Lettres de Madame de Sévigné
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Lettres de Madame de Sévigné
, Lettres de Madame de Sévigné. Le succès durable des Lettres de Mme de Sévigné tient d’une part à leur valeur de témoignage vivant du Grand Siècle, d’autre part au style de l’auteure. Son écriture, bien que savante et élaborée, respire la liberté et la spontanéité ; chaque évènement, important ou futile, triste ou amusant, peut devenir source de réflexion. Dans ses lettres vivantes et alertes, elle relate des anecdotes, des commérages, des faits historiques ou mondains, et le ton varie, tour à tour grave ou léger, ému ou joyeux. De son temps, c’est la femme d’esprit, la femme du monde brillante et non l’épistolière dont ses contemporains font l’éloge. Son style « négligé » a empêché qu’elle fût considérée comme un écrivain de son siècle. Sa correspondance est restée inséparable des circonstances de sa production : son horizon limité à ses relations avec Mme de Grignan ne lui permettait pas d’accéder à l’idée de texte littéraire. Le temps a permis à son œuvre de s’élever au-dessus de ces contingences familiales. Bussy-Rabutin(1618-1693). « Il n’y a point de femme qui ait plus d’esprit qu’elle, et fort peu qui en aient autant ; sa manière est divertissante ; il y en a qui disent que, pour une femme de qualité, son caractère est un peu trop badin. […] Elle aime généralement tous les hommes ; quelque âge, quelque naissance et quelque mérite qu’ils aient et de quelque profession qu’ils soient, tout lui est bon. » Mlle de Scudéry (1607-1701). « Jamais nulle autre personne n’a su mieux l’art d’avoir de la grâce sans affectation, de l’enjouement sans la folie, de la propreté (= ordre, netteté) sans contrainte, de la gloire sans orgueil et de la vertu sans sévérité. » Les Lettres deviennent au XVIIIe siècle un modèle de civilité accomplie : Saint-Simon (1675-1755). « Cette femme, par son aisance, ses grâces naturelles, la douceur de son esprit, en donnait par sa conversation à qui n’en avait pas et savait extrêmement de toutes sortes de choses, sans vouloir jamais paraître savoir rien. » Cependant, avec le jugement hâtif de Voltaire, une image se fixe et restera longtemps l’opinion commune. Voltaire (1694-1778). « Mme de Sévigné, la première personne de son siècle pour le style épistolaire, et surtout pour conter des bagatelles avec grâce ; ses lettres, remplies d’anecdotes, écrites avec liberté et d’un style qui peint et anime tout, sont la meilleure critique des lettres étudiées où l’on cherche l’esprit ». Enfin, les grands auteurs du XXe siècle savent découvrir dans les Lettres une annonce de la sensibilité littéraire moderne, orientée vers le romanesque. Proust (1871-1922). Pour lui, les missives cherchent moins à reproduire le monde qu’à le recréer par le biais des sensations et des émotions. « Tout en la lisant, je sentais grandir mon admiration pour Mme de Sévigné. Il ne faut pas se laisser tromper par des particularités purement formelles qui tiennent à la vie de l’époque, à la vie de salon et qui font que certaines personnes ont fait leur Sévigné quand elles ont dit « Mandez-moi, ma bonne », « Ce comte me parut avoir bien de l’esprit », ou « Faner est la plus jolie chose du monde !» Je me rendis compte qu’elle nous présente les choses dans l’ordre de nos perceptions, au lieu de les présenter par leur cause… ». La correspondance. L’art épistolaire. En un temps où les nouvelles circulaient plus lentement et difficilement qu'aujourd'hui – les journaux étaient encore rares : La Gazette de France paraissait toutes les semaines, Le Mercure galant tous les mois - c'était le rôle assigné aux correspondances entre personnes privées que d’informer de l’actualité de Paris, voire de la cour du Roi. On se tenait ainsi au courant des modes, comme on s’informait de la politique, du théâtre ou des dernières parutions littéraires. La lettre était lue et commentée dans un cercle d’amateurs ou de connaisseurs à l’affût de belles