.
La direction générale de l’alimentation est engagée depuis 2003 dans une démarche qualité qui a permis dès 2010 à cette
administration centrale d’être accréditée par le comité français d’accréditation (COFRAC) selon le référentiel ISO/CEI 17020 :
2012 pour tous ses sites dont les directions départementales de la protection des populations. Cette norme est relative aux
exigences pour le fonctionnement de différents types d’organismes procédant à l’inspection. Cette accréditation a permis
une avancée majeure pour l’optimisation des processus d’inspection puisqu’elle a notamment induit la standardisation d’un
grand nombre d’éléments composant le processus comme les grilles de constats, les rapports, etc. mais également un
remaniement des systèmes de formation ou de management au sein des services.
Cependant, la maîtrise rigoureuse des dépenses publiques imposée à la direction départementale de la protection des
populations de l’Ain entraîne une raréfaction des moyens humains, malgré un nombre grandissant de missions. Des
rapprochements avec d’autres équipes départementales ont ainsi été effectués (Préfecture, unité départementale de la
concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) mais la diversité de leurs missions ne permet pas à la
direction départementale de la protection des populations de l’Ain de conserver sa marge de manœuvre dans les processus
d’inspection.
En particulier, cette dernière est toujours limitée dans la mise en œuvre du plan national d’inspection et du plan pluriannuel de
contrôle. Elle a donc besoin de s’impliquer toujours plus et d’accentuer les évolutions déjà mises en œuvre par la démarche
qualité de la direction générale de l’alimentation dans le but d’optimiser le processus d’inspection.
Il est donc nécessaire d’apporter une réponse à la question suivante: quelles sont les méthodes et procédures à mettre en
œuvre pour optimiser les processus d’inspection ?
Les tâches réalisées au cours du stage ont été de plusieurs ordres mais trois grandes catégories peuvent être distinguées :
les activités supports d’inspection, les activités de service public et d’autres activités correspondant à une demande locale
ou nationale.
Les missions de support d’inspection précèdent celle-ci, ce sont principalement la programmation des inspections, le ciblage
et la recherche d’information sur les établissements à inspecter (identification des entreprises ou professionnels à inspecter,
repérage d’entreprise non déclarés à la DDPP, etc...).
Cinq tâches de support d’inspection ont été réalisées au cours du stage : le classement et la mise à jour des dossiers de
carnivores domestiques, la mise à jour des n°SIRET des exploitants dans SIGAL, la saisie des sous-catégories des produits
fermiers dans SIGAL, le ciblage des hôtels, restaurants et aires de jeux pour l’opération interministérielle vacances 2014 et le
ciblage des hôtels et campings pour les enquêtes 2014 du pôle PEC.
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction sans modification du résumé de mémoire établi par son auteur et
déposé avec ledit mémoire
46
43
Les missions de service public sont celles effectuées par la direction départementale de la protection des populations de l’Ain
qui ne dépendent pas du programme national d’inspection (ou du plan pluriannuel de contrôle pour le pôle environnement).
Elles sont de diverses natures comme l’inspection en abattoir, l’émission de certificats d’export, de certificats de capacité,
l’instruction de dossiers d’autorisation ou d’enregistrement pour les ICPE, les demandes d’avis sur projet, etc. (documents
établis à la demande des usagers).
Deux tâches réalisées au cours du stage ont eu pour but de faciliter les missions de service public : la création d’un guide
d’analyse des dossiers d’enregistrement ICPE et la création de fiches procédures pour les exportateurs de denrées
alimentaires.
Enfin, d’autres activités ont été menées sans rapport direct avec l’inspection comme le suivi et la synthèse de l’enquête sur
les trouble musculo-squelettique en abattoir (commande nationale de la DGAL), la mise à jour du classeur d’astreintes et la
création d’une « mallette » d’astreintes.
Il s’agit donc d’analyser chacune d’entre elles afin d’identifier les dysfonctionnements éventuels et de proposer des axes
d’amélioration.
Les chefs de services et quelques agents ont également été interrogés dans le cadre de cette étude. Des entretiens individuels
ont été menés avec les chefs des service animal vivant, alimentation et environnement ainsi qu’avec deux agents de chacun
de ces services âgés de 26 et 59 ans et qui ont entre 7 mois et 38 ans d’expérience dans l’inspection.
Il apparaît à travers ces missions que malgré une bonne organisation globale, certains écarts ont pu être observés à la DDPP
et améliorés.
Le principe de base de l’assurance qualité est de corriger les écarts mais également de mettre en place des mesures
préventives afin d’éviter qu’ils ne se reproduisent.
L’analyse des missions effectuées au cours du stage a permis de dégager des axes d’optimisation du processus d’inspection
tels que :
- la réorganisation des services, - l’amorçage des 5S, - la tenue à jour des documents et logiciels, - la mise en place de nouvelles procédures, - l’amélioration de la communication. Cependant, si des sources de dysfonctionnement ont pu être identifiées, la démarche qualité permet de les utiliser comme
des opportunités d’évolution. L’optimisation du processus d’inspection n’est maintenant plus une question de changements
de grande envergure comme cela a pu être le cas lors de la mise en place de la démarche qualité et de l’accréditation de la
direction générale de l’alimentation, mais résultera de petites attentions quotidiennes sur les actions ne permettant pas de
créer de valeur ajoutée à l’inspection et qu’il faut alors supprimer, repenser ou réorganiser. Ainsi, même si la DDPP de l’Ain est déjà impliquée dans une dynamique d’amélioration continue de par la démarche qualité
mise en place par la direction générale de l’alimentation, il est nécessaire de conserver cette dynamique pour mettre en
œuvre la démarche de management par processus.
Si cette étude s’est restreinte au seul cadre de la démarche qualité entreprise par la direction générale de l’alimentation,
une comparaison de ce système à celui mis en œuvre par la direction générale de la concurrence, de la consommation
et de la répression des fraudes en mettant en parallèle l’inspection et l’enquête permettrait peut-être de dégager d’autres
pistes pour l’optimisation du processus d’inspection. Une telle étude permettrait également de réfléchir à une démarche
de management par processus commune à ces deux entités qui collaborent au sein des directions départementales de la
protection des populations.
Elaboration d’une méthode d’évaluation des coûts engendrés
par un dispositif de surveillance d’une maladie animale en
prenant l’exemple de la brucellose bovine
Alison DUSSIOT, Inspectrice élève de la santé publique vétérinaire 2013-2015
44
Cadre de réalisation
Cette étude a été réalisée par Alison DUSSIOT au titre de sa première année de formation statutaire à l’ENSV, du 24 février
au 20 juin 2014 à l’Anses - Lyon
, sous la responsabilité de Viviane HENAUX et de Didier CALAVAS (co-encadrants).
Questions abordées par l’étude 47
De nombreux dispositifs de surveillance spécifiques ont été mis en place dans un contexte de forte prévalence des maladies
animales infectieuses. Les bénéfices liés au contrôle de ces maladies étant évidents, les performances coût/efficacité de
la surveillance ont rarement été évaluées. Toutefois, en réponse à des contraintes budgétaires croissantes, il est devenu
nécessaire d’améliorer l’efficience des dispositifs de surveillance, et d’évaluer leurs modalités de financement et leur coût.
L’évaluation des coûts engendrés par un dispositif de surveillance d’une maladie animale est une étape essentielle à
l’évaluation de son efficience.
Le projet de stage a consisté à élaborer une méthode d’évaluation des coûts engendrés par un dispositif de surveillance
d’une maladie animale en prenant l’exemple de la brucellose bovine. La brucellose est une maladie contagieuse due à une
exposition à Brucella abortus, B. melitensis ou plus occasionnellement B. suis. Cette infection entraîne des avortements chez
les femelles gestantes, avec l’excrétion d’une quantité importante de bactéries dans le placenta, les sécrétions vaginales et
le lait. Il s’agit d’une maladie zoonotique souvent liée à une exposition professionnelle ou à l’ingestion de produits laitiers, ce
qui représente un risque majeur pour la population humaine.
La surveillance de la brucellose bovine, dirigée et encadrée par l’Etat, a été mise en place en 1965. La surveillance des
avortements de bovins, qui repose sur le dispositif de déclaration obligatoire des avortements, constitue l’outil principal de
la surveillance de la brucellose en France. En parallèle, des mesures de dépistage annuel et à l’introduction d’animaux sont
effectuées dans les cheptels, de manière à qualifier les cheptels, dans le but de prouver le statut indemne de la France visà-vis de la brucellose bovine. Le coût annuel du dispositif de surveillance de la brucellose bovine pour l’Etat a été estimé à
environ 4M€. Ce montant est évalué annuellement à partir d’une enquête de la DGAL auprès des Directions départementales
de la cohésion sociale et de la protection des populations (nommées DDPP dans la suite du document) sur les résultats
techniques et financiers des actions conduites dans chaque département vis-à-vis des maladies réglementées du bétail,
dont la brucellose bovine. Toutefois, ce montant n’inclut ni les coûts payés par les éleveurs (ou associations d’éleveurs) pour
la prise en charge de la prophylaxie collective et des contrôles à l’introduction, ni les coûts liés à la gestion administrative du
dispositif de surveillance.
I. Matériels et méthodes
L’objectif de ce stage était d’évaluer le coût global de la surveillance de la brucellose bovine en France aux niveaux
départemental et national. Deux approches complémentaires ont été employées. La première démarche a consisté à estimer
les coûts liés à la fonction d’encadrement des opérations techniques de surveillance à partir de l’identification des ressources
humaines employées dans les structures en charge de l’élaboration, de la gestion administrative et du suivi de la mise en
œuvre du dispositif. La seconde démarche a été une évaluation des coûts payés par ces structures aux opérateurs de la
surveillance, tels que les vétérinaires sanitaires et les laboratoires d’analyses.
Des entretiens avec les personnes en charge de la mise en œuvre du dispositif de surveillance de la brucellose bovine
au sein des DDPP, GDS et LVD ont été menés dans trois départements, nommés ci-après départements A, B et C. Ces
entretiens ont permis de collecter des données relatives aux ressources humaines et financières employées dans le cadre
des dispositifs de surveillance des maladies réglementées. Depuis 2003, les délégations de missions administratives relatives
aux prophylaxies bovines sont encadrées par des conventions départementales techniques et financières conclues entre
DDPP et GDS. Pour les trois départements visités, les dépenses du GDS pour la réalisation des missions déléguées ont été
quantifiées. Pour chaque département, le montant versé par la DDPP pour la délégation de la gestion administrative de la
prophylaxie des maladies réglementées a été calculé.
Les coûts payés aux opérateurs de la surveillance ont été évalués par un recensement des différents types d’opération
effectuées dans le cadre du dispositif (visites, prélèvements sanguins, Epreuve à l’Antigène Tamponné, ...). Pour chaque
type d’opération, le nombre des opérations réalisées durant l’année civile 2013 a été multiplié par le tarif appliqué pour
la réalisation d’une opération. Des données relatives à l’ampleur de l’activité déployée en matière de surveillance de la
brucellose bovine ont été extraites de SIGAL et de la BDNI. Les tarifs des opérations ont été extraits de la règlementation
nationale, ainsi que des conventions fixant localement les tarifs des opérations de surveillance. En outre, un questionnaire a
été élaboré à destination des laboratoires départementaux et interdépartementaux d’analyse afin de connaître les tarifs des
analyses qui sont appliqués dans chaque département.
Certaines opérations techniques ou administratives effectuées dans le cadre du dispositif de la brucellose bovine sont
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction sans modification du résumé de mémoire établi par son auteur et
déposé avec ledit mémoire
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45
communes à plusieurs dispositifs. En d’autres termes, les dispositifs de surveillance en santé animale sont imbriqués.
Par exemple, un échantillon de sang prélevé sur un animal soumis à la prophylaxie de la brucellose est analysé en vue
du dépistage de la brucellose, mais aussi de l’IBR, voire de la tuberculose et d’autres maladies. Pour chaque opération
commune à plusieurs dispositifs, une méthode a été élaborée afin de déduire la part qui peut être attribuable à la brucellose
du coût global de l’opération.
II. Principaux résultats
A. Evaluation des coûts dans les trois départements visités
Dans le département A, les dépenses du GDS liées à la fonction de gestion des prophylaxies et des contrôles à l’introduction
ont été estimées à 21 410 €. La subvention de l’Etat a couvert 91% des coûts réels. Dans le département B, le coût réel des
missions couvertes par la subvention étant établi par le responsable du GDS à 220 057 €, l’Etat a subventionné les activités
déléguées à hauteur de 18,9%. Dans le département C, le coût réel de la gestion administrative de la surveillance sanitaire des
exploitations de bovins au regard de quatre maladies a été évalué à 88 664 € par le GDS et l’Etat contribue au financement
à hauteur de 36,5%. Concernant les départements A et C, pour lesquels les frais de gestion des « prophylaxies » et ceux
relatifs aux « introductions » était connus au moment de l’étude, il a été possible de déduire de ces frais la part attribuable au
dispositif de surveillance de la brucellose bovine. Les frais de gestion de la prophylaxie au regard de la brucellose bovine ont
été estimés pour les départements A et C, respectivement à 4 544 € et à 13 796 €, ceux des contrôles à l’introduction à 1
375 € et à 10 679 €, soit un total pour le département A de 5 919 € et pour le département C de 24 475 €.
B. Evaluation des coûts dans les départements de France métropolitaine
Le montant total versé par l’Etat était de 1 496 812 € pour la délégation des deux domaines de gestion de la prophylaxie et
774 016 € et pour celle de gestion des contrôles à l’introduction des maladies réglementées, soit un total de 2 270 828 €. Il
faut noter que ce montant n’inclut pas la somme versée pour la délégation de l’édition des ASDA, qui n’a pas pu être estimée
car le nombre d’ASDA éditées par département en 2013 n’était pas connu.
Le tarif moyen de la visite d’exploitation en vue de la qualification des cheptels a été de 26,36 € HT (± 3,45). Il s’agit du tarif
appliqué aux éleveurs adhérents pour les départements dans lequel le GDS contribue à la prise en charge financière de
l’analyse. Le tarif moyen d’un prélèvement sanguin a été de 2,55 € HT (± 1,27). Le tarif de la visite nécessaire au contrôle à
l’égard de la brucellose, de la leucose, de l’IBR et de la tuberculose des bovinés nouvellement introduits dans l’exploitation
(intradermo-tuberculination et vaccination IBR non comprises) et appliqué au premier animal a été extrait des conventions.
Le tarif varie fortement selon les départements ; le tarif moyen facturé aux éleveurs adhérents au GDS était de 29,91 € HT
(± 25) en 2013. Le tarif moyen d’une analyse par méthode d’analyse (ELISA, EAT et FC) ont également été évalué. Le coût
lié aux activités des vétérinaires sanitaires sur le terrain et aux analyses de laboratoire effectuées dans le cadre du dispositif
de surveillance de la brucellose bovine a été estimé à 25 millions d’euros en 2013. En particulier, le dépistage programmé
par sérologie s’élevait à plus de 19,5 millions d’euros, les contrôle à l’introduction à 3 millions d’euros, la surveillance des
avortements à 2,5 millions d’euros et la police sanitaire à 17 761 €. La part spécifiquement attribuable à la brucellose a été
évaluée à 13,3 millions d’euros.
Les retours du questionnaire adressé aux laboratoires d’analyses renseignent sur les modalités d’acheminement des
prélèvements vers les laboratoires d’analyse. Un échantillon de 42 départements a été considéré. En 2013, la collecte des
échantillons sanguins et des écouvillons notamment a été prise en charge par le laboratoire dans au moins 25 départements.
Dans trois quarts de ces départements, le LVD a collecté plus de 75% des échantillons.
III. Discussion
Les coûts engendrés par le dispositif de surveillance de la brucellose bovine sont de différentes natures. Plusieurs procédures
complémentaires ont été conduites en vue de leur évaluation. Afin d’évaluer les coûts liés à l’exécution des actes techniques
par les opérateurs de surveillance, il a fallu connaître les coûts unitaires de chaque acte, par département et par contexte
de surveillance. Les coûts engendrés par l’exécution des actes techniques sont variables en fonction de la situation
sanitaire du territoire au regard de la maladie, le nombre d’actes réalisés par département et par contexte a été recherché.
L’exploitation des données stockées dans SIGAL a montré que plusieurs analyses brucellose sont parfois effectuées de
manière redondante, lorsque la règlementation prévoit une conduite davantage économe. Concernant l’évaluation des coûts
payés (coûts variables), bien que la méthode proposée dans ce rapport soit plus exhaustive que la méthode employée
actuellement, certains contextes de surveillance n’ont pas été considérés lors de l’étude, tels que la surveillance programmée
par dépistage sur lait de mélange, ou encore les dérogations à la surveillance programmée et aux contrôles à l’introduction.
D’autres coûts de nature différente ont été évalués. Il s’agit des coûts engendrés par les actes administratifs encadrant la mise
en œuvre des protocoles techniques. Ces coûts sont relativement fixes par rapport aux coûts liés à l’exécution des actes
techniques. Par exemple, la fraction des ETP affectés en DDPP à l’encadrement du dispositif ne semble pas proportionnelle
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au nombre de cheptels bovins présents dans le département, et donc peu liée au nombre d’actes de surveillance réalisés.
Les procédures conduites pour évaluer les coûts qualifiés de « variables » et celle relatives à l’évaluation des coûts « fixes » ont
parfois été difficiles à mettre en place. Certains coûts ont pu être sous- ou surestimés. Par exemple, le coût de la surveillance
évènementielle a probablement été sous-estimé. L’arrêté du 17 juin 2009 fixe les mesures financières relatives aux actions
de police sanitairere vis-à-vis de la brucellose bovine et précise que les tarifs des actes vétérinaires sont augmentés lors
de l’application de sanctions aux éleveurs par les vétérinaires (par exemple, des pénalités dues à l’absence de contention
des animaux en amont de la visite). Cette information n’est pas disponible dans la base de données SIGAL et n’a donc
pas été quantifiée. Une étude récente sur les leviers et freins à la déclaration des avortements chez les éleveurs de bovins
soulignait les difficultés techniques rencontrées par les éleveurs allaitants pour récupérer les vaches en estive et permettre
les prélèvements de sang ou d’organe à des fins de dépistage de la brucellose bovine (Bronner 2013). D’autre part, d’après
le rapport CGAAER relatif aux délégations de service public aux Groupements de défense sanitaire (Repiquet, Thévenon-Le
Morvan et al. 2008), « l’évaluation du coût réel des délégations est difficile du fait du manque d’enregistrement des tâches
réalisées et du temps de travail de chaque agent, de l’absence de comptabilité générale et du manque de caractérisation
des éléments constitutifs du coût».
Conclusion
Les étapes de la surveillance sont nombreuses, incluant notamment la planification, la mise en œuvre, l’échantillonnage,
les analyses de laboratoire, la gestion et communication des résultats, et engendrent différentes sources de coûts. Les
coûts sont liés à l’emploi de ressources humaines et matérielles lors de l’exécution des opérations de surveillance par les
intervenants tels que les vétérinaires et les laboratoires, et lors de l’encadrement (gestion et suivi) de ces opérations par les
gestionnaires. L’abondance des résultats numériques issus de l’étude reflète la complexité du dispositif et la multitude des
parties prenantes impliquées. En particulier, l’étude met en exergue la variabilité interdépartementale des tarifs appliqués pour
la rémunération des opérateurs et celle des procédures de financement.
Il est prévu de prolonger le projet de stage par une thèse de modélisation à l’interface entre épidémiologie et économie de
la santé dans le but d’identifier les protocoles de surveillance et de lutte les plus efficients vis-à-vis de la brucellose bovine et
d’autres maladies, et ainsi répondre à des problématiques auxquelles les gestionnaires de la santé animale sont confrontés.
Références
Bronner, A. (2013) «Identification des facteurs influençant la déclaration des avortements chez les bovins par les éleveurs et
les vétérinaires.» Bulletin épidémiologique n°57, p.5.
Repiquet, D., F. Thévenon-Le Morvan, et al. (2008) «Rapport relatif aux délégations de service public aux Groupements de
défense sanitaire du cheptel.» Mission CGAAER n° 1552.
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Mémoires soutenus dans le cadre du Master
PAGERS
Etude sociologique de la place de l’obligation normative
dans la mission du bénévole. Le cadre de la mise en place de
l’habilitation préfectorale concernant les associations effectuant
du don alimentaire dans le Rhône
Adrien Barlet, étudiant du master 2 PAGERS, 2013-2014
Cadre de réalisation
Stage effectué du 14 avril au 25 juillet 2014 à la Banque Alimentaire du Rhône. Mémoire de stage rédigé sous la direction de
Sébastien GARDON ((SciencesPo Lyon – ENSV VetAgro Sup – Triangle - ACSPAVE)
Questions abordées par l’étude 48
Après avoir tenté de cerner l’univers du bénévole et ses motivations profondes, nous avons pu constater une hétérogénéité
importante des bénévoles et des structures qui les entourent. La définition du bénévole de Dan Ferrand-Benchmann a été
une piste importante dans cette démarche. Cependant, la diversité des fonctionnements et des positions du bénévole ne
permettent pas de définir un concept unique et nous renvoie à une pluralité de visions du bénévolat.
A la question initiale « Quelle place le bénévole laisse-t-il à la norme au sein de sa mission ? », les réponse sont nombreuses
en ce que chaque bénévole a un rapport différent à la norme du fait de sa position dans l’association, de son passé, de ses
motivations ou encore du type de structure dans laquelle il évolue.
Le terrain du réseau associatif de la Banque Alimentaire du Rhône a été important pour montrer des profils de bénévoles
nombreux et complexes. Certaines conclusions ont quand même pu être apportées quant aux tendances comportementales
basées sur les audits et les observations sociologiques. Le critère propre au bénévole est la liberté de sa démarche, en effet,
nous avons constaté que l’engagement bénévole pourrait être vu certaines fois comme une consécration, une preuve
sociale de sa liberté.
Le profil du bénévole a été soigneusement étudié dans le cadre d’une analogie avec son alter- ego le salarié dans un grand
nombre d’associations. Outre les autres caractéristiques du bénévole (gratuité de l’acte, altruisme etc.), qui peuvent parfois
être remises en cause (les bénévoles sont possiblement dans une démarche de reconnaissance sociale, une recherche
d’utilité auprès des autres ou encore d’un gain d’expérience servant à la vie active), la liberté est une donnée qui ne souffre
d’aucun doute dans son interprétation. La liberté reste donc le critère qui différencie fondamentalement le bénévole et le
salarié.
Cette liberté se définit dans le cas du bénévolat comme une auto-contrainte du bénévole. Cette notion paraît donc
incompatible avec la norme ou l’obligation extérieure. Les manifestations de cette liberté dans le discours du bénévole sont
d’ailleurs présentes : menace de cesser l’activité face aux règlementations croissantes, doutes sur l’utilité ou l’opportunité de
la norme, rappel du statut de bénévole du personnel de l’association, refus pur et simple d’appliquer la norme...
Deux moyens interviennent alors pour faire appliquer la norme: un processus de transformation de la norme exogène en
une norme endogène ou la sanction (quelle que soit la forme qu’elle prend). La sanction ne doit pas, dans l’optique de
l’application des normes, être nécessairement appliquée mais rester présente dans l’esprit du bénévole face à la norme. Il
s’agit surtout de rendre la sanction possible et même probable en cas de manquement.
L’application des normes au sens strict du terme dans le monde associatif et particulièrement dans le réseau de la Banque
Alimentaire du Rhône est une tâche difficile et, ce pour plusieurs raisons.
Premièrement, la taille et les moyens des associations sont divers et les outils informatiques par exemple ne sont pas à la
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction sans modification du résumé de mémoire établi par son auteur et
déposé avec ledit mémoire
48
48
portée de tous. De même, la disponibilité de chaque bénévole reste aléatoire en fonction des associations.
Deuxièmement, la relation entre les associations et la Banque Alimentaire du Rhône est une relation de confiance dans
laquelle la sanction est quasiment inexistante ou relève de cas extrême. Si la radiation de l’association du partenariat peut
être envisagée, peu de degrés intermédiaires interviennent pour les manquements mineurs.
Troisièmement et dernièrement, le nombre des associations environ 125, est un problème dans la vérification de l’application
des normes puisqu’elle implique des visites constantes et régulières.
Pour ces raisons, l’étude m’a permis de profiler des solutions pour la Banque Alimentaire en vue de méthodes plus
persuasives d’application des normes. Il faut dans un premier temps amener le bénévole à intérioriser l’obligation.
Ce processus qui fait passer le bénévole d’une position d’obligé à la position de celui qui impulse la norme passe par une
reconnaissance de sa part de l’utilité, de la nécessité et de l’opportunité de la norme.
Pour rendre la norme exogène en une norme endogène pour le bénévole, il semble que la solution passe par une pédagogie
importante et une transparence de la Banque Alimentaire sur le but des règles de la convention de partenariat mais aussi
de l’habilitation ou encore des règles sanitaires. La Banque Alimentaire a déjà mis en place une formation « EVEREST » qui
consiste en une auto-évaluation de l’association afin de rendre compte aux responsables de leurs obligations sanitaires et
des progrès qu’il reste à faire. La pédagogie adaptée reste la première solution en ce qu’elle sauvegarde une relation de
partenariat et de confiance dans un univers caritatif qui ne peut être dominé par les normes et les contrôles.
La deuxième solution interviendrait en dernier lieu, il s’agit de la sanction. Pour qu’elle n’amène pas un découragement du
personnel associatif, il est impératif que la sanction soit prédéterminée et proportionnée au manquement. Par la fréquence
de la sanction et sa probabilité, le responsable associatif et le bénévole vont être plus à même d’appliquer toutes les normes
aussi mineure soit-elle. La hiérarchisation des normes et leur probabilité permettra d’éviter un sentiment d’injustice.
De cette manière, le bénévole sera prévenu et pourra sereinement appliquer la démarche psychologique de la balance des
avantages et des inconvénients de la mise aux normes. De la même manière, l’application de la norme et le changement
dans l’organisation que cela implique doit nécessairement être moins contraignante que la sanction en elle même.
Par un contrôle rigoureux et une pondération des sanctions, la norme s’appliquera sans pour autant qu’il y ait une rupture de
confiance entre l’association et la Banque Alimentaire.
Le stage que j’ai effectué m’a permis d’appréhender une grande partie des associations du Rhône qui ont pour but annexe ou
principal le don alimentaire. J’ai, au fur et à mesure, de ma mission cerné les différents profils d’association et leur composition.
Le milieu associatif est souvent un relai prépondérant de l’action publique, de même, dans le cadre de l’habilitation la Banque
Alimentaire du Rhône a eu un rôle de conseiller précieux. En effet, la communication de la cartographie des associations
et leurs coordonnées ont été des apports auprès des services préfectoraux en charge du dossier de l’habilitation et le fruit
d’une coopération avec la Banque Alimentaire.
D’un point de vu personnel, l’étude de la norme dans la mission du bénévole va m’être particulièrement utile dans l’orientation
que je veux donner à ma carrière future. En effet, j’ambitionne de travailler dans le milieu associatif. La connaissance précise
du terrain associatif, les différentes formes de fonctionnements et l’expertise managériale seront les apports de mon stage.
La complexité de la cohabitation des bénévoles avec les salariés dans les structures et la difficulté de leur management m’ont
révélé une partie de leurs secrets, ce qui m’aidera sans doute à être efficace dans des rôles de direction au sein de ce milieu.
Manger dans le Nord-Pas-de-Calais. Quelle gouvernance
alimentaire pour la région ?
Anouck MIRO, Inspectrice Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Etude réalisée du 14 avril 2014 au 25 juillet 2014, au sein du SRAL de la DRAAF du Nord-Pas-de-Calais. Mémoire de stage
rédigé sous la direction de Sébastien GARDON ((SciencesPo Lyon – ENSV VetAgro Sup – Triangle - ACSPAVE)
Questions abordées par l’étude 49
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction sans modification du résumé de mémoire établi par son auteur et
déposé avec ledit mémoire
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L’alimentation est devenue un sujet incontournable dans l’agenda institutionnel international. La communauté internationale,
l’Union européenne se préoccupent pour l’instant plus de sécurité alimentaire que de souveraineté alimentaire, qui reste plus
un objectif pour des ONG ou des institutions sans pouvoir normatif. L’état français a également développé ses programmes
d’action et légiféré sur la problématique alimentaire. La Loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche introduit dans
le code rural et de la pêche maritime (CRPM) une définition de la politique de l’alimentation. Divers plans et programmes
d’actions existent, Plan National Nutrition Santé, Plan Obésité, Plan National d’Aide Alimentaire, Plan National SantéEnvironnement….mais le Programme National de l’Alimentation, même s’il est porté par le Ministère de l’Agriculture, de
l’Agroalimentaire et de la Forêt (MAAF), est le premier qui tente de s’articuler ave tous les autres en intégrant toutes les
problématiques de l’alimentation. Il a d’ailleurs été élaboré en lien avec les différents ministères et a pour ambition d’articuler
les différents programmes existants, et de mettre en cohérence les différentes politiques sectorielles existantes.
Méthodologie
L’enquête de terrain a été menée de deux façons : La première est l’observation, qui a été faite soit quotidiennement pour
les agents du SRAL, via la participation à des réunions, aux discussions informelles, soit à l’occasion de réunions CR-DRAAF
ou d’évènements auxquels les acteurs de la gouvernance alimentaire participaient. Les évènements, organisés au siège
du CR, auxquels j’ai pu assister sont : les assises de la restauration collective et la journée de clôture du débat public et «
d’installation du CRALIM ». A ces occasions (réunions et évènements), j’ai essayé d’observer les jeux d’acteurs, j’ai pris des
notes, mais sans intervenir.
Il faut noter que le positionnement d’observateur a parfois été difficile à maintenir. Notamment pour une réunion qui portait
sur l‘organisation de l’installation du CRALIM. En effet, à un moment, la conversation a porté sur les dossiers de réponse à
l’appel à projet (APP) lancé par le SRAL, alors que j’avais participé à l’étude et au tri des dossiers.
Pour prolonger mon enquête, des entretiens ont été réalisés Il s’agissait de compléter les observations et d’essayer d’aborder
des points qui ne pouvaient l’être en « public ».
Deux dernières précisions doivent être apportées. La directrice et le directeur-adjoint de la DRAAF, ainsi que le VP n’ont pas
été interviewés. D’une part parce que leurs emplois du temps semblaient surchargés ; d’autre part parce que j’ai pensé qu’ils
tiendraient un discours proches du discours officiel que je pouvais retrouver par ailleurs.
De plus, je me suis ou j’ai été présenté comme stagiaire ISPV, travaillant pour le SRAL à tous les acteurs rencontrés. Cela a pu
apporter un biais dans leur comportement ou dans leur discours, puisque les personnes rencontrées étaient éventuellement
à travailler avec moi un jour, et j’étais logiquement associée à la structure DRAAF.
Deux acteurs de la gouvernance ont été les sujets de l’observation dans cette étude : les CR et la DRAAF. Les contacts
étaient quotidiens avec les agents du SRAL, et les agents du CR, habitués à travailler avec la DRAAF, étaient facilement
abordables. Certains autres acteurs ont toutefois pu être rencontrés au cours de différents évènements « publics », et dans
le cadre de l’étude technique. Des entretiens semi-directifs ont été mené avec deux agents du CR, un agent du SRAL et
un agent d’un lycée agricole. Malheureusement, une dernière péripétie est venue compliquer l’exploitation de ces données
: un problème technique encore non élucidé a transformé les enregistrements de 4 de ces 5 entretiens en grésillements
inaudibles. Seul l’agent du SRAL a pu être recontacté et a accepté gentiment de rediscuter, mais il n’a pu m’accorder qu’une
demi-heure au lieu de l’heure et demie du premier entretien. Certains des témoignages seront donc basés sur des souvenirs,
ou sur les quelques notes prises au cours des entretiens.
Résumé et questionnements
La région Nord-Pas-de-Calais est en train de mener une réflexion sur l’alimentation dans sa globalité. En rassemblant les
acteurs, en les faisant aussi réfléchir sur les enjeux de l’alimentation en région, sur le système alimentaire en place, l’objectif
est de les regrouper autour de biens communs associés à l’alimentation et de proposer une forme d’action publique nouvelle.
Les moyens mis en œuvre par la collectivité territoriale sont originaux et de grande ampleur. Associée à la démarche, la
DRAAF est devenue un partenaire privilégié de ce chantier en tant que pilote et que financeur.
Mais malgré les affichages optimistes, les moyens financiers et de communication mis en œuvre, les difficultés s’amoncellent
et ralentissent le projet. Entre les positionnements figés des acteurs, les difficultés institutionnelles, les lentes ou inexistantes
modifications des méthodes de travail, l’avenir de la gouvernance alimentaire en région NPdC ne s’annonce pas radieux.
D’autant plus que des difficultés supplémentaires se profilent. Le calendrier électoral va mettre un frein aux activités du CR.
Les changements annoncés d’élus mettent en péril les projets portés par la mandature actuelle. Sans compter les futures
modifications des collectivités territoriales qui s’annoncent avec la réforme sur les régions.
Ainsi, une des questions qui restent en suspens est celle du maintien du sujet de la gouvernance alimentaire comme sujet
phare du CR. Même si des moyens financiers importants ont été alloués à ce projet, il faut relativiser : le CR dispose d’un
budget colossal et la comparaison avec les moyens des services déconcentrés de l’état n’est pas pertinente. De plus ; les
50
deux élus en charge pour l’un de l’agriculture et de l’alimentation et pour l’autre de la démocratie participative, qui se sont
beaucoup investis, appartiennent à EELV. La vice-présidence actuelle joue son rôle d’appui et de relai auprès des acteurs
publics et privés mais reste connotée « écolo ». Quand sera-t-il lors de la prochaine mandature ?
Dans le cas où un des nouveaux élus décide de s’emparer du sujet : comment pourra-t-il relancer la dynamique ? A la
fois en interne, puisque les démarches initiées vont être ralenties pendant la période de réserve électorale, et les services
techniques vont rester dans l’attente. Mais aussi en externe : sans institutionnalisation de la gouvernance, le travail réalisé a-til été suffisant pour que les autres acteurs aient des attentes assez fortes pour que le nouveau CR soit obligé d’y répondre ?
Le partenariat entre la DRAAF et le CR reste également incertain. Alors que des habitudes de travail entre services techniques
avaient été prises, les luttes institutionnelles menées par les directions ont mis à mal les collaborations. La méfiance qui s’est
installée de part et d’autre semble pour l’instant bloquante et l’avenir des appels à projets communs est incertain, alors que
cela aurait pu être une première concrétisation du travail sur la gouvernance. Cela aurait pu légitimer la position des deux
structures et rassurer les autres acteurs, qui restent sceptiques sur les capacités de la DRAAF et du CR à prendre les choses
en main efficacement.
Il reste au CR à évaluer l’efficacité des outils qu’il a mis en œuvre pour la gouvernance alimentaire. Et il serait intéressant de
voir comment ils s’articulent avec les décisions qui sont prises au niveau de l’exécutif régional.
Apports personnels
Le sujet de l’alimentation dans son ensemble et de la gouvernance alimentaire en particulier est vaste et le stage m’a permis
de bénéficier d’une approche transversale mais qui reste incomplète. Le travail réalisé a surtout été un travail d’observation
et le temps a manqué pour analyser les données rassemblées. De nombreuses questions restent en suspens et l’épilogue
du projet du CR n’est pas encore écrit. C’est avec un réel intérêt que je suivrais les évènements futurs.
Ce stage a été l’occasion de découvrir une institution qui est un partenaire privilégié des services de l’Etat en région.
Impressionnant par sa taille, par ses moyens humains et financiers, le Conseil régional représente un défi pour les agents de
la DRAF : la connaissance de son fonctionnement et la maîtrise de ses réseaux d’action publique est primordial pour pouvoir
travailler sur des politiques publiques destinées de plus en plus à être partagées. Pour ce qui est de l’alimentation, le défi pour
les services de l’Etat me semble être de pouvoir conserver un rôle dans le domaine des politiques publiques de l’alimentation
en région, en restant conscient que les partage des tâches est nécessaire. Trouver le juste équilibre entre les structures,
entre les personnalités et face à des acteurs qui investissent le sujet sera un but commun aux collectivités territoriales et aux
services déconcentrés, lorsque le portage politique le permet.
L’inspection en pharmacie vétérinaire dans le Finistère : un
exemple de relations inspecteurs – inspectés
Cécile ADAM, Inspectrice Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission effectuée du 14 avril au 25 juillet 2014 à la Direction Départementale de la Protection des Populations du Finistère,
antenne de Brest. Mémoire de stage rédigé sous la direction de Nicolas FORTANE (INRA)
Questions abordées par l’étude 50
La particularité de l’inspection en pharmacie des structures vétérinaires réside dans l’existence au préalable de relations entre
inspecteurs et inspectés, qui se rencontrent en routine dans le cadre de l’organisation de la défense sanitaire. L’inspection
entraîne une redéfinition brutale des relations qui ne se font alors plus d’égal à égal : l’interlocuteur de l’administration
devient l’inspecteur qui sanctionne, et qui prend symboliquement l’ascendant dans les relations. L’inspection est alors le
théâtre d’un constant décalage, notamment entre la culture administrative de l’inspecteur et la culture « vétérinaire » de
l’inspecté. L’inspecteur, ancré dans la culture administrative de l’assurance qualité, nourrit son inspection de preuves écrites.
Le vétérinaire, au contraire, s’inscrit dans une culture orale, où l’administratif est associé à une contrainte. En conséquence
et c’est un point déterminant pour comprendre les relations, l’inspection est tout à fait étrangère à la culture du vétérinaire,
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction sans modification du résumé de mémoire établi par son auteur et
déposé avec ledit mémoire
50
51
pour qui la perspective d’être inspecté correspond à une lointaine éventualité, réservée aux fraudeurs et autres « affairistes ».
L’inspection permet également de mettre en évidence un décalage entre la loi et son application, qui est un constat récurrent
depuis la promulgation de la première grande loi de pharmacie vétérinaire en 1975. Les ayants droit du médicament vétérinaire
définis par cette loi sont restés imperméables à son application. Rien n’a d’ailleurs contraint les vétérinaires à appliquer cette
loi, puisqu’ils sont très peu contrôlés par les administrations chargées de ce contrôle. Il s’agit d’un autre élément clé de la
compréhension de la situation actuelle : 40 ans après la promulgation de la loi qui instaure le contrôle de leur pharmacie,
les vétérinaires n’ont toujours pas l’habitude d’être inspectés. Leur administration de tutelle, au fait de l’application très
hétérogène de la loi par les vétérinaires, mais aussi du taux d’inspection extrêmement faible par ses services, tolère de
manière tacite cet illégalisme et ferme ainsi les yeux sur une forme de criminalité en col blanc. Les vétérinaires ont donc
longtemps gardé toute la latitude pour appliquer la réglementation comme bon leur semblait. Car la loi occasionne un autre
décalage entre inspecteur et inspecté. L’inspecteur tire sa légitimité de la loi, qui est également le support de son inspection.
La réglementation est le seul outil à force contraignante dont dispose l’inspecteur. C’est pour lui une ressource de valeur
dont il est dépendant. Pour les inspectés au contraire, la loi est une source d’incohérences. En cristallisant sur les aspects
de la loi que les vétérinaires jugent illégitimes, iniques voire contraires à la santé publique, ils lui font subir un processus
de dé-crédibilisation. Il est donc plus difficile pour l’inspecteur de fonder son action sur un outil décrié par les inspectés.
Toutefois, nous avons mis en évidence que, passée la stupeur de l’annonce de l’inspection, les vétérinaires ne sont pas
contre l’inspection en tant que telle. Un nouveau décalage apparaît sur la définition de l’inspection : les vétérinaires attendent
de l’inspection qu’elle les aide à progresser dans leurs pratiques. Les vétérinaires attendent donc de l’inspection qu’elle soit
un audit, ce qui n’est pas la mission des services de l’Etat.
Enfin, si l’inspection en pharmacie vétérinaire est aussi complexe, c’est qu’elle touche à un sujet politiquement tendu. Car le
médicament vétérinaire mobilise depuis toujours d’importants enjeux économiques pour les ayants droit. L’acte vétérinaire
est mal valorisé par les praticiens qui, face à la concurrence du conseil gratuit des nombreux techniciens d’élevage, ont
adapté en conséquence leur facturation. En tirant de la vente du médicament vétérinaire la rémunération de l’acte, les
vétérinaires s’en sont rendus dépendants. Aujourd’hui, la vente du médicament est un enjeu vital pour la survie de la plupart
des vétérinaires.
Pour dépasser ces difficultés, et malgré la mise sous assurance qualité des services d’inspection dont on pourrait penser
qu’elle limite la marge de manœuvre de l’inspecteur, ce dernier met en place des stratégies. L’inspecteur n’a pas le droit
de dispenser du conseil à un inspecté qui en est pourtant très demandeur. Pourtant, s’il veut inciter l’inspecté à améliorer
ses pratiques, il est nécessaire de passer par une phase explicative (explication du déroulement de l’inspection ou encore
de l’intérêt d’une disposition réglementaire par exemple). Pour donner du sens à son inspection, l’inspecteur est quasiment
contraint de dispenser une forme de conseil, aussi minime soit-elle.
Dans le Finistère, les services d’inspection ont développé et mis en place un programme d’inspections visant à instaurer
un accompagnement vers le changement sur le long terme. L’objectif de cette démarche est d’initier un dialogue et une
dynamique chez les praticiens du département, afin qu’ils améliorent leurs pratiques en pharmacie vétérinaire. Pour cela,
il a été procédé à une vingtaine d’inspections non suivies de sanctions. L’acceptation des inspections par les enquêtés a
reposé sur un processus de concertation et de négociation entre l’administration et les représentants des professionnels. La
dynamique a été entretenue par une communication très régulière autour du sujet. Afin de pouvoir contourner l’impossibilité
de donner du conseil aux vétérinaires, la DDPP 29 a fait appel à une stagiaire, qui a aussi joué le rôle de facilitateur du
dialogue entre administration et professionnels. La réussite de cette démarche repose aujourd’hui sur la négociation, la
communication et la collaboration entre l’administration et les représentants des professionnels.
La démarche constitue une initiative qui trouble un équilibre instauré de manière tacite depuis longtemps. Profitant de la
fenêtre d’opportunité que représente le plan Ecoantibio, la DGAL a annoncé en 2013 un durcissement des inspections.
Pourtant on constate toujours un décalage entre la mesure annoncée et les moyens associés, qui confère à la situation une
certaine inertie. C’est cette inertie précisément que la démarche 29 vient troubler.
Nous aurions pu axer notre analyse sur la question du droit et de son respect. Car les travaux de Lascoumes ont montré que
les règles ne sont pas faites pour être appliquées. Elles constitueraient plutôt une base de négociation et de discussion avec
les administrés, et un cadre pour l’action. De plus, la règle ne peut être appliquée dans son intégralité : elle résiste rarement
à l’épreuve de la pratique. Dès lors, les administrés que nous sommes, nous mettons quotidiennement en infraction avec
la réglementation. Doit-on pour autant parler d’illégalisme ? Doit-on condamner toute nos actions si elles ne sont pas pour
partie conformes à la loi ? Il est possible au contraire de considérer qu’il existe une solution de continuité entre le respect
de la règle et sa transgression51 . Car en effet, c’est bien la transgression qui permet à l’organisation d’exister : demander à
un cabinet vétérinaire d’appliquer la réglementation dans son intégralité du jour au lendemain bouleverserait ses pratiques
au point d’entraîner sa dissolution. La structure vétérinaire serait entièrement tournée vers l’application de la loi, et perdrait
peut-être la capacité d’exercer son activité initiale. Nous pourrions considérer que la transgression de la règle est même la
condition de son application, car elle la rend acceptable. Il est donc illusoire de vouloir tout contrôler et de tendre au respect
parfait de la réglementation. Pourtant, il se joue ici aussi la légitimité de l’Etat comme organe régulateur qui traite de manière
52
égalitaire ses administrés. La gestion différentielle des illégalismes, bien que réalisée dans un but diplomatique – ne pas
annoncer de sanctions pour éviter que les administrés cachent des pratiques dangereuses par exemple- met à mal l’image
de l’administration.
Suite à l’analyse réalisée, et en dépit des nombreuses questions qu’elle a soulevées et auxquelles il conviendrait de consacrer
une étude, nous proposons une série de recommandations et de suggestions afin de faciliter le déroulement des inspections
et d’améliorer le respect de la réglementation. Ces propositions ne constituent que des pistes de réflexion ; mais permettent
d’ouvrir la discussion.
Nous avons identifié que l’existence de relations de « dépendance » entre administration et vétérinaires dans le cadre du
mandat sanitaire complexifiait l’inspection pharmacie dans les régions où elle n’est pas mutualisée. Dans ces départements,
il pourrait être envisagé de confier la réalisation des inspections à un organisme indépendant qui n’aurait aucune autre
relation avec les vétérinaires. Bien qu’il s’agisse d’une disposition du code de la santé publique relativement appréciée des
vétérinaires, la question de ne plus faire réaliser les inspections par des vétérinaires devrait être envisagée. La solution d’un
organisme indépendant de la DDPP conviendrait également dans les cas où une DDPP refuse d’inspecter.
A défaut de créer un organisme indépendant dans les régions où l’inspection n’est pas mutualisée, l’inspection pourrait
être confiée à un inspecteur n’appartenant pas au service santé et protection animale et qui ne communique pas avec les
vétérinaires sanitaires.
Seule l’inspection a un pouvoir contraignant : procéder à des inspections est donc indispensable pour stimuler les vétérinaires
à appliquer la réglementation. Par ailleurs, il s’agit d’un excellent moyen pour garder un contact avec les administrés, et de
savoir ce qu’il se passe sur le terrain. Inspecter permet également d’acculturer les vétérinaires au fonctionnement administratif,
afin de mieux se comprendre. Les échanges doivent se faire dans les deux sens, et une relation de confiance est pour cela
nécessaire. Nous pensons donc que le nombre d’inspections réalisées par an doit être suffisant pour que la crainte de
l’inspection motive au changement. Dans un contexte de réduction des effectifs des services du ministère de l’Agriculture,
dans les régions ou les départements où l’inspecteur ne peut procéder à un grand nombre d’inspections, nous pourrions
imaginer des inspections « partielles ». Inspecter tous les points du vademecum demande une journée d’inspection. Nous
pourrions envisager des thématiques d’inspection par année. Cela permettrait aux inspecteurs d’inspecter un pourcentage
important de structures, d’y passer moins qu’une journée, et d’avoir des relations d’inspection régulières avec les vétérinaires.
Cette option permettrait aussi de mettre en place une sorte d’agenda de mise en place de certains points réglementaires
par les structures vétérinaires. En revanche, cette option est difficilement réalisable dans les cabinets où aucune démarche
d’amélioration n’a été initiée : l’inspecteur sera en effet amené à constater de nombreuses non-conformités, qu’il est tenu
de relever.
Nous avons identifié que l’impossibilité de donner du conseil peut constituer une difficulté pour les inspecteurs. Ce point
est commun à de nombreuses inspections : l’inspecté attend de l’aide de la part d’une personne qu’il considère comme
un expert du domaine. Il est du rôle des organisations de professionnels de mettre en place le conseil à leurs confrères.
L’inspecteur pourra utilement renvoyer le vétérinaire vers le vademecum d’inspection et le guide de bonnes pratiques de la
SNGTV. Le guide présente toutefois l’inconvénient d’être exhaustif et ambitieux, et il va au-delà des attendus réglementaires.
Il appartient aux professionnels de s’organiser afin de mettre un point un autre outil qui sera plus de leur convenance. Nous
pensons que l’administration doit y participer de manière structurante. L’exemple du Finistère montrera si cette solution
fonctionne. En effet, dans le Finistère, la DDPP a impulsé une dynamique pour susciter des discussions parmi les vétérinaires.
La DDPP 29 a accompagné les vétérinaires jusqu’au point du débat où ils se disent qu’il pourrait être utile de construire un
outil pour les aider dans leur progression. Il conviendra de redonner le témoin aux professionnels lorsque la dynamique sera
pérennisée, tout en restant présent aux côtés des vétérinaires. Le guide des bonnes pratiques de la SNGTV a été établi en
concertation avec la DGAL.
Nous suggérons deux exemples d’outil, que les discussions avec la DDPP et les représentants des professionnels ont
fait émerger. Il nous semble très important de souligner que ces deux outils ont été choisis car ils correspondent bien à la
culture des vétérinaires. Il était exclu, selon nous, d’écrire un énième rapport/ guide/ grille, que les vétérinaires n’auraient
certainement pas lu. Les outils que nous proposons s’inscrivent dans l’oralité. De plus, ces outils s’utiliseront dans un cadre
informel : nous avons montré que les formalités administratives sont une contrainte pour les vétérinaires.
Tout d’abord, nous pensons que les vétérinaires doivent envisager la possibilité de mettre au point des audits. Un vétérinaire
qui maîtrise bien la réglementation – c’est une condition indispensable – pourrait aller auditer un cabinet qu’il ne connaît pas
afin d’apporter un regard extérieur. Nous nous sommes prêtée à cette exercice afin d’en évaluer la possibilité. Nous avons
réalisé un audit de quatre heures dans un cabinet canin qui avait déjà bien avancé dans sa réflexion d’amélioration. Notre
audit n’a pas été exhaustif, mais a permis de mettre en évidence des points positifs et négatifs dont le vétérinaire n’avait pas
conscience. Avec la rédaction du rapport, le temps d’un tel audit est estimé à une journée et demie. Le bilan est positif, car il a
permis aux vétérinaires audités de faire un point sur leurs pratiques. Nous avons rendu compte de ce test aux représentants
des professionnels, à qui il appartient désormais d’avancer dans la démarche.
53
Le second outil que nous avons suggéré est la mise en place de réunions annuelles ou semestrielles, entre vétérinaires. Le
but de ces réunions est qu’ils puissent discuter entre eux, éventuellement en groupe, de leurs difficultés afin de trouver des
solutions ensemble, ou d’échanger sur des pratiques qui fonctionnent bien. Nous avons observé que, lors de réunions entre
vétérinaires, des idées pertinentes émergent, ce qui montre bien tout l’intérêt de ces discussions. Nous avons aussi incité les
vétérinaires à convier à ces réunions les représentants de leurs fournisseurs – laboratoires, centrales d’achat, fournisseurs
de logiciels- qui doivent absolument faire partie de la discussion. Nous pensons en effet que des logiciels clients adaptés
et des conditionnements adéquats pour les médicaments sont des éléments clefs pour aider les vétérinaires à pouvoir plus
facilement appliquer la réglementation.
Enfin, nous axons notre troisième piste de réflexion sur la conduite de changement. Il semble évident que la progressivité
permet de faire accepter le changement. Pour initier ce genre de démarche, il convient de profiter de fenêtres d’opportunité,
comme une nouvelle réglementation, ou une nouvelle politique publique, ou encore une décision de justice. L’administration
pourra mieux justifier un changement dans ses pratiques – mise en place de plus d’inspections ou durcissement des
sanctions- lorsque ce changement s’adosse à un nouvel élément réglementaire. La loi d’avenir pour l’agriculture est un
excellent exemple de fenêtre d’opportunité pour l’administration. Nous avons pu constater sur le terrain que les vétérinaires
sont très sensibilisés à la question de l’antibiorésistance, et qu’ils prennent conscience de la fragilité de certains acquis
: il faut s’en servir comme d’un levier d’action. La mise en place d’un nouveau plan d’action sera moins coûteuse pour
l’administration si elle s’appuie sur une dynamique pré existante.
Pour mettre en place un changement progressif, l’appui des représentants des professionnels est indispensable. L’exemple
du Finistère montre que c’est un élément clef pour impulser le changement. Ensuite, il convient de communiquer autour de
la démarche administrative, les représentants des professionnels jouant le rôle de relais et de facilitateurs. La communication
doit s’appuyer sur la mise en place de réseaux de communication locaux. L’inspecteur et les trois représentants du GTV ont,
dans le Finistère, formé un noyau dur faisant office de nœud de communication. Le réseau permet d’instaurer la confiance
et la communication dans les deux sens.
Nous pensons que la démarche finistérienne est une initiative originale, et qui semble pour le moment efficace en regard de
la situation locale. Nous pensons qu’il est nécessaire de la voir fonctionner et évoluer, afin, éventuellement, de s’en servir
comme d’un modèle.
La modernisation du secteur de l’abattage au Maroc : une
politique publique à l’épreuve du terrain
Bénédicte MARTINEAU
, Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2012-2014
Cadre de réalisation
Mission effectuée du 14 avril au 11 juillet 2014 au Service économique régional de l’Ambassade de France au Maroc.
Mémoire de stage rédigé sous la direction de Muriel FIGUIE (CIRAD).
Questions abordées par l’étude 52
Malgré sa place de cinquième puissance d’Afrique, le Maroc reste selon les critères de l’Organisation des Nations-Unies un
pays en développement.Dans un Etat où l’agriculture représente près de 75 % des emplois en milieu rural et où une grande
majorité des élevages compte moins de cinq têtes de bétail, l’élevage bovin est une composante essentielle de l’économie
marocaine. Il permet d’assurer l’autosuffisance du pays en viande bovine et joue un rôle essentiel en termes d’emplois et de
développement rural.
En raison de cette importance stratégique, le dernier plan agricole marocain lancé en 2008, le Plan Maroc Vert, a accordé
une place prioritaire à la filière viandes rouges. Afin de dynamiser l’agriculture marocaine et de réussir le double pari de la
libéralisation des échanges et du développement durable, le plan a été construit selon deux axes : le renforcement de la
grande agriculture exportatrice et la création de grands pôles économiques (pilier 1) et un programme de développement de
la petite agriculture et de lutte contre la pauvreté (pilier 2).
Sept ans après le début du premier-contrat programme entre l’interprofession des viandes rouges, la FIVIAR, et le
gouvernement marocain, la situation de l’aval de la filière reste préoccupante et le développement de l’aval est aujourd’hui
la priorité pour la filière. Aucun abattoir n’a été mis à niveau sur les douze prévus, et sur les huit projets de construction
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction sans modification du résumé de mémoire établi par son auteur et
déposé avec ledit mémoire
52
54
d’abattoirs privés, trois seulement ont vu le jour. Les abattoirs au Maroc restent dans une situation sanitaire et un état de
vétusté qui empêchent toute exportation de viande bovine et représentent un risque pour la santé publique. Pourtant, les
abattoirs constituent un point clé de la modernisation de la filière, en tant que maillon essentiel et secteur le plus critique de
la filière.
Face à cette situation d’inertie, et à l’aube du nouveau contrat-programme signé en avril 2014, cette étude se proposait
d’apporter un regard sur les difficultés de modernisation des abattoirs au Maroc, sous l’angle de l’analyse des jeux d’acteurs
et de leurs conséquences, afin de mettre en lumière de potentiels leviers de changement. Réalisée dans le cadre d’une étude
pour l’ambassade de France au Maroc sur l’état des lieux de la filière viande bovine au Maroc et des perspectives pour la
France, cette étude visait également à évaluer les intérêts en termes d’échanges commerciaux et de coopération entre les
deux pays.
Il s’agissait de comprendre en quoi la modernisation des abattoirs était devenue un point de convergence du développement
d’une nouvelle gouvernance de la filière viande bovine au Maroc.
Pour cela, les enjeux et le cadre de mise en œuvre de la modernisation des abattoirs ont été dégagés, en s’appuyant sur
l’état des lieux de la filière, afin de montrer que la modernisation des abattoirs ne peut se concevoir sans le cadre plus général
de la politique volontariste et multidimensionnelle de transformation de la filière.
La situation des abattoirs au Maroc ne fait en effet que refléter la situation d’une filière dont le fonctionnement est resté très
traditionnel et basé sur l’informel. Les enjeux des abattoirs et de la filière s’entremêlent : la modernisation des abattoirs ne
peut se faire sans tenir compte de l’ensemble des problématiques de la filière. Moderniser les abattoirs, c’est donner un élan
à la filière (incitation à produire des carcasses plus lourdes, développement des pratiques de chaîne du froid, changement
des pratiques d’abattage, d’approvisionnement et de commercialisation). C’est donner aussi un signal symbolique dans
un contexte où le poids des traditions joue un rôle premier. Inversement, la modernisation des abattoirs est elle-même
dépendante de la modernisation du reste de la filière, et en premier lieu des conditions d’encadrement (réglementation,
formation...).
Dans ce contexte, le Plan Maroc Vert est apparu comme une opportunité pour moderniser les abattoirs, leur offrant une
politique claire et des moyens financiers importants. Cependant, le démarrage difficile des nouveaux abattoirs a montré
qu’au- delà des seuls aspects techniques, la modernisation du secteur est confrontée à des enjeux qui complexifie sa mise
en œuvre, et ce malgré la volonté politique et les efforts mis en œuvre. En plus de la question de santé publique, les enjeux
de sécurité alimentaire et considérations économique et sociales font des abattoirs le carrefour de problématiques multiples,
représentatives des difficultés de toute une filière.
Une fois cette perspective établie, les résultats des entretiens menés auprès d’acteurs de la filière (administration et
professionnels) ont été exploités afin de mettre en lumière le positionnement des acteurs sur la question et les groupes
d’acteurs clés à mobiliser. L’aspect multidimensionnel de la problématique implique la mise en cause d’acteurs multiples
et variés qui ont petit à petit créé un blocage autour d’une possible modernisation des abattoirs. Dans ce jeu d’acteurs, la
volonté politique s’est heurtée à la résistance des acteurs de terrain.
Les acteurs de l’encadrement de la filière ne sont pas parvenus à créer une dynamique autour de la modernisation du
secteur. Le ministère de l’agriculture, pilote du contratprogramme, s’est enfermé dans un système bureaucratique incapable d’innover et de mobiliser les professionnels, tandis que
le ministère de l’intérieur n’est pas parvenu à s’imposer face à des communes qui refusent de céder la gestion des abattoirs.
L’interprofession, jeune et manquant de moyens financiers et humains et de compétences, s’est montrée incapable de jouer
son rôle de mobilisation des professionnels. Face à eux, les professionnels de la filière se sont montrés soit indifférents, soit
vivement opposés à la question. Les chevillards, et de façon moindre les bouchers, ont montré une résistance active à la
modernisation des abattoirs.
Deux acteurs clés sont ainsi ressortis de l’analyse des enjeux et des intérêts de la multitude d’acteurs initialement concernés.
Les communes et les chevillards sont apparus comme le frein majeur à la réforme des abattoirs, fort d’un monopole basé
respectivement sur une prise de pouvoir local et sur l’attachement au fonctionnement traditionnel de la filière.
Paradoxalement, ces deux groupes d’acteurs disposent du pouvoir et des ressources nécessaires pour débloquer la
situation, alors que les pouvoirs publics ne parviennent pas à trouver les clés pour faire évoluer la situation, enfermées dans
une bureaucratie lourde et inerte.
Face à la résistance au changement des principaux acteurs concernés par la réforme des abattoirs, il est apparu nécessaire
de s’interroger sur l’opportunité d’une nouvelle gouvernance de la filière, menée par le secteur privée en articulation avec les
pouvoirs publics. L’analyse du jeu d’acteurs a permis d’envisager les leviers de changements mobilisables pour débloquer
la situation actuelle des abattoirs, ainsi que le rôle que pourraient jouer l’interprofession et les associations de professionnels.
L’action privée collective nous a semblé être un levier indispensable pour un changement aussi ambitieux. Le blocage de
la situation étant la résultante de jeux de pouvoir et de négociations dans le système, c’est l’ensemble du système qui doit
55
évoluer. Pour cela, il est nécessaire de travailler en collaboration avec les acteurs opposés au changement, chevillards en
tête, en les sensibilisant à leurs intérêts dans la modernisation de la filière. Ces intérêts sont réels, ce qui permet de penser
que la résistance au changement des chevillards est toute relative. Pour preuve, certains chevillards ont pris les rênes de
l’Association nationale des chevillards pour porter les intérêts futurs de la profession. Ainsi, si beaucoup de professionnels
voient encore leur profession et leurs habitudes de travail menacées par la modernisation des abattoirs, un mouvement
commence à se créer pour communiquer sur Les effets positifs à long terme.
Dans ce contexte, l’interprofession et les associations de professionnels ont un rôle fondamental à jouer pour sensibiliser
les professionnels. L’organisation interprofessionnelle marocaine est donc un enjeu fondamental de la modernisation des
abattoirs. Bien que créée depuis quelques années déjà, elle peine à s’organiser, pénalisée par un manque de ressources
humaines et financières et de compétences managériales. L’interprofession et les organisations professionnelles sont
une pierre angulaire potentielle du changement, mais tout reste à construire. Entre un Etat encore très présent et des
professionnels réticents et qui peinent à s’organiser, la mise en place d’une organisation professionnelle efficace prendra du
temps et gagnera à s’appuyer sur l’expérience d’autres pays.
En cela, la coopération en cours entre les interprofessions française et marocaine a tout intérêt à se développer autour
d’actions concrètes de sensibilisation des acteurs et de formation professionnelle, à la fois des dirigeants et des adhérents
de l’interprofession.
A terme, le Maroc envisage selon ce qui s’est passé en France la privatisation complète des abattoirs. Pourtant, au regard
de l’expérience d’autres pays dans la privatisation des services publics et du contexte marocain, cette perspective soulève
des interrogations. L’articulation public/privé est un mode de gouvernance qui semble à l’heure actuelle adaptée au contexte
marocain, en raison d’un Etat historiquement fort et d’un secteur privé encore peu dynamique. Les conséquences d’une
privatisation complète du secteur sont mal évaluées en ce qui concerne l’impact sur la qualité du service public et sur les
aspects socio-économique, en particulier vis-à-vis des professions les plus fragiles de la filière comme les petits agriculteurs,
les chevillards et les bouchers traditionnels.
Comme le soulignait un professionnel, « le Maroc ne peut pas être la France en dix ans ». Le Plan Maroc Vert a soulevé de
grands espoirs pour la filière, qui ont vite été déçus, mais beaucoup d’acteurs interrogés ont montré un grand optimisme
quant à l’avenir proche de la filière.
La difficulté de la dimension systémique du changement des abattoirs est que le changement doit se faire chez tous les
acteurs et dans l’ensemble de la filière. Un auteur relevait à propos de la France dans les années 1970 53 : « c’est sans doute
parce qu’il n’est pas perçu dans toute son ampleur et dans toutes ses conséquences que le problème du déficit des abattoirs
publics inquiète si peu l’opinion publique et même l’Administration ». Pour l’instant, la prise de conscience est encore timide,
mais une fois cette étape franchie, un processus de changement rapide sera enclenché, selon les plus optimistes.
Si cette analyse souligne le poids essentiel des professionnels et notamment des chevillards, elle ne permet pas de traiter
la question de la résistance des collectivités locales, qui dispose de la gestion des abattoirs par voie réglementaire et
refusent de la céder au secteur privé en raison des intérêts financiers en jeu. L’enjeu est que le ministère de l’intérieur
prenne ses responsabilités face aux communes, sous la pression conjointe d’un ministère de l’agriculture volontaire et d’une
interprofession renforcée, afin que les communes cèdent leur monopole sur la gestion des abattoirs.
Influence du problème de l’Encéphalopathie Spongiforme
Bovine sur les politiques publiques liées à l’utilisation des
protéines animales transformées en France et en Asie du SudEst
Coraline CHAMORET, Inspectrice Élève de la Santé Publique Vétérinaire, 2012-2014
Cadre de réalisation
Mémoire réalisé du 21 avril 2014 au 26 juillet 2014 au Service économique régional de l’Ambassade de France à Singapour.
Mémoire rédigé sous la direction de Muriel FIGUIE (CIRAD)
DE BOURDONNAYE A. (1970), « Peut-on faire des abattoirs publics un outil économique ? », Économie rurale, n°85, 1970,
pp. 135-147.
54
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction sans modification du résumé de mémoire établi par son auteur et
déposé avec ledit mémoire
53
56
Questions abordées par l’étude 54
A l’occasion du changement réglementaire européen de 2013, permettant de nouveau l’utilisation de protéines animales
dites transformées dans l’alimentation d’animaux d’aquaculture, il est pertinent de se pencher sur ce que cela peut changer
pour la filière française productrice de ce type de sous-produits animaux. Ainsi, il s’agit de savoir si cette nouvelle autorisation
permettrait du changement dans les pratiques liées à l’utilisation de ce type de produit en France et à l’international. Cependant,
nous l’avons vu, si les protéines animales transformées sont des produits dont la fabrication est maintenant parfaitement
maitrisée du point de vue sanitaire, elles demeurent, dans les esprits, associés aux farines animales, responsables de
l’épidémie d’encéphalopathie spongiforme bovine. En effet, les événements liés à cette épidémie ont eu une répercussion
énorme sur l’esprit du grand public, la gestion du risque sanitaire et le commerce des produits animaux liés de près ou de
loin à cette maladie.
L’objet de cette étude consistait donc à décrypter dans quelles mesures les événements liés à l’ESB ont eu une influence
sur les pratiques d’utilisation et de commerce des protéines animales transformées. Nous avons étudié en particulier en quoi
ce problème pouvait impacter les possibilités de changements de pratiques suite à la modification réglementaire de 2013.
Tout d’abord, nous nous sommes attelés à la description historique des événements liés à l’épidémie de l’ESB en Europe.
Pour ce faire, nous avons utilisé la méthode de Chateauraynaud et Torny, qui proposent de segmenter un tel événement
en diverses épreuves successives. Nous avons ainsi pu schématiser l’historique du problème de l’ESB. Alors que selon
Chateauraynaud et Torny, le schéma généralement observé consiste en une succession de phases uniques (vigilance –
controverse – polémique – crise – normalisation), nous avons pu démontrer que ce n’était pas le cas pour notre problème.
En effet, nous avons pu voir qu’il y avait plutôt eu une succession de deux crises (en 1996, puis en 2000), espacées par des
phases de controverse et de polémique. Les conséquences ont donc eu une répercussion particulièrement importante sur
l’économie de la filière et la manière de gérer un problème sanitaire en Europe.
Nous avons ensuite détaillé l’évolution historique de la phase de normalisation ayant suivi ces événements en Europe et en
France. Nous avons pour cela étudié l’évolution des textes réglementaires et des avis scientifiques au niveau européen et
national, car les textes réglementaires sont, selon Chateauraynaud et Torny, les moyens de codification et de stabilisation
usuellement observés en phase de normalisation. Nous avons donc pu constater dans un premier temps, immédiatement
après les crises de l’ESB, que la France et l’Europe était toutes deux dans une optique conservatrice, à savoir limiter au
maximum le risque en verrouillant notamment toute utilisation de farines animales pour tout animal de rente. Ainsi, jusqu’en
2009, il n’était pas question de revenir sur ces interdictions. Cependant, avec le temps, s’est posée une autre question :
celle de l’utilisation des sous-produits animaux d’abattoir. En effet, si le seul débouché pour certains de ces produits était la
destruction, il paraissait alors pertinent de vouloir leur trouver une utilisation davantage productive. À partir de la rédaction
du règlement 1069/2009 sur les règles sanitaires applicables aux sous-produits animaux et produits dérivés non destinés à
la consommation humaine, la commission européenne affiche cette nouvelle volonté et commence à proposer, au travers
de ses feuilles de route, de reconsidérer l’utilisation de protéines animales en alimentation des animaux de rente, sous forme
de protéines animales transformées. Si l’Union Européenne affirme cette nouvelle position, la France reste réfractaire à cette
opinion, notamment au travers des avis rendus par l’Anses.
Au cours de l’évolution de cette longue phase de normalisation, nous avons enfin pu mettre en évidence un rétrécissement
du problème sur plusieurs fronts. D’une part, le grand public, aujourd’hui, ne se sent pas concerné par l’utilisation que l’on
fait des protéines animales transformées. Si l’on compare à l’époque des crises de l’ESB, on se rend bien compte que la
population concernée par le problème actuel est bien moins importante. Par ailleurs, nous avons également pu démontrer
que le sujet est devenu très spécifique et technique, l’aliénant non seulement des arènes du grand public et des médias,
mais également de groupes d’acteur censés connaitre le sujet. L’utilisation incorrecte, voire la méconnaissance des termes
« farines animales » et « protéines animales transformées » par ces différentes personnes telles que les professionnels, les
politiques ou encore les avis scientifiques illustrent cette idée. Néanmoins, la connaissance de ce problème n’est pas pour
autant perdue et sa gestion est assurée par une poignée de personnes selon les domaines. Par exemple, la priorisation
des couples pays/produits pour l’exportation, depuis la France, de protéines animales transformées en Asie du sud-est est
décidée par un comité de 5 personnes.
Cette première partie permet donc de visualiser l’historique de l’ESB comme une succession de phases, composée de deux
crises et d’une longue phase de normalisation. Cette dernière a fait l’objet de quelques évolutions, motivées par l’Europe
mais freinées par la France, davantage impactée par les effets de ces crises que d’autres états membres. Au cours de cette
phase, une restriction massive du nombre d’acteurs concernés s’est effectuée, rendant le sujet très spécifique et l’affaire de
quelques personnes seulement.
Dans une seconde partie, nous avons tenté de cibler l’approche plus particulière de la France vis- à-vis du problème de
l’ESB, tel qu’il est perçu actuellement, au travers de différents entretiens. Nous avons tout d’abord proposé de caractériser
la phase de normalisation particulière de la France suite aux crises de l’ESB. Il en ressort que le pays a recours massivement
57
à la réglementation pour codifier l’ensemble des pratiques liées de près ou de loin au risque ESB. Par ailleurs, la spécificité
du sujet et le fait que le grand public semble se sentir moins concerné par ce problème en particulier en a fait un sous-sujet
et l’a rendu moins prioritaire. Paradoxalement, une peur du retour d’une épidémie demeure. En fait, il s’agirait davantage
d’une peur, de la part des gestionnaires, que le grand public reprenne peur et que cela se matérialise par une baisse de la
consommation et des conséquences économiques graves.
Nous avons ensuite repris ces caractéristiques pour expliquer en quoi elles maintiennent un statu quo des pratiques liées
à l’utilisation des PAT en alimentation animale en France. En effet, les restrictions réglementaires réduisent le nombre
d’établissements éligibles à la aux conditions de production requises pour assurer un seuil de sécurité sanitaire satisfaisant.
Par ailleurs, des contraintes économiques freinent également les possibilités d’évolution. Une compétition de marché existe
pour l’utilisation des PAT : la filière petfood semble drainer en grande partie la production de ces sous-produits animaux. De
plus, il n’est pas certain que les établissements fabricant des PAT soient capables d’augmenter leur capacité de production.
Enfin, un dernier type de contrainte concerne la crainte de certains acteurs, empêchant toute évolution dans l’utilisation des
protéines animales transformées. En effet, les distributeurs, notamment, craignent toujours une nouvelle phase polémique
et imposent à leur fournisseur une interdiction d’utilisation de protéines animales dans l’alimentation de leurs animaux. Ainsi,
l’impact particulièrement important des crises de l’ESB au niveau national a pour effet de rendre difficile toute possibilité
d’utilisation de protéines animales transformées en alimentation des animaux d’aquaculture.
Il reste donc à envisager les possibilités de production pour l’export. Pour cela, avant de s’intéresser à l’éventuelle réceptivité
des pays tiers, il convient d’abord de se pencher sur l’utilisation et la vision de l’accord bilatéral par les gestionnaires du
risque français. En effet, la commercialisation d’un produit particulier comme les protéines animales transformées nécessite
que le pays tiers signe un accord avec l’exportateur pour déterminer les possibilités d’utilisations de tels produits dans le
pays importateur. Si l’objectif initial d’un tel accord est d’assurer une gestion du risque à l’extérieur du territoire national, il
semblerait qu’il y ait une autre motivation derrière ce genre de pratique, que nous avons en fait croisé tout le long de cette
partie. En effet, certains entretiens révèlent une pratique de l’avoid-blaming au travers de l’utilisation des accords bilatéraux,
dédouanant le pays
exportateur de toute possibilité de culpabilisation en cas d’incident sanitaire dans un pays tiers. Nous en déduisons que cette
tendance est une caractéristique propre de la phase de normalisation de la France suite aux crises de l’ESB.
Dans la troisième et dernière partie, nous nous sommes enfin penchés sur la possible réceptivité des pays tiers à l’utilisation
de protéines animales transformées en alimentation pour leurs animaux d’aquaculture. Pour cela, nous nous sommes plus
particulièrement intéressés aux pays d’Asie du sud- est, grands producteurs de produits de la mer et d’eau douce. Dans un
premier temps, il a paru pertinent de dresser un portrait, commun aux pays de l’ASEAN, des filières associées à notre sujet
: production aquacole, alimentation animale. Il en ressort une description très différente des filières homologues françaises :
très atomisées, elles comprennent néanmoins quelques grands groupes de producteurs, représentant de bons potentiels
partenaires commerciaux pour les exportateurs français. Nous avons ensuite tenté d’étudier plus finement la région, pays
par pays et nous en avons tiré plusieurs catégories de pays allant de pays avec des filières agricoles assez développées à
d’autres pays où la production agricole reste très traditionnelle. Ainsi, le Vietnam et la Thaïlande semblent être, à première
vue, les candidats les plus éligibles pour des opportunités d’exportation de protéines animales transformées. Cependant, si
les pratiques semblent être très éloignées de celles observées en France, nous pouvons néanmoins percevoir des similitudes
de tendances. En effet, bien qu’il soit démontré que les événements liés à l’ESB n’aient pas eu de conséquences directes
pour les pays de l’ASEAN, nous avons pu révéler des exemples de tendances à la précaution, à l’avoid- blaming, comme
cela a été observé en France. Nous pouvons donc avancer que pour une crise aussi importante que celle de l’ESB, les
répercussions au niveau mondial sont telles qu’il pourrait y avoir une transposition directe de la phase de normalisation et de
ses caractéristiques à des pays n’ayant pas subi directement les conséquences de ce problème.
Nous avons donc tenté de retrouver les autres caractéristiques de la phase de normalisation française, identifiées en seconde
partie. Nous avons ainsi pu voir que le recours massif à l’outil de la réglementation n’était pas aussi poussé, voire parfois
inexistant. Au cours des entretiens avec des professionnels des pays de l’ASEAN, il est révélé que ces pays ont en fait
subi les conséquences d’autres crises sanitaires de différentes natures et, étant donné l’état de développement différent
de ces pays et du type de profil de la crise, des phases de normalisation aux caractéristiques différentes se sont installées.
Avec l’exemple de la crise de l’Early Mortality Syndrome chez la crevette au Vietnam, nous avons pu décrire une phase de
normalisation sans grands changements réglementaires mais avec une action importante de la part des acteurs privés et
une mise en commun à grande échelle des pratiques de mesures de prévention.
L’identification d’une phase de normalisation présentant des différences de caractéristiques avec celles de la phase de
normalisation française entraine des écarts de pratiques entre la France et les pays de l’ASEAN. Ces différences sont
nombreuses, quelques-unes d’entre elles sont développées, mais ce qu’il est surtout important de souligner est que cela
pousse les pays exportateurs tels que la France à développer des stratégies pour tenter de compenser ces différences. Par
exemple, lors de la signature d’un accord bilatéral, les rédacteurs français vont essayer d’anticiper les demandes spécifiques
d’un pays en leur proposant une version adaptée. Par ailleurs, la nécessité de développer de nouvelles stratégies de gestion
58
du risque devient réellement nécessaire lorsque certains produits, tels que des produits de la mer et d’eau douce des pays
de l’ASEAN sont destinés à être exportés en direction de l’Union Européenne. Il incombe alors naturellement aux pays
membres de gérer le risque d’utilisation incorrecte de protéines animales transformées dans des produits importés. Nous
avons ainsi pu mettre à jour, notamment au Vietnam, l’existence d’une double filière : l’une produisant pour la consommation
locale et l’autre pour l’export exclusivement. Pour cette dernière, des organismes de certification privés d’origine européenne
ou américaine sont implantés dans ces pays producteurs pour chaperonner les bonnes pratiques de production pour des
produits quoi sont ensuite exportés. Si les pays tels que la France, alors devenus importateurs, se plient aux pratiques locales
à savoir une moindre utilisation de la réglementation et plutôt l’implantation d’organismes
privés, cela a néanmoins un impact considérable sur le développement et le profil des filières agricoles dans des pays tels
que le Vietnam.
Ainsi, nous avons pu démontrer que si les événements liés à une crise telle que celle de l’ESB peuvent avoir une influence
sur certaines politiques publiques, il en est également de même pour des phases a priori moins populaires comme les
phases de normalisation. En effet, l’étude des crises sanitaires par les sciences sociales est, la plupart du temps, centrée
sur les conséquences d’événements tels que les crises, les polémiques, voire les controverses. Cependant, nous avons pu
montrer, au cours de cette étude que la phase de normalisation, plus discrète, pouvait aussi avoir des répercussions sur la
construction de politiques publiques, comme celles liées à l’utilisation des protéines animales transformées.
En effet, la politique actuelle d’utilisation de tels produits est à considérer comme étant la conséquence de l’évolution de
la phase de normalisation, suite au problème de l’ESB. D’une part, cette phase a permis de générer la définition des PAT
ainsi que de préciser leurs conditions d’utilisation. Toutefois, la définition de cet ensemble reste fortement marquée par
l’expérience de l’ESB.
Une phase de normalisation se caractérise, en principe, par une stabilisation. Plusieurs stratégies peuvent être employées
pour y arriver, selon la nature du problème ou les différentes volontés des acteurs. Nous nous devons de citer, en premier lieu,
la nécessité de reconquérir la confiance du grand public. Cette volonté de regagner la confiance du grand public est motivée
par une crainte du retour de la polémique. Cependant, il est difficile de savoir si le grand public a encore des craintes sur la
manière actuelle de gérer le risque de l’ESB. Des sondages ont été faits pour tester l’opinion publique sur le changement
réglementaire de 2013, cependant les intitulés font mention des farines animales et les réponses sont davantage à lier avec
la confiance du système de gestion du risque de l’ESB à l’époque des crises55 .
Pour retrouver la confiance du consommateur, il est d’une part possible de communiquer sur les évolutions liées à un sujet
particulier. Nous avons pu voir, au contraire, que si les informations scientifiques relatives au sujet de l’utilisation des PAT sont
disponibles pour tous, ce sujet est cependant devenu très technique et n’est plus compréhensible par tous, ayant provoqué
son aliénation progressive. En fait, nous pourrions même avancer que la maitrise de ce sujet par une poignée de personnes
soit volontaire afin de confiner la gestion d’un problème et d’éviter toute nouvelle polémique, bien que pour le développement
de cette dernière, l’identification d’un nouveau danger soit nécessaire. Nous pouvons encore associer à cette stratégie,
la pratique de la précaution au nom de la santé publique, à laquelle, nous l’avons vu, les acteurs ont sans cesse recours,
provoquant un statu quo dans l’évolution des mesures liées à l’utilisation des PAT en alimentation animale.
Une autre stratégie que nous avons pu voir en parallèle est le recadrage du problème, sa redéfinition. Ainsi, afin de justifier
les évolutions réglementaires sur l’utilisation des PAT en alimentation animale, le terme de farines animales est remplacé par
celui des protéines animales transformées, permettant d’éloigner la connotation négative du problème de l’ESB. De plus, si
l’on conserve une volonté de préserver la santé publique humaine et animale de tout danger, une autre problématique est à
prendre en compte : celle de la durabilité des ressources protéiques pour l’alimentation animale.
Si nous pensions avoir observé une transposition des craintes relatives à l’ESB à des pays non impactés par cette épidémie,
tels que ceux de l’ASEAN, nous avons en fait pu démontrer que des phases de normalisation différentes se sont installées
à la suite de crises sanitaires différentes. Il en résulte des pratiques différentes dans le commerce de denrées alimentaires
qui, couplées à une crainte permanente, de la part de pays tels que la France, de voir resurgir une épidémie d’ESB, force
les acteurs de ces derniers pays à mettre en place des stratégies de gestion du risque au-delà de leur territoire national. Ces
stratégies peuvent avoir un impact considérable sur le profil des filières agricoles des pays tiers.
Nous l’avons vu néanmoins, une pratique commune à tous les pays a été identifiée : celle du recours à la précaution. En effet,
cette tendance, invoquée au nom de la priorité du maintien de la santé publique, a souvent pour conséquence de freiner des
évolutions possibles de pratiques, notamment dans l’utilisation de protéines animales transformées en alimentation animale.
Cependant, au cours des entretiens, un autre point a été soulevé :
« Tu peux avoir des intuitions, tu peux dire ce pays, pour les importations de pomme ou de viande, il est très très dur donc
je pense que c’est pareil pour les PAT notamment, mais en fait, pas forcément. Dans une position un peu dure, tu peux
avoir des éléments techniques purs, mais tu peux avoir des éléments commerciaux, de barrières non tarifaires, de machin,
enfin... ce qui veut dire que tu ne peux pas forcément corréler de façon très sure à une pratique générale du pays que tu vas
retrouver en général dans tous les secteurs, tous les produits... il y a plein d’autres facteurs qui vont jouer. [...] Et puis après
En 2011, un sondage mené par Familles Rurales et la confédération de la Consommation, du Logement et du Cadre de vie
révèle que 86.8% des votants (au nombre de 1841) considèrent qu’il est inacceptable de « réintroduire les farines animales,
même en l’absence de risque sanitaire et environnemental ».
55
59
il y a la question de est-ce qu’il y a vraiment un déficit, ou est-ce qu’ils ont ce qu’il faut sur place. [...] Tu peux très bien avoir
un pays qui est très dur. Imagine qu’ils n’arrivent pas trop à alimenter leurs besoins en PAT, pour leurs poissons, ben ils vont
peut- être être plus laxistes et avoir tendance à ouvrir plus facilement. Alors que par ailleurs ils peuvent être très durs pour
d’autres choses. »
Agent de la fonction publique en ambassade n°2, Pg 3-4.
La nécessité reste l’élément phare à étudier pour savoir si un pays serait enclin à s’ouvrir à un marché spécifique. Ces
nécessités sont importantes à comprendre avant tout pour qu’un professionnel français puisse envisager de mettre en
place un partenariat commercial avec un importateur d’un pays tiers. Elles sont partiellement spécifiques à chacun des pays
potentiels pour une ouverture de marché.
Néanmoins, une nécessité d’ordre mondiale semblerait poindre. En effet, quelques articles scientifiques commencent à
parler de changements sur la qualité nutritive des protéines végétales, dus aux modifications climatiques. En effet, Samuel S.
Myers et al. [26] expliquent qu’il est prouvé scientifiquement que le changement de concentration ambiante en CO2, du au
changement climatique, a une conséquence néfaste sur la qualité nutritionnelle des protéines végétales. Si cela représente
un danger pour l’alimentation humaine, d’autant plus que la population mondiale croît, cela implique également un souci
pour l’alimentation animale. En effet, le fait que les protéines végétales ne puissent plus alimenter correctement nos animaux
de rente a, lui aussi, des répercussions directes sur la sécurité alimentaire. Ce fait pourrait donc abonder en faveur de la
substitution des protéines végétales en alimentation animale et pourrait créer la nécessité mondiale de trouver de nouvelles
ressources. A ce titre, le régime de la précaution pourrait bien être mis de côté pour favoriser la sécurité alimentaire et les
protéines animales transformées pourraient représenter un substitut intéressant, à point nommé.
Evolution de la réglementation relative aux biocides au sein
du ministère de l’agriculture et son transfert au ministère de
l’environnement
Amal BOUTALEB, Inspectrice Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission effectuée du 14 avril 2014 au 25 juillet 2014 à la à la Direction Générale de l’Alimentation, Bureau des Intrants et de
la Santé publique en élevage
. Mémoire rédigé sous la direction de Gwenola LE NAOUR (SciencesPo Lyon)
Questions abordées par l’étude 56
Au cours de cette étude, nous avons vu que sous l’appellation de « produits biocides » sont regroupés divers produits
destinés à détruire, à repousser, ou à rendre inoffensifs les organismes nuisibles, à en prévenir l’action ou à les combattre par
une action chimique ou biologique.
Nous avons également constaté, que ces produits sont classés en quatre grands groupes que sont les désinfectants, les
produits de protection, les produits de lutte contre les nuisibles et les autres produits, tels que les produits antisalissures et
les fluides de taxidermie.
Par ailleurs, comme nous l’avons mis en évidence, c’est la réglementation européenne qui a stimulé la mise en place
de nouvelles réglementations qui imposent, notamment l’évaluation de toutes les substances actives aboutissant à leur
inscription sur une liste positive européenne.
Cette réglementation européenne, impose également, l’obligation d’obtention d’autorisation de mise sur le marché, à terme,
de tous les produits biocides contenant les substances actives approuvées.
Par la même occasion, il a été instauré, une harmonisation des déclarations et d’étiquetage pour tous les produits biocides
au niveau européen facilitant ainsi la tâche des autorités gouvernementales, des industriels mais également des utilisateurs.
Consécutivement, la réglementation française a adapté progressivement, à travers différents textes, ces réglementations
européennes qui sont elles-mêmes un relais de la politique environnementale internationale.
Cependant, durant la période transitoire dont nous avons fait mention dans la présente étude, [période pendant laquelle les
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction sans modification du résumé de mémoire établi par son auteur et
déposé avec ledit mémoire
56
60
substances actives sont en cours d’évaluation], la France a souhaité maintenir les anciens régimes d’autorisation pour les
produits biocides les plus dangereux, notamment les désinfectants et les insecticides. Les autres produits déjà sur le marché
étant quant à eux, dispensés d’autorisation préalable de mise sur le marché.
En matière de gestion, le Ministère en charge de l’agriculture, avait dans ses attributions, notamment, la compétence pour
traiter une partie des dossiers biocides. Il a vu, au cours du temps et de l’évolution réglementaire, cette mission confiée
progressivement au Ministère en charge de l’environnement avec le soutien technique de l’ANSES, de la commission des
produits chimiques et biocides et éventuellement, de tout autre organisme extérieur.
Pour appréhender au mieux l’évolution de la réglementation relative aux biocides, au sein du ministère en charge de
l’agriculture et son transfert au ministère en charge de l’environnement, nous avons donc, été amenés :
Dans un premier temps, à exposer la multiplicité et la complexité de la réglementation européenne et nationale concernant
les biocides.
Dans un second temps nous nous sommes attachés à relever la lenteur qui a prévalu pour la désignation de l’autorité
administrative compétente pour la gestion de ce dossier et à mettre en évidence les problèmes qui ont découlé de
l’interprétation des textes, notamment en ce qui concerne la définition des attributions et de la compétence de chacun des
bureaux en charge de ce dossier tant au sein du ministère en charge de l’agriculture qu’au sein du ministère en charge de
l’environnement.
Enfin, nous avons relevé les nombreuses démarches préalables au transfert de ce dossier, notamment, en ce qui concerne
la partie « évaluation » transmise à l’AFSSET, ainsi que la problématique de l’avenir de ce dossier « biocides ».
Aussi, nous avons tenté de mettre en évidence que loin d’être un processus facile, le transfert réglementaire de la gestion du
dossier technique « biocide » d’un ministère à un autre, a dû prendre en compte diverses interdépendances entre différentes
catégories d’acteurs, notamment : le ministère de départ, le ministère d’arrivée et les agences d’évaluation57 .
D’autant plus que les transformations réglementaires ont toujours, diverses origines qui peuvent être à la fois sociétales,
économiques et politiques, et qu’elles exercent une influence sur la politique environnementale compte tenu des enjeux liés
à la protection de l’environnement et au développement durable.
Ce processus de transformation ne s’est pas réalisé du jour au lendemain, c’est un processus long qui a été difficilement
ré-orientable. Il a nécessité l’implication de divers acteurs sur lesquels il a eu diverses conséquences.
Nous avons observé aussi, que les acteurs, qui sont au cœur de cette gestion des dossiers biocides, remplissaient chacun
des rôles divers et variés ; certains sont instructeurs, ils vérifient si les redevances ont été acquittées et si les dossiers sont
complets, d’autres sont transmetteurs vers les agences d’évaluation, d’autres encore sont « experts », ils émettent leurs avis
et d’autres enfin, sont délivreurs d’agrément ou d’autorisation de mise sur le marché.
Les objectifs de ces différentes personnes sont le plus souvent complémentaires et visent la même finalité, qui est l’instruction
globale des dossiers aboutissant au final à une notification au fabricant du résultat de cette instruction. Cela implique la mise
en place de moyens de coopération et de coordination pour assurer une gestion pleine et entière des dossiers.
Par ailleurs, étant donné, la complexité et la diversité des différents textes qui ont découlé de cette transformation
réglementaire, ont engendré la nécessité de recourir, à diverses reprises, aux services des affaires juridiques pour clarifier les
nombreuses interprétations contradictoires qui ont été relevées.
D’autant que la diversité d’acteurs en charge de ce dossier a provoqué dès le départ, la confusion dans l’esprit des
professionnels induisant un surcroit de demandes de renseignement et en conséquence, une charge de travail supplémentaire
pour les différents intervenants administratifs.
Finalement, le transfert de compétence qui est ensuite intervenu, n’a pas entraîné qu’une substitution ministérielle, il a
également induit la reconfiguration des systèmes d’administration publique, notamment à travers l’extension des attributions
des agences d’évaluation et le renforcement de leurs compétences.
Cette reconfiguration du système d’administration a en plus, contribué à la mise en place d’une simplification administrative
et a permis d’instaurer le « guichet unique » pour les professionnels, tout en améliorant l’efficacité du service public.
De même, l’importance accrue des attributions du ministère en charge de l’environnement et celles des agences a
effectivement eu des impacts organisationnels sur leurs structures.
En effet, le ministère de l’environnement a dû notamment procéder au recrutement et à la formation de nouveaux personnels.
Il a dû aussi, absorber le retard cumulé des dossiers non traités dont il a hérité du ministère en charge de l’agriculture.
L’agence d’évaluation a, quant à elle, dû également se réorganiser et demander des moyens supplémentaires de financement.
Pour ce qui est du ministère en charge de l’agriculture, la décision de transfert de cette gestion a été d’autant mieux admise,
que ses moyens, étaient en constante diminution, alors que sa charge de travail était croissante, ce qui a conduit à la
dégradation et à l’inertie du service public dont il avait la responsabilité ; et ce malgré les essais de transfert interservices qu’il
avait tenté d’effectuer à titre expérimental mais sans succès.
57
Le lidee P., « Le jeu du compromis : l’Etat et les collectivités territoriales dans la décentralisation en France »
61
La mise en application de la réglementation européenne a, ainsi, constitué pour ce ministère, une fenêtre d’opportunité pour
déléguer certaines de ses compétences au ministère en charge de l’environnement. Ceci, lui a permis aussi de se décharger
de certaines de ces attributions et par la même occasion des dossiers qu’il avait en souffrance, à l’exception cependant, des
attributions et des dossiers dont il continu a avoir la charge au titre de l’arrêté du 28 février 1957.
Par ailleurs, nous avons malheureusement constaté, au cours de notre étude, un manque regrettable d’information ou de
documents retraçant le déroulement des négociations intervenus dans la mise en œuvre des transferts.
En effet, le « turn-over » au sein des différents ministères et le manque d’archivage ne nous ont pas permis de retracer
l’historique et de disposer d’une vision claire et exhaustive sur les échanges qui ont contribué à l’arbitrage et aux choix des
décisions qui sont intervenues.
Enfin, l’analyse de la généalogie de la réforme a montré que c’est le ministère en charge de l’environnement, au regard de
ses prérogatives ayant trait à la protection de l’environnement, qu’il est le plus à même de prendre en charge les dossiers
des produits « biocides » parce qu’ils ont un impact important sur l’environnement.
Par ce transfert, la compétence et la légitimité environnementales de ce ministère ont été renforcées et consacrées.
Il reste entendu, pour l’avenir, que les agences d’évaluation sont susceptibles de voir le champ de leurs compétences étendu
à la gestion et à l’évaluation du dossier « biocide » au complet.
L’action publique dans un contexte de conflit. Biodiversité et
élevages. Illustration par l’exemple du loup
Anne JEANNIN, Inspectrice Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 14 avril 2014 au 25 juillet 2014 dans le service Biodiversité et Ressources Minérales de la Direction
Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement de la Région Rhône Alpes
. Mémoire de stage rédigé
sous la direction de Gwenola LE NAOUR (SciencesPo Lyon)
Questions abordées par l’étude 58
Le loup ! Rien que le nom éveille les esprits, avec les convocations de l’enfance, avec les contes et les chants, la beauté
de l’espèce ou la peur de la cruauté de celle-ci ; l’évocation du loup anime souvent les discussions, soulève l’intérêt voire la
passion.
Dans la réalité des activités humaines, économiques ou de loisir, la question du partage du territoire entre l’homme
et le loup structure les débats. En effet le loup est revenu au cours des années 1990, à une époque où la filière ovine en
général était en difficulté. Le monde agricole, appuyé par quelques élus, a montré sa détermination contre le loup qui exerce
une pression de prédation importante sur les troupeaux domestiques. Le monde non agricole, lui, se montre plus favorable
au retour du loup en France ; il constitue l’emblème du retour à la nature, que les hommes ont contribué à défigurer.
Ainsi apparaissent, comme pour le retour des autres grands prédateurs, lynx ou ours, des sources de conflits. Toutefois, à
la différence des siècles précédents, la résolution des conflits doit intégrer une nouvelle donnée : nos sociétés modernes
occidentales ont reconnu la nécessité de préserver l’environnement, dont la biodiversité. L’extermination du loup telle qu’elle
a autrefois été menée en France n’est plus envisageable.
Nous avons défini la problématique de notre étude sur le dépassement de ces oppositions, pour montrer comment l’action
publique peut naître entre groupes aux visions et intérêts différents.
Les controverses sont d’abord apparues chez les éleveurs du Sud-Est qui s’étaient déshabitués à la présence du loup
dans les massifs du Mercantour. Ils ont mis à profit par le pastoralisme des ressources fourragères rendues disponibles par
l’absence de prédateurs. Les particularités géographiques des terrains montagneux, avec reliefs, crêtes et arêtes permettent
de délimiter des secteurs où s’alimentent les petits ruminants sans clôture et en libre parcours. La valorisation fourragère de
ces milieux hétérogènes, difficiles d’accès, est possible grâce à la conduite pastorale des bergers qui guident les troupeaux
sur des versants choisis et les déplacent, en fonction de la pousse de la végétation et en évitant le sur-pâturage. Cette
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction sans modification du résumé de mémoire établi par son auteur et
déposé avec ledit mémoire
58
62
conduite souple et tranquille est basée sur le comportement naturel grégaire des ruminants, dont l’unité est en partie assurée
par la visibilité des animaux entre eux. L’arrivée du loup a impliqué des changements de pratiques des éleveurs, les rendant
plus contraignantes.
Nous avons d’abord montré comment les protagonistes avaient construit leur discours, au départ monolithiques et opposés.
Les partisans du loup utilisent une argumentation basée sur l’éthique, l’attachement à la nature, les nouveaux rapports que
l’homme doit établir avec son environnement. Reconnaître la place du loup aujourd’hui permettrait de réparer les erreurs
du passé et contribuerait à restaurer une Nature intacte pour les générations futures.
Pour ses partisans, représentés par
les association de protection de la Nature, le loup est revenu de manière naturelle, en traversant les Alpes du Piémont
italien au Mercantour français. La protection de cette espèce, symbole de la préservation de la biodiversité, s’impose par
la réglementation internationale, européenne et nationale.
Les prédations sur les troupeaux sont normales de la part d’une
espèce sauvage, ce sont les éleveurs qui doivent protéger les troupeaux : ils doivent mettre en place des mesures de
protection des troupeaux contre le prédateur, avec notamment des parcs clos et du gardiennage de proximité.
L’intérêt
écologique des loups est majeur au regard de la biodiversité et de ses prélèvements sur la faune sauvage blessée ou
malade, il régule les surpopulations ; protéger cette espèce, c’est participer à la restauration des équilibres naturels ; les
partisans du loup utilisent l’expression « espèce parapluie » pour signifier qu’en protégeant cette espèce, d’autres espèces
en profiteront dans le même habitat. Pour ces acteurs lycophiles, le pastoralisme ne doit plus être invoqué pour son intérêt
écologique ; l’augmentation de la taille des troupeaux conduit surtout à l’érosion des tapis d’herbage en altitude, et traduirait
une démarche de course aux subventions : des dispositifs agricoles soutiennent l’élevage de brebis par des primes, en zone
d’élevage avec des handicaps naturels. Les difficultés de la filière ovine n’ont rien à voir avec le retour du loup qui fait figure de
bouc émissaire, face aux difficultés structurelles des exploitations ovines, à un marché mondial agressif ou à des importations
massives sous accords commerciaux.
Les défenseurs de la cause agricole vont développer une argumentation sociale, basée sur le constat que l’agriculture crée
du lien, des emplois, maintient l’activité professionnelle sur des territoires qui resteraient déserts ; ce registre argumentaire
évolue mais trouve les mêmes résonances avec l’arrivée du loup en plaine.
Pour ses détracteurs, le loup a été artificiellement réintroduit, par des écologistes qui aurait facilité l’expansion du loup hors
d’ Italie, ou des forestiers souhaitant le retour du prédateur pour freiner les dégâts des chevreuils sur les forêts. Dans de tels
cas, les loups ne répondent plus aux impératifs de protection, dès lors qu’ils ne sont plus dans leur « habitats naturels »,
selon les dispositions de la Directive « Habitats »59 . D’ailleurs, les loups se sont habitués à l’homme, ils ne sont plus sauvages
et prélèvent leur nourriture dans « des garde-manger » qui leur sont offerts, auxquels ils s’adaptent. Ce ne sont pas des
individus mais des meutes entières qui auraient pris goût aux troupeaux domestiques. Pour ces ruraux, le pastoralisme
contribue à la bonne santé de la montagne en la préservant de la fermeture des paysages ; il enrichit ainsi sa biodiversité
floristique et faunistique.