tournures et en quête de divertissement. C’était un moyen de briller en société. Les lettres formaient aussi un genre littéraire, qui se développa dans la première moitié du XVIIe siècle. Guez de Balzac (1594-1654) fut le premier à publier des Lettres (1623) ; elles lui valurent un succès immédiat et servirent d’exemples à beaucoup d’autres. Les lettres de Vincent Voiture (1597-1648), moins emphatiques et plus enjouées, firent les délices des cénacles à la mode. Publiées après sa mort, elles devinrent, elles aussi, des modèles admirés et imités. Chez ce représentant de la préciosité alors en vogue, la recherche formelle et le badinage primaient pour plaire à un public choisi et non à un destinataire particulier. Lettre galante de Vincent Voiture. Enfin, je suis arrivé en vie : et j’ai honte de vous le dire. Car il me semble qu’un honnête homme ne devrait pas vivre après avoir été dix jours sans vous voir. […]Il n’y a point d’accablement, de tristesse, ni de langueur pareille à celle où je me trouve. L’amour et la crainte, le regret et l’impatience m’agitent diversement à toutes heures et ce coeur que je vous avais donné entier est maintenant déchiré en mille pièces. […] De sorte qu’il arrive souvent que, lorsque mon cœur souffre des tourments extrêmes, mon âme goûte des félicités infinies, et au même temps que je pleure et que je m’afflige, que je me considère éloigné de votre présence et peut-être de votre pensée, je ne voudrais pas changer ma fortune avec ceux qui voient, qui sont aimés et qui jouissent. Je ne sais si vous pouvez concevoir ces contrariétés, vous, Madame, qui avez l’âme si tranquille. C’est tout ce que je puis faire que de les comprendre, moi qui les ressens : et je m’étonne souvent de me trouver si heureux et si malheureux ensemble. La virtuosité de l’expression l’emporte sur l’analyse du sentiment amoureux. Ces deux illustres précurseurs incitèrent nombre d’écrivains à préparer une publication de leur correspondance, soigneusement corrigée et retouchée pour se rapprocher d’un idéal formel préétabli. Bussy-Rabutin fut l’un d’entre eux Par sa sincérité et son authenticité, Mme de Sévigné ne suivait pas les codes de l’art épistolaire de l’époque. La publication des Lettres. Aucune des lettres de la marquise ne fut publiée de son vivant. Son cousin, Bussy-Rabutin, Mme de Grignan et d’autres correspondants les avaient gardées précieusement (même si, par la suite, une partie a été perdue). Le fils de Bussy-Rabutin, l’abbé Celse de Bussy, a pris l’initiative d’une première édition en 1725 (28 lettres ou extraits), intitulée « Lettres choisies de Mme la marquise de Sévigné à Mme la comtesse de Grignan sa fille, qui contiennent beaucoup de particularités sur l’Histoire de Louis XIV ». Puis Pauline de Simiane, fille de Mme de Grignan, a décidé de publier officiellement la correspondance de sa grand-mère. Elle a confié ce soin à un éditeur d’Aix-en-Provence, Denis-Marius Perrin. Celui-ci a publié 614 lettres en 1734 puis 772 en 1754. Malheureusement, les lettres ont été remaniées selon les instructions de Pauline de Simiane : toutes celles touchant de trop près à la famille ou dont les qualités littéraires étaient jugées insuffisantes ont été détruites. Janséniste, elle n’a pas hésité à supprimer les histoires galantes et les remarques trop libres de sa grand-mère (tout ce qui pouvait heurter la bienséance et le bon goût) afin d’offrir à la postérité une image parfaite de la marquise. Suite à des protestations de lecteurs qui estimaient que ces lettres portaient ombrage à la réputation de leur famille, elle a brûlé les lettres de sa propre mère, Mme de Grignan, ce qui nous prive aujourd’hui de l’intérêt de la réponse. Au XIXe siècle, les éditeurs, dont Monmerqué, ont tenté, en l’absence des autographes, de restituer les textes en comparant les différentes éditions du XVIIIe siècle. Par chance, un lot de copies manuscrites (établi par la petite-fille de la marquise) a été retrouvé chez un antiquaire en 1873 : il couvrait une grande partie des lettres adressées à Mme de Grignan. C’est cette copie qui permet aujourd’hui au lecteur de disposer d’une version aussi authentique que possible du « style » de Mme de Sévigné. L’édition complète est parue en 1953 dans la collection de la Pléiade. En 1970, Roger Duchêne (1930-2006) a substitué le terme de « correspondance » à celui de « lettres », faisant entendre la voix des correspondants, quand c’était possible. On recense aujourd’hui 1155 lettres de Mme de Sévigné, dont 764 à sa fille, 126 à son cousin Bussy-Rabutin et 220 adressées à d’autres correspondants : à son fils Charles, à ses amis Madame de Pomponne, le cardinal de Retz, La Rochefoucauld, le philosophe Corbinelli, Madame de La Fayette, Madame Scarron... Sans ambition littéraire, Mme de Sévigné est devenue auteur par la volonté de combler son manque affectif et de consoler sa douleur. Biographie Marie de Rabutin-Chantal naquit le 5 février 1626, place Royale (place des Vosges) à Paris. Elle était la petite-fille de la future sainte Jeanne de Chantal, qui fonda l'ordre de la Visitation avec François de Sales. Son père Celse-Bénigne de Rabutin fut tué au combat quand elle avait un an. Sa mère Marie de Coulanges mourut six ans plus tard. Orpheline à sept ans, elle fut élevée par sa famille maternelle dont elle reçut une excellente instruction, fondée essentiellement sur les belles lettres et l’étude des langues. Elle épousa en 1644 Henri de Sévigné, un jeune noble d’origine bretonne, fort beau mais aussi infidèle et belliqueux. Le jeune couple passe pour avoir mené une vie joyeuse, à en croire les témoignages de deux contemporains, Tallemant des Réaux et Bussy-Rabutin, cousin de la marquise. Mme de Sévigné fréquentait à Paris une société choisie, en particulier celle de l'hôtel de Rambouillet, où elle se lia d'amitié avec La Rochefoucauld, le cardinal de Retz ou encore Fouquet. Le marquis Henri de Sévigné mourut lors d'un duel en 1751, à l'âge de vingt-huit ans, pour les beaux yeux d'une maîtresse. La marquise se retrouva veuve à vingt-cinq ans avec 2 enfants à élever : Françoise Marguerite, (née en 1646) qu'elle considérait comme « la plus jolie fille de France » et qui fit de brillants débuts à la cour ; Charles, (né en 1648) dont elle subit les frasques de jeune homme avec une grande indulgence. Profitant de la liberté apportée par son veuvage, Madame de Sévigné passa moins de temps en Bretagne et s'installa à Paris. Turenne et les ministres Servien et Fouquet éprouvaient pour elle une amitié amoureuse. Madame de Lafayette qui sera son amie et sa rivale l'évoqua parmi les personnages de l'un de se recueils. Et Mlle de Scudéry s'inspira d'elle pour l'un des personnages de Clélie. Malgré les diverses occasions qu'elle eut de se remarier, elle décida de se consacrer à sa vie mondaine, et plus encore à l'éducation de ses enfants. Après leur avoir assuré une enfance choyée, garantir un bon mariage à sa fille et une honorable situation à son fils devint son but principal et l'incita à profiter de toutes les relations qu'elle pouvait avoir à la Cour. L'hôtel Carnavalet à Paris. « Dieu merci, nous avons l’hôtel de Carnavalet. C’est une affaire admirable : nous y tiendrons tous, et nous aurons le bel air. » (Lettre du 7 octobre 1677) Mme de Sévigné, née place des Vosges, y passa son enfance, et resta fidèle au quartier toute sa vie. Elle déménagea six fois avant de louer, en 1677, l'hôtel Carnavalet. Commencé en 1548 pour Jacques des Ligneris, président au parlement de Paris, l’hôtel fut achevé vers 1560. Il comprenait à l’origine un grand corps de logis entre cours et jardin et un bâtiment plus bas, séparant la cour de la rue, relié au corps de logis par deux ailes basses, formant galeries ouvertes en arcades sur la cour. Sur la façade on voit toujours les splendides reliefs – les quatre saisons – placés entre les croisées de l’étage noble, dus sans doute à Jean Goujon. En 1578, l’hôtel fut acquis par la veuve de François de