L’opposition entre les différentes parties prenantes traduit au départ la difficulté à formuler une définition publique du problème,
reconnue par un plus grand nombre.
Au début des année 1990, il s’agissait d’un problème de protection des troupeaux, lié au pastoralisme ; l’augmentation du
nombre de victimes du loup en raison de son expansion géographique et de la croissance de sa population a permis de
formuler une définition du problème, permettant sa mise à l’agenda politique vers 1996.
Le loup apparaît lui-même comme un acteur puisqu’il suscite des échanges de parole à l’origine de « mieux vivre ensemble
». Les groupes mobilisés étudient ainsi les relations que chacun tisse avec le loup, lycophiles ou lycophobes, pour se
connaître, se reconnaître, voire s’associer ou s’allier pour travailler ensemble et former des groupes d’action. Ainsi est née
une dimension collective de la concertation, entre groupes d’acteurs qui ont su dépasser leurs revendications de départ,
partisanes ou corporatistes pour sortir des stériles confrontations du syndrome NIMBY : Not In My Back Yard, où chacun
peut reconnaître le bien-fondé de tel argument, aménagement ou action, mais ne pas en subir soi-même les effets.
La convocation de la biodiversité dans son ensemble a permis une nouvelle montée en généralité, mais s’est de nouveau
heurtée au paradoxe des biodiversités différentes, chaque groupe reconnaissant le rôle de l’autre à sa préservation.
Nous avons ensuite exploré les espaces de concertation et les tentatives de rapprochement qu’exercent des acteurs
intermédiaires.
Le Groupe National Loup est une instance de concertation présidée par le ministère de l’écologie et du
développement durable, en étroite collaboration avec le ministère en charge de l’agriculture. Il réunit au moins trois fois par
an les élus, organisations professionnelles agricoles et associations de protection de la nature, en présence des services
déconcentrés de l’État et de l’Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage, chargé du suivi scientifique de l’espèce
Loup. Les différents partenaires impliqués dans la mise en œuvre de la politique publique relative au loup peuvent dialoguer
et proposer des mesures en faveur du partage du territoire grâce à cet outil de médiation. Ces espaces de concertation sont
déployés selon les contextes d’expansion des territoires des loups, au niveau régional et départemental.
Il apparaît que des élus peuvent porter une cause au niveau local puis national, facilitant parfois des avancées majeures,
comme dans la mise en œuvre expérimentale de nouvelles mesures du protocole technique d’intervention sur les populations
Directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de
la flore sauvage
59
63
de loup (effarouchement, tirs de défense des troupeaux ou opération de prélèvement).
Des initiatives de rapprochement peuvent provenir des chasseurs qui incitent les éleveurs à plus s’appuyer sur les interventions
de tirs prévues par la réglementation. La nette progression du loup sur les territoires géographiques, et l’accroissement
important du nombre de victimes ont conduit la profession agricole à adopter un net raidissement de leur position : ils
demandent plus d’efficacité du Plan d’action national Loup, notamment dans la mise en œuvre du protocole technique
d’intervention. Pour cela, l’aide des chasseurs permet de rendre les tirs plus efficaces, lorsque ceux-ci ont été autorisés
après étude des possibilités de dérogation à l’interdiction de détruire les espèces protégées. Par ailleurs, des projets de
partage d’expérience, au niveau départemental mais aussi avec des pays européens, favorisent le rapprochement des
chasseurs et éleveurs vers les associations naturalistes.
Dans le cadre de la mission technique que nous avons menée pour le compte de la Direction Régionale de l’Environnement,
de l’Aménagement et du Logement (DREAL), nous avons proposé une étude permettant de réviser le barème des
indemnisations des dommages causés par le loup aux troupeaux domestiques. En effet, les instruments financiers
permettent eux-aussi l’acceptabilité du loup par les éleveurs qui en subissent les dommages. Outre ces indemnisations, les
éleveurs bénéficient du financement des mesures de protection des troupeaux par l’Europe, par le biais du Fonds Européen
Agricole pour le Développement Rural. Le Ministère en charge de l’agriculture cofinance ces aides européennes ; il prend en
charge la totalité des crédits d’urgence alloués aux services de l’État en département pour qu’ils soient rapidement attribués
aux éleveurs en cas de crise, par exemple pour acheter rapidement des parcs de regroupement nocturne en estives ou
embaucher un berger.
En conclusion, nous constatons que l’action publique peut naître de la concertation et de la coopération entre groupe
apparemment opposés ; au niveau des pratiques de terrain, dans l’action, comme par exemple lors des procédures de
constats des dommages occasionnés par le loup, les acteurs apprennent à se connaître ; des arrangements locaux peuvent
émerger, favorisant la flexibilité de certaines dispositions réglementaires ; par exemple, des dérogations à l’interdiction de
destruction des loups permettent en cas de « dommages importants » des tirs de prélèvement sur les loups. Cette notion de
dommage important est laissée à l’appréciation des préfets ; l’injonction nationale ou européenne à préserver l’Environnement
peut être vue à travers le prisme local du nécessaire aménagement des territoires ; les éleveurs ont largement contractualisé
par le biais des mesures agro-environnementales pour participer au développement et à la préservation des territoires.
La présence du loup, bien patrimonial dont la protection a été impulsée par une reconnaissance mondiale en faveur
de l’Environnement, dans des espaces ruraux dont le développement doit être décliné selon les originalités territoriales,
soulève toujours des conflits ; la crise n’en est pas à son terme puisque des manifestations, plaidoyers, questions directes à
l’Assemblée Nationale en illustrent toujours l’actualité.
L’action publique apparaît ainsi de plus en plus complexe en raison de l’empilement des niveaux de réglementation et des
valeurs à promouvoir ; d’autant plus complexe que l’augmentation des acteurs apporte de l’inertie à l’élaboration et à la
mise en œuvre de nouvelles actions.Les expérimentations de participation collective par la mise en consultation publique
des projets de réglementation dans le domaine environnemental répondent aux exigences de transparence des citoyens ; il
semble néanmoins que leurs contributions ne puissent infléchir des décisions déjà prises, surtout si auparavant elles ont fait
l’objet d’annonce publique.
Mais par ailleurs, il nous paraît important de d’approfondir la base des discours argumentaires permettant la montée en
généralité pour qu’un nombre plus important d’acteurs prennent part à la résolution des conflits ; pour cela, une caution
scientifique s’avère indispensable ; par exemple, des études approfondies doivent étayer des assertions aussi bien des
pro- que des anti-loups qui veulent s’arroger la préservation de la biodiversité. De la même manière, il ne semble pas que
la preuve ait été apportée que tuer des loups diminue le nombre d’attaques ou l’ampleur des dégâts, ni même que ces
prélèvements ne favorisent pas une augmentation des portées comme cela a déjà été observé suite à des campagnes
d’éradication.
Plutôt que de vouloir résoudre les conflits, il apparaît que ceux-ci permettent d’accompagner les changements. La diversité
des pensées, des humeurs, les dissonances même sont sources de vitalité, rendant les actions publiques adaptables aux
enjeux variés des situations territoriales.
Pour juger de l’acceptabilité du loup, il convient de connaître le seuil d’acceptabilité des prélèvements du loup sur les
troupeaux, à côté des autres pertes dues aux maladies, aux dérochements, disparitions et attaques de chiens errants ;
certains éleveurs acceptent parmi ces autres risques, celui de donner « la part du loup ».
Collaboration des services de l’Etat du Morbihan sur la
déclinaison des dispositions ORSEC spécifiques des épizooties
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction sans modification du résumé de mémoire établi par son auteur et
déposé avec ce mémoire
60
64
Sandy LECOQ-ESPALLARGAS, Inspectrice Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 14 avril 2014 au 25 juillet 2014 à la Direction Départementale de la Protection des Populations du
Morbihan . Mémoire de stage rédigé sous la direction de Frédéric MOUGEOT (Centre Max Weber)
Questions abordées par l’étude 60
En lien avec la sensibilisation croissante de la population française aux risques naturels et technologiques, la sécurité civile
et le dispositif d’organisation de la réponse de sécurité civile (ORSEC) sont devenus des figures incontournables du secours
et de la gestion de crise. La déclinaison du dispositif ORSEC pour la gestion du risque sanitaire particulier des épizooties
nécessite la collaboration de différents services de l’Etat. La réalisation de cette mission en tant qu’inspecteur stagiaire de
la santé publique vétérinaire à la Direction départementale de la protection des populations du Morbihan a été l’occasion
d’étudier la manière dont collaborent les services de l’Etat de ce département dans le cadre d’un tel projet. Le matériau
analysé a été récolté par le biais d’entretiens semi-directifs et d’observations réalisés sur une période de stage de trois mois
et demi.
Le dispositif ORSEC implique pour chaque zone de défense et chaque département, un recensement des risques et des
moyens d’action privés et publics mobilisables, une préparation et un dispositif global d’organisation inter services de gestion
des situations d’urgence. Il repose sur des dispositions générales définissant une organisation capable de s’adapter à tout
type d’événement, complétées par des dispositions spécifiques propres à certains risques particuliers.
C’est la voie hiérarchique préfectorale qui institue le dispositif ORSEC comme une priorité des services. La préfecture constitue
le dénominateur commun aux services et joue un rôle rassembleur. Mais cette priorité est relative et reste modulable, car les
services départementaux de l’Etat travaillent dans une hiérarchie bicéphale où des missions préfectorales concurrencent des
missions ministérielles. En effet, la réorganisation des institutions survenue en 2010 a visé à harmoniser l’action de l’Etat en
un groupe plus resserré de services qui fait appel à plus de transversalité. Partagés entre leurs diverses missions, la résolution
de cette équation par les agents fait appel au facteur humain : les agents gardent la liberté de hiérarchiser les priorités parmi
les priorités en fonction des sujets auxquels ils sont le plus sensibles.
Les services reçoivent donc l’instruction mais ce sont les agents qui se l’approprient. Ils se saisissent individuellement du
projet en fonction de leur vécu, de leur logique, et de leur culture. Ils sont sensibles à l’importance d’un sujet parce qu’ils
se sentent concernés professionnellement et personnellement. L’appropriation du projet devient complète si la réception
individuelle est accompagnée d’échanges avec les autres. L’effort de transmission passe par une traduction du sujet dans
le langage des autres et via le prisme de leurs intérêts. Les agents enquêtés proviennent de milieux professionnels différents
mais se rejoignent au travers de valeurs communes, d’un vécu commun. La compréhension mutuelle autour d’un sujet
partagé se révèle bénéfique pour les projets communs car la collaboration gagne alors en fluidité et en motivation.
On constate que le dispositif ORSEC met à profit cette appropriation individuelle et collective en favorisant l’établissement de
liens entre les services et entre les agents pour créer un réseau soudé d’acteurs. C’est en créant des liens, que l’on constitue
un réseau. ORSEC utilise ces liens humains pour les valoriser dans la coopération professionnelle. A la faveur de rencontres
en réunion ou en exercice, la connaissance mutuelle est renforcée et une culture commune de crise est cultivée. L’idée est
que des acteurs plus impliqués sont des acteurs plus efficaces. Toutefois cette démarche participative bénéfique est limitée
par la lourdeur de sa mise en oeuvre. Il apparaît ainsi qu’ORSEC est également un instrument de gestion de groupe : il clarifie
les tâches de chacun, normalise les pratiques, fixe une orientation opérationnelle au groupe. ORSEC valorise une démarche
collective et participative. Ainsi, l’intégration de risques particuliers, tel que le risque sanitaire, au champ d’ORSEC contribue
à un effacement des frontières entre les services de l’Etat, dont la mission commune est de veiller à la sécurité des biens et
des personnes.
A la lumière des résultats de notre étude, il est possible d’identifier des pratiques favorisant l’implication des services de l’Etat
sur les sujets sanitaires :
Nous avons vu qu’un historique commun contribue à réduire les clivages professionnels. A côté des contacts procéduraux,
ce sont les contacts dépouillés de leur caractère formel qui permettent aux agents de se rapprocher et de créer des liens.
Il pourrait donc être utile d’exploiter l’ensemble des opportunités offertes par ORSEC pour rencontrer les autres services.
Notamment en participant aux exercices auxquels la DDPP est conviée, et réciproquement, en organisant des exercices
sur les épizooties avec un scenario nécessitant l’intervention de services autres que ceux de la DDPP. En 2014, l’exercice
régional annuel portait sur la réalisation des prélèvements et de l’enquête épidémiologique en cas de suspicion de peste
porcine. On pourrait par exemple imaginer en 2015, un scenario de mise en place du périmètre réglementé dans le cadre
65
d’une confirmation de fièvre aphteuse.
Par ailleurs, pour traduire la problématique, il semble important que les agents soient davantage informés de la réalité du
quotidien des agents des autres services. Plus qu’une connaissance des missions théoriques aux intitulés peu parlants,
ce sont les actions concrètes des agents et leur contexte de réalisation (travail au QG, en extérieur, au bureau derrière
l’ordinateur...) qui seraient intéressants à visualiser. Il serait alors plus facile de présenter les projets sanitaires sous un aspect
concordant avec les centres d’intérêts des autres services. De la même manière, il pourrait être utile de mettre l’accent sur
le lien existant entre santé animale et sécurité humaine. Comme l’étude l’a mis en évidence, les agents des services de l’Etat
mettent toute leur motivation dans la réalisation des missions qui leurs sont confiées avec le souhait de travailler pour l’intérêt
général. C’est au travers de valeurs personnelles communes avec leurs collègues que les agents sont encore plus motivés
à collaborer.
Il est par ailleurs important de veiller à expliciter systématiquement le vocabulaire technique, dont on ne perçoit pas forcément
le caractère spécifique en tant qu’agent du domaine, et dans la mesure du possible, de n’utiliser que du vocabulaire partagé,
de manière à ne communiquer qu’à l’aide d’un langage commun.
La multiplication des langages se retrouve dans les nouveaux moyens de télécommunication. Alors que des auteurs tels
que Canos et ses collaborateurs expliquent que l’utilisation de logiciels de planification facilite l’élaboration et le pilotage des
plans d’urgence, à l’heure où sont utilisés des tableaux de type excel, les services de l’Etat se heurtent à l’incompatibilité de
leurs logiciels de base : logiciels de traitement de texte, outils cartographiques et sécurité de réseau sont autant d’entraves à
une collaboration fluide entre les services. L’avancée que constitue la publication du PISU de la DDPP du Morbihan sur son
site intranet, est freinée par le fait qu’aucun autre service n’en possède les droits d’accès. On peut en revanche souligner
l’existence du logiciel SYNERGI qui est utilisé en partie comme une plateforme de partage de documents. A défaut d’être
un espace de travail collaboratif, il participe à l’harmonisation des pratiques et contribue à la mutualisation en permettant le
partage limité des plans élaborés par d’autres départements.
En outre, lors des consultations des parties prenantes sur les futures mises à jour du plan, on ne peut que recommander la
demande d’une réponse en provenance de chaque service, même sommaire, pour s’assurer que les agents ont effectivement
pris connaissance du document. Pour maintenir les services sensibilisés sur le sujet particulier des épizooties, il est proposé
de mettre à jour les dispositions spécifiques correspondantes plus fréquemment, par exemple tous les cinq ans.
Enfin, compte-tenu du temps nécessaire à la réalisation de la mission et du contexte de réduction des effectifs dans les
services de l’Etat, on peut s’interroger sur l’utilité d’élaborer des dispositions originales dans chaque département. Les
spécificités locales justifient-elles une déclinaison départementale? Il pourrait être envisagé de mutualiser ce type de
document entre les départements d’une même région, voire de partager les retours d’expérience au niveau national.
Aménagement de la lutte contre la flavescence dorée de la
vigne en Bourgogne. Regards sur les plans de lutte 2013-2014 :
une enquête auprès des viticulteurs et des techniciens viticoles
Marie-Laure CHEVALIER, Inspectrice Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 14 avril 2014 au 25 juillet 2014 au SRAL de la Direction Régionale de l’Alimentation, de l’Agriculture et
de la Forêt de Bourgogne. . Mémoire de stage rédigé sous la direction d’Amandine GAUTIER (SciencesPo Lyon – ENSV
VetAgro Sup – Triangle - ACSPAVE)
Questions abordées par l’étude 61
J’ai réalisé mon stage de fin d’études (Master PAGERS et CEAV-SPV) du 15 avril au 25 juillet 2014 au Service Régional de
l’Alimentation (SRAL), un des services de la DRAAF62 de Bourgogne. Plus précisément, j’ai intégré le pôle « santé végétale
» qui est en charge de la surveillance biologique du territoire, dont la lutte contre les organismes nuisibles réglementés, et
des inspections dans le domaine des productions végétales. Ma mission a consisté à participer à la construction, la mise en
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction sans modification du résumé de mémoire établi par son auteur et
déposé avec ce mémoire
62
Direction régionale de la l’alimentation, l’agriculture et la forêt
.
63
Le terme «flavescence dorée de la vigne» sera abrégé par l’acronyme FD dans cette note.
61
66
œuvre et à l’analyse du dispositif qui permet d’adapter les traitements insecticides visant le vecteur de la flavescence dorée
de la vigne63, maladie réglementée présente en Bourgogne, dans les départements de Côte d’Or et de Saône-et-Loire. Le
mémoire réalisé dans le cadre du CEAV-SPV «Lutte contre la flavescence dorée de la vigne en Bourgogne : aménagement
de la lutte en 2014» décrit la maladie, son insecte vecteur et le cadre réglementaire des mesures de lutte contre cette maladie
de la vigne, analyse les mesures mises œuvre dans le vignoble de Bourgogne et l’évolution des stratégies de lutte déployées
par les autorités sanitaires et les différents acteurs de la filière.
Dans le cadre du Master «Politiques publiques et gouvernements comparés», parcours : «politiques de l’alimentation et
gestion des risques sanitaires» les responsables des études demandaient la problématisation et l’analyse d’une politique
publique autour du thème du stage. Je projetais initialement de réaliser une analyse de la mise en œuvre des plans de lutte
sanitaire en Côte d’Or et en Saône-et-Loire, de leur mise à l’agenda et de leur élaboration, leur exécution dans le contexte
de la nouvelle gouvernance sanitaire jusqu’à l’évaluation des mesures mises en œuvre. Après quelques semaines de stage, il
m’est apparu que la construction du nouveau plan de lutte et sa mise en œuvre était essentiellement questionnée autour du
sujet «est-ce que tout le monde va adhérer à cette action ?». En effet, suite à la médiatisation au cours de l’hiver 2013-2014
de «l’affaire Giboulot», des dissensions sont apparues dans la profession viticole et sont très souvent évoquées dès que le
sujet de la lutte contre la FD est abordé et leurs conséquences sur les mesures mises en place pour 2014 sont discutées64 .
J’ai donc cherché à comprendre, à partir des observations faites sur mon lieu de stage, lors de réunions techniques ou
publiques et d’entretiens avec les viticulteurs ou leur entourage professionnel (techniciens viticoles), comment les différents
acteurs ont participé à l’élaboration du dispositif et comment ils mettent en pratique et perçoivent le plan de lutte. Mon
objectif était de relever et d’analyser les stratégies65 des acteurs (dont les groupes d’intérêts66 qui apparaissent dans le
champ de cette action publique) et de comprendre comment chacun a défendu sa position. L’identification des freins à la
mise en œuvre des plans de lutte et des critiques émises à son encontre m’ont permis de mieux comprendre les refus de
certaines actions prescrites dans le plan de lutte.
C’est donc par une approche organisationnelle et en cherchant à identifier les règles informelles qui permettent de comprendre
les relations et interactions entre les acteurs, que j’ai analysé les modalités de mise en œuvre de l’action collective. L’étude des
arguments développés par les acteurs, notamment lors de coopération ou de désaccord, et leurs formes de justifications67
a été réalisée à partir des données collectées :
- dans les documents du service «pôle santé végétale», courriers adressés au service et dossiers, informatiques le plus
souvent, mis à ma disposition,
- sur les sites Internet des différentes institutions engagées dans la lutte contre la FD,
- par une «revue de presse» étendue à la presse locale, la presse professionnelles, la presse nationale, les émissions de radio
et extraits de journaux télévisés traitant de la FD et souvent focalisés sur l’»affaire Giboulot»,
- lors des observations consignées dans mon carnet de terrain,
- lors d’entretiens semi-directifs sollicités auprès de viticulteurs et d’une technicienne viticole (cinq entretiens d’une durée
d’environ 2h30).
Cette démarche empirique, associant observations participantes et entretiens semi-directifs, m’a permis d’ouvrir des pistes
de réflexion, d’émettre des hypothèses et enfin, par la connexion avec des concepts et théories sociologiques, de proposer
une analyse.
Rappel des faits : l’élaboration du plan de lutte contre la FD en 2013 dans les départements de Saône-et-Loire et de Côte
d’Or s’est faite dans un contexte particulier. Après une période entre 2004 et 2010 où la maladie a été détectée dans des
parcelles sous forme de pieds isolés dans le centre de la Saône-et-Loire et le sud de la Côte d’Or, foyers rapidement détecté
et éradiqués, un foyer bien plus important est détecté dans le nord-Mâconnais (dit foyer de Plottes) fin 2011. La situation
épidémiologique est jugée grave et après une année de lutte dans un périmètre étendu aux communes environnantes,
l’extension redoutée de la maladie au nord et au sud de la zone initialement atteinte est constatée fin 2012. Alertés par la
situation épidémiologique de la maladie en Saône-et-Loire, les représentants de la profession viticole ont demandé un plan
d’action rigoureux dès l’automne 2012. En 2013 les dispositifs de lutte adoptés par arrêtés préfectoraux ont concerné la
Saône-et-Loire, la Côte d’Or et l’Yonne. Ces plans sont spécifiques à chaque département, toutefois, l’ensemble du vignoble
est inclus dans le périmètre de lutte obligatoire (PLO). En Saône-et-Loire trois traitements insecticides contre le vecteur de
la maladie sont imposés ainsi que des prospections collectives encadrées par des techniciens viticoles, l’arrachage de tout
pied présentant des symptômes de la maladie et une mesure de prévention, assurant le traitement des plants contre la FD
Monsieur Emmanuel Giboulot est un viticulteur de Beaune travaillant en biodynamie ayant refusé d’effectuer le traitement
insecticide obligatoire contre le vecteur de la FD au cours de l’été 2013, une des mesures de l’Arrêté Préfectoral pris dans le
cadre de la lutte contre cette maladie en Côte d’Or Un procès verbal a été dressé par les agents de la DRAAF à son encontre
et le jugement de cette affaire à Dijon en février 2014 puis la décision du jugement rendue en avril 2014 ont largement mobilisé
le monde viticole, l’espace médiatique et la société civile.
65
D’après Crozier et Frieberg dont les méthodes et concepts fondent la sociologie des organisations, la stratégie des individus ne repose pas uniquement sur des critères calculés à partir d’un intérêt clairement identifiable ; elle met en jeu l’utilisation
des règles formelles et informelles du système. Un acteur dispose donc de ressources qu’il peut mobiliser stratégiquement
afin de réaliser le but qu’il s’est fixé. CROZIER M., FRIEDBERG E. «L’acteur et le système» Paris, Seuil, Coll.»Points»1977
.
66
La notion de groupe d’intérêt est rattachée à la « la fonction première de ces groupes » qui est de « faire pression sur les
détenteurs de positions de pouvoir bureaucratico-politiques en accédant à la position d’acteur pertinent reconnu, ou à tout
le moins existant, dans la définition des politiques publiques en général ou de certaines politiques sectorielles ». OFFERLE
Michel, Sociologie des groupes d’intérêts, Paris, Montchrétien, 1994.
67
BOLTANSKI L., THEVENOT L. «De la justification. Les économies de la grandeur». Gallimard, 1991.
64
67
est obligatoire. Des analyses de laboratoires sont prévues et une cotisation est prélevée auprès de chaque viticulteur de
Bourgogne pour financer cette action. En Côte d’Or, des mesures identiques à celles en vigueur en Saône-et-Loire sont
adoptées : seule différence le traitement insecticide est limité à une application et ne concerne pas les vignobles isolés du
Châtillonnais et de l’Auxois.
Au moment de la mise en œuvre des traitements insecticides en juin 2013, les premières critiques à l’encontre du plan de
lutte se font jour en Saône-et-Loire comme en Côte d’Or. Pourtant au moment du bilan de la campagne de lutte, dès la fin
de la prospection du vignoble, un constat plutôt positif est réalisé par les autorités sanitaires et les structures professionnelles
viticoles sur les mesures mises en place : les prospections ont permis de détecter des pieds isolés atteints et dans les foyers
«historiques» une seule parcelle de vigne est atteinte au point d’être arrachée (soit une surface de 0.11 ha en 2013 contre
11.4 ha fin 2012). Toutefois, la mobilisation des viticulteurs dans les années à venir reste nécessaire car la maladie a été
détectée dans de nouvelles communes et reste présente sur plus d’une trentaine de communes dont quatre situées en
Côte d’Or.
Parmi les critiques exprimées à l’encontre du plan de lutte, deux points de controverse se révèlent particulièrement intéressants
à analyser. Le premier point concerne les aspects environnementaux et la santé des personnes qui sont exposées aux
traitements insecticides, le second est relatif à l’image divisée de la «profession» viticole bourguignonne.
Différents acteurs sont présents lors de l’élaboration et de la mise en œuvre des plans de lutte :
- les représentants de la profession, la Confédération des Appellations et des Vignerons de Bourgogne68 , les Chambres
d’Agriculture Départementales (CAD),
- des services techniques dans le domaine phytosanitaire : FREDON - Fédération Régionale de lutte et de Défense contre
les Organismes Nuisibles, CAD, SEDARB69 ,
- et les services de l’Etat (préfecture, DRAAF, DDT70 ).
Certaines personnes peuvent se sentir écartées de ce processus par rapport aux personnes détenant l’expertise et
l’information.
Certains interlocuteurs sont privilégiés et partagent les mêmes stratégies (services de l’Etat, représentants professionnels
élus, FREDON). Les espaces et sujets de négociation dans l’élaboration du plan de lutte apparaissent bien définis et
certains interlocuteurs sont donc privilégiés : Lowi 71 puis Peters72 définissent pour ce type de relation « symbiotique » entre
représentants des groupes d’intérêts, agences de l’Etat et élus, dont les intérêts deviennent similaires, la notion de « triangle
de fer », forum relativement fermé. Un tel réseau d’acteurs et l’existence de coopérations récurrentes entre les acteurs d’une
politique publique conduit P. Hassenteufel73 à constater que « les politiques publiques ne sont pas seulement produites par
l’État mais par un ensemble plus large d’acteurs publics et privés en interaction ».
La controverse développée autour du plan de lutte contre la FD a permis à certains acteurs d’exprimer une certaine distance
vis à vis des rapports d’autorité classiquement établis. Selon P. Lascoumes74 , cette remise en cause des autorités politiques
ou scientifiques est le reflet d’une situation démocratique exigeant des espaces de discussion et le besoin de compréhension
des acteurs pour les décisions qui les concernent. Ainsi l’organisation de la lutte contre la FD en Côte d’Or et en Saône-etLoire adoptée dans les AP pour 2014 reprend largement les propositions faites par la «profession» viticole qui a cherché un
compromis et se satisfait d’avoir su y associé toutes ses «sensibilités». La profession viticole est très diversifiée en Bourgogne
où coexistent : des vignobles de prestige et des caves coopératives, des circuits de vente directe et du négoce, un fort
développement de la viticulture en agriculture biologique (AB) ou en biodynamie et une viticulture plus conventionnelle, des
démarches mettant en avant le terroir et des secteurs plus mécanisés...
Si les justifications75 expliquent en partie les critiques des uns envers les autres et la naissance de la controverse sur la
nécessité ou l’efficacité de telle ou telle mesure du plan de lutte contre la FD, on peut remarquer de nombreux points de
compromis pour le bien commun qui permettront d’apaiser les tensions et de trouver un accord pour 2014. En effet le
«monde civique» est partagé par les vignerons en AB ou en viticulture conventionnelle, les agents des services de l’Etat et
les responsables de la «profession» notamment dans la notion d’action collective et du fait qu’aucun ne néglige les impacts
négatifs sur l’environnement de certaines mesures. La nécessité de trouver un compromis qui réunisse la profession et
qui permet d’être aussi efficace, de mobiliser tous les acteurs est également admise par tous. La forte cohérence des
justifications des vignerons bio qui veulent accéder au statut «d’acteur entendu» dans le nouveau plan de lutte sera un atout
dans la négociation à venir.
Ainsi les aménagements de la stratégie du plan de lutte pour 2014, permis par une meilleure connaissance de la situation
La CAVB fédère les ODG (Organisme de Défense et de Gestion des appellations d’origine) et les vignerons indépendants.
Service d’éco-développement agrobiologique et rural de bourgogne
.
70
Direction départementale des Territoires.
71
«Public administration review» (1969)
.
72
«American Public Policy», Mac Millan, 1986.
73
P. HASSENTEUFEL, « De la comparaison internationale à la comparaison transnationale ». Les déplacements de la
construction d’objets comparatifs en matière de politiques publiques, Revue française de science politique, 2005/1 Vol. 55,
pp. 113‐132.
74
P. LASCOUMES, «Penser les sciences, les techniques et l’expertise aujourd’hui», Groupe d’analyse des politiques publiques, Ens-Cachan, Intervention au séminaire, 25 janvier 2001
.
75
La justification, selon Boltansky et Thevenot (in «De la justification : les économies de la grandeur» Gallimard, 1991), est le
principe (ou bien commun) auquel se réfère les acteurs.
76
En agriculture, on appelle «intrants» les différents produits apportés aux terres et aux cultures qui ne proviennent pas de
l’exploitation agricole. Les principaux intrants sont les produits fertilisants, les produits phytosanitaires, les semences et les
plans.
68
69
68
sanitaire du vignoble, reposent sur le renforcement des mesures de prospections, d’arrachage, des pieds traités à l’eau
chaude et une adaptation de la lutte insecticide. Cette adaptation, mesure essentielle, est réalisée selon le niveau de risque
local (groupes de communes ayant des facteurs de risques communs identifiés) permettant de définir des zones sans
traitement insecticide, des zones à un, deux ou trois traitements en fonction de la présence de pieds contaminés sur les
parcelles viticoles et de la présence avérée du vecteur. Ces mesures permettent de diminuer sensiblement l’utilisation de
produits phytosanitaires tout en renforçant la lutte dans les zones les plus exposées.
Des évolutions dans la méthode d’élaboration et mise en œuvre du plan de lutte sont également constatées :
- les phases de dialogue en amont de la décision ont permis de faire d’un opposant pressenti (le «Collectif de vignerons
contre la FD - comprendre pour agir», association créée en décembre 2013) un acteur participatif en accordant l’accès au
processus de d’élaboration et de consultation,
- la communication sur les mesures de lutte, leur justification et les enjeux a été largement développée et coordonnée,
- des mesures comme la réorganisation des contrôles «intrants»76 par les services de la DRAAF, ne mettant pas uniquement
l’accent sur le contrôle de la réalisation des traitements insecticides obligatoires, permettent également de répondre à
certaines critiques.
La controverse sur les dispositifs de lutte contre la FD ouverte en 2013 dans les départements de Côte d’Or et de Saôneet-Loire a peut-être donné une image non désirée de la viticulture bourguignonne qui tient fortement à son image liée à ces
climats uniques et ses vins exceptionnels. L’analyse de l’évolution du dispositif montre un tout autre aspect, un processus
d’apprentissage décrit par P. Lascoumes77 qui permet d’élargir le champ de la politique développée, échappant aux aspects
limités à la maîtrise du problème sanitaire, pour s’ouvrir aux nouveaux enjeux sociétaux. Elle remet en cause la position
des acteurs établis, les obligeant à prendre en compte d’autres intérêts, à revoir leur stratégie et permet à de nouveaux
acteurs de s’organiser, d’entrer dans l’espace des négociations et de passer d’une attitude d’opposition à une action plus
constructive. Cela n’est possible que si des efforts sont faits dans la recherche d’un compromis, facilité par des valeurs
communes. Cet effort est récompensé par le climat plus apaisé dans lequel se déroule cette année la campagne de lutte.
Toutefois la mise en œuvre du plan de lutte contre la FD a été complexifiée et demande un effort de communication qui a été
anticipé et assumé par les services de l’Etat et par les organisations professionnelles. L’organisme à vocation sanitaire auquel
l’Etat délègue les missions de surveillance et de coordination, la FREDON, s’appuie sur les organisations professionnelles
viticoles (CAVB, BIVB78 ) et les structures offrant des services techniques aux viticulteurs (SEDARB, CAD, IFV79 ) pour assurer
ces missions. Elle doit aussi renforcer et mobiliser le réseau de viticulteurs bénévoles, les responsables communaux, qui relaie
les aspects opérationnels et les bilans des prospections réalisées localement. Il convient de veiller à ce que la complexité
de l’organisation, gérée au niveau technique, n’écarte pas du processus de mise œuvre les représentants légitimes des
viticulteurs (les élus des ODG7 par exemple). Le fait de mettre à disposition des structures locales que sont les ODG toutes
les informations phytosanitaires qui les concernent, mais aussi les synthèses des autres secteurs afin d’avoir une vision plus
large de la situation phytosanitaire, pourrait leur donner un peu plus de visibilité pour intervenir au niveau décisionnel.
Deux questions restent toutefois en suspens, d’une part la compréhension du dispositif de lutte par les viticulteurs. En effet
ce dispositif devient très complexe, et sur quelques points, incohérent80 . D’autre part, l’efficacité à long terme des mesures
est incertaine car l’allègement des traitements pourrait se traduire par une diminution de l’appréhension du danger («zéro
traitement» égale «zéro risque» ?) et diminuerait la mobilisation de certains viticulteurs au moment des prospections ainsi que
pour la réalisation des arrachages de pieds symptomatiques.
Construction d’une politique de gestion des risques sanitaires
dans le domaine alimentaire - Prise en compte de l’acceptabilité
sociale dans la mise en place de techniques de décontamination
microbienne des viandes fraîches
Alice MALLICK, Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2012-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 14 avril 2014 au 25 juillet 2014 à la Food Standards Agency, Londres (UK) . Mémoire de stage rédigé
sous la direction de Gwenola LE NAOUR (SciencesPo Lyon)
LASCOUMES P., «Penser les sciences, les techniques et l’expertise aujourd’hui», CNRS, Groupe d’analyse des politiques
publiques, ENS-Cachan, Intervention au séminaire du 25 janvier 2001
78
Bureau Interprofessionnel des Vins de Bourgogne.
79
Institut français de la vigne et du vin.
80
Du fait d’interventions locales, des aménagements non prévus par la Commission régionale FD ont été réalisés, mettant à
mal la justification «technique» proposée (commune de Bouzeron sans traitement alors qu’elle située dans une à traitement
obligatoire, communes de Côte d’Or où la présence de FD n’est pas détectée incluses dans le traitement à la demande des
présidents ODG locales).
81
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ce mémoire.
77
69
Questions abordées par l’étude 81
Dans le cadre de la construction d’une politique de gestion des risques sanitaires dans le domaine alimentaire, notre travail
s’est intéressé à la prise en compte de l’acceptabilité sociale dans la mise en place de techniques de décontamination
microbienne des viandes fraîches. Si la situation épidémiologique des maladies d’origine alimentaire nécessite de mettre en
place des stratégies de prévention des risques alimentaires, il est en effet nécessaire de ne pas imposer au consommateur
des méthodes de production qu’il n’accepte pas, au risque de conduire à une crise économique de la filière.
Ainsi, notre étude a relevé un faible enthousiaste du consommateur à l’égard de l’ensemble des techniques de décontamination
des viandes fraîches. Une distinction s’opère toutefois entre traitements physiques plus facilement acceptés (rinçage à
l’eau, immersion dans un bain d’eau chaude, traitement à la vapeur, refroidissement rapide, congélation, etc.) et traitements
chimiques largement rejetés (application d’une substance antibactérienne comme les chlorites, l’acide lactique, l’ozone,
etc.). De multiples facteurs interviennent dans ce choix, les principaux étant la méfiance à l’égard de l’ensemble de la chaîne
alimentaire, incluant industriels et autorités publiques en charge de la régulation, et les potentiels risques, pour la santé
humaine et l’environnement, liés à l’utilisation des méthodes chimiques principalement. Le consommateur souhaite voir
utiliser des méthodes conservant les qualités organoleptiques de la viande et qui lui semblent « naturelles », c’est-à-dire ne
faisant recours à aucun ajout de produits chimiques ou étant directement réalisables par lui-même au domicile (congélation
ou rinçage à l’eau par exemple). S’il reste raisonnable, le surcoût qui serait appliqué sur le prix des viandes ne semble pas
être un frein pour ce type de produits.
Notre travail s’est également intéressé à évaluer l’appropriation du risque alimentaire par le consommateur. En effet, la
conscience du risque est une étape préliminaire à sa prévention. Pourquoi le consommateur accepterait-il une stratégie de
décontamination des viandes s’il ne reconnait pas la présence de micro-organismes pathogènes à leur surface ? Les études
réalisées sur le sujet montrent que même si le consommateur lambda est conscient des risques liés à la consommation
de la viande, un sentiment d’invisibilité est fréquemment rencontré. Ce biais optimiste est clairement identifié comme un
frein à l’acceptabilité des pratiques de décontamination. Un des leviers pour convaincre le consommateur de l’utilité de
ces méthodes est de lui faire prendre conscience des risques alimentaires auxquels il s’expose lui- même en adoptant de
mauvaises pratiques d’hygiène lors de la préparation de ses propres repas au domicile. Ainsi, la mise en place de stratégies
de décontamination des viandes avant leur mise sur le marché n’apparait plus comme un moyen de cacher de mauvaises
pratiques d’hygiène au cours de la production, mais bien comme une volonté de renforcer la protection du consommateur
face aux dangers auxquels il s’expose lui-même.
Le jugement du consommateur vis-à-vis de ces traitements, et en particuliers des traitements chimiques, peut ainsi
être amélioré ; et d’autres marges de manœuvres sont identifiables pour rendre acceptables des pratiques qui a priori
ne le semblent pas. Dans nos sociétés contemporaines, le consommateur a notamment perdu ses repères en matière
d’alimentation : co-créateur de sa santé, il est cependant tenu à l’écart des processus de production des aliments qu’il
consomme. Il ne maitrise plus le risque auquel il est exposé, ce qui est source d’anxiété. Cette dernière est par ailleurs
renforcée par un sentiment de confusion dérivant des nombreuses informations, souvent contradictoires, à disposition du
consommateur. Une large communication, associant le plus d’émetteurs possible, délivrant le même message, et visant
à restaurer la confiance ébranlée du consommateur à l’égard des industriels et des autorités publiques, devrait fournir
de bons résultats. Cette communication peut se faire via les campagnes gouvernementales, les médias et les voies de
communication propres aux industriels (magazines, emballages des produits, etc.), mais également par une sensibilisation
des plus jeunes consommateurs au cours de leur cursus scolaire.
Il est important de garder en tête que l’attitude du consommateur à l’égard de l’alimentation est liée à de nombreux facteurs
démographiques, socio-économiques, culturels et à des préférences et expériences personnelles, aboutissant à une
perception différente des risques alimentaires entre experts et consommateurs profanes. Les politiques publiques se heurtent
donc à un dilemme important : comment construire une politique dans un domaine où la perception des problèmes est si
différente selon l’interlocuteur ? Il apparait alors nécessaire d’intégrer le consommateur aux processus d’évaluation et de
gestion des risques sanitaires. Définir les sujets de préoccupations prioritaires par un débat entre secteur privé, secteur public
et consommateurs, aboutirait à une meilleure acceptation générale des décisions prises. Ce dialogue pourrait notamment
aider à gommer les différences entre les risques réels, estimés par les experts, et les risques perçus par le consommateur.
Dans le processus de construction des politiques de la FSA, le consommateur est toujours sollicité pour récolter son opinion
sur les avancées proposées. Dans l’optique où la FSA souhaiterait mettre en place une décontamination des viandes de
volaille avec une solution d’acide lactique, un travail de communication à long terme et à fort investissement sera nécessaire
pour que le consommateur anglais adhère à cette pratique. Cependant, en cette période de crise, la FSA doit faire face
comme de nombreuses structures gouvernementales à une forte pression budgétaire et doit rationaliser ses ressources
en termes de budget et de personnel. Si une opportunité d’utiliser l’acide lactique semble se dessiner, il sera nécessaire
d’évaluer les coûts engendrés par une telle communication.
70
Notre travail n’a pas la prétention d’avoir fait le tour de la question, d’autres leviers d’actions pourraient être identifiés pour
convaincre le consommateur de l’utilité des traitements de décontamination des viandes. Nous regrettons notamment de ne
pas avoir pu conduire davantage d’entretiens. Les témoignages du secteur privé, tels que les supermarchés et abattoirs, et
de consommateurs manquent cruellement dans cette étude. Un stage plus long aurait certainement permis d’approfondir
ces points. En effet, le démarrage de l’étude a été relativement long, notamment du fait du délai d’adaptation que requérait
ce stage. L’immersion dans une agence gouvernementale anglaise a réclamé de se familiariser avec une autre façon de
travailler, le tout dans une langue étrangère.
Par ailleurs, au cours de notre stage, la FSA se trouvait dans une période de restructuration totale. De nombreux agents ont
été conviés à quitter l’agence de façon presque immédiate dans un délai inférieur à deux mois, ce qui s’est soldé par de
multiples départs dans une ambiance relativement tendue. Les agents étaient donc souvent peu disponibles, car ils devaient
boucler leurs dossiers avant de quitter les locaux. Il a également été difficile d’obtenir des contacts extérieurs à l’agence, car
nous n’étions pas autorisées à les joindre directement.
Nous ressentons donc un léger sentiment d’insatisfaction par rapport à ce travail, qui n’apparait pas complètement achevé
à nos yeux. Nous sommes toutefois satisfaites du résultat rendu dans un délai de trois mois.
Ce travail pourrait être poursuivi en intégrant davantage de témoignages du secteur privé ainsi que des consommateurs.
Il renvoie également à une problématique plus large de l’acceptabilité sociale dans la mise en place de techniques de
décontamination microbienne des aliments en général. Il pourrait en effet être opportun d’approfondir les différences
d’acceptabilité selon les catégories d’aliments. Le traitement par irradiation est par exemple autorisé au sein de l’UE pour la
décontamination des épices et herbes séchées, et cela ne semble pas attendre l’agenda public.
L’ESB comme entrave au commerce entre la France et la
Chine : Etude de l’accession de la viande bovine à l’agenda
des négociations sanitaires bilatérales
Mathilde PALUSSIERE, Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2012-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 14 avril 2014 au 25 juillet 2014 à l’Ambassade de France en Chine
. Mémoire de stage rédigé sous la
direction d’Amandine GAUTIER (SciencesPo Lyon – ENSV VetAgro Sup – Triangle - ACSPAVE)
Questions abordées par l’étude 82
L’ESB est une zoonose mortelle et incurable, qui se transmet à l’homme par l’ingestion de produits d’origine bovine
contaminés. Dans un monde depuis toujours soumis à des peurs alimentaires, cette maladie occupe le devant de la scène
depuis son apparition à la fin des années 80. La décision de la Chine de mettre en place en 2000, suite à la seconde crise
de la vache folle, un embargo sur les importations de viande bovine française est donc la réaction classique qui pouvait être
attendue. Cependant, cet embargo s’inscrit dans la durée alors que la situation sanitaire s’améliore et que les connaissances
sur cette maladie s’étoffent. Tout en visant un secteur phare de l’agriculture française, il va alors à l’encontre des règles
internationales édictées par l’OMC et l’OIE. Alors que la principale voie pour lever un embargo mis en place pour des raisons
sanitaires est la mise en œuvre de négociations sanitaires bilatérales, le dossier de l’ESB n’a encore fait l’objet d’aucune
discussion entre la France et la Chine.
L’objectif de cette étude était de s’intéresser au problème de l’ESB comme entrave au commerce entre la France et la Chine
ainsi qu’au traitement de cette question par les deux pays. Il s’agissait plus précisément de mettre en lumière les raisons de
la durée de la période précédant l’accession de ce dossier à la table des négociations sanitaires franco-chinoise.
Le maintien de l’’embargo ESB dépasse le cadre strictement sanitaire et réglementaire. Nous avons pu voir dans une
première partie que des explications en termes de contextes économique, social et politique peuvent être apportées. En
effet, les enjeux économique représentés par la fermeture de ce marché sont récents, à la fois du côté français et du côté
chinois. La distanciation entre l’offre et la demande françaises ainsi qu’entre l’offre et la demande chinoises, qui n’existaient
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ce mémoire.
82
71
pas encore à la mise en place de l’embargo, poussent respectivement les deux pays à chercher à exporter et importer. De
plus, le rôle favorable à l’avancée des relations diplomatiques dans un contexte de cinquantième anniversaire des relations
diplomatiques franco-chinoises a été mis en évidence.
Dans une seconde partie, l’étude de la dynamique du processus d’ouverture des négociations a permis de mettre en
évidence trois points. Tout d’abord, les motivations respectives des deux pays ont été explicitées. La France souhaite rouvrir
le marché d’abord pour une question de principe, puis pour des raisons économiques. La Chine a la volonté de protéger
sa population – au moins de montrer à sa population qu’elle la protège – et de conserver le pouvoir octroyé par la fermeture
du marché. Ce sont ensuite les manœuvres des deux pays pour maintenir leur position tout en donnant l’impression de
satisfaire les attentes de l’autre pays qui ont été données à voir. Les deux pays ont développé des stratégies leur permettant
de concilier au maximum leurs objectifs propres et les attentes de l’autre partie. Enfin, nous avons souligné l’importance de
la volonté politique dans l’avancée d’un tel dossier. Bien que l’association du technique, des relations commerciales et du
politique soit indispensable, ce sont bien les actions politiques (comme les visites officielles) qui donnent le rythme.
Bien que les choses aient beaucoup progressé depuis un an et demi, il n’est pas encore temps de crier victoire. Des étapes
ont été franchies, mais d’autres obstacles sont à venir. Tout d’abord, bien que l’ouverture des négociations soit officiellement
prévue par les autorités des deux pays, tant qu’elles n’ont pas concrètement commencé il convient d’être prudent. En effet,
un revirement est toujours possible. Ensuite, l’ouverture des négociations laisse place aux négociations, qui peuvent ellesaussi s’étendre dans le temps. Le questionnaire doit être transmis aux autorités chinoises, le groupe de travail tenu, puis il
faudra encore négocier un protocole sanitaire, accueillir une délégation chinoise en France, négocier un certificat sanitaire
puis faire agréer des entreprises. Ce sont encore de longues années de négociations qui se profilent.
L’analyse de cette période a permis de mettre en évidence que la Chine est en position de force. Elle seule a réellement
le dernier mot, et elle décide du rythme d’avancée du dossier. Une autre chose a également pu être mise en évidence:
contrairement à quelques années auparavant, la Chine a besoin d’ouvrir son marché à d’autres pays. La question est donc
à présent la suivante : comment faire pour que la Chine ouvre son marché à la France plutôt qu’à d’autres pays ? Quelles
sont les leviers pouvant être mobilisés par la France pour se faire valoir face à la Chine ?
Nous l’avons vu, il est nécessaire d’appuyer sur trois aspects. Tout d’abord il faut prendre en compte l’aspect politique. Les
relations diplomatiques sont très importantes pour les chinois. La fin de l’année 2014 doit être pleinement exploitée, et les
efforts ne doivent pas se relâcher. L’intérêt porté par la France à la Chine est élevé, il faut traduire cet intérêt dans des actes.
Ensuite il faut considérer l’aspect commercial, à l’aide des acteurs de la filière. Les acteurs économiques français ont besoin
de ce marché, il faut alors montrer aux acteurs économiques chinois l’intérêt qu’ils pourraient y trouver. Il est nécessaire de
montrer que l’offre française peut correspondre à la demande chinoise. Pour cela, il faut clarifier de façon objective quels
sont les besoins de la Chine, et ensuite préciser les avantages qu’elle peut retirer de l’ouverture de son marché à la France.
Enfin, il faut ajouter à cela l’aspect technique. Le côté technique est la justification officielle de l’embargo : est-ce que la Chine
peut réellement importer des produits français sans aucun risque pour sa population et pour son cheptel ? La gestion de
cet aspect est donc primordiale. Autant des considérations techniques peuvent servir de prétexte pour retarder les choses,
autant le moindre doute à ce niveau peut bloquer le processus en entier.
De plus, nous avons vu qu’il ne faut pas considérer un dossier de manière isolée mais prendre en compte tout l’environnement.
L’intérêt porté par la France à ce dossier, l’urgence de son débloquement, doivent être mis en perspective relativement à tous
les autres dossiers faisant l’objet de négociations sanitaires entre la France et la Chine. Le dossier de l’ESB est important,
mais son avancée ne doit pas se faire au détriment d’autres dossiers également important, comme celui de la viande porcine
par exemple. Il est aussi important de mettre le dossier ESB en perspective par rapport aux relations franco-chinoises dans
une plus large mesure. A quel point la France est-elle prête à tenir tête à la Chine pour ce marché ? Il serait intéressant de
répondre à cette question à l’heure actuelle, et de la reposer à intervalle régulier à mesure que le contexte économique, social
et politique évolue. En effet, la réactivité est une chose importante, et pour réagir rapidement il faut se préparer à ce qui peut
se passer, anticiper au maximum. Pour cela il faut s’intéresser à la fois à la France, à la Chine, et aux autres pays qui eux aussi
négocient actuellement avec la Chine dans le but d’exporter leur viande bovine.
Analyse sociologique d’une négociation communautaire –
Illustration à travers l’exemple de la révision du règlement (CE)
n°882/2004 sur les contrôles officiels
Marie JACOLOT, Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2012-2014
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ce mémoire.
83
72
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 14 avril 2014 au 25 juillet 2014 à l’unité E-5 (Enforcement) de la DG SANCO (Commission européenne)
.
Mémoire de stage rédigé sous la direction de Louise DANGY (ISPV en FCPR, SciencesPo Lyon – ENSV VetAgro Sup –
Triangle - ACSPAVE)
Questions abordées par l’étude 83
Le fonctionnement de l’Union européenne est fondé depuis les premiers jours sur une logique de prise de décision consistant
à produire du compromis, tout en réduisant progressivement les divergences entre les États membres. Ayant réalisé
différents stages dans le contexte européen, à la lumière des connaissances acquises et du stage de terrain que j’effectue
à la Commission européenne, j’ai souhaité réaliser une analyse des négociations et des acteurs qui font partie du « magma
» d’échanges et de discussions à travers l’exemple précis de la modification du système de financement des contrôles
officiels et dans le temps législatif spécifique de la première lecture. C’est une façon de voir sous un prisme sociologique la
construction d’une politique publique à un moment particulier, d’obtenir une vision synthétique mais appliquée sur un sujet
donné, d’analyser la multiplicité des acteurs et la complexité des relations qu’ils établissent entre eux. Cette analyse sur un
sujet très technique et juridique se limite peu au contenu du texte en lui-même (elle doit néanmoins donner quelques éléments
pour en préciser le cadre d’étude) mais elle s’intéresse essentiellement aux acteurs, aux processus relationnels qu’ils mettent
en œuvre lors d’une négociation communautaire, à leurs façons d’aboutir à un accord pour réviser et construire une nouvelle
politique publique.
L’unité E.5 (Enforcement) de la direction générale de la santé et des consommateurs (DG SANCO84) est une des directions
générales de la Commission européenne en charge de la coordination des actions de la Commission visant à assurer
l’application de la législation tout au long de la chaîne alimentaire et notamment s’occupe de la révision du règlement
(CE) n°882/2004 sur les contrôles officiels85 . Mes fonctions étaient d’assister le personnel de cette unité responsable des
négociations interinstitutionnelles sur la proposition de révision du règlement relatif aux contrôles officiels en réalisant des
documents de travail pour faciliter le compromis. Je devais en particulier effectuer une analyse et une synthèse des positions
de tous les pays membres pour chaque article de la nouvelle proposition. Ceci a permis de dégager pour chaque paragraphe
une « position Conseil » résultat d’une possibilité de compromis (162 articles au total). Ce travail a été effectué grâce au suivi
des réunions d’experts en charge du domaine ainsi que lors des réunions de drafting86 auxquelles la Commission était
conviée. J’étais aussi en charge d’aider à la rédaction des comptes-rendus de toutes les réunions auxquelles j’assistais car
ces éléments faisaient partie intégrante de la compréhension des enjeux de chaque État membre. Une analyse concomitante
quant à la possibilité de compromis entre les amendements déposés par le Parlement européen et la position de compromis
qui ressort au Conseil a été également réalisée.
Ainsi, ma question de recherche sociologique a été : Analyse d’une négociation communautaire : rôles, position et
positionnement87 des différents acteurs dans la recherche d’un consensus. Illustration à travers l’exemple de la révision du
règlement (CE) n°882/2004 relatif aux contrôles officiels
En amont de mon stage, afin de connaître les activités qui me seraient confiées et d’appréhender les premiers enjeux des
négociations sur mon sujet, j’avais pris contact avec les membres travaillant à la Commission et notamment au sein de l’unité
E.5. J’ai aussi pris contact avec des membres de l’administration française pour comprendre la position de l’hexagone et les
points majeurs de difficulté au niveau national (à l’échelle française, plusieurs ministères sont en charge des contrôles officiels)
et au niveau européen. En parallèle, j’avais aussi commencé à lire des articles et ouvrages sur l’Union européenne et les
politiques publiques et ai eu accès aux documents internes du Secrétariat général des affaires européennes (SGAE) (c’està-dire l’ensemble de la littérature grise distribuée dans le cadre des négociations en cours). Il faut noter mon positionnement
particulier dans le cadre de cette analyse. En effet, la récolte de données a pu être réalisée grâce à mes connaissances
antérieures d’individus travaillant dans différentes structures nationales et européennes. Ces personnes me faisant confiance
et me considérant comme « une des leurs », m’ont facilité l’accès aux éléments de fond du dossier.
J’ai ensuite, lors de l’arrivée sur le terrain, effectué une analyse approfondie d’archives et une étude de la littérature grise à
laquelle ma situation en tant que stagiaire à la Commission européenne me donnait accès (commentaires écrits et positions
des pays membres, documents internes à la Commission européenne). J’ai également pu continuer à bénéficier des archives
du SGAE ainsi que des documents internes au ministère français en charge de l’Agriculture via un login interne. La récolte,
l’étude et l’analyse de ces écrits ont été complétées par des matériaux très riches que sont l’observation participante active
et la réalisation d’entretiens semi-directifs. L’observation participante s’est réalisée durant la période de stage qui s’est étirée
d’avril à juillet 2014 et s’est attardée sur les modalités de négociation multidimensionnelles qui s’effectuent lors de la première
lecture d’un texte législatif; elle s’est faite au quotidien et notamment durant toutes les réunions d’experts en charge de la
révision du règlement sur les contrôles officiels et les réunions de drafting et redrafting auxquelles la Présidence convie la
DGSANCO ou Direction générale de la santé et des consommateurs, http://ec.europa.eu/dgs/Health_consumer/index_fr.htm,
page consultée le 16 avril 2014.
85
Présenté le 6 mai 2013 au Conseil de l’Union européenne et au Parlement européen. Pour plus d’informations : http://
ec.europa.eu/dgs/Health_consumer/index_fr.htm.
86
Les réunions de drafting sont des réunions où la Présidence réalise une version modifiée et consolidée de la proposition
initiale de la Commission en tenant compte des positions de tous les États membres. La Commission est invitée « par courtoisie » à y participer notamment lorsque la Présidence à des besoins de clarification sur certains points. Entretien Membre3
DGSANCO, le 16 avril 2014.
87
Nous distinguons le terme de « position » et de « positionnement ». Le terme de « position » fait référence à l’orientation
d’un acteur sur un sujet tandis que le « positionnement » a trait à la stratégie qu’entreprend un acteur pour défendre sa position.
73
84
Commission par courtoisie. Les entretiens semi-directifs ont été effectués essentiellement durant cette période mais aussi
deux en amont par identification d’acteurs pertinents. Soulignons que la réalisation d’entretiens n’a pas été forcément très
facile, les acteurs étant réticents à parler d’un sujet qu’ils jugent « sensible ». Ainsi, beaucoup d’entretiens ont été refusés ou
les éléments de discussion considérablement réduits.
Après une présentation du cadre de recherche et les enjeux du texte (I), l’étude porte d’abord sur une analyse des négociations
interinstitutionnelles entre les acteurs du «triangle législatif» essentiellement à travers les relations entre la Commission
européenne et le Conseil (II). Ensuite est effectuée une analyse des négociations entre les délégations nationales du Conseil
de l’Union européenne. Nous faisons un focus sur les négociations nationales de la délégation française afin de comprendre
la complexité des niveaux de négociations et l’inadéquation possible entre l’aboutissement d’un accord et l’applicabilité
nationale.
I. Informations contextuelles : la construction et l’évolution du règlement (CE) n°882/2004 relatif aux contrôles officiels
Les contrôles officiels réalisés en vue de s’assurer de la conformité des denrées alimentaires sont régis par le règlement
(CE) n°882/200488 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relatif aux contrôles officiels (RCO) effectués pour
s’assurer de la conformité avec la législation sur les aliments pour animaux. Mis en place dans le cadre du « paquet hygiène
» pour répondre à des crises sanitaires ayant eu des impacts économiques et sociaux majeurs (par exemple, crise « à la
dioxine », crise de la « vache folle »), le cadre juridique du règlement (CE) n°882/2004 s’est révélé jusqu’à présent globalement
efficace pour prévenir les risques et les contrecarrer89 . Suite à des rapports d’évaluations et pour tenir compte de l’évolution
sociale, économique, politique et institutionnelle, la Commission européenne, qui bénéficie de l’initiative législative, a présenté
le 6 mai 2013 un projet de révision de ce règlement au Conseil de l’Union européenne et au Parlement européen, les deux
co-législateurs dans le cadre la procédure législative ordinaire90 . Cette proposition a pour but de répondre aux nouveaux
enjeux et aussi de consolider et optimiser la politique publique existante. Le Parlement européen a arrêté sa première lecture
par un vote de ses amendements en session plénière le 15 avril 2014. Le Conseil continue d’examiner le texte sur les
contrôles officiels, au niveau des groupes de travail, dans le cadre de sa première lecture.
En ce qui concerne le financement91 , les données recueillies révèlent des incertitudes quant à la viabilité à long terme des
contrôles officiels (CO) ; les autorités compétentes des États membres devant assurer un financement approprié afin de
réaliser efficacement ces contrôles. Ce sujet du financement des CO était particulièrement important dans le cadre de
la révision du règlement car la proposition souhaite étendre le champ d’application à de nouveaux domaines (santé des
végétaux, semences, matériaux forestiers de reproduction, etc.) et qu’il modifie aussi les modalités de calcul du financement
dans les secteurs déjà couverts par le règlement actuel. C’est « le point le plus sensible » et « source de tensions » pour tous
les acteurs. Cet objet est également intéressant à étudier car il met en avant l’imbrication de dimensions variées sur un texte
initialement à vocation sanitaire (économique, politique, juridique, fiscale et budgétaire). Cet objet est donc fil rouge dans
l’analyse des négociations pour concrétiser quelques positions des acteurs.
II. Négociations interinstitutionnelles et recherche de compromis entre les acteurs du « triangle législatif »
Dans le cadre de la procédure législative ordinaire, la Commission européenne propose son texte au Conseil et au Parlement
européen. Les négociations se font essentiellement entre les acteurs de ce « triangle législatif» mais chacun a un rôle et
une position et un positionnement spécifiques dans la décision. Durant l’étude, la Commission n’était plus « maître de sa
proposition » ; le Conseil était en cours de discussions internes et le Parlement européen avait arrêté sa première lecture.
Ce triangle n’est cependant pas un « triangle de fer » et est ouvert à des groupes d’intérêts qui se mobilisent sur le sujet
(fédérations, associations notamment).
Malgré les divergences, les acteurs ont tout intérêt à aboutir au moins à un compromis car qui dit compromis dit concrétisation
d’une politique publique ... Nous avons vu que les interactions sont ambiguës car elles sont le fruit de logiques contradictoires
(notamment entre l’intérêt national et européen). Il existe une forme d’européanisation inachevée qui, en quelque sorte, prend
le pas sur la substance même de l’acte legislative qui est construit.
Règlement (CE) n°882/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relatif aux contrôles officiels effectués
pour s’assurer de la conformité avec la législation sur les aliments pour animaux et les denrées alimentaires et avec les dispositions relatives à la santé animale et au bien-être des animaux.
89
COMMISSION EUROPÉENNE (6 mai 2013). Impact assessment acoompanying the document, Proposal for a Regulation of
the european parliament and of the council on official controls and other official activities performed to ensure the application
of food and feed law, rules on animal Health and welfare, plant Health, plant reproductive material, plant protection products
and amending Regulations (EC) No 999/2001, 1829/2003, 1831/2003, 1/2005, 396/2005, 834/2007, 1099/2009, 1069/2009,
1107/2009, Regulations (EU) No 1151/2012, [....]/2013 [Office of Publications, please insert number of Regulation laying down
provisions for the management of expenditure relating to the food chain, animal Health and animal welfare, and relating to
plant Health and plant reproductive material], and Directives 98/58/EC, 1999/74/EC, 2007/43/EC, 2008/119/EC, 2008/120/EC
and 2009/128/EC (Official controls Regulation). http://ec.europa.eu/dgs/Health_consumer/pressroom/docs/official-controlsia_en.pdf.
90
Dans le cadre de la procédure législative ordinaire, il existe une parité entre le Conseil et le Parlement européen qui adoptent conjointement des textes législatifs après proposition de la Commission européenne. On parle du triangle institutionnel ou
« triangle législatif ».
91
COMMISSION EUROPÉENNE (2011). Rapport final de l’étude sur les redevances ou taxes perçues par les États membres
pour couvrir les coûts occasionnés par les contrôles officiels. Contrat-cadre « Évaluation, analyse d’impact et services
connexes » : Lot 3 (chaîne alimentaire) (attribué dans le cadre de l’appel d’offres n° 2004/S 243-208899), Première partie –
étude principale et conclusion.
92
Terme utilisé par FOUILLEUX E., DE MAILLARD J. et SMITH A. L’intégration européenne : entre émergence institutionnelle et
recomposition de l’État, Paris, Presses de SciencesPo, 2004, p. 292.
88
74
De plus, l’analyse des relations bilatérales entre la Commission européenne et le Conseil de l’Union européenne à travers les
réunions d’experts et les réunions de drafting a révélé une forme de pré-négociation du compromis qui s’inscrit dans une
logique de socialisation européenne et de culture du compromis.
III. Négociations dans le cadre du Conseil de l’Union européenne : la prise en compte des enjeux des délégations
nationales
Dans cette partie, l’analyse se concentre sur une institution européenne qu’est le Conseil de l’Union européenne, le législateur
historique, à travers les réunions de drafting et d’experts sur la révision du règlement relatif aux CO sous Présidence grecque
puis italienne. Ce sont ces réunions d’experts qui assurent la préparation de la décision publique et qui sont le véritable «
nerf de production des politiques publiques92 » . Dans le cadre du Conseil, la Présidence tente de trouver une position de
compromis après discussions entre les délégations nationales mais aucune position très claire n’est encore connue. Chaque
délégation n’a pas forcément le même poids dans la négociation en terme de vote et en terme de reconnaissance par ses
pairs.
La strate de négociation institutionnelle est particulièrement importante dans le cadre du Conseil de l’Union européenne.
Celui-ci réunit des États à intérêts divergents (enjeux différents, contextes locaux particuliers) mais qui doivent s’efforcer de
trouver une position consensuelle portant dès lors les positions de l’institution pour laquelle ils interviennent. Cette phase est
d’autant plus délicate qu’elle s’effectue désormais entre 28 membres et il y a un véritable débat. Nous avons vu qu’au sein
de cette institution, les échanges ont un degré d’ « informel » plus élevé notamment par les liens humains qui se mettent en
place entre les experts, qui se connaissent, s’apprécient et se voient régulièrement en dehors du contexte professionnel.
Enfin, nous analysons la strate nationale à travers l’exemple de la délégation française pour comprendre la complexité bien
plus forte qui existe qu’une simple position nationale ; cette position devant se construire à l’échelon du pays avec déjà de
nombreuses parties prenantes.
L’approche de la négociation communautaire est avant tout coopérative et constructive entre les différents acteurs ; le conflit
n’est pas recherché même si cela ne signifie pas qu’il est absent. Le fondement de toute négociation communautaire c’est
la discussion mais également la connaissance et la compréhension des règles qui régissent ces arènes de discussion. Pour
agir sur la décision publique européenne, l’appartenance à des réseaux formels ou non, est fondamentale. Les liens avec la
Commission sont tout particulièrement importants car c’est l’institution qui connait le mieux le terrain européen et a appris
ce qu’on pourrait appeler une sorte d’instrumentation « opportuniste » (consentie ou non par les autres partenaires) en vue
de la défense de sa propre position.
Mon étude a mis en évidence certaines limites et difficultés.
Tout d’abord, concernant l’objet d’étude en lui-même, un de mes enquêtés a posé la question de la pertinence de la révision
du règlement qui fait l’objet de mon analyse. La Commission n’a elle pas voulu modifier un système trop rapidement ? N’a
elle pas été aussi trop ambitieuse en voulant inclure l’ensemble des champs couvrant la chaîne alimentaire ce qui crée plus
de divergences et risque de faire perdre la substantielle moelle du texte ? N’aurait-il pas mieux fallu se contenter de simples
ajustements de forme et envisager une révision plus profonde que dans quelques années ? La réponse sera donnée par
l’issue des négociations et surtout sur la pertinence du texte qui en ressortira. Ensuite, concernant les modalités de négociation entre les acteurs, nous avons vu qu’il existe une grande part d’informel
mais aussi que le jeu des négociations peut parfois être assez fermé pour des non-initiés. Pour entreprendre, il est important
de se mobiliser afin d’appartenir à des réseaux de relations et d’informations qui permettent d’alimenter de façon pertinente
le débat.
Mais aussi l’angle d’approche, je me suis focalisée surtout sur le Conseil et les relations qu’il établit en son sein et avec
les autres acteurs. Ce choix est le reflet du travail effectué en tant que stagiaire et observateur mais aussi du stade des
discussions sur la révision du RCO. Néanmoins, la combinaison de recherche documentaire, d’entretiens, d’observations a
permis de réaliser une approche relativement complète et représentative de l’objet étudiée.
Concernant les réponses aux questions de départ, elles sont parfois difficiles à donner de manière concise et unique. À ce
stade, les éléments sur le financement qui seront gardés dans la version finale du texte ne sont pas lisibles et les positions
restent très perméables et susceptibles d’évoluer ; on ne peut pour l’instant que faire des scénarios : recours non obligatoire
aux systèmes de redevance ? Exemption des micro-entreprises du financement ? Maintien de différents systèmes de calculs
de coûts ? Le risque lorsque les négociations deviennent trop compliquées est que le minimum soit conservé, des objectifs
généraux qui laissent libre choix aux États membres. La subsidiarité n’est- elle pas dans ce cas contraire à l’harmonisation
souhaitée dans le cadre de ce type de règlement ?
Puis, concernant les acteurs eux-mêmes, plusieurs points peuvent ressortir :
Tout d’abord, l’engagement individuel et le poids des individus dans le jeu des négociations sont particulièrement importants
pour la continuité des positions et la bienséance des négociations. En effet, c’est bien souvent la personnalité d’individus qui
75
permet de faciliter des négociations sur des points difficiles ; c’est aussi le maintien en poste de ces personnes qui garantit
une cohérence des positions exprimées par leur expertise, leurs connaissances des dossiers et des autres partenaires.
Puis, concernant les acteurs institutionnels, leur position définitive n’est pas encore claire notamment pour le Parlement
européen qui, soumis aux aléas des élections, rend l’avenir encore plus incertain. Ensuite, une dualité fonctionnelle des acteurs (individus, représentants ou organisations) a été mise en évidence. Chaque
acteur est dans une logique de porter la position qu’il défend mais aussi d’aboutir à un accord reflet d’une décision
consensuelle réussie avec les partenaires avec lesquels il négocie. Cette double logique est parfois contradictoire dans les
objectifs mais souvent l’échelon supérieur l’emporte sur les niveaux inférieurs. Cette dualité montre donc comme une sorte
de « schizophrénie » où les individus sont tiraillés entre des dimensions parfois totalement incompatibles.
Mais aussi, concernant plus spécifiquement le rôle de la délégation française, une difficulté a été mise en évidence. La
France est reconnue par ses pairs notamment dans le cadre du Conseil mais elle doit maintenir sa légitimité en développant
et entretenant ses réseaux d’informations et de négociations. En effet, la France est encore relativement peu active dans
cette participation parallèle aux politiques publiques, dans ce type de gouvernance. Pourtant, il serait important que tous
les acteurs français s’y impliquent pleinement et fassent preuve de proactivité. Comme dans beaucoup de situations, mais
tout particulièrement dans le système européen, se faire connaître, conserver les cartes de visite, aller déjeuner ou prendre
un café tout comme « entretenir » ses contacts sont autant d’actions qui permettent d’être connu des acteurs et de faciliter
l’accès aux informations. Par ailleurs, une limite temporelle est à souligner. Une négociation communautaire est discutée sous plusieurs présidences,
pendant plusieurs mois, voire années. Mes seize semaines de stage ne peuvent donc malheureusement pas refléter
entièrement l’ensemble des interactions qui vont encore avoir lieu et la direction que va prendre la négociation. On ne peut,
à ce stade, faire encore que des scénarios que j’ai tentés à certains moments d’évoquer. Enfin, la difficulté de mon double positionnement à la fois académique (et sociologique) et en immersion professionnelle à la
Commission a été difficile à envisager. En effet, deux points peuvent être soulignés. D’une part, étant intégrée au sein d’une
structure dont j’étais partie prenante mon regard d’analyse a parfois pu être biaisé, ou être réducteur. D’autre part, il me
semble que la position de sociologue a été difficile à assumer au quotidien pour récolter des informations pertinentes ; il a
fallu très souvent enquêter à « couvert ». Malgré cette étude réalisée « à couvert », certaines réunions m’ont quand même
été refusées car jugées « inutiles » pour mes connaissances mais surtout car j’aurais pu avoir accès à certaines informations
que les représentants jugeaient « sensibles » ou « politiquement incorrectes ». Ce statut « à couvert » a permis néanmoins
d’avoir une étude sociologique assez exhaustive des relations établies dans le cadre des négociations communautaires et
du rôle et du positionnement des acteurs. Attention, il faut néanmoins souligner que dans le cadre de mon travail, faisant
déjà partie d’un réseau européen, j’ai bénéficié d’un avantage de taille pour avoir accès aux informations et identifier les bons
interlocuteurs. Enfin, je finirai sur un dernier questionnement qu’a mis en exergue toute cette étude : l’Union européenne n’est-elle qu’un
seul État ou la réunion d’États gardant leur indépendance ? Cette opposition confédéralisme/fédéralime est ancienne. Il est
vrai qu’il est difficile de s’accorder mais le bénéfice des gouvernements nationaux passe, même si « les procédures sont
lentes, très lentes93 » , il me semble, par davantage d’Europe, dans une construction collective de « l’Union fait la force » tout
en garantissant son efficacité et sa pertinence dans l’action.
Essai de coopération autour des astreintes
Laure PAGET , Inspectrice Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 14 avril 2014 au 25 juillet 2014 à la Direction Départementale de la Protection des Populations du Rhône
.
Mémoire de stage rédigé sous la direction de Frédéric MOUGEOT (centre Max Weber)
Questions abordées par l’étude 94
La Direction Départementale de la Protection des Populations du Rhône : les missions 95
La direction départementale de la protection des populations est compétente en matière de politiques de protection de la
population. Ses services instruisent des autorisations d’exploiter, contrôlent et mettent en œuvre des mesures de police dont
Entretien Éric Poudelet, directeur de la sécurité de la chaîne alimentaire à la DGSANCO.
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ce mémoire.
95
D’après le bilan d’activité 2013 de la DDPP du Rhône
.
93
94
76
le but principal est de protéger la santé publique, le consommateur et l’environnement.
Le service protection de l’environnement assure la fonction de guichet unique pour l’ensemble des procédures liées aux
installations classées, ainsi que leur contrôle pour les domaines agricoles et agro-alimentaires Dans la logique d’un contrôle
« de la fourche à la fourchette », en amont des missions de contrôle d’hygiène et de sécurité sanitaire des aliments, la DDPP
conduit les actions nécessaires pour lutter contre les zoonoses, les maladies animales réglementées en raison de leur impact
sur la santé des animaux et l’économie du secteur de l’élevage et des industries agro-alimentaires et s’assure des conditions
de bien-être animale.
Par ailleurs, le service de la protection du marché et de la sécurité du consommateur contrôle le respect de la concurrence
dans la commande publique, la sécurité des consommateurs et la loyauté des transactions et de lutter contre les tromperies
entre professionnels, tout en assurant la surveillance des prix des carburants.
Enfin, le service de la protection économique exerce l’ensemble des missions sur ce thème par des enquêtes de nature
principalement judiciaire, il veille au respect de la loyauté des transactions et de l’information donnée au consommateur.
Ce service a enfin une action importante de conseil et d’assistance au consommateur dans des litiges ne relevant pas
directement de ses compétences.
Il y a donc au sein de la DDPP, cinq services techniques de taille variable (lié à la nature de leur activité), auxquels s’ajoute
des missions supports; et cinq donneurs d’ordre (le Premier ministre, le ministère des finances, le ministère en charge de
l’agriculture, le ministère de l’environnement, le ministère de l’intérieur). La très grande majorité des agents est fonctionnaire
de la fonction publique d’état mais dépendant de ministères différents.
Les astreintes
Les astreintes de la DDPP font partie du système des astreintes de la préfecture dont l’objet principal est de participer
à la gestion des situations urgentes touchant principalement la sécurité des personnes et des produits : accident de la
voie publique, retrait de la vente des produits dangereux, maladies animales contagieuses ... Il y a un certain nombre de
situations, rentrant dans le champ des missions de la DDPP, qui peuvent survenir en dehors des horaires d’ouverture et
qu’il est nécessaire de traiter sans attendre pour des raisons de sécurité sanitaire ou économique. Ce système est obsolète
notamment car il ne tient pas compte de la nouvelle organisation de la structure et des nouvelles missions. Sous l’impulsion
de la circulaire du 21 juin 2013 relatif aux astreintes en directions départementales interministérielles, la direction souhaite
aujourd’hui remettre à jour les procédures des astreintes. Le travail demandé pour mon stage consiste à revoir l’organisation
et les outils de mise en œuvre dans l’organisation actuelle en direction départementale interministérielle.
La refonte du système des astreintes est considérée par la direction comme un projet pouvant permettre de fédérer les cadres
de la DDPP autour d’un projet collectif relevant des missions de service public (d’alerte, de crise, de menace, d’incident...)
donc du cœur de métier. Ce projet collectif pourrait permettre de faire émerger un sens commun dans les actions et des
voies de collaboration nouvelles entre services. Cependant, sans savoir quels sont les projets importants et la charge de
travail que cela représente, les agents peuvent choisir de ne pas participer à ces projets en les refusant ou en ne faisant pas
ce qui lui est demandé. L’étude des cultures et identités des segments de la DDPP devrait permettre de mettre en évidence
les différentes rationalités à l’œuvre et ainsi de comprendre ce qui peut pousser les acteurs à agir.
Protocole d’enquête
L’étude de la socialisation professionnelle a été réalisée d’une part, à partir d’archives pour déterminer les différentes voies de
recrutement, des annales de concours, de la sélection des candidats ainsi que l’historique de la fusion des services. D’autre
part, des entretiens semi- directifs des chefs de services, chefs de pôle ainsi que la direction (11 personnes au total) ont été
réalisés dans l’objectif de tirer les grands traits des différentes cultures, des identités professionnelles et le cœur des métiers.
Enfin, j’ai été à l’écoute de chacun, et en travaillant tous les jours auprès d’eux, j’ai appréhendé leurs activités quotidiennes
dans une démarche compréhensive.
La fusion-absorption des Directions Départementales
Des réformes au forceps
De la régionalisation de la DGCCRF à la DDPP : un pas en avant deux pas en arrière de l’avis des agents CCRF
La loi organique relative aux lois de finances (LOLF) promulguée en 2001 et appliquée entièrement pour la première fois
à l’exercice budgétaire 2006, vise à moderniser la gestion de l’Etat. Le décret n°2006-81 du 26 janvier 2006 relatif à la
mise en place d’une nouvelle organisation territoriale de la DGCCRF a été mis en application de la LOLF. Cette réforme a
redéfinie le périmètre d’action des agents départementaux, et modifiée la chaine hiérarchique. Jusqu’à présent les unités
territoriales départementales recevaient les instructions directement de la direction générale. Ce changement organisationnel,
a été perçu comme créant des strates supplémentaires vides de sens pour les agents départementaux, qui est, à l’heure
actuelle, toujours remis en cause. Les agents des fraudes engagés dans cette régionalisation depuis 2006, pensaient ne pas
être concernés par la réforme générale des politiques publiques (RGPP). Par conséquent, les agents CCRF n’étaient pas
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ce mémoire.
34
77
préparés aux changements consécutifs aux RGPP.
La création de la DDPP
Par le suite, le gouvernement a mis en place au 1er janvier 2010 pour l’échelon départemental, puis de 2010 à 2011 pour
l’échelon régional, une nouvelle organisation des services déconcentrés de l’État, avec comme objectifs de resserrer le
nombre de directions départementales et régionales, de renforcer les rôles de pilotage des préfets de département et de
région, en confiant un rôle prééminent aux préfets de région et de permettre des synergies générant des économies de
moyens significatives. Le nombre de directions départementales a été ramené à 2 ou 3 selon les départements, et le nombre
de directions régionales à 5. La démarche choisie peut apparaître a posteriori comme inspirée par la volonté de mettre en
place les nouvelles structures dans les délais les plus rapides possibles, quitte à limiter fortement le temps imparti au dialogue
social de préparation et d’accompagnement de ces réformes, notamment la réflexion relative aux missions.
Les stigmates de la fusion-absorption des DD
La mise en place d’une nouvelle organisation moins cloisonnée entre ministères, entre services, entre corps, entre statut...
pour répondre aux nouvelles exigences de l’intervention publique. Cette nouvelle organisation fragilise pour certains agents
les « petits espaces et collectifs de travail »96 dans lesquels se construisaient ces règles opératoires (en régulation autonome).
Le poste de directeur départemental : un poste mouvant
En trois ans, deux directeurs d’origines et politiques diverses se sont succédés (de 2010 à 2013), par ailleurs, le préfigurateur
n’a pas été celui retenu par le Préfet. Cette mouvance du personnel de la direction, dans cette période charnière, a eu pour
conséquence de gêner la lisibilité des objectifs poursuivis par la structure et a participé à freiner la définition d’une identité
commune dans cette nouvelle structure.
Le passage de petites structures identifiées vers une structure de grande taille inconnue des administrés
La structure fusionnée a une taille plus importante qu’auparavant. Cela a des effets sur l’activité des agents, puisque ceuxci travaillent désormais dans des structures dont ils peuvent ne pas connaître tous les membres. Les agents cohabitent
avec d’autres agents avec lesquels ils n’auront pas de contact, ni en terme de coopération active au travail, ni en terme de
relationnel. En cela, les structures ne correspondent plus aux cadres régulatoires antérieurs.
Le second impact lié à la fusion concerne la plus grande variété des profils professionnels des agents. Au sein de la DDPP
se côtoient des ingénieurs, des juristes, des vétérinaires... de l’agriculture, de la préfecture ou des fraudes qui n’ont pas le
même profil, la même trajectoire de formation, et qui ont pu être auparavant en concurrence. Aussi de nouveaux cadres
de coopération sont à trouver. Le contenu même de l’activité est redéfini parce qu’il s’agit pour tous ces professionnels de
coopérer avec des acteurs qui n’ont pas les mêmes standards et repères de pratiques.
Enfin, on observe une forme de glissement des régulations organisationnelles, depuis la production de règles opératoires vers
la production de règles de coordination des activités. Cela n’est pas sans conséquences sur les acteurs du « terrain » voyant
leurs supérieurs s’éloigner de leur activité « pratique ». Cela entraîne des conséquences sur la légitimité de l’encadrement et
accentue la distance hiérarchique.
La DDPP constitue donc un système faiblement lié. Cette nouvelle structure est confrontée à une difficulté de taille : celle
de produire des régulations qui intègrent suffisamment l’ensemble des acteurs et qui aient un sens dans la conduite de leur
activité. La nouvelle organisation des astreintes pourrait participer à la production de ces régulations.
Une variété des expériences du changement organisationnel
On observe une fracture entre ceux qui vivent ces changements comme exogènes et ceux qui se vivent comme des
acteurs.
Certains se sont positionnés en serviteurs loyaux de l’État et se sont fait un devoir d’appliquer les réformes, mais
cela ne signifie pas qu’ils partagent toujours des orientations prises par les RGPP. On trouve des tensions assez fortes
entre leurs différentes valeurs : défense de l’ancien modèle et loyauté envers le service public. Mais c’est l’attachement à la
loyauté (règle jugée incontournable à la fonction) qui l’emporte généralement dans leurs comportements et qui explique leur
comportement d’obéissance.
Il y a, par ailleurs également, des agents qui se vivent comme les objets des changements organisationnels. Ceux-ci
perçoivent l’ensemble des transformations comme les effets directs des transformations organisationnelles qu’ils récusent
(RGGPP, RéATE...). Ils sont farouchement opposés aux « philosophies » qui leur semblent sous-jacentes à ces réformes. Cela
se traduit par des oppositions et des résistances à toute forme de changement (opposition à des changements d’espace de
travail mais aussi des oppositions à la redéfinition des équipes de travail).
La DDPP, créée depuis 2010, a compétence dans des domaines variés, pouvant être indépendants les uns des autres.
Par ailleurs, les profondes modifications organisationnelles ont modifiés les cadres et régulations antérieures, aujourd’hui la
structure constitue un système faiblement lié. Cette nouvelle structure est donc confrontée à la difficulté suivante : celle de
produire des régulations qui intègrent suffisamment l’ensemble des acteurs et qui aient un sens dans la conduite de leur
activité. Par ailleurs, le phénomène culturel de perte d’identité entretenu par des stratégies contradictoires et des normes de
comportements différentes est une entrave à la réussite de coopération efficiente dans la DDI. Celle-ci ne peut réussir que
96
97
MILLY B. le travail dans le secteur public, PUR, 2012, p29
BERNOUX P., La sociologie des organisations, Points, 2009, p 413.
78
si l’unité de direction de la DDPP est assurée. Elle relève d’une stratégie organisationnelle, qui va être déployée autour de
l’organisation des astreintes notamment en s’accompagnant d’un grand respect des sous-cultures. Aussi, la partie II a pour
objet de décrire les sous cultures présentes dans l’organisation.
Les cultures de la DDPP entre convergences et conflits
L’étude des cultures et identités des segments de la DDPP permet de mettre en évidence les différentes rationalités à l’œuvre
et ainsi de comprendre ce qui peut pousser les acteurs à agir (registres de motivation). Ainsi, la définition des cultures met en
évidence ce qui limite les capacités d’action. En effet, d’après Philippe Bernoux 97 : « Une mutation pour être acceptée doit
s’insérer dans le système technique et culturel existant, le perfectionner et non le contre dire ; elle doit, de plus, ne pas aller
à l’encontre du système de valeurs ni du système de pouvoir ».
La socialisation professionnelle des segments de l’organisation
Une formation d’un an forme à l’ensemble des métiers de la DGCCRF sur l’ensemble des entreprises concernées. La
formation est par conséquent dense et assez généraliste. De formations initiales diverses, les stagiaires sont majoritairement
juristes ou de formations scientifiques. En fonction de la formation initiale, ils deviennent cadre B ou A, mais il y a des facilités
pour gravir les échelons aussi, il y a de nombreux inspecteurs qui étaient au préalable contrôleurs. Ce qui crée une proximité
entre les agents dévolus au terrain et ceux de l’encadrement. De plus, tous les cadres formés ont pour leurs premières
affectations des missions d’inspections, ce qui renforce cette proximité entre les agents.
Les inspecteurs de la santé publique vétérinaire (ISPV) sont recrutés sur concours en quatrième année de cursus vétérinaire
et en fin d’études d’ingénieurs agronomes (pour une faible proportion), ou après une expérience professionnelle vétérinaire.
Ils suivent, avant leur prise de poste, les enseignements de l’Ecole National des Services Vétérinaires. Les ISPV constituent
une corporation au même titre que les médecins. Il y a une distribution des tâches en lien direct avec le statut et la profession.
Les ISPV sont détenteurs d’une fonction et d’un rôle directement hérités de leur formation. Leur formation est technique et
managériale.
Pour les attachés administratifs, la formation a lieu l’Institut régional d’administration de Metz et dure douze mois. Elle repose
sur l’alternance entre des périodes d’enseignement à l’institut et deux périodes de stage. A l’issue de la formation, les
stagiaires sont cadres A et ont vocation à travailler dans l’administration de l’éducation nationale et les Préfectures. Ils ont une
formation de gestionnaire administratif qui leur permet une grande mobilité dans les administrations.
Les formations sont diverses : généralistes et administratives, techniques et bien définies (ISPV). Ces formations sont à
l’origine de rationalité et de cultures différentes qui devront cohabiter dans la nouvelle organisation des astreintes.
Les rationalités des acteurs
Le sens de l’action
Le sens donné à l’action bien que portant sur des domaines d’action pouvant être différents en fonction des segments de
l’organisation (protection économique du consommateur, santé publique ou intérêt général), celui-ci est confluant autour de
la notion de « protection de la population ».
Des méthodes et philosophies de travail différentes...mais qui tendent à converger
De façon caricaturale, les agents « agriculture » mettent en œuvre des mesures de police administrative permettant de
maîtriser les risques : fermeture administrative, mise en demeure de mettre des mesures correctives curatives et préventives
; tandis que les agents « fraudes » sont les spécialistes du contentieux (procès-verbaux). Cependant, les pratiques si elles
n’étaient pas totalement partagées auparavant convergent de plus en plus.
Recherche d’autonomie vs ceintures et bretelles
Chez les agents fraudes, l’autonomie dans le travail est revendiquée notamment afin de mener les investigations nécessaire
aux enquêtes : « Moi, quand j’ai commencé à être inspecteur fraude, on était assez autonome, on avait des enquêtes à
faire etc.... dans un délai bien sûr. Mais on était très libre de faire cette enquête. On a un certain nombre de pouvoirs, des
panels d’infractions à constater, on n’avait pas vraiment de schémas d’enquête, chacun bâtissait un peu à la manière d’un
policier de l’économie. » A contrario, les méthodes d’inspection sont très formalisées pour les missions « agriculture » dont
l’inspection est sous assurance qualité97 . Le savoir faire et opposé à la procédure pouvant créer des chocs de rationalité.
Les mondes de la DDPP
L’observation et les entretiens menés ont permis de classifier les agents de l’encadrement en différents mondes (selon le
modèle des mondes de Laurent Thévenot et Luc Boltanski 98) en fonction des différentes perceptions de leur travail. La
méthode et les témoignages utilisés pour l’enquête sociologique ont leurs limites mais ils me paraissent suffisants pour
dresser de grandes lignes de compréhension. J’ai identifié au sein de l’organisation, les mondes suivants : le monde
industriel, le monde civique, le monde de l’opinion et le monde projet. Dans chaque monde, les valeurs (ou principes) de
justifications mobilisées forment un système de cohérence. Il y a un véritable bouillon de culture à la DDPP, oeuvrant avec
des rationalités diverses. Si ces rationalités sont différentes, de nombreuses voies d’interaction sont possibles et souvent
Accréditation COFRAC , norme ISO 17020.
BOLTANSKI L., THEVENOT L., De la justification. Les économies de la grandeur, Paris, Gallimard, 1991.
100
SAINSAULIEU (R.), 1977, L’identité au travail, Presses de la Fondation nationale de Sciences politiques, rééd.1985.
98
99
79
convergentes. C’est sur ces bases que devra s’appuyer la nouvelle organisation des astreintes.
Les négociations autour de la réorganisation des astreintes
Comment alors créer de la coopération dans cette nouvelle structure?
Des logiques d’actions divergentes face aux astreintes
Les enjeux des acteurs
Les enjeux des acteurs méritent d’être détaillés afin d’anticiper d’éventuelles possibilités de compromis, les modes
d’inscription qui sont les leurs, les systèmes d’équivalence à la lumière des mondes au sein desquels ils s’enracinent. Ces
enjeux sont une variable explicative des logiques d’actions rencontrées. Elles sont variées et peuvent être divergentes.
Les systèmes de relations et les identités collectives
On retrouve dans ces négociations autour des astreintes deux modèles d’identité au travail100 :
Dès les premiers débats
autour des astreintes, des alliances se sont rapidement faites entre acteurs aux enjeux convergents, particulièrement pour
ceux qui refusent la participation aux tâches. Dans ce cas-là l’union fait la force ! Une conduite de retrait est dès le début
adoptée et constitue ainsi une coalition offensive. Ils forment des acteurs de masse en accord au principe de cohérence de
leur monde de l’opinion.
Le deuxième modèle rencontré est celui de la fusion. Les acteurs se fondent dans le groupe. Ils ont
été désignés volontaires pour participer aux astreintes (dès 2010), ils ne pas en cause leurs participations, mais souhaitent
que le sujet des astreintes soit mis en débat afin de dégager un consensus accepté par tous. La négociation et l’acceptation
des différences sont de mises. Pour ces acteurs l’autorité imposée est refusée, tant que la direction est un leader qui facilite
les relations dans le groupe et l’avancée des projets elle est légitime.
La recherche des possibilités d’accord : quelques outils pour les astreintes
La théorie de la traduction peut nous permettre de guider la gestion des changements, les outils présentés ici sont directement
inspirés de la sociologie de la traduction de B. Latour et M. Callon. Nous nous concentrons ici dans une perspective
managériale afin d’aider dans la conduite du changement.
Des acteurs en demande de sens : propositions de reformulation du sens des astreintes en fonction des différents mondes
et des rationalités
Quelles sont les traductions à opérer pour modifier le système d’action concret en lui donnant un degré de convergence
plus important ? Le tableau en annexe 1, cherche à répondre à cette question, en traduisant le sens du projet des astreintes.
Les propositions d’outil d’aide à la réalisation de l’astreinte
La structuration de réseau d’aide à l’astreinte
L’objectif est de favoriser l’introduction du changement en considérant que la réussite de celui-ci dépend de la structuration
de l’organisation en réseau101 (cf. annexe 2), dans l’objectif de rassurer les agents d’astreinte. L’astreinte de sécurité est
un des piliers de l’astreinte réalisée par les services de l’Etat au niveau départemental (par définition d’autres directions et
services sont d’astreinte ou de permanence). Parallèlement à ces soutiens externes, j’ai proposé à la structure de mettre
en lumière le fait que, en plus de l’astreinte de sécurité il y a toujours une astreinte de direction. La charge est d’assurer
la continuité des fonctions de direction (dors et déjà permanente), notamment la communication, et de coordonner les
interventions si besoin est. En effet, il est nécessaire que le « traducteur » aide et nourrissent le lien qui relie les membres de
ces entités hétérogènes qui constituent un réseau.
La « mallette d’astreinte » : un outil d’aide à la décision, accompagnant pas à pas les agents d’astreinte
A partir des interventions recensées dans l’ensemble de la région, une « mallette d’astreinte » a été constituée. Sa construction
a fait l’objet d’une part importante lors de mon stage. Chaque situation fait l’objet d’une fiche réflexe, à visée simple et
didactique (donc support de compromis), qui est une aide à la gestion des interventions (cf. annexe 3)
La conduite du changement : la mise en lumière des résistances
Après les phases d’entretien et d’élaboration des outils, une première réunion de restitution a été organisée, permettant de
voir le champ provisoire des possibles se préciser. L’objectif était d’associer les acteurs à l’élaboration des décisions alors
que ce sont eux qui vont avoir à les mettre en œuvre pour ensuite amorcer le changement.
Les négociations menées d’une main de fer pour rompre les cercles vicieux
102
La tâche autour des astreintes est ardue, dès les premiers échanges collectifs autour de la réorganisation des astreintes,
certains acteurs expriment leurs grandes réticences à partager la charge de cette tâche. Très rapidement ce comportement
conduit le management de la direction à devenir directif afin de mettre en œuvre le nouveau système d’organisation des
astreintes espéré.
Les scenarii d’organisation envisagés
Dans l’objectif de distribuer les rôles, d’enrôler les acteurs, et de chercher des « porte-paroles » plusieurs scenarii d’organisation
ont été proposés (cf. annexe 4). Ces scénarii ont été présentés dans le dernier mois de mon stage, et les négociations autour
M. AKRICH, M.CALLON et B.LATOUR, Sociologie de la traduction : textes fondateurs, Paris, Mines Paris Tech, Les presses,
« sciences sociales » ,2006.
102
M.CROZIER, Le phénomène bureaucratique, Paris, Le Seuil, coll Points et Essais, 1964.
103
F. CHAMPY, La sociologie des professions, PUF, 2010, p56.
101
80
de ces changements organisationnels étaient encore en cours lorsque j’ai quitté la DDPP.
Conclusions
Le changement de l’organisation des astreintes remet fondamentalement en cause certaines valeurs des organisations
concernées. Il y a un certain nombre d’acteurs en situation de freinage. Ces comportements sont consécutifs au passif
mais également à un manque de visibilité sur le futur. Depuis la création de la DDPP des changements ont été réalisés. La
révision du système des astreintes met en évidence les différences culturelles entre les segments de l’organisation et la perte
de sens des activités. Le changement de l’organisation des astreintes est amorcé, mais l’objectif de créer une communauté
de travail reste à atteindre.
«La coopération des acteurs suppose qu’ils partagent des conventions, c’est à dire des conceptions communes du travail,
qui sauf dysfonctionnement de la coopération, n’ont pas besoin d’être explicitées. Les conventions sont construites dans la
pratique103. »
La création de la coopération dépasse largement le sujet des astreintes et si de nombreux progrès, remarqués par tous, sont
constatés il reste du chemin à faire pour atteindre l’objectif de coopération. Ci-dessous quelques modestes recommandations
dans l’espoir d’aider à la construction de la communauté de travail.
L’intéressement et les alliances
Il serait intéressant de s ‘appuyer sur les différentes personnalités de la direction pour, d’une part, écarter les individualités en
position de freinage et d’autre part, faire émerger des personnalités motrices au sein des chefs de pôles.
L’objectif étant de valoriser les différentes cultures pour créer du collectif.
« Tout changement nécessite, comme conditions nécessaire, la prise en compte des rationalités des différents acteurs
impliqués et donc la reconnaissance non seulement qu’ils peuvent et doivent infléchir les actions de changement, mais que
concrètement ils les infléchissent et les modifient. Pas de changement possible sans reconnaissance de ce qu’il engage la
rationalité des acteurs qui y sont mêlés104. »
La direction ayant clairement précisé ses orientations, elle devrait désormais s’appuyer sur un processus de reconnaissance
des compétences et de valorisation du travail de chacun.
Au centre de ces fondations se situe le sens des missions.
Le sens des actions
« Aucun changement ne peut avoir lieu si les acteurs ne lui donne un sens105 ». Quel que soit le monde auquel les agents appartiennent, ceux-ci sont en demande de sens. Il paraît intéressant de (re)définir
des objectifs stratégiques pour guider les managers dans le sens des activités. Ces objectifs ainsi affirmés ne sont pas
négociables, en revanche les moyens à mettre en œuvre pour les atteindre doivent émerger de la communauté de travail.
Ces objectifs donnent des lignes directrices fermes et claires. Une attention particulière au vocabulaire devra être portée
afin que chaque segment de l’organisation se reconnaisse et puisse adhérer.
Il en est de même pour l’accompagnement
au changement de l’organisation des astreintes. L’objectif poursuivi par la direction doit être expliqué avec pédagogie sans
craindre de répéter. Le sens de cette mission doit être traduit pour chacun par le porteur du projet (§II-1- Des acteurs
en demande de sens : propositions de reformulation du sens des astreintes en fonction des différents mondes et des
rationalités).
Faire confiance : piloter et non réaliser
Il faut veiller à laisser la main-mise sur la technique aux chefs de services. En effet, c’est notamment, par des projets techniques
que les managers assoient leur légitimité et motivent leurs agents. Si la direction se positionne en expert technique, elle
touche au coeur du métier des chef de service et donc par là les ampute d’une partie de la reconnaissance dont ils ont droit.
La direction doit rester cantonnée au pilotage, à la communication et à la coordination.
Un projet fil conducteur des missions des services
Afin de faire émerger des solutions locales et d’apporter un fil conducteur dans les missions des services, des projets
pourraient être lancés dans les services. En effet, il faut laisser la place à l’innovation par les services. Il semble que les
lois d’avenir et Hamon peuvent être des opportunités par cela. Des réflexions pourraient être menées sur l’information du
consommateur dans les restaurants par exemple, ou sur la simplification administrative, ou sur la police administrative. Il est
possible que des solutions émergent du local.
Favoriser les projets interservices
Il y a peu de projets interservices en dehors des opérations du type comités opérationnels départementaux anti-fraude
(CODAF), plus d’actions conjointes pourraient être réalisées afin d’augmenter l’efficience des contrôles et d’ouvrir d’autres
voies d’investigation.
Laisser du temps au temps
104
105
P. BERNOUX, La sociologie du changement, Points, 2004, p307.
P. BERNOUX, La sociologie du changement, Points, 2004, p191.
81
L’appropriation du changement nécessite du temps, pendant lequel la direction doit continuer à expliquer les objectifs et
poursuivre la mise en place des actions.