Kernevenoy, gentilhomme breton dont le nom fut francisé en Carnavalet. La demeure fut remaniée dans les années 1650-1660 par François Mansart, et c’est cet état que connut Mme de Sévigné, locataire des lieux jusqu’à sa mort. L’hôtel fut acquis en 1866 par la ville de Paris pour y installer un musée de la capitale. Lettre du 12 octobre 1677. « Nous déménageons, ma mignonne, et parce que mes gens feront mieux que moi, je les laisse tous ici, et me dérobe à cet embarras, et au sabbat inhumain de Mme Bernard, qui m’éveille dès six heures avec ses menuisiers : ces adieux consolent de la séparation. »[…] Les lettres comme mémoire d’une époque. La part que la correspondance faisait aux évènements historiques, sociaux et culturels, s’explique par la qualité, propre à la marquise, de témoin privilégié de son temps. Les visites qu’elle rendait à la cour et les conversations qu’elle y entretenait l’informaient des intrigues du monde. Ainsi, l’annonce d’un mariage, d'un décès, d'une représentation théâtrale était, autant que les évènements importants, matière à conter et à plaire. Elle avait vocation à mêler les sujets graves à ceux plus légers, anecdotiques. L’épistolière relatait les faits au jour le jour, les sélectionnait en fonction de l’intérêt qu’elle y prenait et de son destinataire. Elle adaptait la forme et le contenu de ses narrations aux attentes et aux goûts de ce dernier. Quand la marquise tenait dans ses lettres la rubrique des gens du monde, elle empruntait leur ton à la conversation de salon : elle se faisait l’écho de bavardages souvent frivoles. L’intérêt résidait moins dans leur contenu que dans « l’art de bien dire des bagatelles ». C’est à son cousin Coulanges qu’elle adressa une lettre le 15 décembre 1670, lui rapportant la nouvelle du projet de mariage entre Lauzun, simple duc, et la Grande Mademoiselle. L’épistolière, par sa rhétorique, cherchait à susciter l’intérêt de son correspondant et non à blâmer l’union qu’elle annonçait. Anne-Marie-Louise d'Orléans (1623-1693), Mademoiselle, fille de Gaston d'Orléans, frère de Louis XIII, s'éprend en 1669, d'un gentilhomme, le comte de Lauzun et n'hésite pas à braver les préventions qu'une telle mésalliance soulève à la Cour. Le Roi, d'abord consentant, revient sur sa décision et le mariage est annulé. Le mariage de Lauzun. Lettre adressée à M. de Coulanges. Á Paris, le lundi 15 décembre 1670. Je m’en vais vous mander la chose la plus étonnante, la plus surprenante, la plus merveilleuse, la plus miraculeuse, la plus triomphante, la plus étourdissante, la plus inouïe, la plus singulière, la plus extraordinaire, la plus incroyable, la plus imprévue, la plus grande, la plus petite, la plus rare, la plus commune, la plus éclatante, la plus secrète, la plus brillante, la plus digne d’envie : enfin une chose que l’on ne peut pas croire à Paris (comment la pourrait-on croire à Lyon ?) ; une chose qui comble de joie Mme de Rochan et Mme de Hauterive ; une chose enfin qui se fera dimanche et qui ne sera peut-être pas faite lundi. Je ne puis me résoudre à la dire ; devinez-la ; je vous la donne en trois. Jetez-vous votre langue aux chiens ? Eh bien ! il faut donc vous la dire : M. de Lauzun épouse dimanche au Louvre, devinez qui ? Je vous le donne en quatre, je vous le donne en dix ; je vous le donne en cent. Mme de Coulanges dit : Voilà qui est bien difficile à deviner. C’est Mlle de Lavallières. - Point du tout, Madame. - C’est donc Mlle de Retz ? - Point du tout, vous êtes bien provinciale. - Vraiment nous sommes bien bêtes, dites-vous, c’est Mlle Colbert ? - Encore moins. - C’est assurément Mlle de Créquy ? - Vous n’y êtes pas. Il faut donc vous le dire : il épouse Mademoiselle, ma foi ! Mademoiselle, fille de feu Monsieur ; Mademoiselle, petite-fille de Henri IV ; mademoiselle d’Eu, mademoiselle de Dombes, mademoiselle de Montpensier, mademoiselle d’Orléans, destinée au trône ; Mademoiselle, cousine germaine du Roi ; Mademoiselle, le seul parti de France qui fut digne de Monsieur. Voilà