Communiquer sur les actions réalisées par la direction concernant la rémunération et les conditions de travail
La seule marge
de manœuvre de la direction sur la rémunération est de faire remonter les inégalités salariales au niveau national et auprès
du Préfet. C’est sur ce point qu’elle devrait communiquer pour montrer qu’elle est consciente de ces disparités et qu’elle
agit pour les réduire.
De la convivialité !
Des moments de convivialité ont été mis en place au sein de la direction pour l’ensemble des agents mais également au
sein des services. Il pourrait être instauré des moments de convivialité plus récurrents. Afin de faciliter la communication
notamment, il pourrait être institué des déjeuners mensuels après les CODIR ; ou encore, des initiatives ludiques telle que
des échanges de livres ou de plantes pour tous les agents.
Le management se doit d’être présent dans les moments forts de la vie des agents : pot de départ, pot d’arrivée, naissance...
Annexe 1 : Traduction en fonction du monde et des rationalités des acteurs
En fonction de ces différents mondes, il est proposé une traduction du sens des astreintes.
Monde
Formulation du sens des astreintes
Civique
La DDPP est désormais une communauté de travail mais elle est toujours un système faiblement lié. Ces membres ne constituent pas encore une réelle communauté de travail. La
nouvelle structure doit produire des modes de fonctionnement qui intègrent suffisamment
l’ensemble des acteurs et qui ait un sens dans la conduite de leur activité.
Le projet des astreintes est l’occasion de créer du collectif centré sur la continuité des services
aux consommateurs et aux entreprises.
L’exemple donné par les managers dans ce projet portera du sens pour l’ensemble des agents et encouragera le travail d’équipe et la collaboration
sur l’ensemble de la structure.
Industriel
La DDPP se doit de s’organiser afin de gérer les alertes et les urgences potentielles qui peuvent
arriver en dehors des horaires d’ouverture conformément à la réglementation en vigueur. Il
existe des situations pour lesquelles les administrés, d’autres administrations ou des entreprises ont besoin d’une intervention de la DDPP en urgence (accident de transport, alerte
produit...).
Ces astreintes sont une contrainte pour tous mais elles doivent être réalisées. Le partage de
cette tâche sur l’ensemble de l’encadrement permet de répartir cette charge de travail. C’est
l’organisation la plus efficace.
Les astreintes créent des réseaux de collaboration au sein de la structure, ce qui créera du dynamisme dans la collaboration des services. C’est donc un projet qui impulsera une dynamique
dans la communauté de travail, et qui amorcera pour les nouveaux projets le travail de collaboration des acteurs en vue d’évolutions futures.
Annexe 2 : Les réseaux pour le fonctionnement des astreintes
82
Annexe 3 : Extrait de la mallette d’astreinte
83
Annexe 4 : scénarii d’organisation proposé au CODIR
Scénario 1 : Projet collectif fédérant l’ensemble des chefs de service et adjoints au chef de service autour des missions
de service public
Forces
Faiblesses
Projet fédérateur
Fréquence des astreintes (1 astreinte / trimestre)
Difficultés à rassembler autour du projet notamment
dans en le service PEC (pas d’urgence)
Opportunités
Menaces
Création d’une dynamique de travail collectif au niveau
des cadres et pouvant être moteur pour un travail collectif de l’ensemble des agents.
Non adhésion au projet
Scénario 2 : Projet collectif fédérant l’ensemble des cadres de la DDPP
Forces
Faiblesses
Valorisation du statut cadre
Nombre important d’agents éligibles.
Fréquence des astreintes faible (de l’ordre d’une semaine /an).
Risque de « démotivation » des techniciens chefs notamment.
Opportunités
Menaces
Instaurer un dialogue entre les services Echanges de
pratiques
Difficultés de formation
Non adhésion au projet
Scénario 3 : Projet ouvert à tous les agents de la DDPP
Forces
Faiblesses
Scénario qui ménage les sensibilités.
Assiette de recrutement importante.
Sélection des candidats.
Compétences à acquérir.
Opportunités
Menaces
Non adhésion au projet
Difficulté de formation
Scénario 4 : Projet collectif fédérant l’ensemble des chefs de service et un agent de son service autour des missions
de service public
Forces
Faiblesses
Apport de compétences
Perte des objectifs initiaux
Opportunités
Menaces
Responsabilisation des agents les plus impliqués et
compétents.
84
Y aurait-il un Globodera français et un Globodera belge ?
Etat des lieux et comparaison de l’application, en Belgique et en France, des directives européennes sur la gestion des
nématodes à kystes de la pomme de terre ou comment une même Directive – la Directive 2007/33/CE du Conseil du
11 juin 2007 concernant la lutte contre les nématodes à kystes de la pomme de terre et abrogeant la directive 69/465/
CEE – est retranscrite dans deux pays frontaliers : la France et la Belgique
Bruno MEGANCK, Inspecteur Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 10 avril 2014 au 8 août 2014 au SRAL de la Direction Régionale de l’Alimentation, de l’Agriculture
et de la Forêt du Nord-Pas-de-Calais
. Mémoire de stage rédigé sous la direction de Sébastien GARDON (SciencesPo
Lyon – ENSV VetAgro Sup – Triangle - ACSPAVE)
Questions abordées par l’étude 106
Professionnel 3 : « Y a la manière dont c’est écrit à Bruxelles, la manière dont c’est retranscrit et la manière dont c’est
appliqué »
Professionnel 3 : « beaucoup de choses viennent de l’application... l’application n’est pas faite partout de la même
manière »
Professionnel 3 : « A chaque fois qu’il y a quelque chose qui sort ça tend vers plus d’harmonisation, puis on s’aperçoit
en réalité que c’est complètement faux parce que il suffit qu’on entende parler ou du Grenelle de l’environnement, ou
de...comment dire... de la loi d’avenir, ou je sais pas quoi pour que chacun adopte... comment dire, ses propres lois, ses
propres règles et puis après on s’aperçoit que l’harmonisation et ben... »
Les déclarations de ce professionnel rejoignent, effectivement, ce que nous avons observé dans le cadre de notre
travail.
Pour une même Directive, dans notre cas la Directive 2007/33/CE du Conseil du 11 juin 2007 concernant la lutte contre
les nématodes à kystes de la pomme de terre et abrogeant la directive 69/465/CEE, nous observons des différences
réelles dans son application entre 2 pays voisins : la France et la Belgique. Différences avérées car observées à la fois
dans les textes réglementaires, dans les textes infra réglementaires et dans le discours des acteurs rencontrés – acteurs
administratifs et professionnels français et belges. Ces différences sont au nombre de 3 et sont en faveur de la Belgique
; il s’agit de :
- la possibilité, en Belgique, de valoriser les lots contaminés, - la possibilité, en Belgique, de réaliser des analyses de laboratoires en dehors des plans de surveillance (donc de
réaliser des autocontrôles) sans avoir à faire les notifications individuelles en cas de résultat positif, - et, en Belgique, le choix d’un échantillonnage du champ plus favorable et la possibilité de délimiter une parcelle
contaminée plus restreinte que le champ en cas de résultat positif. Si elles sont finalement peu nombreuses elles sont fondamentales ; elles sont sources de récriminations fortes de la part
des producteurs de pommes de terre de consommation du NPdC qui se sentent lésés. Fondamentales au point d’être
proposées comme sujet de stage par le SRAL de la Région concernée. Or il est, a priori, étonnant que les applications d’une Directive, qui vise à une convergence transnationale du droit, se
soldent par de telles différences. C’est pourquoi nous nous sommes attachés aux fondements de ces différences. A l’étude des textes et du résultat des entretiens et des observations, nous avons pu déterminer que ces différences
étaient dues à une traduction différente, dans chacun de pays concernés, engendrée à la fois par des contextes de
contamination différents et par des comportements administratifs presque opposés. On retrouve : Du côté français la recherche du risque zéro et, au-delà d‘éviter toute diffusion du parasite, la volonté de l’éradiquer
complètement dans les zones où il est présent. D’où le choix de ne pas accepter les possibilités prévues par la Directive,
sur l’utilisation des lots contaminés, tant que les processus de décontamination (lavage ou traitement industriel) ne
montreront pas une efficacité de 100%. Ce choix étant, probablement et aussi, dû au fait que la contamination ait
un historique plus récent et une localisation plus restreinte – et donc, d’un appui officieux des « nouvelles Régions
» productrices de pommes de terre de consommation, ou au moins l’absence de revendication concertée des
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ce mémoire.
106
85
organisations nationales de professionnels, qui ne sont pas encore touchées par le parasite.
La « traduction » est : la
Directive vise l’éradication du parasite.
On observe aussi une culture administrative fortement centralisée qui laisse peu de place à une possibilité d’autogestion
par les professionnelles, voire qui présente une certaine méfiance vis à vis de ces professionnels.
Du côté belge le choix d’une gestion, plus pragmatique, permettant de « vivre avec » le parasite tout en empêchant
sa diffusion et en limitant son développement dans les zones où il est présent. Ce choix étant, probablement et en
partie, due à un historique de contamination plus ancien, et une étendue de contamination proportionnellement plus
importante.
La « traduction » est : la Directive ne vise pas l’éradication du parasite, mais le contrôle de sa diffusion.
On observe aussi une attitude plus conciliante, plus attentive aux considérations économiques des professionnels, dont
les organismes de représentation nationale se sont mobilisés.
Nous sommes, par conséquent, en face d’une réelle appropriation de la Directive par chacun des deux pays, qui ont
adopté cette norme réglementaire par le prisme de leur « réalité nationale »107.
« De ce fait, les normes et les outils portés par des acteurs (intermédiaires) transnationaux ne font pas, en général, l’objet
d’une simple transposition au niveau des politiques publiques nationales : ils sont, au sens littéral et sociologique du
terme, « traduits » nationalement 108»
Par ailleurs, cette différence dans l’application est à l’origine d’un ressenti complètement contraire entre les professionnels
du NPdC et de Belgique.
Nous avons, effectivement, constaté que le choix français, dans la gestion des nématodes, provoque ce que nous
avons appelé une « tabouisation » du nématode à kystes de la pomme de terre ; tout est fait pour « passer entre les
mailles du filet » et on en parle pas, on ne veut pas savoir. Un climat de défiance tourne autour de ce parasite Ce
qui se traduit, par exemple, par le refus des producteurs de vendre leurs pommes de terre de consommation pour
l’export. En effet, l’export nécessite une analyse et donc le risque de déclencher les mesures officielles contraignantes
en cas d’analyse positive. Au final cela crée un manque à gagner au niveau économique et une incertitude quant à la
contamination réelle du sol.
A l’inverse, en Belgique la gestion est décomplexée, le nématode n’est pas un problème. Les producteurs n’hésitent
pas à effectuer des autocontrôles. Et au final le commerce marcherait mieux et l’image de la contamination serait plus
fiable.
Nous ne pouvons, toutefois, pas juger de l’efficacité de la gestion de l’un par rapport à l’autre. S’il est certain qu’en
terme de « bien-être » du professionnel le choix de l’application belge est plus efficace...
DGAL« Je voudrais bien savoir, avec ce type de méthode, combien de zones ont retrouvé leur statut assaini. C’est une
vraie question. Parce que c’est toujours l’argument qu’on nous oppose français qui sommes un peu rigides (...) mais
pour autant, je voudrai bien savoir la fameuse gestion du niveau de contamination qu’est-ce que ça donne. Ça donne
que on va pas trop y regarder, on n’embête pas trop les gens, ça fait pas de conflit, on est bien d’accord, par contre...
euh... dans le cadre du nématode à kyste est-ce qu’ils ont réussi à baisser leur pression de nématodes pour autant. »
... on ne peut généraliser cette efficacité à l’ensemble de la politique considérée, ici la lutte contre les nématodes à
kystes de la pomme de terre ; nous nous rappelons, à ce propos, du commentaire de l’agent de l’UPC de Mons sur le
choix de l’échantillonnage des champs et de la définition des parcelles contaminées.
Les autorités fédérales belges en charge de la gestion officielle
de la santé animale. Etude sociologique sur la perception de
leur fonctionnement par les partenaires
Benoîte LETAVERNIER, Inspectrice Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 14 avril 2014 au 25 juillet 2014
à l’Agence Fédérale pour la Sécurité de la Chaîne Alimentaire
HASSENTEUFEL P., « De la comparaison internationale à la comparaison transnationale : Les déplacements de la
construction d’objet comparatifs en matière de politiques publiques », op.cit.
108
Ibid.
107
86
(AFSCA, Belgique). Mémoire de stage rédigé sous la direction de Boris OLLIVIER (DGAL)
Questions abordées par l’étude 109
L’État belge a connu depuis 1970 une série de réformes constitutionnelles qui ont conduit à un État fédéral par
dissociation et qui ont eu un impact sur la politique de gestion de la santé animale, en décentralisant des domaines
spécifiques. Ces réformes constitutionnelles sont les conséquences d’une volonté politique de satisfaire les souhaits de
prise en compte des particularités linguistiques, culturelles, économiques des régions néerlandophone, francophone et
germanophone de Belgique. Par l’instauration de compétences exclusives, la fédéralisation belge a pour particularité
l’équipollence des réglementations des entités fédérées et fédérale : il n’y a aucun lien de subordination entre les
régions et l’État fédéral. Il n’y a pas de droit de veto du fédéral sur les décisions des régions et inversement.
L’administration en charge de la santé publique vétérinaire a été profondément impactée par la dernière réforme de la
fonction publique fédérale en date, la réforme Copernic, qui faisait suite à la crise de la dioxine en 1999. Cette crise a
eu d’importantes conséquences économiques et politiques et a servi d’élément déclencheur pour lancer une réforme
radicale dans sa forme autant que dans le fond.
L’application de principes tirés du courant idéologique New Public Management (NPM) ou Nouvelle Gestion Publique a
permis une modernisation radicale de la fonction publique à l’aide notamment l’utilisation d’outils de management issus
du secteur privé. Un changement de paradigme s’est opéré ; d’une logique bureaucratique classique ou wébérienne,
le gouvernement a souhaité faire passer l’administration fédérale à une logique bureaucratique marchande. Le citoyen
est devenu un « client », a pris une place centrale dans la réforme Copernic et les services publics fédéraux se devaient
de répondre aux demandes et attentes de celui-ci. Du fait de la crise de la dioxine et des faiblesses révélées par
celle-ci dans l’organisation des services des ministères de l’Agriculture et de la Santé publique, la réorganisation de
l’administration en charge de la sécurité de la chaîne alimentaire devait être réalisée. Une nouvelle culture administrative
s’est mise en place ainsi qu’une nouvelle gestion des ressources humaines, notamment avec la création des mandats
pour les hauts fonctionnaires dirigeants, des contrats de 6 ans renouvelables assortis d’une obligation d’évaluation par
le ministre de tutelle et de résultats et avec la possibilité de recruter des personnes issues du secteur privé directement
à des postes à haute responsabilité.
Ainsi, l’État fédéral, représenté par l’AFSCA, la DG4 du SPF SPSCAE et l’AFMPS créés à l’aube des années 2000,
chacun pour ce qui le concerne, est compétent pour la politique de gestion de la santé animale pour les animaux captifs,
la politique relative à la sécurité de la chaîne alimentaire et la politique de santé publique relative aux médicaments et
produits de santé. Les régions sont compétentes pour la politique de gestion de la santé de la faune sauvage non
captive, du bien-être animal et la politique agricole également.
Même si la réforme Copernic n’est plus soutenue politiquement, les modalités de fonctionnement des institutions
mises en place sont restées identiques. Bien que toutes les mesures prévues dans la réforme n’aient pas été toutes
suivies d’effet, notamment la suppression des cabinets ministériels, elle a finalement été perçue comme une phase
d’accélération des réformes administratives en Belgique.
Dans le cadre du mémoire PAGERS, en lien avec le sujet technique traité par le mémoire CEAV, il paraissait intéressant de
connaître la perception du fonctionnement du niveau fédéral et pour ce faire, il a été choisi d’interviewer les partenaires
de l’AFSCA et du SPF SPSCAE, des personnes appartenant à des structures très diverses et représentant les principaux
acteurs dans le domaine de la gestion sanitaire: un représentant d’une fédération agricole, un représentant de l’ordre
vétérinaire, des représentants d’associations agréées (ces associations correspondent à la réunion des GDS, EDE et
laboratoires départementaux en France), des représentants d’un laboratoire national de référence, un représentant de
l’Organisation mondiale de la Santé animale. Des retranscriptions d’entretiens réalisés en 2012 par un stagiaire ISPV à
l’AFSCA dans le cadre de son propre mémoire PAGERS ont également été utilisées. Tout ce matériau a permis de tracer
de grandes lignes qui faisaient consensus mais aussi de relever des avis contradictoires.
La fragmentation des institutions fédérales ne permet pas une vision claire de la situation que ce soit pour un regard
extérieur, pour les acteurs intervenant dans la politique publique de l’alimentation ou de la santé animale ou encore pour
les fonctionnaires de ces institutions mêmes.
De plus, les agences fédérales que sont l’AFSCA et l’AFMPS semblent, d’après les acteurs interviewés, opter pour
un mode d’application de politique publique descendante ou « top down », alors que le SPF SPSCAE opte pour
une approche « bottom up » ou ascendante, avec l’établissement d’un réseau durable avec les acteurs du secteur
primaire dans le cadre de la gestion du fonds sanitaire. C’est un fonds d’indemnisations et de compensations en cas
d’application de mesures sanitaires telles que des abattages en cas de découverte de foyers de maladies à déclaration
obligatoire. Il est constitué d’une part de cotisations payées par les éleveurs et d’autre part d’un budget alloué par l’État.
Aujourd’hui, avec l’assainissement progressif des troupeaux, une partie des fonds sert à financer des programmes de
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ce mémoire.
109
87
recherche et de lutte contre des maladies qui ne sont pas à déclaration obligatoire.
Une approche client a également été mise en exergue par les personnes interviewées pour définir les relations qu’elles
pouvaient avoir avec l’AFSCA. Elle aurait vu le jour avec la réforme Copernic et l’application des principes du NPM.
Enfin, un point important lié à la fragmentation des compétences (et donc des responsabilités) et des institutions en
charge de la santé animale a également été relevé : cet émiettement des compétences génère un risque de manque
de responsabilisation des autorités, ce qui pourrait engendrer, en cas de crise sanitaire touchant la faune sauvage, une
perte de temps précieux dans la gestion sanitaire des foyers.
Et finalement, le caractère bicéphale des autorités fédérales a été mis en cause dans le ralentissement de la prise de
décision de par leur manque de communication. Dès lors qu’ont été exprimées les perceptions des différents acteurs
interviewés, il est aisé de leur demande ce qu’il verrait de façon positive dans la réorganisation de l’État fédéral. Une
grande majorité exprime clairement une demande de reconnaissance de leurs avis, positions dans l’élaboration de
la politique de santé publique vétérinaire. Alors que la majorité des personnes interviewées voient d’un bon œil la
simplification administrative, la fusion de la DG4 du SPF SSCE et l’AFSCA, la propre réorganisation de l’agence pour
des raisons de communication interne défaillante et visible, la tutelle d’un seul ministre pour la DG4 du SPF SPSCAE et
pour l’AFSCA, d’autres sont totalement réfractaires. Le SPF SPSCAE n’étant pas assimilé à une autorité de contrôle, il
est vu comme un contre-pouvoir essentiel de l’AFSCA dans la politique de contrôle dans le domaine de la sécurité de
la chaîne alimentaire. La crainte d’une position de suprématie de l’agence est réelle.
Une piste d’amélioration à explorer serait donc celle d’un changement de paradigme au sein de l’AFSCA, le passage
d’un modèle de fonctionnement jugé dirigiste et arbitraire, rigide et peu enclin à l’écoute à un modèle de gouvernance
au sens défini par Patrick Le Galès, les parties prenantes souhaitant être réellement des moteurs et non de simples
opérateurs dans la politique de la santé publique, de la santé animale, de la sécurité de la chaîne alimentaire.
La formation du futur gouvernement fédéral belge aura des conséquences très probables sur l’organisation et la tutelle
des autorités administratives fédérales étudiées. En effet, de par la régionalisation des compétences économiques
agricoles, la présence d’un ministre fédéral en charge de l’Agriculture est considérée par la majorité des acteurs comme
artificielle et ne servirait qu’à représenter le pays auprès des instances supranationales. Si effectivement il n’y a plus de
ministre fédéral en charge de l’Agriculture, l’AFSCA retournera très probablement dans le giron du ministre de la Santé
publique, au même titre que le SPF SPSCAE. En outre, dans le contexte socio-économique actuel, un contexte de
restrictions budgétaires que connaissent tous les pays industrialisés à l’heure actuelle, une recherche de rationalisation
des dépenses publiques paraît évidente et logique pour une fusion de services agissant dans le secteur de la santé
publique vétérinaire.
Le concept One Health Instrument d’action publique
internationale en Asie du Sud-Est
Sabine DIDIERLAURENT, Inspectrice Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 4 avril 2014 au 25 juillet 2014 à l’Unité de Recherche AGIRS du CIRAD (Bangkok, Thaïlande)
.
Mémoire de stage rédigé sous la direction de Muriel FIGUIE (CIRAD)
Questions abordées par l’étude 110
Cette étude est une réflexion sur une action publique internationale, relative à la gouvernance des risques sanitaires
en réponse aux « menaces » pandémiques. L’objet d’étude est la formation One Health utilisée en tant qu’instrument
d’action publique par les organisations internationales en Asie du sud-est.
La mondialisation a modifié la perception des risques sanitaires globaux. « La grippe est la maladie de la mondialisation
», non seulement parce que le virus peut se déplacer rapidement à travers les nombreux réseaux de transport actuels,
mais également par l’arrêt soudain des échanges qu’il peut provoquer (Keck F., 2010a). Cette peur a engendré un
changement de paradigme de la gestion traditionnelle des menaces par les gouvernements, en protégeant leur territoire,
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ce mémoire.
110
88
vers une gouvernance globale des risques sanitaires par les organisations internationales permettant en autres leur
renforcement et le maintien des échanges commerciaux internationaux (Figuié M., 2014).
Contexte de l’étude
L’Asie du sud-est a subi récemment plusieurs crises sanitaires (épidémies de grippe aviaire, SRAS...) qui ont eu un
retentissement mondial, et doit aujourd’hui faire face à de nombreux enjeux liés à la santé. En 2008, K.E. Jones and al
démontrent par une étude rétrospective entre 1940 et 2004 que la distribution des maladies émergentes ou résurgentes
n’est pas liée au hasard. Les résultats montrent que 60% des maladies infectieuses humaines sont zoonotiques, avec
une origine le plus souvent reconnue dans la faune sauvage (71,8%). Les auteurs montrent que les maladies émergentes
infectieuses sont significativement corrélées à des facteurs écologiques (richesse de la biodiversité), environnementaux
(précipitations) et anthropiques (densités et croissance démographique). A partir de ces résultats, ils identifient des
zones dans le monde où les émergences sont les plus à risques. Depuis, il est fait référence aux « hotspots » pour
les régions où l’apparition de maladies infectieuses sont les plus probables dans le monde : l’Asie du sud-est en fait
partie. L’existence des nombreux facteurs socio-économiques, biologiques, environnementaux et politiques montre la
nécessité d’une approche pluridisciplinaire pour permettre une compréhension intégrée et globale de la santé publique
: le concept One Health tente de répondre à cette attente.
Dans cette étude, nous nous sommes donc intéressés à la diffusion du concept One Health en Asie du sud-est par
les organisations internationales, comme une manière de prévenir et de se préparer à une possible catastrophe en
coopération entre les différentes disciplines et les différents secteurs professionnels.
L’objectif technique était de recenser les formations fondées sur une approche intégrative de la santé, appelée ou
non One Health, proposées aux futurs professionnels des pays de la région du sud-est asiatique. Cet état des lieux
permet de mieux connaitre le paysage dans lequel s’inscrit une future formation académique, le master InterRisk pour
«l’évaluation et la gestion des risques sanitaires à l’interface homme-animal-environnement », construit autour d’un
partenariat rassemblant le centre de Coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement
(CIRAD), l’université de Kasetsart (Bangkok, Thaïlande) et l’école nationale vétérinaire de Toulouse (France).
Cette mission technique nous permet également d’étudier le concept One Health sous un autre angle : la formation
One Health est-elle un instrument d’action publique internationale pour changer la gouvernance des risques sanitaires
? Ces changements sont-ils réels ?
La problématique et les hypothèses de départ
L’intérêt réside donc dans la compréhension de la diffusion par les organisations internationales d’un nouveau référentiel
« One Health », et plus généralement d’une approche systémique de la santé, par l’intermédiaire d’un instrument :
l’éducation.
Comment le paradigme One Health est-il diffusé par ces organisations internationales et gouvernementales?
Comment concrètement se met en place l’offre de formation One Health ? Dans quelle mesure ce nouveau paradigme
est-il capable de provoquer un changement dans le processus des formations académiques ? En d’autres termes, estce que les formations mises en place montrent réellement une approche nouvelle de la santé ?
Les hypothèses de départ en réponse se distinguent selon trois niveaux.
Hypothèse 1 : la formation est réellement un instrument de diffusion du référentiel One Health utilisé par les différents
acteurs internationaux.
Pour argumenter cette hypothèse, les recherches sur les sites internet des programmes financés par les organisations
internationales et de leurs activités dans la région apportent un indicateur de l’utilisation de la formation comme
instrument de propagation du concept One Health en Asie du sud-est.
Hypothèse 2 : les formations affichées One Health montrent des changements modestes dans leur contenu.
Pour confirmer cette hypothèse, l’analyse détaillée de onze formations choisies est explicitée par des indicateurs
recueillis lors des recherches documentaires et également lors des entretiens menés dans les universités et les facultés.
Des indicateurs tels que le montage des formations, la construction des modules et le financement des formations
académiques affichées One Health : parmi les organismes de formation, qui s’approprie ce concept ? Pour quels
publics ? Comment sont construits les formations appelées « One Health » ? Y-a-t-il réappropriation et donc recadrage
du concept dans sa mise en œuvre ?
Hypothèse 3 : les changements apparaissent modestes car :
- la définition même de l’objet est floue, toujours en évolution et très malléable : les différences de définition persistent
entre les communautés épistémiques, différences de vision sur l’animal réservoir et l’implication de la santé animale,
89
différence de vision du concept de prévention. Les médecins, hormis ceux impliqués dans la santé publique et la
médecine préventive, se reconnaissent dans le concept Global Health, la prise en charge des malades et ne sont pas
moteurs dans l’approche One Health. - Les barrières entre les disciplines sont des freins à la mise en œuvre : malgré l’engouement, les « silos » disciplinaires
de l’enseignement et des institutions universitaires freinent la mise en application d’une nouvelle approche de la santé.
Pour apporter des arguments à ces hypothèses, nous étudierons les entretiens menés auprès des universités
responsables des formations « One Health », mais également des structures et des réseaux qui coordonnent ou qui
financent ces formations. Des questions générales sur les enjeux et les difficultés dans la mise en œuvre des formations
nous permettent de mieux comprendre pourquoi ces changements restent modestes. La démarche utilisée (partie 1)
Cette étude suit donc une démarche hypothético-déductive.
Plusieurs outils ont été mobilisés :
- les recherches en ligne d’abord sur les sites institutionnels, mais également par mots clés, - le questionnaire construit en anglais avec des indicateurs ciblés pour l’étude précise des formations, - les entretiens pour compléter et collecter de manière la plus exhaustive possible les questionnaires, et des questions
plus générales pour tenter d’appréhender les enjeux et les difficultés rencontrés à la mise en œuvre d’une formation
One Health. - La tenue d’un carnet de terrain pour noter les observations au sein de la structure d’accueil.
Cartographie des acteurs One Health de la région Asie du sud-est et place de la formation dans les projets de
développement (partie 2)
La description des nombreux enjeux de la région Asie du sud-est (cf Introduction), et notamment la caractérisation
des hotspots pour les émergences infectieuses et la biodiversité, explique l’engouement des financements étrangers
d’envergure et le développement de nombreux programmes One Health dans la région, en partenariat entre différents
pays. Les recherches en ligne par les mots clefs décrits dans la méthode nous a permis de faire la cartographie des
acteurs impliqués dans les projets de développement One Health. Pour chaque projet, nous montrons comment le
concept One Health est intégré dans le projet et si le volet formation (ponctuelle ou initiale) y est représenté. Le résultat des recherches montre un large panorama d’acteurs gravitant autour des formations académiques One
Health, l’engouement et la pleine expansion de cette nouvelle vision holistique de la santé humaine et animale. Cette
dynamique a engendré une multitude de projets et réseaux en pleine évolution qu’il est parfois difficile de caractériser
en détail. Cependant le volet renforcement des capacités y est systématiquement représenté, avec notamment de
nombreuses activités de formations qu’elles soient ponctuelles ou initiales. La formation est donc très souvent utilisée
en tant qu’instrument de diffusion du concept One Health par les organisations internationales : cette formation est le
plus souvent ponctuelle alors que l’éducation proprement dite (formation initiale) est moins fréquente. L’étude approfondie des formations One Health montre que des changements sont présents mais modérés (partie
3).
Cette troisième partie étudie douze formations académiques, sélectionnées pour leur approche systémique de la santé.
En fonction des critères d’analyse comparative relevés sur le montage des formations, la construction de leurs modules
et leur financement spécifique, nous pouvons dire que des changements sont opérés, mais ils restent modérés selon
certains critères : - l’interdisciplinarité n’est pas toujours assurée, que ce soit au niveau des étudiants réellement inscrits (avec une faible
implication des étudiants en médecine) ou des différentes sciences enseignées. - les méthodes d’enseignement évoluent mais parfois très modérément, les formations longues présentant la possibilité
d’études de terrain qui semblent plus appropriées pour la mise en pratique du concept One Health. - Le financement reste encore très lié à l’implication des organismes de financement internationaux, répondant plutôt
à une logique de projet à court terme.
De plus, l’impossibilité de différencier les formations décrites en fonction des différents courants d’approche holistique
de la santé (selon les modules ou les maladies enseignés) m’amène à penser que les organismes de formation se
réapproprient et mélangent les différents concepts pour les adapter à leur contexte local (présence ou non de modules
similaires, présence d’intervenants formés...) ou pour capter les ressources financières disponibles: «One Health is a
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sexy word» (communication informelle avec un vétérinaire).
Les changements modérés observés s’expliquent-ils par la jeunesse du concept One Health (partie 4) ?
Dans cette évolution des courants en faveur d’une approche systémique de la santé, nous avons distingué quatre
mouvements, définis à l’aide de critères schématiques, parfois caricaturaux, mais qui servent de grille de lecture, pour
analyser plus facilement l’offre de formation.
Après avoir montré que la formation est un instrument souvent utilisé dans la diffusion d’un nouveau paradigme One
Health par les organisations internationales (partie 2) et que les offres d’éducation fondées sur ce nouveau paradigme
présentent des changements modestes (partie 3), nous montrons pourquoi ces changements sont modérés, pourquoi
l’adaptation à cette nouvelle approche holistique de la santé semble acceptée mais difficile à mettre en œuvre.
En effet, l’étude des changements apportés grâce aux formations One Health montre d’une part, un réel engouement
pour une approche systémique de la santé par les acteurs concernés, mais d’autre part des difficultés de compréhension
entre différentes communautés épistémiques (particulièrement les médecins et les vétérinaires) et des barrières
disciplinaires liées au fonctionnement historique de l’enseignement.
Pourtant, la dynamique que ce concept apporte dans des pays en plein essor comme l’Asie du sud-est laisse penser
que cette approche, certes novatrice et peut-être difficile à mettre en œuvre, est encore en pleine évolution et mérite
d’être suivie et encouragée pour les impacts positifs qu’elle semble apporter, tout en sachant que cette positivité n’est
pour l’instant qu’une croyance.
Les limites de l’étude
Cette étude n’a pas pu tout percevoir. D’autres champs pourraient être explorés tels que l’importance des
communications entre les différentes cultures, et également l’influence des financements et des bailleurs de fond sur
les formations One Health mises en place (leurs intérêts propres, leur influence...). De plus, nous n’avons pas pu étudier
de manière approfondie l’impact de ces formations One Health sur les étudiants ou les participants, quelles seront leurs
prochaines compétences et quelles carrières ou aptitudes ces formations leur apporteront.
La commande de départ n’a pas pu être réalisée sur l’ensemble des pays de l’Asie du sud-est.
Les recherches en ligne se sont principalement portées sur quatre pays : Thaïlande, Vietnam, Indonésie et Malaisie.
Elles ont suivi la démarche décrite dans la seconde partie et ont donc suivi l’identification des bailleurs de fonds,
des projets et des réseaux One Health. Ce cheminement peut entraîner un biais dans les recherches car de ce fait,
les programmes les plus visibles (en terme de communication), financés par des organisations internationales sont
identifiés en premier lieu.
Ce biais a été partiellement compensé par des recherches complémentaires sur les universités déjà identifiées, et
également par la définition des mots clefs englobant des concepts EcoHealth et Global Health, qui se rapprochent
de One Health. Cependant certains pays comme les Philippines n’ont pas été explorés, car relativement absents des
projets connus, alors même que de nombreuses universités proposent des formations de médecine, de santé publique
ou de médecine vétérinaire (ces trois branches sont souvent recensées dans les réseaux One Health).
La visite physique des acteurs sur différents pays étaient impossibles en quelques mois. Le choix s’est donc
principalement porté sur la Thaïlande (Bangkok et Chiang Maï), lieu du stage, et le Vietnam (Hanoï). Des entretiens
à distance ou par mail avec les acteurs indonésiens ont permis d’explorer partiellement ce gigantesque pays qu’est
l’Indonésie. En revanche, je n’ai reçu aucune réponse des acteurs malais. Ceci peut amener à méconnaitre d’autres
mouvances dans d’autres pays.
Les différentes approches holistiques de la santé sont encore floues et en pleine évolution.
La complexité des concepts définis dans cette étude rend difficile la sélection des formations étudiées. Plusieurs
spécifications coexistent ; j’ai donc choisi des définitions internationalement reconnues, parfois larges et encore floues
(Leboeuf A., 2011). Cela complique la sélection des mots clefs et surtout la sélection des formations One Health like.
De plus, l’évolution rapide des dernières années (suite aux crises sanitaires de la région) et la dynamique que les
financements internationaux entrainent dans la région, ont pour conséquence que les résultats de notre étude
pourraient devenir partiellement obsolètes dans un délai assez court. Ce biais est en partie compensé par la recherche
des formations en cours de construction (exemple du module Undergraduate à Hanoï ou du master potentiellement
en cours à Mahidol...) mais l’incertitude persiste d’une part sur l’exhaustivité de cette recherche, et d’autre part, sur la
réalisation effective de ces formations.
La diversité culturelle est également à prendre en compte
L’Asie du sud-est étant aussi étendue que l’Europe, la diversité des pays et des cultures est également un frein dans
91
une étude à répartition aussi large.
Pour les recherches en ligne, certains sites sont presque exclusivement en langue nationale, l’anglais n’est pas utilisé
pour toutes les pages des sites universitaires. Au Vietnam par exemple, certains sites sont peu traduits, avec des
curricula de formation en vietnamien et en format protégé (non accessible aux traductions en ligne). Mais la barrière de
la langue, la différence de culture et les incompréhensions peuvent être bien plus importantes au cours des entretiens
lorsque les deux protagonistes (intervieweur et interviewé) s’expriment dans une langue étrangère. Les codes culturels
et le langage verbal et non verbal sont d’autant plus difficiles à décrypter lorsqu’on étudie dans des pays éloignés de
notre propre culture.
Le biais d’une communauté épistémique
Etant moi-même d’un profil vétérinaire, j’ai éprouvé des difficultés à percevoir la notion de Global Health (plutôt médecine
humaine) comme un concept séparé alors que je ne comprenais pas l’absence des médecins dans le concept One
Health. Une fois cette notion de santé globale identifiée comme un mouvement séparé, ancien et promu par l’OMS, les
perceptions se sont éclairées et de nombreuses
observations sont alors venues renforcer cette notion à part qui explique la difficulté de compréhension entre deux
communautés épistémiques.
Pourtant, malgré ces différentes limites, les résultats obtenus peuvent nous permettre d’apporter quelques éclairages
sur la diffusion du concept One Health par les organisations internationales utilisant l’éducation dans les programmes
de développement en Asie du sud-est.
Le concept semble plaire, la croyance en une nouvelle vision de la santé est forte. C’est sans doute ce qui explique
l’expansion internationale des nouvelles approches holistiques de la santé. Mais cette réelle dynamique n’est pas si
simple à mettre en œuvre sur le terrain du fait des difficultés que représentent les incompréhensions entre professions,
disciplines et la rigidité des institutions d’enseignement. Est-ce que le temps permettra d’avancer vers une meilleure
imprégnation du terrain ?
Le bureau de la diplomatie agricole
Pierre SCANDOLA, Inspecteur Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2012-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 4 avril 2014 au 25 juillet 2014 au Ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt
(MAAF) - Direction générale des politiques agricole, agroalimentaire et des territoires (DGPAAT) - Service des relations
internationales (SRI) - Sous-direction des échanges internationaux (SDEI) - Bureau des relations bilatérales (BRB).
Mémoire de stage rédigé sous la direction de Nicolas FORTANE (INRA)
Questions abordées par l’étude 111
C’est lors d’un stage d’application au bureau des relations bilatérales que j’ai été confronté au terme de diplomatie
agricole. Ce terme est omniprésent dans le bureau. D’une part il est utilisé par les agents pour décrire leurs missions et
d’autre part il est retrouvé dans plusieurs documents cadres pour le bureau. Pour autant aucune définition précise n’en
existe. La notion de diplomatie agricole représente donc l’entrée que j’ai choisie pour analyser certains enjeux liés à la
politique agricole internationale et pour comprendre le fonctionnement d’un bureau particulier au sein du ministère en
charge de l’Agriculture ; le bureau des relations bilatérales. L’approche retenue est ethnographique, assortie de l’analyse
de fonds documentaires, et d’entretiens semi-directifs des membres du bureau.
La première partie de ce mémoire se penche donc sur les activités et les pratiques des agents du BRB (notamment
celles des correspondants géographiques), qu’ils décrivent eux- mêmes comme relevant de la diplomatie agricole.
Elle a dévoilé le rôle charnière occupé par les correspondants géographiques dans la circulation des actualités et des
informations à caractère agricole entre la France et les pays de leur portefeuille géographique.
Une part importante de leur travail est dévolue à la collecte d’informations actualisées sur les pays dont ils ont la charge.
C’est un travail qualifié de veille. Ils s’alimentent par plusieurs sources, généralistes, proches ou lointaines, officielles
ou officieuses. Parallèlement, des informations en provenance du ministère convergent vers les correspondants
géographiques. Cette convergence est à la fois passive (suivi des politiques portées par le ministre), mais aussi active
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ce mémoire.
111
92
lorsqu’ils réceptionnent les apports des bureaux techniques pour la rédaction d’une note. Dans tous les cas, ils
assemblent et recoupent les informations auxquelles ils ont accès, qui leurs parviennent par différents canaux. Ils les
assemblent, les synthétisent et si possible les analysent, en d’autres termes ils les « digèrent » avant de les redistribuer.
Cet accès à l’information est corrélé à l’existence de réseaux. Les agents du BRB s’insèrent dans plusieurs réseaux que
l’on peut schématiquement séparer en deux réseaux distincts ; un réseau français (le réseau international) et un réseau
étranger (essentiellement des conseillers agricoles de l’étranger). Bien qu’il soit difficile de les classer dans une typologie
particulière, ces réseaux ont plusieurs points communs, en particulier une interdépendance des membres du réseau
entre eux, liés par l’échange d’une ressource : l’information. De plus, ces réseaux demeurent stables, malgré la rotation
permanente des membres qui les constituent. Cette stabilité est notamment permise par l’organisation d’événements
réguliers (Conférence des réseaux, sortie des CAE) et une association (l’Amicale des conseillers agricoles à Paris).
Rajoutons que le pouvoir qui s’y exerce est relationnel, et que ces réseaux demeurent relativement fermés.
Enfin lors de la tenue d’une rencontre bilatérale, le correspondant géographique concerné prépare la réunion. Il joue un
véritable rôle d’interface entre l’Etat français et les représentants étrangers. Il mobilise l’expertise technique auprès des
autres bureaux, prépare les dossiers, l’agenda et même la logistique. La conduite des rencontres bilatérales représente
un investissement conséquent pour les agents du BRB, notamment lorsqu’il s’agit de rencontres type Groupe de travail.
L’essentiel du travail est en amont de la réunion, et une attention particulière est portée aux détails. La rencontre qui s’en
suit est alors protocolaire (face à face, présentation des délégations, répartition de la parole, attitude retenue, échanges
de cadeaux) et ne laisse place qu’à peu de surprises.
Ainsi les activités et les pratiques des correspondants géographiques du BRB sont très proches des trois pôles
individualisés dans le schéma de la diplomatie agricole retrouvé dans le rapport d’activité du BRB de 2011-2012, à
savoir : la veille stratégique ; l’animation du réseau international ; le pilotage d’échanges bilatéraux. On comprend alors
pourquoi les agents du BRB décrivent leurs missions comme relevant de la diplomatie agricole.
La deuxième partie de ce mémoire s’attache à mettre en avant les enjeux derrière le terme de diplomatie agricole.
En 2005, suite à un rapport de l’inspection générale de l’agriculture, le service des relations internationales entreprend
de se doter d’une stratégie à l’internationale. Cette stratégie s’articulait autour de 3 domaines : économie, solidarité
et influence dont chacun constitue le thème principal d’intervention de chacun des bureaux de la sous-direction
des échanges internationaux du SRI (respectivement le bureau des échanges et de la promotion ; le bureau du
développement et des organisations internationales; et le bureau des relations bilatérales). Ce sont les trois « registres
» de la diplomatie agricole, qui recouvrait alors l’ensemble des champs d’activité des bureaux de la SDEI. Très vite un
plan pour le volet économique est mis en place. Mais il faudra attendre 2008 pour l’élaboration d’un plan sur le volet
influence : le plan stratégique d’influence internationale. Ce plan deviendra par la suite le plan stratégique international
(PSI) lorsqu’il sera décidé de le rendre public.
Le BRB en assure la rédaction. En associant l’ensemble des acteurs du MAAF à son élaboration, un consensus sur la
stratégie internationale du ministère apparait. Le rôle de coordination de l’ensemble des bureaux du ministère vis-à-vis
de la stratégie internationale du MAAF dévolu au BRB est alors facilité. Ce rôle de coordination est également conforté
par la gestion par le bureau d’un budget dédié : le budget d’influence. Ainsi le PSI actuel fait consensus et est largement
connu. Lorsqu’un opérateur du ministère engage une action, il s’y réfère.
Bien que rédigé par le BRB, le PSI influe aussi en retour sur les actions conduites par le bureau. Le PSI institue un
cadre d’action clair pour le bureau. Il définit des pays « prioritaires » et conforte le rôle des agents du bureau dans
leurs missions d’animation de réseaux, de production de veilles et dans la conduite des échanges bilatéraux. C’est
notamment à cette occasion que sont pris en compte les intérêts étatiques.
Le terme de diplomatie agricole est également utilisé pour promouvoir les intérêts du BRB. En 2005, il définissait
l’ensemble des volets d’actions de la SDEI du SRI, puis se fit oublier. Le terme ne réapparait qu’à partir de 2012,
notamment dans le PSI et le rapport d’activité du BRB. Il est utilisé pour décrire les missions des agents du BRB et
s’inscrit dans un processus d’institutionnalisation récent.
Il s’agit d’une démarche proactive de l’actuel chef de bureau pour conceptualiser les missions des agents du BRB. En
effet le BRB est un bureau particulier au sein du MAAF, avec une ambivalence forte entre le technique et le politique. Les
agents ne produisent pas de textes législatifs. Ils ont une vision macro et transversale des problématiques, et mobilisent
l’expertise technique. Mais la diplomatie agricole s’envisage également comme un label pour un bureau en renouveau
d’image dans un contexte de modification de ces missions et de renouvellement de son équipe. Enfin la diplomatie
agricole est utilisée pour standardiser les pratiques des agents du BRB.
L’intérêt de ce travail réside donc en la mise en évidence des enjeux de pouvoirs qui ont contribué à l’institutionnalisation
de la diplomatie agricole, puisqu’à terme un récit mythique des origines sera fabriqué, de sorte à gommer les luttes
de pouvoirs et à démontrer que son institutionnalisation a résulté d’un processus logique, nécessaire et inéluctable112 .
Pour autant ce travail aurait à gagner en pertinence si l’enquête était élargie à d’autres acteurs que le BRB, notamment à
KNIGHT J., (1992), Institutions and Social Conflicts, Cambridge, Cambridge university Press d’après BOUSSAGUET L.,
JACQUOT S., RAVINET P., (2010), Dictionnaire des politiques publiques, Les Presses SciencesPo, 776 p., (entrée : « Création
et changement institutionnels »).
112
93
d’autres bureaux du SRI et au ministère des Affaires étrangères (MAE). Par ailleurs le terme de diplomatie agricole reste
encore relativement interne au MAAF. Mais quelle serait sa perception par le corps diplomatique français ? Serait-il pris
au sérieux ? Ou bien comme une concurrence ?
D’un point de vue opérationnel, l’institutionnalisation de la diplomatie agricole devrait se poursuivre. A court terme il
faudrait multiplier les initiatives telles qu’initiées à la sortie de bureau du BRB en juin 2014, à savoir des rencontres avec
le service du protocole et celui des affaires juridiques du ministère des Affaires étrangères. De même, toute initiative
pour standardiser les pratiques des agents devrait être encouragée, que ce soit dans la formalisation du travail du BRB,
ou dans la formalisation des contacts avec les acteurs extérieurs. A moyen-long terme, il faudrait initier une réflexion
pour définir précisément la notion de diplomatie agricole. Il faudrait aussi se poser la question de savoir si elle a vocation
à être diffusée, et le cas échéant, quelles en seraient les conséquences, notamment auprès du ministère des Affaires
étrangères.
Stage au sein du Bureau Exportation Pays Tiers de la DGAL
Mila WOBERSCHAR, Etudiante du master 2 PAGERS, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 4 avril 2014 au 25 juillet 2014 au sein du Bureau Exportation Pays Tiers (BEPT), Sous Direction des
Affaires Sanitaires Européennes et Internationales (SDASEI), Direction Générale de l’Alimentation (DGAL), Ministère
de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt (MAAF). Mémoire de stage rédigé sous la direction de Sébastien
GARDON (Sciences Po Lyon – ENSV VetAgro Sup – Triangle - ACSPAVE)
Questions abordées par l’étude 113
Tout au long de cette étude nous avons pu constater qu’un développement des politiques publiques s’est mis en
place lors de la création de l’Union douanière. Ce nouvel espace économique met en évidence l’intérêt de la Russie,
à « reconquérir » une position de leader dans la sphère internationale. Vladimir Poutine poursuit l’objectif d’assurer le
développement économique de la Russie pour affirmer son indépendance, et multiplier les échanges diplomatiques
pour devenir un interlocuteur privilégié avec les grandes puissances et ainsi peser dans le jeu international. Les rapports
qu’entretient le gouvernement russe avec les autres instances internationales et les chefs des gouvernements sont liés
à des enjeux politiques et stratégiques, devant assurer la pérennité de l’Etat russe afin qu’il devienne autonome dans
différentes sphères, dont celle qui englobe l’agroalimentaire. Les jeux de concurrence des différents acteurs soulignent
l’importance du secteur de l’exportation tant dans la sphère économique et dans le marché mondial que dans la gestion
des crises diplomatiques.
En dépit de la faiblesse structurelle au sein de la Fédération de Russie et de la récente Union douanière, le pays ne
cesse d’être plus puissant et plus influent depuis ces quinze dernières années. La modernisation du pays passe par un
développement économique impliquant de lourds investissements étrangers. La Russie a cherché à s’insérer dans les
processus de globalisation, en participant de façon active à l’élaboration des normes internationales (dans le domaine
sanitaire et vétérinaire entre autre), et en devenant un associé non négligeable dans le secteur de l’exportation. Elle est,
en effet, l’un des partenaires commerciaux de l’Union européenne qui cherche à construire un espace économique
européen intégrant la Russie. Moscou et Bruxelles ont multiplié les groupes de travail pour y développer et intégrer
différents sujets, dont l’ouverture de divers marchés dans les domaines de l’énergie, des hautes technologies ou encore
agroalimentaire. La Russie a également développé son activité lors de son entrée au sein de l’OMC. Cela lui a offert la
possibilité d’intégrer les gouvernements les plus représentatifs de l’économie mondiale et ainsi devenir un acteur de
choix. La Russie reste une puissance régionale à dimension mondiale, et le fait d’y imposer des relations et ruptures ne
font que favoriser et légitimer son poids dans les décisions politiques. Pour mettre fin au K.O. politique et économique
la Russie se rapproche des entités politiques comme par exemple les Organisations Internationales. Par ce biais, elle
tisse des liens avec différents gouvernements et met en place des accords de libre-échange. Cela passe également
par l’instrumentalisation des politiques engagées par les autorités russes qui prennent la forme de ruptures politiques,
d’embargos en passant outre les négociations et données scientifiques. Il en résulte un processus dynamique du jeu
d’acteur avec les instances internationales et nationales, comme c’est le cas pour le Ministère de l’agriculture français
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ce mémoire.
113
94
qui tente par l’intermédiaire de plusieurs outils de favoriser et stabiliser les échanges. Les moyens d’action utilisés
par les autorités gouvernementales supposent le renforcement des coopérations internationales et l’application de
nouveaux accords, favorisant les marchés et le développement économique de chacun.
L’exportation agroalimentaire est un milieu essentiel pour assurer la cohésion économique nationale mais surtout
mondiale. Cet enjeu manifeste les intérêts et besoins des gouvernements et se traduit par une forme concurrentielle
entre chaque Etat. Le secteur export se transforme alors en « arme » politique et diplomatique, comme nous le démontre
l’embargo russe du 6 aout 2014, qui touche la majorité des produits agroalimentaires européens et américains, en
réponse aux sanctions occidentales liées à la crise ukrainienne. Moscou a donc annoncé un « embargo total » sur la
majeure partie des produits alimentaires originaires de l’Union européenne et des Etats-Unis exportés vers le territoire
russe et douanier.
Le milieu export, comme nous avons pu le constater lors de l’analyse, est essentiel à la pérennité économique d’un
pays tel que la France. L’un des rôles majeurs de l’agriculture réside dans la contribution à l’amélioration des échanges
extérieurs à travers, notamment, la valorisation des avantages comparatifs agroalimentaires. Cette mission a toujours
été renforcée par les pouvoirs publics grâce à des politiques de soutien au secteur des exportations agroalimentaires,
en particulier en termes d’amélioration de la compétitivité de ces filières. Ces politiques ont été davantage affirmées
par la promotion des filières agricoles à fortes valeurs ajoutées. Cela permet également de mettre à jour une nouvelle
appréciation d’un pays et de maintenir de meilleures relations politiques ainsi que des projets déjà mis en œuvre. Avant
tout, il s’agit d’une mission économique, avec le suivi des relations économiques et commerciales russo-françaises et
le développement des partenariats entre les entreprises des deux pays. Ces échanges aboutissent à la modernisation
de l’économie russe grâce au savoir-faire technologique des sociétés françaises, mais aussi à la diversification des
exportations russes, à la promotion des avantages compétitifs de la Russie et à son intégration harmonieuse dans
l’économie mondiale. Cette coopération permet d’une part de développer les intérêts du pays, dans le cas présent
la Russie, mais permet d’autre part de maintenir le dialogue entre les gouvernements. La diffusion d’informations sur
l’économie russe et son climat d’investissement est l’un des constats qui émergent d’une telle collaboration, avec
pareillement la promotion des investissements français en Russie. Cela favorise ainsi la représentation des intérêts
russes auprès des organisations internationales basées pour la plupart à Paris (OCDE, IEA, OIE, etc.).
Le marche russe révèle de nombreux points forts pour les pays souhaitant y investir et trouver un marché pour les
produits agroalimentaires, étant donné que la Russie est un vaste marché de près de 142 millions d’habitants, dôtés
d’un pouvoir de consommation en constante augmentation. Sa position géographique unique, au carrefour de l’Europe
et de l’Asie offre d’importants avantages pour étendre les exportations, ainsi qu’avec la création de l’Union douanière.
En effet, la naissance de l’Union douanière regroupant la Russie, la Biélorussie et le Kazakhstan, couvre pour le moment
un territoire de 20 millions de km2 et abrite 173 millions d’habitants. La politique de modernisation et d’ouverture du
pays aux investissements étrangers offrent aussi un panel de possibilités plus large et ambitieux. Ainsi, le territoire
douanier et celui de la Russie sont propices non seulement aux investissements mais surtout à l’exportation massive de
produits agroalimentaires vers une population qui rappelons le, consomme près d’un tiers des marchandises importées
sur son territoire.
Nombre d’entreprises françaises en Russie :
500 entreprises françaises implantées en Russie
7 000 entreprises françaises exportent leurs produits vers la Russie
2
000 entreprises ont réalise un CA export vers la Russie pour plus de 100 000 €
Les investissements français se concentrent dans les secteurs suivants :
Activités financières et assurances, la France étant le 1er investisseur étranger dans le secteur bancaire russe (Société
Générale, AXA) ;
Industrie manufacturière, avec en particulier le secteur automobile (Renault, Peugeot-Citroën, Alstom) ;
- Grande distribution (Auchan, Castorama, Décathlon, Leroy-Merlin) ;
- Agroalimentaire (Danone, Lactalis, Bonduelle) ;
- Energie (Total, Centre russe pour l’efficacité énergétique114) .
C’est également un moyen pour devenir plus compétitif face aux autres pays et maintenir des rapports plus denses.
Ce type d’export, dans le domaine agroalimentaire, permet également de visualiser le positionnement du pays face à
la concurrence, de vérifier si techniquement la production et l’ensemble de la filière est compétitive face au marché
mondial. La comparaison est nécessaire afin de pouvoir positionner le secteur agricole et agroalimentaire par rapport
aux adversaires, et ainsi développer ou améliorer certains points pour obtenir un rendement et une place sur le marché
de qualité et de performance supérieure.
Ainsi, le secteur de l’export est « vital » pour maintenir une économique stable, capable de supporter la concurrence
avec d’autres pays exportateurs, qui commencent eux aussi à développer un large espace agroalimentaire comme
Note de service sur les « Exportations françaises et les Concurrents au sein de l’Union européenne et des pays tiers », C.
Pacheko, 9 aout 2014.
114
95
pour le Brésil ou la Chine. La valorisation des produits en passant par le système de contrôle sanitaire de l’ensemble
des filières, permettent d’instaurer des rapports de confiance et des échanges plus amples. En outre, le pourcentage
grandissant de l’exportation agricole française vers l’Union européenne ou les pays tiers, donne les moyens aux
professionnels d’obtenir un chiffre d’affaire plus conséquent et contribue donc à l’économie de la France.
Finalement, le milieu export est bénéfique et fondamental pour tous les gouvernements qui ont une politique agricole
et agroalimentaire importante. Ils basent une majeure partie de leur économie sur l’exportation des excédents et des
marchandises agroalimentaires vers de grands marchés, tels que la Russie ou la Chine. Ce secteur a un tel levier
d’action et impact que de nombreux Etats le mobilisent en tant qu’instrument d’action politique, en décrétant des
embargos visant uniquement quelques pays ou bien l’ensemble d’une zone économique. Pour illustrer ces propos nous
pouvons commenter la situation actuelle de l’Union européenne et des Etats-Unis, suite au sévère embargo imposé par
la Russie, qui comprend les marchandises agroalimentaires en provenance de l’Europe et des Etats- Unis.
Le Premier Ministre russe Dmitri Medvedev a révélé que Vladimir Poutine a signé mercredi 6 aout 2014 un décret
bannissant des étals russes et pendant une durée d’un an tous les fruits et légumes, le lait, le fromage, le poisson, le
bœuf, le porc et la volaille en provenance de l’Union européenne, des Etat- Unis, du Canada, de l’Australie et de la
Norvège. L’UE exportait près de 10 % des exportations agricoles vers la Russie. Celle-ci devrait à la place augmenter
son importation de produits d’Amérique du Sud et notamment du Brésil, de l’Argentine, du Chili et de l’Equateur,
d’après l’agence de sécurité sanitaire (VPSS) qui est en discussion avec les ambassadeurs de ces pays. La Biélorussie
se dit prête à se substituer à l’UE et à exporter vers la Russie ses propres produits alimentaires115 . Cela provoquerait
une hausse du taux d’inflation en Russie même si il va y avoir valorisation des produits et producteurs locaux. Les
producteurs européens craignent notamment que la production originellement destinée au marché russe se rabatte
sur les pays de l’Europe et crée une situation de crise. De plus, une part du marché risque d’être confisqué au profit
de l’Asie ou de l’Amérique Latine qu’il sera très difficile à reconquérir. Selon Fréderic Vincent, porte-parole de l’Union
européenne, il a dénoncé une décision « clairement politique » de la part des autorités russes et a pris soin de rappeler
que les sanctions européennes à l’encontre de la Russie étaient « directement liées a l’annexion illégale de la Crimée
et à la déstabilisation de l’Ukraine ». Le secteur export vers les pays tiers, et notamment vers la Russie, devient donc
une arme politique, utilisée pour faire valoir la position d’un pays. Les autorités russes usent de ce procédé pour mettre
en avant sa position de leader dans les échanges commerciaux mais surtout son influence et prédominance politique
face à l’ensemble des autorités européennes et américaines. Cet « embargo total », peut impacter l’ensemble de
l’économie de marché et créer un déséquilibre et une division commercial. Les sanctions risquent d’engorger l’espace
communautaire qui perd un débouché important, en fruits et légumes notamment. La Russie se ferme aux importations,
mais les produits qui n’iront plus à l’exportation vont se rabattre sur les pays européens et créer une situation de crise
avec un risque d’inflation.
Les exportations agroalimentaires françaises vers la Russie concernent en premier lieu les vins et spiritueux, ce qui
représente plus du tiers des exportations françaises. Les produits laitiers (fromages et beurre), sont également très
significatifs avec les viandes (porcine - avant l’embargo de janvier derniers – et volaille). Dans le domaine phytosanitaire,
les semences végétales et les fruits occupent aussi une part importante des exportations françaises vers le territoire
russe et douanier. De fait, cet embargo touche une part importante de l’exportation française.
Chiffres généraux : 116
La Russie importe 36% de ce qu’elle consomme, soit 29,48 Md d’€ de produits agroalimentaires (en 2013), dont 1,172
Md d’€ depuis la France. La France, qui détient 3,98% des parts de marché, est en 10ème position derrière le Brésil,
l’Ukraine, l’Allemagne, les Pays-Bas, la Turquie, les USA, la Chine, la Pologne et la Biélorussie.
Il est à noter cependant que les chiffres donnés sont ceux de l’année 2013, et qu’au vu des embargos pris contre l’UE,
les USA, l’Ukraine, la Moldavie ou la Pologne, le classement des pays exportateurs va être modifié en 2014.
Les principales marchandises exportées vers la Russie en 2013 étaient :
- 462 M d’euros de boissons alcoolisées ou sans alcool (en baisse de 1% par rapport à 2012, représentant 18% des
importations russes de ces produits)
- 135 M d’euros de viandes et produits transformés à base de viande (en hausse de 1%, représentant 2,7% des
importations russes de ces produits)
- 119 M d’euros de produits laitiers (en hausse de 50%, représentant 3,7% des importations russes de ces produits)
- 114 M d’euros d’alimentation animale (en hausse de 6,2%, représentant 10,8% des importations russes de ces
produits)
Position de la France :
Vins et spiritueux :
La France est leader dans ce secteur, en valeur, devant le Royaume-Uni, l’Italie, l’Ukraine et l’Arménie. En volume,
117
118
Compte-rendu de la Délégation de l’Union européenne sur la situation de crise, du 8 aout 2014.
Idem.
96
la France est en troisième position derrière l’Italie et l’Ukraine. Les principaux pays tiers fournisseurs sont l’Ukraine,
l’Arménie, les USA, la Géorgie, l’Amérique latine et l’Afrique du Sud.
Produits laitiers :
La France est 8ème, après l’Ukraine, la Biélorussie, la Finlande, les Pays-Bas, l’Allemagne, la Pologne et la Lituanie.
Les importations continuent d’augmenter chaque année (+16.6% pour la poudre de lait, +14.6% pour le beurre, +3.4%
pour les fromages), du fait notamment d’une filière laitière russe toujours en grande difficulté (baisse sans discontinuer
du cheptel bovin et production de lait en baisse).
Viande :
La viande de volaille : 4ème derrière les USA, le Brésil et l’Ukraine.
La viande bovine congelée : la France est le 16ème fournisseur de la Russie en 2013.
Au vu de cet embargo, la Russie cherche de nouveaux fournisseurs, et se tourne vers les pays d’Amérique Latine,
Brésil, Costa Rica ainsi que vers l’Asie avec la Chine, la Corée du Sud etc. Pour autant, il existe chez ces pays des
problèmes sanitaires, ce qui peut freiner la plupart des exportations vers la Russie. Cette rupture de l’exportation marque
un conflit politique qui peut avoir de fortes conséquences économiques. En effet, il peut en résulter une saturation
des étals français, notamment pour les produits a courte durée de vie comme les fruits et légumes, avec une perte
nette correspondant au marché russe. Les agriculteurs et institutionnels craignent une concurrence accrue d’autres
producteurs et donc provoquer un « dumping commercial » important en provenance d’autres pays exportateurs. Par
ailleurs, la durée de cet embargo pourrait compromettre le marché français, avec une perte du débouché en Russie,
au profit d’autres pays en bons termes avec Moscou. Ainsi, la place de la Russie au sein du secteur export lui permet
de faire pression sur ses partenaires commerciaux, étant un gros importateur de produits agroalimentaires. La situation
est urgente étant donné que ce blocus est réalisé en pleine saison des récoltes. Le gouvernement français a mis en
place des réunions avec Bruxelles d’autres pays afin de trouver des solutions et éviter un trop grand décalage entre les
exportateurs et producteurs français, espagnols, polonais etc . La Commission européenne n’exclut pas de porter le
contentieux auprès des instances de l’OMC. D’après la Commission, les premiers touchés par cette mesure seront les
consommateurs russes, qui verront le prix de l’alimentation augmenter et subiront des pénuries alimentaires. Entre 40 et
50% des importations agricoles russes proviennent des pays concernés par l’embargo . En conséquence, la place des
instruments de politique publique dans les rapport internationaux reliant le secteur export agroalimentaire français à la
zone économique russe et de l’Union douanière, est notable. L’utilisation de ces outils dans les manœuvres politiques
développe et met en application de nouveaux moyens politiques règlementaires, qui induisent des enjeux économiques
ainsi que politiques. Les négociations bilatérales et multilatérales se retrouvent dans un espace d’enjeux et d’intérêts en
perpétuelle évolution. Les acteurs administrent ces enjeux dans la sphère internationale par l’intermédiaire de ruptures
des collaborations et d’embargos économiques à visée politique.
Décret sur les mesures de réalisation du décret du président de la Fédération de Russie du 6 aout 2014 n°560,
« sur l’adoption des mesures économiques spéciales pour assurer la sécurité de la Fédération de Russie » :
Afin de mettre en œuvre le décret du président de la Fédération de Russie du 6 aout 2014 n°560 « sur l’adoption
de mesures économiques spéciales pour assurer la sécurité de la Fédération de Russie », le gouvernement de la
Fédération de Russie ordonne :
De mettre en œuvre pour une période d’un an une interdiction d’importation en Fédération de Russie des produits
agroalimentaires, des matières premières et des aliments provenant des Etats- Unis, des pays membres de l’UE, du
Canada, de l’Australie et de Norvège, conformément a la liste en annexe.
Au service fédéral des douanes, d’assurer le contrôle de l’application du point 1 du présent document.
A la commission gouvernementale pour le suivi et la mise en œuvre opérationnelle des changements de conjonctures
sur les marches des produits alimentaires, conjointement avec les organes exécutifs des sujets de la fédération de
Russie, d’assurer l’équilibre des marches des produits et de ne pas permettre une hausse des prix des produits
agroalimentaires, des matières premières et des produits alimentaires.
Au ministère de l’Industrie et du Commerce de la Fédération de Russie et au ministère de l’Agriculture de la Fédération,
en collaboration avec les autorités des sujets de la Fédération de Russie, d’organiser la mise en œuvre de la surveillance
opérationnelle quotidienne et le contrôle de l’état des marches des produits agricoles, alimentaires et des matières
premières.
Au ministère de l’Agriculture de la Fédération de Russie, avec les organes exécutifs fédéraux concernes et avec la
participation des associations des producteurs agricoles, d’élaborer et de mettre en œuvre un ensemble de mesures
visant a accroitre l’offre des produits agricoles, alimentaires et des matières premières afin d’éviter les hausses de prix.
Au ministère de l’Industrie et du Commerce de la fédération de Russie, au ministère de l’Agriculture de la Fédération de
97
Russie, au ministère du Développement économique de la Fédération de Russie et au service fédéral anti monopole,
avec les associations et organisations commerciales, de se coordonner pour contenir la hausse des prix.
La présente décision entre en vigueur le jour de sa publication officielle.
Dmitri MEDVEDEV 119
En outre Medvedev a menacé jeudi 9 août 2014 la fermeture de l’espace aérien russe aux compagnies aériennes
effectuant la liaison entre l’Europe et l’Asie, dont la route la plus courte passe par la Sibérie120 . Cette interdiction du
survol de la Russie provoquerait un surcoût en carburant pour les compagnies. Ces menaces et ruptures à l’encontre
des gouvernements ayant administré des sanctions quant au comportement politique et militaire russe face à l’Ukraine,
mettent en lumière les intentions politiques du gouvernement de Poutine. Cette manipulation du marché économique
est un « jeu clairement politique121 » . A court terme, cette sanction aura de grosses conséquences sur le marché
intérieur européen, et provoquera la fermeture de certaines usines et entreprises ainsi qu’une saturation et inflation du
marché pour les produits ayant une date limite de consommation, comme les fruits et légumes qui sont rapidement
périssables.
La réponse aux sanctions occidentales concernant les mesures politiques russes envers l’Ukraine, marque une rupture
temporaire entre les gouvernements européens et la Russie. La « stratégie de déstabilisation, cherche à trouver la faille
entre européens et américains, et éviter par ce biais l’isolement international122 » . Nous pouvons nous interroger sur la
logique de cette politique, par l’instauration d’un blocus agroalimentaire européen et sur la motivation d’une « stratégie
du chaos contrôlée » par le gouvernement russe. Avec la montée en puissance de la Russie dans le secteur de l’énergie
et du gaz, qu’elle place occupera-t-elle face aux autres gouvernements lorsqu’elle obtiendra le monopole ? La Russie
devient un fournisseur de gaz naturel incontournable, également pour l’Etat français, qui se fournit notamment chez la
Russie. De nombreux accords entre plusieurs pays asiatiques et européens sont en cours d’élaboration concernant
l’acheminement du gaz russe vers ces territoires. La Russie est l’un des plus gros producteurs de gaz naturel au monde
et une partie des pays européens sont en situation de dépendance énergétique. Des chantiers de constructions et
d’infrastructure sur l’acheminement du gaz naturel apparaissent, reliant la Russie à l’Asie de l’Ouest, dont l’un des
partenaires les plus coopérants étant l’Iran. Mais également le projet de gazoduc sous-marin, Nord Stream, reliant
après sa construction la Russie a l’Allemagne sans passer par l’Ukraine et la Biélorussie. La mise en place de plusieurs
projets et d’accords de négociations avec ces divers pays, tant par les questions énergétiques que par la vente
d’armes (vers l’Iran, l’Azerbaïdjan, la Syrie) élargissent l’horizon de coopération de la Fédération de Russie a d’autres
puissances montantes. Cette stratégie peut-elle avoir une finalité gagnante pour la Russie ? Qu’elles peuvent- être les
conséquences sur les relations internationales et la stabilité économique mondiale ?
De L’Union douanière à l’Union eurasiatique, quelles
perspectives ?
Chloé GELIN, Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2012-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 14 avril 2014 au 25 juillet 2014 à l’Ambassade de France en Russie
. Mémoire de stage rédigé sous
la direction d’Amandine GAUTIER (SciencesPo Lyon – ENSV VetAgro Sup – Triangle - ACSPAVE)
Questions abordées par l’étude 123
La crise ukrainienne a pour point de départ la compétition entre l’Union européenne et la grandissante Union Eurasiatique
L’Union Douanière, future Union Eurasiatique, et son organe de gouvernance, la Commission Economique Eurasiatique,
ne peuvent pas être abordées sans mentionner l’existence d’un conflit très largement médiatisé ces derniers mois :
celui de la crise Ukrainienne. En effet, la crise ukrainienne a été déclenchée en partie suite à l’importance croissante
qu’a prise l’Union Douanière, et au choix qu’a dû faire le gouvernement ukrainien entre l’adhésion à l’Union Européenne
ou l’adhésion à l’Union Douanière. La crise ukrainienne témoigne de l’importance croissante que prennent l’Union
Traduction du Décret N°560, du Président de la Fédération de Russie Vladimir Poutine, « sur l’adoption des mesures
économiques spéciales pour assurer la sécurité de la Fédération de Russie », du 6 aout 2014.
120
Source AFP, 8 aout 2014. 121
Yves Lambert.
122
Jacques Blot, « L’embargo russe ne devrait pas influencer les positions des Occidentaux », 8 août 2014, Investir.fr
123
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
119
98
Douanière et son organe de gouvernance, en général et plus particulièrement face à l’Union Européenne. L’ampleur de
la crise montre l’impact très étendu de la mise en place de ce type d’organisation, dans un contexte de mondialisation
croissante. Cet évènement, encore en cours à l’heure actuelle, montre l’importance d’étudier le développement d’une
telle organisation supranationale. Quels sont les tenants et les aboutissants d’une telle crise ?
CONTEXTE
L’EURASEC, POINT DE DEPART DE L’INTEGRATION REGIONALE EURASIATIQUE 124
La Communauté économique eurasiatique (ou EurAsEc) a été fondée en 2000 entre la Russie, la Biélorussie, le
Kazakhstan, le Kirghizstan et le Tadjikistan comme une organisation intergouvernementale de coopération économique
et commerciale (l’Ouzbékistan l’a rejointe en 2006). En 2007, trois membres de l’EurAsEc (la Russie, la Biélorussie et le
Kazakhstan) ont signé un accord portant création d’une union douanière à partir de 2010. Cet accord a été suivi d’un
mouvement d’harmonisation de la base normative existante en matière de libre-échange aboutissant à la signature, en
octobre 2011, d’un accord sur la création d’une zone de libre- échange. Ce projet est le seul auquel participe l’Ukraine,
dont l’absence pèse sur les autres accords d’intégration régionale.
L’UNION DOUANIERE CONSACRE LE DEBUT D’UNE POLITIQUE COMMERCIALE COMMUNE
L’Union douanière s’est progressivement mise en place entre 2010 et 2011. L’élaboration d’un Code douanier commun,
la suppression progressive des frontières douanières intérieures et le déplacement du contrôle douanier à la frontière
extérieure de l’Union ont été complétés par l’adoption d’un tarif extérieur commun sur les marchandises importées. Ceci
marque le début d’une politique commerciale commune aux trois Etats membres, définie et conduite par la Commission
douanière, située à Moscou. Elle rassemble autour de la Russie plusieurs Etats et s’inscrit dans un processus de
réaffirmation125 de la Russie sur la scène internationale.
Figure 1. Les trois pays membres de l’Union Douanière
Le poids de la Russie dans l’Union douanière est considérable. En 2011, 65% des marchandises échangées dans
l’Union douanière avaient pour origine la Russie, 23% la Biélorussie et 12% le Kazakhstan. Ceci se vérifie également
dans la clé de répartition des recettes douanières puisque la Russie perçoit 88 % des droits de douane à l’importation.
La création de l’Union douanière a fortement stimulé les échanges commerciaux intra-union. Cette Union douanière est
le premier stade de l’intégration régionale et pourrait accueillir deux nouveaux membres dans les prochaines années, le
Kirghizstan et l’Arménie. L’ambition affichée des dirigeants russes, biélorusses et kazakhs est de s’acheminer vers une
intégration économique plus poussée, bâtie sur le modèle de l’Union européenne.
Le 1er janvier 2012, la Commission économique eurasiatique a remplacé la Commission douanière et est devenue
l’organe supranational d’administration de l’Union douanière et de l’EEC. Cette commission est désormais mise en
avant par la Russie dans toutes les négociations internationales. Il s’agit donc d’un partenaire dont l’importance est
appelée à croître.
VERS UN PROJET D’INTEGRATION REGIONALE PLUS AMBITIEUX : L’UNION EURASIATIQUE
Le 29 mai 2014, les Présidents des trois Etats membres de l’Union douanière ont signé un accord sur la création d’une
Union eurasiatique à partir de 2015. Dans un premier temps, celle-ci devrait regrouper les Etats Membres de l’Union
Toulorge L. : L’intégration régionale eurasiatique, SER de Moscou, octobre 2013.
Le terme « international » désigne un rapport de parité entre des nations ou des Etats, tandis que le terme « supranational
» désigne une réalité qui englobe plusieurs nations et qui les dépasse : par exemple l’union Européenne ou l’O.N.U.
124
125
99
Douanière puis pourrait intégrer d’autres Etats, comme le Tadjikistan et le Kirghizstan. Cette union vise une intégration
économique reposant sur des politiques communes (énergie, agriculture, politique monétaire, protection des droits de
propriété intellectuelle). Le cadre réglementaire et juridique de l’Union douanière et de l’Espace économique commun
servira de base à la future Union Eurasiatique. D’autres institutions devraient voir le jour, sur le modèle de l’Union
européenne (Assemblée parlementaire, Cour de Justice).
Avant l’UD, l’intégration s’est caractérisée par des constructions institutionnelles asymétriques : dans les règles de prise
de décision des organismes de réglementation précédant la Commission Economique Eurasiatique, la répartition des
voix pondérées et les majorités requises ont toujours assuré une position dominante de la Russie. Le lancement de
l’UD a introduit pour la première fois des mécanismes supranationaux limitant les logiques de souveraineté et réduisant
l’asymétrie entre Etats Membres. Outre la puissance nouvelle de la Commission, on peut noter que son organe inférieur,
le « Collège », est habilité à décider à la majorité des deux tiers, ce qui signifie que la Russie pourrait être mise en
minorité. En rupture avec l’usage antérieur, les votes sont répartis sur le principe « un pays, une voix ».
Figure 2. L’Union Douanière et ses perspectives d’intégration (blog école de journalisme de Lyon ISCPA)
PRESENTATION DE LA COMMANDE
Un stage d’une durée de trois mois a été réalisé dans les locaux de l’Ambassade de France à Moscou, au sein du pôle
agricole du Service Economique Régional.
La mission technique consiste en la clarification et le recensement de la réglementation applicable pour les exportations
de produits alimentaires français vers la Russie. Il s’agit dans un premier temps de hiérarchiser les normes et les textes
entre l’Union Douanière et la Russie, de lister les textes en vigueur, pour ensuite dans un second temps proposer une
mise à jour de la page internet correspondante du site de FranceAgriMer, en lien avec l’AFRAA (Association FranceRussie pour l’Agroalimentaire, qui regroupe vingt organisations professionnelles), avec les autorités russes, avec la
Commission économique eurasiatique, et enfin avec la délégation de l’UE à Moscou. Cette mission est commandée
dans un contexte de changement réglementaire : les textes de l’Union Douanière remplacent peu à peu les textes
nationaux, d’où une nécessité de clarification, de classement, de recherche des textes en vigueur.
A partir de cette mission technique et du contexte de changement réglementaire (création et développement de
l’Union Douanière et de l’Union Eurasiatique), plusieurs questions se posent : comment fonctionne l’Union Douanière,
notamment les organes qui élaborent les normes ? Comment se déroule la transition réglementaire, et plus largement
la création de ces Unions (Douanière puis Eurasiatique) ? Si la mission technique s’intéresse aux normes de santé
publique vétérinaire, elle soulève des interrogations plus larges sur la politique agricole. En effet l’établissement d’une
politique agricole commune aurait un impact sur les normes techniques. Par exemple, jusqu’à ce jour chaque Etat
Membre possède sa propre liste d’organismes nuisibles des cultures céréalières. La mise en place d’une politique
agricole commune impliquerait la mise en commun de nombreux sujets, et impacterait donc lourdement les normes de
l’Union Eurasiatique, ainsi que leur élaboration.
L’étude technique de la réglementation sanitaire et de son élaboration va permettre de mettre en exergue certains aspects
du fonctionnement de l’Union Douanière, ainsi que certains aspects de la future Union Eurasiatique. Par exemple, la
mission technique a permis de constater la mise à part de la Biélorussie et du Kazakhstan dans certains règlements
sanitaires de l’Union Douanière. D’autre part, cette étude technique a permis de constater que les services vétérinaires
100
russes ont mis en avant, plus d’un mois après la signature de la création de l’Union Eurasiatique (le 29 mai 2014), un
règlement technique de la fédération de Russie sur les produits carnés, alors qu’un règlement technique équivalent de
l’Union Douanière est entré en vigueur début 2014. Etre présent à l’ambassade de France auprès du pôle agricole a
permis d’être au cœur de l’information. En effet la conseillère agricole, en lien étroit avec les services vétérinaires russes,
est informée des litiges sur les produits français à la frontière, sur les négociations entre l’Union Européenne et l’Union
Douanière, sur les positions du Ministère de l’Agriculture Français. Par ailleurs, la mission technique a pu révéler qu’un
équivalent de l’OAV (office alimentaire et vétérinaire, établissement qui contrôle au niveau européen notamment les
inspections vétérinaires) pour la Commission Européenne, est inexistant pour le moment au sein de la CEEA.
CONSTRUCTION DE LA PROBLEMATIQUE
L’accord de création de l’Union Eurasiatique a été signé le 29 mai 2014, en plein milieu du stage à l’ambassade de
France en Russie. L’Union Douanière va donc se transformer en Union Eurasiatique le 1er janvier 2015, en une structure
supranationale ayant davantage d’ambitions que les simples volontés économiques : cette nouvelle Union s’assume
politiquement. Comment et par quels mécanismes le projet de l’Union Eurasiatique a-t-il été mis en avant ? Quels sont
les véritables objectifs d’une telle Union ? Pourquoi l’association est réalisée précisément entre la Russie, le Kazakhstan
et la Biélorussie ? Quels sont les éventuels prochains membres ? Qu’est-ce qui est en place aujourd’hui, comment
cela fonctionne, comment cela va-t-il évoluer ? Il faut pour cela se poser des questions sur l’Union Douanière, sur sa
construction, son fonctionnement.
L’étude de l’Union Douanière nous mène forcément à l’Union Européenne : la comparaison est évidente. Leurs
similitudes sont telles qu’elles prennent un pouvoir comparable : la friction s’est matérialisée par la crise Ukrainienne,
qui a dû choisir son camp. On ne peut effectivement pas s’empêcher de comparer l’Union Eurasiatique avec l’Union
Européenne : Quelles sont les différences notables entre les deux Commissions ? Comment fonctionnent ces deux
gouvernances? En considérant le contexte historique, géographique et politique : quelles sont leurs relations, comment
et avec qui interagissent-elles ? En quoi cela peut-il éclairer la crise en Ukraine ?
Dans un contexte de mondialisation126 , les Etats s’unissent pour faire face aux autres superpuissances. L’Union
Douanière, jeune de quelques années, bientôt transformée en Union Eurasiatique, s’inspire légitimement de ses voisins
pour se construire. Peut-on parler d’un transfert de politiques publiques ? Si oui, comment le qualifier ? Comment et sur
quels objets se réalise le transfert ? A quel niveau, par quels acteurs ? Quels sont les enjeux d’un tel transfert ?
La Commission Economique Eurasiatique est l’organe de gouvernance de l’Union Douanière et de l’Espace
Economique Commun. Ce dernier souhaite étendre l’intégration à d’autres sphères de l’économie. Les tarifs douaniers
sont harmonisés, mais de nombreux projets sont en cours de construction et de discussion, notamment concernant
la politique agricole. La Politique Agricole Commune (PAC) de l’Union Européenne est l’exemple le plus connu de
l’intégration communautaire européenne : La PAC représente environ 40% du budget de l’Union européenne. Est-ce
qu’une politique agricole commune est possible et souhaitable par l’ensemble des pays de l’UD ? Quelle politique
agricole commune souhaite la Commission Economique Eurasiatique ? Comment oriente-t-elle ses recherches, ses
décisions à ce sujet ? Quel impact cette politique aurait-elle sur l’ensemble des pays de l’UD ? Quel impact cette
politique agricole aurait-elle sur l’Union Européenne, sur la France ? On peut se demander comment cette future
politique agricole impactera le SER et son fonctionnement en fonction de l’évolution de l’Union Eurasiatique et de ses
relations avec l’Union Européenne.
HYPOTHESES
Quels sont les véritables objectifs de l’Union Douanière, puis de l’Union Eurasiatique ? Cette dernière est considérée
par Vladimir Poutine comme l’aboutissement de la reprise sur le devant de la scène internationale de la Russie et de
ses voisins proches. On peut donc supposer que cette Union a été créée pour concurrencer les grandes puissances
supranationales telles les Etats-Unis ou l’Union Européenne. On peut également émettre l’hypothèse selon laquelle le
contexte historique (les nombreuses tentatives infructueuses d’alliances post- URSS), géographique (l’Eurasie, entité
intermédiaire entre l’Europe et l’Asie, mais bien distincte de l’Europe et de l’Asie) et politique (l’Ukraine, la légitimité de
telles alliances, la compétitivité entre elles, les relations entre les gouvernements et les diplomates) expliquera plus
largement les raisons de cette association d’Etats.
Nous ferons également l’hypothèse d’un transfert de politique publique entre l’Union Européenne et l’Union Eurasiatique:
nous tenterons d’analyser leurs relations et leurs constructions comme telles. Nous nous intéresserons aux différences
entre les deux instances, aux objets réellement transférés, aux modalités de transfert, ainsi qu’aux acteurs impliqués
dans ce dernier. Nous considérons que d’étudier les relations entre l’Union Européenne et l’Union Eurasiatique sous
l’angle du transfert de politique publique, donc sous l’angle de la sociologie, fournira un éclairage nouveau sur la crise
Ukrainienne et permettra de mieux expliquer les raisons de cet engrenage.
La mondialisation désigne le processus d’intégration des marchés et de rapprochement des hommes qui résulte notamment de la libéralisation des échanges (de biens, de main-d’œuvre et de connaissances), de l’expansion de la concurrence et
des retombées des technologies de l’information et de la communication à l’échelle planétaire.
126
101
Une dernière hypothèse est constituée par l’importance accordée à la politique agricole pour comprendre l’organisation
d’une structure supranationale. En effet, la PAC européenne est un exemple phare, voire a été au moins un temps l’un
des succès de l’association entre les pays européens. Constituant près de la moitié du budget de l’UE, la politique
agricole commune a été complexe à mettre en place au sein de l’Europe. Se focaliser sur le chantier particulier de la
mise en place de la politique agricole eurasiatique permettrait alors de mieux comprendre les tenants et aboutissants,
l’impact et l’importance de cette Union Eurasiatique.
METHODOLOGIE
La création de l’Union Eurasiatique, les projets de la Commission eurasiatique, sont en pourparlers en ce momentmême. Comprendre la mise en place de l’Union Douanière, les différents contextes (historique, géographique et
politique), nécessitent de s’intéresser à la presse (tant européenne qu’eurasiatique) parue ces dernières années et
ces derniers mois. Une étude bibliographique a également été menée sur les transferts de politique publique, sur
l’européanisation ainsi que sur la comparaison et la mise en place des structures internationales et supranationales.
Pour compléter les revues de presse et pour mieux comprendre les différents contextes menant à la création des
Unions supranationales, mais aussi pour mieux comprendre les enjeux actuels et les relations entre les acteurs, il a
été décidé d’interroger par des entretiens semi-directifs les acteurs gravitants autour de la réglementation russe et de
l’export des produits français en Russie, en postes à Paris et à Moscou (DGAl, FAM, DGPAAT à Paris, à l’Ambassade
de France en Russie et pour l’Union Européenne à Moscou).
Une attention particulière sera portée aux relations franco-russe et franco-européennes, ainsi que franco- eurasiatiques
observées lors du stage au sein du pôle agricole. L’auteur du présent document sera mis en copie des mails importants
concernant l’Union Douanière et sa réglementation, la création de l’Union Eurasiatique, et les embargos sanitaires.
Même si la plupart des évènements ont été repoussés au vu du contexte politique tendu, un séminaire s’est déroulé
sur l’enseignement agricole franco-russe à l’Université Agricole de Timiriazev à Moscou. Il a également été possible
d’assister aux réunions de service élargies mensuelles du SER. Enfin, il a été possible d’assister aux réunions mensuelles
des conseillers agricoles de l’Union Européennes en poste à Moscou.
CONCLUSION
I. L’UNION DOUANIERE : UNE JEUNE UNION EN FORMATION
Une première partie a permis de faire l’état des lieux de la formation de l’Union Douanière, et de décortiquer le contexte
de formation, les premiers balbutiements de fonctionnement de cette Union jeune de quelques années seulement.
Devant les asymétries dans le pouvoir de négociation des Etats Membres, la Russie conserve le dernier mot dans la
détermination des compromis, au moins en ce qui concerne la Biélorussie, et dès son adhésion l’Arménie. En dépit
de la mise en avant de la promotion de l’économie comme principal argument de l’Union, l’intégration ne semble pas
avoir été décidée en fonction de critères économiques : le commerce à l’intérieur de l’UD (très faible comparé à celui à
l’intérieur de l’UE ou de l’ALENA), n’a pas augmenté depuis la mise en vigueur de l’UD127 .
L’impulsion du projet par le haut lie étroitement sa légitimité et sa durabilité à la personnalité des leaders qui l’ont
soutenu128 . L’intégration eurasiatique est non seulement vulnérable aux changements de présidents (le président du
Kazakhstan a 74 ans), mais tend aussi à perpétuer les régimes en place dans chaque pays en les liant entre eux.
Sur le plan économique, l’ensemble des pays composants ou qui composeront vraisemblablement l’UEA souffrent
de sérieux retards qui devront rapidement être rattrapés. Si les volontés de modernisation sont suffisamment fortes
et si ses pays parviennent à devenir réellement attractifs, l’UEA pourrait être un cadre positif, qui contribuerait à leur
développement économique. Mais si les nombreux blocages constatés demeurent, l’UEA risque de devenir un carcan
renforçant la stagnation de ces membres, pour peu à peu perdre de sa substance puis disparaître. Les profondes
inégalités existantes entres les membres actuels et à venir du projet constituent une autre faiblesse: une union
économique digne de ce nom ne peut fonctionner sur des bases saines lorsque le PIB par habitant de l’un de ses
membres est quinze fois plus élevé que celui d’un autre membre. De plus, pour que l’association soit durable, il faudrait
une diversification de la production de chaque Etat Membre.
L’extension géographique de l’Union est en progression par la seule impulsion de la Russie, cette dernière étant
désireuse de contenir d’une part l’influence de l’UE vis-à-vis de pays comme l’Ukraine, l’Arménie et la Moldavie, d’autre
par l’influence chinoise en Asie centrale. Mais seuls deux pays d’Asie centrale ont exprimé leur volonté de rejoindre l’UE
sur une base volontaire. Plus la dimension géopolitique du projet d’Union Eurasiatique est mise en avant par la Russie,
moins les fondements économiques et la prise en compte des intérêts des autres Etats sont solides.
La logique d’intégration de l’Union Eurasiatique est donc marginalisée par la logique du rapport de forces entre les
Aleksey Shapovalov : baisse du commerce au sein de l’Union Douanière, 09/05/2014, journal Kommersant. http://www.
kommersant.ru/doc/2474260#comments
128
Dreyfus E. : « De l’Union douanière à l’Union eurasiatique, Etat et perspectives d’intégration dans l’espace post- soviétique
», note stratégique, octobre 2013.
127
102
Etats Membres. Cette contextualisation est un passage obligé pour comprendre ensuite les relations qui lient l’Union
Douanière et l’Union Européenne. On remarque des différences entre le fonctionnement de l’Union Douanière et celui
de l’Union Européenne, que ce soit sur le nombre de pays impliqués, sur l’influence relative de chaque pays, ou encore
sur les causes originelles de rassemblement. La crise en Ukraine, mais également les différents embargos russes sur
les produits alimentaires européens montrent les relations tendues entre l’Union Européenne et l’Union Douanière. Les
fondements de l’Union Eurasiatique sont pourtant inspirés de l’expérience de l’Union Européenne. Cette dernière a été
consultée par les membres de la Commission Economique Eurasiatique. Le transfert de politiques publiques est en
cours actuellement, comment se déroule-t-il ?
II. DE LA COMMISSION EUROPEENNE A LA COMMISSION EURASIATIQUE : UN TRANSFERT DE POLITIQUES
PUBLIQUES ?
Une deuxième partie a permis de mettre en évidence un grand écart à première vue entre le modèle exportateur et
le modèle importateur. L’Union Européenne a été créée sur plus de vingt ans, rassemblant des pays assoiffés de
paix après la deuxième guerre mondiale, et cherchant une prospérité économique. Elle diffère de l’Union Douanière,
purement économique, rassemblant des pays russophones de l’ex-URSS autour de la Russie, et se transformant
progressivement en Union Eurasiatique davantage politique, le tout en moins de cinq ans. Voisines géographiquement,
mais paradoxalement opposées : l’une est tournée vers l’Océan Atlantique, l’autre, très continentale, côtoie l’Asie. Ces
deux Unions remettent sans cesse en cause la légitimité de leur voisine, tout en signant des accords de partenariats
économiques afin de promouvoir les échanges commerciaux forts entre les deux entités. Ces paradoxes rendent
leurs relations complexes. Néanmoins, la promotion de l’économie est un objectif partagé par les deux structures. De
même, ce sont deux Unions Supranationales. L’Union Eurasiatique souhaite importer les modalités de délégation de
compétences nationales vers l’Union Européenne, ou tout du moins en s’enquérir de son expérience pour se construire
le plus stablement possible. Cette volonté de transfert résulte de l’émulation résultant de la concurrence accrue entre les
nations du fait de la globalisation économique. Une forme d’imposition de la part de l’Union Européenne est perceptible
du fait de la non-reconnaissance de l’UEA pour cause de non-attachement aux valeurs démocratiques de l’UE. Dans
tous les cas, le transfert résulte d’une transaction entre les deux entités : l’Union Eurasiatique conserve une autonomie
dans le transfert. Les conflits liés à l’élargissement des deux instances ont éclaté notamment en Ukraine, entachant
leurs relations. Dans ce contexte, le Service Economique Régional de l’Ambassade est positionné sur une plaque
tournante stratégique entre les instances françaises, européennes et eurasiatiques. Cela en fait un véritable opérateur
du transfert des politiques publiques, notamment au sujet du transfert de compétences au niveau supranational de la
politique agricole.
Face à la caractérisation de ce transfert de politiques publiques, il est important de rappeler que le transfert étudié n’est
pas terminé, loin s’en faut : on en est aux prémisses de la transmission d’informations entre les deux Unions. Tenter de
caractériser un transfert en cours de réalisation a ses limites : on ne peut pas se focaliser sur l’évolution du transfert, sur
les conséquences pour l’importateur. Le manque de recul empêche de conclure définitivement.
Il convient également de se référer aux travaux de Patrick Hassenteufel sur l’analyse des problèmes méthodologiques
de la comparaison des politiques publiques129 . Il insiste sur le fait que la dimension transnationale ne peut pas
simplement être considérée comme une couche supplémentaire qui viendrait s’ajouter au local, régional ou national.
Il est, au contraire, à appréhender en tant que niveau qui se constitue en interaction avec les précédents et qui génère
des logiques, modifiant toute la structuration initiale. Cela est d’autant plus important à considérer que les acteurs
transnationaux produisent toujours plus de politiques publiques : institutions internationales, mais aussi entreprises
multinationales, ONG, etc... les différentes couches sont en interaction. De plus, la diffusion de modèles et de normes
est liée non seulement à l’action d’exportateurs, mais aussi à celles d’importateurs. Le transfert de politiques publiques
supranationales et son analyse sont ainsi délicats et difficiles à appréhender dans leur globalité. De plus, le transfert
étudié ici se réalise entre entités au sein desquelles des transferts ont été effectués et/ou sont en cours (de structures
nationales vers des structures supranationales), ce qui démultiplie le nombre de couches en interaction.
L’échange de produits, notamment agricoles, entre pays est l’occasion pour la Russie ou pour l’Union Douanière de
faire peser sur les décisions politiques. La gestion de la politique agricole est très importante pour peser dans le
monde et pour assurer au pays l’autonomie, la sécurité alimentaire d’une part, la compétitivité de l’autre. Pour preuve,
la politique agricole commune européenne (PAC) est la plus ancienne et la plus importante des politiques communes
de l’UE. L’organisation de la politique agricole est présentée comme prioritaire par l’accord de création de l’Union
Eurasiatique le 29 mai 2014. Après s’être focalisé sur le transfert en cours, sur les négociations concernant le transfert
de compétences de la politique agricole : qu’en retiennent les instances de l’Union Eurasiatique ? Quelle orientation
prennent-ils ? Quel chantier les attend ?
Hassenteufel P., « De la comparaison internationale à la comparaison transnationale », les déplacements de la construction d’objets comparatifs en matière de politiques publiques, Revue française de science politique, 2005/1 Vol 55, p. 113-132.
129
103
III. UN NOUVEAU CHANTIER POUR LA CEE : LA POLITIQUE AGRICOLE
L’agriculture et l’élevage des trois pays de la CEI sont relativement complémentaires, mais toujours sous- exploités. En
Russie, la spécialisation en céréales la rendent dépendante des marchés sans réel soutien financier aux agriculteurs,
tandis que deux formes inégales d’exploitations coexistent : les grands agro-holdings et les petites fermes familiales.
La tendance générale est à la baisse des échanges de produits agricoles au sein de l’UD, au profit de l’UE ou des
Etats-Unis, plus compétitifs. Les pays de l’Union Douanière doivent moderniser leur agriculture pour faire face aux
gros pays producteurs. En 2013 toutefois, selon la presse russe spécialisée, depuis la création de l’Union Douanière,
la croissance cumulative de la production agricole a dépassé les 20%, et le commerce agricole mutuel a augmenté de
40%130 . Il n’en reste pas moins que l’agriculture eurasiatique est loin de ses capacités, que les importations russes de
produits agroalimentaires sont considérables (35%), et que le budget alloué à l’agriculture au niveau national n’est pas
à la hauteur des objectifs eurasiens. L’enjeu et le chantier de la politique agricole eurasiatique est donc de taille.
L’accord de la création de l’Union Eurasiatique, de plus de 800 pages, contient deux annexes traitant du protocole de
mise en place de la politique agricole commune. Mais peut-on réellement utiliser le terme de « protocole » ? Aucune
spécification sur le budget, aucun planning prévisionnel pour la mise en place des mesures n’est spécifié dans l’accord.
Il évoque à l’horizon 2025 la création d’une politique monétaire, financière et de concurrence unique, mais ne prévoit
pas l’adoption d’une monnaie commune et encore moins la création, comme à Bruxelles, d’institutions ad hoc. Cet
accord est une ébauche d’un protocole qui sera approfondi et mis en vigueur en janvier 2015, lors de la réelle entrée en
vigueur de l’Union Eurasiatique.
La partie agricole précise les définitions des mesures provoquant des distorsions de concurrence (ces dernières sont
interdites de mise en œuvre dans les Etats Membres de l’UEA). Les subventions doivent être notifiées à la Commission
Economique Eurasiatique.
Concernant la partie sanitaire, on retiendra qu’il est prévu la création de services vétérinaires propres à l’Union
Eurasiatique (composé d’inspecteurs des trois Etats membres) pour inspecter les Etats Membres et s’assurer du
respect de la réglementation. Cette instance existe au sein de l’Union Européenne, mais pas encore au sein de l’Union
Douanière. Ceci augmenterait considérablement la légitimité des mesures sanitaires de l’Union Douanière.
Le transfert de politiques publiques agricoles n’en est donc qu’au stade de la discussion, du recueil d’informations,
d’organisations de rencontres entre les deux instances, à des niveaux techniques, mais les politiques publiques ne sont
pas encore en cours d’élaboration réelle. Il n’y a pas de budget alloué, et pas de planning prévisionnel à long terme, pas
d’objectifs précis, surtout des considérations techniques. Cependant, on peut lire dans ces recommandations d’Etats
Membres une volonté d’harmoniser l’agriculture eurasienne et de la promouvoir, de la faire progresser. La presse, tant
générale que spécialisée, met l’accent sur le caractère de « test » de la politique agricole : l’Union Eurasiatique devra
faire ses preuves sur cette délégation de compétences des Etats Membres vers la Commission, d’où l’intérêt de réaliser
un transfert de politiques agricoles de l’Europe vers l’Eurasie, dans les meilleures conditions possibles, en considérant
tous les tenants et aboutissants d’un tel transfert.
BILAN / RECOMMANDATIONS
L’UE ne constitue pas seulement un concurrent pour l’UEA, mais un allié. La force d’attraction qu’exerce l’UE sur ses
voisins s’exerce aussi sur la Russie, en témoigne le transfert de politique publique en cours. La présence de nombreuses
entreprises européennes dans cet espace interdit de croire à l’exclusivité des zones d’influence respectives. L’unification
d’un marché est favorable à l’expansion de leurs activités. L’UE ne doit pas gâcher le capital que constitue l’appétit pour
l’Europe dans l’espace post-soviétique : plus de 50% des échanges de la CEI, sont réalisés ave l’UE. La France et l’UE
doivent consolider leur position dans les pays de la CEI. La France et l’UE doivent garder une position pragmatique visà-vis de l’UD et de la future UEA. La question de reconnaissance ne doit pas les empêcher de communiquer entre elles.
Il faut approfondir la connaissance de la réalité de l’application des normes de l’UD, tenter de mieux cerner la formation
de l’Union Eurasiatique, en pleine évolution. Pour cela, le pôle agricole du SER de l’Ambassade doit continuer de
promouvoir les échanges entre les instances, et être un opérateur actif du transfert des politiques publiques agricoles.
L’écho de la crise ukrainienne au Kazakhstan, en Biélorussie et en Arménie doit être suivi avec vigilance. De même, une
attention particulière sera portée à la question du lieu du siège de l’UEA : capitale du Kazakhstan ou de la Russie ? Si
Astana est retenue, le poids du Kazakhstan dans l’ensemble institutionnel – notamment en termes de fonctionnaires
recrutés, qui sont à ce jour 80% russes à la Commission – s’en verra renforcé.
Toute position de principe sur la pérennité du projet doit être écartée : aussi fragiles que paraissent les structures
actuelles, l’ampleur des efforts mis en œuvre par rapport aux cadres régionaux antérieurs indiquent une forte volonté
politique. Le pôle agricole de l’Ambassade doit continuer à promouvoir les échanges entre l’UE et l’UEA, et prêter une
attention accrue au transfert de politique publique en cours entre ces deux instances.
Forum « Le développement efficace des complexes agro-industriels de la Russie et de la Biélorussie – une condition
essentielle pour la sécurité alimentaire de l’Union Eurasiatique », discours d’accueil du forum entre la Biélorussie et la Russie,
Minsk, 5 juin 2014.
130
104
RETOUR SUR L’ETUDE
Concernant l’analyse du transfert des politiques publiques entre l’UE et l’UEA, Patrick Hassenteufel met en garde
contre les comparaisons «à distance», s’appuyant sur la littérature, sur la presse et autres médias d’informations, sans
enquêter sur le terrain. Au préalable à toute recherche comparative, la comparaison suppose selon lui une certaine
familiarité avec les acteurs, car tout phénomène politique est indissociable de la culture dans laquelle il s’inscrit, ce qui
suppose une immersion assez longue dans le milieu. Cette étude a été réalisée dans le cadre d’un stage de trois mois
à l’Ambassade de Russie, dans le pôle agricole. Il a permis de comprendre l’organisation de la structure, comment
elle était connectée aux institutions françaises, aux exportateurs français, aux institutions russes. Cependant, il n’a
pas été possible de rencontrer des membres de la Commission Economique Eurasiatique. Le pôle agricole est en
lien (notamment par mail) avec des anciens membres des Services Vétérinaires russes ayant intégré le Département
technique sanitaire de l’Union Douanière, mais l’occasion de les rencontrer ne s’est pas présentée. Des entretiens avec
la partie importatrice du transfert auraient permis de mieux cerner le transfert et de multiplier les points de vue sur celuici.
Ensuite, la barrière de la langue s’est fait ressentir, pour les entretiens mais aussi pour déchiffrer la presse russe
traduite pour l’essentiel via des logiciels de traduction. La chargée d’étude russe du pôle agricole a pu aider à traduire
précisément quelques formulations épineuses.
Ce travail a permis de donner une toute autre dimension à l’étude technique, une autre approche des politiques
publiques. L’intérêt de cette étude réside dans le fait que la mission technique a pu mettre en évidence des éléments
concrets pour alimenter l’étude sociologique, et inversement.
TABLE DES ACRONYMES
AFRAA : Association France Russie pour l’Agroalimentaire
ALENA : Accord de libre-échange nord-américain
CEEA : Commission Economique Eurasiatique
CEI : Communauté des Etats Indépendants
DGAL : Direction Générale de l’Alimentation, rattachée au Ministère de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt
DGPAAT : Direction générale des politiques agricole, agroalimentaire et des territoires
DGSANCO : Direction Générale de la Santé et du Consommateur à la Commission Européenne
DG TRESOR : Direction générale du Trésor, rattachée au ministère de l’économie et du redressement productif
EM : Etat Membre
EURASEC : Communauté économique eurasiatique
FAO : Food and Agriculture Organization
FAM : FranceAgriMer, établissement national des produits de l’agriculture et de la mer
NEI : Nouveaux Etats Indépendants
OAV : Office Alimentaire et Vétérinaire
OMC : Organisation Mondiale du Commerce
PAC : Politique Agricole Commune
SER : service économique régional de l’ambassade française
UD : Union Douanière
UE : Union Européenne
UEA : Union Eurasiatique
105
Tuberculose bovine : maladie du passé ou maladie d’avenir ?
Analyse de la lutte contre la tuberculose bovine en France en
tant que problème public.
Heïdi BEAUDOIN, Inspectrice Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Stage réalisé du 15 avril au 25 juillet 2014 à la Direction Départementale de la Cohésion Sociale et de la Protection des
Populations des Ardennes. Mémoire de stage rédigé sous la direction de Nicolas FORTANE (INRA)
Questions abordées par l’étude 131
Pour comprendre le contexte actuel de la lutte contre la tuberculose bovine en France, que ce soit la définition des
mesures de lutte au niveau national ou leur mise en œuvre au niveau local, il est à nos yeux nécessaire de considérer
la carrière de cette lutte dans son ensemble. En effet, dans ce cas précis le concept de carrière est particulièrement
adapté, tant le passé « contraint » l’avenir.
La carrière de la lutte contre la tuberculose bovine en tant que problème public a donc débuté au milieu du XIXème
siècle sous l’impulsion des vétérinaires qui l’ont définie en tant que nécessité sanitaire, cette maladie contagieuse à
l’Homme étant à leurs yeux un problème de santé publique. Il y a cependant absence d’enjeu économique pour les
éleveurs, qui parviennent à vendre leur production, et d’intérêt général pour l’Etat, pour qui l’inspection des viandes,
l’analyse bactériologique et la pasteurisation du lait suffisent à maîtriser les risques zoonotiques. Dans un premier temps
les vétérinaires ne parviennent donc pas à imposer la mise en place des mesures de lutte légalement actée, qui restent
lettres mortes. Ce n’est que quand les éleveurs prêtent eux-mêmes une identité économique à cette maladie, et que
l’Etat reconnaît que l’intérêt collectif commercial et sanitaire est en jeu, que la tuberculose bovine devient un véritable
problème public réclamant l’intervention de l’Etat.
Les vétérinaires vont jouer un rôle actif pour faire se rencontrer ces identités. Portés par leur idéal et par leurs enjeux
professionnels, ils développent des stratégies dédiées afin de se rapprocher des pouvoirs publics et des éleveurs. En
particulier, ils vont s’appuyer sur leur élite qui comporte des membres éminents des services de l’Etat, et vont se poser
en véritables partenaires des éleveurs comme conseillers quotidiens. Appartenant au « monde industriel » au sens de
Luc Boltanski et Laurent Thévenot132 , ils développent des rhétoriques adaptées au « monde domestique » des éleveurs
et au « monde civique » des pouvoirs publics. Ceci leur permet d’imposer leur définition sanitaire de la tuberculose
bovine comme préalable à l’identité économique, ces deux identités contribuant à forger l’identité de problème public
de la lutte contre cette maladie. L’articulation des enjeux professionnels des vétérinaires et commerciaux des éleveurs
se concrétisera dans l’action concertée entre ces deux professions dans le cadre du premier Groupement de Défense
Sanitaire en Vendée en 1951, sous la supervision des services vétérinaires départementaux. Ce fonctionnement ayant
fait la preuve de son efficacité tant sanitaire que commerciale, il est généralisé par l’Etat qui y trouve le meilleur moyen
d’assurer l’auto-suffisance alimentaire de la Nation et la puissance exportatrice de la France. Les vétérinaires ont donc
initialement joué un rôle majeur et actif dans la mise à l’agenda et la définition des mesures de lutte contre la tuberculose
bovine.
Cette lutte a été victorieuse, la mobilisation du trépied sanitaire français a eu pour résultat d’abaisser le taux d’élevages
touchés par la maladie à moins de 0,1%, ce qui a permis à la France de solliciter et d’obtenir des autorités européennes
le statut de pays « officiellement indemne de tuberculose ». Ce statut s’accompagne d’avantages économiques
importants car il permet de s’affranchir des entraves sanitaires au commerce relatives à cette maladie. Cette victoire a
cependant un revers. Les enjeux sanitaires et économiques étant satisfaits, les acteurs se détournent de la lutte contre
la tuberculose bovine, dont ils considèrent l’éradication comme acquise. C’est le statut « officiellement indemne » qui
devient l’objet de leur attention, ce qui a pour corollaire de rendre l’enjeu économique prégnant. Des signaux tendent
pourtant à montrer que l’infection est toujours présente sur le territoire français, mais ils sont négligés par les acteurs du
trépied sanitaire et les experts, selon un processus de construction sociale de l’ignorance renforcé par un jeu complexe
de légitimations croisées. Ces signaux sont confinés dans des arènes périphériques à l’arène sanitaire classique. La
tuberculose bovine est redéfinie comme un problème local ou un problème de faune sauvage. Le discours sur cette
maladie devenue mineure est retreint par la saturation de fait de l’espace de circulation du discours sur les maladies
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ce mémoire.
132
BOLTANSKI L., THEVENOT L. « De la justification. Les économies de la grandeur », Paris, Gallimard, 1991.
131
106
animales contagieuses par des maladies plus « médiatiques » ou « d’actualité ».
Afin de ne pas troubler ce consensus, les administrations locales confrontées à des foyers doivent les gérer « discrètement
» en partenariat avec les acteurs professionnels. Les mesures de gestion négociées localement sont cependant sujettes
aux limites propres à l’ordre négocié, en particulier leur non pérennité133 . Les acteurs de la gestion discrète réclament
donc des outils de sécurisation de ces négociations, outils techniques, mais aussi outils réglementaires. Les mesures
de lutte locales sont reprises par le niveau national en respectant le confinement du discours : les textes réglementaires
et infra-réglementaires que la DGAl élabore soutiennent la thèse d’une maladie à caractère d’exception, présente
uniquement dans certains départements et/ou dans la faune sauvage. Le recours à des instruments « scientifiques
» tels que le dosage de l’interféron gamma sont pour les autorités locales et nationales une garantie sanitaire, et
pour les éleveurs un moyen de sécuriser l’obtention des aménagements qu’ils ont contribués à définir localement.
L’extension du nombre de départements infectés et le maintien dans le temps de l’infection conduisent cependant à
un élargissement de fait de l’espace de circulation du discours. Après une décennie de « silence » relatif, les acteurs
locaux et nationaux initient un processus de déconfinement du discours relatif à la tuberculose bovine et donc de sortie
discrète de l’ignorance. A peine initié, ce processus est brutalement accéléré par les conclusions d’un audit de l’Office
Alimentaire et Vétérinaire, organe d’inspection de la Commission européenne : les autorités françaises ne respectent
pas entièrement et ne font pas respecter la réglementation européenne en matière de tuberculose bovine. La confiance
des autorités européennes dans le système sanitaire français est écornée, les débouchés commerciaux sont en jeux.
Le trépied sanitaire français doit donc redéfinir la lutte contre la tuberculose bovine dans un contexte où l’enjeu
économique est devenu prégnant. Les éleveurs, représentés par leurs syndicats et le GDS national, sont en position
de force et participent activement aux travaux. Les pouvoirs publics ne subissent cependant pas cet activisme. Ils
utilisent l’audit de l’OAV et la nécessité de réévaluer certaines politiques de lutte, dont celle conter la tuberculose
bovine, comme une opportunité de réaffirmer leur leadership dans la gestion des maladies animales contagieuses en
France et en Europe. Les vétérinaires sanitaires par contre semblent pris entre leurs enjeux professionnels, par exemple
leur place dans les élevages ou la valorisation de leurs actes, qu’ils cherchent toujours à sécuriser, et leur rôle dans le
dispositif sanitaire qu’ils considèrent parfois comme celui de simple exécutant. Etre conseiller de l’éleveur et agent de
l’Etat n’est pas une position facile et l’équilibre entre ces deux missions reste délicat à trouver. Dans les discours des
acteurs rencontrés, les vétérinaires semblent parfois les grands oubliés. La confiance qu’ils accordent à l’Etat, et qu’ils
en attendent en retour, semble s’éroder.
Nous avons souhaité consacrer notre troisième partie au thème de l’incertitude, récurrent dans le discours de tous les
acteurs rencontrés. Cette partie se veut plus normative que les précédentes, mais reste fortement ancrée dans l’analyse
sociologique.
Face à un risque qui a changé de visage, les acteurs concernés doivent produire et mettre en œuvre des mesures
de gestion du risque adaptées à cette mutation. Ils doivent le faire dans un contexte d’incertitude important, car les
données manquent pour évaluer la situation d’une façon qu’ils puissent juger suffisante. Evolution épidémiologique,
comportement des différents acteurs, limites des techniques de dépistage ou de diagnostic et des connaissances
scientifiques sont autant de facteurs de variabilité difficilement contrôlables. C’est dans ce contexte que chaque
acteur doit mener un travail normatif, que ce soit la réévaluation des politiques de lutte au niveau national, l’élaboration
d’une norme de travail pour la mise en œuvre de ces mesures sur le terrain pour l’administration départementale, ou
l’intégration de nouvelles règles dans la conduite de leur exploitation par les éleveurs.
Pour diminuer la variabilité « amont » (celle des informations remontant du terrain et utilisées pour définir des mesures de
gestion du risque) et « aval » (la variabilité dans mise en œuvre effective de ces mesures dans chaque département), les
agents de l’administration centrale mettent en œuvre une démarche de type rationnel traitant séparément les variabilités
de plusieurs sous- système dûment identifiés, pour nourrir ensuite une démarche de type incrémentaliste, c’est-à-dire
par une succession de changements en apparence modestes. Cette démarche permet une évolution sécurisée de la
réglementation en réduisant les risques de conflits et/ou d’échec puisqu’elle emprunte un chemin déjà connu de toutes
les parties prenantes.
Pour l’administration locale, il s’agit d’évoluer au sein d’un jeu d’acteurs complexe où se croisent enjeu sanitaire collectif
et enjeux propres à chaque acteur, et de mettre en place des mesures de gestion hors du cadre réglementaire habituel.
Ces deux facteurs, mais aussi le souci global de l’éleveur développé par les agents, augmentent considérablement les
coûts de transaction et donc la quantité de travail à réaliser. La notion de coût de transaction a été élaborée initialement
en économie par l’économiste Ronald Coase dans son article The Nature of the Firm (1937), puis reprise par différentes
disciplines dont les sciences sociales. Un coût de transaction est un coût lié à une transaction sur le marché. Il peut
être direct (commission) ou indirect (coût de prospection, temps et effort passés à la négociation et à la vérification de
la transaction, etc.). Plus largement, toute interaction va demander que les acteurs investissent dans des « transactions
sociales134 » qui vont permettre de prévenir ou de réduire les conflits. Ce sera par exemple prendre le temps de répondre
aux questions d’un éleveur ou élaborer une procédure de travail avec le GDS pour prévenir une possible opposition à
« Les bases d’une action concertée (l’ordre social) doivent être continuellement reconstituées ou (...) « travaillées ». »
STRAUSS A., La trame de la négociation, Paris, L’Harmattan, 1992, p88
134
REMY J., VOYÉ L., SERVAIS E ., « Produire ou reproduire ? » (1978)
133
107
des mesures de police sanitaire. Pour les acteurs de l’administration locale, il s’agit donc de trouver des instruments et
d’élaborer une nouvelle norme de travail afin de maîtriser l’inflation de ces coûts de transaction.
Pour les éleveurs, l’irruption de la tuberculose bovine, situation « hors norme », impose de prendre un grand nombre
de décisions sans avoir de bases solides (scientifiques, expérience passée etc.) sur lesquelles s’appuyer. Pris dans la
« machine » administrative, sujet à des réactions de déni, de défi, ou de relégation du risque dans la sphère privée,
l’éleveur ne subit pas passivement les mesures décidées par l’administration mais se préserve un espace de liberté dans
le cadre réglementaire et reste acteur de la situation. Par ce positionnement, il parvient à garder la maîtrise symbolique
de son cheptel dont les opérations de police sanitaire tendent à le déposséder. Collectivement, les éleveurs ardennais
mettent en place des processus de normativité et de régulation sociale pour faire face au risque « tuberculose bovine ».
Ce faisant, ils assurent l’avenir de leurs exploitations et plus largement du tissu agricole local.
Notre travail présente cependant plusieurs limites. La limite principale est la quantité de matériau d’enquête réunie.
Le temps et les moyens alloués étant limités, nous n’avons pu réaliser que treize entretiens. De plus, nous n’avons pu
assister qu’à un seul comité de pilotage local au dernier jour de notre stage et à aucun comité ou groupe de travail
national. Une autre limite est que notre terrain d’étude était notre seul terrain de stage, le département des Ardennes.
Ceci peut limiter la perception du jeu d’acteurs que nous avons pu développer, les points de vue recueillis et les
opportunités d’observation des acteurs n’étant pas suffisamment nombreux.
Les données que nous avons recueillies sur le jeu d’acteurs local ne peuvent pas être comparées à celles d’autres
départements. Nous ne pouvons donc prétendre ni généraliser notre propos sur le jeu d’acteur local, ni définir si
plusieurs grandes tendances se dégagent ou si des points communs peuvent être trouvés dans les différents ordres
négociés et jeux d’acteurs locaux. Il s’agit pourtant d’une perspective intéressante à étudier. Il serait par exemple
intéressant pour les gestionnaires nationaux de déterminer s’ils peuvent s’appuyer sur des points constants pour définir
un cadre réglementaire relativement contraint, ou si au contraire les particularités de chaque ordre local sont tellement
distinctes qu’il serait préférable de mettre au point un cadre plus souple, dans lequel les moyens seraient plus proposés
que prescrits, et qui supposerait de développer un rôle accru de supervision et d’appui qui se substituerait en partie rôle
prescriptif de l’administration centrale.
Ces limites font également que nous avons une perception limitée du jeu d’acteurs au niveau national. Il serait en
particulier intéressant d’explorer en quoi la crise de la FCO et les travaux menés au cours des Etats Généraux du Sanitaire
par la suite ont pu influer sur ce que nous identifions comme la réaffirmation par la DGAl de son rôle prépondérant dans
la gestion des maladies animales contagieuses. Le rôle des vétérinaires sanitaires nous semble également important
à explorer. C’est toute une réflexion sur la place des vétérinaires sanitaires dans le trépied sanitaire, sur leurs relations
avec les deux autres acteurs, et plus largement sur les relations entre le monde vétérinaire et le monde de l’élevage
qu’il nous semble nécessaire de mener. Plusieurs éléments laissent à montrer une « crise de confiance » entre les
vétérinaires et les services de l’Etat, crise qui à notre sens pourrait compromettre l’avenir du trépied sanitaire français,
qui ne peut prétendre à l’équilibre si ses « pieds » n’ont pas tous la même longueur et le même résistance.
Nous nous interrogeons également sur l’impact que peut avoir l’importation de savoirs managériaux du secteur privé
dans l’administration sur la définition des mesures de gestion du risque. Il s’agit en particulier du management par
la qualité, démarche dans laquelle la DGAl s’est engagée depuis près d’une décennie, et plus généralement de la «
managérialisation » de l’action publique, qui se concrétise par exemple par la définition d’indicateurs de performance.
Nous avons exposé par exemple que la DGAl avait « découpé » les travaux sur la redéfinition des mesures de lutte contre
la tuberculose bovine en un plan d’action comportant 107 mesures réparties en axes et sous-axes. Les processus de
management font appel à des indicateurs de performance et à des indicateurs de fonctionnement permettant d’estimer
les moyens humains et financiers nécessaires, par exemple en fonction du nombre d’arrêtés préfectoraux de mise sous
surveillance (APMS) gérés par une structure. Ces outils managériaux sont-ils utilisés « à côté » de la définition des
mesures de lutte, ou comme outils dans la définition et le suivi de ces mesures ? Ont-ils un impact sur la façon dont
sont prises les décisions, et in fine ont-ils un impact sur la teneur de ces décisions en elles- même? Leur utilisation
modifie-t’elle de façon substantielle les façons de travailler des gestionnaires du risque ? En résumé, la mobilisation de
ces outils managériaux a-t’elle un impact sur les décisions publiques ?
La commande initiale de notre structure d’accueil était un livret d’accompagnement des éleveurs sous le coup d’une
suspicion ou d’une déclaration d’infection de leur cheptel par la tuberculose bovine. A travers notre étude, nous avons
mis au jour que derrière cette demande d’un « outil » spécifique, les cadres de la DDCSPP 08 sont en fait à la recherche
de moyens de diminuer leurs coûts de transaction. Ceux-ci sont en effet importants dans un contexte de travail marqué
par la complexité et la mise en place de mesures de gestion prescrites par une instance supérieure, en- dehors de
toute norme habituelle ou stable, voire simplement temporairement « stabilisable ». Cette commande fait l’objet d’une
réponse dédiée au travers d’un rapport de mission s’appuyant sur l’analyse que nous avons conduite en troisième
partie de ce travail.
Nous avons pu identifier au cours de notre période d’immersion participante que les outils écrits nécessaires ont
108
déjà été élaborés par les agents et cadres de la DDCSPP 08. Effectivement, ils ont élaborés des fiches synthétiques
répondant à chaque cas, fiches qu’ils améliorent constamment. Un nouvel outil écrit ne permettrait pas à notre sens
de diminuer les coûts de transaction. Nous identifions la normalisation du cadre de travail comme un facteur-clé de
diminution de ces coûts. Cependant, cette normalisation ne pourra se faire que quand il sera possible de s’appuyer sur
un cadre normatif réglementaire et infra-réglementaire stabilisé, ce qui permettra de travailler dans un cadre sécurisé, de
standardiser le traitement des dossiers, et de développer une normativité interne sur la base du cadre normatif national.
Le processus de normativité externe mis en place par le collectif des éleveurs est également un facteur qui nous semble
participer de la baisse des coûts de transaction, puisque ces transactions se font principalement entre administration
et éleveurs. Le GDS, de part son rôle de fédération des éleveurs autour des enjeux sanitaires, nous apparaît jouer un
rôle important dans ce processus en réunissant les expériences des différents éleveurs, en s’appuyant sur l’expérience
d’autres GDS, et en diffusant en retour les normes élaborées collectivement sur la base de ces informations.
La baisse des coûts de transaction ne pourra cependant être drastique, elle reste importante en situation de « crise »
sanitaire où les interactions entre administration et professionnels sont nécessairement nombreuses et répétées dans
le temps. Il nous apparaît donc important de souligner que le travail réellement effectué dépasse inévitablement et
fortement le seul travail prescrit, ce qui devrait être pris en compte par les gestionnaires des ressources humaines et
des moyens financiers. De la même façon que nous avons souligné l’importance de la prise en compte de l’acteur
« vétérinaire », nous soulignons l’attention qu’il faut porter au travail de l’administration départementale en tant que
membre à part entière du trépied sanitaire français.
La Direction Départementale de la Protection des Populations
du Bas-Rhin forme-t-elle un ensemble cohérent ?
Cécilia GERHARDY, Inspectrice Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Stage réalisé du 15 avril au 25 juillet 2014 à la Direction Départementale de la Protection des Populations du Bas-Rhin.
Mémoire de stage rédigé sous la direction de Frédéric Mougeot (Centre Max Weber)
Questions abordées par l’étude 136
Le visage actuel de la Direction Départementale de la Protection des Populations est le fruit de nombreuses réformes,
engagées dans un souci d’économies budgétaires et empreintes de l’idéologie du Nouveau Management Public. Ce
courant utilise les techniques de management traditionnellement employées dans le secteur privé pour les appliquer
dans le secteur public, afin de rendre ce dernier plus efficient : l’administré devient donc un « client » qu’il faut satisfaire
à moindre coût.
La réforme qui a donné sa composition actuelle à la DDPP est la Réforme de l’Administration Territoriale, réalisée
dans le cadre de la Révision Générale des Politiques Publiques et initiée en 2007. Elle prescrit la création de Directions
Départementales de la Protection des Populations qui regroupent les anciens services vétérinaires et des fraudes.
Le bilan de cette réforme est mitigé : si l’économie semble prouvée, cette réforme, une fois appliquées dans le secteur
public, engendre des réactions d’opposition des agents concernés.
Afin de comprendre les oppositions rencontrées à la DDPP du Bas-Rhin, nous avons étudié ce qui faisait l’identité des
agents qui y travaillent. La socialisation professionnelle des agents (histoire du service et formation des agents) de la
DGCCRF se fait plutôt sur un mode unique, alors que celle des agents de la DGAl est construite autour de deux pôles
: les cadres d’une part et les techniciens d’autre part. En conséquence, les perspectives de carrières diffèrent, ce qui
a un impact sur le fonctionnement hiérarchique de ces deux groupes professionnels. Cette identité professionnelle
se manifeste au travers de valeurs professionnelles. Elles sont en partie communes aux agents pour ce qui concerne
l’attachement à la protection du consommateur mais semble ne pas être superposables pour ce qui est des domaines
d’action ou des méthodes de travail.
La collaboration entre ces deux groupes professionnels aux cultures différentes, prescrite par la réforme, engendre
donc des résistances de la part des agents qui ne souhaitent pas perdre leur identité propre, source de leurs valeurs
professionnelles, pour prendre tous la même identité. Ces résistances se manifestent par exemple dans l’opposition
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ce mémoire.
136
109
aux nouvelles procédures de fonctionnement (badger, réserver un véhicule de service...)
Le but de cette résistance est donc de conserver leur identité et leurs manières d’exécuter leurs missions car c’est ce
qui fait leur valeur à leurs propres yeux. Ils défendent en particulier une valeur professionnelle : celle du service rendu
à l’administré, qui fait partie de leur identité professionnelle. Enfin, ils s’opposent à toute tentative de réduction de leur
autonomie, nécessaire au contrôle de leurs activités et donc au maintien de leur pouvoir. Malgré les contestations,
plusieurs exemples d’ouverture d’une culture professionnelle à l’autre ont été observés. L’usage de l’humour entre
agents et l’utilisation par la hiérarchie ou un syndicat de valeurs professionnelles communes aux agents des deux
origines ministérielles en sont des illustrations.
Fort cette analyse, nous avons donc tenté d’identifier des recommandations pour augmenter la cohérence de la DDPP
du Bas-Rhin. La difficulté de cet exercice réside dans le fait que la DDPP ne dispose que de peu de marges de
manœuvre face à la situation : les règles prescrites le sont par l’administration centrale et non pas par un supérieur
hiérarchique personnellement connu. Aussi, la plupart des critiques des agents sont dirigées vers les décisions de
l’administration centrale sur lesquelles la hiérarchie de la DDPP du Bas-Rhin n’a pas de prise (systèmes informatiques,
procédures différentes, chaines de commandement distinctes...)
Si on détaille le terme de « cohérence » en plusieurs aspects, on peut tout de même proposer des pistes de réflexion,
adaptées à l’échelle locale.
Aussi, si la cohérence s’entend comme la logique d’une organisation, on constate que la DDPP est déjà en partie
logique puisqu’elle répond à la logique d’économie budgétaire. Par contre, aux yeux des agents la réunion dans une
seule organisation n’est pas logique si on considère que les domaines d’interventions sont différents. Une première piste
d’amélioration serait donc de favoriser le recoupement des domaines d’intervention. Dans ce but, on pourrait étudier la
possibilité de former des agents volontaires des fraudes aux inspections vétérinaires et vice versa, pour les domaines
pour lesquels la législation le permet, notamment au moment où s’effectuent les contrôles de CP2M (Contrôle de
Première Mise sur le Marché) des agents de la DGCCRF et les inspections pour la délivrance des agréments des agents
de la DGAl. Cette démarche aurait également l’avantage d’accroitre la polyvalence des agents et donc la flexibilité de
la structure, paramètre non négligeable dans un contexte de réduction des effectifs.
La cohérence de la DDPP peut aussi évoquer l’homogénéité de l’organisation. Dans ce sens, la DDPP n’est pas
cohérente, car les agents des deux origines ministérielles forment toujours deux groupes professionnels distincts. Il
faudrait pour améliorer ce point favoriser l’acculturation c’est-à-dire, « l’ensemble des phénomènes qui résultent d’un
contact continu et direct entre des groupes d’individus de cultures différentes et qui entraînent des changements dans
les modèles culturels initiaux de l’un ou des deux groupes137 » . Le but serait de favoriser la connaissance réciproque
des méthodes de travail. Ainsi, les agents pourraient être sollicités pour exprimer ce qu’ils estiment efficace dans leur
façon de fonctionner et qui pourrait être utilisé par l’autre groupe professionnel. A titre d’exemple, les procès-verbaux
émis par les agents de la DGCCRF sont très suivis par la justice, ce qui est gratifiant pour eux. Leurs méthodes de
travail dans ce domaine pourraient être utilisées par les agents de la DGAl dont les procès-verbaux sont moins suivis.
Cependant, tout en favorisant l’acculturation, il faudrait veiller à ce que les valeurs professionnelles de chaque groupe
soient en partie respectées, dans la mesure où le fonctionnement de l’organisation n’est pas entravé, car les valeurs
des groupes professionnels, construites depuis des décennies, ne peuvent pas être effacées sans heurter les agents.
Ainsi, les départs en véhicule de service depuis la DDPP pour réaliser les inspections/contrôles sont essentiels aux
yeux de tous les agents car il s’agit du cœur de leur métier. Les agents de la DGCCRF ont insisté sur la conservation
de leur autonomie dans les déplacements (pas de contrôle de l’utilisation des véhicules par un autre agent etc.) et les
agents de la DGAl sur leur efficacité (éviter la perte de temps pour récupérer les véhicules etc.). De nouvelles procédures
d’utilisation des véhicules méritent donc d’être envisagées : afin de faciliter le chargement/déchargement des voitures,
on pourrait étudier la possibilité de stationner les véhicules sur un emplacement proche des bureaux et prévu à cet
effet ou permettre aux agents de partir la veille avec une voiture de service déjà chargée afin de faciliter le départ en
inspection/contrôle le lendemain (les modalités de cette procédure doivent être discutées avec les agents notamment
pour la gestion des plaques eutectiques nécessaires lors des contrôles avec prélèvements).
La cohérence de l’organisation peut également s’entendre comme la cohésion d’un ensemble. Même si nous avons
vu que la DDPP ne forme pas un ensemble homogène, le ciment de l’organisation repose tout de même sur une valeur
professionnelle essentielle, commune aux deux origines ministérielles : la protection du consommateur. Il serait alors
probablement pertinent de fédérer les agents autour de cette valeur en proposant par exemple un thème de travail
en commun. Dans la mesure où les orientations données par la DGCCRF et la DGAl le permettent, des inspections/
contrôles par les agents des deux origines ministérielles, sur un thème qu’ils auraient eux-mêmes proposé, pourraient
être menés, en concertation éventuellement avec la Préfecture. Nous pensons par exemple à un thème vaste tel que «
assurer la protection des enfants » car il a l’avantage d’être assez large pour englober un grand nombre d’activités de
la DGCCRF et de la DGAl (inspection dans les cantines scolaires, contrôles des aires de jeu ou des jouets...). Dans un
souci de valorisation du travail effectué en commun, un bilan de ces actions pourrait faire l’objet d’une communication
Entrée Acculturation in Sous la direction de André Akoun et Pierre Ansart Dictionnaire de sociologie, éditions Le Robert/
Seuil, 1999.
137
110
dans les médias locaux, en présentant la DDPP comme une entité compétente et efficace en matière de protection des
consommateurs et au sein de laquelle les agents peuvent être fiers de travailler.
Enfin, ces propositions doivent être considérées dans la perspective de nouvelles transformations des services
déconcentrés de l’Etat car il s’agit également de préparer les agents à d’éventuelles futures modifications de
fonctionnement, notamment avec les instances régionales. En effet, face à l’annonce séduisante d’André Vallini,
secrétaire d’Etat à la réforme territoriale, «de 12 à 25 milliards de gain grâce à la réforme territoriale138» , la poursuite
de la réforme territoriale semble une évidence, d’autant plus que les réformes à venir prolongeraient celles entreprises
sous l’égide de la RéATE. Cependant, ce continuum de politiques publiques pose question : les DDPP ont-elles été bien
consolidées et stabilisées avant que d’autres changements ne soient mis en œuvre ?
Les indicateurs de performance nous font-ils tourner en rond
?
Analyse par les instruments du dispositif de performance
de budget opérationnel du programme « Sécurité et qualité
sanitaires de l’alimentation »
Sylvie PUPULIN, Inspectrice Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Stage réalisé du 15 avril au 25 juillet 2014 au bureau du management par la qualité et de la coordination des contrôles
(BMQCC) de la DGAL, MAAF. Mémoire de stage rédigé sous la direction d’Amandine GAUTIER (SciencesPo Lyon –
ENSV-VetAgro Sup – Triangle – ACSPAVE)
Questions abordées par l’étude 139
Au cours de notre stage, nous avons mené une étude du dispositif de performance mis en place par la DGAL au niveau
de ses services déconcentrés. Pour ce faire, nous nous sommes intéressée aux indicateurs de performance qui en sont
la pierre angulaire : quels sont ces indicateurs, comment sont ils construits et utilisés, quelles sont leurs conséquences
sur l’action publique et ses acteurs et sur l’organisation ? Nous vous présentons ici une synthèse de notre travail.
Contexte et mission confiée
L’idéologie portée par l’Etat néo-libéral de défense d’un état non interventionniste et acteurs parmi les autres a
profondément modifier l’organisation de l’Etat et l’action publique. Ainsi, l’Etat néolibéral mise sur la problématisation
à l’échelle microsociale et micro-économique pour concevoir et mettre en œuvre l’action publique. Cette vision a pour
conséquences la segmentation de l’Etat en une multitude d’organisations plus ou moins autonomes, le fractionnement
des politiques publiques et la multiplication des acteurs intervenants dans l’action publique. En tant qu’acteur, l’Etat
auquel doit s’appliquer les mêmes règles de bonne gouvernance, de recherche d’efficacité et d’efficience. C’est dans
ce cadre que les principes de gestion de la performance appliqués dans le secteur privé vont être introduits dans la
gestion publique avec leurs outils : stratégie, objectifs, plans d’action deviennent les éléments fondateurs. Pour assurer
le suivi de la réalisation des objectifs fixés sont introduits des outils tels que les indicateurs ou les tableaux de bord. Et
enfin pour évaluer l’efficacité de l’action et l’efficience des services l’Etat fait appel à l’évaluation par l’audit, le diagnostic
ou le conseil d’experts en gestion. L’idée étant d’instaurer une mise en œuvre réactive des politiques publiques : une
évaluation permanente et un ajustement en continu. Le nom couramment donné à ces nouveaux principes de gestion
sont le New Public Management. Les indicateurs de performance, les audits et évaluations permettent d’identifier les
axes d’amélioration pour l’action publique et les organisations. La comparaison de leurs résultats entre administrations
ou entre Etat, le benchmarking, permet la diffusion des bonnes pratiques mais est également une forme de mise en
concurrence, une forme d’incitation à toujours mieux faire en consommant le minimum de moyens. Le benchmarking
suppose donc la transparence. Ces dispositifs de gestion de l’action publique par la performance sont donc aussi des
outils de contrôle de l’administration a posteriori et à distance de l’administration. Et alors que cette forme de gestion a
pour objectif la responsabilisation et l’autonomisation des responsables de l’action publique à tous les niveaux, elle est
aussi une forme de recentralisation de l’Etat par le contrôle qu’elle exerce.
« Vallini : la réforme territoriale permettra d’économiser jusqu’à « 25 milliards d’euros par an »», Le Monde, édition du
09.05.2014, lemonde.fr, http://www.lemonde.fr/politique/article/2014/05/09/vallini-la-reforme-territoriale- permettra-d-economiser-12-a-25-milliards-d-euros-par-an_4413922_823448.html?xtmc=vallini&xtcr=27, consulté le 10.05.2014.
139
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ce mémoire.
138
111
En France, la gestion par la performance est liée à la gestion budgétaire et comptable et est incarnée par la Loi organique
relative aux lois de finances du 1er août 2001 (LOLF). En application de cette loi, les ministères doivent définir, par
politique publique (ou programme selon le vocabulaire de la LOLF), la répartition des dépenses publiques par action,
leur stratégie, leurs objectifs et les indicateurs de performance associés. Ils fournissent ces éléments au Parlement,
dans les projets et les rapports annuels de performance (PAP/RAP) sous une forme prévisionnelle pour l’année n+1 et
sous la forme d’un bilan pour l’année n-1. Ces éléments alimentent le débat parlementaire et le Parlement exerce un
pouvoir de contrôle sur le budget de l’Etat. Parallèlement, les ministères doivent décliner ce dispositif à tous les niveaux
de leur organisation et théoriquement jusqu’aux agents. Pour ce faire, ils déterminent des budgets opérationnels de
programme (BOP) dont les périmètres sont limités par la géographie et/ou par les actions, et des unités opérationnelles
(UO) qui correspondent à l’échelon d’exécution budgétaire. Le ministère de l’agriculture, de l’agro-alimentaire et de la
forêt (MAAF) a donc déployé son dispositif de performance qui concerne en partie la direction générale de l’alimentation
(DGAL) qui est responsable de la mise en œuvre de la politique de sécurité et de qualité sanitaires de l’alimentation
(programme 206 de la loi de finances). Les BOP du programme 206 ont été définis au niveau des directions régionales
de l’agriculture, de l’alimentation et de la forêt et les UO sont les directions départementales en charge de la protection
des populations (DD(CS)PP). Ce dispositif est jugé fiable et cohérent, bien que perfectible, par les parlementaires et
le Comité interministériel d’audit des programmes (CIAP). Toutefois, après 8 ans de mise en œuvre et des services
déconcentrés qui dénoncent un dispositif trop lourd et trop complexe, il apparaît nécessaire de rénover le dispositif de
performance sur le programme 206 et notamment la partie concernant les services opérationnels déconcentrés (BOP).
Le directeur de la DGAL a donc ouvert ce chantier dans le cadre du plan stratégique de la DGAL pour les années 20132015 qui fixe les quatre axes stratégiques suivants pour la DGAL et ses services : 1/ l’actualisation et la consolidation
des modes d’intervention de l’Etat dans le domaine des politiques publiques portées par la DGAL ; 2/ l’optimisation du
fonctionnement collectif et des modalités d’animation ; 3/ la rationalisation des outils et des modalités de travail ; 4/ le
positionnement de la DGAL et la promotion de ses politiques et de ses actions dans son environnement d’intervention.
La rénovation du dispositif de performance fait l’objet de l’action 3.5 « Optimisation du processus de dialogue de
gestion140 et de pilotage de la performance » qui appartient à l’axe visant la rationalisation des outils et des modalités de
travail. Cette action est centrée sur les deux outils utilisés par la DGAL pour le pilotage et la programmation des moyens,
des effectifs, des missions et de la performance à savoir les indicateurs de performance et l’application GAO (gestion
des activités opérationnelles) et a pour objectif leur simplification. Cette préoccupation du DGAL rejoint la volonté de
la direction du budget (en charge de la coordination de la performance publique) de simplifier et de rationaliser les
maquettes de performances des PAP/RAP.
C’est donc dans ce contexte que le bureau du management par la qualité, qui est responsable de l’action 3.5 du plan
stratégique, nous a confié trois missions :
•
proposer des évolutions de la maquette de performance de BOP 206, avec un objectif de diminuer le nombre
d’indicateurs de près de la moitié (passer de 21 indicateurs à une maquette composée de 12 à 16 indicateurs) ; •
décrire la gouvernance de la performance en prenant en compte chacun des acteurs ; •
recenser l’ensemble des indicateurs et données statistiques utilisés en dehors des indicateurs de performance
de PAP/RAP et de BOP. Nous avons tenté de répondre à cette mission en approchant les propositions de simplification de la maquette de
performance et de ses modalités de gouvernance dans le cadre de notre étude technique. Dans le cadre de notre étude
sociologique nous nous sommes consacrée à la gouvernance du dispositif. Questionnements et problématique
Nos questions sont nombreuses concernant l’acceptation de ces réformes de la gestion publique, qui vise à mesurer
une action publique non marchande. Quelles sont les formes de résistance qui s’expriment ? Quels sont les rapports
de pouvoir entre politiques et administratifs, entre administration centrale et services déconcentrés mais aussi entre
individus qui se mettent en place ?
Comment ces dispositifs présentés comme rationnels, objectifs et donc neutres, peuvent ils être neutres alors que ce
sont des outils de contrôle peut-il être neutre ? Comment un dispositif qui impose une sélection des missions et des
activités pour se concentrer sur les plus coûteuses ou les plus emblématiques peut-il être objectif et neutre ? Nous
comprenons bien comment de tels dispositifs vont influencer et orienter l’action publique mais le risque n’est-il pas de
concentrer les moyens sur les actions ainsi rendues visibles ? Les indicateurs de performance sont des outils de mise en œuvre de la politique publique qu’ils mesurent. Ce sont donc
des instruments d’action publique vont générer des effets politiques et organiser des relations de pouvoir entre acteurs.
Pierre Lascoumes et Patrick Le Galès répartissent les instruments en cinq catégories. Les deux premières catégories
correspondent aux outils classiques de l’action politique et visent un intérêt collectif : « les législatifs et réglementaires
Les entretiens de dialogue de gestion sont des moments clef du dispositif français. Ils se déroulent tous les automnes
entre le responsable du programme (RPROG) et les responsables de chaque BOP (RBOP). Lors de ces entretiens, les RBOP
rendent compte au RPROG : bilan d’étape de l’année n, bilan analysé de l’année n-1 et prévisions pour l’année n+1. Ces entretiens correspondent en fait à la négociation du contrat pour l’année n+1 convenu entre RPROG et RBOP, en tenant compte
de l’année n- 1 et des prévisions, notamment en moyens financiers et humains.
140
112
» et « les économiques et fiscaux» (impôts, taxes, subventions, ...). Les trois autres catégories regroupent les types
d’instruments plus récents qui se sont multipliés avec la complexification de l’action publique (augmentation des acteurs,
éclatement de l’Etat, fonctionnement par contractualisation secteur public/secteur privé et au sein du secteur public,
etc.). Ces instruments ont en commun qu’ils basent les rapports politiques sur la communication et la concertation, ils
sont « conventionnels et incitatifs », « informatifs ou communicationnels » ou « des normes ou des standards » diffusant
des bonnes pratiques. Les indicateurs de performance appartiennent à cette dernière catégorie. Les instruments en
plus des effets chercher qu’ils génèrent (la mise en œuvre de la politique publique) vont gagner une certaine autonomie
par l’utilisation que vont en avoir les agents et lui attribuer d’autres usages. Dans ce cas les effets conséquents ne
sont pas anticipés. L’instrument d’action publique répond donc à la définition d’institution au sens sociologique du
terme en tant qu’« ensemble plus ou moins coordonné de règles et de procédure qui gouverne les interactions et
les comportements des acteurs et des organisations» (Lascoumes, Le Galès, 2005, 12). Pierre Lascoumes et Patrick
Le Galès, ont développé l’analyse de l’action publique non par ses objectifs annoncés et ses résultats mais par les
instruments utilisés pour la mettre en œuvre et l’étude des effets qu’ils génèrent.
Ainsi, nous avons mené une analyse du dispositif de performance de BOP 206 en utilisant une approche par ses
instruments, les indicateurs de performance. Nous avons procédé selon une démarche inductive et qualitative. Notre
stage étant à réaliser dans un temps restreint et ayant pour mission de décrire la gouvernance des indicateurs, nous
avons choisi de cibler notre étude sur les acteurs en situation de responsabilité en région et en département (RBOP,
RUO, chefs de pôle, chefs de services) et pour la DGAL sur les chefs de bureau qui sont les concepteurs et les premiers
utilisateurs de ces indicateurs à ce niveau. Initialement nous pensions que l’étude de ces indicateurs nous permettrait
de mettre en évidence le jeu d’acteurs et les rapports de pouvoir existants.
Méthodologie employée et limites
Notre étude technique et notre étude sociologique ont donc le même matériel de recherche. Pour recueillir les données
nécessaires à nos études, nous avons combiné cinq méthodes.
- l’observation active. Nous avons été totalement intégrée au BMQCC et avons ainsi pu observer le travail réaliser par
ce bureau coordonnateur de la performance ; - l’étude de la littérature technique se rapportant à la LOLF et à sa déclinaison par le MAFF et le la DGAL et l’étude de la
littérature scientifique se rapportant à l’évolution des formes de l’Etat, à la construction et l’utilisation des statistiques, à
l’introduction des principes de New Public Management et à ces conséquence, à la mise en œuvre de la LOLF et enfin
à l’étude de dispositifs de performance approchés par les indicateurs ; - la réalisation de 8 entretiens semi-directifs auprès de cadres en SRAL (chef de SRAL, contrôleur de gestion, chef
de pôle coordination et chef de pôle mutualisation, ancien directeur départemental et chef de SRAL) et en DD(CS)PP
(directeur, chefs des services en charges des domaines de santé et protection animale (SPA) et sécurité sanitaire des
aliments (SSA)). Ils nous ont permis de percevoir les rôles que chacun de ces acteurs s’attribue, l’organisation mise en
place dans leur région et département, etc. ; - la réalisation de 2 entretiens collectifs avec les chefs des bureaux concernés par les indicateurs de BOP actuels. Ils
nous ont permis d’obtenir des éléments sur la construction, le suivi, l’analyse et l’utilisation des indicateurs par le niveau
central et également la perception du dispositif par ces acteurs ; - un questionnaire adressé aux DRAAF, DD(CS)PP et DAAF nous a permis de recueillir des données quantitatives et
qualitatives sur l’utilisation des indicateurs et leur critique.
L’exploitation de ces questionnaires a été l’élément central de notre étude technique. Pour notre étude sociologique
nous avons utilisé les verbatim recueillis.
A la différence des questionnaires, l’entretien semi-directif individuel ou de groupe permet de lever les incompréhensions
possibles liées à la formulation des questions. D’autre part les entretiens sont très riches mais étant des échanges entre
personnes ils peuvent facilement dévier et leur durée est forcément limitée dans le temps. Le recueil des données
initialement prévu est donc très souvent partiel. Les questionnaires par contre permettent normalement le recueil
d’informations standardisées sauf dans le cas de questions ouvertes ou de questions fermées incomprises. Le risque
également avec les questionnaires est de formuler les questions de manière à influencer les réponses.
Contrainte par le temps nous n’avons pu mener que 8 entretiens individuels et 2 entretiens de groupe et nous avons du
nous limiter aux acteurs en position d’encadrement et à ceux en charge du contrôle de la gestion de la performance.
Nous n’avons pas pu explorer la perception et l’utilisation des indicateurs par les agents au plus proche du terrain
(les techniciens, les agents technico-administratifs). D’autre part nous n’avons pas non plus bénéficié du temps
nécessaire à une analyse du verbatim recueillie par les réponses au questionnaire. Notre étude ne peut donc viser à une
généralisation de ses résultats.
113
Principaux résultats et recommandations
En première approche, il apparaît que lien entre les objectifs stratégiques et les indicateurs de performance associés
du PAP/RAP et ceux de BOP n’est pas évident. La logique de déclinaison du programme au BOP n’est donc plus
strictement respectée. Concernant les indicateurs de BOP, ils sont très nombreux (21 examinés en dialogue de gestion,
2 pilotés par la DGAL mais non examinés en dialogue de gestion et 1 destiné au pilotage local et non examiné en
dialogue de gestion), leurs libellés est très technique et ne permet pas leur compréhension par des non initiés, leurs
modalités de calcul sont parfois complexes. Par exemple des indicateurs sont calculés sur des périodes glissantes.
L’analyse de nos données confirme ces éléments et nous amène à conclure que les agents en poste d’encadrement
intermédiaire ont une connaissance partielle du dispositif : ils ne connaissent pas la déclinaison du PAP/RAP au BOP,
ou ils confondent les indicateurs de l’un et de l’autre et souvent ils ne connaissent que les indicateurs qui les concerne
directement. Par contre la nature des indicateurs de performance, de leur forme incitative et des représentations qu’ils
portent, est parfaitement perçue par tous nos acteurs.
Nous avons identifié que le dispositif de performance de BOP présentent de graves faiblesses qui vont fortement
impacter son interprétation et son utilisation. Ainsi, sa complexité, sa forte technicité et son manque de lisibilité limite
son utilisation pour les RBOP et les RUO comme outils de pilotage. Sa crédibilité est fortement remise en question du
fait d’une faible fiabilité des données en lien avec les insuffisances des outils informatiques. En effet, les modalités de
saisie des données sont extrêmement complexes ce qui augmente le risque d’erreur de saisie et diminue l’homogénéité
des données. D’autre part, les outils actuels ne permettent pas les extractions et la valorisation des données saisies
nécessaires au pilotage opérationnel. Enfin, les services déconcentrés se plaignent d’un excès de reporting en général
et d’un manque de retours de la part de la DGAL sur l’utilisation et l’analyse des données remontées. Ce manque de
retour d’information participe à faire perdre le sens des indicateurs, du dispositif et de l’action publique et augmente le
risque de dévier vers une « culture du chiffre » : les services se focalisent sur le résultat de l’indicateur et non sur l’action
qu’il porte. Nos acteurs rapportent également que le dispositif n’est pas représentatif de leur activité. Ils voient dans la
quantification de l’action publique la représentation de leurs missions. Nous mettons là en évidence un deuxième effet
pervers : le risque que l’action publique existe parce qu’elle est quantifiée et non l’inverse. La quantification donne corps
à l’action et la rend visible qu’en est-il alors des missions non quantifiées ?
L’analyse des comportements des acteurs vis-à-vis des indicateurs aux moments de leur conception, de leur mise
en œuvre ou de leur appropriation par les DD(CS)PP, nous amène à identifier des indicateurs qui font l’objet d’une
appropriation par l’ensemble des acteurs (les indicateurs de la série SA0306, l’indicateur DC0104 sur le suivi des mises
en demeure) et des indicateurs contre lesquels se développe des résistances. Ce sont des indicateurs contestés et
rejetés (les indicateurs AV0408 et PV0208 par exemple portant sur des taux de non conformités en identification bovine
et dans le domaine végétal), des indicateurs non utilisés (ils sont renseignés mais ne servent pas comme outil de
pilotage de la performance, ce sont principalement les indicateurs de dénombrement de l’activité comme l’indicateur
AV0403 sur le taux d’inspection en pharmacie vétérinaire). Certains font également l’objet de résistances sous la forme
d’un détournement dans l’intérêt du service ou de neutralisation par de fausses déclarations (DC0001 sur la mise à jour
des plans d’urgence). L’analyse approfondie des indicateurs qui font l’objet d’une appropriation, que nous nommons
indicateurs prégnants, montre l’importance de la première étape qui mène à la quantification à savoir la définition de
l’objet mis en nombre et celle des conventions de son calcul. Cette étape en effet est à la base de la représentation qui
sera portée par l’indicateur.
Les disparités constatées concernant les modalités de pilotage nous amènent à nous interroger sur l’organisation
des services, les relations entre les acteurs institutionnels et l’autonomie réelle dont disposent les RBOP et les RUO.
Les SRAL d’abord, nous apparaissent comme des acteurs incontournables du dispositif de performance mais aussi
comme des acteurs non reconnus dans leurs missions de pilotage et de coordination des DD(CS)PP. Notre théorie est
qu’ils se sont emparés des indicateurs de performance pour assurer leur légitimité, se construire une nouvelle identité
et la faire reconnaître. Ainsi, grâce aux indicateurs, ils se positionnent comme experts techniques au sein de la DRAAF,
détenteurs d’informations et régulateurs de leur diffusion, contrôleurs de l’activité des DD(CS)PP et structure fédératrice
et normative. Concernant l’autonomie des RBOP et des RUO, notre théorie est que l’outil de contrôle que forment les
dispositifs de performance limite l’autonomie des décideurs locaux dans une volonté de recentralisation de l’Etat et que
d’autres mouvements de recentralisation s’expriment avec les mêmes effets. Dans ces conditions, l’interministérialité
semble être un des derniers espaces de définition de politiques locales.
Les recommandations que nous pouvons faire concernant le BOP 206 à la lumière de notre analyse sont les suivantes.
Pour améliorer l’appropriation du dispositif par les différents acteurs, lui conserver du sens et limiter le risque de
dérive vers une « culture du chiffre », il nous parait essentiel de simplifier le dispositif, de le rendre plus lisible et de
l’accompagner d’une amélioration des outils informatiques. Il est essentiel aussi que soit apportée une grande vigilance
au moment de la conception de nouveaux indicateurs pour s’assurer de sa réussite. La systématisation des retours
d’information, sans évoluer vers un benchmarking excessif, ainsi qu’une réflexion globale sur l’ensemble des données
114
qui font l’objet d’un reporting, sont également des pistes d’amélioration importantes. Concernant l’organisation de la
chaîne de commandement de la DGAL, il nous semble nécessaire que les rôles et les missions de chacun des trois
niveaux soient redéfinis et que le SRAL soit identifié et reconnu par tous les acteurs pour ses missions de coordination
et d’animation.
Pour conclure sur les dispositifs de performance appliqués aux niveaux opérationnels nous nous interrogeons sur
les conséquences qu’aura la nomination des Préfets de région comme RBOP. Est-ce que cela permettra aux DD(CS)
PP et aux DRAAF/SRAL de mieux défendre leurs missions et leurs politiques locales ? Est-ce que cela augmentera la
volumétrie du reporting en ajoutant un acteur ? Comment vont évoluer les jeux d’acteurs et les rapports de pouvoir par
l’entrée de cet acteur politique dans ce dispositif finalement très technocratique ?
LISTE DES INDICATEURS DE PERFORMANCE DE BOP 206
Code
Libellé
AV0301
Taux de vétérinaires ayant suivi au moins une session de formation
AV0302_01
Taux de réalisation des VSB dans la campagne
AV0303_01
Taux de levée de l’APMS en tub bovine dans le délai de 60 jours
AV0303_02
Taux de levée de l’APMS hors tub bovine dans le délai de 30 jours
AV0403
Pression d’inspection en pharmacie vétérinaire dans les élevages de porcs
AV0405
Taux d’ovins/caprins identifiés par boucle électronique
AV0408
Taux d’élevages contrôlés ne respectant pas les normes de santé publique vétérinaire
dans le domaine de l’identification et de la traçabilité des bovins
SA0204
Taux de respect des prescriptions de la DGAL en matière de recherche de salmonelles
SA0303_01
Taux d’inspection non conformes dans les établissements d’abattage ayant donné lieu
à une suite
SA0303_02
Taux d’inspection non conformes sur les points incontournables du fonctionnement des
établissements ou chaîne d’abattage ayant donné lieu à une suite
SA0306_01
Taux d’inspections non conformes dans les ateliers relevant de l’axe amélioration ayant
donné lieu à une suite
SA0306_02
Taux d’inspections non conformes dans les ateliers relevant de l’axe prévention ayant
donné lieu à une suite
SA0306_03
Taux d’inspections non conformes dans les ateliers relevant de l’axe répression ayant
donné lieu à une suite
SA0703
Taux de zones de production de coquillages classées conformément à la qualité réelle
de la zone
PV0102_01
Taux de réalisation du plan de contrôle des produits phytopharmaceutiques et autres
contaminants chez les distributeurs, applicateurs et utilisateurs
PV0208
Taux de non conformité majeure produits phytopharmaceutiques et autres contaminants (applicateurs et distributeurs)
PV0414
Taux de contrôle des établissements soumis à PPE
DC0001
Taux de mise à jour des PISU
DC002
Taux de réalisation d’exercice de gestion d’épizootie majeure
DC0104
Taux de re-contrôle suite à inspection avec mise en demeure
DC0201_01
Taux d’agents formés au droit pénal appliqué
DC0501
Nombre d’élèves bénéficiant de l’action « un fruit pour la récré »
AV0402
Respect des PSPC activateurs de croissance et antibiotiques
DC0301_00
Taux de réalisation des PSPC (tous)
115
LISTE DES ABRÉVIATIONS ET DES SIGLES
BMQCC : Bureau du management par la qualité et de la coordination des contrôles BOP Budget opérationnel de
programme
CIAP : Comité interministériel d’audit des programmes
DAAF : Direction de l’alimentation de l’agriculture et de la forêt
DB : Direction du budget
DDCSPP : Direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations
DDPP : Direction départementale de la protection des populations
DGAL : Direction générale de l’alimentation
DRAAF : Direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt
ETP : Equivalent temps plein
GAO : Gestion des activités opérationnelles
LOLF : Loi organique n°2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances
MAAF : Ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt
PAP/RAP : Projet annuel de performance / rapport annule de performance
RBOP : Responsable de BOP
RPROG : Responsable de programme
RUO : Responsable d’UO
SALIM : Service de l’alimentation
SARV : Service des affaires régionales vétérinaires
SDPRAT : Sous-direction du pilotage des ressources et des actions transversales
SPA : Santé et protection animales
SRAL : Service régional de l’alimentation
SSA : Sécurité sanitaire des aliments
SV : Santé des végétaux
UO : Unité opérationnelle
La brucellose chez les bouquetins du massif du Bargy : Carrière
d’un problème public, outils de gestion du foyer et controverses,
le cas complexe d’une maladie affectant une espèce protégée
Aline DEPECKER,
Inspectrice Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission effectuée du 14 avril au 25 juillet 2014, à l’Office Nationale de la Chasse et de la Faune Sauvage. Mémoire de
stage rédigé sous la direction de Nicolas FORTANE (INRA)
Questions abordées par l’étude 141
Bien que la France ait obtenu en 2005 un statut de « pays officiellement indemne de brucellose bovine », la résurgence
de la maladie en Haute-Savoie en 2012 fait de cette maladie une préoccupation majeure des gestionnaires de la santé
publique vétérinaire. Cette résurgence d’une maladie connue de longue date présente un caractère atypique dans la
mesure où elle a trouvé à survivre à bas bruit dans la faune sauvage depuis une dizaine d’année sans qu’elle n’y ait été
décelée alors que par le passé elle frappait en masse les cheptels domestiques causant avortements, infections de
l’appareils reproducteurs ou encore des articulations, ne pouvant alors passer inaperçue. La nouvelle crise brucellose en
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ce mémoire.
141
116
Haute-Savoie interroge donc, elle semble remettre en cause les acquis du passé et les conclusions tirées d’expériences
antérieures car elle avait déjà frappé la faune sauvage en France mais s’était éteint progressivement. Dans le massif du
Bargy, c’est le contraire qui s’est produit, la maladie a évolué lentement mais au lieu de s’éteindre, elle s’est développée
largement pour atteindre en 2014 50% de la population de bouquetins. Ce phénomène est à ce jour inexpliqué, les
incertitudes scientifiques sont grandes sur le sujet et c’est dans ce contexte d’incertitudes que les pouvoirs publics ont
dû gérer la crise qui avait trouvé naissance au sein d’un conflit entre acteurs défendant des intérêts différents. Deux
mondes s’opposent : celui de l’élevage qui voit en la résurgence de la maladie une menace pour la filière laitière locale
et donc l’économie et celui des associations de protection de la nature qui cristallisent leurs intérêts en la protection
de la population de bouquetin du massif du Bargy et en la préservation d’un patrimoine animalier emblématique de la
haute montagne. C’est dans ce climat conflictuel grandissant que les pouvoirs publics ont décidé d’agir rapidement
et ce afin d’apaiser les esprits belliqueux. Les décisions prises n’ont pas été aisées à proposer et à défendre car les
incertitudes scientifiques existantes ont été source de débats au plus haut des instances décisionnelles, mais les
décisions prises l’ont été dans le but de satisfaire le plus grand nombre. Ainsi la politique publique élaborée pour gérer
la crise a trouvé fondement dans la mise en place d’une surveillance fine de la faune sauvage locale et dans l’abattage
d’une partie des bouquetins du massif du Bargy. Ces instruments de gestion frappant sous deux angles différents ont
pour premier but d’obtenir des données robustes sur la maladie ainsi que d’en explorer les mécanismes d’apparition
et de développement enrichissant ainsi les connaissances scientifiques et réduisant alors les incertitudes sur ce sujet.
Dans un second temps, l’instrument constitué par l’abattage est mis en place rapidement dans le but d’apaiser les
tensions et afin que l’état ne soit pas accusé de passivité face à la crise : « il fallait bien faire quelque chose » comme le
citent les pouvoirs publics. Cet instrument permet également de réduire le nombre d’individus potentiellement à risques
et donc de diminuer localement la pression d’infection exercée sur les cheptels domestiques. La politique publique
de gestion de la crise est rendue possible par la collaboration d’acteurs hétérogènes qui concourent chacun à rendre
possible le décryptage du processus d’installation du foyer de brucellose et à gérer ses impacts dans un environnement
souvent hostile.
L’enjeu est grand car la France risque de perdre son statut « officiellement indemne de brucellose » statut favorisant les
échanges internationaux, ce qui aurait des conséquences graves pour la France et pour le département dont le principal
débouché du secteur de l’élevage est la vente de produits laitiers comme notamment le Reblochon qui représente 30%
du PIB.
Aussi les pouvoirs publics ont-ils agit rapidement, trop rapidement pour certains, et les instruments d’action publique
utilisés sont ouvertement contestés tel est le cas de l’abattage à l’aveugle de tous les bouquetins de 5 ans et plus
fortement remis en cause car aurait causé plus de dégâts que de biens.
Ainsi la gestion gouvernementale d’une population animale qui plus est sauvage et réservoir d’une maladie transmissible
à l’homme est en véritable défi pour les pouvoirs publics. Ce cas particulier du massif du Bargy illustre bien le concept
« One world, One Health », «un monde, une santé » tel que défendu par les organisations internationales comme
l’Organisation Internationale des Epizooties (OIE), l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) ou la Food and Agriculture
Organization (FAO) visant à « savoir, prévenir, détecter circonscrire éliminer et répondre aux risques pour la santé animale
et humaine attribuables aux maladies animales et aux zoonoses ». Il se situe au carrefour de la santé animale et de la
santé humaine et constitue un réel problème de santé publique. Ce type d’événement ne peut trouver dénouement
qu’au moyen finalement d’une approche collective dans sa gestion et non pas dans une approche morcelée où chacun
n’y voit que ses propres intérêts quitte à faire appel d’ailleurs aux pays voisins qui pour certains ont déjà connu des
situations de crise similaires, c’est de cette manière que les problèmes publics pourront trouver des solutions.
Si le problème est clairement défini, que la question est précisément posée, alors les pouvoirs publics pourront se
pencher sur les propositions de solutions pour le résoudre mais sans question précise la gestion du problème reste
difficile et floue. Dans notre sujet d’étude, on peut se demander si la problématique est clairement définie : cherchet-on à éradiquer la brucellose dans le massif du Bargy ou cherche-t-on à protéger la santé publique ? Ces deux
questions ne soulèvent pas la même réponse et induisent des instruments d’action publique différents. La première,
rejoint sans nul doute les propositions d’abattage total de la population de bouquetins, mais la seconde peut aboutir
à des moyens d’action autres alternatifs à l’abattage tels la sécurisation des productions au moyen de traitement
thermique ou encore par analyses bactériologiques régulières de ces dernières permettant ainsi de garantir la sécurité
sanitaire des produits. Egalement pourrait être envisagée la vaccination des animaux sauvages ou celle des animaux
domestiques sous conditions et après accord de la commission européenne. Quoi qu’il en soit il semble exister d’autres
mesures de gestion de la crise comme nous avons pu l’entendre lors du congrès du Groupe d’Etude en Ecopathologie
de la Faune Sauvage de Montagne142 (GEEFSM) regroupant grand nombre d’experts européens de la faune sauvage
et ces mesures devraient être étudiées économiquement, ce qui jusqu’alors n’a pas été objectivé. Lors du congrès au
mois de juin 2014, nos voisins suisses ou italiens avaient exposé leurs connaissances et partagé le mode de gestion
qu’ils avaient mis en place face à des situations similaires.
Créé en 1983 à Gabas, le GEEFSM regroupe des scientifiques français, italiens, espagnols, suisses et andorrans afin de
mettre en commun leurs connaissances et surtout leurs interrogations quant à la pathologie de la faune sauvage de montagne.
142
117
Aussi, c’est peut être grâce à l’expérience acquise des crises similaires à l’étranger, et grâce à la diminution du décalage
entre le niveau gestion local, national et européen que le foyer de brucellose du massif du Bargy pourra être efficacement
traité et à terme ne plus présenter un risque pour la santé publique ou encore être éradiqué si telle en est la volonté.
La gestion des risques de santé publique impliquant la faune
sauvage :
Le cas de la brucellose chez les bouquetins du Bargy
Célia AMITRANO, Inspectrice Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission effectuée Stage réalisé du 15 avril au 25 juillet 2014 au MEDDE. Mémoire de stage réalisé sous la direction de
Gwenola Le Naour (SciencesPo Lyon)
Questions abordées par l’étude 143
La première partie a offert un retour très complet sur le contexte dans lequel a évolué le dossier. Une analyse de
l’évolution de la gestion de la faune sauvage a été proposée. Nous avons observé que les liens entre le MAAF et le
MEDDE ont été très étroits dans la construction de politiques de gestion de la faune sauvage. Aujourd’hui encore,
les deux ministères ont compétence sur la faune sauvage. Celle du MEDDE consiste en sa protection, tandis que le
MAAF en gère les maladies. Les questions de santé publique impliquant la faune sauvage sont relativement récentes,
et les exemples de gestion sont peu nombreux (rage vulpine, tuberculose chez les cerfs). Le cas de la brucellose
chez les bouquetins est particulier, car il concerne une espèce protégée par plusieurs textes juridiques (nationaux et
internationaux). Toute mesure prise sur cette espèce de bouquetin doit donc faire l’objet d’une dérogation par le CNPN.
Par ailleurs, ce dossier est au cœur d’une région d’élevage extensif, où est produit un fameux fromage au lait cru (le
Reblochon). La brucellose étant une zoonose transmissible par la consommation de produits au lait cru, le problème
a acquis une dimension de santé publique. Nous avons alors procédé à une re-contextualisation afin d’identifier les
acteurs et les enjeux présents dans ce dossier. Nous avons relevé trois enjeux principaux : la santé publique, l’économie
et la biodiversité. Nous avons vu comment les arguments de santé publique ont primé dans le discours des acteurs,
alors que les risques la concernant apparaissaient relativement faibles, malgré la présence de deux cas humains. Les
enjeux économiques étaient probablement la raison principale des inquiétudes des éleveurs et des élus. Pourtant, les
risques étaient eux aussi faibles, puisque la transmission inter- espèce de la maladie (des bouquetins aux bovins) était
faible (avis de l’ANSES). En définitive, le risque le plus présent était peut-être celui de voir la maladie progresser dans
la population de bouquetins dans le massif du Bargy et potentiellement dans les autres massifs. Cet argument n’a été
mis avant que tardivement, et ce n’est probablement pas la raison pour laquelle autant d’acteurs se sont mobilisés.
L’analyse des acteurs et des forces en présence a aussi permis d’identifier une participation des citoyens à ce sujet,
au travers d’une pétition. Cela a eu tendance à confirmer la nécessité d’associer les citoyens aux décisions ayant un
impact sur l’environnement. Cette re-contextualisation était nécessaire, car elle a permis une meilleure compréhension
et une approche plus empirique des enjeux et des acteurs en présence dans ce dossier.
Dans la deuxième partie, nous avons effectué un retour sur l’évolution des mesures prises au cours de l’affaire. Elles
ont d’abord porté sur les cheptels domestiques : contrôles renforcés sur le lait et dépistage des bovins avant et après
la montée en alpages. Des études épidémiologiques sur la faune sauvage ont identifié que la source de la maladie
provenait des bouquetins. Une question majeure se posait alors : quel(s) risque(s) souhaitait-on gérer ? Il n’est pas certain
que cette question ait clairement été posée. Du moins, elle n’a pas suscité de débat entre les acteurs. Il nous semble
pourtant qu’il s’agit d’une question primordiale. Si le risque visé était la protection de la santé publique des mesures
de biosécurité et des contrôles suffisaient peut-être. Nous savons aujourd’hui que le risque est contrôlé, justement en
vertu des dépistages menés. Si c’est le risque de transmission de la maladie aux animaux domestiques qui est visé
(c’est d’ailleurs celui qui a été retenu), les abattages étaient peut- être une des solutions, mais sûrement pas la seule.
Nous avons alors pu observer l’évolution du positionnement des acteurs quant aux mesures à mettre en place. Il y avait
une volonté de ne pas faire peser sur les éleveurs trop de contraintes. Les dépistages renforcés étant déjà une mesure
difficilement acceptable pour les éleveurs. Très vite la nécessité d’agir sur la population de bouquetins est apparue
comme inéluctable. Les chiffres de la prévalence de la maladie (38 % globalement, 56 % chez les 6 ans et plus, 15 %
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ce mémoire.
143
118
chez les jeunes), ont entraîné la promotion de l’abattage total de la population des bouquetins. Elle a été élue comme
étant la solution la plus efficace, à moindre coût, par une majorité d’acteurs (DGAl, Préfet, la plupart des élus locaux, et
les éleveurs). Nous avons alors analysé l’avis de l’ANSES – une instance d’expertise supposée éclairer les décideurs
dans leurs choix –, sur les avantages et inconvénients de plusieurs scenarii. Cet avis a été interprété différemment,
selon ce que voulaient y voir les acteurs. Une lecture objective de cet avis n’est pas évidente, car les experts affirment
la nécessité d’agir sur la source de l’émission de la maladie (les bouquetins) et disent que l’abattage total ou celui des
6 ans et plus, sont les méthodes les plus à même de réduire le risque de transmission144. D’un autre côté les experts
s’interrogent (eux-mêmes) sur la réalité de l’urgence, et rappellent que peu d’exemples d’éradication d’une population
sont recensés. Il semble alors que l’avis se prononce sur l’efficacité des méthodes au regard du risque visé par les
demandeurs (MAAF et MEDDE), autrement dit l’ANSES répond à la question posée : comment réduire rapidement
le risque de transmission . D’un autre côté, l’avis paraît surtout montrer qu’il faut prendre le temps de réfléchir et de
rassembler d’autres connaissances, afin de prendre une décision éclairée, dans un paysage de connaissances plus
complet. Nous avons ensuite analysé l’élaboration de la décision finale, à savoir l’abattage des animaux de cinq ans et
plus. Il s’avère qu’elle a été le fruit d’un compromis entre abattage total et abattage (ce que souhaitaient les éleveurs
et les services locaux) des séropositifs (ce que souhaitaient les APN et le CNPN). Le compromis n’a pas été décidé au
niveau local, en présence des acteurs. Ce sont les cabinets du MAAF et du MEDDE qui sont arrivés à cette position à
mi-chemin, censée allier sécurité sanitaire, biodiversité et finances publiques. Au niveau local le Préfet avait néanmoins
réussi à faire accepter la décision, tant aux éleveurs, qu’à quelques APN. Tout au long du rapport, nous avons analysé
les méthodes communicationnelles des autorités étatiques, en particulier celles du Préfet. Nous avons relevé les outils
rhétoriques qu’il utilisait dans ses courriers ou lors des réunions. Un intérêt particulier a été porté sur la communication
au niveau des chiffres ( de prévalence, de bouquetins testés, etc.). Il apparaît que des confusions et des erreurs sont
souvent commises par les autorités étatiques elles-mêmes. Si ces erreurs ne sont peut-être pas volontaires, elles
dénotent d’une maladresse ou du moins de la complexité du dossier et de sa difficile appropriation par les politiques.
Enfin, nous avons procédé à une « évaluation » de la politique publique menée. Sur le plan pratique l’opération a été
un succès, puisque en trois jours d’opérations, 233 animaux ont été tués. Pourtant, sur les plans épidémiologique et
écologique, les mesures sont un échec. La prévalence de maladie a augmenté chez les jeunes animaux passant de
15% à 50%. Les opérations d’abattage des vieux bouquetins ont déstructuré l’organisation de la population, les jeunes
ayant eu accès au rut plus tôt. La maladie atteint maintenant toutes les classes d’âge. Le dossier est donc de nouveau
à l’agenda politique et ces nouveaux résultats appellent une prochaine décision.
La troisième partie commence par l’analyse des réactions suscitées par l’annonce des résultats de prévalence chez
les jeunes, et les nouveaux positionnements qu’ont adoptés les acteurs. Seules les APN et les services techniques du
MEDDE (DGALN) ont vu en ces résultats une nécessité de prendre du recul et de repenser les méthodes de gestion.
Tous les autres acteurs y ont vu un appel à l’abattage total. La Ministre de l’Écologie a finalement décidé d’aller dans le
sens prôné par les autres acteurs, outrepassant l’avis de ses services. Ces prises de positions nous ont servi de base
pour questionner la manière dont la faune sauvage et par extension, la Nature étaient appréhendées et gérées. Cette
partie était alors l’occasion pour nous de réfléchir à une autre manière de penser et de concevoir la gestion de la faune
sauvage. Nous avons alors émis des pistes de gestion des risques sanitaires impliquant la faune sauvage, différentes
de celle qui avait été choisie (l’abattage massif d’une partie de la population). Nous avons donc proposé des solutions
alternatives à la gestion qui a été accomplie. Ne pas agir aurait pu être une solution. Elle n’a pourtant jamais été
envisagée, car elle était politiquement infaisable. Les éleveurs n’auraient pas admis qu’aucune action ne soit prise sur
la source du risque (les bouquetins). Pourtant, la non-action est une manière de choisir et d’agir. En l’espèce, elle aurait
permis de faire de ce cas inédit un terrain d’expérimentation et de collecte de connaissances. Il est néanmoins possible
de comprendre pourquoi cette solution n’était pas politiquement acceptable vis-à-vis des éleveurs. Nous avons alors
exploré des pistes qui avaient déjà été expérimentées auparavant, pour d’autres maladies ou d’autres espèces. Les
bisons du parc de Yellowstone, eux aussi atteints de brucellose, ont subi plusieurs méthodes de gestion. Il en ressort
qu’il n’y a pas une solution efficace, mais que c’est la combinaison de plusieurs mesures qui permet de maîtriser les
risques au lieu de les éradiquer. La gestion des risques proposée ici, serait d’essayer de changer de paradigmes et de
modes de raisonnements. Vouloir absolument atteindre le risque zéro est peut-être une exigence qui ne vaut pas les
sacrifices réalisés. Mais encore faut-il que la population accepte que l’administration n’ait pas pour objectif le risque nul.
La comparaison est toujours intéressante, mais présente néanmoins des limites : les contextes sont souvent différents
(et donc la situation est rarement comparable) et les solutions pas nécessairement exportables. Nous avons alors
proposé une gestion qui serait plus centrée sur une action en amont : une surveillance accrue de la faune sauvage. Si
nous considérons que les maladies de la faune sauvage sont quelque chose que les pouvoirs publics doivent maîtriser,
il nous paraît alors pertinent d’agir en amont. En effet, une action en aval signifie qu’il est déjà trop tard, et gérer a
posteriori, suppose des mesures qui auraient potentiellement des effets non-anticipés sur la faune sauvage ou les
écosystèmes. Nous avons proposé des pistes de surveillance épidémiologiques et populationnelles qui rassembleraient
divers acteurs : l’ONCFS, les citoyens, les associations et les chasseurs. Ces derniers ne s’impliqueraient dans la
« [...] pour abaisser significativement le risque de transmission aux animaux domestiques notamment sur le massif du
Bargy, et cela dès le début de l’automne, mais aussi pour protéger les autres massifs et maîtriser le risque de décantonnement
» (avis de l’ANSES le 04 septembre 2013, p.2).
144
119
surveillance du bouquetin s’il présentait un intérêt cynégétique. Cela impliquerait alors un changement de statut de
cette espèce emblématique de la reconquête de la biodiversité. La proposition d’une surveillance alliant différents
acteurs, chacun à leurs niveaux, pose les bases d’une gestion pluraliste de la faune sauvage et des risques sanitaires
susceptible d’y être liés. À la toute fin de ce rapport nous imaginons et proposons une gestion politico-administrative du
dossier qui serait pluraliste et participative. Nous nous sommes basés sur les écrits de R. Massé, de P. Lascoumes, M.
Callon et Y. Barthe, ainsi que sur ceux de J. Habermas, pour imaginer ce qu’aurait pu être (et ce que pourrait être) une
gestion collective de ce type de dossier. Les objectifs de cette gestion sont multiples : pacifier les relations entre acteurs,
augmenter l’acceptabilité des mesures, faire émerger des solutions qui prendraient peut-être plus en compte l’intérêt
général, ou qui proposeraient des visions hors des sentiers battus. La prise en compte de la pluralité est essentielle pour
la définition des savoirs, et par extension, des décisions : « la qualité de nos savoirs, leur capacité à être à la hauteur
de la réalité qu’ils concernent auraient alors un seul critère : que soient intéressés tous ceux qui sont susceptibles de
faire valoir une dimension de cette réalité, tous ceux qui peuvent contribuer à ce que le problème que nous posons
à propos de la réalité prenne en compte les exigences multiples que nous impose cette réalité » (Isabelle Stengers,
2002, p. 107)145 . Dans une dernière étape, des esquisses de compromis ont été proposées, en vertu des solutions qui
apparaissaient plus ou moins acceptables pour les acteurs. Nous avons émis l’hypothèse que le compromis aurait
pu se former autour de la mesure d’abattage des séropositifs, et sur la vaccination des bouquetins, si des conditions
favorables de dialogue entre tous les acteurs avaient été réunies Dans tous les cas, la gestion pluraliste et participative
nous est apparue comme une piste à explorer pour la gestion future de ce type de dossier.
Pistes de recommandations pour la gestion future des risques de santé publique impliquant la faune sauvage.
1 - Sur la gestion politico-administrative du dossier.
À la suite des entretiens sociologiques réalisés, et suite à notre analyse du processus décisionnel, il est possible de
dire que la gestion du dossier a été contrôlée, cloisonnée et non pluraliste. Certes le Préfet a reçu les deux principales
parties prenantes, mais il les a reçu séparément, et n’a jamais essayé de mettre en place un dialogue. Les raisons
invoquées par le Préfet sont compréhensibles, il souhaitait une gestion pacifiée et apaisée du dossier, ce qui ne laisse
pas forcément la place à la controverse. La gestion proposée dans ce dossier a été stato-centrée, où l’État est incarné
par le Préfet, qui joue le rôle de pivot. C’est lui qui contrôle les informations que chaque partie reçoit. Nous pouvons
alors supposer qu’il s’agit d’un moyen de garder le contrôle sur les différentes parties. Par ailleurs, nous avons pu
observer et constater que les relations que le Préfet entretenait avec les éleveurs et les élus étaient bien plus cosy et
harmonieuses que celles entretenues avec les associations. Cette position du Préfet, proche du pouvoir périphérique
(les élus locaux), correspond à la théorie développée par Jean-Pierre Worms, dans Le Préfet et ses notables. Celui-ci
aurait appris à travailler avec et pour les élus, quitte à défendre les intérêts locaux face à l’intérêt général. Le Préfet
était effectivement plus sensible aux arguments des éleveurs et à leurs enjeux. Ceux-ci ont d’ailleurs particulièrement
apprécié l’écoute qu’a eue l’État sur ce dossier. Il ne s’agit pas de blâmer le comportement du Préfet, il a probablement
fait ce qu’il pensait être la meilleure solution pour préserver l’ordre public. Cela nous permet cependant de relativiser
la position des éleveurs qui ont apprécié la gestion de ce dossier, et qui de ce fait, n’ont pas manifesté un grand
intérêt pour une gestion pluraliste lors des entretiens. Comment auraient-ils réagi si le Préfet avait été plus sensible aux
arguments environnementaux ?
Ainsi, sur la base de nos observations, des entretiens sociologiques et de notre propre interprétation, nous proposons
les pistes de réflexion suivantes pour réaliser la gestion pluraliste à l’avenir.
- Dès que l’affaire s’est avérée être au
croisement de différents enjeux (brucellose, bouquetins, Reblochon), il aurait fallu identifier tous les acteurs ayant un
intérêt à agir dans l’affaire.
- Le Préfet pourrait, dans un second temps, recevoir les acteurs séparément afin de sonder leurs positions et amener
progressivement l’idée d’une gestion collective.
- Il faudrait ensuite organiser le plus vite possible une réunion
rassemblant toutes les parties prenantes. Il est nécessaire de présenter le dossier de la même façon pour tous les
acteurs. Ils doivent avoir les mêmes informations. Il faut noter que cette réunion doit avoir lieu avant que le dossier ne
s’envenime, et avant que les préjugés et les croyances mutuels des acteurs, ne s’installent à la place de la réalité. En
l’occurrence, les APN étaient très ouvertes et demandeuses de dialogue avec les éleveurs (pour ce dossier).
- Ce type de réunion imposerait une neutralité absolue de la part du représentant de l’État. Il peut néanmoins proposer
des solutions, mais ne pas prendre parti (ou ne pas le faire de suite).
- Pour ce type de dossier, une gestion tripartite
aurait peut-être été plus efficace, du moins au début du dossier. Elle ne suffit probablement pas, il paraît important
d’associer les citoyens aux discussions. Cela n’a pas été fait, puisque la consultation du public, normalement prévue
pour les décisions ayant un impact sur l’environnement n’a pas été réalisée. Matthieu Stelvio, un citoyen s’est d’ailleurs
emparé du dossier et suit l’affaire de très près. Il y a donc bien des revendications citoyennes à être intégré au processus
décisionnel pour des mesures ayant un impact sur la faune sauvage ou sur la santé publique.
144
Stengers, Isabelle, Sciences et pouvoir. La démocratie face à la technoscience, Paris, La Découverte, 2002.
120
- Enfin et surtout, il paraît nécessaire que les experts soient inclus dans les discussions. Il aurait peut-être été opportun
d’inviter les experts de l’ANSES à expliciter leurs avis aux acteurs locaux. La pluralité des acteurs complique et ralentit
peut-être la prise de décision, mais est susceptible de garantir une meilleure compréhension mutuelle des positions,
enjeux et arguments des acteurs.
Dans tous les cas, le critère essentiel est le temps. Une telle démarche en demande beaucoup. Aussi, il paraît
opportun de réunir les participants le plus tôt possible, afin qu’ils puissent participer à l’identification des risques, des
questionnements soulevés, des mesures possibles, etc., sous l’arbitrage et les conseils avisés de l’État. Évidemment,
prendre le temps d’organiser ce type de réunion suppose qu’il n’y ait pas d’urgence à agir. L’État reste le garant de
l’intérêt général, et doit pouvoir garder une marge de manœuvre au cas où les discussions
n’aboutiraient pas à une solution ou à un compromis, ou si cette solution va à l’encontre de l’intérêt général.
2- Sur la gestion de la faune sauvage.
Il nous est apparu, au cours de l’analyse de ce dossier, qu’il y avait une nécessité quant à la définition des questions et
des risques. « Poser les bonnes questions » serait alors une recommandation que nous formulerions. La question des
risques que l’on souhaite gérer, ou même les questions posées à l’ANSES (par exemple la dernière saisine en cours
sur la faisabilité de l’abattage total des bouquetins), devraient aussi être soumises à discussion avec les acteurs dans
le cadre d’une gestion pluraliste. Les questions seraient peut-être moins orientées et seraient moins dépendantes au
sentier. Les questions ne seraient plus « que faire et comment le faire ? », mais « doit-on faire ? ». Faut-il intervenir sur
les maladies de la faune sauvage ? Les motifs de santé publique semblent être une raison justifiant une action de la
part des autorités publiques. Pour autant, le risque doit être évalué, et les mesures prises en fonction de celui-ci. Le
risque de transmission à la faune domestique était, en l’espèce faible et peu probable. Il ne faut néanmoins pas oublier
que deux cas humains ont été diagnostiqués, ce qui n’est pas négligeable (ils avaient mangé du fromage non affiné).
Des mesures devaient probablement être prises, mais elles auraient pu être plus proportionnées. L’idée avancée in
fine dans cette affaire, est de vouloir gérer la faune sauvage de la même manière que les cheptels domestiques. La
prophylaxie utilisée pour la brucellose est l’abattage total, de ce fait, c’est la solution recommandée par le MAAF, les
éleveurs, et maintenant le MEDDE. Abattre tous les bouquetins du massif du Bargy, et après une période de vide
sanitaire, en réintroduire. Il nous paraît nécessaire de questionner ce raisonnement. Comment imaginer pouvoir détruire,
rapidement, tous les individus d’un massif ? Quelles seraient les conséquences de la suppression d’une population sur
un territoire donné ? Nous pouvons en effet imaginer que le vide créé par l’abattage des bouquetins pourrait en appeler
d’autres, ce qui rendrait l’éradication de la population (et de la maladie) plus compliquée. C’est ce qui s’est passé avec
les renards, lors des éradications de masse réalisées pour prévenir la dispersion de la rage : plus les animaux étaient
abattus, plus d’autres populations de renards les remplaçaient. Au-delà de la faisabilité pratique de cette méthode,
la démarche philosophique est aussi à questionner. Peut-on vraiment s’ériger en gestionnaire de la Nature ? Si oui, il
semble alors nécessaire de procéder à des études approfondies sur la faisabilité des mesures prises, et surtout sur leurs
conséquences à moyen et long termes sur les écosystèmes. Si la certitude absolue n’existe pas en science (Hubert
Reeves), elle n’existe pas non plus dans la Nature.
Traçabilité : Instrument du gouvernement vietnamien pour la
mise en place de sa politique sanitaire
Bénédicte BENEULT, Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2012-2014
Cadre de réalisation
Mission effectuée du 14 avril au 25 juillet 2014, à l’Ambassade de France au Vietnam. Mémoire de stage rédigé sous la
direction de Muriel FIGUIE (CIRAD)
Questions abordées par l’étude 146
Dans le contexte d’un pays émergent, le Vietnam qui a subi de nombreuses évolutions récentes, j’ai souhaité étudier
la mise en œuvre d’un instrument de contrôle de la qualité sanitaire : la traçabilité. A partir d’une analyse de l’évolution
de l’économie agricole, du fonctionnement des prises de décisions politiques au Vietnam et d’un exemple de mise en
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ce mémoire.
146
121
place d’un système de traçabilité dans une entreprise industrielle de la filière viande porcine, j’essaie de comprendre les
choix opérés par le gouvernement pour mettre en œuvre cet instrument de politique sanitaire qu’est la traçabilité ainsi
que les difficultés liées à la mise en application de cet instrument.
Dès mon arrivée, plusieurs constats se sont imposés. D’abord, le gouvernement et les autorités locales vietnamiennes
ont montré un fort intérêt pour la traçabilité de par leurs discours et les différents projets établis pour la mise en place
de la traçabilité. Malgré cet intérêt très marqué, la mise en œuvre concrète m’a paru particulièrement délicate comme
en témoigne les refus des propositions faites pour redéfinir la mission et le temps qu’il a fallu pour y parvenir. Il m’a
alors semblé important d’essayer de comprendre quels étaient exactement les intérêts pour le gouvernement mais
également pour l’ensemble des acteurs de la filière de la mise en place d’un système de traçabilité et ensuite de
déterminer quelles difficultés se présentaient pour la mise en œuvre d’un tel système. Trois grandes questions m’ont
semblé essentielles pour la compréhension des intérêts et des difficultés pour la mise en place de la traçabilité :
- Comment fonctionne la politique actuelle au Vietnam, de manière globale et en ce qui concerne les productions
animales et quels sont les enjeux économiques, culturels et politiques du gouvernement vietnamien ? - Quelle est la place de la traçabilité dans la politique sanitaire du gouvernement vietnamien ? - Comment les acteurs des filières de productions animales reçoivent-ils l’instrument de la traçabilité et quelles seront
les conséquences envisageables des différentes réceptions pour la mise en place concrète d’un système de traçabilité
?
La réforme du Doï Moï de 1986 a marqué l’ouverture de l’économie et sa libéralisation ce qui a permis au Vietnam,
après plusieurs années d’essor économique mais aussi de crise, de devenir un acteur de la scène agricole mondiale. La
stratégie du gouvernement vietnamien pour l’agriculture consiste à moderniser, restructurer et industrialiser la production
agricole en transférant des méthodes et des technologies utilisées dans des pays développés. Toutefois le pays présente
de nombreuses spécificités de fonctionnement du gouvernement, de prises de décision, de relations entre les acteurs
des différentes filières. Parmi ces spécificités, on trouve la dilution du pouvoir, la rétention d’information, la volonté des
acteurs à conserver leur pouvoir, une notion de transparence très peu valorisée. L’ensemble de ces caractéristiques
ne va pas être sans effet sur la mise en place de la politique sanitaire visée par le gouvernement. La politique sanitaire
du gouvernement est définie par deux lois sur la qualité des produits et des biens et sur la SSA. Plusieurs circulaires
accompagnent ces deux lois dont une visant à mettre en place un système de traçabilité. Cette politique sanitaire
était essentiellement tournée vers des mesures autoritaires comme la relocalisation et la restructuration des élevages
mais elle semble peu à peu évoluer vers des mesures plus incitatives telles que la traçabilité. Toutefois les spécificités
du fonctionnement du gouvernement évoquées ci-dessus font survenir différentes difficultés pour la mise en place
des mesures sanitaires et entrainent également une passation de responsabilité difficile entre le gouvernement et les
acteurs tant sur le plan sanitaire qu’économique.
Dans la province d’Ho Chi Minh, le département d’agriculture et du développement rural (DARD) a pour principal
objectif de mettre en place la traçabilité uniquement pour de grandes entreprises industrielles, d’abord dans le secteur
des volailles puis celui des porcins. Pour cela, il souhaite mettre en place un système simple et moderne. Selon lui c’est
pour cette raison qu’il choisit certaines entreprises partenaires plutôt que d’autres mais il existe d’autres explications
sous-jacentes telles que les relations entre les entreprises et les autorités, la position de haut membres de l’état au
sein des entreprises ou encore le problème de visibilité de l’action publique mise en œuvre. Ainsi le gouvernement
vietnamien a choisi de se servir de la traçabilité comme un instrument de sa politique de sécurité sanitaire des aliments
(SSA). Au fil des discours on découvre que la traçabilité représente pour le gouvernement un objectif en soi, un label
de qualité plus qu’une méthode de gestion des informations et rien ne transparait sur l’utilisation future par les autorités
des informations de traçabilité. Cet instrument n’est pour l’instant appliqué qu’à de grandes entreprises ayant des
relations privilégiées avec l’état et les autorités locales. Malgré ces relations privilégiées plusieurs difficultés vont
probablement se présenter lors de la mise en place de la traçabilité. Ces difficultés sont de trois ordres : culturel
(manque de transparence, opacité des transactions), pratique (filière en perpétuel changement) et politique (peur de
perdre du pouvoir, engagement de la responsabilité et gestion au niveau provincial).
La traçabilité est un instrument récent dont la définition n’est pour le moment pas unanime. Chaque acteur donne
sa propre définition. Ainsi la traçabilité est vue tour à tour comme un label de qualité et un objectif de valorisation
des produits, comme une obligation imposée par la réglementation, comme un outil de management, de contrôle
des fournisseurs, comme un outil de certification qualité et le contrôle de la qualité des produits carnés, comme une
contrainte, comme l’origine des produits, comme un tampon présent sur les carcasses et des certificats, comme un
lieu d’achat ou enfin comme un moyen de prévenir des atteintes à la santé. Les acteurs se réapproprient la traçabilité et
vont même jusqu’à la détourner pour servir leurs propres intérêts. Selon les dires des acteurs, il y aurait deux principaux
bénéficiaires de la mise en place d’un système de traçabilité : l’entreprise et les consommateurs alors que les éleveurs
seraient « des victimes ».
122
Quatre hypothèses ont été émises pour répondre à la problématique initialement définie et concernant la mise en place
d’un système de traçabilité au Vietnam. Ces quatre hypothèses étaient les suivantes :
- L’intérêt du gouvernement vietnamien pour la traçabilité tient principalement au fait que la traçabilité s’inscrit dans un
projet de modernisation globale du secteur agricole qui est soutenu par des organisations internationales.
- Les difficultés de mise en œuvre d’un système de traçabilité vont être principalement dépendantes du fonctionnement
du gouvernement vietnamien et des relations entre le gouvernement et les grandes entreprises industrielles. L’État
semble avoir du mal à faire évoluer son rôle dans le domaine sanitaire ce qui est peut être lié aux difficultés à changer
son rôle d’acteur économique. - La traçabilité est mobilisée par le gouvernement mais aussi par l’ensemble des acteurs de la filière, ces acteurs
ont des enjeux divergents. La traçabilité risque donc de refléter des enjeux plus globaux que ceux énoncés par le
gouvernement. - La transparence est une valeur fortement valorisée actuellement dans le contexte des pays occidentaux comme mode
d’évaluation de l’action publique et du fonctionnement des filières, ce qui n’est pas forcément le cas au Vietnam. Ceci
va compliquer la mise en œuvre de la traçabilité dans ce pays. A l’aide des 3 parties du développement résumées ci-dessus, nous avons désormais les éléments pour discuter ces
hypothèses. Hypothèse 1 : L’intérêt du gouvernement vietnamien pour la traçabilité tient principalement au fait que la traçabilité s’inscrit
dans un projet de modernisation globale du secteur agricole qui est soutenu par des organisations internationales.
La stratégie de développement agricole du Vietnam est clairement affichée, le gouvernement souhaite mettre en place
une agriculture moderne et surtout industrielle. Nous avons pu voir que les actions mises en œuvre par le gouvernement
pour atteindre les objectifs de la stratégie de modernisation ont d’abord été des actions autoritaires : relocaliser et
restructurer totalement les unités de production en imposant dans la réglementation des lieux d’implantation pour les
unités de production et des technologies à mettre en place. Ces actions n’ont eu que peu de succès le gouvernement
semble donc se tourner désormais vers des mesures plus incitatives comme la traçabilité. La traçabilité serait donc une
étape de plus dans la stratégie de modernisation de la production agricole au Vietnam. Toutefois malgré un affichage
clair dans les discours du gouvernement sur la traçabilité comme étant un instrument de la politique de SSA, on se rend
compte que dans les faits, la traçabilité n’est pas réellement un instrument permettant au gouvernement d’améliorer la
SSA mais que la traçabilité représente plutôt un outil de valorisation des produits des grandes entreprises industrielles.
Aucun élément ne transparait quant à l’utilisation des informations de la traçabilité par le gouvernement pour améliorer la
SSA. En l’état actuel des choses, il est plus vraisemblable que la traçabilité ne servira qu’à apposer des codes barres sur
les produits et ces codes barres serviront en quelque sorte de «logo», de signe de qualité qui signalera un produit issu
d’une filière «contrôlée». Finalement, la traçabilité se présente comme un outil de promotion des produits de l’entreprise
Vissan dont la mise en place se fait aux frais de l’état et de la coopération internationale, voire des consommateurs qui
seraient prêts à payer plus cher pour la présence d’un «logo». Pour l’état, la traçabilité n’est pas un instrument servant
la SSA ou l’information du consommateur mais elle apparait plus comme un outil pour promouvoir l’industrialisation
des filières et des entreprises qui restent des entreprises d’état. Il semble donc que d’après la situation, l’état va utiliser
pour « ses » entreprises de l’argent de la coopération internationale afin de permettre la mise en place d’un outil qui
lui permettra de rendre les produits de « ses » entreprises plus compétitifs sur le marché domestique et international.
Hypothèse 2 : Les difficultés de mise en œuvre d’un système de traçabilité vont être principalement dépendantes
du fonctionnement du gouvernement vietnamien et des relations entre le gouvernement et les grandes entreprises
industrielles. L’État semble avoir du mal à faire évoluer son rôle dans le domaine sanitaire ce qui est peut être lié aux
difficultés à changer son rôle d’acteur économique.
Nous avons montré que les caractéristiques du fonctionnement du gouvernement vietnamien pourraient poser des
problèmes lors de la mise en place de la traçabilité. En effet, la volonté de conserver le pouvoir, la non centralisation des
décisions, la focalisation sur les résultats et non sur les processus, le manque de transparence, la dilution du pouvoir
sont tout autant de caractéristiques qui s’opposent à la mise en place d’un système de traçabilité qui lui se caractérise
par des valeurs de transparence, de partage des responsabilités, de centralisation des décisions et des systèmes.
Les relations entre les grandes entreprises et le gouvernement jouent également un rôle important dans la mise en
place de la traçabilité. Nous avons pu voir que le choix de la mise en œuvre d’un système de traçabilité dans certaines
entreprises était guidé par les relations privilégiées entre l’état et ces entreprises. Ceci permet à l’état de garder le
contrôle sur le système de traçabilité qu’il met en place, cela lui permet d’offrir une large visibilité à son action et d’avoir
des entrées privilégiées dans ces entreprises de par la présence de dirigeants appartenant à l’état. L’état a du mal à se
désengager de son rôle d’acteur économique et à procéder à l’actionnarisation des entreprises publiques. Il semble
que le processus se répète avec son rôle dans la gestion sanitaire des produits. L’état souhaite garder le pouvoir dans
les deux domaines et se sert alors des entreprises transformées en SARL mais qui restent financées par l’état pour
123
mettre en place la traçabilité. Vue de l’extérieur, on pourrait donc penser que l’état délègue ses fonctions de gestionnaire
du sanitaire à des entreprises et donc à des acteurs privés mais au final, il réalise plutôt la promotion de ses propres
entreprises.