un beau sujet de discourir. Si vous criez, si vous êtes hors de vous-mêmes, si vous dites que nous avons menti, que cela est faux, qu’on se moque de vous, que voilà une belle raillerie, que cela est bien fade à imaginer ; si enfin vous nous dites des injures, nous trouverons que vous avez raison ; nous en avons fait autant que vous. Adieu ; les lettres qui seront portées par cet ordinaire vous feront voir si nous disons vrai ou non. A côté des lettres galantes qui annoncent aux correspondants de la marquise des nouvelles ponctuelles sur un ton enjoué, les « relations » rapportent minutieusement et avec davantage de retenue les évènements mondains de premier ordre. François Vatel (1631-1671) D'abord cuisinier de Fouquet, il fut le génial organisateur de la fameuse fête de Vaux-leVicomte (17 août 1661) qui allait entraîner la chute du ministre. Il entra ensuite au service du Grand Condé (le prince de Condé, chef militaire) et reprit son rôle d'intendant dans l'organisation des fêtes de Chantilly. La grande réception offerte par le prince au Roi et à la Cour, se devait d'être mémorable. Vatel y mit tout son zèle, n'hésitant pas à veiller douze nuits pour tout préparer. Parvenu à un point d'extrême fatigue, il ne supporta pas l'annonce -fausse- que le poisson prévu pour les repas du vendredi viendrait à manquer. Désespéré, l’intendant se retira dans sa chambre et se transperça le corps d’une épée. Dans la lettre suivante adressée à sa fille, Mme de Sévigné revient sur les circonstances qui ont conduit Vatel à se donner la mort. La mort de Vatel. Lettre adressée à sa fille. Á Paris, ce dimanche 26 avril 1671. Il est dimanche 2 avril ; cette lettre ne partira que mercredi ; mais ceci n’est pas une lettre, c’est une relation que vient de me faire Moreuil, à votre intention de ce qui s’est passé à Chantilly touchant Vatel. Je vous écrivis vendredi qu’il s’est poignardé : voici l’affaire en détail. Le Roi arriva jeudi au soir ; la chasse, les lanternes, le clair de lune, la promenade, la collation dans un lieu tapissé de jonquilles, tout cela fut à souhait. On soupa : il y eut quelques tables où le rôti manqua, à cause de plusieurs dîners où on ne s’était point attendu. Cela saisit Vatel ; il dit plusieurs fois : « La tête me tourne, il y a douze nuits que je n’ai dormi ; aidez-moi à donner les ordres ». Gourville le soulagea en ce qu’il put. Ce rôti qui avait manqué, non pas à la table du Roi, mais aux vingt-cinquièmes, lui revenait toujours à la tête. Gourville le dit à Monsieur le Prince. Monsieur le Prince alla jusque dans sa chambre, et lui dit : « Vatel, tout va bien, rien n’était si beau que le souper du Roi. » Il lui dit : « Monseigneur, votre bonté m’achève ; je sais que le rôti a manqué deux tables. – Point du tout, dit Monsieur le Prince, ne vous fâchez point, tout va bien. » La nuit vint : le feu d’artifice ne réussit pas, il fut couvert d’un nuage ; il coûtait seize mille francs. A quatre heures du matin, Vatel s’en va partout, il trouve tout endormi, il rencontre un petit pourvoyeur qui lui apportait seulement deux charges de marée ; il lui demanda : « estlà tout ? ». Il lui dit : »Oui, monsieur. »Il ne savait pas que Vatel avait envoyé à tous les ports de mer ; il attend quelque temps ; les autres pourvoyeurs ne viennent point ; sa tête s’échauffait, il croit qu’il n’aura point d’autre marée, il trouve Gourville et lui dit « Monsieur, je ne survivrai pas à cet affront-ci ; j’ai de l’honneur et de la réputation à perdre. » Gourville se moqua de lui. Vatel monte à sa chambre, met son épée contre la porte, et se la passe au travers du cœur ; mais ce ne fut qu’au troisième coup, car il s’en donna deux qui n’étaient pas mortels : il tomba mort. La marée cependant arrive de tous côtés ; on cherche Vatel pour la distribuer ; on va à sa chambre ; on heurte, on enfonce la porte ; on le trouve noyé dans son sang ; on court à Monsieur le Prince, qui fut au désespoir. Monsieur le Duc pleura : c’était sur Vatel que roulait