Le fonctionnement du gouvernement et les relations entre le gouvernement et les grandes entreprises influence en
grande partie la mise en place d’un système de traçabilité mais nous avons également vu que d’autres facteurs étaient
impliqués. Parmi ces facteurs, on trouve l’organisation des filières qui est difficile à déterminer et qui est en perpétuel
changement. On trouve également les habitudes des consommateurs qui sont habitué à consommer de la viande
fraîche sur les marchés sans informations écrites. Les consommateurs ont confiance dans les marques ou dans leur
vendeur mais ne sont pas forcément demandeurs d’informations supplémentaires.
Hypothèse 3 : La traçabilité est mobilisée par le gouvernement mais aussi par l’ensemble des acteurs de la filière, ces
acteurs ont des enjeux divergents. La traçabilité risque donc de refléter des enjeux plus globaux que ceux énoncés par
le gouvernement.
Tel que présenté actuellement, le système de traçabilité parait être un système utile au management de l’entreprise
Vissan pour le suivi et contrôle de ses fournisseurs mais également pour le transfert de responsabilité en cas de
problème sanitaire en amont de la filière. En maitrisant le contenu de l’information de la traçabilité comme cela semble
être le cas actuellement, l’entreprise contrôle ce qui peut en être fait et évite d’en faire un outil de contrôle de ses propres
pratiques. Toutefois à ce stade, il est très difficile de dire qui aura réellement accès aux informations et surtout comment
les informations pourront être utilisées par les différents acteurs. Cette zone d’ombre fait que peu d’acteurs se sentent
réellement impliqués, hormis l’entreprise, les autres acteurs ne perçoivent pour le moment aucun intérêt dans la mise
en place d’un système de traçabilité. Même si l’ensemble des acteurs donne sa propre définition de la traçabilité, les
enjeux qui en ressortent sont limités. Pourtant, on pourrait imaginer que la traçabilité soit utilisée par d’autres acteurs
de la filière que l’entreprise, par les fournisseurs par exemple qui pourrait contrôler la répartition de la valeur ajoutée
sur la filière ou contrôler la valorisation de leurs efforts de qualité. Cela nécessiterait d’attacher des données de prix
ou de qualité aux produits, C’est en intéressant les différents acteurs de la filière et en incluant dans la «trace» des
informations qui intéressent chacun d’eux que l’on pourra initier une action collective autour de la traçabilité et ainsi
identifier les enjeux pour chacun des acteurs. Le contenu de la trace doit être idéalement discuté et négocié entre les
acteurs concernés.
Hypothèse 4 : La transparence est une valeur fortement valorisée actuellement dans le contexte des pays occidentaux
comme mode d’évaluation de l’action publique et du fonctionnement des filières, ce qui n’est pas forcément le cas au
Vietnam. Ceci va compliquer la mise en œuvre de la traçabilité dans ce pays.
La transparence est en effet une valeur qui n’est pas mise en avant au Vietnam, le secret et la rétention d’informations
font partie de la culture au sein du système vietnamien. Il est plus important pour les autorités vietnamiennes de se
focaliser sur les résultats et non sur les processus. Pourtant la traçabilité consiste à analyser l’ensemble des processus
et non les résultats. Cette différence majeure avec les pays européens va réellement compliquer le développement d’un
système de traçabilité. Nous avons pu en juger par nous même lorsqu’il a fallu déterminer l’ensemble des fournisseurs
de l’entreprise. Il a fallu 4 rencontres et plusieurs appels téléphoniques pour identifier les fournisseurs de l’entreprise.
La collecte de cette seule information a duré plusieurs semaines. Le manque de transparence représente donc une
sérieuse barrière à la traçabilité.
En dehors des hypothèses, deux autres éléments méritent d’être discutés. En premier lieu, il parait intéressant
de s’attarder sur le rôle du consommateur dans le système de traçabilité. Les différents acteurs semblent voir les
consommateurs comme un moteur réel pour la mise en place de la traçabilité or d’après le discours de ces derniers, ils
ne sont vraiment demandeurs de code-barres et d’informations concernant l’origine de leur produits, ils veulent avant
tout des produits sains et en l’état actuel des choses pour le système vietnamien rien ne relie la SSA et la traçabilité.
Les seuls éléments qui ressortent sont la valorisation des produits et le contrôles des fournisseurs de l’entreprise.
D’après les premiers témoignages récoltés auprès des consommateurs, on peut douter du fait que les consommateurs
liront les codes barres et «traiteront» l’information qu’ils contiennent. On peut vraiment se demander ce que feront
les consommateurs d’un code barre. Après la présentation de l’étude technique et la proposition d’un système de
traçabilité pour l’entreprise, les autorités et les dirigeants du gouvernement se sont accordés sur le fait que le système
proposé pouvait être mis en place dans l’entreprise mais il ne le serait que si une enquête consommateurs était réalisée
au préalable. Les dirigeants de l’entreprise ont précisé que si plus de 30 % des consommateurs se disaient intéressés
par la traçabilité alors ils accepteraient de tester le système de traçabilité dans leur entreprise. Mais est-ce vraiment aux
consommateurs d’être le moteur de la mise en place de ce dispositif ? N’est-ce pas plutôt le rôle du gouvernement en
mettant en place une définition précise de ce qu’est la traçabilité et en définissant concrètement comment il souhaite
se servir de la traçabilité pour assurer la SSA ?
Le second point concerne la diffusion future du système de traçabilité en effet les autorités prétendent mettre en place
d’abord un système pour les grandes entreprises pour ensuite pouvoir l’étendre à l’ensemble de la filière. Toutefois pour
124
le moment il n’a pas été possible de comprendre comment les autorités espèrent étendre la traçabilité à l’ensemble de
la filière dans l’avenir. Le seul point sur lequel nous sommes sûrs est que pour le moment elles refusent catégoriquement
de l’intéresser aux « petits » acteurs de la filière, tous les acteurs qui n’ont pas mis en place des dispositifs industriels
sont pour l’instant écartés du dispositif. Or si l’on s’en tient au discours des autorités, l’objectif premier de la traçabilité
est d’améliorer la SSA. Elles considèrent également que les élevages de type familial sont les plus à risques d’un point
de vue sécurité sanitaire car ils ne respectent pas les règlementations émises par le gouvernement. En suivant ce
raisonnement, il semblerait donc logique d’adresser le système de traçabilité plutôt à ces acteurs qu’acteurs industriels.
Mais ce n’est pas le cas pour l’instant. D’autre part, des publications sur l’avenir de l’agriculture au Vietnam soutiennent
que cette dernière ne pourra pas fonctionner sans les petits producteurs, il parait donc essentielle pour la durabilité de
l’agriculture et de la traçabilité d’inclure l’ensemble des acteurs dès maintenant dans la politique sanitaire afin que tous
se sentent impliqués.
Retour sur expérience
Avant de conclure ce rapport je souhaite faire un bref retour sur la mission que j’ai réalisée au Vietnam pendant 3 mois.
La mission technique qui m’a été confiée, était de proposer un système de traçabilité pour une entreprise produisant
de la viande porcine. Cette mission s’est révélée être une mission particulièrement délicate avec beaucoup d’enjeux,
beaucoup d’attentes et beaucoup d’acteurs impliqués. Avant mon arrivée, je ne connaissais aucun aspect sociologique
des relations au Vietnam, j’ai ensuite découvert les caractéristiques du fonctionnement des administrations et des
autorités dans ce pays. Il m’a fallu beaucoup de temps pour que le sujet technique soit approuvé, ensuite chaque
rencontre avec quelque acteur que ce soit devait être précédée d’une demande officielle qui pouvait parfois n’être
obtenue qu’après 2 semaines. Je me suis aussi rapidement rendu compte de l’incohérence de certaines données
collectées qu’il a fallu ensuite vérifier à plusieurs reprises et croiser avec d’autres sources d’information. Ces différentes
caractéristiques ont conduit à une avancée de la mission assez laborieuse, en ce qui concerne la mission technique, je
n’ai donc pas obtenu un résultat aussi concret que je l’aurai souhaité. J’ai parfois ressenti un sentiment d’impuissance
pour faire avancer les choses au cours de ma mission, d’une part à cause de la méconnaissance du terrain d’autre
part à cause de la barrière de la langue mais finalement j’ai eu une position idéale pour observer et analyser les jeux
d’acteurs puisque ma position se trouvait au carrefour de tous les acteurs. Cette position m’a permis de réaliser l’analyse
sociologique présentée dans ce rapport. Bien sûr beaucoup d’aspects sociologiques m’ont sans doute échappés
durant l’étude étant donné le court laps de temps de la mission, mais j’ai été particulièrement intéressée par l’approche
par les instruments et l’analyse des jeux des acteurs tout au long de la mission.
La mise en place de la traçabilité n’en est pour l’instant qu’à sa phase pré-décisionnelle, les acteurs peuvent encore
faire pression pour protéger leurs intérêts et mettre en avant leur résistance au changement afin d’influencer la mise
en œuvre de la traçabilité. Pour le moment l’état semble se servir de la traçabilité comme un outil pour mettre en avant
les entreprises industrialisées et afficher sa volonté de poursuivre l’industrialisation. Toutefois si les autorités souhaitent
mettre en place un système de traçabilité il apparait évident qu’il faudra du temps pour surmonter les difficultés liées
au contexte économique, politique et culturel. Le gouvernement devra également mettre l’accent sur une définition
précise de la traçabilité et en particulier sur les modalités d’utilisation des informations s’il veut mobiliser les acteurs.
Enfin il devra également inclure l’ensemble des acteurs à ce projet notamment les petits acteurs de la filière qui ne sont
pas industrialisés.
125
Mémoires soutenus dans le cadre du CEAV-SPV
Anticiper l’arrivée du loup dans les élevages ovins laitiers :
Proposition de protocole d’étude sur l’impact du stress des
troupeaux sur la production laitière
Anne JEANNIN
, Inspectrice Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 14 avril 2014 au 25 juillet 2014 dans le service Biodiversité et Ressources Minérales de la Direction
Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement de la Région Rhône Alpes.
Questions abordées par l’étude 147
Les médias locaux et nationaux se sont largement fait l’écho au cours de l’été 2014 des dommages imputés au loup,
images violentes de brebis éventrées, de génisses dérochées, précipitées du haut d’une crête, peut-être effarouchées
par une attaque de loups.
En effet, depuis le retour officiel du loup en France en 1992, le travail des éleveurs semble remis en cause par la
prédation des loups ; d’abord dans le Sud-Est dans le parc du Mercantour où il est arrivé naturellement, puis dans tous
les territoires progressivement colonisés par le loup, préalablement investis par des troupeaux domestiques.
Les associations de protection de la nature de leur côté, ainsi que les citoyens dans leur ensemble, se réjouissent
du retour d’une belle espèce sauvage, emblème du retour à la nature, avec l’espoir que les effets de l’anthropocène
s’amenuisent. Ils réclament le respect du statut d’espèce strictement protégée dont bénéficie le loup.
La particularité nouvelle de la présence du loup en France réside dans la nécessité de maintenir sa population dans un
état de conservation favorable ; avant sa disparition vers les années 1930, des campagnes de destruction (notamment
avec les « primes à la queue ») étaient organisées, conduisant progressivement à leur éradication.
La Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement, où j’ai effectué mon stage en RhôneAlpes, est un service de l’État relevant de deux ministères de tutelle, le Ministère de l’Écologie, du Développement
Durable et de l’Énergie (MEDDE) et celui du Ministère du Logement et de l’Égalité des Territoires (MLET).
Le bureau dédié à la coordination technique inter-régionale du Plan d’action National Loup nous a commandé une
étude relative aux effets potentiels du stress sur la production laitière des brebis, dans l’objectif de modifier le barème
d’indemnisation des dommages occasionnés par les attaques de loup sur les troupeaux domestiques.
En effet, le secteur de l’élevage des petits ruminants reste fragile face à la bonne structuration des filières bovines,
en raison du marché mondial concurrentiel et de la nouvelle politique agricole commune dont les aides directes à la
production baissent progressivement. Par ailleurs, les territoires géographiques du loup s’étendent progressivement
hors des massifs montagneux, vers des secteurs où la filière ovine laitière jouit d’une production de qualité, souvent
labellisée, parfois valorisée par des exportations.
L’action de l’État se dessine ainsi autour de deux orientations, celle dictée par la Directive de protection des espèces
et des habitats148 , et celle de performance économique voulue notamment par l’exigence de développement durable.
Il s’agit de concilier les objectifs de préservation des ressources naturelles, dont la biodiversité, avec une économie
reposant sur des modes de production et de consommation durables, capables de nourrir une population de neuf
milliards d’habitants à l’horizon de 2050. Ainsi la loi de Modernisation de l’Agriculture (2010) pose comme objectif le
renforcement de la compétitivité de l’agriculture française et des exploitations agricoles, et le projet de loi d’Avenir149
pour l’ Agriculture, l’Alimentation et la Pèche soutient l’agro-écologie dans un contexte de performance économique
de l’agriculture française.
Cependant la cohabitation du loup et des activités humaines génère de nombreux conflits. L’État organise des espaces
de concertation pour faciliter l’élaboration d’actions acceptées par le plus grand nombre de parties prenantes ; ainsi le
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ce mémoire.
148
Directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de
la flore sauvage : http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/? uri=CELEX:31992L0043&from=FR
149
http://www.senat.fr/petite-loi-ameli/2013-2014/775.html
147
126
Groupe National Loup, formé en particulier des représentants de l’État, des éleveurs ou des associations de protection
de la nature, contribue au suivi et à l’adaptation des mesures du plan d’action national Loup.
La population de loups sur les zones de présence permanente où il s’est établi, ou lors des nouvelles colonisations, n’est
pas directement visible ; il demeure dans des habitats couverts, le plus souvent boisés. Sa présence est le plus souvent
révélée par les prédations qu’il effectue sur les troupeaux domestiques, et plus particulièrement sur les troupeaux ovins.
Le cheptel ovin français compte un total de 7,5 millions d’ovins, parmi lesquelles 5,5 millions de brebis et agnelles
saillies (28 % de brebis laitières). La filière laitière est beaucoup moins importante que la filière viande ; en 2010,
pour environ 50 000 structures allaitantes, la France comptait 5 000 structures laitières, avec une chute relative moins
importante par rapport à l’année 2000, respectivement de 43 % et 8 %. La filière laitière résiste mieux à la chute des
effectifs grâce à une valorisation des productions fromagères, surtout dans les bassins de production du Massif Central
et des Pyrénées Atlantiques. Les ressources fourragères proviennent essentiellement du pastoralisme, dont le rôle sur
l’environnement et l’économie locale est essentiel.
L’État accompagne les éleveurs dans la mise en place de mesures de protections contre le loup : aides pour l’installation
de bergers, de parcs dans les espaces pastoraux, ou l’utilisation de « patous », ces chiens de protections des troupeaux
; mais l’adaptabilité du prédateur et son organisation en meute peuvent venir à bout de ces précautions, voire engendrer
des attaques récurrentes sur les mêmes troupeaux dans les mêmes secteurs.
En 2013, les attaques des loups ont conduit à la prédation de six mille victimes animales environ, dont la majorité
d’ovins, réparties sur 23 départements, alors qu’il y en avait seulement un peu plus de quatre mille en 2010, sur
seulement 9 départements.
Le loup, carnivore opportuniste, qui en l’absence d’ongulés sauvages se contente de petites proies comme des
rongeurs, peut cependant s’attaquer à des animaux d’élevage domestiques plus faciles à capturer. En effet, les usages
pastoraux permettaient préalablement aux bergers de conduire les troupeaux en bas des estives, puis de les envoyer,
en lâchers dirigés, vers les hauteurs, sur des secteurs délimités par des particularités géographiques de terrain, sans
gardiennage permanent. Avec la progression du loup sur de nouveaux territoires géographiques, ce sont des bassins
de production laitières qui sont menacés.
L’État a décidé d’indemniser les victimes dès les premiers constats de dommages causés par le loup en 1993 dans le
département des Alpes Maritimes. Il s’agit d’une démarche volontaire de l’État, assumée financièrement par le ministère
chargé de l’écologie. Elle vise à aider les éleveurs subissant des préjudices par une espèce protégée contre laquelle ils
ne peuvent pas se défendre.
L’indemnisation est basée sur des barèmes nationaux datant de 2011150 . Ces indemnisations prennent en compte
les pertes directes (les animaux tués ou devant être euthanasiés, ou disparus car mis en fuite suite à l’attaque) ayant
fait l’objet d’un constat, et les pertes dites indirectes. L’indemnisation de ces pertes indirectes est sensée compenser
les baisses de production et autres effets indirects liés aux perturbations occasionnées par l’attaque sur le reste du
troupeau : mauvaise croissance des agneaux, perte en qualité bouchère, pertes laitières et éventuels autres effets
révélés par la mission technique que j’ai menée.
L’indemnisation des victimes est fondée sur le principe de la prise en compte des seuls dommages pour lesquels la
responsabilité du loup ne peut être écartée.
Les indemnisations au titre des pertes indirectes sont attribuées selon un forfait qui peut paraître aléatoire : par exemple
pour chaque animal, un montant de 80 centimes est prévu jusqu’à 300 animaux, uniquement pour les quatre premières
attaques, montant qui pourrait paraître peu adapté notamment dans le cadre de productions fromagères sous signe de
qualité. En effet, les barèmes actuellement utilisés ont été prévus pour les premiers troupeaux impactés, soit pour des
productions bouchères, pour lesquelles les barèmes n’ont jamais été remis en cause.
En anticipant les premières attaques de loups sur des troupeaux de forte valeur économique, pour l’indemnisation
desquels le barème actuel n’est pas adapté, le recueil de données sur les effets du stress sur la production laitière est
réalisé.
Une production laitière est optimale sur un animal bien nourri, dans des conditions d’élevage permettant un état de
bien-être constant. Les attaques du loup perturbent cet état de bien-être, aussi bien lors d’une seule attaque que lors
d’attaques répétées ; la commande qui m’a été faite est de rassembler des éléments scientifiques pour objectiver ces
pertes, en permettant de comprendre les phénomènes qui en sont à l’origine, notamment le phénomène de stress.
En particulier, les données bibliographiques utilisées nous ont permis d’identifier que :
- Des animaux peuvent avoir des perceptions différentes d’un même événement potentiellement menaçant, selon leur
expérience antérieure (mode d’élevage, attaque déjà vécue, etc).
- Les incidences sur les lots d’animaux dépendent de leur statut physiologique, gestation ou lactation, primipare ou
non, etc..
Circulaire du 27 juillet 2011 relative à l’indemnisation des dommages causés par le loup aux troupeaux domestiques du
ministère en charge de l’écologie et du développement durable.
150
127
- Le stress altère les interactions de l’individu avec son environnement. L’hyper-vigilance conduit à l’arrêt de l’activité en
cours au moindre signal d’alerte, et peut être à l’origine d’une baisse du comportement alimentaire. Ainsi les animaux
stressés sont sujets à une moindre consommation d’aliments, susceptible d’affecter leur production laitière.
- Le stress a des conséquences physiologiques, notamment hormonales et comportementales qui peuvent conduire
à la baisse de production lactée. La situation de stress conduit à la sécrétion de cortisol, hormone qui peut jouer sur
les processus de régulation du système endocrinien. Ainsi, après un stress aigu ou durant l’exposition à un stress
chronique, des éleveurs ovins assurent que leurs brebis avortent ou que les agneaux sont chétifs à la naissance.
- Les agneaux nés de brebis stressées par un prédateur lors du dernier tiers de leur gestation ont une réactivité
comportementale profondément modifiée, ce qui se traduit par un défaut de bien -être ; celui-ci peut conduire à une
baisse des niveaux de production chez les agneaux eux- mêmes.
L’étude bibliographique ne nous a permis de conclure que de façon partielle ; ce qui nous conduit à proposer d’autres
études expérimentales.
Le protocole vise à recueillir scientifiquement des données comportementales et biologiques sur des lots témoins
et testés après une période de stress ; à partir d’un modèle de stress aigu ou de stress chronique, dans l’objectif de
caractériser différents niveaux de dommage, selon la violence des attaques, leur nombre ou leurs espacements, le
stade physiologique de lactation ou l’âge des animaux.
Dans le but de répondre rapidement à une demande de revalorisation du barème, des propositions d’analyses globales
ont été faites, sur la base d’exploration de données historiques déjà enregistrées: des données de production sont à
comparer spatialement, entre territoires équivalents, avec ou sans présence du loup, ou historiquement, avant et après
l’arrivée du loup.
La mission technique que j’ai effectuée constitue une base susceptible de répondre au MEDDE lorsqu’il se tournera
vers la DREAL Rhône-Alpes pour étudier les possibilités de modifier les barèmes actuellement utilisés.
Néanmoins, le peu de données scientifiques trouvées sur les effets de la présence du loup sur les productions en
élevage reflète peut-être une faible programmation des recherches en ce domaine. Il nous semble ainsi, malgré la
volonté d’anticipation que constitue cette mission, que des expérimentations multiples doivent être menées à long
et à moyen termes, de façon régulière. Ainsi des micro-projets comme celui-ci pourraient trouver leur base dans des
projets plus larges, plus structurants, avec une caution scientifique solide basée sur un dispositif pluridisciplinaire. Ainsi
le programme DIVA (action publique, agriculture biodiversité), piloté par le service de la recherche du MEDDE, permet
de rassembler, sur un même projet choisi par le comité d’orientation, des gestionnaires, des équipes de chercheurs et
des décideurs.
Il serait ainsi intéressant de disposer d’éléments relatifs aux attaques de chiens errants, dont il semble actuellement que
peu de données soient répertoriées officiellement.
Par ailleurs, des récents outils législatifs, la Loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt , et l’arrêté ministériel
portant expérimentation pour la mise en œuvre de tir de prélèvement au cours de battues par les chasseurs151 , ont pour
effet de faciliter les interventions de prélèvement sur les loups ; se pose la question de la cohérence de l’action française
avec les mesures de protections adoptées vis-à-vis des grands prédateurs sur le territoire européen. La Commission
européenne qui a lancé en juin 2014 une nouvelle plate-forme européenne sur les grands carnivores, veut ainsi créer
un espace de concertation entre les différentes parties prenantes pour faciliter la coexistence pacifique entre l’homme
et les grands carnivores.
Biocides utilisés pour la désinfection après un épisode de
danger sanitaire
Amal BOUTALEB, Inspectrice Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission effectuée du 14 avril 2014 au 25 juillet 2014 à la DGAl, sous la responsabilité de Caroline CORNUAU et Olivier
DEBAERE.
Arrêté du 5 août 2014 portant expérimentation pour la mise en œuvre de tirs de prélèvement de loups au sens de l’arrêté
du 15 mai 2013 fixant les conditions et limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être
accordées par les préfets concernant le loup (Canis lupus).
151
128
Questions abordées par l’étude 152
Depuis le 1er septembre 2013, le règlement communautaire (UE), n° 528/2012 du parlement européen et du conseil du
22 mai 2012 concernant la mise à disposition sur le marché et l’utilisation des produits biocides, est entré en application.
Ce règlement s’applique à tous les produits biocides, aux articles et matériaux traités avec ces produits.
Sous l’appellation de « produits biocides », on regroupe divers produits destinés à détruire, à reposer, ou à rendre
inoffensifs les organismes nuisibles, à en prévenir l’action ou à les combattre par une action chimique ou biologique.
Les biocides sont classés en vingt-trois types de produits regroupés en quatre grands groupes que sont les désinfectants,
les produits de protection, les produits de lutte contre les nuisibles et les autres produits tels que les produits antisalissures et les fluides de taxidermie.
La réglementation européenne « biocides » harmonise les pratiques entre tous les Etats Membres et impose l’obtention
d’autorisation de mise sur le marché de ces produits. Elle donne par la même occasion, la possibilité d’obtenir une
autorisation de mise sur le marché de l’Union évitant ainsi la répétitivité des procédures aux industriels.
La mise en application de cette réglementation s’articule en deux étapes consécutives :
1- un processus d’évaluation des substances actives au niveau européen qui aboutit si la substance répond aux critères
à un règlement d’approbation au niveau communautaire, ou dans le cas contraire à une décision de non-approbation.
2- l’évaluation des produits biocides au niveau national donnant lieu à la délivrance ou non d’une autorisation de mise
sur le marché (AMM).
En France, l’autorité compétente désignée pour prendre en charge la gestion de ces dossiers est le Ministère chargé de
l’Environnement conformément à l’article L.522-2-1 du code de l’environnement.
Les conséquences de ces évaluations sont, soit l’obtention de l’AMM pour un produit biocide dans un délai de deux
ans suite à la date d’approbation de la dernière substance active soit pour les produits déjà sur le marché, le retrait de
la vente du produit dans un délai de 180 jours après la décision de non approbation.
Cependant, pendant la période transitoire [période durant laquelle les substances actives notifiées au programme
d’examen européen sont dans l’attente d’évaluation], (prévue initialement jusqu’en 2008 puis reportée plusieurs
fois jusqu’en 2024), la France a souhaité maintenir les anciens régimes d’autorisation pour les produits les plus
dangereux153 , notamment les désinfectants et les insecticides. Les autres produits déjà sur le marché étant quant à
eux, temporairement dispensés d’autorisations préalables.
Parmi les régimes maintenus, figurent notamment pour les produits de type 3 : « biocides destinés à l’hygiène
vétérinaire », l’obligation d’une AMM transitoire délivrée par le Ministère en charge de l’environnement sur avis de
l’ANSES et l’agrément au titre de l’arrêté du 28 février 1957 relatifs aux désinfectants utilisés lors de foyers de maladies
réglementées.
C’est dans le cadre de cet arrêté de 1957 que la présente étude est menée.
En effet, l’arrêté du 28 février 1957 relatif à la désinfection dans le cas de maladies contagieuses des animaux, toujours
en vigueur, mentionne une liste de substances actives biocides pouvant être utilisées contre «les maladies contagieuses
du bétail soumises à déclaration obligatoire ou contre celles qui font l’objet d’une prophylaxie collective organisée par
l’Etat » et impose l’agrément pour les autres produits de désinfection.
Mais, parmi les substances actives mentionnées, certaines sont désormais interdites par la réglementation européenne
:
- la solution d’hypochlorite de potassium, - le lait de chaux, - la solution de soude caustique (hydroxyde de sodium), - la solution de phénol - et la solution de crésyol sodique.
Par ailleurs, pour bénéficier de l’agrément des produits de désinfection, les fabricants s’appuyaient sur des normes
françaises pour tester l’efficacité de leurs produits et le Ministère en charge de l’agriculture (DGAL-BISPE) délivrait
l’agrément après une évaluation réalisée par l’AFSSA (laboratoire de Fougères) sur chaque dossier, et ceci conformément
à l’instruction ministérielle du 08 avril 1987154 .
Les normes françaises utilisées à l’époque et recommandées dans cette instruction pour l’attribution de l’agrément ont
aujourd’hui évolué ; certaines ont été supprimées, d’autres remplacées et de nouvelles ont été créées. Actuellement,
la norme européenne NF EN 14885 « relative aux antiseptiques et désinfectants chimiques » est reconnue au niveau
international comme norme de référence. Elle définit notamment dans le «domaine vétérinaire», les différentes normes
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
153
Listés à l’article 13 de la loi n° 2013-619 du 16 juillet 2013 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union
européenne dans le domaine du développement durable.
154
Agrément des désinfectants utilisables en cas de maladies légalement contagieuses et dans le cadre des programmes de
prophylaxie subventionnés.
152
129
auxquelles un produit désinfectant doit répondre pour pouvoir revendiquer une activité microbicide (Bactéricide,
Levuricide, Fongicide, Mycobactéricide, Virucide). Cette norme est également utilisée dans le cadre de l’attribution
actuelle de l’AMMt ou l’AMM nationales.
Enfin, l’arrêté du 28 février 1957, susmentionné, fait également référence dans ses articles 1 et 2 à une commission pour
l’agrément des produits de désinfection. Cette commission n’est plus active depuis plusieurs années.
Au vu de l’évolution réglementaire et normative au niveau national et européen mais également compte tenu des
changements dans l’organisation administrative, il apparaît opportun de confronter les dispositions relatives à l’attribution
des AMM et celles de l’attribution des agréments au titre de l’arrêté de 1957 et de proposer des modifications à cet
arrêté.
Propositions d’actions :
I. Conservation de l’agrément dans l’attente de la réponse de l’ANSES :
Afin de savoir si les conditions d’essai obligatoires et les exigences mentionnées dans les normes actuelles pour chaque
activité d’un produit, sont suffisantes pour couvrir l’ensemble des dangers sanitaires de 1ère et 2ème catégorie155 et
donc peuvent être utilisés pour remplacer l’agrément au titre de l’arrêté du 28 février 1957, un projet de demande
d’appui scientifique et technique à l’ANSES relatif à l’évaluation de l’efficacité des produits biocides destinés à être
utilisés pour la désinfection lors de dangers sanitaires a été rédigé.[Cf. Annexe 8 du mémoire]
- La réponse nous permettrait de savoir d’une part, si nous devons maintenir l’agrément ou pas et d’autre part, si
l’agrément doit être maintenu, les conditions additionnelles à prescrire aux fabricants qui permettraient de couvrir
l’ensemble de ces dangers sanitaires de 1ère et de 2ème catégorie.
II. Mise à jour des dossiers et procédures et d’agrément :
Il nous parait nécessaire que chaque fabricant remette le dossier d’agrément de chaque produit à jour pour plusieurs
raisons :
- Les agréments délivrés au titre de l’arrêté du 28 février 1957 ne prévoyaient aucune limitation de durée et de ce fait,
les dossiers n’ont jamais été réévalués.
- Les agréments au titre de l’arrêté sont conditionnés à l’obtention de l’AMMt ou l’AMM. En effet, tous les produits désinfectants agréés, conformément à l’arrêté du 28 février 1957 encore commercialisés,
possèdent d’autres usages TP3 que l’usage: «désinfectants utilisés contre les maladies contagieuses du bétail
soumises à déclaration obligatoire ou contre celles qui font l’objet d’une prophylaxie collective organisée par l’Etat ».
Par conséquent, tous ces produits doivent bénéficier au préalable d’une AMMt ou AMM. - L’évolution des normes doivent être prises en compte pour le maintien de l’agrément. Dans ce cadre, différents échanges ont été réalisés avec les personnes responsables de la gestion du dossier « Biocide
» (MEEDE et ANSES). Ces échanges ont permis de dégager un accord sur la mise en place des modalités de gestion
et d’évaluation des dossiers ainsi que les circuits de dépôt des dossiers. Ainsi, une note à l’attention des fabricants de produits de désinfection a été rédigée et suggérée. Elle résume les
différentes évolutions réglementaires et normatives ainsi que les modalités de mise à jour mais aussi d’obtention d’un
nouvel agrément au titre de l’arrêté du 28 février 1957. [Annexe 10 du mémoire]
- Cependant reste à définir avec la direction de l’Anses les modalités de traitements de ces dossiers : charge de travail
en fonction du nombre de dossiers et de leur ancienneté, et le cas échéant si des moyens doivent être alloués à l’Anses
pour la gestion de ce dossier.
Dans l’attente, un inventaire avec un enrichissement des informations parcellaires qui étaient disponibles dans
l’ancienne liste des désinfectants agréés datant de 2006 ont été réalisés. Les différentes informations récoltées ont été
synthétisées dans un tableau qui permettra de disposer d’une liste exhaustive et mise à jour des produits désinfectants
agréés avec notamment les normes utilisées pour l’évaluation de chaque activité (bactéricide, fongicide, levuricide,
mycobactéricide et virucide). [Annexe 8 du mémoire]. Ces informations pourront en partie être publiées sur le site du
ministère en charge de l’agriculture pour une accessibilité plus aisée aux structures départementales en cas de besoin.
III. Modification de l’arrêté de 1957 :
Au vu de ce qui a été présenté précédemment (certaines substances actives interdites, commission d’agrément
supprimée, évolution des normes des désinfectants...), il apparaît donc indispensable de modifier certaines dispositions
devenues obsolètes de cet arrêté ministériel et de les adapter aux différentes évolutions réglementaires.
Une proposition d’un arrêté modificatif de l’arrêté du 28 février 1957 a été rédigée et proposée. [Annexe 11].
IV. Pour l’avenir :
Arrêté du 29 juillet 2013 relatif à la définition des dangers sanitaires de première et deuxième catégorie pour les espèces
animales.
155
130
Il est également proposé, la révision complète voire l’abrogation du texte, suite à l’avis de l’Anses et les conclusions
des travaux de normalisation qui sont en cours à l’AFNOR concernant les procédures de décontamination d’un élevage
après un épisode infectieux.
L’inspection en pharmacie vétérinaire dans le Finistère : un
exemple de relations inspecteurs – inspectés.
Cécile ADAM, Inspectrice Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 14 avril 2014 au 25 juillet 2014, à la DDPP du Finistère, antenne de Brest sous la responsabilité de
Loïc Gouyet, adjoint au service PSSAV.
Questions abordées par l’étude 156
Le stage a consisté en une mission d’appui à la démarche professionnelle de progrès en matière d’application de
la réglementation relative à la pharmacie vétérinaire dans les domiciles d’exercice professionnel dans le Finistère. Il
s’est inscrit dans la continuité d’une démarche initiée par la DDPP157 du Finistère en janvier 2013. Nous l’appellerons
par la suite la « démarche 29 » ou encore « la démarche ». La démarche débute en réponse à une sollicitation de
l’administration locale par les représentants des professionnels au sujet d’un projet de demande d’agrément pharmacie
d’un groupement auquel ils sont opposés. La DDPP objecte aux vétérinaires qu’ils n’ont jamais été inspectés, et
qu’il apparaît qu’ils appliquent la réglementation en pharmacie vétérinaire de manière hétérogène. La DDPP accepte
d’étudier les arguments des vétérinaires contre l’agrément pharmacie du groupement, mais négocie avec les
représentants des professionnels la mise en route d’un programme d’inspections. L’objectif de ces inspections est de
stimuler l’amélioration des pratiques des vétérinaires. Pour cela, DDPP et représentants des professionnels conçoivent
conjointement une démarche basée sur :
- un nombre suffisant d’inspections pour obtenir une vision représentative des pratiques des vétérinaires finistériens ; - des inspections non suivies de sanctions158 sauf fraude ou risque pour la santé animale ou publique ; - une communication autour de la démarche pour sensibiliser les vétérinaires qui n’ont pas été inspectés. Une vingtaine
d’inspections ont été conduites, et des points d’étape régulièrement faits à l’intention des vétérinaires. Des formations
sur la réglementation en pharmacie vétérinaire ont été organisées par les représentants des professionnels. Un an après
le début de la démarche se pose alors la question de la suite à lui donner. Le stage a donc constitué un appui à cette
réflexion. Les objectifs du stage étaient techniques et analytiques. Les objectifs techniques étaient les suivants : - rechercher des solutions techniques visant à faciliter l’application de la réglementation par les vétérinaires, comme
des logiciels clients adaptés, des douchettes, etc. - développer une grille d’audit permettant aux vétérinaires de s’entre-auditer ; - fournir des éléments de réponse aux questions des vétérinaires sur les domaines de la réglementation posant des
difficultés, en particulier la mise en œuvre pratique du suivi sanitaire permanent.
Les objectifs analytiques ont visé à :
- comprendre la situation locale ; - recueillir la perception des inspectés sur le déroulement de l’inspection ; - recueillir la perception des vétérinaires et des inspecteurs sur la démarche finistérienne ; - proposer des actions à mener pour pérenniser la démarche. Le stage a demandé la prise en compte d’enjeux
multiples. D’un point de vue général, il convient de dire que la pharmacie vétérinaire est un sujet politiquement tendu,
largement héritier de l’histoire de la pharmacie vétérinaire. Nous proposons dans notre mémoire une analyse de l’histoire
ayant abouti au positionnement actuel des enjeux159 . Nous rappellerons ici brièvement les enjeux actuels.
L’enjeu principal est celui de la santé publique : antibiorésistance, résidus dans l’environnement et dans les DAOA,
santé animale et qualité des DAOA. Pour la DDPP, tout l’enjeu est politique et diplomatique. Comment parvenir à
mener des inspections chez des ayants droit qui n’ont jamais été inspectés, et avec qui elle entretient par ailleurs des
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
157
Direction départementale de la protection des populations.
158
Traduits par la profession vétérinaire en « inspections pédagogiques ».
159
Voir partie I : 1762-2014 : aperçu historique de la réglementation en pharmacie vétérinaire, p.8.
156
131
relations de « dépendance » dans le cadre de l’organisation de la défense sanitaire départementale ? L’enjeu pour la
DDPP était de ne pas rompre la discussion avec les vétérinaires. Rappelons que les vétérinaires utilisent leur mandat
sanitaire comme une arme de négociation, et qu’ils ont menacé la DDPP 29 de lui rendre leur mandat sanitaire. Le stage
a permis de faciliter les discussions entre administration et vétérinaires, en s’appuyant sur notre statut intermédiaire
entre le vétérinaire et l’agent administratif. Le stage a par ailleurs permis à la DDPP de « déléguer » l’émission de
conseils aux administrés, puisque les services d’inspection ne peuvent délivrer du conseil aux inspectés. Du côté des
vétérinaires, l’enjeu est économique : ils sont dépendants de la vente du médicament vétérinaire pour assurer la viabilité
économique de leur activité. Ils se placent donc stratégiquement en opposition aux autres ayants droit (pharmaciens,
groupements) dont ils contestent la légitimité.
Méthode retenue
Lors de la première étape, nous avons pris connaissance de la réglementation en pharmacie vétérinaire160 . Nous avons
également étudié un corpus de documents : articles de presse, lettres de représentants de professionnels, comptes
rendus de réunion, mails échangés entre l’administration et les administrés, et entre agents de l’administration.
Nous avons ensuite pris contact avec les professionnels. En premier lieu nous nous sommes rapprochée des
représentants des professionnels (GTV 29) afin de planifier une réunion et pour les suivre sur le terrain. Puis nous avons
contacté d’autres représentants (SNVEL, Ordre), ainsi que les vétérinaires inspectés. Des acteurs identifiés comme clefs
au cours de la phase d’étude réglementaire ont également été contactés (SNGTV). Enfin, nous avons contacté des
inspecteurs chargés d’inspection en pharmacie vétérinaire d’autres départements.
En tout, près de 25 professionnels ont été contactés par mail ou par téléphone. Nous avons suivi deux vétérinaires ruraux
sur le terrain pendant trois jours, au cours desquels observation participante et entretiens ont permis de comprendre
les difficultés pratiques des vétérinaires. Nous avons réalisé 21 entretiens avec les professionnels : onze entretiens semi
directifs en face à face et dix entretiens téléphoniques. Des vétérinaires, des inspecteurs vétérinaires, un agent de la
DGAL, un pharmacien inspecteur, un responsable assurance qualité ont été rencontrés. Nous avons observé quatre
inspections de domiciles d’exercice professionnel vétérinaires, conduites par deux inspecteurs différents. Nous avons
réalisé un audit chez un vétérinaire canin volontaire. Nous avons assisté à une commission régionale de la pharmacie
vétérinaire. Nous avons animé deux réunions avec trois vétérinaires du GTV et un inspecteur. Nous avons rédigé des
courriers de réponse aux vétérinaires, ainsi que des courriers de point d’étape de la démarche. Les observations ont
fait l’objet de prises de notes dans des carnets de terrain, et les entretiens sociologiques ont été conduits et traités
conformément à la méthodologie sociologique161 .
Pour connaître les outils techniques pouvant aider les vétérinaires à mieux appliquer la réglementation en pharmacie
vétérinaire, nous avons contacté des fournisseurs de logiciels (démonstration en ligne), ainsi qu’une centrale d’achat
vétérinaire. Nous avons également contacté une centrale d’achat de pharmacie d’officine et des assureurs afin de
connaître les exigences en termes de sécurisation des stupéfiants pour les pharmaciens d’officine. Des échanges de
mail avec l’ANMV et l’ANSM ont permis d’obtenir des réponses sur des questions réglementaires précises (emballage
et étiquetage du médicament vétérinaire, exigences de l’AMM, incohérences entre les mentions du site de l’ANMV
et l’emballage, déclarations de vol de stupéfiants, etc.).
Nous avons présenté nos conclusions aux vétérinaires du
Finistère et à leurs représentants au cours d’une réunion lors de la dernière semaine de notre stage.
Résultats
L’objectif initial de notre stage était de trouver des outils pour aider les vétérinaires. Nous avons pu mettre en évidence
que de nombreuses solutions techniques existaient déjà à la disposition des vétérinaires. Certains logiciels sont
spécifiquement conçus pour permettre entre autre l’enregistrement du bilan sanitaire et du protocole de soins, sa
consultation et sa modification. Notons que certains praticiens « aménagent » eux-mêmes les applications du logiciel
pour arriver à cet usage. De même, des douchettes sont commercialisées par les centrales d’achat pour permettre
l’enregistrement des numéros de lot lors de la sortie de stock, mais aussi des douchettes pour faire des inventaires.
Enfin, les centrales d’achat proposent des bons de livraison électroniques permettant d’intégrer les numéros de lot et
dates de péremption au logiciel.
Les obstacles rencontrés par les vétérinaires sont les suivants :
- coût du logiciel ; - temps de prise en main du logiciel ; - réticence à l’informatisation ; - divergences managériales entre associés de la structure ; - difficulté d’uniformiser les pratiques de tous les vétérinaires de la structure ; Nous avons utilisé en particulier Pouliquen H., Vandaële E., Vademecum de législation en pharmacie vétérinaire, Editions
du Point Vétérinaire, 2012.
161
Beaud S., Weber F., Guide de l’enquête de terrain. Edition La découverte. Quatrième édition. 2010. 334 p.
3.
160
132
- problèmes de compatibilité entre logiciels et bons de livraison, entre logiciels et douchettes ; - coût de mise en place des douchettes (en temps et en argent).
Nous n’avons pas développé de grille d’audit contrairement à ce qu’il avait initialement été prévu, car un système
d’audit existe déjà, et a été développé en 2003 par le SNGTV. Il s’agit du guide de bonnes pratiques de gestion du
médicament dans les cabinets vétérinaires de la SNGTV. Il apparaît que le guide, très exhaustif et allant au-delà de la
réglementation, est d’un abord compliqué pour les vétérinaires, qui ne savent pas par quoi commencer. Nous avons
réalisé notre « audit-test » sans utiliser de grille, mais en se basant sur nos connaissances de la réglementation, et en
nous aidant du vademecum pour vérifier que nous avions observé les éléments principaux. Nous avons constaté un
certain rejet du formel et de l’administratif par les vétérinaires, aussi avons-nous préféré opter pour un audit informel.
L’audit a duré quatre heures, et avec la rédaction du rapport, nous a occupée une journée et demi en tout. Le vétérinaire
a été satisfait par l’audit, qui lui a apporté un regard extérieur sur sa clinique.
Nos recherches sur la manière de sécuriser le stock de stupéfiants – que nous avons étendu par esprit pratique à
tous les médicaments que nous pourrions qualifier de « dangereux162 » - ont abouti à la conclusion que la meilleure
manière de sécuriser l’ensemble de la clinique est de mettre une alarme. En effet, la loi exige une « armoire sécurisée
». Les simples armoires vitrées fermées à clef ne présentent pas une sécurisation suffisante. Les coffres arrimés au sol
peuvent être arrachés. C’est pourquoi nous avons abouti à la conclusion qu’il est plus pertinent de jouer sur l’apparence
du coffre et sur sa localisation (éviter les coffres blancs marqués d’une croix médicale et placés en évidence dans un
couloir).
Les vétérinaires, lors des entretiens, ou leurs représentants, nous avaient transmis des questions précises163 . Ces
questions requièrent indirectement une interprétation de la loi que nous ne pouvions apporter. Nous avons apporté des
éléments de réponse afin d’aider les vétérinaires à se rapprocher de ce que nous pourrions qualifier « d’esprit de la loi
». En effet, nous sommes partie du constat que, pour un certain nombre de pratiques, les vétérinaires vont se mettre
en irrégularité. Afin de pouvoir justifier le choix de se mettre sciemment en non-conformité, nous leur proposons de
réaliser dans chacune de ces situations une analyse de risque, et d’en garder des preuves. L’inspecteur sera tenu de
relever la non-conformité, mais en cas de procédure judiciaire, l’organe juridique pourrait décider de ne pas poursuivre
le vétérinaire sur la base de tels éléments.
Nos échanges avec l’ANMV nous ont permis d’obtenir des réponses rapides. Seule une question est restée sans
réponse, nous avions pourtant interrogé l’ANMV et le laboratoire commercialisant le produit164 . Cela souligne toute
la difficulté technique du médicament vétérinaire : il n’existe aucune autorité supérieure omnisciente en matière de
médicament vétérinaire.
Un vétérinaire nous a par ailleurs contactée afin de déclarer un vol de kétamine. Nous avons
pu constater la difficulté de faire une telle déclaration en pratique, et nous en avons fait part à l’ANSM. L’ANSM nous
a communiqué les chiffres de déclaration de vols qui confirment l’importante sous déclaration, voire non déclaration,
des vols.
Nos entretiens avec les vétérinaires nous ont permis de dégager des éléments de compréhension de leur perception de
la réglementation et des inspections. L’inspection est grandement compliquée par le fait que des relations préalables
existent entre l’inspecteur et les vétérinaires dans le cadre du mandat sanitaire. Ces relations se font de manière
informelle et d’égal à égal. L’interlocuteur de la DDPP se transforme pendant l’inspection en inspecteur qui sanctionne.
Par ailleurs, vétérinaires et inspecteurs n’ont pas la même culture. L’inspecteur amène lors de l’inspection sa culture
administrative basée sur l’assurance qualité et l’enregistrement de preuves. La culture vétérinaire est orale et centrée
sur le soin de l’animal. Par ailleurs, les vétérinaires n’ont jamais été inspectés : la culture administrative de l’inspection
leur est tout à fait étrangère. Ce décalage culturel entraîne l’incompréhension de la part des vétérinaires, voire parfois
des quiproquos. Ensuite, nous avons constaté que la légitimité de la loi est contestée par les vétérinaires. Or, la loi donne
leur légitimité aux inspecteurs, et ils sont dépendants de ce qui constitue le seul outil mobilisable durant l’inspection. Il
est alors compliqué pour les inspecteurs de s’imposer sur la base d’une règle décrédibilisée par les vétérinaires.
Les vétérinaires rejettent l’inspection dans un premier temps, dans la mesure où elle semble réservée aux fraudeurs
et autres « affairistes ». Mais nous avons constaté que passée cette première phase de crainte et d’incompréhension,
ils rejettent surtout la forme de l’inspection. Ils attendent de l’inspection qu’elle soit un bilan de leurs pratiques, afin
de progresser. Les vétérinaires attendent en fait un audit. Sur les dix vétérinaires inspectés avec qui nous avons pu
discuter, la plupart ont jugé la démarche positive. Ils ont apprécié le fait que les inspections soient « pédagogiques165 »
et qu’un échange soit possible avec l’inspecteur.
La démarche 29 semble pleinement avoir atteint son objectif de dynamisation des discussions. Les vétérinaires parlent
beaucoup de pharmacie vétérinaire entre eux, et cherchent des solutions. Ils commencent donc à s’acculturer à
l’inspection. Une trentaine de vétérinaires sont venus assister à notre présentation, ce qui atteste de leur intérêt pour la
question166 . Nous avons pu observer lors de notre présentation le dynamisme du débat des vétérinaires entre eux, qui
aboutissent ainsi à des pistes de réflexion. La DDPP a réussi à animer le débat sur un sujet délicat.
Nous considérons comme dangereux les produits stupéfiants, assimilés stupéfiants (kétamine, tilétamine), et euthanasiques. Nous proposons aux vétérinaires de gérer ces produits « au flacon », et de les stocker ensemble. Ceci constitue un
écart à la réglementation, qui demande de stocker séparément stupéfiants, produits sur liste I et produits liste II. Par ailleurs,
les stupéfiants doivent faire l’objet d’un registre à l’usage (noter chaque unité utilisée). 163
L’ensemble des questions posées par les vétérinaires sont regroupées dans un document qui a été distribué aux praticiens. Présenté sous forme de questions-réponses, ce rapport figure à l’annexe 4 de notre mémoire (page 134).
164
Il s’agit du Flectron, dont l’emballage stipule qu’il doit faire l’objet d’une prescription. Le site de l’ANMV (http://www.ircp.
anmv.anses.fr/) apporte l’information inverse.
165
Annoncées sans sanctions, les inspections ont été qualifiées de pédagogiques par les vétérinaires, à la faveur d’un quiproquo.
166
Nous avions pour cela soigné la communication : envoi d’un courrier, puis d’un mail.
162
133
Discussion.
Notre statut intermédiaire entre le vétérinaire et l’inspecteur a constitué un avantage pour aller à la rencontre des
professionnels, même si nous pouvons anticiper que certains vétérinaires ont fait preuve de réserve.
Une des limites de notre travail d’interprétation de la démarche réside dans les interlocuteurs rencontrés, qui étaient
déjà tous investis et engagés. Il s’agit donc d’un biais. Sur les vingt vétérinaires inspectés, dix nous ont répondu :
nous n’avons pu recueillir les commentaires de tous les inspectés. De la même manière, l’audit a été réalisé chez un
vétérinaire qui avait déjà bien avancé dans sa démarche d’amélioration. Il est légitime de penser que, chez un praticien
n’ayant rien mis en place, l’audit prenne plus que quatre heures. Il aurait été intéressant de pouvoir procéder à d’autres
audits, chez des praticiens au profil différent.
Il aurait été indiqué, si nous avions disposé de plus de temps, de chercher
à chiffrer le temps de prise en main de chaque logiciel.
La formulation d’éléments de réponse aux vétérinaires est un exercice délicat, dans la mesure où il s’apparente à du
conseil. Nous avons pris soin, à chaque « question-réponse », de rappeler les articles de loi. Nous avons également
insisté sur le fait que toute non-conformité doit faire l’objet d’un relevé par l’inspecteur, quand bien même le vétérinaire
a procédé à l’analyse de risque conseillée.
Enfin nous avons conscience du fait que seuls les vétérinaires peuvent se motiver et se décider au final à procéder aux
améliorations.
Propositions.
Tout d’abord il nous paraît primordial de poursuivre la démarche initiée. C’est en discutant ainsi que les vétérinaires
peuvent trouver comment améliorer leurs pratiques. Le dialogue avec l’administration permet également de faire
remonter certaines difficultés, et permet à l’administration de se tenir informée des pratiques. Il pourrait être intéressant
de présenter la démarche à d’autres départements, afin d’étendre la dynamique sur la question.
Nous pensons que les vétérinaires préférant la communication orale et informelle, la mise en place d’audits par la
profession est une piste à suivre. Il convient pour cela de fixer un coût pour ces audits, ainsi que de déterminer quels
vétérinaires pourraient les pratiquer. De la même manière, nous suggérons la mise en place de réunions semestrielles
entre les vétérinaires, qui pourraient échanger entre eux sur leurs pratiques.
Nous avons émis des propositions à l’intention des professionnels comme se rapprocher des fournisseurs de logiciels,
des centrales d’achat, mais aussi des laboratoires pour demander des modifications dans le sens de leurs pratiques,
mise sous alarme de la clinique, gestion en temps réel de leur stock, etc. Un test va être conduit auprès des laboratoires
pour connaître la conduite à tenir en cas de panne du réfrigérateur (faut-il jeter les médicaments réfrigérés ou avancer
leur date de péremption ?).
Ce travail a par ailleurs permis de mettre en évidence l’écueil du conseil, toujours demandé par les inspectés, mais que
l’inspecteur ne peut dispenser. Il appartient à la profession de mettre en place une structure ou un outil permettant aux
vétérinaires qui le souhaitent de recevoir du conseil, comme par exemple la mise en place d’audits que nous avons
évoquée. Nous pensons que l’administration a un rôle à jouer en tant qu’initiateur de la dynamique – comme le montre
l’exemple du Finistère -, puis à moyen et long termes en tant qu’animateur et partenaire d’entretien de la démarche.
L’initiative 29 prouve à nouveau que la communication et la négociation permettent de faire évoluer une situation, quand
bien même elle présente une certaine inertie étant donné les enjeux.
Enfin la démarche 29 met en lumière la difficulté pour un inspecteur d’inspecter des professionnels avec qui il entretient
des relations professionnelles dans le cadre du mandat sanitaire. La mutualisation de l’inspection en région semble
résoudre cette difficulté. Une réflexion pourrait être menée afin d’envisager la possibilité de confier l’inspection à un
inspecteur non chargé d’organiser le mandat sanitaire. Il pourrait être fait appel à une structure indépendante qui serait
chargée des inspections.
La lutte contre le gaspillage alimentaire en restauration collective
dans la région Nord-Pas-de-Calais. Initiation de la démarche
dans les EPLEFPA de la région
Anouck MIRO, Inspectrice Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
134
Cadre de réalisation
Mission effectuée du 14 mai au 25 juillet 2014 à la DRAAF Nord-Pas-de-Calais au service régional de l’alimentation
(SRAL), sous la responsabilité d’Emilie HENNEBOIS, chef de SRAL
Questions abordées par l’étude 167
Le gaspillage alimentaire est un sujet récurrent dans l’actualité. A toutes les échelles, les pouvoirs publics, les collectivités
territoriales, les acteurs du privé et la société civile se sont emparés du sujet et se mobilisent pour agir contre ce
paradoxe d’un gaspillage alimentaire important face à une insécurité alimentaire grandissante.
La thématique du gaspillage alimentaire fait partie des priorités de la politique publique de l’alimentation, réorientée
pour 2013-2017 sur trois grands axes dans le Plan National pour l’Alimentation (PNA): l’éducation des jeunes, la justice
sociale et la territorialisation de l’alimentation. La signature du pacte national de lutte contre le gaspillage alimentaire en
2013 est la concrétisation de l’engagement des pouvoirs publics sur cette thématique. Dans ce contexte national, la
Direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DRAAF) est chargée de piloter en région les actions
dans le domaine de l’alimentation, et doit être moteur pour initier les actions de lutte contre le gaspillage alimentaire, en
respectant les priorités affichées par le ministère.
En France, 4 milliards de repas sont servis en restauration collective (chiffres de 2010) et 12 millions dans la région
du Nord-Pas-de-Calais (NPdC). Identifié comme un gisement important de déchets alimentaires, le secteur de la
restauration scolaire offre des marges de progrès importantes. Le Conseil régional a également lancé une opération de
consultation publique sur l’alimentation et le gaspillage alimentaire est l’un des thèmes abordés.
Diverses possibilités se présentaient pour l’orientation de l’étude: gaspillage en milieu hospitalier, en restauration
scolaire, gaspillage et dons alimentaires.....Le choix de travailler avec les lycées d’enseignements publics agricoles se
justifie puisque les trois enjeux prioritaires du PNA s’y rejoignent. De plus, le SRFD travaille avec les établissements
publics d’enseignement agricole et a déjà engagé une démarche sur l’approvisionnement des restaurants scolaires par
les produits issus des exploitations agricoles des établissements.
L’objectif était de dégager, à partir des nombreux documents disponibles, les points essentiels pour la mise en place de
la démarche de la lutte contre le gaspillage alimentaire dans un établissement scolaire. L’idée était de se détacher de
l’effet d’affichage et de mettre en place des actions durables et efficaces sur le long terme.
Le déroulement de la mission
Deux lycées ont été choisis : ce sont ceux qui ont organisés les repas dans le cadre de la démarche de développement
de l’approvisionnement des restaurants des lycées agricoles par les produits issus des exploitations agricoles des
établissements.
Les premiers contacts ont été pris avec les équipes de direction, de cuisine et de la vie scolaire : directeur d’établissement,
directeur d’exploitation, gestionnaire, chef de cuisine, CPE. Des questionnaires et une fiche de pesée ont été proposés.
Malheureusement, la période n’était pas propice à un investissement important des différentes équipes sur cette
thématique.
Toutefois, toutes les rencontres, les difficultés et les données récoltées permettent de faire quelques préconisations afin
de faciliter la future mise en place de la démarche.
Les préconisations
L’aspect économique : l’argument à privilégier
- Pour les équipes de direction, l’intérêt est évident : le budget de fonctionnement est alloué chaque année par le Conseil
Régional, les établissements en disposent librement (dans la limite du contrôle financier). Les marges de progrès et les
montants dégagés peuvent prendre des proportions assez importantes. De plus, l’image des établissements publics
d’enseignement agricole dans la région semble souffrir de la concurrence des établissements privés ; la question de la
qualité de la restauration et l’impact positif de l’affichage d’une démarche de lutte contre le gaspillage peuvent être des
atouts pour l’enseignement public. - Pour les convives, les économies réalisées peuvent permettre différentes améliorations de la restauration : décoration
de la salle de restaurant, achat de produits de meilleure qualité, achats de matériel, organisation de repas à thèmes... - Pour les équipes de cuisine : après un cap à passer qui est celui de changer les méthodes de travail, le plaisir à
travailler des produits différents (qui sont plus chers) et de voir les quantités de déchets réduites semblent semble être
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
167
135
un argument efficace, pour une partie au moins des agents.
Le travail en inter-service au sein de la DRAAF
En interne cette collaboration a comme intérêt : - De clarifier les missions de chacun et d’améliorer la communication entre les services. - Dans un contexte d’effectif
restreint, de profiter de l’expérience de chacun (pour ne pas perdre du temps en recherche d’information par exemple).
- De combiner les deux démarches : approvisionnement en produits issus des exploitations des lycées agricoles et
lutte contre le gaspillage alimentaire. Cette cohérence serait un modèle pour les établissements ciblés. Cela permettrait
également de mobiliser différents leviers que chacune des démarches peut fournir à l’autre. Vis-à-vis des acteurs externes, il faudrait :
- Clarifier les missions de chaque service. - Leur permettre d’identifier un contact privilégié pour les questions qui concernent la restauration scolaire. - Améliorer l’image de la DRAAF : le SRFD, perçu comme l’autorité académique et le SRAL, comme un service de
contrôle ou de financement par le biais des appels à projets, devraient pouvoir être identifiés comme des services
d’appui et de conseil.
La collaboration avec le Conseil régional
Le Conseil Régional dote les établissements de leur budget de fonctionnement, est responsable de l’entretien des
locaux et de l’achat des équipements et est responsable de l’embauche des techniciens et des agents, ainsi que de leur
formation. La collaboration est donc obligatoire, d’autant plus qu’il a également beaucoup de moyens pour financer
des projets. La communication : point essentiel
Selon les recommandations d’une personne qui a beaucoup travaillé sur le gaspillage alimentaire, il faut « raconter
une belle histoire » aux acteurs « en montrant l’avant et l’après ». La préparation de l’intervention de la DRAAF sur
cette thématique est essentielle. L’idée de faire réaliser un « logo anti-gaspi » par des élèves n’a malheureusement pas
eu le temps d’aboutir. Mais il paraît intéressant de la reprendre à la rentrée scolaire, afin de permettre aux élèves de
s’investir. Toutefois, il ne faut pas négliger la sensibilisation auprès des autres catégories de convives : les a priori sur les
adolescents sont contredits par les différentes expériences et d’autres convives semblent au contraire beaucoup plus
réticents à s’investir. Le pain est identifié comme un bon support de communication : le gaspillage de cet aliment est
facile à visualiser et les effets de mesures simples à mettre en place sont rapides et impressionnants.
La démarche de lutte contre le gaspillage alimentaire : une démarche sur le long terme
Les trois points-clefs de la réduction des déchets alimentaires sont : l’évaluation, la prévention et la valorisation. Il
faut prendre ces étapes dans l’ordre, sans vouloir commencer à valoriser les déchets avant de réduire les gisements,
tendance qui a été observée pendant ce stage. Les documents
Références bibliographiques
Un inventaire non exhaustif des rapports, des guides méthodologiques existants sur le gaspillage alimentaire,
en particulier en restauration collective scolaire a été réalisé. Les deux tableaux proposés en annexe 3 du rapport
permettent de les retrouver.
Questionnaires
Trois questionnaires ont été construits sur une même trame (ils sont présentés en annexe 4 du rapport). L’objectif est
de : - Enquêter dans les différents lycées agricoles en utilisant une base commune, afin de pouvoir identifier les pistes
d’actions par lycée, tout en offrant la possibilité de faire des comparaisons : motifs de gaspillage, efficacité des actions
mises en place par exemple.
- Questionner les différentes catégories de convives lors de repas habituels ou lors de repas « événementiels », afin
d’évaluer les effets de l’introduction de produits issus de l’agriculture biologique, des circuits de proximité ou de repas
à thème... 136
- Simplifier l’exploitation des résultats. Un document informatique sera fourni au SRAL comme exemple d’exploitation.
Fiche de pesée :
Le choix a été fait d’utiliser la méthode de pesée la plus simple (le document est présenté en annexe 5 du rapport). Il
se justifie par une volonté : - de ne pas surcharger les équipes de cuisine ; - de faire réaliser le tri par les convives et donc par une nécessité de ne pas imposer un tri trop compliqué dès le début
de la démarche ; - de pouvoir réaliser le tri et la pesée avec du matériel simple, peu onéreux et facile à mettre en place. Eléments de communication :
Des éléments simples de communication sont proposés (annexe 1) : il s’agit de chiffres-clés sur le gaspillage alimentaire
en restauration scolaire et des enjeux de la lutte.
Ils sont volontairement simples puisqu’un des enseignements de ce stage est que la communication est le point
essentiel de la démarche et doit être adaptée à chaque établissement. Les éléments proposés en annexe pourront
donc servir à l’introduction de la démarche dans les établissements. Il faudra ensuite impliquer les acteurs « locaux »
dans la réalisation des éléments de communication, en les adaptant au contexte, aux motifs de gaspillage identifiés et
aux actions mises en place.
La thématique du gaspillage alimentaire est un sujet large et qui peut être abordé par de nombreuses voies d’entrée. La
difficulté pour définir le sujet du stage l’avait fait pressentir. La réalité du terrain l’a confirmé. La dimension symbolique
de l’alimentation, le nombre de catégories d’acteurs concernés, la nécessité d’une coordination entre tous, les enjeux
multiples de la lutte contre le gaspillage rendent la mission du SRAL à la fois intéressante et complexe. L’apport de ce stage est à mon sens mesurable à plusieurs échelles : - pour les lycées agricoles : disposer de documents qui leur permettre de mettre en place une démarche un minimum
harmonisée. L’intérêt est de leur offrir la possibilité de se rencontrer et d’échanger sur le thème de la lutte contre le
gaspillage en combinant les deux démarches : approvisionnement des restaurants scolaires avec les produits issus des
exploitations agricoles et la lutte contre le gaspillage alimentaire ; - pour la DRAAF, le SRAL : un travail préliminaire de recherche documentaire et de sélection des informations les
plus pertinentes sur le sujet du gaspillage alimentaire en restauration collective. Les documents proposés et les «
recommandations » permettront de faciliter la mise en place des actions au sein des EPL. L’utilisation de documents
identiques permettra d’exploiter plus facilement les résultats.
- sur le plan personnel : la compréhension du fonctionnement du SRAL dans ses relations avec les autres acteurs
concernés par les questions liées à l’alimentation. Cela a permis de mettre en évidence la difficulté de travailler avec
des structures déjà fortement sollicitées et sur un thème qui semble parfois trop éloigné des préoccupations qualifiées
d’urgentes.
Annexe 1 – Eléments de première communication
Les définitions :
137
Gaspillage alimentaire: denrées alimentaires consommables qui sont jetées; sont inclues ***: les parties consommables
qui sont mangées par certains et pas par d’autres
Déchets alimentaires : déchets non consommables
Biodéchets : déchets verts, papiers , cartons...
Les chiffres du gaspillage alimentaire :
Biodéchets : 179 à 200g/personne/repas, en moyenne 191g/personne/repas
Gaspillage alimentaire : 152g/personne/repas, soit 52cts d’euros par repas (pour un coût de repas de 2.23 euros)
Equivalents en nombre de repas : 95 repas jetés sur 434 repas servis
Les enjeux de la lutte contre le gaspillage : (adaptés au contexte des lycées agricoles)
- environnemental : réduction des déchets, de l’empreinte carbone, de « l’empreinte-eau », de « l’empreinte foncière »
- économique : réduction des pertes financières de 11cts d’euros par repas, amélioration de la rentabilité de la
restauration, possibilité de se fournir en produits de meilleure qualité. Impact économique de l’infection par Leptospira interrogans
dans les cheptels bovins laitiers en France
Florence AYRAL, Etudiante du CEAV-SPV, 2013-2014
Questions abordées par l’étude 168
Les questions relatives à l’impact économique de L. interrogans dans les élevages ont été soulevées par le groupe de
travail « Global Leptospirosis Environment Action Network ». Les travaux menés pour y répondre ont été faits dans
le cadre de la résidence du Collège Européen de Santé Publique Vétérinaire et cofinancés par le projet européen de
recherche WildTech et VetAgro Sup. Le résultat de ces travaux a fait l’objet de deux articles publiés dans le Bulletin des
GTV169 .
La quantification de l’impact économique des maladies est un outil essentiel pour la gestion de l’élevage. Le coût relatif
aux infections ayant des manifestations frustes et non spécifiques est souvent sous-estimé par un défaut d’identification
des pertes de production réellement attribuables à l’infection. L’absence de prise en compte des conséquences
indirectes telles que le travail supplémentaire associé au traitement des animaux malades ou la dépréciation des
animaux contribue, de plus, à cette sous-estimation. La leptospirose bovine compte parmi ces maladies dont l’impact
économique est difficile à évaluer.
En France, la séroprévalence de l’agent de la leptospirose (Leptospira interrogans sensus lato) dans les cheptels bovins
laitiers varie de 21% à 35% selon les études170 . Les conséquences de l’infection se distinguent selon le statut de
l’élevage en regard des Leptospires. Parmi les élevages infectés, la forme enzootique est la plus répandue ; elle est
due à l’infection chroniques par Leptospira sérovar hardjo chez une partie des bovins et se manifestent à l’échelle du
troupeau par une diminution de la fertilité171 . En revanche, dans les élevages naïfs pour Leptospira quel que soit le
sérovar infectant, de la fièvre, des avortements et des chutes de production laitières sont observés. Plus rarement, le «
milk drop syndrome » (lait rosé sans inflammation apparente de la mamelle) peut se manifester.
Le coût réel de la baisse de fertilité dépend de multiples variables (nombre d’inséminations nécessaires, longévité de la
vache, intervalle vêlage-vêlage, taux de conception, décalage de la lactation). De même, Le coût relatif à un avortement
ne se limite pas à la valeur du veau mort, il doit prendre en compte un certain nombre pertes indirects (gestion du postpartum, conséquences sur la lactation, dépréciation de la vache), voire de gains (alimentation non distribuée).
L’objectif de cette étude tend à définir les principales pertes en termes de production et d’évaluer les coûts relatifs à
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
169
Ayral F. La leptospirose dans les cheptels bovins laitiers en France : Impact économique de l’infection. Bulletin des GTV,
2013, n°69 : p. 61-67 ; Ayral F. La leptospirose dans les cheptels bovins laitiers en France : établir un programme de lutte.
Bulletin des GTV, 2013-14, n°72 : p. 53-58
170
André-Fontaine G, Nicholas D, Scalzo B, Keta A, Nanjiani IA. Prévalence sérologique de la leptospirose à Leptospira sérovar hardjo chez les bovins femelles adultes en France en 2004. Bulletin des GTV, 2010, n°55: p. 67–74 ; Tresse L, Rubeaux D,
Kodjo A, André-Fontaine G, Mascaron L. Enquête sur l’infection des bovins par les leptospires en région Ouest. Renc. Rech.
Ruminants, 2009, p. 16
171
André-Fontaine G, Kodjo A. Leptospirose et troubles de la reproduction chez les bovins. Bulletin des G.T.V. 2009, 48:
p.53–8
168
138
l’infection, à l’échelle d’un individu et pour une année. Ces coûts peuvent ensuite être extrapolés à l’échelle de l’élevage
et comparés selon le nombre d’individus atteints et les méthodes de gestion de l’élevage. Le coût des mesures de lutte
est ensuite évalué afin de déterminer l’option de choix dans une situation donnée.
Matériel et Méthode
Coût de la maladie : la méthode des budgets partiels est adaptée à l’analyse micro- économique car elle tient compte
des différents cas de figures liés aux caractéristiques de l’élevage. Six cas de figures sont considérés dans cette étude
selon le remplacement ou non du veau mort, la réforme ou non et le remplacement ou non de la vache avortée. Le
découpage des effets de l’infection (baisse de fertilité, avortements) en conséquences élémentaires sur la production
(mort du veau, perte de production laitière) puis leur conversion en termes financiers permet d’estimer l’impact
économique de l’infection par vache avortée. A l’échelle de l’élevage, le coût de l’infection est additif selon le nombre
de vaches infectées et les manifestations observées.
Coût des mesures de lutte : à partir des connaissances sur l’épidémiologie de la leptospirose dans les cheptels bovins
laitiers, les mesures de lutte pertinentes en France ont été définies. Les mammifères de la faune sauvage et les bovins
eux-mêmes sont les réservoirs potentiels des agents pathogènes. Les différentes espèces réservoirs se distinguent
également en termes de sérogroupes transmis et par conséquent, en termes de mesures de lutte disponibles et
appropriées. Le coût des mesures de lutte pertinentes a été évalué pour chacun des réservoirs en cause (faune sauvage,
notamment les rongeurs versus les bovins) et ciblait les mesures médicales (antibiothérapie versus vaccination).
Les mesures de lutte sont conçues pour diminuer les coûts relatifs aux pertes de production dues à la leptospirose.
L’avantage du programme de lutte représente la part des pertes réduites par les mesures de lutte. Le bénéfice de la lutte
prend en compte à la fois l’avantage de la lutte et le coût de sa mise en place, tel que décrit dans la formule suivante :
Gain Avantage du programme de lutte + Coût programme de lutte = Bénéfice Lutte
Résultats
Coût de la maladie : selon la stratégie de l’éleveur, le coût d’une vache ayant avorté suite à une infection leptospirosique
varie de -88€ à -2369€. L’éleveur perd un minimum de 88€ lorsque la vache n’est pas réformée et le veau non remplacé
à la suite de l’avortement. En revanche, les pertes répercutées sur les années suivantes (décalage de la lactation, perte
de production laitière, retard des mises bas suivantes) vont être cumulées. A l’autre extrême, l’éleveur perd 2369€
lorsque la vache avortée est réformée mais non remplacée et le veau mort remplacé. Dans ce cas, l’éleveur aura de plus
un manque à gagner les années suivantes suite à l’absence de la vache non remplacée. En considérant les 6 modalités
de gestion de l’élevage, le coût d’un avortement leptospirosique est estimé à 1043€ en moyenne (IC95%=[203 – 1882])
la première année de l’infection avec de probables répercussions les années suivantes, non prises en compte dans ces
calculs.
Coût des mesures de lutte : le total des avantages lié à un avortement leptospirosique évité lorsque la stratégie de l’éleveur
et de remplacer les animaux impliqués représente un gain de 684€. Par ailleurs, le total des coûts de l’antibiothérapie se
réparti en un coût fixe de -200€, un coût fixe par traitement de -121€ et un coût par vache en production de -123€. Le
total des coûts de la vaccination se réparti en un coût fixe de -260,75€ et un coût par individu de - 3,90€.
Lorsque BénéficeLutte ≤ 0, la mesure n’est pas rentable. Par conséquent, l’antibiothérapie est rentable pour des
groupes d’animaux inférieurs à 14 individus alors que la vaccination reste rentable en-deçà de 428 bovins traités.
Discussion
Le coût lié à un avortement leptospirosique a été estimé entre -88€ et -2369€ selon la stratégie de l’éleveur. En évaluant
les coûts la première année de l’infection, ces derniers ne tiennent pas compte de la répercussion des effets (décalage
des vêlages et des lactations) les années suivantes et pourraient être sous-estimés. A l’échelle de l’élevage, les pertes
économiques sont fonction du nombre de bovins infectés qui peut représenter 30% à 40% du troupeau172 . Ces pertes
peuvent donc être considérables quelle que soit la gestion de l’élevage et soulève la question des mesures de lutte
visant l’amélioration des performances de troupeaux infectés mais aussi la prévention de cheptels sains exposés.
Les mesures de lutte dont les coûts sont évalués, sont ciblées selon leur pertinence. Le dépistage puis l’élimination
ou l’isolement des bovins infectés n’est pas considéré compte tenu des limites du test (faible sensibilité) pour détecter
certains porteurs asymptomatiques. Lors d’exposition du bétail aux infections de la faune sauvage, les mesures
sanitaires ne sont pas pleinement efficaces pour limiter l’impact de l’infection mais constituent, souvent, le seul recours.
Le coût associé à ces mesures de lutte n’est pas évalué, ici, car sa grande variabilité parmi les troupeaux ne permet
pas de le généraliser. Ce coût dépend, en effet, des investissements nécessaires pour limiter la présence des espèces
sauvages tels que le type de bâtiment d’élevage (ouvert versus fermé), et leur surface, le mode de stockage et de
distribution des aliments, le mode de distribution de l’eau et sa qualité.
Bolin C.A. Clinical signs, diagnosis and prevention of leptospirosis in cattle. British Cattle Veterinary Association, 2001, 9,
267 – 273
172
139
Les mesures de lutte dans les cheptels bovins exposés aux leptospires se distinguent selon le sérogroupe. Pour
des conditions d’efficacité particulière et lors d’exposition au sérogroupe Sejroe, le plan de lutte le plus rentable est
la vaccination de tous les bovins associée à des mesures sanitaires si la source de l’infection est identifiée. Lors
d’exposition aux autres sérogroupes, le plan de lutte requiert une antibiothérapie des bovins associée à des mesures
sanitaires si la taille du troupeau est inférieure ou égale à 14 individus ; au-delà de 14 bovins, seules les mesures
sanitaires sont économiquement envisageables bien qu’elles ne soient pas optimales.
La vaccination est l’alternative de choix en termes d’efficacité à moyen et long terme mais ne concerne que les infections
par les leptospires dont les bovins sont eux-mêmes réservoir (sérogroupe Sejroe). Des préparations vaccinales
multivalentes sont disponibles à l’étranger. Elles sont reconnues pour développer une réponse cellulaire en plus de la
réponse humorale et présenteraient potentiellement des protections croisées entre sérogroupes173 . Ces alternatives
fourniraient dès lors les mesures de lutte adéquates pour circonscrire l’impact de l’infection par les leptospires dans les
cheptels bovins en France.
Conclusions
La reproduction et la production laitière sont les aspects les plus importants dans la rentabilité d’une ferme laitière. En
ayant un impact sur ces paramètres, les infections par Leptospira impliquent des conséquences économiques non
négligeables et souvent sous- estimées par l’aspect fruste et non spécifique des manifestations. Les caractéristiques
de l’infection par les leptospires rendent l’évaluation de l’impact économique complexe.
Toutefois, la méthode des budgets partiels confirme l’impact économique non négligeable de la maladie. L’évaluation
du coût des mesures de lutte qui en découle constitue un argument essentiel pour conseiller les éleveurs de troupeaux
infectés ou sains exposés.
Une meilleure transmission de cette information pourrait améliorer la vigilance des éleveurs quant aux infections par L.
interrogans et ainsi améliorer la problématique tant de santé publique qu’économique.
Plan d’urgence contre les épizooties majeures dans le Rhône
Razika BOUHALI, Vétérinaire officielle algérienne (inspecteur en hygiène alimentaire), 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 3 mars 2014 au 20 juin 2014 à la Direction Départementale de la Protection des Populations du
Rhône, sous la responsabilité de Vincent Pfister, chef de service de la santé et la protection animales
Questions abordées par l’étude 174
Les récentes crises, très médiatisées pour la plupart, montrent l’impact des maladies de la liste A (épizooties majeures)
sur l’économie des filières. Et comme les plans de lutte contre ces maladies sont centrés au niveau des services
vétérinaires donc pour assurer le succès de lutte contre ces maladies hautement contagieuses, ces services doivent
être techniquement adaptés en fonction de la maladie concernée et de l’espèce. Pour ces mêmes fins la DDPP69 a
décidé de renforcer trois besoins opérationnels chez ses agents en lien avec le plan d’urgence contre les épizooties
majeures par la mise en place des dispositifs de formation pour chacun de ces besoins :
•
Enjeux du plan d’urgence contre les épizooties majeures
•
Enjeu économique exemple de l’épizootie de fièvre aphteuse au Royaume-Uni en 2001 : 2026 foyers, 9000
fermes dépeuplées et 6,2 millions d’animaux abattus et éliminés
•
Enjeu de santé publique (cas de l’influenza aviaire)
•
Enjeu d’opinion publique : image de l’élevage, bien-être animal. Objectifs du plan d’urgence : empêche la diffusion de la maladie à d’autres zones ou élevages indemnes, prévention
des risques zoonotiques, éradication de la maladie L’Organisation de la lutte contre les épizooties majeures en France
a) Au niveau central
Brown R.A., Blumerman S., Gay C., Bolin C.A., Duby R., Baldwin C.L. Comparison of three different Leptospiral vaccines
for induction of a type 1 immune response to Leptospira borgpetersenii serovar hardjo. Vaccine, 2003, 21, 4448 - 4458
174
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
173
140
En cas de foyer d’épizootie majeure, le ministère de l agriculture et de la pêche par le bais notamment de la sous
direction de la santé et la protection animales) à la DGAL organise la lutte et soutient l’action au niveau départemental et
régional par la détermination de la stratégie de lutte à mettre en œuvre, mise disposition des moyens (appui technique,
matériel, personnel, appui technique, contact avec les laboratoires......). b) Au niveau départemental
C’est la DDPP en coordination avec le préfet du département qui est chargée de la préparation et la mise en œuvre
des plans d’urgence, gestion de la suspicion et la confirmation en cas de crise (empêche la propagation de la maladie)
c) Cette lutte met en jeu d’autres acteurs
•
Vétérinaires sanitaires sont les vrais acteurs du terrain
•
Laboratoires vétérinaires
•
Direction départementale de la concurrence de la consommation et de la répression des fraudes (DDCCRF)
•
Direction départementale du territoire
•
Service départemental d’incendie et de secours (SDIS)
•
Les collectivités territoriales
•
Laboratoire vétérinaire départemental
•
Gendarmerie ou police
•
Groupements techniques vétérinaires
•
Groupements de défense sanitaire (regroupement des éleveurs): partenaire des services vétérinaires dans la
réalisation des prophylaxies •
Les entreprises de nettoyage et désinfection,.........
En cas de crise le DDPP
Partie1: Plan d’urgence contre les épizooties majeures de la DDP du Rhône 69 selon la séquence de la gestion d’une
crise on distingue 4 phases
A) Etape de veille : phase de préparation
•
Organisation du réseau de surveillance (vétérinaires sanitaires, laboratoires, les organismes des éleveurs.........)
•
Organisation du réseau de lutte: action des services de l’état, des collectivités territoriales. Les services de
l’état impliqués dans le plan de lutte s’organisent en centre opérationnel départemental (COD) préfecture, et en poste
de commandement opérationnel (PCO) B) Phase de gestion de la suspicion
Cette phase est subdivisée en deux :
•
Phase de déclaration : lorsque la DDPP est informé d une suspicion : information des agents, des responsables
(DGAL, préfet),des intervenants et préparation de la visite de l’élevage suspect  Préparation de la visite de l’élevage
suspect (personnel, matériel)
•
Visite de l’élevage suspect : mise en place des mesures de biosécurité (protection individuelle, désinfection)
enquête épidémiologique, réalisation des prélèvements.
C) Phase de gestion de la confirmation
Validation de la déclaration (DGAL), abattage des animaux, zones de restriction et les opérations de nettoyage et
désinfection.....
D) Phase de la sortie de la crise
Rétablissement de la situation : réunions de retours d expérience avec les équipes du terrain, bilans pour la DGAL, .....
Partie 2 : Identification des compétences opérationnelles nécessaires pour le plan d’urgence contre les épizooties
majeures dans le département 69
Dans le tableau on présente les compétences opérationnelles générales nécessaires pour cette lutte
Etre capable de faire
Contenu de la formation
Savoir réaliser une enquête en élevage suspect
Quelles sont les questions et comment les poser à un
éleveur
141
Etre capable de se protéger en milieu infecté (équipement de protection individuelle)
Savoir comment assurer une protection maximale tout
en évoluant d une manière organisé dans un élevage
suspect et pourquoi le port de cet équipement
Etre capable de connaître le comportement d un animal
et comment assurer sa contention
Les différentes réactions d’un animal et comment assurer sa contention parfaite sans aucun danger
Etre capable de mettre en place des mesures de biosécurité
Savoir comment et pourquoi la mise en place des mesures de biosécurité
Etre capable de réaliser des prélèvements (différentes
espèces)
Savoir comment réaliser des prélèvements (différentes
espèces)
Etre capable d’euthanasier les animaux
Savoir comment et quelle technique on doit choisir
Propositions de renforcement : à partir du tableau précédent la DDPP69 a pu déterminer trois besoins opérationnels à
renforcer pour que ses agents puissent faire face à une crise :
•
Equipement de protection individuelle( EPI) : tenue porté par les agents lors d’intervention en crise sanitaire en
élevage (combinaisons jetables, masques, lunettes, charlottes......)
•
Objectif : La prévention du risque zoonotique (IA), risque chimique (manipulation de désinfectants lors des
opérations de désinfection) et risque traumatique (utilisation du matériel...... ).
•
Rotoluve : C’est un dispositif de désinfection des véhicules sortant de l’exploitation infectée (contact des
roues avec le sol contaminée l’exploitation) et a pour objectif d’empêcher la sortie de l’agent pathogène de l’exploitation
infectée.
•
Dispositif de formation
On a pu réaliser une technique de montage du rotoluve adaptée à la DDPP69 (fiche technique comme support de
formation) selon le matériel au niveau de la direction.
•
Techniques d’euthanasie
Pour avoir des techniques d’euthanasie adaptées à la DDPP69 on doit prévoir une planification des ressources
humaines et matérielles avant l’apparition d’une crise : formation du personnel (utilisation du matériel), vérification du
matériel par des organismes habilités à cette vérification, recrutement d’autres agents (personnel très réduit insuffisant
en cas de crise).
Conclusion
On savait que les situations d’urgences sanitaires exigent une réponse immédiate et efficace pour en limiter le plus
possible les pertes économiques. Donc pour éviter cette situation il faut se préparer en temps de paix par : formation
du personnel, avec des exercices de simulation (permet de tester les compétences opérationnelles,) sensibiliser
les partenaires de lutte, avoir un inventaire du matériel, sensibiliser les éleveurs, animation du réseau d’épidemiosurveillance (laboratoires, vétérinaires sanitaires.....
La brucellose chez les ongulés sauvages de montagne :
épidémiologie descriptive du foyer du Bargy et estimation des
risques pour l’arc alpin
Aline DEPECKER, Inspectrice stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 14 avril 2014 au 25 juillet 2014 à l’Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage sous la
responsabilité de Jean Hars
142
Questions abordées par l’étude 175
Alors que la France n’avait pas connu de cas de brucellose de ruminants en élevage depuis plus de 10 ans, suite à
l’avortement d’une vache dans un cheptel laitier produisant du reblochon fermier au lait cru et situé sur la commune
de Grand-Bornand en Haute-Savoie, un cas bovin à Brucella melitensis biovar 3 a été mis en évidence le 4 avril 2012.
Quelques mois plus tôt, en janvier 2012, un cas de brucellose humaine chez un enfant, dont l’origine était restée
inconnue avait été détecté dans la région. Il avait été suivi d’un second cas dans la même famille chez un autre jeune
homme. Après étude par l’Agence Nationale de Sécurité Sanitaire de l’Alimentation, de l’Environnement et du Travail
(Anses) des souches bactériennes isolées chez les patients et chez la vache avortée il s’est avéré que celle-ci étaient
identiques d’un point de vue espèce, biovar et génotype.
Par ailleurs l’enquête épidémiologique menée auprès des personnes atteintes par la maladie a révélé que celles-ci
avaient consommé des produits laitiers issus de la ferme où le bovin brucellique a été découvert c’est ainsi que ces
cas humains ont été reliés au foyer bovin. Le cheptel bovin concerné, composé d’une vingtaine de bovins, a été abattu
en totalité dans les jours qui ont suivi la confirmation de l’infection brucellique. Les analyses effectuées sur les bovins
abattus n’ont révélé qu’une contamination très limitée des autres animaux du troupeau. L’enquête épidémiologique
conduite par la Direction Départementale de la Protection des Populations (DDPP) de Haute-Savoie, en collaboration
avec l’Anses et la Direction Générale de l’Alimentation (DGAL), et toutes les investigations menées dans les cheptels
voisins n’ont pas permis de déterminer l’origine de ce foyer.
Le seul lien épidémiologique avec ce foyer de 2012 était la déclaration ancienne, en 1999, d’un foyer dû également à
Brucella melitensis biovar 3 dans une exploitation mixte bovine, ovine et caprine située sur la commune du Reposoir se
trouvant à quelques kilomètres du Grand-Bornand sur le versant nord du massif du Bargy.
Ainsi, la question première pour la compréhension de l’origine du foyer était de savoir s’il pouvait y avoir un lien entre
l’ancien foyer de 1999 et celui de 2012, si la bactérie avait pu persister localement pendant plus de douze ans et si un
relais « silencieux » avait pu être assuré par la faune sauvage locale, l’exploitation touchée étant à l’origine officiellement
indemne de Brucellose.
Ainsi, dès l’automne 2012, le Ministère en charge de l’agriculture et plus particulièrement la DGAL a confié par convention
à l’Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage (ONCFS) la maitrise d’œuvre d’un programme de surveillance
sanitaire de la faune sauvage locale (cerfs, chamois, bouquetins) la plus réceptive à la maladie.
Les premiers résultats de cette étude ont laissé entrevoir dès l’automne 2012 qu’une proportion sérieuse de la population
de bouquetins du massif du Bargy était atteinte par la brucellose et que cette dernière constituait bel et bien un réservoir
sauvage de la maladie.
A la suite de ces premiers résultats, le programme de surveillance s’est poursuivi en 2013 et une estimation de la
séroprévalence de la maladie a pu être effectuée. Chez les jeunes animaux (2 à 5ans) la séroprévalence apparente de la
maladie était de 15 % tandis qu’elle s’élevait à 56 % pour les animaux âgés de 6 ans et plus.
Face à ces constats, malgré les avis plutôt modéré du Comité National de Protection de la Nature (CNPN) et de l’Anses,
il a été rapidement décidé, suite à un arbitrage inter-ministériel rendu fin septembre 2013, d’adopter une stratégie de
lutte fondée sur un abattage partiel de la population de bouquetins visant à éliminer tous les animaux de cinq ans et
plus, correspondant aux classes d’âges les plus infectées. Un arrêté préfectoral a été rédigé et signé en conséquence
le 1er octobre 2013. Cet arrêté est valable un an à compter de sa signature pour le département de la Haute-Savoie.
Ainsi, malgré l’avis des comités d’experts et suite à la décision du premier ministre, une opération éclair a été menée
au mois d’octobre 2013 à peine quelques jours après la signature de l’arrêté et 197 bouquetins ont été abattus en trois
journées.
En 2014, le programme de surveillance se poursuit et un nouvel état des lieux sanitaire est mené par les agents de
l’ONCFS. Notre étude analytique des données recueillies sur le terrain relatives à la population de bouquetins du massif
du Bargy a montré qu’à l’heure actuelle, malgré les mesures de gestion édictées par les Ministères en charge du
dossier, à savoir l’abattage partiel des animaux de 5 ans et plus et celui des individus séropositifs, la progression de
la maladie ne semble pas maîtrisée parfaitement dans la mesure où la séroprévalence globale aujourd’hui n’est pas
significativement différente de celle observée en 2013 et qu’elle a augmenté significativement chez les jeunes animaux.
Le suivi populationnel des bouquetins du massif a lui mis en évidence que le risque de contamination des cheptels était
relativement faible au vu des contacts rares entre les animaux sauvages et les animaux domestiques. D’autre part, cette
étude permet également de penser que la maladie semble bien circonscrite au massif du Bargy car aucun déplacement
inter-massif n’a été observé. Les données actuelles recueillies sur le terrain devraient pouvoir conduire à une nouvelle
approche de gestion du foyer en s’aidant éventuellement des expériences de crises similaires décrites dans des pays
étrangers tels l’Italie, ou encore les Etats-Unis qui ont eu à souffrir de cette maladie via la faune sauvage.
Face à cette situation de crise, l’ONCFS s’interroge, si un tel foyer a su se développer à bas bruit au sein de la faune
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
175
143
sauvage en Haute-Savoie, qu’en est-il des autres départements alpins ? C’est à cette question que nous avons
également tenté de répondre au cours de notre stage.
Concernant cette étude menée sur l’arc alpin, deux zones potentiellement contaminées par la brucellose au cours
des transhumances d’animaux domestiques ont pu être mise en évidence mais ce travail de recherche s’avère
incomplet faute de données disponibles. Cependant, au vu du nombre de foyers de brucellose déclarés dans les
cheptels domestiques, notamment en espèces ovines et caprines, il semble que le risque puisse être présent ailleurs en
particulier dans le département des Hautes-Alpes ayant accueil nombreux cheptels transhumants. Suite aux difficultés
rencontrées sur le terrain pour obtenir des informations au moyen d’une approche faune domestique, cette étude
mériterait peut-être d’être poursuivie sous l’angle faune sauvage en étudiant des photothèques ou en exerçant une
veille scientifique thématique active.
Ce cas particulier du massif du Bargy illustre bien le concept « One world, One Health », «un monde, une santé » tel que
défendu par les organisations internationales comme l’Organisation Internationale des Epizooties (OIE), l’Organisation
Mondiale de la Santé (OMS) ou la Food and Agriculture Organization (FAO) visant à « savoir, prévenir, détecter circonscrire
éliminer et répondre aux risques pour la santé animale et humaine attribuables aux maladies animales et aux zoonoses
». Il se situe au carrefour de la santé animale et de la santé humaine constituant ainsi une illustration de ce qu’est un
réel problème de santé publique.
Lutte contre la flavescence dorée de la vigne en Bourgogne :
aménagement de la lutte en 2014
Marie-Laure CHEVALIER, Inspectrice stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 14 avril au 25 juillet 2014 à la DRAAF de Bourgogne sous la responsabilité de Claude MAGNIEN,
chef du pôle «santé végétale»
Questions abordées par l’étude 176
Dans le cadre du certificat d’études approfondies vétérinaires en santé publique vétérinaire (CEAV-SPV), j’ai réalisé
mon stage du 14 avril au 25 juillet 2014 au sein du pôle santé végétale, service de la DRAAF de Bourgogne, où ma
mission a consisté à participer à la construction, la mise en œuvre et à l’analyse du dispositif qui permet d’adapter les
traitements insecticides visant le vecteur de la flavescence dorée de la vigne dans les départements de Côte d’Or et de
Saône-et- Loire. Le mémoire présenté « Lutte contre la flavescence dorée de la vigne en Bourgogne : aménagement de
la lutte en 2014» décrit tout d’abord la maladie, son vecteur et le cadre réglementaire des mesures de lutte contre cette
maladie de la vigne puis analyse les mesures mises œuvre dans le vignoble de Bourgogne et l’évolution des stratégies
de lutte déployées par les autorités sanitaires et les différents acteurs de la filière. Enfin, il décrit le dispositif mis en place
en 2014 sur plusieurs zones du territoire viticole dans l’objectif de conditionner certains traitements insecticides aux
populations vectorielles résiduelles et en étudie les premières conséquences.
La flavescence dorée (FD) est une maladie grave de la vigne ayant fait son apparition en France dans les années 1950
qui touche depuis 2004 le sud de la région Bourgogne. Cette maladie bactérienne est aujourd’hui incurable, classée
danger sanitaire de première catégorie177 et organisme de quarantaine. Elle entraîne la mort des pieds de vigne et
s’étend de façon épidémique car la contamination de cep en cep est assurée par un vecteur, un insecte piqueur
inféodé à la vigne, la cicadelle de la flavescence dorée. L’importance de la maladie découle également de son impact
économique qui ne peut être négligé en Bourgogne où la viticulture tient une place à part. Une partie de ce vignoble
est prestigieuse et si les surfaces en vigne ne constituent dans la région que 2% des surfaces agricoles exploitées
(environ 31 500 ha pour 4126 exploitations viticoles178 ), la viticulture représente à elle seule près du tiers de la valeur de
la production agricole régionale (elle apporte 3 % du PIB régional avec 45.000 emplois générés, soit 7% de l’emploi).
La part exportée représente 50 % de la production en appellation Bourgogne sur 204 millions de bouteilles produites.
Détectés à l’occasion des surveillances des jeunes plantations dans le centre de la Saône-et- Loire, puis dans le sud
de la Côte d’Or et enfin dans les Côtes Châlonnaises entre 2004 et 2009, les premiers «foyers» de FD sont constitués
d’un ou de quelques ceps atteints et les mesures de lutte mises en œuvre dans des périmètres assez restreints (PLO179
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
177
Dans un but d’intérêt général, ce danger requiert des mesures de prévention, de surveillance ou de lutte rendues obligatoires par les autorités administratives (CRPM art. L 251-3)
178
Données Agreste : recensement agricole 2010
179
Périmètre de Lutte Obligatoire
176
144
) permettent de contenir la maladie et d’assainir ces foyers. Les mesures de lutte consistent en une surveillance du
vignoble, inspection visuelle cep à cep afin de détecter les symptômes de la maladie180 , la réalisation d’analyses
officielles de laboratoire afin de confirmer la présence de la FD, l’arrachage des pieds atteints (voire l’arrachage de toute
la parcelle lorsque plus de 20% des pieds sont atteints) et l’application de traitements insecticides visant l’insecte vecteur
Scaphoideus titanus. Les mesures de lutte, établies sur la base des dispositions réglementaires d’un arrêté ministériel
et d’une évaluation du risque sanitaire locale, sont fixées par arrêté préfectoral (AP) et font l’objet de communications
adressées aux viticulteurs et aux élus locaux concernés. Le plan de lutte est mis en œuvre par les viticulteurs du PLO
et la DRAAF travaille sur ce sujet en étroite collaboration avec les organisations professionnelles viticoles, la FREDON
Bourgogne (organisme à vocation sanitaire régional dans le domaine de la santé végétale), les chambres d’agriculture
départementales et le service viticole du SEDARB (association de promotion de l’agriculture biologique).
A l’automne 2011, un foyer d’une toute autre ampleur est découvert dans le centre du département sur la commune
de Plottes et la situation est telle qu’une parcelle atteinte à plus de 60% doit être arrachée : les prospections conduites
alentour, interrompues par la chute des feuilles permettent de mettre en évidence la maladie sur deux communes
contigües. Faisant le constat, au vue de la situation phytosanitaire, que la maladie est déjà installée depuis plusieurs
années dans le vignoble, et connaissant l’importance des populations vectorielles locales, la DRAAF définit un PLO
largement étendu aux communes limitrophes. En 2012, les prospections confirment l’extension de la maladie dans le
foyer mais également dans le sud Mâconnais et dans une commune située dans la Côte Chalonnaise. Le bilan de la
campagne fait état de 26 communes contaminées et de 11.4 ha de vignes atteintes à plus de 20 % qui doivent être
arrachées. En 2013, les mesures de lutte sont étendues à tout le département de Saône-et-Loire (avec trois traitements
insecticides) et à la demande de la profession viticole de Côte d’Or, un AP organisant la lutte sur tout le département
(hors Châtillonnais et Auxois) est pris afin d’anticiper une crise sanitaire, imposant un traitement insecticide (visant la
réduction des populations vectorielles particulièrement élevées) et une prospection collective à l’automne. Les AP
imposent également l’utilisation de pieds sains pour les nouvelles plantations et le remplacement des ceps manquants.
Les méthodes de lutte sont basées sur les connaissances scientifiques de l’agent pathogène (Candidatus phytoplasma
vitis) et de son vecteur (S. titanus). La mise en évidence la maladie est réalisée par des analyses officielles de laboratoire
car la flavescence dorée s’exprime de façon analogue à une autre jaunisse de la vigne, le bois noir, présent dans le
vignoble de Bourgogne mais qui ne présente pas les mêmes caractéristiques épidémiques (son vecteur est différent et
non inféodé à la vigne).
La mise en œuvre des mesures du plan de lutte suscite des oppositions dès l’été 2013 ; toutefois la mobilisation de
la profession a permis une prospection exhaustive du vignoble, mettant en évidence une extension de la FD limitée,
résultat de la lutte insecticide et des arrachages des pieds atteints (FD ou BN) réalisés en 2012, et a permis la détection
de pieds isolés. Des riverains du vignoble critiquent l’application des traitements insecticides, notamment autour des
écoles dans les villages viticoles, et ces critiques sont relayées par certains viticulteurs en AB. Des questions à propos
de l’utilisation systématique de trois traitements insecticides en Saône-et- Loire et d’un traitement obligatoire en Côte
d’Or sont soulevées par certains viticulteurs, des associations environnementales et une partie de la population :
quels sont les risques auxquels la population riveraine est exposée, et plus largement quelles sont les conséquences
environnementales de ces traitements, quelle est la responsabilité de chacun des acteurs dans l’utilisation de ces
produits, fallait -il utiliser les insecticides sur un périmètre aussi large alors que les foyers ne concernent qu’une partie du
territoire... ? Au cours des contrôles réalisés par les agents du SRAL pour s’assurer de l’application des prescriptions du
plan de lutte contre la flavescence dorée, un viticulteur en biodynamie de la région de Beaune (21) est verbalisé parce
qu’il n’a pas réalisé le traitement obligatoire. Son cas est médiatisé et l’affaire «Giboulot» prend de l’ampleur au cours
de l’hiver 2013-2014 : la profession viticole de Bourgogne apparait divisée.