tout son voyage de Bourgogne. Monsieur le Prince le dit au Roi fort tristement : on dit que c’était à force d’avoir de l’honneur en sa manière ; on le loua fort, on loua et blâma son courage. Le Roi dit qu’il y avait cinq ans qu’il retardait de venir à Chantilly, parce qu’il comprenait l’excès de cet embarras. […]Cependant Grouville tâche de réparer la perte de Vatel ; elle le fut : on dina très bien, on fit collation, on soupa, on se promena, on joua, on fut à la chasse ; tout était parfumé de jonquilles, tout était enchanté. Voilà ce que m’a dit Moreuil, pour vous mander. Je jette mon bonnet par-dessus le moulin, et je ne sais rien du reste. M ; d’Hacqueville, qui était tout à cela, vous fera des relations sans doute ; mais comme son écriture n’est pas si lisible que la mienne, j’écris toujours. Mais parce que je les aimerais en pareille occasion, je vous les mande. Le courrier à l’époque. La lecture de la correspondance de la Marquise avec sa fille permet de comprendre comment fonctionnait la poste. Les courriers (on les appelait les « ordinaires »), partaient à date fixe de Paris pour la province. Ils mettaient cinq jours pour aller en Provence, dix pour apporter une lettre de Provence aux Rochers. Mme de Sévigné donnait ses lettres les mercredis et les vendredis : elle recevait celles de sa fille les lundis et les vendredis. Louvois, nommé surintendant des Postes en 1668, avait organisé la poste en monopole d’Etat, ce qui garantissait le départ et l’arrivée du courrier à dates fixes. Lettre du 12 juillet 1671. « Ces messieurs les postillons [...] sont incessamment sur les chemins pour porter et reporter nos lettres. Enfin, il n'y a jour dans la semaine qu'ils n'en portent quelqu'une à vous et à moi ; il y en a toujours et à toutes les heures par la campagne? Les honnêtes gens ! Qu'ils sont obligeants ! Et que c'est une belle invention que la poste. » Mme de Grignan Née en 1646 à Paris, Françoise-Marguerite avait hérité de ses parents sa grâce et sa beauté. Après trois années de gloire (de 1663 à 1665) à la Cour de Louis XIV, figurant dans toutes les fêtes du début de règne, elle connut une disgrâce précoce pour avoir refusé les avances du Roi ; elle épousa en 1669 le comte de Grignan, qui fut bientôt nommé lieutenant général de Louis XIV en Provence. Après avoir donné naissance à sa première fille, elle laissa MarieBlanche à sa mère et partit rejoindre son mari dans le midi. Madame de Sévigné supporta difficilement la séparation d'avec sa fille. Le 6 février 1671, quand Mme de Sévigné écrivit à la comtesse, qui l'avait quittée deux jours plus tôt, elle avait quarante-cinq ans depuis la veille. Débuta alors une correspondance entre une mère et sa fille qui allait durer un quart de siècle. Les sentiments d’une mère. Á Paris, le 6 février 1671. Ma douleur serait bien médiocre si je pouvais vous la dépeindre ; je ne l’entreprendrai pas aussi. J’ai beau chercher ma chère fille, je ne la trouve plus ; et tous les pas qu’elle fait l’éloigne de moi. Je m’en allais donc à Sainte-Marie toujours pleurant et toujours mourant : il me semblait qu’on m’arrachait le cœur et l’âme ; et en effet, quelle rude séparation ! Je demandais la liberté d’être seule ; on me mena dans la chambre de Mme du Housset, on me fit du feu ; Agnès me regardait sans me parler ; c’était notre marché ; j’y passais cinq heures sans cesser de sangloter ; toutes mes pensées me faisaient mourir. J’écrivis à M. de Grignan, vous pouvez penser sur quel ton ; j’allais ensuite chez mme de Lafayette, qui redoubla mes pleurs par l’intérêt qu’elle y prit. […] Je revins enfin à huit heures de chez Mme de Lafayette ; mais en entrant ici, bon Dieu ! Comprenez-vous bien ce que je sentis en montant ce degré ? Cette chambre où j’entrais toujours, hélas ! J’en trouvais les portes ouvertes ; mais je vis tout démeublé, tout dérangé, et votre petite fille qui me représentait la mienne. Comprenez-vous bien ce que je souffris ? Les réveils de la nuit ont été noirs, et le matin