Au-delà des aménagements permis par l’amélioration de la connaissance de la situation sanitaire en Bourgogne (de
nombreuses données épidémiologiques ont été recueillies, notamment au cours des campagnes 2012 et 2013),
l’élaboration du dispositif de lutte contre la FD en 2014 doit prendre en compte plus largement les considérations
sociétales, l’expression des divergences stratégiques et associer toutes les «sensibilités» de la profession.
Ainsi l’organisation de la lutte contre la FD pour 2014 en Côte d’Or et en Saône-et-Loire et particulièrement
l’aménagement de la lutte insecticide s’est faite dans un double objectif :
- assurer un niveau élevé de protection contre
la maladie dans les zones encore indemnes avec le maintien de périmètres de lutte obligatoire étendus ce qui permet d’y
rendre obligatoires des mesures de surveillance (dont la prospection collective) et des mesures de protection sanitaire
(utilisation de plants traités à l’eau chaude par exemple),
- contenir la maladie voire assainir le vignoble dans les zones
où la maladie a été détectée tout en limitant au strict nécessaire le recours au traitement insecticides.
L’évaluation du risque sanitaire a permis d’affiner le niveau de décision, du département en 2013 au groupe de
communes (délimitations de zones) en 2014, et la réduction du nombre de traitements insecticide dans ces zones de
risque distinct (risque élevé, risque moyen ou risque faible). La mise en place des traitements conditionnés, approche
inédite en Bourgogne, combine l’analyse de risque et un suivi des populations vectorielles résiduelles pour la zone «2
180
Cette inspection rapprochée est aussi appelée prospection du vignoble.
145
traitements moins 1»(2-1) et la zone «3 moins 1» dans lesquelles le second ou troisième traitement est conditionné à
l’efficacité du ou des premiers traitements insecticides (qui est vérifié par l’absence du vecteur dans les parcelles de
vigne d’une commune). Elle a nécessité l’élaboration d’un protocole de surveillance des populations vectorielles dont a
été chargée la FREDON, de la définition d’une clé de décision (seuil de déclenchement des traitements insecticides) et
d’un dispositif efficace de communication. Si l’aménagement «3- 1» des traitements insecticides a bénéficié des acquis
des expériences menées dans d’autres régions, le dispositif 2-1 a été conçu spécifiquement à cette occasion.
L’aménagement de la lutte insecticide a permis une réduction des intrants (insecticides) de plus de 40%, tout en
s’assurant de la maîtrise des populations vectorielles et une réduction des surfaces traitées de presque 34 %. L’impact
de cet aménagement sur l’efficacité de lutte contre la FD ne peut être évalué immédiatement car c’est au cours des
prospections des vignes de 2015 qu’apparaîtront des symptômes sur des ceps contaminés cette année et parce que
les conséquences des autres mesures mises en œuvre, la qualité des prospections collectives, le taux d’arrachage des
pieds présentant des symptômes de jaunisses (FD ou BN), l’utilisation de plants assainis doivent également être prises
en compte.
La Nouvelle Gouvernance Sanitaire Régionale en France,
exemple de l’élaboration de la trame du schéma régional de
maîtrise des dangers sanitaires en Midi Pyrénées
Hélène BRIEN, Inspectrice élève de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2015
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 3 mars au 20 juin 2014 à la DRAAF Midi-Pyrénées sous la responsabilité de Catherine PAVE, chef
de SRAL et de Dominique MARMION, responsable du pôle coordination du SRAL
Questions abordées par l’étude 181
La Nouvelle Gouvernance Sanitaire, émanant des Etats Généraux du sanitaire de 2010, replace l’échelon régional
au coeur de l’organisation sanitaire. Ce dispositif inclut l’élaboration d’un schéma régional de maîtrise des dangers
sanitaires, véritable plan stratégique de lutte contre les dangers sanitaires reconnus comme prioritaires pour la région.
L’exemple de l’élaboration de ce schéma régional en Midi-Pyrénées illustre la mise en place de cette réforme.
I. Contexte de la nouvelle gouvernance sanitaire régionale et schéma régional de maîtrise des dangers sanitaires
Face à l’accélération des échanges et à l’évolution des écosystèmes, entrainant l’introduction ou la réémergence
d’agents pathogènes ou d’organismes nuisibles, repenser l’organisation sanitaire française est primordial afin de rester
efficient et réactif contre des risques qui s’intensifient et se diversifient. En effet, les conséquences économiques,
sanitaires, environnementales et sociétales des crises sanitaires peuvent se révéler majeures pour les filières agricoles
(crise ESB : Encéphalite spongiforme bovine, fièvre catarrhale ovine, sharka, cynips).
L’organisation sanitaire française a fait la preuve de son efficacité, mais le contexte s’est progressivement modifié,
notamment face à des risques d’émergence de maladies et d’organismes nuisibles, liés à la mondialisation et au
changement climatique.
L’intérêt de réformer cette organisation est de mettre l’accent sur la prévention et d’assurer la sécurité sanitaire du
consommateur, plutôt que de financer des pertes et de gérer les conséquences liées à des crises sanitaires.
Ainsi, les Etats Généraux du Sanitaire tenus en 2010, mettent en relief plusieurs objectifs à atteindre au cours de la
réforme de la Nouvelle Gouvernance Sanitaire :
- la responsabilisation du professionnel, et la délégation des contrôles et de la maîtrise de certains dangers sanitaires ;
- la hiérarchisation des dangers sanitaires, permettant la priorisation des moyens et des ressources publiques comme
privées dans la lutte contre les maladies animales et les organismes nuisibles à la santé des végétaux ;
- le rapprochement des politiques sanitaires dans les domaines de la santé végétale et animale ;
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
181
146
- le positionnement en région de la gouvernance sanitaire, confortant le rôle des institutions régionales en tant que
pilotes de la politique sanitaire à l’échelon local.
La Nouvelle Gouvernance Sanitaire replace l’échelon régional au coeur de ce dispositif, et met en place de nouvelles
instances et organismes pour décider de l’orientation de la politique sanitaire animale et végétale :
- Le Conseil Régional d’Orientation des Politiques Sanitaires Animales et Végétales (CROPSAV), est une instance
consultative constituée de deux sections spécialisées et une section plénière. Son rôle est consultatif.
- Les Organismes à Vocations Sanitaires (OVS), ont pour objet essentiel la protection de l’état sanitaire des animaux
et des végétaux, des aliments pour animaux ou des denrées alimentaires d’origine animale, dans le secteur et l’aire
géographique sur lesquels elles interviennent. Un unique OVS est reconnu par région et par domaine. Ils apportent
un appui technique et sanitaire aux professionnels et remplissent des missions déléguées par l’Etat (surveillance,
prévention, mesures de lutte pour certains dangers sanitaires). En Midi-Pyrénées, l’OVS animal est la FRGDS MidiPyrénées et l’OVS végétal est la FREDON Midi-Pyrénées.
- L’Organisation Vétérinaire à Vocation Technique (OVVT) a pour objet essentiel la formation permanente et l’encadrement
technique des vétérinaires. Une unique OVVT est reconnue par région, en Midi-Pyrénées la FRGTV Midi-Pyrénées
occupe cette place.
- L’Association Sanitaire Régionale (ASR), dont les textes réglementaires la définissant ne sont pas encore publiés,
regroupera les OVS, l’OVVT ainsi que la Chambre Régionale d’Agriculture, les collectivités et toute organisation
professionnelle exerçant une compétence sanitaire sur le territoire. Elle aura pour rôles essentiels la collecte des
informations concernant la détection ou la suspicion d’apparition d’un danger sanitaire de 1ère catégorie et de certains
dangers de 2nde catégorie, afin de les transmettre à l’autorité administrative ainsi que l’élaboration du schéma régional
de maîtrise des dangers sanitaires.
Le schéma régional de maîtrise des dangers sanitaires présente un plan de maîtrise et de lutte sur 5 ans concernant les
dangers sanitaires identifiés comme prioritaires pour la région et ses filières agricoles ainsi que les modalités de mise
en oeuvre, de financement et de contrôle. Il regroupe le domaine animal et le domaine végétal et priorise les dangers
sanitaires compte tenu des spécificités régionales. Ce schéma permet de disposer d’une vision régionale cohérente
dans les problématiques sanitaires, incluant une dimension économique.
Suite à son élaboration, l’ASR transmet le schéma régional au préfet de région pour approbation et au CROPSAV pour
avis. Dans un second temps, il est fait de même auprès du ministre de l’agriculture et du CNOSPAV (Conseil National
d’Orientation de la Politique Sanitaire Animale et Végétale).
Organisation de la nouvelle gouvernance régionale, procédure d’approbation du schéma régional de maitrise des
dangers sanitaires
147
II. Elaboration du schéma régional en Midi-Pyrénées méthode et bilan
En Midi-Pyrénées, l’élaboration du schéma régional a été initié avant même la publication de l’ensemble des textes
réglementaires concernant l’ASR et le schéma régional.
Ainsi, Midi-Pyrénées occupe une place de région pilote pour cette mission. Ce travail a été initié dès Septembre 2013,
avec la mise au point d’une méthode de hiérarchisation des dangers sanitaires. Le stage complétant ma formation
théorique pour l’obtention du CEAV en Santé Publique Vétérinaire, a pour objet d’élaborer la trame du schéma régional
de maîtrise des dangers sanitaires. Cela permettra dores et déjà d’identifier les axes stratégiques et de proposer des
actions opérationnelles dès que les textes réglementaires concernant la reconnaissance de l’ASR et le contenu du
schéma régional de maîtrise des dangers sanitaires seront publiés.
La méthode, identique pour toutes les filières, permet de présenter une hiérarchisation objective et argumentée,
s’appuyant sur des dires d’experts. L’outil a été élaboré par un groupe de travail et est spécifique à Midi-Pyrénées. Il se
présente sous la forme d’un tableau.
Après un recensement des dangers sanitaires concernant la filière donnée, la hiérarchisation s’obtient par la notation
d’un certain nombre d’indicateurs (sanitaires, économiques, environnementaux, sociétaux, efficacité des mesures de
lutte ... ). Chaque danger sanitaire obtient une note unique, permettant de le classer dans la liste. Cette note est obtenue
grâce à une formule qui double le poids de l’impact économique (pour la filière et pour l’exploitant) et retranche la note
des mesures de lutte le concernant. La notice en annexe présente les indicateurs pris en compte dans ce travail de
hiérarchisation, ainsi que les modalités d’attribution des notes.
L’étape suivante de l’élaboration du schéma régional de maitrise des dangers sanitaires est la proposition de mesures
collectives de lutte pour les dangers sanitaires prioritaires. Ce travail a été envisagé dans les filières pour lesquelles nous
avons eu le temps d’obtenir au cours des réunions successives une hiérarchisation complète et satisfaisante.
La réflexion a donc été initiée, dans le cadre de réunions de groupe de travail, pour l’ensemble des filières animales et
végétales présentes en Midi-Pyrénées:
- filières animales : bovins, petits ruminants, lait cru, équins, porcs, volailles/palmipèdes, abeilles, poissons, lapins ;
- filières végétales: arboriculture, viticulture, grandes cultures, cultures spéciales, horticulture et pépinières, prairies,
zones non agricoles, forêt.
Afin de noter correctement chaque indicateur, l’avis d’experts et de professionnels a semblé indispensable, afin
que le travail soit complet et le plus juste possible. Ainsi, pour chaque réunion de travail par filière ont été invités les
organismes à vocation sanitaire, les représentants des professionnels, les élus du réseau des chambres d’agriculture,
les professeurs de l’Ecole Nationale Vétérinaire de Toulouse (pour certaines filières animales), les instituts techniques ...
Le tableau suivant présente l’avancée des travaux et les suites prévues pour chaque filière
Bilan de la progression du travail par filière
148
Au cours de cette mission, je suis intervenue en tant que coordinatrice du projet, et d’interlocuteur pour l’ensemble
des participants à ces réunions. Mon travail a donc été de prévoir les réunions, d’effectuer les invitations, d’animer
certaines réunions, et d’assurer le bon déroulement de la suite des réunions, à savoir la transmission du tableau, outil de
hiérarchisation des dangers sanitaires, la rédaction des comptes-rendus des réunions, la compilation des modifications
apportées par chacun des intervenants. Un intervenant commun pour toutes les filières est nécessaire, pour assurer la
continuité du travail et la cohérence du raisonnement.
III. Discussion : limites, intérêt, prolongement
Le bilan de ce travail est globalement positif, malgré quelques points faibles.
L’application de cette méthode est en effet consommatrice de moyens, le nombre de réunions de travail s’élevant à 30
au cours du stage, et cela faisant intervenir un nombre important d’organismes et de personnes. La logistique est lourde
et il est nécessaire de nommer un coordinateur, qui assure le lien entre les différentes filières et garantit l’application
d’une méthode de travail unique.
La méthode semble tout de même robuste puisqu’elle offre une démarche identique pour toutes les filières et la plus
objective possible. Le travail est complet puisqu’il envisage toutes les filières agricoles de Midi-Pyrénées. De plus,
l’intervention d’un grand nombre d’experts et de professionnels rend le résultat final fiable et légitime. Les hiérarchisations
sont peu critiquables puisqu’elles ont été élaborées par les professionnels, les experts et les organismes sanitaires euxmêmes.
Cette démarche participative a permis d’informer les professionnels des modalités de mise en place de la réforme et
des enjeux qui les concernent directement. Les OVS deviennent l’interlocuteur unique de l’Etat, et reçoivent directement
les participations financières de l’Etat.
Les professionnels doivent donc se fédérer autour des OVS ; cela est globalement en place pour les filières animales,
mais nécessite une réorganisation des professionnels dans le domaine végétal autour de la FREDON.
Cependant, au delà de l’aspect technique, l’élaboration du schéma montre que d’autres facteurs influencent la réussite
du travail, tels que les aspects politiques, les tensions entre les organismes qui doivent travailler ensemble sur un
projet commun et coopérer, ou l’incertitude face à ce contexte de réforme. Enfin, il faut aussi adapter le calendrier aux
imprévus, telle que la suspension du travail par la FRGDS à cause du retard de reconnaissance des OVS au mois de
Mars 2014, qui a provoqué l’annulation de 7 réunions pour les filières animales.
Ainsi, ce travail de grande ampleur a permis de faire participer de nombreux professionnels et organismes sanitaires,
dans une coopération sans précédent. A l’issue des 4 mois de stage, le travail est incomplet mais il est cependant bien
initié et mérite d’être prolongé.
Les points clés de la réussite éventuelle de ce travail sont l’existence d’un coordinateur, point commun entre toutes les
filières et garant de l’unicité de la méthode, la reconnaissance de l’ASR afin de confirmer la légitimité des acteurs de
l’élaboration du schéma, la publication des textes définissant le contenu du schéma régional, la mise au point d’une
méthode commune aux domaines animaux et végétaux, robuste et la plus objective possible ainsi que l’adhésion des
professionnels à ce travail d’élaboration du schéma régional.
Les réunions du 19 juin ont permis de proposer au CROPSAV la formule appliquée afin d’obtenir la note finale pour
chaque danger sanitaire. Le travail de hiérarchisation doit être finalisé dans certaines filières, ainsi que les mesures
collectives à proposer. L’étape suivante est la compilation des listes hiérarchisées de chaque filière pour obtenir une liste
inter-filière. De plus, les propositions de mesures collectives de lutte devront être précisées (modalités de financement,
de mise en oeuvre, de contrôle). Enfin, ce travail s’achèvera par la rédaction du schéma et par sa proposition par l’ASR
au CROPSAV et au préfet de région, puis au CNOPSAV (Conseil National équivalent du CROPSAV) ainsi qu’au ministre
de l’Agriculture pour approbation.
Midi-Pyrénées étant la première région à initier cette démarche, ce travail serait également une base pour l’élaboration
des schémas dans les autres régions. Dans cette optique, une réunion d’information s’est déroulée le 18 juin 2014 en
présence de Mme SOUBEYRAN, chef du service de la prévention des risques sanitaires de la production primaire,
DGAL.
En conclusion, de nombreux facteurs influencent la réussite d’une réforme. Ce travail à l’échelon régional illustre
l’importance de nombreux points clés conditionnant l’aboutissement d’un projet de cette ampleur: une méthode
robuste, un coordinateur, l’appui des professionnels,
un accompagnement de la part de l’Etat dans cette réforme sans précédent. Malgré ces contraintes, les réformes
149
de l’Etat sont primordiales pour que celui ci reste efficient et adapté aux contraintes actuelles, qui ne tendent qu’à se
diversifier et à s’intensifier dans le domaine sanitaire.
Etude de l’offre d’éducation One Health en Asie du sud-est
Sabine DIDIERLAURENT, Inspectrice stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 4 avril au 25 juillet 2014 à l’Unité Agirs du CIRAD (Bureau de Bangkok) Sous la responsabilité de
Flavie GOUTARD (chercheur épidémiologiste, CIRAD Agirs) et Mathilde PAUL (enseignant chercheur, INP-ENV Toulouse)
Questions abordées par l’étude 182
L’Asie du sud-est a subi des crises sanitaires mondialement connues (épidémies de grippe aviaire, Syndrome
Respiratoire Aigu et Sévère ou SRAS..) et doit faire face à de nombreux enjeux liés à la santé.
En 2008, K.E. Jones and al démontrent par une étude rétrospective entre 1940 et 2004 que 60% des maladies
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
182
150
infectieuses humaines sont zoonotiques, avec une origine le plus souvent reconnue dans la faune sauvage (71,8%).
L’Asie du sud-est fait partie de ces zones appelées « hotspots » où le risque des émergences infectieuses est le plus
élevé.
De nombreuses études ont montré que des facteurs géographiques, démographiques, environnementaux, socioéconomiques et politiques entrent en ligne de compte. Pour expliquer et agir face à cette complexité des problèmes de
santé, le concept One Health montre la nécessité d’une approche pluridisciplinaire pour permettre une compréhension
intégrée et globale de la santé publique.
Ce concept d’une seule santé a des racines anciennes. Mais, c’est le vétérinaire Calvin Schwabe (1927- 2006) qui a
sans doute le plus promu le terme « une santé » et appelé pour une approche unifiée contre les zoonoses, par une
collaboration effective entre les médecines humaine et animale : « One medicine, One Health ».
Au début du 21e siècle, dans un contexte de menaces épidémiques, toujours d’actualité, telles que la fièvre hémorragique
Ebola, le SRAS et l’épidémie mondiale de grippe aviaire H5N1, la Wildlife Conservation Society publie en septembre
2004, les douze principes de Manhattan pour une approche internationale et interdisciplinaire. Ces 12 priorités doivent
permettre de combattre les menaces sanitaires et forment la base d’un concept « One Health, One World » en intégrant
des questions environnementales (dont la conservation des espèces) et socio-économiques (WCS 2004, A.Binot 2013).
En 2008, One Health devient une approche recommandée internationalement et une réalité politique, particulièrement
depuis l’engagement de la Food and Agriculture Organization (FAO), l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE)
et l’Organisation mondiale de la santé (OMS), contre les risques sanitaires existants à l’interface homme, animal et
environnement, renforcée par la note tripartite d’Hanoï en avril 2010 (FAO-OIE-WHO, 2010).
En parallèle, d’autres concepts d’approche intégrative de la santé (voir la définition dans la démarche utilisée) évoluent
depuis la fin des années 1990. D’une part, l’approche écosystémique de la santé, ou Ecohealth, englobe plusieurs
approches centrées sur les facteurs écosystémiques et socio-économiques qui altèrent la santé humaine et animale
(J.Zinsstag 2011, J.Lebel 2003). Et d’autre part, la santé internationale d’aide au développement des pays pauvres
prend l’appellation de « santé globale », en réponse à la globalisation (D. Kerouedan, 2013).
C’est dans ce contexte général et diversifié que prend place notre étude, dont l’objectif est de recenser les formations
fondées sur une approche holistique de la santé, appelée ou non One Health, proposées aux futurs professionnels
des pays de la région du sud-est asiatique. Cet état des lieux permettra de mieux connaitre le paysage dans lequel va
s’inscrire une nouvelle formation académique, le master InterRisk pour « l’évaluation et la gestion des risques sanitaires
à l’interface homme-animal-environnement», construit autour d’un partenariat rassemblant le centre de Coopération
Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement (CIRAD), l’université de Kasetsart (Bangkok,
Thaïlande) et l’école nationale vétérinaire de Toulouse (France).
I. La démarche utilisée dans l’étude des formations One Health :
Pour effectuer l’état des lieux des offres de formation académiques One Health en Asie du sud-est, la démarche suivie
a tout d’abord consisté à identifier les organismes de formation puis à étudier de manière précise la construction de
ces formations.
Plusieurs outils ont été mobilisés :
- les recherches en ligne d’abord sur les sites institutionnels, mais également par mots clés, - le questionnaire construit avec des indicateurs ciblés pour l’étude précise des formations, - les entretiens pour compléter et collecter de manière la plus exhaustive possible les questionnaires, et des questions
plus générales pour tenter d’appréhender les enjeux et les difficultés rencontrés à la mise en œuvre d’une formation
One Health. Pour orienter les recherches, je me suis appuyée sur la définition du concept One Health promue par les organisations
internationales pour définir des mots clef : - une formation interdisciplinaire ou transdisciplinaire signifie que différentes disciplines collaborent et se coordonnent
ensemble dans une direction et pour un résultat commun ; - une approche systémique, intégrative ou holistique de la santé : on reconnait et on étudie les différentes composantes
qui expliquent et influencent la santé humaine, comme un système complexe de facteurs interdépendants. C’est ce
qu’on appelle la pensée systémique de la santé qui étudie les liens et les interactions entre tous les facteurs.
- une formation intégrant des modules de santé humaine, animale et écosystémique avec des incursions socioéconomiques : cette agrégation de disciplines est également un critère de choix, même si la représentation de chacune
peut être très contrastée.
151
- L’étude de maladies le plus souvent infectieuses et zoonotiques, parfois émergentes ou ré- émergentes, transfrontalières
ou pandémiques voire menaçantes, liées à l’environnement biophysique, économique ou social, ou à fort impact sur
ces mêmes environnements.... Devant le foisonnement des universités de la région Asie du sud-est, nous avons réorienté les recherches en fonction
des organismes de financement internationaux. En effet, les formations One Health sont essentiellement mises en
place par des organisations étrangères en partenariat avec des universités régionales. C’est donc par les organismes
de financement (United States Agency for International Development USAID, Commission européenne...), les réseaux
ou les institutions chargées de la mise en œuvre des projets de développement (CIRAD, International livestock research
institute ou ILRI...) que j’ai conduit mes recherches. Cette méthode par recherche en ligne, questionnaire et entretiens m’a permis d’obtenir deux niveaux d’analyse dans
les résultats : - Une cartographie des acteurs qui gravitent autour des formations One Health (les financeurs, les organismes chargés
de la mise en œuvre des programmes, les réseaux et les universités proposant une formation One Health) - Une étude qualitative de la construction de 12 formations identifiées One Health.
II. Les résultats de l’étude :
A. Cartographie des acteurs impliqués dans les formations One Health
Dans ce domaine, les bailleurs de fond sont principalement occidentaux : américains et européens pour les plus
importants (jusqu’à 90% de l’aide mondiale à la santé, Commission européenne 2011), canadiens, australiens et
suisses dans une moindre mesure. Ils se différencient parfois par leur vision du concept One Health et par leur stratégie
d’action.
Le panorama des acteurs gravitant autour des formations académiques One Health montre l’engouement et la pleine
expansion de cette nouvelle vision holistique de la santé humaine et animale. Cette dynamique a engendré une multitude
de projets et réseaux en pleine évolution qu’il est parfois difficile de caractériser en détail.
C’est à partir de cette cartographie que nous avons choisi d’étudier plus précisément 12 formations organisées sur 4
pays : la Thaïlande, le Vietnam, l’Indonésie et le Cambodge.
B. Etude approfondie de la construction des formations identifiées « One Health » :
12 formations sur des universités de Chiang Maï et Bangkok (Thaïlande), Hanoï (Vietnam), Djakarta et Yogyakarta
(Indonésie) et Phnom Penh (Cambodge) ont été étudiées selon des critères précis sur le montage de la formation (durée
prévue, structure d’appui, niveau pré requis...), la construction des modules (les disciplines enseignées, les méthodes
d’enseignement utilisées, les intervenants...) et leur financement (frais de scolarité, bourses, subventions).
Les résultats permettent d’apporter des éléments intéressants ; ceux retranscrits ici sont les plus parlants :
- Les formations sont le plus souvent récentes (ou adaptées récemment), construites à partir de projets et de
financements internationaux, mais également grâce à des relations privilégiées entre deux universités (exemple des
universités de Chiang Maï et du Minnesota). - Elles sont soit longues et de niveau supérieur (minimum 2 ans, niveau Master), soit ce sont des modules intégrés dans
un semestre universitaire, en second cycle (undergraduate). - Sur le profil des étudiants acceptés et inscrits (prévus/réels), 8 formations sont ouvertes de manière très large à diverses
branches disciplinaires, le plus souvent relatives à la santé (médecine, santé publique, vétérinaire, sciences médicales
appliquées, pharmacie...), aux sciences naturelles ou environnementales. Sur ces 8 formations, celles de courte durée
réussissent à attirer des profils très divers, alors que les formations longues attirent 1 à 2 branches seulement. - Parmi les disciplines enseignées, les modules environnementaux sont bien représentés, alors que les sciences
économiques et sociales ne sont enseignées que dans la moitié des formations. Le leadership et la communication sont
parfois représentés, alors que les outils informatiques (bases de données, Systèmes d’Informations Géographiques) et
l’anglais sont peu présents. - Toutes les formations organisent des sorties de terrain : de 1 journée de visite ou d’observation (formations courtes
et modules undergraduate le plus souvent), à quelques semaines d’enquêtes de terrain voire plusieurs mois de stage.
- Les enseignants sont souvent de provenances diverses, parfois d’autres facultés, d’autres universités ou de
nationalités différentes. 152
- Les frais de scolarité peuvent être élevés pour les formations longues (jusqu’à 18 000 euros pour deux ans), avec très
souvent des systèmes d’attribution de bourses ou des aides directes. Les résultats obtenus sur le montage des 12 formations qualifiées One Health, la construction des modules qui les
composent et leur financement spécifique font ressortir des caractéristiques communes ou divergentes. Ces dernières
nous aident à discuter des bonnes pratiques et des contraintes liées à la mise en œuvre de telles formations pour
conserver ce qui me parait être des atouts. III. Discussion : les bonnes pratiques et les contraintes liées à la mise en œuvre des formations One Health
Globalement, les formations One Health sont plutôt récentes ou modifiées récemment (depuis 2009) et suivent une
logique de projet, c’est-à-dire mises en place par des financements extérieurs en appui sur des universités locales. Ce
constat s’explique très facilement par l’évolution internationale récente du concept One Health et l’apport actuel des
financements.
Mais il engendre également une problématique relative à la formation des enseignants. Comment mettre en place des
formations universitaires durables lorsque le concept est nouveau et encore peu appliqué ? Notre étude montre que
plusieurs solutions se mettent en place dans les différentes formations, que ce soit par :
- l’organisation d’ateliers techniques ou pratiques entre les universités (activité des réseaux), - l’édition de nombreux manuels d’apprentissage et de cas d’étude, en anglais mais également dans les différentes
langues locales (thaï, bahasa et vietnamien), - la logique d’apprentissage par la pratique (« learning by doing »), - des relations privilégiées entre deux universités permettent l’échange de méthodes d’enseignement et la formation
réciproque d’enseignants. Mais actuellement, le concept One Health n’étant pas encore très étendu dans les différentes disciplines et les différents
secteurs (entretiens 13, A.Leboeuf 2011), la formation des enseignants est liée de manière importante à la bonne
volonté des personnes sans qu’il n’y ait encore de reconnaissance particulière. Une autre problématique importante est la réalité d’une interdisciplinarité plutôt timide :
Les résultats de l’étude, concernant les profils d’étudiants attendus puis réels, montrent que les formations dites
longues (minimum 2 ans) sont en général destinées à des étudiants de troisième cycle (master minimum), alors que les
formations universitaires courtes sont plutôt intégrées dans des formations de second cycle (undergraduate).
De plus, bien que toutes les formations souhaitent s’ouvrir à différentes disciplines (médicales, vétérinaires,
biologistes...) pour assurer l’interdisciplinarité promue, nos résultats montrent que ce sont les formations undergraduate
qui y arrivent le mieux. On remarque également que la médecine humaine générale est finalement peu représentée
parmi les étudiants One Health. L’implication des médecins apparait alors comme un des premiers challenges de ces
formations. La communication vers les facultés de médecine humaine et l’activité de plaidoyer des réseaux One Health
vers cette discipline devraient être accentuées. D’autres remarques peuvent être exploitées, notamment sur un enseignement plus intégré des sciences sociales (dans
chaque module, en fonction du sujet et avec des intervenants présentant un double bagage disciplinaire), l’intégration
de modules sur le management de projet ou d’équipe (pour les formations de niveau supérieur) et la mise en pratique
de manière participative (« Learning by doing »), impliquant les communautés et les décideurs locaux dans la résolution
de leurs problèmes de santé.
La durabilité financière des formations One Health est un vrai challenge, qui nécessite la reconnaissance, par les
universités et le gouvernement, du bienfondé et des avantages qu’apportent ces formations. Le secteur privé, en
revanche, semble particulièrement intéressé par l’apprentissage des maladies d’origine alimentaire et les règlements
liés à l’exportation, ce qui correspond au paysage économique des pays d’Asie du sud-est.
CONCLUSION
En étudiant les nombreux acteurs qui gravitent autour du concept One Health et les formations proposées, j’ai pu
apprécier le réel engouement qu’il suscite dans la région de l’Asie du sud-est. De nombreux ateliers, séminaires,
formations courtes et ponctuelles sont proposés sur ce thème mais finalement l’offre d’éducation académique reste
limitée : seulement 12 formations, organisées dans 4 pays, ont au total été étudiées de manière plus approfondie.
Ce travail a permis d’apporter un état des lieux des formations académiques fondées sur le concept One healh dans
153
la région du sud-est asiatique et quelques éclairages sur les bonnes pratiques et les difficultés pour la construction de
ces formations. C’est à ma connaissance la seule étude à le faire, même si elle reste partielle (tous les pays n’ont pas
pu être explorés) et ponctuelle dans un système en pleine évolution.
Le concept semble plaire, la conviction de la nécessité de cette nouvelle vision de la santé est forte. C’est sans doute ce
qui explique l’expansion internationale des nouvelles approches holistiques de la santé. Mais d’autres études et mises
en pratique seront nécessaires pour étendre ce nouveau paradigme.
BIBLIOGRAPHIE
Commission européenne, « Coopération au développement: l’Union européenne et les Etats-Unis joignent leurs forces
sur la santé mondiale et pour une plus grande efficacité de l’aide », Communiqué de presse. Brussels, 10 juin 2011.
FAO-OIE-WHO collaboration, « Sharing responsibilities and coordinating global activities to address Health risks at the
animal-human-ecosystems interfaces. », A tripartite concept note, Hanoï, April 2010.
JONES K.E. and al, « Global trends in emerging infectious diseases », Nature, vol 451, 21 February 2008.
KEROUEDAN D., « Globaliser n’est pas sans risques pour les populations les plus pauvres du monde. Émergence de
la « Global Health » en Afrique subsaharienne », Revue Tiers Monde, n°215, juillet-septembre 2013.
LEBEL J., « Un focus. La Santé une approche écosystémique », Centre de recherches pour le développement
international, 2003.
LEBOEUF A., Making Sense of One Health. Cooperating at the human-Animal-Ecosystem Health interface, Health and
environment reports n°7, les rapports Ifri, avril 2011.
ZINSSTAG J., « From «one medicine» to «one Health» and systemic approaches to Health and well-being », Preventive
Veterinary Medicine 101 (2011), p.148-156.
Réalisation du dossier OIE pour la reconnaissance du statut
indemne de la France en peste porcine classique
Anne-Charlotte DUROUX, Inspectrice élève de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2015
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 29 avril au 25 juillet 2014 à la DGAL du MAAF sous la responsabilité de Pierre PRIMOT, chef
du Bureau des Négociations Européennes et Multilatérales, Sous-direction des Affaires Sanitaires Européennes et
Internationales.
Questions abordées par l’étude 183
L’Organisation Mondiale de la Santé Animale (OIE) a le mandat de reconnaitre officiellement des pays ou zones indemnes
de maladies dans le monde. Ce mandat lui a été conféré par l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) en 1998,
à des fins commerciales. En effet un pays déclaré officiellement indemne peut exporter vers d’autres zones indemnes
du monde sans avoir à démontrer son statut à chaque pays vers lequel il veut exporter. En France, les derniers cas de
peste porcine classique remontent à 2002 pour les suidés domestiques et 2007 pour les sangliers sauvages.
Dans ce contexte et dans le cadre de ma formation d’Inspecteur-Elève de la Santé Publique Vétérinaire à l’ENSV, le
ministère m’a chargée d’élaborer le dossier OIE de demande de statut indemne en peste porcine classique (PPC) pour
la France. Il s’agit d’un dossier permettant de démontrer l’éradication de la peste porcine classique du territoire français
ainsi que l’efficacité des services vétérinaires français. J’ai donc réalisé un stage de trois mois au sein de la Direction
Générale de l’Alimentation (DGAl), située rue de Vaugirard à Paris. Cette direction du Ministère de l’Agriculture, de
l’Agroalimentaire et de la Forêt, constitue l’échelon central des services vétérinaires français. J’étais rattachée au Bureau
des Négociations Européennes et Multilatérales (BNEM), de la Sous-direction des Affaires Sanitaires Européennes et
Internationales (SDASEI). A la suite de ce dossier, j’ai également élaboré celui de demande de reconnaissance de statut
indemne en péripneumonie contagieuse bovine (PPCB).
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
183
154
Utilité de réaliser le dossier de demande de statut indemne en PPC
La reconnaissance officielle du statut indemne d’un pays a une grande importance économique pour ce dernier,
qui, en gagnant de cette manière la confiance de ses partenaires commerciaux et de la communauté internationale,
peut prétendre à une exportation vers d’autres pays indemnes. Il s’agit là d’un lien juridique fort entre les normes
établies par l’OIE et le rôle de l’OMC dans l’application de l’Accord sur les mesures SPS (sanitaires et phytosanitaires).
En cas de conflit d’intérêt entre deux pays, l’OMC se base alors sur les normes de l’OIE pour régler le différend.
En faisant la demande de statut indemne en peste porcine classique, la France fait ainsi la demande d’alléger sa
procédure d’exportation de porcs vivants et des produits à base de porc dans le monde. L’OIE étant une organisation
de reconnaissance internationale, ses appréciations sont reconnues par ses 180 pays membres. Les procédures
d’exportation sont ainsi allégées car le pays a déjà prouvé à l’OIE la compétence de ses services vétérinaires, de ses
plans d’urgence, de ses laboratoires... et ne recommence pas ce travail à chaque fois qu’il souhaite exporter.
Pour accéder au statut indemne, les pays membres de l’OIE doivent remplir un questionnaire établi spécifiquement
et adapté à chacune des maladies à statut (peste équine, peste porcine classique, peste des petits ruminants,
péripneumonie contagieuse bovine et risque d’encéphalopathie spongiforme bovine).
La procédure de reconnaissance du statut indemne par l’OIE est basée sur la confidentialité des informations fournies
par les pays et sur la bonne gestion des conflits d’intérêt. Tout d’abord, le service de l’OIE en charge des statuts
sanitaires des pays effectue un examen préliminaire du dossier. Ensuite, le dossier est confié à un groupe ad hoc
puis à la Commission scientifique de l’OIE. Tous les deux évaluent le dossier et donnent un avis favorable ou non.
Avant chaque Session générale, le Directeur général de l’OIE diffuse à tous les délégués une liste des pays membres
pour lesquels la Commission scientifique a recommandé de reconnaître le statut indemne officiel. Les délégués ont
60 jours pour formuler des commentaires concernant cette liste. C’est lors de la Session générale que l’Assemblée
mondiale reconnaît officiellement et approuve les nouveaux statuts sanitaires, sur la base des recommandations de la
Commission scientifique et des éventuels commentaires des pays membres.
Méthode employée pour la réalisation du dossier
Afin de rédiger ce dossier et de répondre au questionnaire de l’OIE, j’ai divisé mon travail en plusieurs étapes. Tout
d’abord, en amont de la rédaction, il est important de s’imprégner de la maladie traitée : la peste porcine classique.
Etre à l’aise sur l’étiologie, l’épidémiologie et le diagnostic de la maladie est une étape très importante car de ces bases
scientifiques découlent toute la réglementation, les mesures de lutte et de surveillance de la maladie. Cela a donc été
la première partie de mon travail, c’est-à-dire me plonger dans les caractéristiques de la maladie. Je me suis ensuite
attelée à la réglementation européenne et française relative à la PPC afin de pouvoir résumer toute cette législation.
En me basant sur le chapitre 15.2 du Code terrestre, j’ai alors pu commencer à répondre aux différents points requis
par le questionnaire :
- Introduction : Il est demandé de fournir une description générale de la géographie du pays, des frontières communes
et des éléments en rapport avec une introduction potentielle de la maladie, ainsi qu’une description générale du secteur
de l’élevage porcin en France. - Système vétérinaire : L’OIE demande de fournir une liste de la législation vétérinaire applicable à la peste porcine
classique. Elle demande également de décrire l’organisation des services vétérinaires dans le pays ainsi que le rôle des
vétérinaires du secteur privé. Enfin il est demandé de détailler le rôle des exploitants, de l’industrie, des groupes non
gouvernementaux dans la surveillance et le contrôle de la maladie. - Eradication de la peste porcine classique : L’OIE requiert de reprendre l’historique de l’éradication de la maladie, les
méthodes et la stratégie utilisées. Elle demande de détailler la méthode d’identification et de contrôle des déplacements
de porcs dans le pays. - Diagnostic de la peste porcine classique : Il est demandé de détailler les méthodes de diagnostic biologique réalisées
dans le pays, la procédure d’accréditation des laboratoires, les mesures de biosécurité et les tests effectués. - Surveillance de la peste porcine classique : Il est demandé de détailler la surveillance clinique, lésionnelle, sérologique
et virologique de la maladie ; de fournir une description de la répartition des cheptels de porcins dans le pays ainsi que
la taille et la répartition des sangliers sauvages ; et enfin de recenser les abattoirs et les centre de regroupement de
porcins. - Prévention de la peste porcine classique : L’OIE demande de décrire les actions de collaboration et d’échanges
d’informations avec les pays voisins ; d’exposer les procédures de contrôle à l’importation des animaux vivants, des
denrées alimentaires d’origine animale et du matériel génétique.
- Mesures de contrôle et plans d’urgence : Elle demande d’exposer quelles sont les mesures mises en œuvre en cas
de suspicion et/ou de confirmation d’un foyer de peste porcine classique dans le pays.
155
- Conformité aux dispositions du Code terrestre : Le CVO de la France doit rédiger une déclaration attestant qu’aucun
foyer n’a été constaté depuis 12 mois, que la vaccination n’est pas pratiquée et que les procédures d’importation sont
bien en accord avec les normes de l’OIE.
Devoir répondre à toutes ces questions a été pour moi très formateur. Cela m’a permis de devoir comprendre et
d’être suffisamment à l’aise avec tous ces points afin d’en rédiger une synthèse explicative et compréhensible par des
personnes naïves quant au système français. Il m’a également été demandé à ce que le dossier soit très synthétique
et concis, avec des phrases courtes, afin de faciliter le travail des experts qui vont étudier la fiabilité du dossier. En
effet, premièrement ils vont devoir traiter de nombreux dossiers en parallèle et deuxièmement mon dossier est amené
à être traduit en anglais. Une rédaction simple permet une traduction plus proche de la rédaction originale et facilite la
compréhension.
Afin de rassembler toutes ces informations, je me suis basée sur l’expertise fournie par plusieurs bureaux de la DGAl
: le bureau des négociations européennes et multilatérales (BNEM), le bureau de santé animale (BSA), le service
d’inspection vétérinaire et phytosanitaire aux frontières (SIVEP), le bureau de l’exportation vers les pays tiers (BEPT)
et le bureau de l’évaluation scientifique, de la recherche et des laboratoires (BERL). J’ai également eu accès à des
renseignements concernant les sangliers sauvages en contactant l’ONCFS. De plus, j’ai réalisé une visite à la DDPP du
Bas-Rhin afin de mieux appréhender ce qu’il s’est passé sur le terrain pendant toute la campagne d’éradication de la
PPC dans le département. Après avoir rencontré toutes ces parties prenantes, mon travail a consisté à effectuer le tri
et la synthèse des informations recueillies. Les bureaux de la DGAl ont finalement relu la partie rédigée concernant leur
domaine de compétence afin d’en vérifier l’exactitude.
Pour m’aider dans la réalisation du dossier, la DGAl m’a organisé plusieurs rencontres en dehors de leurs services.
J’ai ainsi pu me rendre au siège de l’OIE au tout début de mon stage et y rencontrer la responsable reconnaissance
des statuts sanitaires des pays. Cet entretien m’a permis d’avoir une idée claire du travail attendu par l’OIE et de la
procédure de reconnaissance des statuts. La Session générale de l’OIE a eu lieu pendant mon stage et le fait de pouvoir
y assister a également été très formateur. J’ai pu appréhender les suites qui seront données à mon dossier s’il est retenu
par la Commission scientifique, ainsi que l’importance des réunions internationales plénières et surtout bilatérales. Enfin
je me suis aussi rendue dans la DDPP du Bas-Rhin où les derniers cas de PPC chez les sangliers sauvages avaient
été enregistrés en 2007. Cette rencontre m’a également beaucoup appris sur la façon dont la maladie a été éradiquée
d’Alsace, et plus particulièrement sur l’importance de la coopération entre les différents acteurs touchés par le plan de
lutte contre la PPC. Les chasseurs ont ainsi joué un rôle prédominant dans l’éradication de la maladie. Des relations
de confiance se sont tissées entre les agents de la DDPP, les chasseurs et les agents de l’ONCFS. J’ai ainsi pu me
rendre compte que la communication entre tous les acteurs de la santé publique en cas de crise est une étape clé de
la réussite.
Discussion sur les limites et les intérêts des statuts indemnes de l’OIE
L’intérêt d’accéder au statut indemne permet au pays en question de s’ouvrir au marché de l’exportation et de maintenir
ce marché. En effet, les normes établies par l’OIE sont reconnues comme références mondiales par l’OMC. De plus,
l’Accord sur les mesures SPS établit clairement que les mesures sanitaires et phytosanitaires mises en œuvre par les
pays ne doivent pas constituer une restriction au commerce mondial. Pourtant certains pays ne reconnaissent pas les
statuts de l’OIE et déguisent en mesures sanitaires et phytosanitaire des mesures protectionnistes. Nous pourrions à
ce moment-là nous poser la question de l’intérêt de réaliser les dossiers de reconnaissance officielle de statut indemne
par l’OIE si ceux-ci ne sont pas respectés au final.
Cependant le fait d’avoir le statut indemne de l’OIE confère au pays exportateur lésé une certaine légitimité pour
attaquer à l’OMC le pays protectionniste. En effet celle-ci condamne les entraves au commerce. Un pays en conformité
avec cette réglementation a alors normalement toutes les cartes en main pour faire valoir ses intérêts commerciaux. Les
pays comme la France ont donc toujours intérêt à accéder à la reconnaissance officielle des statuts indemnes par l’OIE.
Difficultés rencontrées
Les objectifs de mon stage m’ont été exposés très clairement dès le début, notamment les attentes de l’OIE. Un des
objectifs majeurs, et qui s’est révélé être une difficulté lors de l’élaboration du dossier, a été d’adapter le contexte
français au vocabulaire et aux normes de langage internationales. En effet, les experts du groupe ad hoc ne connaissent
souvent ni le système français ni le système européen, mais ils doivent pouvoir juger des compétences sanitaires de la
France à travers le dossier. De plus, le questionnaire a une portée mondiale : il est rédigé pour tous les pays membres
de l’OIE. Il faut donc adapter au contexte européen et français les questions posées de façon similaire à tous les pays
du monde.
De plus il m’a fallu être très concise dans ma rédaction et avoir une formulation simple. Je disposais d’un grand nombre
156
d’informations que j’ai dû trier, classer par importance et synthétiser. Il m’a parfois été difficile d’accéder aux données
requises par l’OIE car certaines de ces informations demandaient un traitement des données de la part des bureaux de
la DGAl avant que je puisse les exploiter.
Enfin la dernière difficulté à laquelle j’ai été confrontée a été de concilier un dossier officiel écrit au nom de la France
avec un sujet de mémoire et de thèse d’exercice vétérinaire. La rédaction d’une thèse ou d’un mémoire requiert une
rigueur importante dans la citation des sources et des références bibliographiques. Au contraire, lorsqu’on rédige un
dossier officiel au nom de l’Etat français, les données n’ont pas besoin d’être référencées car la source et le rédacteur
sont la même entité : « la France ». La gestion des sources et de la bibliographie n’a donc pas été une tâche aisée.
Conclusion et recommandations
Ce stage a été pour moi très enrichissant. Devoir réaliser un dossier de demande de statut indemne pour la DGAl m’a
permis de me familiariser avec de nombreux sujets. En effet le questionnaire de l’OIE demande entre autres d’exposer
l’organisation des services vétérinaires en France, le fonctionnement des laboratoires agréés, le système de surveillance,
les mesures de contrôle à l’importation, les plans d’urgence. Tous ces points m’ont demandé de me plonger dans la
réglementation européenne et française et d’être à l’aise sur ces sujets afin de pouvoir en faire le résumé en quelques
pages. Ces points se recoupent souvent entre les maladies animales et servent de base à la gestion d’autres maladies
émergentes. Par conséquent connaître les bases de la réglementation sur ces sujets a été pour moi une véritable
formation pour la suite.
La réalisation du dossier m’a également donné l’occasion d’assister à la Session générale de l’OIE. J’ai pu assister aux
séances plénières et comprendre le système d’élaboration des normes de l’OIE. Aussi, j’ai pu appréhender l’importance
de ce type d’évènement pour les réunions bilatérales organisées pour l’occasion, les discussions commerciales
parallèles à la Session générale et l’importance d’entretenir son réseau. Ma visite à la DDPP du Bas-Rhin a également
été très enrichissante de part l’approche plus orientée vers terrain qu’elle m’a laissée entrevoir. J’ai beaucoup appris sur
l’organisation d’une cellule de crise et notamment sur l’importance de la sensibilisation et de la communication entre
les différents acteurs de la santé publique, notamment en période de crise.
De plus, travailler au centre de la DGAl m’a permis d’échanger avec les agents des services vétérinaires centraux et
de comprendre certaines problématiques, notamment dans l’exportation des produits d’origine animale vers les pays
tiers. Ceci m’a fait soulever un point concernant l’intérêt des statuts indemnes qui peut poser problème. En effet, une
fois le statut indemne reconnu officiellement pour un pays, le système ne fonctionne que si les autres pays du monde
reconnaissent et respectent les statuts de l’OIE. Certains pays ne respectent pas les statuts délivrés par l’OIE et cachent
des mesures protectionnistes derrière des mesures sanitaires et phytosanitaires.
Enfin, répondre à ce questionnaire m’a permis de dégager quelques recommandations à l’élaboration de ce modèle de
dossier. J’ai relevé l’importance de bien connaître la maladie traitée, l’importance de maitriser la réglementation relative
à cette maladie, les bénéfices du travail en équipe et notamment les bénéfices de mutualiser les connaissances et de
partager les parties rédigées sur le même sujet dans le cadre d’autres dossiers.
Mise en place de procédures internes pour la gestion des
suspicions de toxi- infections alimentaires collectives (TIAC)
et des non-conformités d’origine alimentaire à la Direction
Départementale de Protection des Populations de la Loire
Anaïs FLEMING, Inspectrice élève de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2015
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 3 mars au 20 juin 2014 à la DDPP de la Loire sous la responsabilité d’Anne COSTAZ, cheffe du
service «produits et services agro-alimentaires ».
157
Questions abordées par l’étude 184
La question de l’alimentation a toujours été au cœur des préoccupations sociétales. La problématique actuelle pour
les pays développés ne concerne plus la quantité, mais bien la qualité de la nourriture. Cette qualité comprend deux
dimensions : sanitaire et organoleptique.
L’aspect sanitaire de l’alimentation est essentiel : les aliments peuvent, en effet, être des vecteurs d’agents pathogènes
et donc sources de maladies. Les toxi-infections alimentaires collectives (TIAC) que l’on définit généralement comme
«l’apparition d’au moins deux cas similaires d’une symptomatologie en général gastro-intestinale, dont on peut rapporter
la cause à une même origine alimentaire » en sont un exemple. L’Union européenne a cherché à maitriser ces dangers
en responsabilisant les professionnels du secteur agro-alimentaire via les textes réglementaires du Paquet Hygiène :
les professionnels doivent ainsi prévenir les services publics dès lors qu’ils considèrent que leurs produits pourraient
être dangereux pour la santé des consommateurs : c’est ce qu’on appelle les non-conformités. Ces non-conformités
peuvent devenir des alertes si les autorités publiques estiment que les denrées sont effectivement dangereuses : des
mesures de gestion doivent alors être mises en place afin de les soustraire de la consommation.
Chaque département ayant ses spécificités, les textes réglementaires et infra-réglementaires d’origine communautaire
ou nationale doivent la plupart du temps être déclinées en instructions permettant la gestion à l’échelle locale. C’est
dans cette démarche que des procédures internes sont rédigées. Les TIAC et les non-conformités alimentaires sont
des situations à traiter en urgence puisqu’elles peuvent avoir de lourdes conséquences sur la santé publique: les
procédures de gestion mises en place doivent être très opérationnelles. C’est dans le cadre de rédaction de procédures
internes relatives à la gestion des suspicions de TIAC et des alertes d’origine alimentaire à la Direction départementale
de protection des populations (DDPP) de la Loire que s’inscrit ce travail.
1- Contexte et enjeux pour la structure. Objectifs de la mission.
Les comportements alimentaires ont largement évolué dans notre pays pendant la deuxième moitié du XXème siècle
(augmentation du nombre des repas consommés en dehors des foyers, en particulier). En réponse à ces changements
d’habitudes alimentaires, de nouveaux dangers sanitaires transmissibles par les aliments sont apparus. Le nombre
de personnes sensibles à différentes infections est en augmentation (population vieillissante, chimiothérapies etc...).
Le consommateur cherche également à avoir accès à une alimentation plus sure. Le coût économique des TIAC et
des alertes est également important à prendre en compte (pour l’Etat mais aussi pour les professionnels) et certaines
situations de crise peuvent même conduire à des tensions diplomatiques. Dans ce contexte social, économique et
politique, la gestion des suspicions de TIAC et des alertes d’origine alimentaire est donc une priorité pour les services
sanitaires de l’Etat.
La Loire est le premier département agro-alimentaire de la région Rhône-Alpes avec 800 entreprises et 7600 salariés.
Les établissements de production de charcuterie y sont nombreux (on y retrouve notamment l’entreprise Aoste®) : la
DDPP de la Loire gère donc régulièrement des non–conformités d’origine alimentaire sur des produits de charcuterie.
Le département héberge également une usine du groupe Nestlé Purina® : la DDPP de la Loire a ainsi été amenée à
gérer plusieurs non-conformités en alimentation animale. Le département est également le premier producteur de lait
de la région Rhône-Alpes (Candia®). Le fromager-affineur Mons® implanté dans le département constitue lui aussi une
source conséquente de non-conformités pour la DDPP de la Loire. Saint-Étienne est également la ville d’origine du
groupe Casino® ce qui explique le nombre important de notifications de non-conformités de la part de ce distributeur.
Le département de la Loire reste un département rural avec une production fermière importante qui représente un
risque non négligeable pour la santé publique. Le service produits et services agro-alimentaires (PSAA) de la DDPP
de la Loire gère en moyenne 13 suspicions de TIAC par an mais un agent pathogène n’est retrouvé de façon certaine
que dans moins d’un cas sur trois. Le nombre de cas humains de listériose investigués par le service varie entre 0 et 3
par an. Le service gère également 27 non-conformités d’origine alimentaire en moyenne par an, mais il semblerait que
la forte augmentation observée pendant l’année 2013 (42 non-conformités gérées) se confirme pour l’année 2014 (15
non-conformités gérées de janvier à mai).
Les TIAC et les alertes relatives aux produits alimentaires sont des urgences et des priorités d’action pour les DD(CS)PP
puisqu’elles sont directement en lien avec la santé humaine. Il n’existe pourtant pas d’instruction nationale de gestion
pratique, ni pour les TIAC, ni pour les alertes «produits alimentaires» et chaque DD(CS)PP doit donc mettre en place des
instructions ou procédures internes qui seront adaptées à sa propre organisation (procédures d’astreintes par exemple).
La mise en place de procédures internes permet de regrouper et d’avoir accès aux informations même si l’agent en
charge de la gestion n’est pas présent. Le regroupement des informations peut aussi faciliter la réalisation des bilans
statistiques (utiles pour les bilans annuels d’activité et la communication auprès des partenaires). Ces procédures
formalisées permettent de mettre en place une méthode de travail harmonisée, ce qui participe à la cohérence de la
structure, importante en cas de médiatisation. Elles pourraient permettre de répondre à d’éventuels recours en justice
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
184
158
en justifiant des actions mises en œuvre par la DD(CS)PP.
Vus les enjeux que représentent la gestion des TIAC et des non-conformités d’origine alimentaire pour la DDPP de la
Loire, il était important de créer ou de mettre à jour les procédures internes de gestion de ces deux situations d’urgence
: les objectifs de la mission étaient donc de réaliser des procédures les plus complètes possibles, qui restaient
opérationnelles, afin de faciliter le travail des agents et ainsi rendre la gestion la plus rapide et la plus efficiente possible.
La mission comprenait également un objectif de communication : il fallait en effet envisager la diffusion des procédures
afin qu’elles soient connues des agents et des cadres d’astreinte, condition minimale pour qu’elles soient utilisées. Au
cours du stage, il est également paru important de mettre en place une procédure dans le cadre de la gestion des cas
humains de listériose qui constituent des situations délicates et pour lesquelles il n’existait aucune mesure écrite dans
le service.
2- Méthode retenue et principaux résultats.
Un premier travail a consisté à faire le point sur les documents existants au sein de la structure en s’appuyant sur les
documents informatiques présents à la fois sur le réseau du service PSAA et sur l’intranet de la DDPP ainsi que sur les
archives papiers du service. L’étude des archives a, entre autres, permis de réaliser les bilans statistiques des gestions
des suspicions de TIAC et de non-conformités alimentaires du service PSAA pour les années 2012 et 2013 (bilans
pouvant servir aux bilans annuels du service et à sa communication).
Une recherche documentaire a ensuite permis de faire le point sur le cadre réglementaire et infra- réglementaire entourant
la gestion des suspicions de TIAC, des cas humains de listériose et des non- conformités d’origine alimentaire. La plupart
des documents ont été trouvés sur les sites internet et intranet du Ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de
la forêt (MAAF) et par l’intermédiaire des bases de données Galatée (côté Direction générale de l’alimentation, DGAL)
et Pythie (côté Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, DGCCRF).
Les instructions internes pour la gestion des suspicions de TIAC et de non-conformités alimentaires des DDPP des
départements du Rhône, de la Savoie et de l’Ardèche ont été récupérées. La procédure de l’Agence régionale de santé
(ARS, partenaire incontournable dès lors que la santé humaine est impliquée, ce qui est le cas pour les suspicions de
TIAC, et les non-conformités d’origine alimentaire) présentant la conduite que l’agence doit tenir en cas de TIAC a
également été obtenue et exploitée.
Le stage se déroulant au sein même du service, il a été possible de découvrir comment se faisait la gestion administrative
des suspicions de TIAC et des non-conformités alimentaires par les agents concernés (échanges avec les partenaires
: administrations centrales, ARS, Service communal d’hygiène et de santé (SCHS), laboratoires d’analyses ; utilisation
des applications métier : Sigal (côté DGAL), SORA et l’application « alertes et signalements » (côté DGCCRF) ;
archivage des informations etc...). Plusieurs sorties sur le terrain m’ont permis de voir comment les agents travaillaient
(3 inspections de restaurants suite à des suspicions de TIAC dont une, avec prélèvements alimentaires ; 1 inspection
d’un établissement impliqué dans une alerte consécutive à des cas humains de salmonellose).
Quatre procédures internes à la DDPP de la Loire ont ainsi été rédigées : une procédure de gestion des TIAC en cas
d’astreinte (pour les cadres membres du comité de direction), une procédure de gestion des TIAC par les agents du
service PSAA (en routine), une procédure de gestion des non-conformités d’origine alimentaire par les agents du service
PSAA et une procédure de gestion des cas humains de listériose (cas neuro-méningés sporadiques ou cas groupés
quelque soit la forme : neuro-méningée, materno-néonatale ou bactériémique). Ces procédures sont regroupées dans
des dossiers informatiques comprenant un ensemble de documents nécessaires à la gestion des situations. Dans
tous les cas, il existe un document word d’instructions générales qui renvoie aux autres documents du dossier. Les
procédures de gestion des TIAC et des non-conformités alimentaires destinées aux agents du service PSAA contiennent
une « fiche réflexe » qui résume et simplifie les instructions générales: les agents y retrouvent les étapes incontournables
de la gestion. Les documents contenus dans les dossiers sont de natures diverses : outils pédagogiques (logigramme
d’aide à la détermination des mesures à mettre en place sur les produits en cas de non-conformité, arbre étiologique
en cas de TIAC, tableau récapitulatif des caractéristiques des agents biologiques à l’origine de TIAC, fiche récapitulant
les étapes pour la gestion des TIAC dans Sigal, etc...), des documents types, pré-remplis, permettant d’accélérer le
travail des agents (modèle d’arrêté préfectoral de fermeture d’urgence, modèle d’accusé-réception de la notification
d’une non-conformité de la part d’un professionnel, modèles de PV de prise ou de restitution de documents pour
des originaux prélevés dans le cadre d’une enquête de traçabilité, fiches commémoratives pour accompagner les
prélèvements, etc...), des annuaires avec les coordonnées des différents partenaires, des fiches récapitulant le cadre
réglementaire et infra-réglementaire, etc...
La réalisation de ces procédures a également permis de mettre en place ou de formaliser les relations avec certains
partenaires du service PSAA internes à la DDPP comme le service « Populations animales » et le service comptabilité
ou, externes comme des laboratoires d’analyses ou l’ARS.
159
Ces procédures ont ensuite été présentées aux agents du service. Cela a été l’occasion de prendre en compte leurs
remarques et a conduit à la rédaction d’une procédure « allégée » (appelée « fiche réflexe») pour la gestion des TIAC
et des alertes : les agents peuvent l’utiliser dans l’urgence car elle ne reprend que les points essentiels des actions à
réaliser. La procédure de gestion des TIAC en cas d’astreinte a été présentée aux cadres d’astreinte qui, pour certains,
n’avaient aucune notion sur le sujet (toutes les personnes d’astreinte n’ont en effet pas forcement de formation
scientifique). Cette présentation a été l’occasion de faire une formation accélérée aux bases des TIAC (présentation
des différents agents pouvant être impliqués) et de mettre en application la procédure au travers de trois cas pratiques.
Parallèlement à cette procédure de gestion des suspicions de TIAC en cas d’astreinte, la mallette «physique» que les
cadres d’astreintes utilisent s’ils doivent réaliser une inspection ou des prélèvements lors de leur astreinte a été mise à
jour (ajout de thermomètres à sonde, nouvelle documentation pédagogique, nouveaux documents pré- remplis comme
des PV vierges de prise de documents etc...).
3- Difficultés rencontrées, discussion et propositions.
Les principales difficultés rencontrées ont concerné la recherche documentaire : l’archivage du service n’était en effet
pas le même pour tous les agents que ce soit l’archivage informatique (pas d’archivage informatique des alertes gérées
par la Dgccrf) ou l’archivage papier (archivage dans les dossiers entreprises ou dans une armoire spécifique selon les
agents pour les dossiers papiers de TIAC) ; les documents des autres départements de la région Rhône-Alpes ont été
difficiles à obtenir, voire impossible pour certains départements ; le contexte réglementaire et infra-réglementaire des
TIAC et surtout des alertes est très dense et certains textes infra-réglementaires postés sur le site intranet du MAAF
n’étaient plus en vigueur ; l’utilisation des bases de données Galatée et Pythie a nécessité une formation de base. Il a
également fallu que ces procédures prennent en compte des outils et des méthodes de travail différents entre la DGAL
et la DGCCRF. L’appropriation des outils et des méthodes « DGCCRF» n’a pas été facile (difficulté d’accès à cause
d’identifiants informatiques difficiles à obtenir pour un agent issu du MAAF).
La principale question est de savoir si les agents vont réellement s’approprier ces procédures, ce qui les obligera
à modifier certaines de leurs habitudes de travail, même si une des personnes récemment arrivée dans le service
et n’ayant auparavant jamais traité des problématiques d’hygiène alimentaire a déjà utilisé à plusieurs reprises la
procédure de gestion des non-conformités alimentaires : « C’est génial pour moi qui suis un lapin de 2 semaines dans
ces domaines, y’a tout ! ».
Ces procédures vont également régulièrement nécessiter des mises à jour (coordonnées des partenaires , évolutions
réglementaires, etc..). Des modifications devront en particulier être rapidement apportées à la procédure de gestion
des alertes (la DGAL va changer prochainement de système d’information : Resytal remplacera progressivement Sigal
; une révision du « guide de gestion des alertes » est en cours, la nouvelle version devrait sortir d’ici la fin de l’année
2014 ; un ordre de méthode relatif aux mesures de gestion à mettre en place en cas d’alerte est actuellement en cours
de rédaction à la DGAL, il devrait paraître au cours de l’année 2014 ; la DGCCRF a identifié le traitement des alertes et
des crises comme un processus à faire passer sous démarche qualité, un groupe travaille actuellement sur la question
(néanmoins, aucune information sur ce qu’il en ressortira, n’a pu être obtenue lors de mon stage, par le responsable
qualité de la DDPP de la Loire auprès de la DGCCRF).
Est-ce que ces révisions seront réellement faites ? Dans le cadre de l’accréditation des services procédant à l’inspection
(norme ISO/CEI 17020), il est prévu que les relations entre les services de l’Etat et les laboratoires qui réalisent pour
eux des analyses officielles doivent être formalisées par la signature de conventions : la rédaction de ces conventions
s’inscrit dans la continuité du stage qui a permis d’identifier trois laboratoires partenaires.
Conclusion
La réalisation de ces procédures internes de gestion des suspicions de TIAC, des non-conformités d’origine alimentaire
et des cas humains de listériose était importante afin de formaliser la démarche au sein du service. Cette formalisation
est en effet nécessaire afin que la gestion soit la plus rapide et la plus efficiente possible, ce qui est particulièrement
nécessaire dans les trois situations considérées qui constituent bien souvent des urgences, vues les lourdes
conséquences qu’elles peuvent avoir sur la santé publique.
Ces procédures ne constituent pourtant pas des documents figés et seront amenées à évoluer puisque la réglementation
et les instructions nationales changent constamment. Ces modifications vont rapidement concerner la procédure de
gestion des non-conformités alimentaires puisqu’un important travail est en cours que ce soit du côté de la DGCCRF
ou de celui de la DGAL.
160
Etat des lieux et perspectives d’évolution de la filière volaille
dans le Bas-Rhin
Cécilia GERHARDY, Inspectrice stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 14 avril 2014 au 25 juillet 2014 à DDPP du Bas-Rhin sous la responsabilité de Claude LE QUERE.
Questions abordées par l’étude 185
Une analyse de la filière avicole du Bas-Rhin a été menée dans le cadre d’un stage de trois mois à la Direction
Départementale de la Protection des Populations du Bas-Rhin. Elle clôture la formation statutaire d’Inspecteur de la
Santé publique vétérinaire (ISPV) et s’inscrit dans le cadre du « Certificat d’Études Approfondies Vétérinaires » (CEAV),
habilité par l’École Nationale des Services Vétérinaires (ENSV).
L’objectif de l’étude de cette filière en Alsace, et plus précisément dans le Bas-Rhin, était tout d’abord de caractériser
la filière volaille dans ce département afin d’identifier ses évolutions possibles. Ce travail a nécessité un rappel du
contexte national et mondial, afin de mettre en valeur les particularités du Bas-Rhin. Enfin, cette analyse a servi de base
à une étude de l’impact des évolutions de la filière volaille sur la charge de travail de la DDPP et a donné lieu à des
recommandations opérationnelles.
Le marché mondial de la viande de volaille est dynamique : cette viande est consommée partout dans le monde, son
excellent taux de conversion céréales/viande en fait une viande peu onéreuse et son faible taux de matière grasse
en fait une viande appréciée des consommateurs occidentaux. Cependant, en France, cette filière est en net recul,
notamment par rapport à ses concurrents européens tels l’Allemagne ou les Pays-Bas. Ce constat est à mettre en partie
sur le compte du manque de compétitivité des entreprises française, aggravé par l’arrêt des restitutions à l’export de
l’Union européenne.
La filière de la poule pondeuse est également dynamique, puisque la demande mondial augmente depuis une décennie
et l’Europe est autosuffisante contrairement à la viande de volaille. Il est à noter que ce marché a été récemment perturbé
par la mise en application au l» janvier 2012 de la directive 1999/74/CE relative au bien-être des poules pondeuses.
Enfin, la filière palmipèdes française se classe au premier rang mondial pour le foie gras et au deuxième si on considère
toutes les viandes de palmipèdes confondues. Cette filière se maintient à un bon niveau car la valeur ajoutée sur le
produit final est importante, mais elle a amorcé en 2008 un léger ralentissement.
Dans ce contexte français, la filière volaille d’Alsace présente une particularité notable : contrairement à la tendance
nationale, cette filière se développe. Pour expliquer ce paradoxe, plusieurs motifs sont avancés :
- la position frontalière du département permet d’écouler certains types de marchandises (poules pondeuses de réforme
ou poulets label rouge), mais également d’accueillir des élevages interdits dans d’autres pays (poules pondeuses en
cage interdites en Allemagne par exemple),
- la filière des volailles alsaciennes est tournée vers la qualité, très recherchée par le consommateur, avec des poulets
de chair standards qui ont une croissance intermédiaire.
De plus, les poulets label rouge ou qui possèdent une Indication Géographique Protégée sont défendus par une
association : Alsace volaille. Les producteurs de foie gras fermier ont également créé leur association : Ganzeliesel. La
demande du consommateur en produit de qualité (poulet Label Rouge, poulet certifié agriculture biologique), est pour
le moment supérieure aux capacités de production,
- l’identité alsacienne est forte et la consommation de produits locaux est donc soutenue en Alsace,
- le principal abatteur (Bruno Siebert), se développe et crée ainsi un besoin en matière première qui stimule le
développement de l’élevage de poulets de chair.
Malgré ce contexte économique favorable, l’urbanisation importante du Bas-Rhin, due à une démographie en
constante augmentation, constitue tout de même un frein au développement des activités d’élevage, d’autant plus que
l’acceptation sociétale de ce type d’élevage est difficile.
Le développement de la filière volaille va nécessairement engendrer un besoin accru de contrôle de la part des
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
185
161
services de l’état et donc de la Direction Départementale de la Protection des Populations. L’étude des hypothèses de
développements futurs de la filière confirme ce besoin: l’établissement Bruno Siebert va poursuivre son développement
pour profiter peut-être de parts de marché laissées par les abatteurs bretons qui ont souffert de l’arrêt des restitutions.
Il ambitionne notamment de rapprocher la production de poulets de son établissement d’abattage bas-rhinois en
développant l’élevage local et a d’ores et déjà entamé des travaux d’agrandissement de son établissement. La filière
poules pondeuses et palmipèdes ne devraient pour l’instant pas augmenter significativement leurs productions.
L’augmentation de la charge de travail pour la DDPP se greffe à une situation déjà compliquée par des restrictions
budgétaires drastiques. Dans ce contexte, il est primordial pour la DDPP de parvenir à anticiper sa charge de travail
et à proposer des solutions pour absorber une future augmentation de cette charge, en n’utilisant si possible que les
ressources déjà présentes dans la structure.
Afin de répondre à ces questions, un état des lieux de la répartition du travail lié à la filière volaille a été mené. Nous
avons dans un premier temps identifié les principales unités élémentaires de mission (UEM) qui intéressent cette filière.
Ces UEM, composent l’outil de pilotage de l’activité prévisionnelle de la structure appelée « la gestion des affectations
opérationnelles » (GAO). Pour chaque UEM nous avons ensuite identifié les agents qui y étaient rattachés d’après leur
fiche de poste et quelle part de leur temps de travail y était consacrée. Puis, nous avons confronté cette répartition aux
recommandations de la DGAl disponibles pour les contrôles en abattoir.
Deuxièmement, nous avons évalué les possibles modifications de la charge de travail pour la DDPP en lien avec la filière
volaille. Trois sources de changements ont été identifiées : une augmentation de l’activité de la filière (essentiellement
pour la partie volailles de chair), un remaniement des effectifs affectés à cette filière (congé maternité, départ à la retraite
... ) et un contexte national qui évolue (audit de l’OAV et la Cour des comptes qui dénoncent un manque de contrôles).
Un bilan tenant compte de ces modifications possibles pour chaque UEM a permis de dresser une liste des UEM pour
lesquels le risque de manque d’effectif est majeur.
Enfin, pour ces UEM « à risque », des propositions opérationnelles ont été formulées : en termes de remaniements de la
répartition des activités déjà attribuées aux agents d’une part et en incluant le service « surveillance sanitaire du gibier
» aux activités de la filière volaille d’autre part.
Etant donné le délai imparti pour la réalisation du stage, toutes les pistes d’allègement de la charge de travail n’ont pas
été explorées. En effet, pour compléter l’étude, des entretiens avec la FDSEA et le GDS afin de connaitre leurs objectifs
et leurs degrés d’implication dans la filière avicole auraient pu être intéressants pour en déduire d’éventuelles missions
à leur déléguer. Il s’agit donc de pistes encore à approfondir pour la DDPP.
Analyse des plans de maitrise sanitaire du fromage AOP SAINT
NECTAIRE fermier a lait cru
Loubna KESSITA, Vétérinaire officielle algérienne, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission effectuée du 03 mars 2014 au 20 juin 2014 à la DDPP du Puy de Dôme, sous la responsabilité de Anne-Laure
TRIDON chef du service « Concurrence et protection de la population »
Questions abordées par l’étude 186
La fabrication du fromage Saint Nectaire nécessite des exigences importantes en terme d’hygiène tant au niveau de la
ferme qu’au niveau de l’atelier de production et des ateliers d’affinage.
Au niveau de la ferme, l’exploitant doit maîtriser
l’environnement de son élevage (eau d’abreuvement de qualité adéquate, qualité des aliments distribués tenant compte
des besoins de production, hygiène générale des bâtiments d’élevage, etc. ..). Il doit gérer le suivi sanitaire des animaux,
la qualité de production du lait (hygiène de la traite) et la qualité de la production du fromage.
A l’issue de mon stage, j’ai constaté que les autocontrôles ainsi que leur fréquence ne sont pas rigoureusement
planifiés pour détecter sur la présence éventuelle de germes pathogènes. Par ailleurs, la conception du plan de maîtrise
sanitaire est théorique et n’est pas réellement adaptée à l’atelier de fabrication du fromage à toutes les étapes. De plus,
l’échantillonnage n’est pas proportionné et adapté, car ne prenant pas en compte à une analyse de risque au niveau de
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
186
162
l’atelier de production ainsi que l’historique. Les producteurs ne sont pas suffisamment formés pour gérer de manière
efficace leur production, malgré la disponibilité des structures professionnelles d’accompagnement.
I- Introduction
J’ai été accueillie au sein de la DDPP du Puy De Dôme pour réaliser une étude sur le fromage Saint-Nectaire fermier au
lait cru, sous la responsabilité du maître de stage Mme Anne-Laure TRIDON, Chef de Service de la Concurrence et la
Protection des Consommateurs.
La mission qui m’a été confiée pour ce stage de quatre mois concerne l’analyse des plans de maîtrise sanitaire des
ateliers fermiers du fromage Saint-Nectaire au lait cru.
L’augmentation constatée des cas de contamination des laits et produits laitiers ainsi que les récentes alertes nationales
et locales à la Listeria et Salmonelles dans le fromage Saint- Nectaire fermier (16 alertes nationales et 17 alertes locales
déclarées à la DDPP63 depuis le 01/01/2014) sont préoccupantes.
Lorsqu’une alerte sanitaire est déclenchée, le premier responsable est le professionnel et le seul moyen de remédier à
ces anomalies est de responsabiliser chaque acteur dans son domaine.
Les rapports d’inspection établis par les agents de la DDPP 63 suite aux inspections sur le terrain chez les producteurs
et les affineurs du fromage Saint-Nectaire fermier montrent que les bonnes pratiques d’hygiène, les plans de maîtrise
sanitaire et les formations sont mal connus ou insuffisamment mis en pratique par la plupart des professionnels de la
filière.
Par ailleurs, cette filière se caractérise par :
- Une pluralité d’opérateurs (producteurs, producteurs-affineurs, affineurs....) ce qui complique son organisation. - De multiples organismes techniques et scientifiques susceptibles d’apporter un appui mais malheureusement leurs
prestations sont sous-utilisées par les professionnels de la filière.
Tous ces manquements nous conduisent aux problématiques suivantes :
- que représente le plan de maîtrise sanitaire pour le producteur ?
- comment le PMS est appliqué dans les ateliers fermiers ?
- comment les producteurs appliquent-ils la réglementation ?
- que font les différents acteurs de la filière ainsi que les services de l’Etat dans ce contexte général ? Comment réussir
à responsabiliser et sensibiliser les producteurs fermier afin de produire du Saint Nectaire de bonne qualité sanitaire.
Afin d’apporter des éléments de réponse à ces interrogations, les responsables du service « concurrence et protection
des consommateurs » m’ont proposé de :
- faire une analyse des plans de maîtrise sanitaire déposés dans les demandes d’agrément sanitaire. - faire une étude comparative entre ce qui est écrit dans le PMS et son application sur terrain, en insistant sur les points
de non-conformité majeure suite aux inspections réalisées sur le terrain.
II- Méthodologie
Mon travail s’est scindé en deux parties :
- La première partie consiste en une étude documentaire à travers :
D’une part, l’étude et l’analyse des demandes
d’agrément sanitaire d’ateliers fermiers du Saint- Nectaire AOP au lait cru, notamment les plans de maîtrise sanitaire
décrits dans les dossiers ce qui m’a permis de relever les points pertinents et les points manquants dans les PMS des
dossiers d’agrément étudiés,
D’autre part, l’étude et l’analyse des rapports d’inspection de l’année 2014.
- La deuxième partie consiste à participer aux missions d’inspection des ateliers fermiers de fabrication des fromages
blancs AOP Saint-Nectaire, soit en vue de l’attribution d’un agrément conditionnel, soit en cas de suivi des nonconformités d’ateliers fermiers déjà agréés. L’objectif est de faire une comparaison entre les PMS décrits dans les
dossiers d’agrément sanitaire et leur application sur le terrain.
Le but de ce travail au niveau des opérateurs de la filière est d’apporter un diagnostic sur la pertinence des documents
élaborés et sur leur utilisation pratique (évaluation de leur efficacité).
En complément de ce diagnostic, j’ai eu l’occasion de rencontrer les différents organismes qui gravitent autour des
producteurs afin de connaître leur rôle actuel et de discuter de l’évolution de leur appui technique en vue d’une
amélioration du niveau sanitaire de la filière.
163
III- Conclusion de l’étude et recommandations
Il ressort de l’instruction des demandes d’agréments sanitaires et en particulier du PMS notamment la partie relative
aux bonnes pratiques d’hygiène (plan nettoyage/désinfection, plan de maitrise des nuisibles...) qu’elle est globalement
bien rédigée. Pour autant, la rédaction des PMS est effectué par des personnes étrangères à l’atelier qui utilisent
systématiquement un modèle type sans l’adapter réellement à l’atelier considéré et sans une réelle analyse du risque
spécifique. Cette situation contribue fortement à limiter l’utilité du PMS et son appropriation comme outil de travail du
producteur.
En effet, nous avons constaté que les plans d’autocontrôles présentés dans les dossiers ne sont pas très explicites
notamment pour ce qui concerne leur fréquence, les seuils de conformité et la gestion des non-conformités. Par ailleurs,
le plan d’échantillonnage exigé par le règlement 2073/2005 relatif aux critères microbiologiques applicables aux denrées
alimentaires n’est pas respecté. Or, les autocontrôles sont le seul moyen pour le producteur de vérifier l’effectivité de
son PMS et il est dommageable qu’il ne les exploite pas pour conforter la sécurité sanitaire de ses fromages . Ceci est
sans doute lié à un manque d’objectifs fixés pour ses plans au moment de leur conception.
Le producteur ne réalise pas de manière cohérente les analyses microbiologiques de la matière première (lait) et du
produit fini (fromage en blanc et affiné), car il n’a pas défini avec pertinence les critères à rechercher, la fréquence
d’analyse et le mode d’échantillonnage.
Si lors de la constitution des dossiers d’agrément, la partie relative aux bonnes pratiques d’hygiène est complète, l’étude
de l’analyse des dangers (HACCP) présente, elle, des carences importantes. Il convient de souligner particulièrement
l’étape de la traite qui est négligée par le producteur n’est pas considérée comme faisant partie intégrante du procédé
de fabrication à mentionner dans le PMS. En conséquence, on observe lors des inspections un manque de contrôle de
la qualité du lait (matière première) qui se traduit par l’insuffisance, voire l’absence fréquente des résultats d’analyses
chez les producteurs fermiers et par une absence de suivi rigoureux de la part de l’Interprofession chargée de l’appui
technique au producteur et de la mise en place des actions correctives en cas de non- conformité.
L’analyse des rapports d’inspections et les inspections suivies montrent un nombre important de non-conformités
de la matière première (taux de cellules somatiques dépassant souvent la norme) lié à une mauvaise gestion sanitaire
des élevages et au non-respect de l’hygiène de la traite. Pour autant, ces nombreuses anomalies n’empêchent pas le
producteur de produire du lait et de fabriquer du fromage en blanc.
La présence de non conformités relevées est souvent liée à un manque de formation des producteurs, en élevage et à
l’hygiène. Ils ne maîtrisent pas les notions de base de l’HACCP, ce qui explique la non application des bonnes pratiques
d’hygiène décrites dans leur PMS. La difficulté rencontrée par les différents organismes oeuvrant sur le terrain est
d’arriver à sensibiliser et à mobiliser les producteurs.
La gestion des alertes a démontré des lacunes en matière de définition du lot sanitaire et de la traçabilité des produits,
qu’il s’agisse des producteurs ou des affineurs. Cette non-maitrise s’avère très préjudiciable et peut entraîner un rappel
médiatique lors d’une non-conformité d’un lot. La traçabilité constitue un point important du PMS, elle est exigée à
chaque étape de la filière.
Malgré le rôle important des acteurs de la filière, il a été relevé que la coordination entre les différents maillons est faible.
Ainsi, le producteur ne sollicite pas assez les services qu’offrent ces derniers pour l’aider à assurer une bonne qualité
d’hygiène et la sécurité sanitaire de ses produits comme le montre par exemple, la présence d’un nombre restreint
de producteurs lors des formations proposées par certains organismes. Le rôle de l’ISN en tant qu’organisme de
coordination au sein de la filière est indispensable.
Pour permettre aux producteurs et à tous les acteurs de la filière de maîtriser leur production, il est impératif de :
- réaliser les autocontrôles bactériologiques et de cibler en priorité le lait et les produits finis, - définir une fréquence des autocontrôles à respecter et à ré-ajuster en fonction des résultats obtenus, - définir un échantillonnage adapté à la taille de l’atelier pour autant que la sécurité des denrées ne soit pas menacée,
- proposer des formations adaptées, en particulier en lien avec les bonnes pratiques d’hygiène, les bonnes pratiques
d’élevage, en lien avec le plan HACCP et la traçabilité y compris avec le retrait / rappel des lots non conformes. - communiquer les résultats d’analyses microbiologiques aux différents acteurs de la filière notamment l’ISN, le GDS,
le Conseil d’Elevage et le Vétérinaire sanitaire pour que des mesures de prévention ciblées et des mesures correctives
en cas de non- conformité des produits puissent être proposées au niveau individuel et collectif.
L’administration, par l’intermédiaire de la DDPP, œuvre pour la protection des consommateurs. La gestion des alertes
récentes (nombreuses durant l’étude) et la diminution des moyens humains au niveau des services de la DDPP 63
entraîne une forte diminution du nombre d’inspections : 68 inspections des ateliers fermiers sur 164 (dans le Puy-deDome), ont été réalisées en 2013 contre 15 inspections seulement au cours des 5 premiers mois de l’année 2014. Ceci
oblige à programmer les contrôles en ciblant les ateliers les plus à risque. Les services de contrôle sont ainsi contraints
164
de glisser d’une posture pédagogique vers une posture beaucoup plus répressive de manière à tenter de limiter les
situations délicates sur le plan sanitaire et d’éviter qu’elles ne s’inscrivent dans la durée.
Organisation des contrôles applicables aux échanges
intracommunautaires d’animaux vivants et de denrées
alimentaires d’origine animale
Kheirridine MAKHLOUF, Vétérinaire officiel tunisien, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 3 mars 2014 au 20 juin 2014 à la DDDPP de la Côte d’Or sous la responsabilité de Mme Sophie
JACQUET, chef de service protection de l’alimentation humaine et de Mme Fabienne BARTHELEMY, chef de service
protection animale, végétale et de l’environnement.
Questions abordées par l’étude 187
Les fondements du marché intérieur européen, également appelé « marché unique » sont la libre circulation des
personnes, des biens, des services et des marchandises au sein de l’Union européenne. Cette libéralisation de
circulation est fondé sur la suppression des différents contrôle douanier aux frontières nationale et sur l’harmonisation
de la réglementation (ce sont les lois européennes qui priment sur les lois nationales).
C’est dans se cadre que s’inscrit ce travail sur le contrôle des échanges intracommunautaire des animaux vivants et
des denrées alimentaires d’origine animale. Le contrôle douanier aux frontières étant supprimé il est remplacé par deux
autres contrôles :
- Le contrôle à l’origine, effectué a l’envoi de marchandises vers un autre Etat membre.
- Le contrôle à destination, effectué a la réception de marchandises en provenance d’un autre Etat membre. L’harmonisation réglementaire a abouti à l’adoption de plusieurs lois européennes sous forme de règlements, de
directives et de décisions. Pour les échanges intracommunautaires d’animaux vivants et de denrées alimentaires
d’origine animale, on se réfère à la Directive de la communauté économique européenne (CEE) n° 89/662 relative aux
contrôles vétérinaires applicables aux échanges intracommunautaires dans la perspective de la réalisation du marché
intérieur. Pour l’étude de ces deux types de contrôles, mon stage a été scindé en deux périodes différentes dans deux services
de la DDPP, en premier j’ai u a étudier les contrôles à destination (CAD) des denrées alimentaires d’origine animale
(DAOA) au sein du service de la protection de l’alimentation humaine (SSA) ; par la suite j’ai étudier le contrôle à l’origine
(CAO) des animaux vivants au sein du service de la protection des animaux, végétaux et de l’environnement (SPA). Contrôle à destination des denrées alimentaires d’origine animale :
Sur ce type de contrôle on à réaliser une étude rétrospective au niveau nationale et départementale sur une période de
huit années allant du 1er janvier 2006 (avènement du paquet hygiène) au 31 décembre 2013. On a utilisé pour se faire
les différentes notes de services relative aux bilans nationaux des CAD (on ayant recours à l’outil Galatée) pour l’étude
national. Pour les CAD départementaux on à utiliser des extractions a partir du système d’information de la DGAL
(SIGAL) en appliquant les mêmes périodes que les notes de services traitant des bilans nationaux.
Au niveau national on remarque que le nombre d’entreprises concernées par ce type de contrôle sont en augmentation
d’une année a l’autre, alors que le nombre des CAD diminue d’une période à l’autre (on est passer de 3085 CAD pour
2165 entreprises en 2007 à 941 CAD pour 3190 entreprises en 2013).
Au niveau départemental le nombre de contrôles effectués reste satisfaisant hormis une baisse en 2008 et 2012 avec
seulement 5 CAD. Les autres périodes affichent plus des contrôles (jusqu’à 24 contrôles pour la période 2010-2011).
Sur la période d’étude entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2013, les agents de la DDPP ont contrôlés 98 produits
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
187
165
de différents types et de différentes provenance. Les produits les plus inspecté sur ces CAD sont les viandes et les
produits à base de viande et la Belgique est le pays qui a eu le plus de produits contrôlés.
Outre cette étude documentaire j’ai pu au cours de mon séjour au sein du service SSA de la DDPP21 effectué des
visites terrain avec des collègues ; ces sorties mon permis de voir en pratique l’application de ce type de contrôle.
Les inspections sur site en contrôle à destination ne présente pas de difficulté particulière hormis qu’il est impossible à
l’agent de vérifier sur place la véracité de l’agrément de l’entreprise expéditrice du produit même avec la présence du
numéro d’agrément sur les factures et l’étiquetage du produit.
Les non-conformités observées sur ces types de produits sont classé en quatre catégories :
- FA : formalité administrative, cette anomalie est restreinte a la présence ou l’absence d’un document d’enregistrement
vu que les déclarations d’activités ont été allégé (les entreprises n’ont plus à se déclarer comme étant premiers
destinataire).
- CD : contrôle documentaire, présence des documents d’accompagnement du produit avec les mentions adéquates.
- CI : contrôle d’identité, présence d’une marque d’identification et/ou de salubrité sur les produits.
- CP : contrôle physique, c’est le contrôle du produit lui même avec mise en évidence éventuel d’anomalie d’emballage
ou de salubrité.
Les anomalies rencontré sur les différents CAD effectué au niveau de la Côte d’Or sur la période d’étude, sont en
majorité des anomalies d’identité se qui engendre une demande de régularisation documentaire dans les 48h qui
suivent le contrôle.
Contrôle à l’origine des animaux vivants de l’espèce bovine expédiés vers l’Italie :
Pour les contrôle à l’origine (CAO), j’ai fait mon étude au sein du services SPA de la DDPP21 et elle a porté sur l’expédition
de broutards de la Côte d’Or vers l’Italie.
Etant donner que les contrôles à l’origine, comme pour la majorité des régions françaises, sont effectués selon la
procédure alternative qui associe un vétérinaire co- certificateur, on a focalisé cette étude sur les contrôles de deuxième
niveau à la DDPP.
Il s’agit des « inspections bureau » que réalisent les agents des services chargés des dossiers des mouvements des
animaux.
Pour ce faire on a u recours aux différents dossiers existant sur la base de donné de la DDPP relative aux envois de
broutards et aux outils SIGAL, BDNI et TRACES pour les différents vérifications.
L’objectif de cette étude était la mise à jour du rapport locale d’inspection relatif aux envoie d’animaux en procédure
alternative. La procédure alternative est une procédure qui a est appliqué aux envoie d’animaux vers l’Italie ou l’Espagne.
Elle fait intervenir un vétérinaire co-certificateur auquel la DDPP délègue les missions de contrôle des animaux avant
leur départ ainsi que le contrôle du carnet de route au niveau du centre de rassemblement.
L’étude a débuté par un recensement du nombre de certificats sanitaires délivrés par la DDPP et par an. De 2009 à
20013 la DDPP a délivré en moyenne 458 certificats par an ; ce chiffre est inégalement réparti sur les trois centres de
rassemblement agréés (CRA) de la Côte d’ Or, dont un ne dépasse pas les 50 certificats par an. A coté des certificats
délivré aux CRA il arrive que la DDPP délivre des certificats pour des éleveurs qui souhaite envoyer des animaux vers
l’un des Etat membre et dans se cas cette certification n’entre pas dans la procédure alternative.
Pour les CAO on c’est référé en plus de la Directive 89/662/CEE aux :
- Directive 90/452/CEE relative aux contrôles vétérinaires et zootechniques applicables dans les échanges
intracommunautaires de certains animaux vivants et produits dans la perspective de la réalisation du marché unique. - Directive 97/12/CE du 17 mars 1997 modifiant la directive 64/432/CEE relative à la police sanitaire en matière
d’échanges intracommunautaires des animaux des espèces bovine et porcine
- Règlement (CE) n° 1/2005 relatif à la protection des animaux pendant le transport et les opérations annexes Pour l’expédition d’animaux vivants de l’espèce bovine de la Côte d’Or vers l’Italie ces derniers doivent répondre aux
exigences réglementaires stipulées dans les textes de lois précédents, parmi les exigences les plus importantes, on
peut citer les suivantes :
- Les animaux doivent provenir d’un établissement agréé (Exploitation, Centre de rassemblement ou organisme agréé).
- Les animaux doivent faire l’objet d’une visite de bonne santé 24 heures avant le départ.
166
- Les animaux doivent être munis de certificat sanitaire européen dans les deux langues des deux pays.
- Les animaux doivent être munis tout au long de leur voyage d’un carnet de route.
La vérification de ces différents exigences selon la réglementation doit être faite par un vétérinaire officiel des services
vétérinaires de l’Etat d’expédition des animaux, ce qui n’est pas faisable en pratique, vu que les lots d’animaux sont
constitué juste avant le départ. Ceci impose aux différents DDPP le recours à la certification en procédure alternative. Dans ce contexte la DDPP effectue surtout des inspections d’agrément ou de maintien d’agrément des centres de
rassemblement agréés UE pour les échanges d’animaux vivants. Elle a aussi comme mission le contrôle de second niveau de la certification en procédure alternative. Pour ce faire, au
niveau de la DDPP21 ont a recours à une procédure locale de contrôle et a un rapport locale d’inspection. Ces deux
documents on fait l’objet au cours de mon stage d’une mise à jour qui a porté sur l’évolution des exigences sanitaires
dans les différentes régions de l’Europe.
- La France étant un pays indemne de fièvre catarrhal ovine depuis 2011 (FCO0, les exigences sanitaire relative à cette
maladie ont été supprimées. - L’Italie comprend quatre régions pour lesquelles des exigences supplémentaires pour la rhino trachéite infectieuse
bovine sont requis. De se faite on a ajouté une nouvelle parti relatif a cette maladie dans les documents de contrôle
En plus, on a spécifié sur le même document les points de contrôle relatif aux carnets de route se qui a pour objective
de facilité le travaille de l’agent de contrôle. Les nouveaux documents ont été testés sur un échantillon de certificats sanitaire en procédure alternative. Ceci nous
a permis de relevé des anomalies : l’exhaustivité des informations renseignées sur les documents n’été pas conforme,
non retour sous un mois du carnet de route et non validation de ce dernier par les vétérinaire co-certificateur ainsi que
la certification été non conforme pour les animaux qui parte dans les régions de l’Italie pour lesquelles des exigences
supplémentaire pour l’IBR.
Ces anomalies étant relevé, les différents centre de rassemblement concerné on été averti par envoi du rapport
d’inspection bureau et d’un courrier rappelons les exigences réglementaires relative a chacune des anomalies. Il a été
décidé que les certificats sanitaires avec des garanties supplémentaires vis-à-vis de l’IBR ne feront plus partie de la
certification en procédure alternative, ils seront directement fournis par la DDPP. En conclusion de ce travail sur l’organisation des contrôle applicable aux échanges intracommunautaire d’animaux
vivants et de denrées alimentaire d’origine animale, deux types de contrôle sont appliqués (CAD et CAO). L’étude de ces contrôles au niveau de la DDPP 21 montre :
Pour les CAD, un nombre satisferont de contrôles par rapport à une baisse au niveau national. Mais on note des
difficultés relatives à la liste complète et exhaustive des entreprises premiers destinataires ainsi que l’absence de moyen
de vérification lors des inspections sur site.
Pour les CAO, il existe une procédure alternative pour les échanges vers l’Italie ou l’Espagne. Cette procédure
à démontré des limites (la validation à blanc des certificats sanitaire par le vétérinaire officiel, non-conformité de la
certification demandant des garanties supplémentaires vis-à-vis de l’IBR et écarts de renseignement de la par des
organisateurs des voyages).
Mesures de gestion lors de non conformité dans un plan
de surveillance et de contrôle des résidus de médicament
vétérinaires et de substances interdites
Asma LAZGHAB, Vétérinaire officiel tunisien, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 3 mars 2014 au 20 juin 2014 à la DGAL du MAAF, bureau des intrants et santé publique en élevage
sous la responsabilité de Olivier DEBAERE et Isabelle FOURNET
167
Questions abordées par l’étude 188
L’objectif de ce stage est l’élaboration d’un document sur les mesures de gestion en cas de résultat d’analyse non
conforme dans un plan de contrôle de résidus de médicaments vétérinaires et de substances interdites. Pour cela la
réglementation européenne et nationale sur les seuils d’actions appliqués et les procédures de gestions en place ont
été étudiés et synthétisés.
Les données utilisées dans ce rapport ont été recueillis dans différents bureaux intervenants dans la gestion des non
conformités, le bureau des intrants et santé publique en élevage (BISPE) , le bureau des missions des urgences sanitaires
(MUS) et la brigade nationales des enquêtes vétérinaires et phytosanitaires (BNEVP). Ces bureaux représentent des
unités transversales regroupées à la DGAL. Ils travaillent en coordinations.
Deux missions ont été conduites pour compléter les réunions et les entretiens téléphoniques. En Bretagne puis dans
le Gers pour rencontrer les acteurs opérationnels dans l’exécution de la programmation annuelle du plan de contrôle
des anabolisants, des substances interdites et des résidus de médicaments. Ce document vise à répondre à des
problématiques posées au cours des débats et des réunions animés par le BISPE.
Le travail est divisé en trois parties, la première partie concerne le contrôle des anabolisants, la deuxième partie
concerne le contrôle des substances pharmacologiquement actives interdites ou non autorisés, la troisième partie
concerne le contrôle de résidu de médicaments vétérinaires. Chaque partie a fait l’objet une problématique au niveau
de son contrôle et de sa gestion.
I- Le contrôle des anabolisants
1. Objectif
La détection de l’administration illégale de substances interdites et la détection de l’administration abusive de
substances autorisées sur des productions à risque.
2. Problématiques
Les problématiques liées aux prélèvements en trois exemplaires, au ciblage des animaux et aux mesures de police à
entreprendre ont été soulevées.
3. Gestion
Si le choix des trois exemplaires est préconisé afin de garantir une meilleure efficacité et offrir les éléments nécessaires
à la construction d’un dossier, pour une éventuelle sanction. Il faudrait dans ce cas avoir les éléments de suspicion en
amont des prélèvements PSPC. Le préleveur n’irait faire ces échantillons que dans les exploitations dans lesquelles
lui même ou ses collègues ou la BNEVP auraient soupçonnée l’administration ou la détention de traitements illégales.
Seulement et compte tenu du nombre de prélèvement qu’il convient de réaliser conformément aux exigences de la
directive 96/23/CE, il est impossible que les échantillons soient consolidés par des enquêtes.
La police judiciaire conduit le fraudeur vers une punition mais au détriment d’une longue
période pendant laquelle il va pouvoir avoir une action négative sur la santé publique en utilisant impunément la
substance interdite.
Il est alors plus cohérent de procéder dans l’esprit de la législation européenne par étapes, surtout que la fraude liée
à un traitement illégal par des anabolisants est une fraude perpétuelle faisant partie de la gestion de l’exploitation. Il
s’agit d’effectuer un contrôle par le prélèvement d’échantillons ciblés sur des animaux à risque en un seul exemplaire
(sans scellé). Quand le résultat est non conforme, effectuer une enquête afin de confirmer ou infirmer la suspicion. Cette
enquête peut être accompagnée de prélèvements. Si l’objectif des prélèvements est de trancher sur la suspicion, il
convient de les faire cibler en un seul exemplaire. Sinon si le but est de confirmer une suspicion, dans ce cas les prélever
en trois exemplaires avec séquestration des animaux identifiés jusqu’à résultats d’analyses.
La police administrative détruit les animaux et les denrées présentant un danger pour l’homme. C’est une manière
réactive de réprimer le fraudeur, mais difficile à mettre en œuvre.
Finalement, l’autorité compétente dispose de pouvoirs administratifs et de pouvoirs judiciaire. L’important est de se
servir des moyens à disposition en les adoptant aux situations pour protéger au mieux la santé publique et démonter
l’origine du risque lié à l’utilisation de ces substances
II- Le contrôle des substances interdites
1. Objectif
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
188
168
L’objectif du plan de contrôle des substances interdites est de détecter un traitement illégal par l’administration d’une
substance pharmacologiquement active non autorisée ou interdite sur des exploitations à risque.
2. Problématique
Une problématique liée aux seuils d’actions pour les échanges commerciaux et les polices sanitaires.
3. Gestion
L’objectif dans l’établissement de valeurs de références pour les substances pharmacologiquement actives interdites
ou non autorisées est de déterminer une concentration analytique dans la denrée alimentaire qui peut être décelée par
les laboratoires d’analyses et qui soit assez faible pour protéger la santé du consommateur. Les valeurs de références
prennent en compte la faisabilité analytique et la sécurité toxicologique pour le consommateur. Elles ne sont pas
encore définies. Actuellement, les Etats membres utilisent les LPMR comme valeurs de référence pour les échanges
commerciaux. Lorsque les résultats d’analyses sont en dessous des valeurs de référence, l’autorité compétente
effectue les enquêtes prévues par la directive 96/23/CE, afin de déterminer si des substances pharmacologiquement
actives interdites ou non autorisées ont été administrées et, le cas échéant, applique les sanctions prévues (Article 24,
règlement 470/2009/CE).
Les mesures de contrôle cité pour les anabolisants concernent aussi ces substances. La gestion des substances
pharmacologiquement actives interdites se fait en se basant sur les articles et procédures décrites dans le code de la
consommation.
En examinant le contexte d’utilisation des substances pharmacologiquement actives interdites, il en ressort que la
fraude est pratiqué une fois le produit est détenue pour le traitement des animaux. Une foie le traitement terminé,
l’éleveur peut ne plus jamais réutiliser la substance en cause. La gestion de non conformité liée à ces substances est
très dépendante de la durée d’analyse dans le laboratoire. Plus le résultat d’analyse est court (< à 15 jours), plus il y a
de fortes chances de trouver le produit ou les animaux traités lors de perquisition.
III- Le contrôle de résidus de médicaments
1. Objectif
Le plan de contrôle des résidus de médicament vétérinaire vise à contrôler la conformité des résidus de médicaments
vétérinaires avec les limites maximales de résidus fixées (Règlement CE 37/2010, tableau 1) sur les animaux ou les
groupes d’animaux où la probabilité de trouver des résidus est la plus élevée.
2. Problématique
Les limites maximales de résidus à entreprendre lors de l’application de la cascade sur une espèce et le principe de
l’extrapolation sur les espèces et les denrées
3. Gestion
Dans certain cas, et dans le cadre de l’application de la cascade, certains médicaments prescrits n’ont pas d’AMM
l’espèce en question. Dans ce cas le vétérinaire prescrit un temps d’attente forfaitaire devant être supérieur au temps
d’attente minimum fixé pour la denrée (article L.5143-4 du code de la santé publique). La LMR dans ce cas est établie
en tenant compte de la substance pharmacologiquement active autorisée par le principe de l’extrapolation (Règlement
470/2009/CE, article 5) indépendamment des restrictions d’espèces. Cette extrapolation est envisagée par l’agence
européenne de médicaments.
Sur le plan national, l’Anses-ANMV estime qu’il est nécessaire d’appliquer un raisonnement par denrée. L’utilisation d’un
médicament contenant une substance inscrite dans le tableau 1 (règlement CE/37/2010) est donc possible quelle que
soit l’espèce de destination finale du médicament si une LMR existe pour cette substance pour la denrée concernée
(DGAL, 2004).
Conclusion
Cette revue des mesures de gestion nous amène vers une nouvelle réflexion, celle de savoir si les attributions et les
compétences de chaque acteur intervenant dans la gestion des non conformités et donc de la protection de la santé
publique et à chaque étape de son intervention sont bien respectées ou mériteraient une mise à jour.
Le plan de contrôle des résidus vise à examiner et à mettre en évidence les raisons des risques de résidus dans les
denrées alimentaires d’origine animale au niveau des élevages, des abattoirs, des industries laitières, des établissements
de transformation des poissons et des centres de collecte et d’emballage des œufs (annexe III, directive 96/23/CE).
Un résultat d’analyse non conforme n’est qu’un indicateur d’une infraction au niveau de ces exploitations. Seule une
enquête orientée dans ce sens permet de mettre en évidence les raisons de ce risque pour le consommateur. Une
enquête d’inspection suite à un résultat non conforme représente une donnée descriptive du manquement relevé,
169
même lorsque celui ci est non intentionnel. Le profil de l’éleveur, sa situation, le type de production, les mouvements,
l’alimentation et son réseau professionnel, sont autant d’éléments sur lesquelles l’autorité compétente peut agir pour
examiner et prévenir le risque d’utilisation de substances interdites. L’enquête permet aussi d’identifier clairement les
acteurs impliqués dans la présence du résidu dans la denrée alimentaire.
La prévention de ce risque est engagée sur plusieurs étapes. La première étape vise à collecter les données nécessaires
sur l’élaboration du risque de résidu. La deuxième étape vise à communiquer l’infraction à l’acteur qui en est responsable.
La troisième étape est la mise en place d’une action corrective.
L’action corrective n’est pas synonyme d’action de police. Elle doit être volontaire et obligatoire. Le réglage d’une
machine à traire, la diminution du nombre d’animaux par bâtiment, le contrôle des règles zootechniques, sont souvent
suffisants à stopper le recours aux médicaments et à l’automédication due à des pathologies récurrentes.
Les efforts conduits pour la mise en place des plans de résidus de médicaments et de substances interdites ont pour
objectif la réalisation de la sécurité tangible en mettant en place les actions effectives pour lever le risque de résidus sur
les exploitations touchées.
Elaboration des dispositions spécifiques ORSEC relatives aux
épizooties majeures pour le département du Morbihan
Sandy LECOQ-ESPALLARGAS, Inspectrice stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 14 avril 2014 au 25 juillet 2014 à la DDPP du Morbihan
Questions abordées par l’étude 189
Les épizooties sont dans le langage commun des maladies contagieuses qui atteignent un grand nombre d’animaux.
On peut les rapprocher réglementairement des dangers sanitaires pour lesquels le Code Rural et de la Pêche Maritime
prévoit que des plans d’intervention sanitaires d’urgence (PISU) doivent être élaborés, et dont la liste est fixée par décret.
Il s’agit de maladies contagieuses présentant un risque épizootique et susceptibles d’avoir un impact économique
important et/ou transmissibles à l’être humain par les animaux ou leurs produits.
Compte-tenu de leur rapidité de diffusion et de l’ampleur potentielle de leurs effets sanitaires et économiques, la gestion
de ces maladies épizootiques ne constituent pas seulement un enjeu de santé animale ou de santé publique, mais aussi
un enjeu de sécurité civile. Ainsi depuis 2004, à l’instar des catastrophes naturelles, nucléaires ou technologiques, c’est
l’outil de référence de réponse aux risques pour la sécurité civile qui a vocation à être mis en oeuvre pour gérer le risque
des épizooties majeures : le dispositif ORSEC (Organisation de la Réponse de Sécurité Civile).
Modernisé par la loi n°2004-811 du 13 août 2004, le dispositif ORSEC constitue une réponse unique face à la pluralité
des risques, basée sur une organisation simplifiée et opérationnelle, qui permet de mobiliser sous l’autorité unique du
préfet l’ensemble des acteurs privés et publics. Il s’articule autour d’un tronc commun définissant l’organisation de base
capable de s’adapter à toute type de situation, complété par des dispositions spécifiques propres à certains risques
particuliers.
C’est en tant que risque particulier que les épizooties majeures ont été identifiées comme nécessitant l’élaboration de
dispositions spécifiques ORSEC, au même titre que d’autres risques sanitaires tels que la canicule ou les pandémies.
Objectifs de la mission
La mission technique nous a été attribuée par la direction départementale de la protection des populations (DDPP) du
Morbihan. Elle consistait à élaborer les dispositions spécifiques des épizooties pour le département afin d’intégrer le
plan d’intervention sanitaire d’urgence de la DDPP au dispositif ORSEC de la préfecture.
Compte-tenu du cahier des charges ORSEC, il s’agissait de s’approprier la méthodologie ORSEC puis de piloter la
rédaction d’un document consensuel avec les divers services concernés par lutte contre une épizootie (services de
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
189
170
la préfecture, gendarmerie, service d’incendie et de secours...), sous la coordination du Service Interministériel de
Défense et de Sécurité Civiles (SIDPC).
Réalisation
La première étape du travail fut de prendre connaissance du PISU de la DDPP et d’effectuer une revue de la
réglementation et de la documentation infra-réglementaire en vigueur. En parallèle, des échanges avec l’adjointe au
chef du service santé protection animales et avec le coordinateur régional des plans d’urgence, permirent de mieux
appréhender le périmètre de la mission et d’identifier les principaux acteurs du dispositif.
L’intervention du directeur de la DDPP auprès du cabinet du Préfet permit la programmation d’une rencontre entre le
SIDPC et la DDPP afin de discuter du projet. Une réunion de lancement avec les acteurs principaux fut rapidement
organisée par le SIDPC afin que nous puissions leur présenter les problématiques sanitaires, les enjeux du projet et
le calendrier prévisionnel de réalisation du projet. Des cartes permettant de visualiser la répartition des “victimes”
potentielles d’une épizootie dans le Morbihan ainsi qu’un rappel de l’impact économique potentiel avaient été insérés
au diaporama afin de marquer les esprits. Pour accélérer la procédure et nourrir les échanges, un tableau recensant les
principales actions à mener par chaque services fut distribué.
Un projet d’architecture du document fut proposé sur la base des recommandations du guide méthodologique ORSEC
avec trois grands thèmes :
1. Connaissance du risque et des enjeux : présentation des maladies concernées, de leurs cibles, de leur impact
sanitaire et économique, ainsi que des spécificités et vulnérabilités du département ; 2. Stratégie de protection et d’intervention : rappel des grands principes que suivent les mesures de lutte sanitaire
(valider la suspicion, empêcher la propagation, éradiquer le(s) foyer(s)) ; 3. Missions particulières des intervenants : fiches synthétiques listant les missions et les moyens de chaque service. Cette réunion en préfecture fut également l’occasion de nous introduire auprès des principaux interlocuteurs et d’obtenir
leurs coordonnées directes.
Bien que la doctrine ORSEC recommande que chaque service fournisse sa « réponse opérationnelle propre», il fut
décidé, compte-tenu des délais contraints, que la DDPP proposerait un document martyr que les services concernés
seraient ensuite invités à commenter. Il s’agissait d’élaborer un document synthétique permettant une appropriation
facile par les agents et comprenant des aides mémoires, de façon à clarifier l’attribution des rôles et la logique des
missions.
Afin d’informer l’ensemble des acteurs concernés de l’évolution du projet, un compte-rendu de réunion accompagné
d’un exemplaire du diaporama fut diffusé.
Le coordinateur régional des plans d’urgence mit à notre disposition les documents élaborés par trois autres
départements français aux profils distincts du Morbihan.
Résultats
Les échanges avec le SIDPC et les services concernés ont abouti à l’élaboration d’un document consolidé après deux
versions consécutives.
Nous nous sommes attachés à présenter les éléments de contexte et de stratégie de manière simple, succincte et
opérationnelle. Le format des fiches missions et des fiches moyens a été inspiré par le plan de prévention des risques
Nucléaires Radiologiques Biologiques et Chimiques (NRBC) avec un code couleur. Ces fiches synthétiques listent
d’une part les missions de chaque service en cas de déclenchement du plan pour répondre à la demande du “qui fait
quoi”, et d’autre part les moyens dont ils disposent avec une approche capacitaire. Des modèles d’arrêtés préfectoraux
ainsi que des instructions relatives à la construction de rotoluves et à l’élimination de cadavres sont annexés.
Compte-tenu des délais contraints et du grand nombre d’acteurs impliqués, il a été proposé de fixer un délai de rigueur
pour une ultime relecture du projet par les services avant de le soumettre à la validation du Préfet.
Mission complémentaire
Au terme de l’élaboration des dispositions spécifiques ORSEC, il nous a semblé utile de mettre à profit la vision globale
que nous avions acquise pour améliorer le PISU existant. Nous avons ainsi proposé de rédiger de nouvelles instructions
et de remanier certains documents pour plus de lisibilité. Nous nous sommes inspirés de l’architecture des guides
de bonnes pratiques de protection animale en abattage, qui comprennent des modes opératoires normalisés et des
annexes, et avons synthétisé l’ensemble des documents sous la forme d’un logigramme récapitulatif.
171
Cette présentation avait pour objectif de faciliter l’accès et l’appropriation des documents par les agents ne travaillant
pas quotidiennement sur les PISU, considérant qu’ils étaient susceptibles d’intervenir en période d’astreinte ou en cas
de crise. Elle en outre paraissait adaptée à une publication sur le site intranet.
Discussion
L’élaboration de dispositions ORSEC repose sur la collaboration de services qui ne sont pas nécessairement familiers
du sujet concerné. En tant que mission de sécurité publique, la préparation de la réponse face au risque des épizooties
majeures fait cependant appel à un travail collaboratif. Elle induit l’implication d’une diversité d’acteurs et de structures
qui peut freiner la réalisation du projet.
Premièrement, étant donné qu’ORSEC se base sur une démarche participative, il est difficile d’obtenir l’implication de
tous les acteurs concernés sur une même période. En effet, les directions départementales interministérielles reçoivent
leurs priorités par deux canaux d’instruction : le Préfet et leurs ministères de tutelle. Dans cette configuration bicéphale,
des conflits de priorité apparaissent. Un travail de sensibilisation et de relance s’avère donc nécessaire pour faire
progresser le sujet au sein du classement des priorités des autres services et du SIDPC.
On constate alors que les agents les plus sensibilisés sur des sujets qui n’entrent a priori pas dans leur domaine de
compétence, le sont de par leur expérience personnelle propre ou de par des activités qui les amènent à côtoyer des
éleveurs ou des vétérinaires. Il semble donc important de multiplier les contacts entre les agents de l’Etat pour créer du
lien et développer une culture et un langage communs, par exemple à l’occasion d’exercices de simulation.
L’implication de certains services reste difficile. C’est par exemple le cas du Conseil Général, qui a nouvellement été
identifié comme un acteur potentiel du dispositif ORSEC Epizooties. Cette collectivité territoriale a en effet hérité de
nouvelles compétences lors la réforme de l’administration territoriale de l’Etat (REATE) en 2010, alors qu’elle n’était
jusqu’alors pas familière de la gestion d’urgence ni de crise. On constate que la formalisation des actions contribue à
rendre l’action collective plus efficace. On peut penser que la clarification des rôles par ORSEC jouera un rôle clé dans
le développement des coopérations interprofessionnelles.
Gestion officielle de la santé animale en Belgique : Etat des
lieux, analyse SWOT et proposition d’organisation idéale
Benoîte LETAVERNIER, Inspectrice stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 14 avril 2014 au 25 juillet 2014 à l’Agence fédérale pour la Sécurité de la Chaîne alimentaire (AFSCA),
Belgique, sous la responsabilité de Pierre Naassens, CVO – directeur général de la Direction Générale Politique de
Contrôle
Questions abordées par l’étude 190
La gestion officielle de la santé animale en Belgique est complexe de par le nombre d’acteurs impliqués et l’imbrication
de leurs missions. L’analyse des modalités institutionnelles et opérationnelles de cette gestion a fait l’objet d’une
étude menée dans le cadre d’un stage de trois mois à Bruxelles à l’Agence fédérale pour la Sécurité de la Chaine
alimentaire (AFSCA), auprès du directeur de la direction générale de Politique de Contrôle (DG PCCB). Elle clôture la
formation statutaire d’Inspecteur de la Santé publique vétérinaire (ISPV) et s’inscrit dans le cadre du «Certificat d’Etudes
Approfondies Vétérinaires» (CEAV), habilité par l’École nationale des Services vétérinaires (ENSV).
Pour bien comprendre l’organisation et le fonctionnement des instances belges en charge de la gestion de la santé
animale, il est opportun de préciser le contexte de l’étude et plus particulièrement trois aspects :
- le contexte historique général, avec les réformes successives de l’Etat belge et la réforme Copernic qui a modifié
fortement le visage de l’administration belge dans les années 2000, réformes qui ont mené à la structure actuelle de
l’État belge. - le contexte socio-économique. Les crises sanitaires en Europe qui se sont déroulées depuis une vingtaine d’années,
notamment la crise de la dioxine ont eu des conséquences importantes sur différents plans, politiques, économiques et
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
190
172
organisationnels. Le phénomène de mondialisation du marché et des restrictions budgétaires sont également à prendre
en compte. - le contexte politique particulier. Des élections ont eu lieu durant le stage pour renouveler les gouvernements fédéral et
régionaux. C’est une opportunité pour élaborer une proposition de réorganisation des autorités fédérales en charge de
la sécurité de la chaine alimentaire en général et donc de la santé animale en particulier pour en améliorer l’efficience.
L’éventualité de ne plus avoir de ministre de l’Agriculture tutélaire de l’AFSCA est à prendre en considération.
L’étude commanditée par l’AFSCA consistait à réaliser un état des lieux de la gestion officielle de la santé animale
en Belgique, d’en retirer les éléments nécessaires à une analyse SWOT et de proposer des pistes d’amélioration par
l’élaboration d’un schéma idéal de la gestion officielle de la santé animale. Elle s’est concentrée sur l’échelon fédéral
mais les documents de travail élaborés durant l’étude permettront au commanditaire de réaliser d’autres analyses
SWOT en « cadrant » de façon différente ; sur un échelon particulier ou sur une thématique particulière par exemple.
Elle a fait l’objet d’un suivi régulier par des agents de l’AFSCA ainsi que par un membre du cabinet de la ministre en
charge de l’Agriculture. La forme du rendu était cadrée; une formalisation des objectifs stratégiques et opérationnels a été l’étape initiale qui a
fait l’objet d’une discussion ouverte et constructive entre les membres du groupe de travail.
Puis a été construit un tableur Excel reprenant les acteurs de la gestion officielle de la santé animale, de l’éleveur
à l’Organisation mondiale de la Santé animale (OIE), en passant par toutes les organisations et institutions belges
et européennes parties prenantes dans le domaine. Les particularités propres à la Belgique ont fait que le nombre
d’acteurs est assez étonnant : l’existence de la pluralité des langues officielles liées à deux zones linguistiques distinctes
(sans compter la partie germanophone de la Belgique), la Flandre et la Wallonie, duplique de facto un nombre important
d’acteurs. Les compétences des autorités « services vétérinaires » sont réparties sur des entités juridiques différentes,
l’Etat fédéral et les entités fédérées que sont les régions, dont les réglementations sont équipollentes et entre lesquelles
il n’existe pas de hiérarchie. Ceci peut conduire à des politiques, et des applications de celles-ci, différentes entre la
Flandre et la Wallonie pour certains points comme la surveillance sanitaire de la faune sauvage. Le niveau fédéral est en
lui-même complexe : la répartition des missions entre le Service public fédéral Santé publique, Sécurité de la Chaîne
alimentaire et Environnement (SPF SPSCAE) et l’AFSCA pour le domaine de la sécurité de la chaîne alimentaire est
quelque peu alambiquée, que ce soit pour un observateur externe tel que l’auteure ou pour les agents eux- mêmes,
d’autant que cette répartition a évolué au cours du temps. De plus, la tutelle ministérielle a une réelle importance dans
le fonctionnement des institutions et traduit une certaine politisation de l’administration en charge de la politique de
l’alimentation.
Le projet a été voulu collectif dès le début. L’analyse SWOT (Strengths (forces), Weaknesses (faiblesses), Opportunities
(opportunités), Threats (menaces)) et la proposition de schéma idéal ne devaient pas être réalisées par l’auteure seule.
Il est compréhensible que le temps pouvant être accordé à ce projet par une stagiaire ou un agent de l’AFSCA ne
soit pas le même. Il était logique que soient proposés dans le temps imparti du stage, afin de construire un étude
conséquente et cohérente, une analyse SWOT et un schéma idéal. On peut s’interroger sur la pertinence de la méthode.
En effet, l’analyse SWOT est généralement réservée à un domaine relevant du marketing ou du business et non à
une administration. Néanmoins, à la réflexion, nous pouvons y trouver une certaine logique. En effet, la nature même
de l’agence telle qu’elle a été imaginée à l’origine repose sur les principes d’un courant de pensée, le New Public
Management, qui a conduit à une réforme de l’administration belge de grande ampleur à l’orée des années 2000, la
réforme Copernic. Il s’agissait alors d’appliquer les principes et les méthodes du privé et de les adapter au secteur
public. Si aujourd’hui, la réforme Copernic n’est plus soutenue politiquement, son influence se fait toujours sentir.
L’analyse SWOT n’est donc pas si incongrue comme elle pouvait le paraître au premier abord. Cette méthode a fait
apparaitre les atouts et les faiblesses de l’échelon fédéral mais aussi les opportunités et les menaces présentes dans
l’environnement des institutions concernées.
La proposition de fusion entre l’AFSCA et la DG4 (Direction générale 4) du SPF SPSCAE n’est pas une surprise pour
plusieurs raisons : c’est une idée qui est évoquée depuis longtemps sans qu’elle ne se concrétise. Le fait que ce soit,
sur le papier du moins, la même ministre de tutelle pour l’AFSCA et une partie de la DG4 du SPF est également un
indice important. Enfin, la régionalisation en cours induit un transfert d’une partie non négligeable des compétences du
SPF SPSCAE vers les régions. Les compétences résiduelles du SPF n’ont que peu à voir entre elles. La fusion des deux
structures n’est plus une question de faisabilité mais une question de temps.
Par ailleurs, la préconisation du Codex alimentarius de séparer l’évaluation et la gestion du risque de façon claire
est à prendre en compte. L’instauration d’une autorité d’évaluation du risque indépendante de la gestion du risque
regrouperait toutes les instances existantes au sein du SPF SPSCAE, de l’AFSCA, du Centre d’Étude et de Recherches
Vétérinaires et Agrochimiques (CERVA) et de l’ Agence fédérale des Médicaments et des Produits de Santé (AFMPS) et
garantirait une absence de conflit d’intérêts.
173
Enfin, ces propositions iraient dans le sens d’une simplification administrative, d’une clarification des missions de
chacun pour les partenaires des institutions fédérales et d’une meilleure efficience, ce qui répondrait notamment aux
devoirs d’économie d’échelle dans le contexte socio-économique actuel.
Globodera sp. français et Globodera sp. belges : des parasites
différents ? Comparaison de la gestion des nématodes à kystes
de la pomme de terre entre la région Nord-Pas-de-Calais et la
Belgique
Bruno MEGANCK, Inspectrice stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 10 avril au 8 août au SRAL de la DRAAF du Nord-Pas-de-Calais sous la responsabilité de Cécilia
MATHIS chef du Pôle Alimentation / Surveillance des Organismes Réglementés
Questions abordées par l’étude 191
« Ils en ont rien à foutre de la réglementation ! », ou encore « en Belgique c’est plus facile ! 192» . Ce sont le genre de
propos qu’entendent régulièrement les agents du Service Régional de l’Alimentation (SRAL) du Nord-Pas-de-Calais
(NPdC).
Ces récriminations régulières, que font certains agriculteurs du NPdC auprès des agents de contrôle du SRAL,
concernent la gestion des Globodera pallida et Globodera rostochiensis – ou nématodes à kystes de la pomme de terre
. Ils considèrent que leurs homologues belges n’ont pas les mêmes contraintes qu’eux, que la situation de ces derniers,
sur le sujet, est moins difficile et qu’ils (les producteurs de pomme de terre193 français) souffriraient d’une distorsion
de concurrence. Ils en viennent, alors, de façon plus ou moins directe, à critiquer les modalités de gestion françaises.
La récurrence de ces remarques, de la part des producteurs de pommes de terre, est une des raisons qui ont été
avancées par le SRAL pour proposer un travail sur les différences, dans les modalités de gestion de ces parasites, de
part et d’autre de la frontière franco-belge.
Pour autant, quels que soient les domaines, les contrôle effectués par l’administration sont, a minima, vécus comme
une contrainte par les personnes qui les subissent – même si la plupart en perçoivent la nécessité. Cette perception
est d’autant plus négative que, en fonction de leurs résultats, certains contrôles peuvent amener à des mesures de
régulation contraignantes194 , voire coercitives195 . On observe effectivement, régulièrement et dans tous les domaines,
des réactions négatives, voire agressives, de la part des personnes contrôlées.
Ce constat m’a amené, dans un premier temps, à étudier les motivations de la demande. Les informations récoltées
m’ont permis, dans un second temps, de concrétiser la demande sous forme de deux objectifs. Ces objectifs ont
été présentés au chef de service du SRAL et au chef du pôle des politiques alimentaire et phytosanitaire, santé des
végétaux (nommé Chef de pôle pour la suite de ce document) et validés sous la forme suivante :
- apporter aux agents du SRAL des éléments d’information comparée et objectivée de la gestion des nématodes du
genre Globodera entre la région NPdC et la Belgique
- si possible et sous réserve de l’accord de la Direction Générale de l’Alimentation (DGAL) et de l’Agence Fédérale pour
Sécurité de la Chaîne Alimentaire (AFSCA), organiser une rencontre entre les agents de contrôle français et belges Dès lors, pour répondre à la demande du SRAL, mon travail a été organisé de la façon suivante :
- étude des motivations et du contexte de la demande ; que sont ces parasites ? Quels sont les enjeux liés à ce parasite
? Pourquoi les remarques des agriculteurs ont elles provoquées la demande en question ? Y-a-t-il d’autres raisons ?
- point sur les acteurs de la filière, notamment ceux de Belgique,
- état des lieux de la gestion des nématodes à kystes de la pomme de terre dans le but d’objectiver les récriminations
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
192
Ce sont des propos tenus par un exploitant et entendus lors de l’accompagnement d’un agent du SRAL pour un contrôle
export de pomme de terre.
193
Ces nématodes sont des organismes de quarantaine ; ces organismes nuisibles aux végétaux sont réglementés par des
Directives européennes et régulés par la Convention Internationales de la Protection des Végétaux (CIPV).
194
C’est le cas, lors de la découverte d’un micro-organisme pathogène, des mesures administratives prises pour en éviter la
propagation et pour l’éradiquer.
On pense aux mesures pénales en cas d’infraction, aux retraits de primes suite à un contrôle
conditionnalité défavorable, etc.
195
On observe, effectivement, des cas de réaction excessive comme celui de l’assassinat de deux inspecteurs du travail en
Dordogne en 2004.
191
174
des exploitants et le questionnement des agents du SRAL à propos de la différence qui existerait entre la Belgique et
la France quant à la gestion du Globodera. Cet état des lieux s’appuie sur une étude documentaire et bibliographique
et, sous réserve de l’accord de la DGAL et de l’AFSCA, sur des observations sur le terrain en France et en Belgique, - réalisation des objectifs validés par le chef de service du SRAL et le chef de pôle.
Partie I : Quels sont les enjeux liés aux nématodes à kystes de la pomme de terre ?
Globodera pallida et Globodera rostochiensis, comme leur nom vernaculaire l’indique, sont des parasites quasi exclusifs
des pommes de terre. Les enjeux liés à leurs effets néfastes sont donc, a priori, intimement liés aux caractéristiques
économiques de la production de ce tubercule ; les pays et régions pour lesquels la production de pommes de terre
a une place importante seront, effectivement, particulièrement impactés par la présence de ces parasites et ses
conséquences.
I.1/ La pomme de terre – un enjeu économique important pour la région Nord-Pas-de- Calais ?
Ce chapitre vise à faire le point sur le contexte économique de la filière pomme de terre en France et, plus
particulièrement pour la région Nord-Pas-de-Calais. Les données relevées concernant la production de pomme de
terre en frais, et notamment la pomme de terre de consommation, montre que c’est une production végétale qui a une
balance commerciale bénéficiaire et qui présente un poids agro-économique important en France et particulièrement
dans la région NPdC ; région qui domine ce marché avec la région Picardie. On peut donc, facilement, imaginer que
toute perturbation négative et importante de cette production aura des répercussions économiques non négligeables
qui pourront toucher non seulement les producteurs, mais aussi tous les acteurs des secteurs économiques qui lui
sont liés de façon plus ou moins directe (industriels, courtiers, négociants, restaurateurs, consommateurs, etc.). Dans
ce contexte, on peut facilement comprendre que toute entrave à ce commerce peut-être source de tension pour les
acteurs concernés I.2/ Enjeux liés au parasite
L’étude des caractéristiques des nématodes à kystes de la pomme de terre montrent que leur activité à des répercussions
directes et indirectes sur la production de pomme de terre.
I.2.1/ Conséquences directes
Ces effets sont la perte de rendement, jusqu’à 80% de perte, et la diminution de la valeur marchande du fait de
perturbations organoleptiques
De plus, le mode de dissémination fait que :
- Il est difficile de détecter un premier foyer dans une parcelle sans une analyse de laboratoire spécifique,
- l’extension de ces parasites est difficile à maitriser une fois qu’un foyer est apparu dans une parcelle et n’a pas été
détecté rapidement (transmission par le matériel et les machines agricoles notamment).
I.2.2/ Conséquences indirectes
En réaction aux effets directs, les autorités ont prescrits tout un panel de règles qui, bien que nécessaires d’un point de
vue sanitaires, peuvent être perçues, par les professionnels tenus de les respecter, comme des contraintes et des freins
à leurs activités commerciales. Il est donc aisé de comprendre, d’une part, les manifestations de mécontentement
de producteurs face à un sentiment d’inégalité de traitement, à leur détriment, dans la gestion de ces nématodes et,
d’autre part, les questions posées aux agents du SRAL sur les fondements de ces inégalités, voire la remise en cause
de leurs contrôles.
I.3/ Autres enjeux C’est, aussi, le champ de ces questions qui est à l’origine de la proposition du sujet de ce rapport. Il est, en effet,
difficile pour les agents du SRAL d’y répondre de façon argumentée. Ces questions portent non seulement sur la
réglementation et les méthodes de travail françaises mais aussi belges. Or, il s’est avéré, au cours des observations
effectuées sur les 15 premiers jours du stage que la réglementation, l’administration et les acteurs belges n’étaient peu,
voire pas, connus des agents du SRAL. Cette observation est à l’origine du travail effectué dans le cadre de la partie
II de ce rapport. 175
Partie II : Quels sont les acteurs français et belges des filières de la pomme de terre
Le travail, ici, a été de faire un point sur les acteurs de la filière afin, notamment, de donner les informations concernant
la Belgique aux agents du SRAL. Ce travail a aussi permis de sélectionner les acteurs à rencontrer pour les entretiens.
Concernant notre problématique, les récriminations entendues par les agents du SRAL venaient, exclusivement, des
producteurs et des exportateurs de pomme de terre, et plus précisément, de pommes de terre de consommation. Les
plants de pomme de terre ont une gestion spécifique qui est homogène entre les deux pays.
Le travail a été, suite à ce constat, orienté sur la filière consommation et, par conséquent, les acteurs choisis pour les
entretiens furent (annexe XXVI) :
- des producteurs de pomme de terre de consommation, de la région NPdC, dont un exportateur et des membres
d’organisations professionnelles et interprofessionnelles,
- un producteur belge membre d’une organisation interprofessionnelle, - des agents de l’administration française et belge, en centrale et en service d’inspection.
Partie III : Etat des lieux de la réglementation et de son application : des réglementations différentes et/ou des
applications différentes ?
La comparaison des textes régissant la gestion des nématodes et le résultat des entretiens ont permis d’objectiver les
différences entre le Nord-Pas-de-Calais et la Belgique. Tout d’abord, au fur et à mesure des entretiens, le champ des différences a été réduit directement par les producteurs
français.
Et finalement, à part les différences visibles et présentées dans cette partie, certains points de différences soulevés par
les professionnels ne semblent pas réellement fondés. En tout cas, dans ce qui ressort de l’observation des documents
officiels et des entretiens fait avec l’administration belge. Par ailleurs, des entretiens réalisés auprès des professionnels de la région NPdC, montrent que les récriminations sur
les différences de traitement entre la France et la Belgique visent plutôt l’administration française
Globalement, si ils sont sensibles aux aspects sanitaires, les professionnels lui reprochent de « laver plus blanc que
blanc » et « d’en remettre une couche » ; d’aller au-delà des Directives, quand d’autres pays les appliquent, ni plus, ni
moins.
L’absence de possibilité de valorisation des lots, malgré les études effectuées par la profession, fait aussi partie des
faits reprochés. Ils ne comprennent pas le refus de valider le processus de nettoyage des pommes de terre, alors que,
de leur point de vue, les résultats semblaient satisfaisants. Incompréhension d’autant plus forte qu’aucun retour clair
sur ce refus ne leur a été fourni.
Pour eux, tout cela est excessif et va à l’encontre du bien-être économique de la filière. C’est, notamment, un frein à
l’exportation vers les pays tiers ; les producteurs du NPdC refusent, de plus en plus, que leurs marchandises partent à
l’exportation par crainte des conséquences d’un éventuel résultat positif en nématodes à kystes des pommes de terre.
En conclusion et à propos de la réalisation des objectifs
Cette crainte des résultats positifs et l’exacerbation de la différence entre les pratiques belges et françaises pourraient
paraitre étonnantes vu le faible nombre de différences objectives dans l’application des Directives étudiées. En fait, les
entretiens mettent en relief une différence fondamentale dans l’approche de ce parasite :
- En Belgique la gestion des Globodera sp. est « sereine », ce n’est pas un problème. - En France c’est un sujet tabou, voire une « psychose ». Il y a une volonté, des exploitants, de « passer entre les gouttes
» et un sentiment que « la réglementation est faite un peu pas vu pas pris ».
Ces différences de comportement face au parasite sont, a priori, compréhensibles ; si les points objectivés de différence
sont peu nombreux ils sont fondamentaux. Les possibilités de valorisation des lots contaminés en Belgique permettent aux producteurs de ne pas subir la peur
d’une perte économique conséquente du fait de leurs destructions. Les possibilités d’autogestion des parcelles, sans
déclarations nominatives, évitent la mise au ban des producteurs concernés. Et enfin, les communications de l’AFSCA,
sur ce sujet, semblent claires et bien connues des professionnels En France, la sensation de cul-de-sac en cas de contamination par les nématodes et l’absence de communication
claire des autorités semblent créer le côté « psychotique » dans l’approche de la problématique Globodera sp.
176
Réalisation des objectifs
Les objectifs proposés au chef de service et au chef de pôle ont partiellement été réalisés.
La transmission des informations recueillies s’est faite par des discussions informelles avec les agents, une présentation
au pôle le jeudi 7 août et la mise à disposition du rapport. La création de liens directs entre les UPC et le SRAL a été initiée par la visite des UPC en compagnie d’agents du pôle.
La programmation des rencontres a été proposée aux agents des UPC rencontrés lors des entretiens. Mais aucune
date précise n’a été, pour le moment fixée. Limite des contrôles actuels sur le bien-être animal et intérêt de
l’intégration des mesures de type « animal based »
Anne-Cécile MEYER-WARNOD, Inspectrice élève de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2015
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 24 février 2014 au 20 juin 2014 à la DDPP de Saône et Loire sous la responsabilité de Jean-Bernard
DERECLENNE, chef de service filière volailles et abattoirs
Questions abordées par l’étude 196
Avec la domestication de l’animal par l’homme, ce dernier voit dans l’animal l’aspect utilitaire : force de travail,
nourriture, habillement, etc. L’animal d’élevage a donc une utilité économique. Après la Seconde Guerre mondiale, un
« pacte productiviste » est conclu entre le monde agricole et l’état français afin de nourrir la population. On a assisté
à l’émergence d’élevages spécialisés, industrialisés et de grande densité s’accompagnant d’une mécanisation des
tâches. Depuis les années 90, on est en surproduction. Les consommateurs, n’ayant plus à craindre le manque de
nourriture, commencent à s’intéresser à la qualité des produits qu’on leur fournit, ainsi qu’au traitement des animaux.
Ainsi, aujourd’hui, la problématique du bien-être animal répond à une demande croissante de la société française
et européenne. En effet, d’après l’Eurobaromètre de 2010, 64% des européens se disent inquiets pour le bien-être
des animaux d’élevage. Cette réflexion grandissante autour du bien-être animal a donc conduit à une évolution de la
réglementation.
Dans certains cas, ce n’est pas le terme « bien-être animal » qui est employé, mais le terme « protection animale ». Lors
de l’utilisation de ce terme réglementaire, il est sous-entendu que les acteurs n’apprécient pas le bien-être animal en
tant que tel, mais le respect de la réglementation. Cette réglementation, qui énonce des obligations de moyens (normes
en termes de bâtiments, de pratiques d’élevage etc.) n’a donc pas pour ambition de respecter le bien-être animal mais
bien d’obliger les éleveurs ou intervenants à respecter des normes censées assurer le bien-être animal.
En ce qui concerne la perception de ces contrôles « Protection Animale » par les agents des DD(CS)PP, une appréhension
vis à vis de la subjectivité (ou du manque d’objectivité) qui entoure la mesure du bien-être animal en élevage est relevée.
Ainsi, le but de cette étude est de voir comment intégrer certaines mesures (en particulier basées sur les animaux) aux
contrôles Protection Animale afin de les objectiver et d’améliorer les conditions de bien-être animal suivant la législation
en élevage bovins ?
I. Réglementation et contrôles conditionnalité
1.1. Réglementation actuelle en Protection Animale
Actuellement, le principal texte sur le bien-être animal est la directive européenne 98/58/CE du Conseil du 20 juillet 1998
concernant la protection des animaux d’élevage (personnel qualifié, obligation de tenir à jour un registre, obligation de
permettre aux animaux de se déplacer sans souffrance inutile, et de disposer d’une alimentation et d’un abreuvement
sains et adaptés et d’une ambiance de bâtiment acceptable). Au-delà des directives européennes transcrites telles
quelles en droit français, le bien- être animal est intégré aux exigences liées à la conditionnalité des aides de la PAC
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
196
177
(Politique Agricole Commune) depuis 2007.
La particularité de cette réglementation repose sur le fait qu’elle est basée sur l’obligation de résultats par l’éleveur,
les autres directives portant sur l’obligation pour l’éleveur de mettre en place des moyens pour satisfaire le bien-être
de ses animaux et leur respect est contrôlé en élevage. Concernant la PAC, c’est le règlement (CE) n° 73/2009 du
Conseil de l’Union Européenne du 19 janvier 2009 qui établit les règles pour les régimes de soutien direct en faveur des
agriculteurs. De plus, l’article 22 explique la fonction des contrôles de la conditionnalité : vérifier sur place si l’agriculteur
respecte ses obligations.
1.2. Les contrôles conditionnalité
On peut distinguer deux types de contrôles de la conformité des élevages par rapport à la réglementation, pour la
conditionnalité (le versement de certaines aides communautaires se fait au respect d’exigences de base) ou hors
conditionnalité, qui ont chacun leur grille d’inspection. Les visites pour la conditionnalité des aides peuvent se traduire
par une pénalité sur les primes des éleveurs si des non-conformités sont notées, les visites hors conditionnalité ne se
traduiront que par des mesures administratives (simple rappel de loi à la mise en demeure).
En France, les modalités de contrôle sont l’objet d’une note de service et de trois circulaires annuelles présentant
la mise en œuvre de la conditionnalité de l’année. Elles sont revues tous les ans et constituent des documents de
référence pour les contrôleurs, avec le Vade-mecum.
La DD(CS)PP est le seul organisme de contrôle compétent pour
les contrôles dans le domaine protection animale.
1.3. Une subjectivité remarquée
Le travail des contrôleurs est l’évaluation formalisée du bien-être animal au travers des contrôles « Protection Animale
» qu’ils réalisent en élevage. La grille d’évaluation du bien-être utilisée est très générale puisqu’elle est la même pour
toutes les espèces (bovins, volailles, lapins, ...), sauf les porcs et les veaux qui ont leur propre grille. Elle semble en
outre plus adaptée à des problèmes de protection animale vraiment importants. L’utilisation du vade-mecum, guide
de contrôle jugé comme très précis par la DGAL mais estimé trop vagues et rébarbatifs par les agents des DD(CS)
PP, n’assure pas forcément non plus une évaluation du bien-être animal précise. En effet, de nombreux point du
vademecum sont subjectifs et donc soumis à l’appréciation du contrôleur, comme par exemple « la perception d’une
odeur d’ammoniac irritante pour les muqueuses sera révélatrice de conditions d’ambiance mal maîtrisées. » ou, dans
les bâtiments disposant d’un éclairage naturel, « la luminosité doit être suffisante pour permettre de voir les animaux. »
Au final, les contrôleurs avouent ne s’y référer que rarement, tandis qu’ils privilégient beaucoup plus leur expérience de
terrain afin de juger de l’état des animaux.
Les directives contiennent également des dispositions qui sont trop générales pour avoir des effets pratiques. Par
exemple : « Tous les animaux doivent avoir accès à la nourriture à des intervalles correspondant à leurs besoins
physiologiques ».
Ainsi, l’évaluation du bien-être se fait souvent à « l’œil ». Les contrôleurs ont l’habitude de voir les animaux, d’évaluer
le bien-être et se basent sur leur expérience et leurs connaissances, avec des critères qui leur sont propres, parfois
centrés sur l’animal, et qui vont ensuite influencer leur diagnostic ou au moins orienter les contrôles. Ils ont conscience
de la subjectivité de leur évaluation mais font confiance à leur expérience et leurs connaissances. Le fait d’être en
binôme leur donne cependant l’impression d’être plus objectifs car ils peuvent confronter leurs connaissances et leur
expérience. En fait, l’évaluation en binôme est surtout un moyen de rendre leur appréciation plus légitime et donc moins
contestable par l’éleveur.
II. Pistes d’amélioration du contrôle du bien-être animal
Dans la logique de contrôle du respect de la réglementation, les grilles d’évaluation sont axées sur les moyens mis en
œuvre par l’éleveur pour fournir aux animaux des conditions d’élevage adaptées (directive 98/58/CE). Ainsi, sur les cinq
points d’évaluation, un seul porte sur l’état de l’animal lui- même, les autres portent sur son environnement.
Les mesures basées sur les animaux (« animal-based ») consistent à analyser les comportements des animaux, leur
santé ou certains paramètres de production afin d’évaluer comment les animaux réagissent à ce qui les entoure (état
effectif de bien-être de l’animal). Les mesures basées sur l’environnement (« non animal-based ») consistent simplement
à décrire les systèmes de logement et la gestion du troupeau par l’éleveur.
Les mesures observées directement sur les animaux sont généralement considérées comme étant des mesures plus
directes du bien-être au sens où elles cherchent à évaluer directement l’état de l’animal. En effet, puisque le bienêtre se réfère aux caractéristiques de l’animal plutôt qu’à ce qu’on lui donne, il semble logique de les privilégier. Elles
seraient donc préférables aux mesures sur l’environnement pour évaluer le bien-être des animaux. Malheureusement,
178
elles sont souvent beaucoup plus difficiles à réaliser et les observations demandent plus de temps (notamment
pour les observations comportementales). De plus, les résultats collectés peuvent se révéler difficiles à interpréter
en termes de bien-être, certaines mesures pouvant être liées à plusieurs dimensions du bien-être. Par exemple, le
faible état d’engraissement d’un animal peut être dû à un problème de nourriture (manque, mauvaise qualité ou ration
déséquilibrée) ou à une maladie chronique.
Les mesures non fondées sur les animaux doivent donc continuer à être utilisées lorsqu’il est manifeste qu’elles
empêchent l’apparition de problèmes touchant au bien-être des animaux, par exemple la présence d’objets tranchants
ou de saillies dans les stabulations, et ce d’autant plus si elles peuvent être réalisées assez facilement et demandent
peu de temps. De plus, elles sont généralement faciles à standardiser et peuvent être répétées sans difficultés. Ces
mesures sont donc les plus objectives et de ce fait les plus répétables, en opposition aux mesures effectuées sur les
animaux comme les mesures comportementales qui ont la plus faible reproductibilité.
Les contrôles conditionnalité en Protection animale ne se font pas souvent seuls, ils sont au moins associés avec
le paquet hygiène. La partie la plus longue lors des contrôles est le troisième volet, l’identification des animaux. En
moyenne, cela prend entre une et quatre heures, soit 60-70% du temps passé sur l’exploitation. Il ne faut pas non plus
oublier le temps passé à préparer la visite et le temps passé à rédiger les rapports et courriers.
Il ne faut donc pas que les mesures réalisées fassent perdre trop de temps, et qu’elles soient le plus objectives possible.
J’ai alors dû sélectionner les critères qui puissent se mesurer en un simple coup d’œil et qui peuvent se faire en
même temps que la visite de la ferme, tout en étant objectifs, répétables et moins contestable par les éleveurs. Par
exemple, en regardant le troupeau dans son ensemble, on regarde le déplacement des animaux, s’ils ne boitent pas
; on peut également faire des notes d’état corporel et de propreté. En revanche, tout ce qui correspond à l’étude du
comportement des bêtes est trop chronophage.
Pour sélectionner les critères utiles à notre cadre d’étude, j’ai utilisé la « boîte à outils » de l’EFSA qui fournit une liste
de mesures à sélectionner en fonction de l’objectif recherché puis à réaliser en élevage pour effectuer une évaluation
du bien-être adaptée au cas considéré (contrôle de la réglementation pour nous). Pour créer cette « boîte à outils »,
l’EFSA s’est largement inspirée de l’étude Welfare Quality® qui a développé une méthode standard d’évaluation du
bien-être animal et de notation des élevages et des abattoirs. Cette boîte se présente sous la forme d’un tableau à trois
colonnes : la première présente un critère (par exemple la recommandation n°11 stipule que le système d’alimentation
doit permettre à toutes les vaches d’être nourries selon leurs besoins en qualité et en quantité), les deux autres donnent
les mesures respectivement sur l’animal et sur l’environnement qui peuvent être utilisées pour voir si la recommandation
est respectée.
J’ai donc procédé comme suit :
1. Sélection des recommandations correspondants à notre objectif de contrôle : ceux existant déjà dans les grilles
conditionnalité ou Sigal, et ceux qu’on pourrait y intégrer ;
2. Sur cette sélection, retenir les mesures qui seraient les plus pratiques à réaliser lors des contrôles ;
3. Recherche bibliographique sur ces mesures ;
4. Etude de la faisabilité de ces mesures lors de contrôles ;
5. Retirer les mesures qui prennent trop de temps ou qui sont trop techniques ;
6. Création de fiches techniques (Guide pratique) et proposition de formations.
A l’issue des deux premiers points, voici les mesures retenues :
Mesures « animal-based »
Mesures « non animal-based »
Altérations de la peau
Analyse macroscopique nourriture
Boiteries
Box d'isolement
Collisions avec le matériel
Comportement de l'éleveur
Consistance des bouses
Design du bâtiment
Douleurs : Caudectomie / Marquage
Diplômes et formations
Glissades +/- chute
Inspection des abreuvoirs
"Maladies" : toux, jetage nasal, oculaire et vulvaire,
diarrhée, respiration difficile
Inspection des auges
Intensité lumineuse
179
Note d’état corporel (NEC)
Nombre de places au cornadis
Propreté des vaches
Profondeur de lisier/fumier
Signes de chaleur ou de froid
Registre d'élevage
Temps pour se lever/coucher
Système de surveillance des maladies
Vaches couchées en dehors de la zone
Température
Concernant la recherche bibliographique des mesures les plus adaptées au contexte de contrôle, l’EFSA ne développe
pas la façon de prendre ces mesures. J’ai dû donc rechercher différentes méthodes, en particulier dans le projet Welfare
Quality®, et retenir la plus pertinente dans mon cadre d’application, c’est-à-dire les contrôles Protection Animale
réalisés par les DD(CS)PP.
III. Enquête terrain
Afin de faciliter la prise des notes avec les mesures faites sur les animaux, j’ai créé un tableau qui les résume. Il faut
compter environ 1 minute par vache à noter. Je pense que l’idéal serait de noter 10% des vaches du troupeau avec un
minimum de 10 vaches, en choisissant les vaches aléatoirement, dans tous les prés et bâtiments visités. Ensuite, il faut
réaliser une moyenne des notes (ça ne prend que quelques secondes). Ainsi, ça ne rajoute pas beaucoup de temps de
contrôle.
Enfin, voici quelques remarques sur certaines mesures effectuées :
Lors des contrôles, on ne voit que très rarement un
comportement de coucher (je n’en ai vu aucun parmi la dizaine de contrôles auxquels j’ai assisté), et seulement quelques
comportements de relevé. Ainsi, la probabilité de voir des collisions avec le matériel lors du couchage est très faible et
il est presque impossible de mesurer le temps de coucher. On peut donc retirer ces points des mesures retenues. De
même, le comportement de l’éleveur est difficile à prendre en compte car il n’y a qu’un cas de maltraitance avérée qui
peut donner des suites décemment.
Au moment de la mise au pré, il est normal d’observer des animaux légèrement
diarrhéiques. Il ne faut donc pas sanctionner l’éleveur si consistance des bouses est diminuée et que l’arrière train est
sale (surtout au printemps).
Pour ce qui est des mesures environnementales, elles sont pour la plupart déjà décrites
dans le vade-mecum Inspection PA d’un élevage de bovins. Pour les autres, des normes officielles tendraient à être
étudiées et exposées.
A la suite de toute cette étude, j’ai réalisé un Guide pratique pour expliquer aux agents comment réaliser les mesures.
Ces mesures ont été choisies dans un but d’amélioration de la subjectivité des contrôles conditionnalité actuels dans le
domaine Protection Animale.
Pour chaque mesure retenue, il en est donné une définition et les outils pour l’effectuer. Il
sera précisé enfin à quel(s) paramètre(s) des grilles conditionnalité (tous élevages) et Sigal ces mesures font référence.
Il n’apparaît donc que les mesures utiles aux contrôles actuels.
Une journée de formation semble importante à mettre en place pour expliquer aux techniciens ces nouvelles mesures.
Lors de cette journée, il semblerait aussi qu’il soit intéressant d’ajouter une intervention sur la psychologie/sociologie
du monde des agriculteurs qui pourrait aider les contrôleurs à adapter leur discours par rapport à l’individu qu’ils ont en
face, dans l’unique but que le contrôle se passe bien et que les deux parties en ressortent contentes.
CONCLUSION
L’implication européenne dans le bien-être des animaux va jusqu’à la mise en place d’une section spéciale dans les
contrôles conditionnalité de la PAC et la création du projet Welfare Quality® et d’un groupe spécialisé à l’EFSA. Ce
dernier a créé une boîte à outils de mesures dont je me suis inspirée pour améliorer la subjectivité des contrôles
Protection Animale en élevage.
Après avoir sélectionné 25 mesures que j’ai jugées pertinentes pour les contrôles et facilement applicables en élevage,
je les ai testées en pratique. J’en ai retiré 3 qui se sont révélées non faisables (collision avec le matériel lors du couchage,
temps de coucher et comportement de l’éleveur).
J’ai ensuite compilé les 17 mesures utiles aux contrôles actuels dans
un Guide pratique :
1. altérations tégumentaires,
2. boiteries,
3. consistance des bouses, 4. « maladies » (toux, jetage nasal et oculaire, respiration difficile, diarrhée et jetage vulvaire), 5. note d’état corporel, 180
6. note de propreté, 7. glissades, 8. signes de stress thermique, 9. inspection des abreuvoirs,
10. inspection des auges,
11. nombre de places à l’auge, 12. analyse macroscopique de l’alimentation, 13. présence d’un local/box d’isolement, 14. diplômes et formation, 15. intensité lumineuse, 16. température, 17. registre d’élevage et protocole de soins.
Enfin, les 5 mesures restantes (douleurs (écornage, caudectomie et castration), animaux couchés en dehors de la
zone de couchage, conception du bâtiment, profondeur du lisier/fumier, et système de surveillance) sont d’après moi
facilement réalisables lors des contrôles en élevage. Il faudrait maintenant établir des normes dans les textes en relation
avec ces mesures et faire apparaitre des items correspondant dans les grilles d’inspection avant de les intégrer au
guide. L’organisation des astreintes à la direction départementale de
la protection des populations du Rhône
Laure PAGET, Inspectrice Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 24 avril au 25 juillet 2014 à la DDPP du Rhône sous la responsabilité de Elisabeth CHAMPALLE
(Directrice) et Virginie DUSCH (responsable qualité locale)
Questions abordées par l’étude 197
La Direction Départementale de la Protection des Populations du Rhône : les missions 198
La direction départementale de la protection des populations est compétente en matière de politiques de protection
de la population. Ses services instruisent des autorisations d’exploiter, contrôlent et mettent en œuvre des mesures de
police dont le but principal est de protéger la santé publique, le consommateur et l’environnement.
Le service protection de l’environnement assure la fonction de guichet unique pour l’ensemble des procédures liées
aux installations classées, ainsi que leur contrôle pour les domaines agricoles et agro-alimentaires Dans la logique d’un
contrôle « de la fourche à la fourchette », en amont des missions de contrôle d’hygiène et de sécurité sanitaire des
aliments, la DDPP conduit les actions nécessaires pour lutter contre les zoonoses, les maladies animales réglementées
en raison de leur impact sur la santé des animaux et l’économie du secteur de l’élevage et des industries agroalimentaires et s’assure des conditions de bien-être animale.
Par ailleurs, le service de la protection du marché et de la sécurité du consommateur contrôle le respect de la
concurrence dans la commande publique, la sécurité des consommateurs et la loyauté des transactions et de lutter
contre les tromperies entre professionnels, tout en assurant la surveillance des prix des carburants.
Enfin, le service de la protection économique exerce l’ensemble des missions sur ce thème par des enquêtes de nature
principalement judiciaire, il veille au respect de la loyauté des transactions et de l’information donnée au consommateur.
Ce service a enfin une action très importante de conseil et d’assistance au consommateur dans des litiges ne relevant
pas directement de ses compétences.
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
199
D’après le bilan d’activité 2013 de la DDPP du Rhône
197
181
Il y a donc au sein de la DDPP, cinq services techniques de taille variable (lié à la nature de leur activité), auxquels
s’ajoute des missions supports ; et cinq donneurs d’ordre (le Premier ministre, le ministère des finances, le ministère en
charge de l’agriculture, le ministère de l’environnement, le ministère de l’intérieur). La très grande majorité des agents
est fonctionnaire de la fonction publique d’état mais dépendant de ministères différents.
Les astreintes : de qui s’agit-il et à quoi ça sert ?
Les astreintes de la DDPP maillon de la chaine du réseau des urgences gérées par l’Etat
Les astreintes de la DDPP font partie du système des astreintes de la Préfecture dont l’objet principal est de participer
à la gestion des situations urgentes touchant principalement la sécurité des personnes et des produits : accident de la
voie publique, retrait de la vente des produits dangereux, maladies animales contagieuses ...
Il y a un certain nombre de situations, rentrant dans le champ des missions de la DDPP, qui peuvent survenir en
dehors des horaires d’ouverture et qu’il est nécessaire de traiter sans attendre pour des raisons de sécurité sanitaire ou
économique.
« L’astreinte est un moyen d’organiser la disponibilité d’agents demeurant à leur domicile ou à proximité en
dehors de l’horaire de travail normal pour, en cas d’événement soudain, aléatoire ou imprévisible, intervenir rapidement
lorsque les exigences de continuité du service ou des impératifs de sécurité l’imposent199. »
Une organisation ancienne et obsolète
Ce système est obsolète notamment car il ne tient pas compte de la nouvelle organisation de la structure et des
nouvelles missions. Sous l’impulsion de la circulaire du 21 juin 2013 relatif aux astreintes en directions départementales
interministérielles, la direction souhaite aujourd’hui remettre à jour les procédures des astreintes. Le travail demandé
pour mon stage consiste à revoir l’organisation et les outils de mise en œuvre dans l’organisation actuelle en direction
départementale interministérielle.
Les objectifs de la mission à réaliser lors du stage
Les objectifs du stage définit par la DDPP sont les suivants :
- harmoniser et actualiser les procédures d’astreinte existantes entre les différents départements de Rhône-Alpes, - créer les procédures / fiches réflexes nécessaires à la bonne gestion de l’alerte ou de la crise par un cadre quelle que
soit son origine ministérielle - identifier les réseaux d’acteurs pour gérer les interventions réalisées lors de ces astreintes. La refonte du système des astreintes est considérée par la direction comme un projet pouvant permettre de fédérer
les cadres de la DDPP autour des missions de service public (d’alerte, de crise, de menace, d’incident ...). Ce projet
collectif pourrait permettre de faire émerger un sens commun dans les actions et des voies de collaboration nouvelles
entre services. Mon stage consistait à fournir des outils afin d’atteindre cet objectif. Après la présentation des enjeux, du contexte et des objectifs de la mission, nous détaillerons la méthode retenue pour
l’étude ; la troisième partie proposera des outils à mettre en place pour la réalisation des astreintes et enfin, la dernière
partie suggèrera des pistes relatives à la conduite du changement engendré par la nouvelle organisation. Partie 1 : Enjeux/contexte et objectifs de la réorganisation des astreintes I. - La DDPP une structure jeune dans un contexte difficile : le passage de petites structures identifiées vers une
structure de grande taille inconnue des administrés
La DDPP est née de la fusion entre la CCRF, d’un service de la Préfecture et la DSV en 2010. La structure fusionnée
a une taille plus importante qu’auparavant. Cela a des effets sur l’activité des agents, aussi de nouveaux cadres de
coopération sont à trouver. Le contenu même de l’activité est redéfini, il s’agit pour tous les professionnels de la DDPP
de coopérer avec des acteurs qui n’ont pas les mêmes standards et repères de pratiques.
II - L’organisation des astreintes au sein de la DDPP aujourd’hui : un héritage de l’ancienne Direction départementale
des Services Vétérinaires (DDSV)
Le système actuel d’organisation des astreintes au sein de la DDPP est celui hérité de l’ancienne DDSV qui avait pour
coeur de métier la gestion des crises et des urgences relatives à la santé des animaux et la sécurité sanitaire des
produits alimentaires d’origine animale.
Lorsque la DDPP a été créée le système des astreintes de la DDSV a été conservé en l’état. Cela c’est fait naturellement
puisque seule cette direction (DDSV) mettait en oeuvre des astreintes.
Circulaire du Premier ministre du 21 juin 2013 relative aux astreintes en directions départementales interministérielles, p 10
et p 3.
199
182
III- L’identification des situations d’urgence ou de crise pour la DDPP Le premier travail à réaliser a été d’identifier les situations rentrant dans le champ de compétence de la DDPP, afin de
construire des outils d’aide à la gestion des situations, afin de déterminer les situations nécessitant une intervention et
pour celles-ci, d’apporter les informations à la connaissance de l’agent d’astreinte. IV- L’organisation opérationnelle des astreintes
Il s’agit d’un des enjeux du projet. L’astreinte est actuellement assurée par les vétérinaires or la direction souhaite que
cette tâche soit répartie sur l’ensemble de l’encadrement de la structure et de créer de la coopération au sein de la
DDPP. Ce travail a consisté à :
- étudier les typologies d’astreintes possibles,
- identifier des acteurs du réseau d’astreintes de la DDPP,
- élaborer les d’outils nécessaires à la mise en oeuvre de l’astreinte,
- proposer des scénarii d’organisations possibles.
Partie 2 : Méthodes
I- Enquête exploratoire en Rhône-Alpes
Cette enquête exploratrice, réalisée auprès des DDPP de la région Rhône-Alpes, avait pour objectif de dresser les
grandes lignes du fonctionnement des astreintes, des thèmes ayant nécessité une intervention, leurs durées et les
éventuelles difficultés rencontrées (enquête a par mail auprès des directeurs départementaux et étude de documents).
II- Entretiens individuels avec les managers de la direction
Ces entretiens avaient un double objectif :
1- Recueillir des données sociologiques afin de réaliser une étude de la socialisation professionnelle pour comprendre
ce qui pousse les agents à agir et de faire émerger différents registres de motivation afin de guider les changements
prévus (entretiens semi-directifs).
2- Recueillir les besoins de chacun en terme d’outils et les données techniques nécessaires à l’élaboration des fiches
reflexes.
III- Les étapes du projet
Afin, de mener à bien le projet, quatre étapes ont été définies :
1 - Composition de l’équipe d’astreinte et organisation des astreintes
2 - Identification des situations potentielles et actions à mener lors de l’astreinte
3 - Rédaction d’outils d’aide à la décision
4 – Instructions et formation des agents d’astreintes
Partie 3 : Résultats
I- La définition du type d’astreinte en vue des besoins et des moyens
I-1- Les astreintes : typologie, conditions d’application et rémunération
L’article 1 de l’arrêté du 27 mai 2011 relatif aux cas de recours aux astreintes dans les directions départementales
interministérielles en définissant trois types d’astreinte en fonction des missions assurées par celles-ci : astreinte
d’exploitation (relative aux fonctionnements des infrastructures), astreinte de direction (continuité des fonctions de
direction dont la coordination des interventions), astreinte de sécurité (continuité de service de la DDPP lors de situation
d’alerte ou d’urgence).
La Circulaire du Premier ministre du 21 juin 2013 relative aux astreintes en directions départementales interministérielles,
prescrit des conditions statutaires pour l’astreinte de direction uniquement : être au minimum chef de service200 .
Indemnisation et compensation des astreintes et des interventions201 : le principe est le suivant (cf. annexe 1):
indemnisation pour l’astreinte de direction, indemnisation ou compensation horaire pour l’astreinte de sécurité.
I-2- Les interventions réalisées en Rhône-Alpes de 2010 à mai 2014
Le bilan a permis de réaliser la liste des domaines d’intervention réalisés, que l’on peut classer ces interventions en
Agent de catégorie A, ayant autorité sur un service, sous l’autorité directe du directeur et participant au comité de direction
+ l’adjoint au chef de service lorsqu’il assure les fonctions de chef de service en cas d’absence de celui-ci.
201
Arrêté du 17 décembre 2012 relatif à la rémunération et à la compensation horaire ou en temps des astreintes et à la rémunération des interventions effectuées par certains agents des directions départementales interministérielles.
200
183
fonction du traitement réalisé (entre parenthèse le nombre d’intervention):
- faire suivre au service de la DDPP en jours ouvrés (20), - réorienter vers les structures compétentes (26), - conseiller par téléphone (60) - intervenir sur site (2)
Remarque : une intervention peut avoir plusieurs types de traitements.
La fréquence des interventions en astreinte ne
peut être déduite de cette enquête puisque les données sont parcellaires202 . La durée d’intervention est brève (voir
graphique 1 et tableau 1) fréquemment de moins de 25 min et en moyenne d’une heure et demi. Figure 1 : durée d’intervention lors d’une astreinte
Temps d'intervention
en min
en heure
Min
15
0,25
Max
720
12,0
Moyenne
87
1,4
Médiane
60
1,0
Tableau 1 : durée d’intervention lors d’une astreinte
Lors des astreintes, il se passe, en général, peu de choses. Lorsqu’il y a une intervention, elle est très majoritairement
peu grave et traitée par téléphone. Mais il y a (2 cas entre 2010 et mi 2014) des alertes (suspicion d’épizootie) qui
nécessitent une veille et une intervention en urgence.
II- Les outils d’aide à la réalisation des astreintes
II-1- Les situations retenues et leur hiérarchisation
La liste a été réalisée par les chefs de service et validée par la direction et permet d’orienter sur l’importance et la
gravité de la situation (cf. annexe 2). Les critères de sélection ont été : la gravité, l’importance, la fréquence, le besoin
des administrés, les ordres de service d’action, la valeur ajoutée dans la participation. La hiérarchisation des situations
a pour vocation d’orienter les agents d’astreintes sur l’importance et le degré d’urgence (de 1 à 4, 4 étant le niveau le
plus élevé).
II-2- Les outils à la réalisation de l’astreinte
II-2-1- Les réseaux d’alerte et d’aide aux agents d’astreintes (cf. annexe 4)
Cependant, qualitativement, on peut imaginer que la mémoire conserve surtout les cas graves, que ces interventions
nécessitent très peu de déplacements sur site (2 sur 74 recensés). On estimera pour la suite de l’exercice que la fréquence
d’intervention (téléphonique ou sur site) lors d’une astreinte est pour un département de l’ordre d’une fois par semaine.
202
184
Divers réseaux en amont et en aval de la DDPP
L’astreinte de la DDPP s’intègre dans le système d’astreinte de la préfecture du Rhône. La préfecture fait donc un premier
tri des situations qui nécessitent d’être traitées en urgence et oriente les appels vers les structures compétentes. Celleci sert également de plateforme d’orientation pour les agents d’astreinte de la DDPP qui auraient besoin de contacter
une administration ou service d’urgence de permanence ou d’astreinte. L’astreinte de la DDPP est l’un des maillons
des structures de l’Etat au niveau départemental, mobilisable pour les situations d’urgence relevant de sa compétence.
Les réseaux au sein de la DDPP
L’astreinte de sécurité pourrait toujours être doublée de l’astreinte de direction (coordination des interventions et
communication). De plus, le réseau des « sachants » de la DDPP peut être une aide nécessaire. En effet, dans un
petit nombre de situations une expertise est nécessaire (pollution grave, épizootie...). Ce réseau peut-être interrogé
pour une aide technique par téléphone ou exceptionnellement mobilisé pour une intervention (pré-urgence d’épizootie
notamment).
II-2-2- La mallette d’astreinte : les fiches réflexes d’aide à la décision
Les agents d’astreinte peuvent être sollicités sur des thèmes n’étant pas de leurs compétences premières. La mallette
d’astreinte a pour objet de les aider dans le traitement des situations. Elle est constituée de fiches réflexes d’aide à la
décision, et de documents permettant d’obtenir rapidement des informations complémentaires (cf. annexe 3).
III- Les scénarii d’organisation proposés
Dans le cadre des objectifs définis par la direction, plusieurs propositions d’organisation ont été exposées au CODIR,
afin de dégager collégialement un consensus sur la future organisation.
Ces scénarii proposés (cf. annexe 5) ont
nécessité une réflexion et une enquête sur leur acceptabilité notamment pour les scénarii recrutant des volontaires au
sein des chefs techniciens du MAAF, celle- ci n’était pas terminée à l’issue de mon stage.
Partie 4 : La conduite du changement
Ces propositions ont été réalisées avec l’aide de l’analyse des données sociologiques, selon le modèle de la sociologie
de la traduction203 .
I- L’intéressement et les alliances : les enjeux des acteurs et les porte-paroles
Il est nécessaire d’intéresser les acteurs en fonction de leurs logiques d’action, afin qu’ils acceptent les objectifs
proposés par la direction comme conformes à leurs problématiques respectives.
« Tout changement nécessite, comme
conditions nécessaires, la prise en compte des rationalités des différents acteurs impliqués et donc la reconnaissance
non seulement qu’ils peuvent et doivent infléchir les actions de changement, mais que concrètement ils les infléchissent
et les modifient. Pas de changement possible sans reconnaissance de ce qu’il engage la rationalité des acteurs qui y
sont mêlés204. »
De plus, il est nécessaire de séparer les individualités en position de freinage et de faire émerger d’autres au sein des
chefs de pôles.
II- Définir le sens et les objectifs : propositions de reformulation du sens des astreintes en fonction des différents mondes
et des rationalités
Quelles sont les traductions à opérer pour modifier le système d’action concret en lui donnant un
degré de convergence plus important ? Le tableau en annexe 6 cherche à répondre à cette question, en traduisant le
sens du projet des astreintes, souvent recherché par les acteurs, en fonction de leur monde et de leur rationalité.
III- La formation aux astreintes
Il s’agit de former chaque intervenant dans les astreintes. Cette formation devra comporter d’une part une partie
descriptive des différents outils et documents disponibles et d’autre part une phase de mise en situation sur un cas
concret. La formation se déroulera sur 2 à 3 heures, animé par les chefs de service ou leurs adjoints.
IV- L’animation du réseau
Le responsable du réseau est le responsable qualité (RQL). Des points seront réalisés à l’occasion de l’élaboration
du calendrier des astreintes tous les trimestres. A l’aide des fiches d’enregistrements des interventions, les agents
d’astreintes feront un retour d’expérience sur leurs interventions, en dégageant les points ayant posés des difficultés
éventuelles et en proposant des voies d’amélioration.
V- Une mise à jour régulière de la mallette
Les retours d’expérience et les mises à jour seront intégrés dans le système qualité : mise à jour par le RQL et intégration
dans le système d’audit interne (mise à jour annuelle).
M. AKRICH, M.CALLON et B.LATOUR, Sociologie de la traduction : textes fondateurs, Paris, Mines Paris Tech, Les presses,
« sciences sociales » , 2006.
204
P. BERNOUX, La sociologie du changement, Points, 2004, p307.
203
185
Conclusion
Le changement de l’organisation des astreintes remet fondamentalement en cause certaines valeurs des organisations
concernées. Il y a un certain nombre d’acteurs en situation de freinage. Ces comportements sont consécutifs au passif
mais également à un manque de visibilité sur le futur. Depuis la création de la DDPP des changements ont été réalisés.
La révision du système des astreintes met en évidence les différences culturelles entre les segments de l’organisation et
la perte de sens des activités. Le changement de l’organisation des astreintes est amorcé, mais l’objectif de créer une
communauté de travail reste à atteindre.
« La coopération des acteurs suppose qu’ils partagent des conventions, c’est à dire des conceptions communes
du travail, qui sauf dysfonctionnement de la coopération, n’ont pas besoin d’être explicitées. Les conventions sont
construites dans la pratique205. »
ANNEXES
Annexe 1: Indemnisations et compensation par type d’astreinte
Type dʼastreinte
Direction
Astreinte de sécurité2
Durée de lʼastreinte
Indemnité
allouée
Compensation
horaire1
Semaine complète
121 €
Week-end
76 €
Samedi
25 €
Dimanche ou jour férié
34,85 €
Nuit de semaine
10 €
Semaine complète
149,48 €
1,5 jour
Week-end
109,28 €
1 jour
Samedi
34,85 €
0,5 jour
Dimanche ou jour férié
43,38 €
0,5 jour
Nuit de semaine
10,05 €
2 heures
Le choix entre indemnisation et compensation appartient aux agents concernés et le cumul des deux astreintes est
possible mais pas les indemnités.
Annexe 2 : Situations retenues par niveau d’importance.
Thème
Niveau d’importance
Accident de transport de denrées alimentaires
1
Accident transport animaux
1
Alerte denrée alimentaire
3
Alerte produit dangereux ou défectueux (autre que
alimentaire)
3
Animal mordeur griffeur
2
Divagation d'animaux (dont blessés et dangereux)
1
F. CHAMPY, La sociologie des professions, PUF, 2010, p56.
L’article 5 du décret N°2012-1406 prévoit des modalités de compensation en temps majoré des interventions réalisées
dans le seul cadre d’astreinte de sécurité.
207
Majoration par un coefficient de 1.5 si délai de prévenance est inférieur à 15 jours.
205
206
1 L’article 5 du décret N°2012-­‐1406 prévoit des modalités de compensation en temps 186
majoré des interventions réalisées dans le seul cadre d'astreinte de sécurité. 2 Majoration par un coefficient de 1.5 si délai de prévenance est inférieur à 15 jours. Importation d'animaux de compagnie
1
Incendie en exploitation agricole
3
Pollution d’élevage
3
Toxi-infection alimentaire collective
1à3
Découverte d’oiseaux sauvages morts
2
Mortalité des abeilles
1
Salmonellose en élevage de poules pondeuses
3
Fièvre aphteuse
4
Peste porcine
4
Grippe aviaire
4
Annexe 3 : Exemple de fiche réflexe
187
188
Annexe 4 : Les réseaux pour le fonctionnement des astreintes
189
Annexe 5 : scénarii d’organisation proposé au CODIR
Scénario 1 : Projet collectif fédérant l’ensemble des chefs de service et adjoints au chef de service autour des
missions de service public
Forces
Projet fédérateur
Fréquence des astreintes (1 astreinte /
trimestre)
Faiblesses
Difficultés à rassembler autour du
projet notamment dans en le service
PEC (pas dʼurgence)
Opportunités
Menaces
Création dʼune dynamique de travail collectif
au niveau des cadres et pouvant être moteur
pour un travail collectif de lʼensemble des
agents.
Non adhésion au projet
Scénario 2 : Projet collectif fédérant l’ensemble des cadres de la DDPP
Forces
Faiblesses
Valorisation du statut cadre
Nombre importants dʼagents éligibles
Fréquence des astreintes faible (de lʼordre
dʼune semaine /an)
Risque de « démotivation » des
techniciens chefs notamment
Opportunités
Menaces
Instaurer un dialogue entre les services
Echanges de pratiques
Difficultés de formation
Non adhésion au projet
Scénario 3 : Projet ouvert à tous les agents de la DDPP
Forces
Scénario qui ménage les sensibilités
Assiette de recrutement importante.
Opportunités
Faiblesses
Sélection des candidats
Compétences à acquérir.
Menaces
Non adhésion au projet.
Difficulté de formation
Scénario 4 : Projet collectif fédérant l’ensemble des chefs de service et un agent de son service autour des missions de service public
Forces
Apport de compétences
Opportunités
Responsabilisation des agents les plus
impliqués et compétents
Faiblesses
Perte des objectifs initiaux
Menaces
190
Annexe 6 : Traduction en fonction du monde et des rationalités des acteurs
L’observation et les entretiens menés ont permis de classifier les agents de l’encadrement en différents mondes
(selon le modèle des mondes de Laurent Thévenot et Luc Boltanski 208) en fonction des différentes perceptions
de leur travail.
La méthode et les témoignages utilisés pour l’enquête sociologique ont leurs limites mais ils me
paraissent suffisants pour dresser de grandes lignes de compréhension. J’ai identifié au sein de l’organisation,
les mondes suivants : le monde industriel, le monde civique, le monde de l’opinion et le monde projet. Dans
chaque monde, les valeurs (ou principes) de justifications mobilisées forment un système de cohérence. Ce
système combine une série d’ingrédients : un principe supérieur, ce qui est grand, ce qui est petit, etc. ... En
fonction de ces différents mondes, il est proposé une traduction du sens des astreintes.
Monde
Civique
Industriel
Opinion
Projet
208
La DDPP est désormais une
communauté de travail mais elle est
toujours un système faiblement lié.
Ces membres ne constituent pas
encore une réelle communauté de
travail.
La nouvelle structure doit produire
des modes de fonctionnement qui
intègrent suffisamment lʼensemble
des acteurs et qui ait un sens dans la
conduite de leur activité.
Le projet des astreintes est
lʼoccasion de créer du collectif centré
sur la continuité des services aux
consommateurs et aux
entreprises.
Lʼexemple donné par les
managers dans ce projet portera du
sens pour lʼensemble des agents et
encouragera le travail dʼéquipe et la
collaboration sur lʼensemble de la
structure.
La DDPP se doit de sʼorganiser afin
de gérer les alertes et les urgences
potentielles qui peuvent arriver en
dehors des horaires dʼouverture
conformément à la réglementation
en vigueur. Il existe des situations
pour lesquelles les administrés,
dʼautres administrations ou des
entreprises ont besoin dʼune
intervention de la DDPP en urgence
(accident de transport, alerte
produit...).
Ces astreintes sont une contrainte
pour tous mais elles doivent être
réalisées. Le partage de cette tâche
sur lʼensemble de lʼencadrement
permet de répartir cette charge de
travail. Cʼest lʼorganisation la plus
efficace.
Ce qui compte ce nʼest pas le projet
des astreintes en soit, mais les
opportunités quʼil offre. Les
astreintes permettent de montrer son
implication dans les différents
services et qui sera un argument
pour lʼaccès à un poste plus élevé.
Les astreintes créent des réseaux de
BOLTANSKI L., THEVENOT L., De la justification. Les économies de la grandeur, Paris, Gallimard, 1991.
15
191
Mise en place d’un questionnaire pour la caractérisation de la
consommation d’intrants dans les filières animales et sur les
perceptions des éleveurs
Axelle POIZAT, Inspectrice élève de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2015
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 1er mai au 30 juin 2014 au SRAL de la DRAAF Pays de la Loire
, sous la responsabilité de JeanNoël DE CASANOVE, Chef de service.
Questions abordées par l’étude 209
Les historiens datent les débuts de l’utilisation des pesticides en agriculture à 1000 ans avant J-C, ce qui correspond
à l’Antiquité (source : Observatoire des Résidus de Pesticides, ORP). Les produits utilisés à l’époque étaient naturels
et les hommes se servaient alors de propriétés naturellement présentes de certaines plantes ou certains minéraux. AU
XIXème siècle, la chimie minérale permet un développement des produits phytosanitaires, mais ce n’est qu’à la fin de
la seconde guerre mondiale, dans les années 50 que les pesticides connaissent leur véritable essor, grâce à la chimie
organique.
A la suite de la seconde guerre mondiale, les Etats ont pour objectif d’assurer la sécurité alimentaire et l’autosuffisance
des pays. Ainsi, l’intensification de l’agriculture fait appel à des quantités de plus en plus importantes d’intrants dans
les élevages et, entre 1945 et 1985, la quantité de produits phytosanitaires utilisés a doublé tous les 10 ans.
Aujourd’hui, le terme de « pesticide » trouve sa racine étymologique dans la langue anglaise, « pest », qui signifie ravageur (source MAAF Ecophyto). Les pesticides désignent donc des substances ou préparations utilisées pour la prévention, le contrôle ou l’élimination d’organismes jugés indésirables: plantes, animaux, champignons, virus ou bactéries.
Les produits phytosanitaires recouvrent une gamme plus large de molécules et comprend également les régulateurs de
croissance et les molécules permettant la conservation des produits végétaux. Les produits phytosanitaires recouvrent
donc les produits alternatifs ayant les propriétés décrites ci-dessus, mais ils ne comprennent pas les produits biocides.
Si ces pesticides ont permis d’atteindre les objectifs de sécurité alimentaire fixés et une augmentation spectaculaire
des rendements, ils sont aussi susceptibles de présenter un danger, tant pour l’homme que pour l’environnement.
Suite à l’intensification de la production, la dégradation de la qualité des eaux a conduit les pouvoirs publics à définir
des zones vulnérables. Aujourd’hui, 55% de la surface agricole française est classée en zone vulnérable (Anonyme,
2013a).
La découverte et l’utilisation des antibiotiques sont, quant à elles, bien plus récentes. C’est en effet en 1928 qu’Alexander Flemming découvrait par hasard la Pénicilline. Douze ans plus tard, cet antibiotique, premier d’une longue liste, allait
révolutionner la pratique de la médecine, reléguant au rang de banalités des affections autrefois mortelles.
Pourtant, dès la fin des années 40 (OMS), des bactéries résistantes mettent en échec des traitements antibiotiques
et cette menace ne cesse de prendre de l’ampleur. En 2009, la Commission Européenne estimait que les bactéries
antibiorésistantes étaient responsables au sein des pays membres de la mort de 25 000 patients en médecine humaine
et de coûts directs et indirects en élevage de 1,5 milliards d’euros par an.
Dans le même temps, les laboratoires pharmaceutiques peinent à mettre sur le marché de nouvelles molécules antibactériennes. Les antibiotiques demeurent parmi les molécules les plus importantes de la médecine humaine et animale. Aussi, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), la Food and Agriculture Organisation (FAO) et l’Organisation
Internationale des Epizooties (OIE) appellent de concert à réagir. Il devient essentiel de préserver l’efficacité des molécules existantes en limitant leur usage dans les situations inappropriées.
D’après l’OMS, au moins 50% des antibiotiques produits dans le monde sont destinés aux animaux. Dans ce contexte,
un objectif majeur se détache : il s’agit de limiter l’apparition de bactéries résistantes. Ceci implique la réduction des
pressions de sélection exercées par les antibiotiques et donc leur utilisation. Certains antibiotiques, les antibiotiques
dits d’importance critique, sont tout particulièrement visés puisque, derniers arrivés sur les marchés du médicament
et molécules
essentielles de médecine humaine, peu de bactéries y sont encore résistantes. Il s’agit également de préserver un
arsenal thérapeutique efficace en médecine humaine et vétérinaire.
Ces deux catégories de produits utilisés de manière courante dans la production agricole française font aujourd’hui
l’objet de deux programmes gouvernementaux, appelés Ecophyto et Ecoantibio 2017, visant une réduction de ces
intrants en élevage afin de pouvoir développer une agriculture plus écologiquement responsable. % de l’usage des
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
209
192
pesticides en 2018 par rapport à 2008, année de référence - ce qui correspondrait au passage de toute l’agriculture
française à une agriculture en production intégrée (Butault et al., 2011). Aujourd’hui, l’objectif affiché du plan développé
par le gouvernement est de réduire les impacts et d’améliorer l’utilisation des produits phytosanitaires. Le programme
EcoAntibio 2017 vise quant à lui la réduction de 25% de la consommation d’antibiotiques vétérinaires en 2017 par
rapport à l’année 2012.
Face à ces enjeux majeurs, les éleveurs développent des stratégies pour conserver une productivité élevée ainsi qu’une
bonne santé des animaux. Ces alternatives consistent en l’utilisation de produits plus naturels, de produits de lutte
biologique, ou encore à la mise en place de mesures de prévention, comme les mesures de biosécurité par exemple.
Après une période de très forte industrialisation de l’agriculture, se déroule actuellement un retour à l’agronomie, indispensable pour une réduction d’utilisation des intrants.
L’objectif de ce stage est double puisqu’il s’agit de décrire dans un premier temps les entrées d’intrants en élevage
concernant les secteurs végétal et animal et de prendre connaissance des textes règlementaires s’y rapportant qui
en régulent les usages. Il s’agit de décrire et de quantifier dans un second temps les conditions d’utilisation de ces
intrants, en portant une attention particulière sur les antibiotiques d’importance critique (AIC), et d’explorer les freins et
arguments à l’utilisation de méthodes alternatives.
Pour la compréhension de ces mécanismes complexes, j’ai réalisé un questionnaire technique, un simili d’audit permettant de comprendre les pratiques des élevages, puis un questionnaire plus orienté vers la compréhension des
comportements, contraintes et motivations des éleveurs concernant la mise en place de pratiques plus responsables.
J’ai dirigé ces questionnaires auprès d’éleveurs des filières porcines (un éleveur naisseur-engraisseur), bovin viande (un
agriculteur conventionnel et un élevage en agriculture biologique ou en conversion), bovin lait (un agriculteur biologique
et un agriculteur en conversion ou en système biologique) et poulet de chair (un élevage en batterie et un élevage plein
air en agriculture biologique ou en conversion).
I Les intrants en élevage et différents circuits d’approvisionnement et règlementation
A Les intrants en production végétale, utilité et circuits de distribution
Les intrants du domaine de la production végétale contribuent à la fertilisation des sols, à l’élimination de faune ou de
flore indésirable et à la gestion des maladies.
Les intrants comprennent notamment les produits phytosanitaires. On
regroupe sous ce terme les désherbants chimiques, les traitements fongicides, les traitements insecticides, et les antilimaces, les régulateurs de croissance, les acaricides, rodonticides et nématodicides.
En France en 2011 le désherbage chimique était pratiqué sur 96% des surfaces de grandes cultures, les traitements
fongicides sur 64% et les insecticides sur 34%.
Lorsque les agriculteurs sont en système intégré, ils appartiennent alors
à un groupe coopératif qui fournit les fertilisants, semences, produits phytosanitaires et conseil.
Dans le cadre d’élevages plus indépendants, les éleveurs se fournissent directement auprès des fabricants agréés pour
les produits phytosanitaires. Pour ce qui est des semences et des fertilisants, un agrément n’est pas obligatoire. Ils
peuvent également acheter ou échanger des effluents d’élevages avec d’autres éleveurs selon leurs besoins.
B Les intrants en production animale, utilisation par différents canaux
Les intrants en production animale qui nous intéressent ici se déclinent en médicaments vétérinaires, en compléments
alimentaires à allégation de santé et en utilisation de produits phytothérapeutiques. Les premiers, les plus règlementés
permettent le contrôle de la santé des animaux, qu’ils agissent en préventif – les vaccins par exemple – ou en curatif,
parmi lesquels les antibiotiques, les anti- inflammatoires, les antiparasitaires. Les produits phytothérapeutiques sont
des extraits de plantes obtenus par extraction, naturels, utilisés selon les cas à titre préventif ou curatif. Ce sont des
huiles essentielles, teintures mères et absolus. Certains produits à base de plantes sont utilisés en tant que médicament vétérinaire.
Les éleveurs peuvent se fournir en médicament vétérinaire auprès de trois types d’ayant droit : les pharmaciens, les
vétérinaires et sous condition (médicaments vétérinaires préventifs de la liste positive) auprès des groupements agréés.
Le circuit de distribution impliquant les pharmaciens reste anecdotique puisque ces derniers ne détenaient que 5%
des parts de marché en 2011. Les vétérinaires et les groupements représentent quant à eux respectivement 78,4% et
16,2% des parts de marché du médicament vétérinaire.
C Règlementation des intrants
La règlementation des intrants en production animale et végétale encadre l’approvisionnement, l’utilisation et l’enregistrement dans des registres afin d’assurer la traçabilité et permettre le contrôle des conditions d’utilisation.
II Description et analyses concernant les pratiques et la réduction de l’utilisation des antibiotiques et des intrants
Concernant l’utilisation des antibiotiques, deux types de comportements humains entrent en jeu : d’une manière très
pragmatique, sur le terrain, il s’agit pour l’éleveur de prendre une décision et de faire ou ne pas faire un traitement et de
le décider seul. D’une manière plus générale, concernant les trajectoires de changement, il s’agit pour lui de raisonner
193
autour de ces transformations pour réfléchir aux objectifs à atteindre et aux moyens à mettre en œuvre pour y arriver.
La frontière entre ces deux processus est parfois floue et les théories de certains auteurs aident à schématiser ces
phénomènes.
. La théorie du MODE model (= Motivation and opportunity as determinants of the attitude-behavior relation) décrit deux
types de prise de décision : un très rapide et basé sur les impressions et le ressenti de la personne ainsi que sur son
expérience personnelle ; un autre, plus élaboré, se construit selon différentes options étudiées avant de faire un choix.
. D’autres théories concernent les choix de changements à l’échelle d’un groupe ou d’un individu. Lorsqu’il est question de changements, on observe des « pionniers », innovateurs. Ils prennent les risques de l’adoption de nouvelles
techniques et s’informent pour la plupart via des réseaux « marginaux ». Par opposition, la « masse » attend, observe
et calcule les risques/bénéfices avant d’adopter une innovation. Leur réseau d’information correspond plutôt aux
conseillers des chambres d’agriculture et de groupements. A la mise en place du changement, des essais sont fait sur
une surface limitée afin de réduire le risque. Enfin, les « retardataires » ou réfractaires au changement recherchent plutôt
un confort, une stabilité et tendent à améliorer le système préexistant.
III observations de terrain : conduite d’enquêtes en élevage
. Contexte et objectifs : Les filières animales revêtent une importance majeure en Pays de la Loire. Compte tenu d’évolutions historiques, la plupart des exploitations agricoles pratiquant l’élevage sont de type polyculture élevage. En Pays
de la Loire, selon le dernier recensement Agreste de 2010, la région comptait 15 400 exploitations en polyculture élevage, sur un total de 34 300 exploitations agricoles, ce qui la place parmi les 3 régions françaises ayant plus de 4% de
leurs exploitations spécialisées en polyculture-élevage. Ainsi, les agriculteurs doivent assurer la gestion de deux types
d’ateliers, l’un animal, l’autre végétal. Ils travaillent donc dans un cadre complexe, aux multiples enjeux et prennent
au quotidien un nombre de décisions très importantes. Ils doivent également faire face à une incertitude permanente,
que ce soit pour les cultures, avec la météo par exemple, ou pour la bonne conduite du troupeau, avec la gestion de
la santé animale.
Une exploitation agricole de type polyculture élevage peut être appréhendée comme un système par lequel entrent et
sortent en permanence des flux de matière. Deux types de flux entrants de matière revêtent une importance particulière
pour la santé publique : il s’agit des médicaments vétérinaires et des produits phytosanitaires. Au sein de la région,
la DRAAF des Pays de la Loire développe des actions et incitations dans le cadre des plans nationaux EcoAntibio et
Ecophyto afin de réduire et d’optimiser l’utilisation de ces intrants.
Dans un contexte de réduction de l’utilisation des médicaments vétérinaires et particulièrement des antibiotiques ainsi
que des produits phytosanitaires, il est intéressant d’analyser les conditions d’utilisation des intrants en élevage, que
ce soit dans le domaine du végétal ou de l’animal ainsi que d’appréhender les méthodes alternatives utilisées et les
motivations ou freins à la réduction d’utilisation de ces intrants.
L’objectif de ce travail est tout d’abord de pouvoir quantifier l’utilisation des intrants et des méthodes alternatives mises
en place. Secondairement, il s’agit d’évaluer la capacité d’un questionnaire à recueillir les informations permettant
d’évaluer les usages, pratiques et perceptions d’un éleveur par rapport à l’utilisation d’intrants en élevage. Enfin, un
objectif à plus long terme est d’évaluer la pertinence de ce questionnaire pour pouvoir en étendre l’utilisation à plus
grande échelle et ainsi avoir une idée précise des pratiques des éleveurs à l’échelle d’une région par exemple.
. Résultats: Les polyculteurs-éleveurs accordent une importance mineure aux cultures et s’intéressent principalement
à l’élevage. L’autonomie des agriculteurs est de ce fait beaucoup plus importante pour la gestion des intrants en santé
animale, même si le vétérinaire reste un intervenant incontournable. A l’inverse, dans le domaine végétal, les éleveurs
semblent dépendre quasi intégralement des conseillers techniques pour la mise en place des traitements sur les parcelles.
Les questionnaires sont un support de qualité pour évaluer les pratiques et perceptions des éleveurs pour l’utilisation
des intrants en élevage. Ils permettent de donner une idée claire du seuil de rupture auquel se situe l’élevage pour les
intrants dans le domaine végétal. Ils ne donnent pas une vision exhaustive de l’utilisation des spécialités vétérinaires,
mais permettent la mise en évidence de la cohérence ou de l’incohérence des pratiques et des perceptions des éleveurs. Une visite de la pharmacie d’élevage et un appui sur des documents tels que les protocoles de soins ou le cahier
d’élevage devraient permettre de compléter les informations données par l’éleveur.
Ces questionnaires, s’ils devaient être déployés à grande échelle, par voie postale par exemple, ne pourraient pas être
utilisés en l’état. Sur la partie concernant les pratiques (le traitement et l’assolement des parcelles par exemple), les
données recueillies seraient fiables, mais pour d’autres questions, notamment sur les perceptions de l’éleveur et les
pratiques « limites » par rapport à la loi (utilisation de formol par exemple), l’échange direct avec l’éleveur et les dialogues sont indispensables et permettent d’obtenir des informations importantes
Conclusion
Les intrants en élevage sont à la croisée des préoccupations des éleveurs, de la société et des questions de santé
publique. Après une augmentation exponentielle de la productivité des exploitations agricoles françaises à la fin du
194
XIXème siècle, il est aujourd’hui question de viser une triple rentabilité à la fois économique et environnementale.
Pour atteindre ces objectifs, il est notamment question de réduire l’utilisation des produits phytosanitaires et des antibiotiques. Les deux plans gouvernementaux développés pour sensibiliser les agriculteurs et les accompagner vers une
réduction notable semble porter leurs fruits. Les réseaux DEPHY sont un exemple de réussite de projets de réduction
d’utilisation des produits phytosanitaires menés par les agriculteurs. Par leurs pratiques modèles et les campagnes
de communication, l’objectif visé par le gouvernement est de faire « tâche d’huile » et de montrer à des agriculteurs
moins innovants que des changements sont possibles sans perte de qualité de vie ou de rentabilité. Les consommations nationales d’antibiotiques et de produits phytosanitaires sont connues et enregistrées, permettant de suivre les
évolutions des quantités utilisées ou vendues sur plusieurs années. Ce traitement des données ne permet cependant
pas de connaître les pratiques et usages des éleveurs ainsi que leur sensibilité par rapport aux questions d’écologie
ou de santé publique.
Les questionnaires établis au cours de ce projet cherchent à répondre à ces deux questions. A l’issue des entretiens
réalisés dans les différents élevages, la pertinence de ce questionnaire a été réaffirmée. Il parait cependant inenvisageable d’étendre une étude de la sorte à une grande échelle sans remodifier les questions du questionnaire ou sans
dépêcher, pour chaque entretien, une personne pour accompagner l’éleveur dans la progression du questionnaire et
pour recueillir des informations au cours des conversations. Les questions abordées sont en effet des points sur lesquels les éleveurs se sentent surveillés, par l’Etat, mais également par la société et les médias. Ils présentent donc souvent la meilleure situation possible et seul un entretien approfondi permet d’accéder à des informations plus sensibles.
Les éleveurs semblent être sensibilisés aux enjeux de réduction des intrants en élevage, notamment en lien avec des
questions de santé publique. Cependant, les habitudes d’élevage, la multiplicité des tâches qui leurs sont allouées au
quotidien et la diversité des conseillers font apparaitre des contradictions entre leurs perceptions et leurs pratiques.
Un effort d’accompagnement des conseillers en élevage et des agriculteurs pour une agriculture plus respectueuse
de l’environnement et de la santé publique devrait permettre une poursuite des efforts engagés pour une réduction de
l’utilisation des intrants.
Le dispositif de performance de la LOLF,
illustration par le
programme 206 « Sécurité et qualité de l’alimentation ».
Propositions d’évolution de la maquette de performance de
BOP et étude de la gouvernance du dispositif
Sylvie PUPULIN, Inspectrice stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 14 avril au 25 juillet 2014 au bureau du management par la qualité et de la coordination des
contrôles (BMQCC) à la DGAL sous la responsabilité de Denis DEBAT, Responsable d’appui à la performance
Questions abordées par l’étude 210
Notre étude s’inscrit dans un contexte de recherche d’efficience, d’efficacité et de simplification. Depuis le 1er janvier
2006, le ministère de l’agriculture, de l’agro-alimentaire et de la forêt (MAAF) a déployé un dispositif de performance
décliné de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), depuis son administration centrale jusqu’à ses services
déconcentrés. La direction générale de l’alimentation (DGAL) en porte une partie en tant que responsable de la mise
en œuvre de la politique de sécurité et de qualité sanitaires de l’alimentation (programme 206 de la loi de finances).
Après 8 ans de mise en œuvre et des services déconcentrés qui dénoncent un dispositif trop lourd et trop complexe, il
apparaît nécessaire de rénover le dispositif de performance sur le programme 206 et notamment la partie concernant
les services opérationnels déconcentrés. Un axe du plan stratégique de la DGAL est donc l’optimisation du dialogue de
gestion, moment clef de la gestion de la performance durant lequel sont examinés les résultats obtenus mais aussi les
moyens alloués et les objectifs fixés pour l’année suivante. Un groupe de travail a été constitué et intégrera les résultats
de notre étude dans ses réflexions et ses travaux.
Dans le cadre de notre stage, trois missions nous ont été confiées par le bureau du management par la qualité et de
la coordination des contrôles :
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
210
195
- proposer des évolutions de la maquette de performance de budget opérationnel 206, avec un objectif de diminuer
le nombre d’indicateurs de près de la moitié (passer de 21 indicateurs de sphère 1 à une maquette composée de 12
à 16 indicateurs) ; - décrire la gouvernance de la performance en prenant en compte chacun des acteurs ; - recenser l’ensemble des indicateurs et données statistiques utilisés en dehors des indicateurs de performance. I. Le dispositif de performance prévu par la LOLF et sa déclinaison pour le programme 206
I.1. Présentation du dispositif de performance prévu par la LOLF La LOLF est promulguée le 1er août 2001 et est mise en œuvre progressivement pour être pleinement appliquée
depuis le 1er janvier 2006. C’est une réforme emblématique de la volonté de modernisation de l’Etat. Elle instaure les
principes de l’amélioration de la gestion publique et de la transparence, en remplaçant la logique de moyens par une
logique d’objectifs et de résultats. Et augment le pouvoir du Parlement en matière budgétaire : le vote du budget ne se
fait plus en bloc mais par politique publique, les commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat ont
dans leurs missions le suivi, le contrôle et l’évaluation des lois de finances. Figure n°1. Architecture du budget de l’Etat pour 2014 (Source : guide pratique de la LOLF, 2012)
L’architecture du budget de l’Etat est conçue pour permettre sa compréhension par tous et un débat parlementaire
éclairé (cf. figure n°1) :
- les missions c’est-à-dire par les grandes politiques publiques (sécurité, santé, agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, etc.), sont créés par le gouvernement et peuvent être ministérielles ou interministérielles ; - les missions regroupent les programmes, qui sont les axes des grandes politiques publiques et qui dépendent chacun
d’un unique ministère ; - les programmes regroupent les actions de mise en œuvre de la politique publique. Le budget de l’Etat est constitué d’un volet budgétaire et d’un volet performance. Les ministères rédigent, par mission,
un projet annuel de performance (PAP) dans lequel ils présentent par programme leurs dépenses prévisionnelles à
l’euro prêt, réparties par actions et par titre (personnel, fonctionnement, etc.). Ils y présentent, également par programme, leur stratégie ainsi que les objectifs et indicateurs de performance associés. Dans les rapports annuels de
performance (RAP) les ministères, sur le même modèle que les PAP, présentent leur bilan budgétaire et de performance
pour l’année écoulé. Ces documents sont annexés aux lois de finances et lois de règlement annuelles et analysés par
les parlementaires par alimenter les débats. De manière à responsabiliser les acteurs publics une chaîne de responsabilités est mise en place. Ainsi pour chaque
programme un responsable est identifié (RPROG). Il va constituer des budgets opérationnels de programme (BOP)
(périmètre d’actions ou périmètre géographique), et nommer leurs responsables (RBOP). Il défini également les unités opérationnelles (UO) qui correspondent à l’échelon d’exécution du budget et en identifie les responsables (RUO).
Chaque échelon décline le dispositif et rend compte à l’échelon supérieur. Afin de les aider au pilotage de la performance, les RPROG, RBOP et RUO sont épaulés par des contrôleurs de gestion.
196
I.2. Présentation du programme 206 et de son dispositif de performance
Le budget du ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt (MAAF) est réparti dans deux missions interministérielles, deux missions ministérielles et huit programmes. Le programme 206 appartient à la mission ministérielle
« Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » et couvre les actions menées par les DD(CS)PP dans le cadre de
la sécurité et de la qualité sanitaire des aliments de leur production à leur consommation. Le directeur de la DGAL, en
est le RPROG et a constitué 33 BOP : 2 BOP centraux, et 31 BOP régionaux (22 régions métropolitaines, 5 régions
d’outre-mer, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis- et-Futuna, Polynésie française et Nouvelle Calédonie) dont les RBOP
sont les préfets de région ou de territoire. Ces BOP financent les actions des DD(CS)PP, SRAL et SALIM en matière
sécurité sanitaire des aliments (SSA) et de santé et protection des animaux (SPA) et des végétaux (SPV).
Les UO sont les DD(CS)PP pour les actions relatives à la SSA et la SPA, les DRAAF/SRAL pour les actions du domaine
SPV et les DAAF/SALIM pour l’ensemble des actions. DRAAF/SRAL et DAAF/SALIM sont donc en charge du pilotage
mais aussi de l’exécution du BOP. La maquette de performance du PAP/RAP est articulée autour de 4 objectifs stratégiques et compte 7 indicateurs et
5 sous-indicateurs (soit au total 10 données quantifiées). Elle a été entièrement revue pour le cycle 2015-2017 et est
désormais articulée autour de 3 objectifs et compte 5 indicateurs et 8 sous-indicateurs (soit 9 données chiffrées). La maquette de performance des BOP régionaux, objet de notre étude, compte 21 indicateurs examinés entre RPROG
et RBOP en dialogue de gestion et 3 indicateurs non examinés en dialogue (2 pilotés par le niveau central et par les
UO). II. Méthodologie et résultats
II.1. Les méthodes employées
Afin de recueillir les données nécessaires à notre étude, nous avons combiné plusieurs méthodes :
- l’étude bibliographique pour acquérir la connaissance de la LOLF, du dispositif de performance et de sa déclinaison
au sein du programme 206 et des remontées d’informations sur les indicateurs. Cette étude a été facilité par mon
expérience professionnelle antérieure ;
- un questionnaire nous a permis d’interroger les DRAAF, DD(CS)PP et DAAF afin d’obtenir des données quantitatives
et qualitatives concernant l’utilisation qu’ils font des indicateurs et de recenser leurs critiques et leurs propositions.
Nous avons reçu 69 réponses, 18 de DRAAF/SRAL, 23 de DDCSPP, 27 de DDPP et 1 de SALIM (taux de réponse de
56%, 82 % des DRAAF/SRAL, 50 % environ des DD(CS)PP) ; - 7 entretiens semi-directifs, auprès de cadres en SRAL (chef de SRAL, contrôleur de gestion et chefs des pôles coordination et mutualisation) et en DDPP (direction et chefs des services en charge des domaines SSA et SPA), nous ont
permis de percevoir les rôles que chacun de ces acteurs s’attribue, l’organisation mise en place dans leur région et
département, etc. ; - 2 entretiens semi-directifs de groupe avec les chefs des bureaux concernés par les indicateurs de BOP actuels nous
ont permis d’obtenir des éléments sur la construction, le suivi, l’analyse et l’utilisation des indicateurs par le niveau
central et également la perception du dispositif par ces acteurs.
Les échanges dans le cadre du groupe de travail sur l’optimisation de dialogue de gestion et les échanges informels
que nous avons eus avec les agents de la DGAL tout au long du stage ont enrichi notre réflexion.
II.2. Résultats
La synthèse de l’ensemble des données recueillies nous permet d’établir les constats suivants : - une connaissance et une maîtrise du dispositif différentes suivant les acteurs : les principes du dispositif de performance de la LOLF avec l’articulation entre le PAP/RAP et le BOP ne sont maîtrisés que par les personnes impliquées
directement dans les dialogues de gestion (DGAL, la sous-directrice de la SDPRAT et son adjoint,, les contrôleurs de
gestion, les directeurs et directeurs adjoints de DRAAF et DD(CS)PP, les chefs de SRAL, les chefs de pôle coordination
et mutualisation). Pour les autres acteurs (chefs de bureau, chefs de services en charge des domaines SSA et SPA)
cette connaissance théorique n’est pas acquise et on note une tendance à ne connaître que les indicateurs qui les
concernent ; - une adhésion générale à l’idée de rendre des comptes sur l’utilisation de l’argent public et sur la réalisation des missions. Toutefois, chacun souligne le risque que le système dévie vers une culture du chiffre et vide de sens les missions
des services ; - une définition de l’objet « indicateur de performance » partagée : pour chacun, les indicateurs de performance devraient permettre d’évaluer l’activité en termes quantitatifs et qualitatifs. Ce sont des données construites destinées à
être interprétées et qui donnent un sens aux actions mesurées. Ce ne dont pas des outils neutres, il permettent notamment d’inciter les services à appliquer les politiques et instructions émises par le niveau national ; - une convergence sur les caractéristiques auxquelles doivent répondre les indicateurs de performance ; - un accord sur le fait que l’interprétation des indicateurs nécessite d’utiliser des données complémentaires ; - des critiques partagées par tous les acteurs :
197
- le lien entre les objectifs et indicateurs du PAP/RAP et ceux de BOP n’est plus évident ; - le lien entre les priorités de la DGAL et les indicateurs n’est pas systématique. En conséquence, les acteurs déduisent
que si une activité fait l’objet d’un indicateur alors elle est prioritaire ; - des indicateurs de BOP qui ne sont pas forcément représentatifs de l’activité ;
- des indicateurs trop nombreux et trop techniques pour permettre un pilotage par les chefs de services et par les
directeurs ; - des systèmes d’information défaillants qui ne garantissent pas la qualité des données et qui ne permettent pas aux
services de disposer en continu des extractions nécessaires ; - les services déconcentrés dénoncent un excès de reporting de données qui s’ajoutent aux indicateurs et au suivi de
la réalisation des inspections. Le temps passé à ce reporting et l’absence de retour concernant les utilisations faites
de ces données participent au sentiment de déviance du système vers une culture du chiffre et une perte de sens des
missions. Ces éléments nous permettent également de mettre en évidence que la construction, le recueil, l’analyse, l’interprétation et l’utilisation des indicateurs est très variables entre les niveaux de pilotage (national, régional, départemental),
entre les différentes régions et les différents départements, entre les indicateurs. Ainsi, les indicateurs construits émanent soit d’un besoin identifié par un bureau ou une sous-direction et d’une construction en collaboration avec au
minimum le responsable d’appui à la performance, soit ils émanent de la demande initiale de trouver des indicateurs et
dans ce cas ce sont des données existantes qui ont été choisie sans association d’une réflexion sur la performance. En
ce qui concerne les RBOP, les situations sont très différentes d’une région à une autre, on note toutefois que les pôles
coordination des SRAL sont très impliqués dans le pilotage de la performance et parfois le contrôleur de gestion régional n’est pas associé. Le manque de coordination et d’animation des correspondants départementaux de contrôle de
gestion a été souligné par des interlocuteurs comme un frein important au pilotage de la performance. De plus, dans
certaines régions, les DRAAF/SRAL ont un pilotage pro-actifs avec une véritable gestion de la performance tout au long
de l’année selon un agenda pré-établit et dans d’autres régions ce pilotage se réduit en septembre à la préparation du
dialogue de gestion. Concernant l’analyse et l’interprétation des indicateurs là encore les situations sont différentes et
varient les sous-directions ou les bureaux de la DGAL. Enfin, en termes d’utilisation, les indicateurs peuvent être utilisés,
quel que soit le niveau pour identifier des bonnes pratiques, identifier des besoins en formation ou en animation de
réseau, pour identifier les marges d’amélioration et mettre en place des plans d’action et enfin pour communiquer en
interne, vers les partenaires des services ou vers le grand public.
L’exploitation des réponses aux questionnaires nous a permis de réaliser par indicateur une analyse quantitative et qualitative et de proposer des pistes d’évolution (suppression, modification ou maintien en l’état). Ce travail a été regroupé
en fiches synthétiques dont l’objectif est de servir d’aide à la décision pour les chefs de bureau.
En conclusion, les éléments recueillis dans les entretiens et l’exploitation des réponses au questionnaire, en croisant les
éléments quantitatifs sur la pertinence des indicateurs de BOP et leur utilisation comme outils de pilotage, nous permet
de regrouper ces indicateurs en catégories :
- ceux qui à la définition d’un indicateur de performance et sont utilisés comme tels par toute la chaîne de responsabilités SA0306_01, 02 et 03, DC0104 et DC0002 et les indicateurs AV0303_01 et 02, SA0303_01 et DC0201_01 qui,
même s’ils font l’objet de nombreuses critiques sont pas remis en cause ; - ceux qui sont suivis de manière plus précise avec d’autres outils parce que ce sont des indicateurs d’activité :
AV0403, AV0302_01, PV0102_01, PV0414, SA0204, DC0301_00 et AV0402 ; - ceux qui ne peuvent être interprétés et donc qui ne sont pas compris ni utilisés AV0408, SA0303_02 PV0208 et
DC0001 ; - ceux qui ne relèvent pas des missions des services et donc qui ne sont pas utilisés AV0405, SA0705, DC0501 III. Analyse : propositions de pistes de simplification III.I. Simplification de la maquette de performance de BOP
Concernant les 24 indicateurs de la maquette de BP actuelle, nous proposons : - de conserver les 8 indicateurs qui ressortent comme étant de véritables indicateurs de performance et des outils de
pilotage à savoir AV0303_01 et 02, SA0306_01, 02 et 03, DC0002, DC0104, DC0201_01. Toutefois, nous proposons
des pistes d’évolution les concernant visant à améliorer leur pertinence ou leur compréhension ; - de conserver, sous réserve de modifications très importantes, 3 indicateurs qui ne satisfont pas à la définition d’un
indicateur de performance mais qui sont en lien avec des priorités de la DGAL ou dont la pertinence a été soulignée.
Les indicateurs concernés sont : AV0301, AV0403, SA0303_01 ; - de supprimer les 13 indicateurs suivants :
- les indicateurs qui sont en fait des statistiques d’activité et qui sont suivis par ailleurs par les systèmes d’information
ou les tableaux de bords mis à disposition sur l’intranet de la DGAL : AV0302_01, SA0204, PV0102_01, PV0414,
DC0301_00 et AV0402 ;
- les indicateurs qui ne correspondent pas à des missions affectées aux services - qui alors n’ont pas de leviers d’ac-
198
tion - et dont la donnée n’est pas produite par les services : AV0405, SA0703, DC0501 - les indicateurs dont l’interprétation est impossible : AV0408, SA0303_02, PV0208, DC0001. En préparation de la note annuelle sur le dialogue de gestion, le responsable d’appui au pilotage de la performance
a présenté les premiers résultats de ce travail à la sous-directrice de la SDPRAT et au RPROG. D’ores et déjà la décision a été prise de supprimer les indicateurs suivants pour l’année 2015 : AV0301, AV0302_01, AV0405, AV0408,
SA0303_02, SA0703, PV0414, DC0001 et DC0501.
III.2. Propositions de création de nouveaux indicateurs
En prenant en compte les propositions recueillies et en privilégiant la représentativité de l’action des services et l’extraction automatique des données, nous proposons la création de 5 indicateurs :
- taux de suites données à des inspections dont la note globale est C pour le domaine SSA hors abattoirs ; - taux de suites données à des inspections dont la note globale est D pour le domaine SPA ; - taux de suites données à des inspections dont la note globale est C pour le domaine SPV ; - taux de prélèvements réalisés dans le cadre des PSPC effectivement analysés ; - gestion des suspicions et des foyers en santé des végétaux. Pour conclure le chapitre sur la création de nouveaux indicateurs, il nous semble important d’envisager dans un futur
proche deux nouveaux indicateurs le premier sur le fonctionnement de la nouvelle gouvernance sanitaire une fois
qu’elle sera installée et le second sur le contrôle des délégataires. Ces demandes ont également été émises par les
acteurs rencontrés et dans les réponses au questionnaire.
En cumulant nos propositions de suppression, de modification et de création nous aboutissons à une maquette de
13 indicateurs. Nous proposons également de modifier la présentation de cette maquette en classant les indicateurs
non plus par domaine mais par objectifs stratégiques. Cela permettrait de recréer un lien direct entre PAP/RAP et BOP.
III.3. Propositions concernant la gouvernance
Compte-tenu des données recueillies, nous proposons les pistes suivantes concernant la gouvernance des indicateurs
:
- au niveau de la conception des indicateurs : systématiser la réflexion soit collective et déclenchée en lien avec une
priorité ou une nouvelle politique, et conserver l’historique complet et d ‘assurer la continuité en cas de changement
d’équipe ; - mettre à disposition des tableaux de bords exhaustifs extraits directement par les utilisateurs et non plus en nécessitant l’intervention de la DGAL. Dans le cadre du chantier et du déploiement de Résytal les tableaux de bords sont bien
prévus et devraient répondre aux besoins pour la réalisation des inspections. - homogénéiser l’analyse et l’interprétation des résultats obtenus, et systématiser un retour vers les structures de
même qualité quel que soit le domaine. Enfin, pour parfaire la gouvernance du dispositif de performance, un dernier chantier nous semble indispensable :
celui de la clarification et de la mise en cohérence des autres données statistiques utilisées. En effet, de nombreuses
données sont demandées ou fournies aux services déconcentrées augmentant considérablement le temps de travail
administratif et renforçant le sentiment de « culture du chiffre » et de perte de sens du travail mené. Comme indiqué
nous avons recensé les statistiques et autres indicateurs utilisés au sein de la DGAL mais nous n’avons pas eu le temps
d’en faire l’analyse. Le nombre et la qualité des réponses reçues à notre questionnaire, la richesse des entretiens menés avec des agents
en SRAL et DDPP, la participation active des chefs de bureaux aux entretiens de groupe et la richesse des échanges,
montrent l’intérêt porté par tous les acteurs au dispositif et leur forte implication dans sa réussite. L’analyse des éléments recueillis montre également la convergence de leurs attentes, de leurs propositions et de leurs critiques. Toutefois, nous nous interrogeons sur trois sujets : la place et les missions des SRAL, les conséquences possibles
de l’exclusion des effectifs de la DGAL du programme 206 (poids de la performance sur les services déconcentrés,
influence sur la communication de la DGAL, impact sur le cloisonnement des trois niveaux) et enfin les conséquences
du volume d’évaluations, d’audits, de diagnostics, etc. que fait naître le dispositif de performance et le fonctionnement
actuel de l’Etat. (capacité des administrations à analyser, élaborer, mettre en œuvre et suivre des plans d’action, utilité
de toutes ces évaluations si les structures n’ont pas le temps de voir l’impact des plans d’action, compatibilité entre
changement et évolution permanents et gains d’efficacité). 199
Liste des indicateurs
AV0301
Taux de vétérinaires ayant
suivi au moins une formation
PV0102_01
AV0302_01
Taux de réalisation des VSB
dans la campagne
PV0208
Taux de levée de lʼAPMS en
AV0303_01 tub bovine dans le délai de 60
jours
Taux de levée de lʼAPMS
AV0303_02 hors tub bovine dans le délai
de 30 jours
Pression dʼinspection en
AV0403
pharmacie vétérinaire dans
les élevages de porcs
Taux dʼovins/caprins
AV0405
identifiés par boucle
électronique
Taux dʼélevages contrôlés ne
respectant pas les normes de
santé publique vétérinaire
AV0408
dans le domaine de
lʼidentification et de la
traçabilité des bovins
Taux de respect des
prescriptions de la DGAL en
SA0204
matière de recherche de
salmonelles
Taux dʼinspection non
conformes dans les
SA0303_01
établissements dʼabattage
ayant donné lieu à une suite
Taux dʼinspection non
conformes sur les points
incontournables du
SA0303_02 fonctionnement des
établissements ou chaîne
dʼabattage ayant donné lieu à
une suite
SA0306_01
SA0306_02
SA0703
PV0414
DC0001
DC002
DC0104
DC0201_01
DC0501
AV0402
DC0301_00
Taux de réalisation du
plan de contrôle des
produits
phytopharmaceutiques
et autres
contaminants chez les
distributeurs,
applicateurs et
utilisateurs
Taux de non
conformité majeure
produits
phytopharmaceutiques
et autres
contaminants
(applicateurs et
distributeurs)
Taux de contrôle des
établissements
soumis à PPE
Taux de mise à jour
des PISU
Taux de réalisation
dʼexercice de gestion
dʼépizootie majeure
Taux de re-contrôle
suite à inspection
avec mise en demeure
Taux dʼagents formés
au droit pénal appliqué
Nombre dʼélèves
bénéficiant de lʼaction
« un fruit pour la récré
»
Respect des PSPC
activateurs de
croissance et
antibiotiques
Taux de réalisation
des PSPC (tous)
Taux dʼinspections non conformes dans les ateliers
relevant de lʼaxe amélioration ayant donné lieu à une suite
Taux dʼinspections non conformes dans les ateliers
relevant de lʼaxe prévention ayant donné lieu à une suite
Taux de zones de production de coquillages classées
conformément à la qualité réelle de la zone
200
Liste des abréviations et des sigles
BMQCC
BOP
DDCSPP
DDPP
DAAF
DGAL
DRAAF
LOLF
MAAF
PAP/RAP
Bureau du management par la
qualité et de la coordination des
contrôles
Budget
opérationnel
de
programme
Direction départementale de la
cohésion sociale et de la
protection des populations
Direction départementale de la
protection des populations
Direction de l'alimentation de
l'agriculture et de la forêt
RBOP
Responsable de BOP
RPROG
RUO
Responsable
programme
Responsable d'UO
SALIM
Service de l'alimentation
SDPRAT
Direction
générale
de
l'alimentation
Direction
régionale
de
l'alimentation, de l'agriculture et
de la forêt
Loi organique n°2001-692 du 1er
août 2001 relative aux lois de
finances
Ministère de l'agriculture, de
l'agroalimentaire et de la forêt
Projet annuel de performance /
rapport annule de performance
SPA
Sous-direction du pilotage
des ressources et des
actions transversales
Santé
et
protection
animales
Santé et protection des
végétaux
SPV
SRAL
Service
régional
l'alimentation
SSA
Sécurité
aliments
sanitaire
de
de
des
Élaboration, mise en place et test d’une méthode pour la
préparation de l’expertise de la saisine « alternative » à partir de
l’exemple des produits et substances entrant dans la catégorie
des « plantes et extraits de plantes » utilisés chez les animaux
producteurs de denrées alimentaires et administrés per os
Caroline VISTE-MARTIN, Inspectrice stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2013-2014
Cadre de réalisation
Mission réalisée du 14 avril au 1er août 2014 à l’Unité d’Évaluation des Risques liés à la Santé, à l’Alimentation et au
Bien-être des Animaux (UERSABA) de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et
du travail (Anses) sous la responsabilité de Charlotte DUNOYER, chef de l’UERSABA
Questions abordées par l’étude 211
Cette étude s’inscrit dans la préparation de la saisine « alternative aux antibiotiques212 » de l’Anses par la Direction
générale de l’alimentation, dans le cadre de la mesure 19 de l’axe 2 du plan EcoAntibio 2017. Le plan EcoAntibio 2017
vise une réduction quantitative et qualitative de l’utilisation des antibiotiques et se décline en 5 axes, comprenant un
total de 40 mesures. Son axe 2 vise à développer les alternatives permettant d’éviter le recours aux antibiotiques, et
la mesure 19 concerne plus particulièrement l’évaluation du bénéfice des traitements alternatifs permettant de limiter le recours aux antibiotiques. Dans cette saisine, la DGAl souhaite que soit réalisé un état des lieux des produits
actuellement utilisés comme « alternatives aux antibiotiques », puis connaître le positionnement réglementaire de ces
NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son
auteur et déposées avec ledit mémoire.
212
Saisine n° 2013-SA-0122 « État des lieux des alternatives aux antibiotiques en vue de diminuer leur usage en élevage », cf.
Annexe C.
211
201
produits et, enfin, avoir une évaluation de l’efficacité et de l’innocuité des substances qui n’auraient pas encore été
évaluées.
L’enjeu principal de la mission était de trouver une méthode pour préparer et cadrer le travail des experts sur
cette saisine très large. En effet, la nature des produits « alternatifs », en vue de diminuer le recours aux antibiotiques,
utilisés sur le terrain ou en voie de développement est très variée. Il a par conséquent été décidé de cibler une catégorie, celles des produits et substances à base de plantes, et d’élaborer puis de tester une méthode qui pourrait par la
suite être déclinée aux autres catégories d’alternatives.
Une étude bibliographique classique ne peut pas répondre à elle seule aux objectifs de la mission, puisque les produits
et substances évalués doivent être en priorité des produits utilisés sur le terrain ou qui vont être mis sur le marché
prochainement. Il a donc été envisagé au début de la mission de croiser les résultats d’une recherche bibliographique
classique avec des données collectées sur le terrain : des études privées, qualifiées de « bibliographie grise », et qui
devaient permettre d’avoir des données complètes sur les produits commercialisés ou en développement. A cette
fin, une série d’entretiens avec des fabricants, après les avoir identifiés, devait être programmée en cours de mission.
Par ailleurs, en ce qui concerne la qualification juridique de ces produits, l’ANMV s’est auto-saisie en avril 2014 afin
de proposer des lignes directrices pour alléger les dossiers d’autorisation de mise sur le marché des médicaments
vétérinaires à bases de plantes. Car, depuis sa création en 1975, peu de spécialités à base de plantes disposent d’une
AMM (14 étaient recensées dans le rapport Afssa 2007 qui s’était penché sur le sujet), alors que de nombreux produits
et substances à base de plantes ou d’extraits de plantes semblent être utilisés sur le terrain, et se développe sous l’impulsion du plan EcoAntibio. La plupart de ces produits sont commercialisés comme additifs aromatiques, mais cette
catégorie fait actuellement l’objet d’une révision, et tous les produits anciens qui ne font pas l’objet d’une demande
d’homologation sont progressivement retirés du marché. Une partie de l’étude est donc commune avec celle de l’autosaisine : les médicaments à base de plantes et d’extraits de plantes permettant de diminuer l’usage des antibiotiques.
Le sujet sur les « alternatives à base de plantes et d’extraits de plantes » a fait l’objet de plusieurs cadrage successifs
afin d’en réduire son étendue de manière à pouvoir mener l’étude dans son intégralité. S’il a été choisi de considérer
« les produits alternatifs » au sens large, dans l’esprit du plan EcoAntibio, à savoir tout ce qui peut réduire l’usage des
antibiotiques, soit par prévention soit au sens curatif, en utilisation « à la place de », les principaux axes de recherche
devaient privilégier les produits utilisés en élevage, administrés per os, et exclure les antiparasitaires, les antifongiques,
les facteurs nutritionnels sensu stricto et l’homéopathie. Toutefois, tout ce qui serait collecté sur ces sujets devait être
conservé, soit en vue de la saisine, soit pour l’auto-saisine. La recherche a essentiellement porté sur les publications
de ces dix dernières années, car une rapide étude bibliographique avait déjà été faite par les experts de l’Anses lors de
la rédaction du rapport Afssa de 2007 (« Proposition pour une démarche d’évaluation de substances ou de produits «
nouveaux » destinés à l’alimentation animale. Cas particulier des substances et produits à base de plantes »).
Une première recherche bibliographique, volontairement très générale, a été réalisée afin d’identifier s’il y avait des
domaines (filières, pathogène, stade physiologique) / des plantes / extraits quantitativement plus étudiés. Les filières
les plus porteuses en termes de recherche semblent être les filières porc et volaille, notamment en ce qui concerne
les diarrhées post-sevrage chez le porc et les alternatives aux anti-coccidiens chez les volailles (ainsi que les huiles
essentielles pour soigner les mammites des ruminants, hors du champ de l’étude). Et les produits les plus fréquemment étudiés semblent être les huiles essentielles, principalement de thym, d’origan, et les extraits de thé vert. A ce
niveau, les difficultés rencontrées ont été l’apprentissage de la recherche bibliographique et de ses outils, l’étendu du
sujet, et la particularité des recherches dans le domaine des plantes, qui peuvent être référencées sous des appellation
très diverses : nom latin de la plante, ou nom commun, extrait ou partie de la plante étudiée (fruit), voire principe actif.
Cette recherche a permis de récolter une centaine d’articles d’intérêts pour le sujet, et une quarantaine pour les études
collatérales, avec un pourcentage d’articles dans leur intégralité de près de 60%. Elle a surtout fait émerger le besoin
de construire des outils efficaces pour une recherche plus fine des produits à base de plantes, et si possible, source
d’harmonisation dans les recherches qui seront certainement le fait d’experts ou de 3
groupes d’experts différents. Ces outils ont été présentés aux experts, lors d’une réunion le 17 juin. Il s’agissait d’éléments à discuter en avance pour décider de les inclure ou de les exclure de la recherche, de par leur proximité avec le
sujet (comme les antiparasitaires / anticoccidiens). Ensuite des clés de tri pour la bibliographie (qui n’a été utilisée que
pour la moitié des articles trouvés, par manque de temps) et une grille de pré-analyse, afin de pouvoir harmoniser les
évaluations des différentes plantes, substances ou extraits.
Les entretiens devaient permettre de collecter de la bibliographie grise. Toutefois, avant de contacter les fabricants,
j’ai préféré essayer d’avoir une idée plus précise des produits disponibles et des produits utilisés sur le terrain. Une
recherche préliminaire sur Internet m’a permis d’identifier quelques entreprises du secteur de l’alimentation animale,
essentiellement des prémix, ainsi que des entreprises spécialisées, qui vendent des suppléments nutritionnels, des
produits sur Internet (canine) mais très peu du côté des entreprises pharmaceutiques.
J’ai ensuite choisi de contacter des instituts techniques, des chambres d’agricultures et des GDS impliqués dans la
mesure 19 du plan EcoAntibio ou qui effectuaient des actions dans ce sens (pré- projet CASDAR de la Chambre d’agriculture de Bretagne). Puis j’ai contacté des vétérinaires phytothérapeutes ou ayant une pratique de la phytothérapie et
de l’aromathérapie, avant de contacter finalement cinq fabricants. Ces entretiens ne m’ont pas permis de recueillir la
202
liste attendue de plantes les plus utilisés, de produits commercialisés et de leurs fabricants. Paradoxalement, plus la
personne interrogée connaissait ces pratiques et ces produits, moins elle était encline à les communiquer, moins pour
dissimuler des informations que pour faire passer des messages cadres plus généraux et importants :
- le cul-de-sac de conduite d’élevage dans lequel risque de se retrouver l’élevage « bio » si les anciens additifs deviennent des médicaments et si toute préparation à base d’huile essentielle est soumise à prescription (au vu du règlement
européen de l’agriculture biologique) ; - la compréhension du cadre d’utilisation des produits « plantes » : la médecine holistique, et le besoin de s’accorder
sur des évaluations recevables des ces produits (tant du point de vue de leur efficacité que de leur innocuité). Cet
échec peut très certainement s’expliquer par les particularités du contexte, qui faisait de ce sujet des alternatives
«plantes» un sujet d’actualité, au cœur de débats, et des éclaircissements réglementaires attendus, depuis la parution
d’une note de rappel règlementaire de la part de l’ANMV en 2013 sur le classement des substances alternatives à
l’usage des antibiotiques dans la catégorie des médicaments, et l’interdiction de l’automédication. Les particularités du secteur producteur de ces alternatives « plantes », à cheval entre un secteur très industrialisé et
pharmaceutique, et un secteur alimentaire, mêlant artisanat, TPE, PME et multinationales, et qui impliquait de pouvoir
enquêter dans ces deux secteurs et une bonne connaissance de ces secteurs a également constitué un frein dans
l’atteinte des objectifs fixés.
Il est donc difficile de conclure sur l’efficacité de la méthode testée, et surtout sur son application possible pour les
autres « alternatives » à étudier, la durée du stage était finalement trop courte pour envisager de pouvoir faire le tour
du sujet. De plus, le contexte conflictuel et passionné des produits à base de plante ne rendait pas le sujet compatible
avec une telle étude.
On peut alors s’interroger sur la méthode à employer afin de pouvoir préparer la saisine « alternatives » dans sa globalité. Concernant les alternatives à base de « plantes », il est possible d’accepter la proposition de l’ITAB de réaliser un
état des lieux des pratiques grâce à son réseau. Mais dans ce cas, il faudra garder à l’esprit que cette enquête ne sera
représentative que de l’élevage bio, et que cette base sera à compléter.
L’étendue des informations à collecter et le nombre d’acteurs impliqués sont en faveur d’une participation active, idéalement sur la forme d’un volontariat, des utilisateurs et surtout des fabricants. Pour obtenir cette démarche, un geste
de la part du gestionnaire permettrait d’espérer de retourner une situation de blocage et de méfiance pour instaurer
un climat plus serein propice aux échanges et à la coopération entre intérêts privés et publics. Ce geste pourrait, par
exemple, à l’instar de ce que pratique parfois le ministère des finances, accorder un repentir à ceux qui coopèrent, ou
mieux encore, accorder un délai de transition, d’une à deux années, pour inciter les entreprises situées dans la « zone
grise » à coopérer avant de durcir le régime et de réaliser des opérations de contrôle et de sanction.
203
Groupes d’études scientifiques et techniques
Le parcours de formation statutaire des Inspecteurs Elèves de la Santé Publique Vétérinaire (IESPV) comprend notamment en début de 2ème année (septembre à novembre) un travail pédagogique collectif intitulé Groupes d’Études
Scientifiques et Techniques (GEST).
Ces études portent sur des problématiques techniques en lien avec la santé publique vétérinaire, la santé animale,
l’alimentation, la protection des végétaux ou encore l’environnement peuvent être confiées aux étudiants. Elles doivent
permettre d’analyser une question et d’élaborer à ce sujet des propositions de réponses opérationnelles.
L’étude fait l’objet d’un rapport écrit et le cas échéant, à la demande du commanditaire, d’une restitution orale.
Les étudiants sont placés en situation de groupe projet. Ils doivent conduire l’étude en suivant le cahier des charges et
en respectant l’enveloppe financière allouée par le commanditaire.
La commande d’étude fait l’objet avec l’organisme d’une convention qui précise les termes de référence de l’étude et
les modalités de participation financière de l’organisme commanditaire (v. p. 377 pour les modalités de commande).
Au cours de l’année universitaire 2014-2015, les GEST suivants ont été organisés et ont donné lieu à rédaction d’un
rapport complété par une restitution auprès du commanditaire :
- Etude portant sur le bilan de la gestion de la mortalité anormale de sangliers en Ardèche avec proposition d’un protocole de type de gestion Mortalité des sangliers en Ardèche ; Commanditaire : Fédération Nationale de la Chasse (2
élèves ISPV : Louis Bonhême et Anaïs Fleming).
- Information sur la chaîne alimentaire ; Commanditaire Direction Générale de l’Alimentation.
- Evaluation de la formation dispensée à l’École Nationale des Services Vétérinaires ; Commanditaire : Ecole Nationale
des Services Vétérinaires (8 élèves et stagiaires ISPV : Louis Bonhême, Hélène Brien, Marie Chaussepied, Anne-Charlotte Duroux, Alison Dussiot, Anaïs Fleming, Anne-Cécile Meyer-Warnod et Axelle Poizat).
- Mission d’appui à la rédaction de l’Arrêté SRMDS dans le cadre de la mise en œuvre de la nouvelle gouvernance sanitaire ; Commanditaire Direction Générale de l’Alimentation (3 élèves ISPV : Hélène Brien, Anne-Cécile Meyer-Warnod
et Axelle Poizat).
- Mission d’aide à la préparation et participation au colloque santé et biodiversité des 27 et 28 octobre 2014 ; Commanditaire : VetAgro Sup (7 élèves ISPV : Louis Bonhême, Hélène Brien, Anne-Charlotte Duroux, Alison Dussiot, Anaïs
Fleming, Anne-Cécile Meyer-Warnod et Axelle Poizat).
204
Groupes d’étude des politiques publiques
Dans le cadre du Master PPGC PAGERS co-habilité avec Sciences Po Lyon, et inclus dans la formation statutaire des
ISPV, les étudiants réalisent en groupe mixte (étudiants issus des sciences biologiques et étudiants issus des sciences
humaine) un travail collectif qui porte sur l’étude de problématiques d’actions publiques en lien avec la santé publique
vétérinaire, la santé animale, l’alimentation, la protection des végétaux ou encore l’environnement.
L’étude d’une durée de trois mois se déroule sur la période de décembre à mars et doit permettre d’analyser une
question et d’élaborer à ce sujet des propositions de réponses opérationnelles.
Le travail est encadré par un enseignant-chercheur de Sciences Po Lyon en lien avec l’ENSV.
L’étude fait l’objet d’un rapport écrit et d’une restitution orale sous forme d’un séminaire organisé par le groupe d’étudiants.
Les étudiants sont placés en situation de groupe projet. Ils doivent conduire l’étude en suivant le cahier des charges et
en respectant l’enveloppe financière allouée par le commanditaire
La commande d’étude fait l’objet avec l’organisme d’une convention qui précise les termes de référence de l’étude et
les modalités de participation financière de l’organisme commanditaire (l’ordonnateur des dépenses restant le directeur
de l’ENSV).
La nouvelle gouvernance sanitaire en Bourgogne : des stratégies
de réorganisation aux enjeux professionnels et territoriaux
Fatah Bendali, Nada Boutighane, Virginie Labarre, Brigitte Laplace, Paulin Ngouana, Axelle Poizat, Florence Rouyez
Les États Généraux du Sanitaire ont été une tribune de concertation entre l’État et ses partenaires professionnels
début 2010. L’objectif était de redessiner le paysage du sanitaire à partir de nouveaux objectifs, tout en reprenant son
pilotage, son fonctionnement, ses outils et ses moyens.
Cette remise à plat trouvait pleinement ses motivations dans un contexte mondial d’échanges de plus en plus importants engendrant des risques réels de propagation ou d’apparition de nouvelles maladies ou de nuisibles. Concomitamment, on observait une reconfiguration des politiques publiques : enjeux de répartition des rôles et des compétences, décentralisation, nouvelles relations entre le public et le privé, etc., impulsée depuis plusieurs années.
Notre étude, déployée sur quelques semaines, vise à travers le choix de la région Bourgogne, à comprendre la portée,
les enjeux, les réalités, les craintes et les motivations suscitées par la mise en place de la nouvelle gouvernance. Elle
repose sur des entretiens semi-directifs, réalisés avec tous les acteurs du sanitaire, tant animal que végétal, que nous
avons identifiés tant au niveau régional que départemental. Le contexte de réalisation de cette enquête s’inscrit dans
un suivi inédit, mis en place par la DGAl, décliné sur deux ans, et se situe à une période transitoire où la gestion du
sanitaire, qui prévalait depuis une cinquantaine d’années, laisse aujourd’hui place à l’installation lente et progressive
d’un nouveau modèle. En plus du commanditaire, les résultats pourront servir d’éclairage et d’éléments de réflexion
aux autres études à venir.
En Bourgogne, il existe une diversité de productions animales et végétales, et la gestion du sanitaire se trouve par
conséquent très riche et variée. Via le réseau des GDS, la filière bovine est reconnue pour sa bonne organisation et
une forte adhésion des éleveurs. D’autres filières (aviaire, porcine) se sont organisées en groupements. Le domaine
végétal quant à lui, est également regroupé par filière de production et par groupements, au sein de la FREDON. Le
système sanitaire bourguignon est complexe. Il est la résultante d’un ensemble de contextes et d’acquis historiques
locaux : multiples acteurs autonomes dotés de compétences spécifiques, de niveaux opérationnels différents. Il peut
tout de même être caractérisé par un équilibre stable au niveau départemental, au sein des services de l’État comme
chez les professionnels.
Depuis quelques années, l’État a tenter de restructurer ses services et de modifier ses missions notamment avec la
RGPP et à l’échelle des territoires avec la Réate. Force est de constater que ce n’est pas encore le cas des acteurs
privés, habitués de façon historique, à gérer le sanitaire au plus près du terrain. Depuis leur reconnaissance en mars
2014, les deux OVS, animal et végétal, tardent à constituer l’ASR. Les filières minoritaires ne semblent pas trouver leur
place dans ce nouveau dispositif ainsi que certains acteurs historiques du sanitaire, notamment les vétérinaires et les
LVD, qui se questionnent. Ils considèrent que le nouveau dispositif de gouvernance est asymétrique et attribue un rôle
205
plus important à certains au détriment des autres. La valeur ajoutée de la juxtaposition de la santé animale et végétale
au sein des ASR, n’est également pas clairement perçue par la plupart des acteurs.
Le premier constat qui ressort de notre étude est que les EGS ont essentiellement réuni les services centraux de l’État
et leurs interlocuteurs traditionnels qu’étaient les fédérations et instances nationales (GDS France, COOP de France,
Syndicats agricoles, Interprofessions). La participation des échelons infra-nationaux a été quasi-inexistante, à l’exception de quelques timides contributions de personnes ressources au sein de groupes de travail. Ce sentiment d’avoir
été écartés des débats est identifié par les acteurs de terrain, qu’ils soient des services publics ou des professionnels.
Ce premier reproche est unanime et engendre d’une part la faible implication des acteurs, et d’autre part la lente prise
en compte des nouvelles exigences vécues comme autant de contraintes.
Le second constat révèle la quasi unanimité des acteurs sur l’absence de pilotage de cette réforme. Si les partenaires
privés s’accordent sur le fait qu’elle doit être conduite par les services de l’État en région, force est de constater que
ces derniers, notamment le SRAL animal, manquent de ressources pour animer la mise en place de la NGS. Les
échéances imposées sont courtes et paraissent en décalage avec les changements attendus et les importants efforts
structurels et financiers qui en découlent. Cette réforme se déploie avec de nouvelles instances aux acronymes multiples et complexes. Cela nécessiterait a minima un accompagnement, aussi bien financier, qu’humain ou communicationnel, et la mise en place d’outils de mise en œuvre et de suivi.
Le troisième constat est le reproche fait à GDS France d’avoir saisi l’opportunité de cette nouvelle réforme pour asseoir une position d’interlocuteur unique du sanitaire auprès de l’État et de décideur pour les instances régionales et
départementales. Cette situation est à l’origine de frustrations des acteurs locaux traditionnellement souverains sur leur
territoire, et de l’absence de reconnaissance de cette légitimité inversée. En effet, cette prise de pouvoir est synonyme
de craintes aussi bien pour les structures départementales que régionales qui se sentent légitimes dans l’action de
proximité. Ce point ne concerne par contre que la filière animale.
A travers ces divers constats structurels, fonctionnels et stratégiques, on retient que, comme tout changement engendrant un repositionnement des acteurs, la NGS n’a pas échappé à la règle, elle a engendré un jeu de pouvoir et
d’attribution, de redistribution ou de recherche de prérogatives. La complexité de la réglementation et le manque de
lisibilité de la réforme, sont également des constats largement énoncés sur le terrain. Les acteurs locaux ne comprennent pas bien ce nouveau dispositif et tardent donc à le mettre en place. L’impression générale d’un désengagement
financier de l’État ressort également de notre étude, alors que de leur côté, les OVS engagent de gros efforts de temps
et d’argent pour faire évoluer leurs statuts. Ils regrettent et dénoncent le manque d’accompagnement et de clarté sur
les conséquences financières de cette réforme.
Du point de vue des services déconcentrés de l’Etat, les instructions ne sont pas claires et n’explicitent ni stratégie
ou méthodologie (coordination, accompagnement, etc.), ni attendus dans un contexte où les missions de ces services
ont changé, et deviennent difficiles à mener en raison de la baisse des effectifs et de la réduction des moyens. De plus,
l’augmentation des missions déléguées fait craindre des pertes de compétences des agents de l’État, ce qui affecterait
les capacités d’audit des professionnels par les services techniques déconcentrés.
Les missions et prérogatives de chaque acteur dans le paysage de la NGS sont définies dans les textes réglementaires.
Les constats et freins évoqués plus haut n’ont pas empêché les acteurs de se projeter dans cette nouvelle dynamique,
en commençant par se doter d’outils préalables tels que les statuts de constitution des OVS. Le rapprochement entre
le domaine animal et végétal se fait progressivement au gré des rencontres initiées et va sans doute aboutir à la création de l’ASR en 2015. L’ouverture à toutes les filières animales ne pourra être acquise que moyennant une autonomie
financière réelle et une politique sanitaire autonome. Il n’en demeure pas moins qu’au delà du concept et des aspects
structurels, la grande majorité des acteurs émet le souhait que ce dispositif se dote rapidement d’un programme sanitaire concret et fédérateur. Ce n’est qu’à partir de ce type de réalisation que tout le monde pourra se rendre compte du
bien fondé et de l’efficience de la NGS à l’instar de la mise en place il y a 30 ans du plan de lutte varron par la FRGDS.
Au moment où les acteurs commencent à se positionner et se mettre en ordre de marche, ce changement de paradigme va être bouleversé par la proche réforme territoriale annoncée pour la fin de cette année 2015. En Bourgogne, la
perspective du regroupement avec la Franche-Comté laisse apparaître des appréhensions par les éleveurs bovins en
raison des différences des systèmes et des stratégies sanitaires spécifiques, allaitants vs laitiers.
Enfin, si la mise en place de la NGS est source de tensions, de blocages, les acteurs ne sont pas pour autant opposés
à ce changement. Ils demandent à mieux la comprendre et à bénéficier de temps pour se l’approprier.
Les métiers de la santé publique vétérinaire en question. Le cas
de la socialisation professionnelle des inspecteurs de santé
206
publique vétérinaire
Alexis Bailloud, Louis Bonhême, Marie Chaussepied, Jacky Laborieux, Alexandra Troyano-Groux, Siham Salah
L’organisation de l’appareil d’Etat a été profondément remaniée depuis les années 1960 en vue de le moderniser. La
notion de gouvernance de l’action publique est ainsi introduite et amène à s’interroger sur ce qui fonde la légitimité du
partage de la responsabilité de l’action publique entre les autorités publiques et les acteurs privés.
En santé publique vétérinaire également, l’objectif est d’optimiser la gouvernance et le financement de la politique
sanitaire, de mieux intégrer les partenaires privés, tout en s’adaptant aux nouveaux enjeux et aux nouvelles menaces
liés à la mondialisation des échanges.
Le corps des ISPV, qui participe à ces politiques a également vu une évolution de ses champs de compétences et de
son environnement de travail.
Ce contexte nous a amené à nous poser les questions suivantes : Existe-il un savoir- faire et un savoir-être spécifique
au corps ? Peut-on parler de socialisation professionnelle et de l’acquis d’un savoir-être propre aux ISPV ? Quelle légitimité a le corps pour occuper des postes de pilotage de politiques publiques ?
Notre étude s’articule autour de la problématique suivante: En quoi le fait d’appartenir au corps des ISPV implique-t-il
une socialisation professionnelle organisée autour: d’une part de facteurs internes tels que les compétences et les
valeurs communes, et d’autre part de facteurs externes tels que les interactions du corps des ISPV avec son environnement.
A partir de ce questionnement, trois hypothèses de travail ont émergé au début de notre étude : une mobilisation différente des compétences techniques et scientifiques selon le poste occupé (une diversité au niveau des postes accessibles aux ISPV) ; un dilemme du corps : entre ouverture et perte d’identité ; un déficit de visibilité du corps des ISPV.
Pour élaborer notre étude, nous nous sommes appuyés sur différents travaux sociologiques traitant des acteurs de la
santé publique vétérinaire. Nous avons ainsi appuyé notre raisonnement sur les travaux de Laure Bonnaud et Jérôme
Coppalle et de Philippe Fritsch concernant l’évolution et la transformation du métier des ISPV.
Les contraintes de temps nous ont poussés à restreindre notre terrain d’enquête au corps des ISPV et à choisir des
entretiens plutôt que des questionnaires. Cependant pour ne pas garder une vision trop internaliste de ce corps, nous
avons également interrogé d’autres personnes n’appartenant pas à ce corps. Nous avons réalisé un total de 26 entretiens (18 ISPV et 8 non ISPV). Afin d’obtenir un échantillon représentatif du corps des ISPV, nous avons questionné
des ISPV dans leurs principales structures d’accueil à l’échelon local ou national et à différents niveaux de hiérarchie.
En tant qu’enquêteurs non sociologues, nous avons été confrontés à deux types de difficultés : d’une part, il a fallu
faire un effort d’objectivité pour nous écarter de notre propre vision du métier et d’autre part nous avons interrogé des
personnes qui ont l’habitude de mener des entretiens et dont certaines pourraient devenir nos supérieurs ou collègues.
Pour répondre à la problématique posée précédemment, nous nous intéresserons dans un premier temps aux évolutions de la santé publique vétérinaire, milieu professionnel des ISPV et aux conséquences de ces évolutions sur le
positionnement de ce grand corps d’Etat. Nous verrons ensuite quelles compétences sont nécessaires aux ISPV pour
mener à bien
l’ensemble des missions qui peuvent leur être confiées. Enfin, nous nous interrogerons sur l’identité du corps des ISPV
en nous appuyant sur l’exemple de la socialisation professionnelle et en étudiant les éléments qui fondent la légitimité
de ce corps.
La santé publique vétérinaire, selon la définition qu’en donne l’Académie vétérinaire de France, se fixe comme but
ultime « la protection, la conservation et l’amélioration de la santé de l’Homme, c’est à dire son bien-être, physique,
moral et social ». Les acteurs de la santé publique vétérinaire rencontrés dans le cadre de cette étude se retrouvent
autour de cet objectif, la santé humaine. En revanche, des divergences s’expriment sur le champ que doit embrasser
ce domaine d’action publique, divergences illustrées par les débats qui existent autour de l’idée d’une santé publique
agronomique et vétérinaire. Le plaidoyer pour une santé publique vétérinaire élargie au domaine végétal, et prenant en
compte les risques environnementaux rejoint le concept « One World - One Health » promu par la Wildlife Conservation
Society qui invite à développer une « approche holiste » dans le but, notamment, de « maintenir les écosystèmes ».
Cette approche globale suppose un changement de paradigme dans les modalités de penser et de mettre en œuvre
l’action publique en santé publique vétérinaire, de dépasser les modèles sectoriels d’intervention publique dans lesquels chaque administration, structurée autour d’une logique professionnelle, préserve son autonomie. Le domaine de
la sécurité sanitaire des aliments apparaît comme emblématique d’un champ d’intervention où sont parties prenantes
plusieurs administrations appartenant aux ministères en charge de l’agriculture, de la santé, de l’économie, et de la justice. Par ailleurs, la mise en œuvre du Paquet Hygiène, à partir de 2006, les réflexions engagées à partir de 2010 autour
d’une nouvelle gouvernance du sanitaire, s’inscrivent dans un mouvement général de réforme de l’action de l’Etat, qui
prône la mobilisation et l’intervention, en interdépendance, d’acteurs appartenant à la sphère gouvernementale et à la
sphère privée, pour élaborer et mettre en œuvre l’action collective. Le constat que l’action dans le domaine de la santé
207
publique vétérinaire implique une variété d’acteurs, publics, privés, vétérinaires ou non, est partagé par beaucoup. Se
pose néanmoins la question d’un référentiel commun autour duquel peuvent se réunir ces différents acteurs.
Le corps des ISPV est fortement identifié et reconnu comme un corps de haut niveau technique en charge des questions de santé publique vétérinaire. Les crises sanitaires et alimentaires des années 1990 et 2000, et la publicisation
des questions touchant à la santé publique vétérinaire, contribuent à accroître la visibilité du corps au sein de l’appareil
administratif du ministère de l’Agriculture. Toutefois, le décret statutaire par lequel est crée le corps en 2002 et qui met
en exergue les « fonctions d’encadrement supérieur, de direction, de contrôle et d’expertise » que sont appelées à
exercer les membres du corps des ISPV, engendre un certain nombre de questions face à des injonctions qui peuvent
sembler contradictoires : des fonctionnaires dont le haut niveau de technicité est reconnu ; des fonctionnaires polyvalents avec une double valence, technique et managériale, mais aussi un corps polyvalent, où coexistent ceux qui
font du technique et ceux qui font du management. Ces transformations du corps posent également la question du
maintien et du développement d’autres compétences au sein de celui-ci.
L’approche du métier peut se faire par l’étude des compétences requises à son exercice. A la notion de compétences
se rattachent différents termes comme : connaissances, savoirs, technicité, management. Le classement des compétences évoquées par les acteurs que nous avons rencontrés permet de structurer la présentation de nos résultats
en trois parties : des compétences techniques vétérinaires (fondées sur la connaissance des sciences de la vie) et
non vétérinaires ; des compétences transversales (compétences managériales, savoir-faire et savoir être). La question
se pose alors de savoir quelles relations existent entre ces différentes compétences, et de quelle manière sont-elles
vécues par les personnes enquêtées ?
Les compétences techniques vétérinaires sont reconnues fondamentales et indissociables de l’action par l’ensemble
des enquêtés. La formation vétérinaire ainsi que la pratique participent à la fondation d’un cœur de métier, et d’une
identité professionnelle légitimée dans le milieu professionnel. Toutefois, certains enquêtés ont fait part, lors des entretiens, de la place de plus en plus importante qu’ils doivent accorder au management.
C’est dans un contexte de réforme de l’État visant à améliorer l’efficacité du service public et la maîtrise des dépenses
publiques, que le New Public Management, c’est-à-dire la diffusion de techniques managériales issues du monde
de l’entreprise, s’est imposé dans l’administration publique. Les activités managériales semblent prendre un poids
considérable dans les postes occupés par les ISPV. La notion de management n’est pas univoque. Selon le enquêtés
le terme de management peut évoquer: une responsabilité différentes des compétences techniques, une sensibilité,
savoir diriger une équipe, gérer des conflits et des crises et enfin prendre des décisions, parfois dans l’urgence. Pour
l’ensemble des enquêtés, la nécessité du management est une réalité. Souvent, certains le découvrent face aux difficultés rencontrées dans leur premier poste. Tous regrettent le manque de formation initiale sur ce domaine. Enfin,
malgré des erreurs reconnues parfois en début de carrière, la compétence en la matière s’acquière par la pratique et
la formation continue.
Les enquêtés ont ainsi développé des compétences techniques et des compétences transversales managériales. Elles
ne semblent pas être partagées de façon égale par tous les ISPV selon les postes occupés (services déconcentrés,
administration centrale). Il apparaît cependant que les premières constituent un dénominateur commun qui cimenterait
une identité collective du corps. Les secondes, perçues alors comme une double compétence, justifieraient la place
grandissante de ce corps tout en lui apportant une plus grande visibilité. Les ISPV ne seraient plus assimilables à la
seule profession vétérinaire.
Les ISPV forment un groupe. Nous avons questionné les éléments qui constituent ce groupe et mis en évidence l’importance de facteurs internes et externes dans sa construction. Le modèle de la socialisation professionnelle d’Hugues
est une bonne grille de lecture pour comprendre le sentiment d’appartenance des individus au corps des ISPV. Ce
modèle est conçu à la fois comme une initiation, au sens ethnologique, à la «culture professionnelle» et comme une
conversion, au sens religieux, de l’individu à une nouvelle conception de soi et du monde, bref à une nouvelle identité.
La question s’est alors posée de savoir s’il existait une culture commune aux ISPV. Nous avons alors démontré que
les membres du corps des ISPV possédaient une forte culture vétérinaire, acquise lors de leur formation initiale et que
celle-ci les influençait dans leur manière de raisonner, la démarche diagnostic étant l’un des éléments fondateurs de
cette culture. Cependant, le corps des ISPV est un corps de fonctionnaires de l’Etat. Les ISPV ne possédant pas la
culture administrative à la fin de leur formation vétérinaire, un passage par une école d’application est donc primordial
afin d’opérer cette conversion. Ainsi, au-delà de l’enjeu de préparer les individus à leurs nouvelles fonctions par l’acquisition de nouvelles compétences, l’ENSV permet avant tout de construire un véritable esprit de corps et de réaliser
cette conversion. Nous avons alors pu constater que même si la culture administrative faisait partie intégrante du corps
des ISPV, ce changement restait peu visible pour les personnes extérieures au corps et que l’étiquette de vétérinaire
était bien souvent plus forte que celle d’ISPV.
La définition d’un groupe passe aussi par la définition de ses frontières. Celles du corps des ISPV étaient relativement
faciles à délimiter jusqu’à l’ouverture de celui-ci à de nouvelles missions et à de nouvelles personnes (ingénieurs
agronomes, ingénieurs IAE,...). Si l’ouverture à de nouvelles missions (sur des problématiques végétales, environnementales,...) a été bien accueillie par l’ensemble du corps des ISPV, ses membres y voyant de véritables opportunités
208
d’évolution des carrières, les avis étaient plus partagés concernant l’intégration au corps des ISPV de non-vétérinaires.
L’intégration de ces derniers au corps a entrainé la peur d’une perte d’identité professionnelle chez ses membres. Cette
peur a été exacerbée par la fusion des services vétérinaires départementaux dans les nouvelles des DD(CS)PP. En effet,
nous avons pu voir que ces nouvelles structures cristallisaient de nombreuses inquiétudes chez certains ISPV qui redoutaient un abandon des compétences spécifiques des individus au profit de compétences purement managériales.
Mais si les facteurs internes qui déterminent ce groupe sont trop changeants et ne sont pas assez stables, les ISPV
peuvent ils consolider leur unité en s’appuyant sur les facteurs externes que sont le pouvoir et la légitimité de ce corps
d’Etat ?
Comme tous les grands corps de l’Etat, les ISPV jouissent d’un prestige basé sur le pouvoir tant de ses membres
pris individuellement que du pouvoir propre du corps. Ce pouvoir ne peut perdurer que s’il est légitime. Nous nous
sommes donc penchés sur les sources de la légitimité. A la lecture des travaux de Max Weber, de François-Xavier
Schweyer et Arnaud Campéon, et en nous basant sur nos entretiens, nous avons identifié quatre sources de légitimité
chez les ISPV. La première repose sur le statut et se fonde sur la notion d’intérêt général. La seconde est la résultante
de l’appartenance à la profession vétérinaire. La troisième est liée à une participation à l’édiction des lois et au pilotage
des politiques publiques. La quatrième enfin s’appuie sur la sélection des membres via un concours d’entrée. Chaque
élément pris séparément ne suffit pas à garantir la pérennité du groupe, puisque chacun de ces éléments peut être
remis en question. Ainsi l’appropriation des missions dévolues au ministère de l’agriculture est régulièrement contestée
par d’autres ministères ; le statut du corps lui-même change régulièrement ; le corps s’ouvre à des non- vétérinaires ;
le recrutement sur concours pensé comme républicain apparait finalement plus comme un facteur de reproduction des
élites. Cependant, ces facteurs, combinés, confèrent une légitimité forte au corps.
Nous avons également identifié un manque de visibilité du corps, dont l’ascension au sein du ministère de l’Agriculture
serait finalement liée à un effet d’aubaine suite à un repositionnement stratégique du corps des IPEF, et étudié les
leviers employés au sein du corps pour augmenter cette visibilité. Ces leviers sont : le salaire, le développement de
l’inter- ministérialité et de l’essaimage, le pantouflage, le réseau à la fois au sein et en dehors du corps. Si le salaire et le
réseau apparaissent comme des vecteurs de valorisation unanimement reconnus, l’inter-ministérialité et le pantouflage
sont deux sujets plus clivant au sein du corps. Si pour certains, ils sont la condition sine qua non d’une ascension, pour
les autres ils seraient un facteur de fragilisation de la base technique.
Conclusion
Ce travail a permis aux membres de notre groupe d’élargir leur vision des métiers de la santé publique vétérinaire
et d’appréhender, via l’expérience des enquêtés, la large palette de carrières qui s’offrent aux ISPV, mais les a aussi
amenés à se questionner sur leur propre positionnement et aspirations de carrières. En clarifiant les points sur lesquels
repose la légitimité des ISPV, ce travail leur a donné les clés pour espérer parvenir à équilibrer les différentes compétences requises pour avoir une carrière enrichissante. Il a aussi mis à jour les inquiétudes face aux prochaines prises de
poste qui nous conduirons à manager des équipes.
Au-delà des conclusions de notre rapport, quelles sont les raisons pour lesquelles l’ENSV a choisi de nous faire travailler ensemble ? S’agit-il de favoriser l’intégration (interactions avec les pairs) et l’affiliation (affiliation tant institutionnelle qu’intellectuelle) des étudiants, qui proviennent d’horizons divers (un concours étudiant, deux concours externes,
deux concours réservés, un étudiant en sciences politiques) ?
Pourquoi introduire la sociologie dans le cursus ? L’enjeu est-il, comme l’affirme Julie Gervais, de nous re-légitimer en
tant que grand corps d’Etat, sachant que ces grands corps subissent une certaine défiance de l’opinion publique ?
Est-ce encore une manière de nous préparer à cette défiance ?
La lutte contre le campagnol terrestre en région Auvergne,
étude d’un difficile problème public
Emeline Charles, Alison Dussiot, Virginie Gydé, Florence Legrand, Anne-Cécile Meyer-Warnod, Patrice Rubillard et
Cathy Traynard
La prolifération du campagnol est la cause de dégâts importants pour les agriculteurs. La lutte menée contre ce dernier en Auvergne depuis plusieurs dizaines d’années mobilise de nombreux acteurs, à savoir des administrations, des
associations de protection de l’environnement, des experts et des chercheurs, des agriculteurs, des élus. Notre travail
répond à une commande de la direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DRAAF) d’Auvergne.
Au sein de cette direction, le service régional de l’alimentation (SRAL) en charge des questions relevant du domaine sanitaire cherche à mieux comprendre « la problématique campagnols en Auvergne et l’évolution de la réglementation213
» . Dans ce but, le SRAL nous a commandé un travail d’étude de politiques publiques sur le sujet. Dans ce cadre, nous
Document de présentation du projet d’étude GEPP (Groupe d’Etude des Politiques Publiques) remis aux étudiants en
novembre 2014.
213
209
avons supposé que la pluralité d’acteurs impliqués dans cette lutte pouvait amener à une diversité de définitions du
problème. C’est cette vision multifacette de la lutte qui complexifie la résolution de ce problème public. De plus, nous
avons également fait l’hypothèse d’une communication faible ou inégale entre les acteurs qui renforcerait le caractère
peu harmonisé de la définition du problème. Ainsi, nous nous sommes demandé en quoi l’organisation de la lutte
contre le campagnol terrestre témoignait de la formation d’un difficile problème public. Notre étude rassemble deux
principaux objectifs. Le premier est pédagogique : notre travail de groupe nous a conduits à appliquer les enseignements d’analyse des politiques publiques et à pratiquer une démarche d’enquête de terrain. Ce type de démarche qui
demande à se départir de ses présupposés afin d’avoir un regard neutre et extérieur, permet de recueillir des données
sur un terrain particulier en donnant la parole aux différents acteurs. Pour cela, élargir l’enquête à l’ensemble des acteurs identifiés est nécessaire, aussi nombreux soient-ils, afin de se donner les moyens d’appréhender la complexité
du problème dans sa globalité. Pour ce travail d’enquête, nous avons utilisé principalement l’entretien comme outil
qui ne vise pas la représentativité des données mais qui n’a d’autre ambition que de bien comprendre qualitativement
les logiques d’acteurs. Pour une approche inspirée des sciences sociales, nous avons commencé par effectuer une
revue de la littérature disponible sur le sujet. C’est principalement sur ces matières, données de terrain et littérature en
science politique, que s’est appuyée notre analyse de la situation. Celle-ci nous permet de servir le second objectif de
notre travail : mettre en débat les résultats de notre enquête de terrain et servir de base de discussion afin de permettre
à notre commanditaire d’avancer la réflexion sur le sujet de la lutte contre le campagnol.
Méthodologie
Nous avons tout d’abord réalisé un travail de recherche bibliographique dans les domaines agronomique, vétérinaire et
des sciences sociales. Nous avons également eu accès à une formation ouverte à distance (FOAD) initialement développée pour un public de techniciens, ce qui nous a permis de nous familiariser avec le campagnol. Nous avons ensuite
réalisé plusieurs entretiens de cadrage avec le commanditaire afin de cerner ses attentes vis-à- vis de ce travail. La formulation de nos hypothèses s’est développée en parallèle de ce premier travail exploratoire.
Parallèlement, nous avons
identifié plusieurs acteurs et mené quelques entretiens exploratoires avec des experts. Ces premières étapes nous
ont conduits à mettre au point une typologie des différents acteurs concernés (experts, administration, organisations
à vocation technique et sanitaire et associations environnementalistes), à réaliser une première définition de notre sujet
et à élaborer une grille d’entretien adaptée à chaque type d’acteurs. Souhaitant donner une certaine liberté de parole
à nos enquêtés, nous avons choisi de réaliser des entretiens semi-directifs par binôme en privilégiant les rencontres
plutôt que les discussions téléphoniques. Différents acteurs nous ont orientés vers des contacts potentiels. Ce mode
de sélection a inévitablement introduit un biais en retenant des agriculteurs ouverts au dialogue et installés dans des
zones à risque ou touchées par les campagnols. A l’issue de ce travail de recensement et de prise de contact, nous
disposions de 28 rendez-vous pour des entretiens. Nous avons veillé à répartir les entretiens sur l’ensemble des départements de la région pour avoir un échantillon le plus complet possible. Afin de garantir l’anonymat de nos enquêtés,
nous les avons regroupés par typologie d’acteurs et les avons renommés.
Venant d’horizons différents (science politique, vétérinaire, ingénierie agronome) et d’expériences également variées
(étudiant, ancien chef d’équipe, praticien clinicien), nous avions tous une appréhension particulière des éléments étudiés – vétérinaire sur les rapports aux agriculteurs, agent de secteur public par rapport à l’administration, étudiant en
science politique par rapport aux questions vétérinaires – et avons souvent confronté nos points de vue pour arriver
à partager le sens de nos analyses. Par ailleurs, la multiplicité des acteurs et discours a nécessité une réelle prise de
distance afin d’objectiver notre sujet. La discussion, le partage et le débat au sein de notre groupe ainsi que des retours
systématiques après chaque entretien nous ont permis d’améliorer notre objectivité et de réaliser une réelle analyse
de notre sujet.
Conclusion de l’étude
Notre étude a été initiée par une première réflexion. Comment se fait-il que le campagnol terrestre, un si petit mammifère, provoque des dégâts aussi conséquents en Auvergne? L’aspect minuscule de ce nuisible, ainsi que l’absence
de perception du campagnol comme un problème de santé publique à part entière, participent sans aucun doute à
la difficile formation de ce problème public. Après avoir décrit les aspects biologiques du campagnol, nous sommes
revenus sur les moyens de lutte existants. Alors que le piégeage traditionnel occasionne un coût considérable, les
méthodes chimiques provoquent des mortalités au sein de la faune non-cible, dont le milan royal, espèce protégée.
Les différents acteurs ne partageant pas les mêmes objectifs dans la construction de la lutte contre ce nuisible, on
s’aperçoit qu’il n’existe non pas une « solution » consensuelle et acceptable par tous mais des solutions répondant aux
différentes facettes du problème.
D’une part, la perception du campagnol comme un « problème » est récente. Pour les
agriculteurs, cela remonte aux premiers pics de pullulations dans les années 1970. Pour les environnementalistes, c’est
à la fin des années 1990, suite à une mortalité importante constatée sur la faune sauvage. Leurs revendications ont
alors pesé dans la construction des politiques publiques et ont contribué à faire évoluer l’encadrement réglementaire
de l’usage la bromadiolone et de la lutte contre ce nuisible. A partir des années 2000, certains changements s’opèrent
210
: d’une part une volonté de promouvoir des moyens visant à prévenir la pullulation et d’autre part, une transmission
progressive des compétences en matière de lutte de l’échelle nationale à l’échelle régionale dont l’aboutissement est
la nouvelle gouvernance sanitaire impliquant désormais une pluralité d’acteurs.
D’autre part, nous avons remarqué
que la communication entre les différents acteurs de cettepolitique publique est partielle voire naissante ou inexistante
entre certains d’entre eux. Alors que nous observons une transmission d’informations faible et déséquilibrée, nous
constatons l’existence d’une « expertise terrain du campagnol » chez les agriculteurs, acteurs en contact direct avec le
nuisible. Ces acteurs ont une conception individuelle du campagnol qui résulte à la fois d’une perception particulière de
l’animal, de l’entretien de mythes tel celui du lâcher de campagnols et de la faible quantité d’informations reçues. Cette
vision du rongeur portée par l’agriculteur, au sein de laquelle on peut distinguer plusieurs nuances selon les individus,
est déterminante dans les stratégies de lutte.
Enfin, nous avons vu que la lutte contre le campagnol constitue un problème public « impossible », au sens de difficile
à résoudre. Il s’agit de comprendre la nature même de ce problème : est-il agricole, environnemental ou relève-t-il de
ces deux notions ? Il y a plusieurs appropriations du sens de la lutte entre les différents acteurs. Nous nous sommes
demandé si ce problème était spécifiquement « de santé publique », l’aspect sanitaire apportant une visibilité politique.
Nous le considérons plutôt comme un problème public évolutif et multifacette. Une dernière piste permet de cerner le
caractère « impossible » du problème campagnol alors que différents acteurs nous présentent leurs multiples solutions
au « vivre avec » le campagnol. Tandis que la décentralisation et la nouvelle gouvernance sanitaire se traduisent par un
certain désengagement de l’Etat, les acteurs techniques réclament accompagnements et financements et les agriculteurs se résignent à agir seuls.
L’un des principaux problèmes constatés dans l’élaboration d’une lutte collective est qu’une vision commune semble
difficile du fait d’enjeux et d’attentes divergents entre les acteurs. Toutefois, il doit être possible de déboucher sur un
consensus à condition que des objectifs communs soient identifiés et adoptés. Déjà tous les acteurs se rejoignent
pour dire que les traitements à la bromadiolone en période de pullulation sont inefficaces vis-à-vis du campagnol et
dangereux pour la faune sauvage. Afin de renouer un dialogue constructif, il nous apparait nécessaire d’accepter qu’il
n’y ait pas de coupable mais seulement des acteurs qui, tous, défendent un intérêt respectable. Notre étude de cette
lutte révèle de multiples questions que nous nous contentons de soulever : l’administration ne pourrait-elle pas jouer un
rôle d’animation transversale entre les représentants des différents acteurs? Tout autre acteur pourrait-il avoir pour cela
une légitimité? Un véritable réseau capable de gérer la lutte contre le campagnol existe-t-il à l’heure actuelle ? Tous les
acteurs susceptibles d’intervenir dans cette lutte sont-ils identifiés ? Interagissent-ils tous entre eux ? Sont-ils exploités
au mieux par le réseau pour faire circuler l’information ?
L’importance de la collectivité de la lutte ne peut être négligée. Un axe de travail central serait d’entrainer l’adhésion
de tous les agriculteurs à une action commune de manière à ce que les efforts puissent être payants. En effet, l’investissement pour lutter contre le campagnol étant important, il est fondamental qu’il aboutisse à un résultat sous peine
de découragement de l’ensemble des acteurs. Peut-être alors le passage par une obligation de lutte collective serait
nécessaire. En effet, une étude sociologique a montré que dans le cadre d’une évolution de pratiques, on peut considérer une technique comme modèle seulement quand deux-tiers de la population concernée l’a adoptée. Au sein de
la population des agriculteurs, il y a un tiers des personnes qui vont spontanément s’intéresser voire utiliser la nouvelle
technologie. Parmi le deuxième tiers, les exploitants se positionnent d’abord en tant qu’observateurs et n’adoptent
les nouvelles pratiques que lorsque la moitié de la population a adhéré. Le tiers restant résistera autant que possible
et seule une obligation réglementaire pourra le contraindre à l’utilisation de ces nouvelles technologies. En appliquant
les résultats de cette étude à notre analyse, il nous semble que l’adoption des méthodes de lutte préventive contre le
campagnol passe par une démonstration de leur efficacité afin d’entrainer l’adhésion du premier tiers de la population
agricole. Il serait ensuite intéressant de mettre en place une large communication sur l’efficacité des solutions proposées et d’y associer des mesures incitatives pour entrainer une partie du deuxième tiers de la population agricole à
adopter ces méthodes. En effet, une fois la proportion de 50 % de la population dépassée, la fin du deuxième tiers
devrait suivre spontanément. Concernant le dernier tiers, il semble toutefois que seule une obligation réglementaire
puisse les amener à l’adopter.
De plus, nous avons constaté un manque de communication, notamment sur le terrain entre les pouvoirs publics et les
acteurs en charge de l’application des moyens de lutte. Il conviendrait de commencer par inclure dans les programmes
de formation agricole initiale la présentation de la problématique campagnol et des solutions de lutte préconisées. Il
serait également intéressant de divulguer la formation existante à tous les acteurs techniques de terrain intervenant
dans les exploitations afin d’harmoniser leur discours. Une meilleure utilisation des réseaux existants pourrait de plus
permettre une diffusion intensifiée de l’information vers les agriculteurs. Un accompagnement des agriculteurs sur le
terrain serait également une piste permettant d’aider à l’adaptation des solutions possibles à chaque cas particulier.
Une dernière piste qui pourrait témoigner de la prise en compte des demandes des agriculteurs serait de soutenir un
projet de recherche autour d’une solution rapidement efficace, moins contraignante et sans effets négatifs sur l’environnement.
Pour conclure, nous retiendrons qu’il apparait essentiel que tous les acteurs s’investissent dans la lutte contre le cam-
211
pagnol afin de sortir de la période de crise que l’Auvergne connaît actuellement.
Les basses cours urbaines : il faut trouver une règle pour le jeu
de la poule !
Yacine BACHA, Hélène BRIEN, Eric DURAND, Anne-Charlotte DUROUX, Anaïs FLEMING, Candice VENTE
Cette étude a été commanditée par la métropole de Lyon (Bernard LENSEL) et par l’équipe ACSPAVE de l’ENSV. Elle
a pour objet l’analyse de la pertinence de la mise en place d’une politique publique d’introduction de poules en milieu
urbain. Notre enquête a été réalisée sur le territoire de la métropole de Lyon.
Ce travail s’inscrit dans le cadre du master 2 PAGERS «Politiques de l’alimentation et gestion des risques sanitaires»
de l’Institut d’Études Politiques de Lyon et de l’École Nationale des Services Vétérinaires.
Au-delà de la tendance actuelle de la réintroduction de l’agriculture en ville, l’introduction de poules en milieu urbain est
un phénomène qui est en voie d’expansion.
« Elever des poules en ville, c’est de plus en plus cool !». Telle est l’annonce du Nouvel Obs, en date du 3 mars 2013.
Dans la mouvance actuelle de la réintroduction de l’agriculture en ville, des toits sont végétalisés, des jardins sont partagés, et les poules prennent place dans les cours ou les jardins des citadins.
« En France, l’idée rencontre une unanimité presque angoissante. Poule = cool. ». Même si beaucoup de citadins sont
séduits par l’adoption de poules en dehors de toute incitation d’une collectivité locale, de nombreux projets d’introduction de gallinacés en milieu urbain ont été portés par des communes ou communautés de communes au cours des
dernières années.
Notre étude a mis en exergue plusieurs aspects.
Tout d’abord cette problématique soulève des enjeux de santé. Même en milieu urbain, il est important de se préoccuper de la santé et du bien-être de ces animaux, principalement en termes de nutrition, d’habitat. La poule a des
besoins spécifiques, notamment lorsqu’elle est en période de ponte. Il est donc important de compléter les déchets
ménagers donnés par les propriétaires par des graines achetées en magasins spécialisés. Pour les particuliers, l’habitat
de leurs poules est important pour leur bien-être. Concernant l’habitat, qu’il soit réalisé par le propriétaire lui-même ou
achetés dans un magasin spécialisé, il doit être adapté. Les poules en ville peuvent tomber malade comme les poules
élevées à la compagne ou dans les élevages. Ces maladies sont nombreuses, parfois curables, parfois mortelles, voire
transmissibles à l’homme. Les détenteurs de poules en milieu urbain ainsi que les professionnels chargés de les soigner ou de les commercialiser sont unanimes pour dire que ces animaux doivent être placés dans un environnement
qui leur permette d’exprimer leur comportement physiologique normal sans contraintes ni frayeur. Reste la question de
l’abattage des animaux en fin de vie, qui pour la plupart des personnes interrogées pose un problème de conscience.
De plus, la poule peut être un vecteur de maladies transmissibles à l’homme. Les collectivités territoriales souhaitant
encourager l’introduction de poules, et de manière plus large de l’agriculture, dans le milieu urbain devront donc réaliser
une « évaluation des risques et une hiérarchisation des dangers sanitaires ».
La poule peut être vue comme un atout pour l’environnement par les collectivités locales et les habitants des villes : son
rôle de composteur permet en effet de réduire la production des déchets de table des ménages. Il y a quand même
un revers à la médaille, cet animal peut avoir des conséquences néfastes pour l’environnement : production de fientes,
nuisances de voisinage, attrait des rongeurs, rejets de médicaments dans l’environnement, gestion des cadavres... Il
faut bien penser à tous ces aspects avant d’adopter une poule !
Mais la poule est aussi un objet d’échanges, qu’ils soient sociaux ou économiques. En effet, la présence de poules en
milieu urbain, chez des particuliers est génératrice de lien sociaux et d’une nouvelle approche de cet animal. Bien que
la poule soit historiquement considérée comme un animal de production, son statut est différent pour les particuliers,
qui envisagent ce gallinacé comme un véritable animal de compagnie. La présence de ces animaux est génératrice de
contacts sociaux, au sein du voisinage, et de pédagogie, notamment auprès des enfants. Cette tendance de la réintroduction de poules en milieu urbain est le signe d’une volonté des citadins d’un retour vers la nature, vers un respect
de la nature, et d’une démarche favorisant les circuits courts, et le recyclage des déchets.
Un autre aspect à ne pas oublier est l’intérêt économique pour les particuliers de produire eux-mêmes les œufs qu’ils
consomment, ainsi que la chair des animaux qu’ils élèvent. Le secteur économique des poulaillers urbains est en
croissance. Les productions d’œufs et, de façon marginale, celle des viandes de volaille qui en sont issus est très majoritairement destinée à l’autoconsommation mais peut également faire l’objet de troc dans un périmètre restreint, de
voisinage. La présence de poules en ville permet aux collectivités locales de réduire le coût de traitements de leurs dé-
212
chets mais les projets d’introduction peuvent également générer des coûts à considérer à travers une évaluation coûts/
bénéfices. Ce phénomène s’accompagne du développement de marchés de niches autour de produits et de services
que se partagent entrepreneurs et structures associatives. Ce phénomène apparaît également comme une alternative
marginale mais cruciale aux circuits traditionnels de production et de distributions d’œufs et viandes de volaille.
Finalement, cette étude a permis d’élaborer une cartographie des acteurs de la région lyonnaise qui pourraient être
impliqués dans l’encadrement du phénomène des basses-cours urbaines, soit de leur propre initiative, soit parce que
le sujet entre dans leur champ de compétence. Un groupe de travail a récemment été mis en place sur le sujet de
l’agriculture en ville au sein de la métropole de Lyon. Nos basses-cours pourraient ainsi se rattacher à ce sujet et à ce
groupe de travail. Il est important d’envisager ce travail dans le contexte particulier de la création encore toute récente
de la métropole lyonnaise, datant du 1er janvier 2015. La métropole est en construction, le rôle de chaque acteur n’est
pas encore bien défini. La mise en place, par la métropole, d’une politique publique cherchant à introduire ou encadrer
la présence de poules sur son territoire pourrait donc être fortement influencée, voire modifiée, par les évolutions de
cette collectivité territoriale toute récente.
Compte tenu de l’ensemble des risques sanitaires et nuisances générés par la présence de poules ou par la consommation d’œufs, n’est-il pas alors d’avantage dans son intérêt d’encadrer un phénomène déjà existant, plutôt que d’agir
pour son expansion ? Finalement, la métropole de Lyon peut aussi de cette façon anticiper des problèmes sanitaires
futurs. Par la connaissance du phénomène déjà existant, et par un encadrement efficace, maîtriser une épidémie de
type grippe aviaire semble plus aisée. La collectivité territoriale souhaitant favoriser l’introduction de poules dans le
milieu urbain se doit de se poser la question du rapport coûts/bénéfices : n’a-t-elle pas plus à y perde qu’à y gagner ?
A défaut de proposer des poules aux particuliers, la mise en place de poulaillers collectifs, gérés par la collectivité
territoriale, et fonctionnant en collaboration avec les riverains permettraient de conserver de nombreux aspects positifs
de la présence de poules en milieu urbain, tout en réduisant les conséquences négatives, de type nuisance et risques
sanitaires. La concrétisation de ce genre d’installation induit une collaboration entre la collectivité territoriale, qui mettrait
en place, cofinancerait et contrôlerait, et les citoyens qui bénéficieraient de cette installation. Ils pourraient également
collaborer en apportant leurs déchets ménagers, et pourquoi pas une association qui pourrait mettre en place des ateliers pédagogiques, dans l’optique d’éduquer les jeunes publics au développement durable, à la gestion des déchets
et à la cause animale.
Il faut retenir l’enthousiasme des associations rencontrées lors de cette étude, et l’intérêt que portent les particuliers
pour les gallinacés. Ainsi, la métropole de Lyon pourrait créer une réelle opportunité de mise en place d’une politique
publique et d’impulser une action. Les modalités restant quant à elles à définir, notamment concernant les possibilités
de financement, de délégation auprès d’associations de citoyens pour la gestion de poulaillers, sur le degré d’implication des citoyens dans ce projet. Il pourrait être dans l’intérêt de la métropole de Lyon d’encadrer ce phénomène
déjà existant sur son territoire, d’informer les citoyens sur les risques encourus lors de la détention de poules et de
communiquer de façon plus large auprès du grand public.
L’élevage d’animaux en ville pourrait donc suivre la même voie que les végétaux, pour lesquels les initiatives collectives
sont déjà nombreuses : jardins collectifs et partagés. L’agriculture urbaine gagnera à se diversifier et à s’étendre du
végétal vers l’animal.
213
Publications et communications
Cette nouvelle rubrique est destinée à informer les lecteurs sur l’activité scientifique des élèves et doctorants FCPR de
l’ENSV, ainsi que des membres de l’équipe de recherche ACSPAVE (identifiés en gras en cas de pluralité d’auteurs).
Publications
BRONNER A., MORIGNAT E., TOURATIER B., GACHE B., SALA C., CALAVAS D., « Was the French clinical surveillance system of bovine brucellosis influenced by the occurrence and surveillance of other abortive diseases? », Preventive Veterinary Medicine, 2015 Mar 1;118(4):498-503. doi: 10.1016/j.prevetmed.2015.01.003. Epub 2015 Jan 14 ;
BRONNER A., MORIGNAT E., MADOUASSE E., CALAVAS D., « Surveiller les avortements chez les bovins à partir
des données démographiques et de reproduction : un complément à la déclaration obligatoire ? », Bulletin épidémiologique, santé animale et alimentation n°65 , pp.6-11 ;
BRONNER A., GAY E., FORTANE N., PALUSSIERE M., HENDRIKX P., HENAUX V., CALAVAS D., « Quantitative and
qualitative assessment of the bovine abortion surveillance system in France », Preventive Veterinary Medicine, 2015
Jun 1;120(1):62-9 ;
BRONNER A., MORIGNAT E., HENAUX V., MADOUASSE E., GAY E., CALAVAS D., « Devising an indicator to detect
mid-term abortions in dairy cattle: a first step towards syndromic surveillance of abortive diseases. », PLoS One. 2015
Mar 6;10(3) ;
BRONNER A., PERRIN J.-B., DUPUY C., SALA C., GAY E., DUCROT Ch., CALAVAS D., « La surveillance syndromique peut-elle renforcer la détection précoce des maladies exotiques ou émergentes ? », Bulletin Epidémiologique
Santé animale - Alimentation (66), 55-59.
Communications orales
DANGY L., FORTANE N., « Les rapports entre droit et science dans les processus de normalisation : le cas de la régulation du médicament vétérinaire », in « Regards croisés sur les objets et les pratiques scientifiques et techniques »,
ENS Cachan, 4 décembre 2014
DANGY L., « Analyser et faire l’action publique - Quand le fonctionnaire se glisse dans la peau du chercheur, une schizophrénie salutaire ? » in « Chercheur.es et acteur.es de la participation Liaisons dangereuses et relations fructueuses
», Maison des Sciences de l’Homme, Paris, 29 janvier 2015 »
DANGY L, « De la norme aux principes (et retour) : la bataille transnationale sur le « bœuf aux hormones » », in « Recherche et Régulation», Paris, 10-12 juin 2015
DANGY L., « L’affaire du «bœuf aux hormones» dans les organisations internationales : qu’implique un état de crise
permanente sur la régulation du commerce mondial ? », in Colloque AFSP Aix-en-Provence, 22-24 juin 2015, Section
GRAM
DANGY L, « Passer de l’autre côté du rideau » : l’ethnographie multi-située du gouvernement pour mettre à jour les
processus de l’action publique internationale », in colloque AFSP Aix-en-Provence, 22-24 juin 2015, Section Thématique « Ethnographier les institutions »
DARRIBEHAUDE F. et GARDON S., «Gouverner à distance le sanitaire, Recompositions territoriales et logiques professionnelles », 52ème colloque de l’ASRDLF, Montpellier, 7-9 juillet 2015.
DARRIBEHAUDE F. et GARDON S., « Gouverner à distance les risques sanitaires, l’échelon régional au cœur des
recompositions de l’Etat et de la mobilisation des acteurs professionnels », Colloque Construire les proximités dans un
monde global : enjeux territoriaux, organisationnels et sociétaux, Tours, 20-22 mai 2015
214
Appel à projets
Dans le cadre de leurs différents parcours de formation, les étudiants et élèves fonctionnaires sont amenés, à la demande et pour le compte d’organismes publics, parapublics ou privés intervenant dans les domaines de l’alimentation
et de la gestion des risques sanitaires, à conduire des missions en situation professionnelle et à réaliser des études.
Pour les professionnels, c’est l’opportunité de faire réaliser un diagnostic, une étude, une réflexion prospective, par des
étudiants au regard neuf, mais également d’identifier de futurs stagiaires ou collaborateurs.
Pour l’ENSV, il s’agit de confronter les étudiants aux réalités et contraintes du monde professionnel tout en maintenant
un encadrement sur le plan scientifique et méthodologique par une équipe d’enseignants-chercheurs.
Pour les étudiants et élèves fonctionnaires, enfin, il s’agit de développer des compétences transversales en gestion de
projet et de favoriser l’acquisition des comportements professionnels.
Dans ce cadre, différents types d’études et missions peuvent être réalisés :
Groupes d’étude des politiques publiques (GEPP)
Les GEPP s’inscrivent dans le cadre de mise en situation professionnelle du master PAGERS cohabilité avec Sciences
Po Lyon, et inclus dans la formation statutaire des ISPV.
Les études portent sur une question interpellant l’action publique dans les domaines de l’alimentation ou la gestion
des risques sanitaires.
Elles conduisent les étudiants à analyser la question, à rencontrer les différents acteurs concernés et élaborer des
propositions de réponse opérationnelle.
Modalités de réalisation :
Les études sont réalisées par des groupes de 5 à 7 étudiants d’origine différentes (ISPV, étudiants de Sciences Po
Lyon).
Elles sont encadrées par un enseignant-chercheur de Sciences Po Lyon.
Elles font l’objet d’un rapport écrit remis au commanditaire et d’un séminaire de restitution fin mars organisé par les
étudiants.
Période de réalisation :
Janvier à mars
Modalités de financement :
Le commanditaire alloue au travers d’une convention avec l’ENSV un budget forfaitaire destiné à couvrir notamment
les frais de déplacement et d’organisation du séminaire.
Modalités de commande
Les demandes d’études sont transmises à l’ENSV sous forme de termes de références et comportent :
- Le contexte et les objectifs de l’étude ;
- La méthode pressentie ;
- Les résultats attendus ;
- Le représentant du commanditaire chargé du suivi de l’étude.
Le cahier des charges et le budget sont ensuite précisés avec le commanditaire et intégrés dans la convention Commanditaire-ENSV.
Les demandes pour une réalisation et une restitution au premier trimestre de l’année suivante sont à communiquer
avant fin juillet de l’année en cours à l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires (Sylvie MIALET, responsable de la formation statutaire et diplômante ; [email protected]; tel : 04 78 87 25 47)
Groupes d’études scientifiques et techniques (GEST)
Le parcours de formation statutaire des Inspecteurs Elèves de la Santé Publique Vétérinaire (IESPV) comprend notamment en début de 2ème année (septembre à novembre) un travail pédagogique collectif intitulé Groupes d’Études
Scientifiques et Techniques (GEST).
Ces études portent sur des problématiques techniques en lien avec la santé publique vétérinaire, la santé animale,
l’alimentation, la protection des végétaux ou encore l’environnement peuvent être confiées aux étudiants. Elles doivent
permettre d’analyser une question et d’élaborer à ce sujet des propositions de réponses opérationnelles.
Modalités de réalisation :
Les études sont réalisées par des groupes d’élèves ISPV en résidence à l’ENSV.
Les étudiants sont placés en situation de groupe projet. Ils doivent conduire l’étude en suivant le cahier des charges
établi par le commanditaire et en respectant l’enveloppe financière allouée par celui-ci.
Elles font l’objet d’un rapport écrit remis au commanditaire et le cas échéant, à la demande du commanditaire, d’une
restitution orale.
215
Période de réalisation :
Septembre à novembre
Modalités de financement :
Le commanditaire alloue au travers d’une convention avec l’ENSV un budget forfaitaire destiné à couvrir notamment
les éventuels frais de déplacement.
Modalités de commande :
Les demandes d’études sont transmises à l’ENSV sous forme de termes de références et comportent :
- Le contexte et les objectifs de l’étude ;
- La méthode pressentie ;
- Les résultats attendus.
Le cahier des charges et le budget sont ensuite précisés avec le commanditaire et intégrés dans une convention
conclue entre le commanditaire et l’ENSV.
Les demandes sont à communiquer à l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires avant fin juin de l’année en cours pour
une réalisation en septembre de la même année (Sylvie MIALET, responsable de la formation statutaire et diplômante ;
[email protected]; tel : 04 78 87 25 47)
Stage de fin d’études du CEAV-SPV
Le stage en situation (DDCSPP, Anses, DRAAF, entreprises, administrations centrales…) permet à l’étudiant de mobiliser les connaissances et savoir-faire acquis lors de la formation du certificat d’études approfondies vétérinaires en
santé publique vétérinaire (CEAV-SPV).
Le stagiaire est mis en situation de chargé de mission, responsable de la réalisation d’une étude, conception ou
conduite de projet sur une question d’intérêt pour la structure d’accueil.
Le sujet peut être envisagé, selon les besoins de la structure d’accueil, sous un angle scientifique, technique, administratif, juridique, économique, organisationnel.
Modalités de réalisation :
L’étude est réalisée par l’étudiant au sein de la structure d’accueil.
Elle fait l’objet d’un rapport écrit remis à la structure d’accueil conformément aux termes de référence et d’un mémoire
de stage.
Un maitre de stage au sein de la structure d’accueil veille au bon déroulement de l’étude.
Période et durée de réalisation :
15 semaines, de mars à juin
Modalités de financement :
La structure d’accueil soit alloue au travers d’une convention avec l’ENSV un budget forfaitaire destiné à couvrir notamment les indemnités du stagiaire soit prend directement en charge l’indemnisation du stagiaire dans le cadre d’une
convention tripartite.
Modalités de commande :
Les demandes d’études sont transmises à l’ENSV sous forme de termes de références et comportent :
- Le contexte et les objectifs de l’étude ;
- La méthode pressentie ;
- Les résultats attendus ;
- Le nom du maître de stage pressenti.
Le cahier des charges et les modalités d’indemnisation sont ensuite précisés avec le commanditaire et intégrés dans
la convention Commanditaire-ENSV.
Les demandes sont à communiquer à l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires avant fin octobre pour un stage débutant en mars de l’année suivante (Sylvie MIALET, responsable de la formation statutaire et diplômante ; sylvie.mialet@
ensv.vetagro-sup.fr; tel : 04 78 87 25 47).
Stage de fin d’études du master PAGERS
Le stage s’inscrit à la fin du cursus de formation statutaire des ISPV et du master parcours de Master 2 « Politiques
de l’alimentation et gestion des risques sanitaires » (PAGERS). L’objectif du stage est d’impliquer le stagiaire dans la
structure d’accueil dans la mise en place, le suivi ou l’évaluation d’une mission qui lui permette d’en proposer une
analyse problématisée en mobilisant des outils de sciences sociales et en particulier d’analyse des politiques publiques.
Modalités de réalisation :
L’étude est réalisée par l’étudiant au sein de la structure d’accueil. Elle fait l’objet d’un rapport écrit remis à la structure
d’accueil dont le contenu est fonction des demandes de cette dernière et d’un mémoire qui, à partir du « terrain » du
stage porte sur une question problématisée d’analyse d’une politique publique.
Un maître de stage au sein de la structure d’accueil assure le pilotage direct du stagiaire et évalue le travail rendu. Un
enseignant de l’institut d’Etudes politiques de Lyon supervise la rédaction du mémoire.
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Période et durée de réalisation :
15 semaines, de mi-avril avril à fin juillet
Modalités de financement :
La structure d’accueil alloue au travers d’une convention avec l’ENSV un budget forfaitaire destiné à couvrir notamment les indemnités du stagiaire soit prend directement en charge l’indemnisation du stagiaire dans le cadre d’une
convention tripartite.
Modalités de commande :
Les demandes d’études sont transmises à l’ENSV sous forme de termes de références et comportent :
- Le contexte et les objectifs de l’étude ;
- La méthode pressentie ;
- Les résultats attendus ;
- Le nom du maître de stage pressenti.
Le cahier des charges et les modalités d’indemnisation sont ensuite précisés avec le commanditaire et intégrés dans
une convention tripartite entre la structure d’accueil, l’ENSV et l’étudiant.
Les demandes sont à communiquer à l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires avant fin octobre pour un stage débutant en avril de l’année suivante (Sylvie MIALET, responsable de la formation statutaire et diplômante ; sylvie.mialet@
ensv.vetagro-sup.fr; tel : 04 78 87 25 47).
Thèses d’exercice vétérinaire ou mémoires de fin d’étude d’ingénieur agronome
Les différents thèmes de recherche présentés précédemment peuvent également être l’objet d’une thèse d’exercice
vétérinaire ou d’un mémoire de fin d’études agronomiques.
Modalités de réalisation :
La thèse d’exercice ou le mémoire de fin d’études est susceptible d’être réalisé par un élève ISPV de 1ère année, par un
élève vétérinaire du campus vétérinaire de Lyon ou d’une autre école vétérinaire, ou par un élève ingénieur du campus
agronomique de Lyon ou d’une autre école d’agronomie, en formation à l’ENSV.
L’étude est encadrée par un directeur de thèse ou de mémoire, fait l’objet d’un rendu écrit et d’une soutenance orale
publique. Elle peut se combiner avec la réalisation d’un stage au sein de la structure commanditaire (cf. ci-dessus).
Période et durée de réalisation :
Septembre-octobre de l’année en cours (détermination du sujet et de l’encadrement scientifique) jusqu’en septembre
à décembre de l’année suivante (soutenance).
Les demandes sont à communiquer à l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires avant fin octobre pour un stage débutant en avril de l’année suivante (Sylvie MIALET, responsable de la formation statutaire et diplômante ; sylvie.mialet@
ensv.vetagro-sup.fr; tel : 04 78 87 25 47).
Autres études ou expertises
Le rôle de l’ENSV est non seulement de délivrer des formations, mais aussi de jouer un rôle actif dans la production, le
transfert et la conservation des connaissances relatives aux métiers exercés.
Cette activité prend notamment la forme de pilotage d’études pour le compte d’un commanditaire, d’association à des
études et à des recherches, conduites par des organismes scientifiques, donnant lieu à des publications, de transferts
via des expertises, la participation à des groupes de travail techniques et des interventions pédagogiques, enfin de
réalisation et d’édition de travaux utiles pour les praticiens de la santé publique vétérinaire.
Elle prend également la forme de travaux de recherche de type universitaire (études, expertises, publications) réalisés
par l’équipe de recherche ACSPAVE, sous sa direction, ou en collaboration avec elle.
Notre établissement est à l’écoute de tout organisme public ou privé participant à - ou intéressé par - l’action collective
en santé publique agronomique et vétérinaire qui identifierait un besoin d’étude ou d’expertise dans ce cadre.
Les demandes sont à communiquer à François DARRIBEHAUDE, directeur adjoint de l’ENSV, coordonnateur de
l’équipe de recherche ACSPAVE ([email protected], tel : 04 78 87 25 57) et/ou à Michel MAS,
responsable des activités d’appui à l’administration ([email protected], tel : 04 78 87 25 39)
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Lexique
ACSPAVE : équipe de recherche « Action Collective en Santé Publique. Animal, Végétal et Environnement. Droit et
Science Politique »
ANSES : Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail
BEA : Bien-être animal
CEAV-SPV : Certificat d’études approfondies vétérinaires en santé publique vétérinaire
CIV : Centre d’information des viandes
CROV : Conseil régional de l’ordre des vétérinaires
CSOV : Conseil supérieur de l’ordre des vétérinaires
DDPP : Direction départementale de la protection des populations
DDT : Direction départementale des territoires
DGAL : Direction générale de l’alimentation
DRAAF : Direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt
EFSA: European Food Safety Authority
EHESP : Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique
ENSV : Ecole Nationale des Services Vétérinaires
ESB : Encéphalopathie Spongiforme Bovine
FAO : Food and Agriculture Organization of the United Nations (Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et
l’Agriculture)
FCPR : Formation complémentaire par la recherche
FNGDS : Fédération nationale des groupements de défense sanitaire
GEPP : Groupe d’étude des politiques publiques
GEST : Groupe d’étude scientifique et technique
HDR : Habilitation à diriger les recherches
IESPV : Inspecteur élève de la Santé Publique Vétérinaire
IGSPV : Inspecteur Général de la Santé Publique Vétérinaire
INRA : Institut National de Recherche Agronomique
IRSTEA : Institut National de Recherche en Sciences et Technologies pour l’Environnement et l’Agriculture
ISPV : Inspecteur de la santé publique vétérinaire
ISSPV : Inspecteur stagiaire de la santé publique vétérinaire
MAAF : Ministère de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt
METAFORT : Unité mixte de recherche 1273 « Mutations des activités, des espaces et des formes d’organisation dans
les territoires ruraux » AgroParisTech–Inra –Irstea -VetAgroSup
OABA : Œuvre d’assistance aux bêtes d’abattoirs
OGM : Organismes Génétiquement Modifiés
OIE : Organisation mondiale de la santé animale
OMC : Organisation mondiale du commerce
OMS : Organisation mondiale de la santé
ONEMA : Office National de l’Eau et des Milieux Aquatiques
PAGERS : Parcours « Politiques de l’Alimentation et Gestion des Risques Sanitaires » du master PPGC (Politiques
publiques et gouvernements comparés)
Sciences Po Lyon : Institut d’Etudes Politiques de Lyon
SNGTV : Société nationale des groupements techniques vétérinaires
SNISPV : Syndicat national des inspecteurs en santé publique vétérinaire
SRAL : Service régional de l’alimentation
Terre d’Initiatives Solidaires : Fondation d’Entreprise de Lyonnaise des Eaux Rhône-Alpes-Auvergne et de la Société
Stéphanoise des Eaux
Triangle : Laboratoire Triangle. Action, discours, pensée politique et économique (UMR 5206)
VetAgro Sup : Institut d’enseignement supérieur et de recherche en alimentation, santé animale, sciences agronomiques et de l’environnement
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Fiche de proposition d’étude
Organisme commanditaire :
Responsable de l’organisme :
Responsable du dossier :
Adresse :
Mail :
Téléphone :
Est intéressé par la réalisation d’une étude :
Le contexte et les objectifs de l’étude :
La méthode pressentie :
Les résultats attendus :
Le correspondant du commanditaire ou le nom du maître de stage pressenti :
Contraintes éventuelles :
L’étude est proposée dans le cadre (plusieurs réponses possibles) :
Des GEPP
Des GEST
Du stage CEAV-SPV : Master MAE/MAC-SPV
Du stage master 2 PAGERS
D’une thèse vétérinaire
D’un mémoire de fin d’étude d’ingénieur agronome
Autre (projet de recherche, etc)
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L’École Nationale des Services Vétérinaires
Créée en 1973 par l’Etat pour assurer la formation des vétérinaires fonctionnaires
du ministère chargé de l’agriculture (inspecteurs de la santé publique vétérinaire
- ISPV), l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires (ENSV) est le fruit, tant
structurellement qu’en termes de missions, de quarante ans d’évolution.
Plus largement, en sa qualité d’école interne de VetAgro Sup, elle assure une
mission de formation professionnelle et de recherche, pour la conception,
l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation de l’action collective en santé
publique vétérinaire et en matière d’alimentation (politiques publiques et action
privée), pour l’ensemble de leurs acteurs, publics et privés.
Elle contribue ainsi à une meilleure gouvernance sanitaire mondiale, ce qui lui
vaut depuis 2004 le statut de centre collaborateur de l’OIE pour la formation des
vétérinaires officiels.
Elle reste aujourd’hui une structure singulière aux interfaces de l’enseignement
supérieur et de l’école d’application, de l’expertise en santé publique vétérinaire
et des activités de gouvernance sanitaire vétérinaire associant secteur privé
et secteur public, qui met ses compétences au service de trois missions
fondamentales :
- La formation des acteurs de la santé publique vétérinaire, publics mais aussi
privés, français ou étrangers, en début et tout au long de leur carrière.
- Le renforcement des compétences des services vétérinaires étrangers,
indispensable à une bonne gouvernance sanitaire mondiale.
- Le développement des connaissances en santé publique agronomique et
vétérinaire
Les cahiers de l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires ont pour ambition de
faire connaître les activités de l’Ecole, notamment en présentant toute l’étendue
des travaux de ses élèves.
Pour en savoir plus :
www.ensv.fr
[email protected]
École Nationale des Services Vétérinaires
VetAgro Sup
1, avenue Bourgelat
69280 Marcy l’Etoile
Tel +33 (0)4 78 87 25 45
Fax +33 (0)4 78 87 25 48
Directeur de publication : François DARRIBEHAUDE
Conception graphique : Mélodie Burkhardt
Imprimé à Lyon par SEVEN
Toute reproduction ou transmission, même partielle, sous quelque forme que ce soit est interdite
sans autorisation écrite du détenteur des droits.
ISSN : ISSN 2271-4723
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