je n’étais point avancée d’un pas pour le repos de mon esprit. […] Á Paris, lundi 9 février 1671. […] Rien ne me donne de distraction, je suis toujours avec vous ; je vois ce carrosse qui avance toujours et qui n’approchera jamais de moi : je suis toujours dans les grands chemins ; il me semble même que j’ai quelquefois peur qu’il ne verse ; les pluies qu’il fait depuis trois jours me mettent au désespoir ; le Rhône me fait une peur étrange. J’ai une carte devant les yeux ; je sais tous les lieux où vous couchez : vous êtes ce soir à Nevers, et vous serez dimanche à Lyon, où vous recevrez cette lettre Á Paris, mercredi 18 février 1871. […] Vous comprenez bien, ma belle, que, de la manière dont vous m’écrivez, il faut bien que je pleure en lisant vos lettres. Pour comprendre quelque chose de l’état où je suis, joignez, ma bonne, à la tendresse et à l’inclination naturelle que j’ai pour votre personne, la petite circonstance d’être persuadée que vous m’aimez, et jugez de l’excès de mes sentiments. Méchante ! Pourquoi me cachez-vous quelquefois de si précieux trésors ? Vous avez peur que je ne meure de joie ; mais ne craignez-vous pas aussi que je ne meure du déplaisir de croire voir le contraire ? Mais des dissonances étaient apparues entre les deux femmes bien avant la séparation, conflits liés à leur caractère réciproque. Mme de Sévigné espérait que leur éloignement dissiperait cette mésentente. Á Paris, mercredi 6 mai 1671 Je vous prie, ma bonne, ne donnons point désormais à l’absence le mérite d’avoir remis entre nous une parfaite intelligence, et de mon côté la persuasion de votre tendresse pour moi : quand elle aurait part à cette dernière chose, puisqu’elle l’a établie pour jamais, regrettons un temps où je vous entendais vous dont l’esprit touche mon goût plus que tout ce qui m’a jamais plu. N’allons point faire une séparation de votre aimable vue et de votre amitié : il y aurait trop de cruauté à séparer ces deux choses et quoi que Monsieur de Grignan dise, c’est une folie ; je veux plutôt croire que le temps est venu que ces deux choses marcheront ensemble, que j’aurai le plaisir de vous voir sans mélange d’aucun nuage, et que je réparerai les injustices passées, puisque vous voulez les nommer ainsi. […] Hélas, ma bonne, je suis persuadée que vous n’êtes que trop vive et trop sensible sur ma vie et sur ma santé, et je vous conjure aussi comme j’ai toujours fait, de n’en être point en peine. J’ai une santé au-delà de toutes les craintes ordinaires ; je vivrai pour vous aimer, et j’abandonne ma vie à cette occupation, et à toute la joie, et à toute la douleur, à tous les égarements, et à toutes les mortelles inquiétudes, et enfin à tous les sentiments que cette passion me pourra donner. Le 5 octobre 1673, Mme de Sévigné, qui venait de passer de passer quatorze mois auprès de sa fille, rejoignait Paris. Á Montélimar, jeudi 5 octobre 1673. Voici un terrible jour, ma chère fille ; je vous avoue que je n'en puis plus. Je vous ai quittée dans un état qui augmente ma douleur. Je songe à tous les pas que vous faites et à tous ceux que je fais, et combien il s'en faut qu'en marchant toujours de la sorte, nous ne puissions jamais nous rencontrer. Mon coeur est de repos quand il est auprès de vous : c'est son état naturel et le seul qui peut plaire. [...] J'ai le coeur et l'imagination tout remplis de vous ; je n'y puis penser sans pleurer, et j'y pense toujours, et je trouve que tout me manque, parce que vous me manquez. Mes yeux qui vous ont tant rencontrée depuis quatorze mois ne vous trouvent plus. Le temps agréable qui est passé rend celui-ci douloureux, jusqu’à ce que j'y sois un peu accoutumée ; mais ce ne sera jamais assez pour ne pas souhaiter ardemment de vous revoir et de vous embrasser. Je ne dois pas espérer mieux de l'avenir que du passé. Je sais que votre absence m'a fait souffrir ; je serai encore plus à plaindre, parce que je me suis fait imprudemment une habitude nécessaire de vous voir. Il me semble que je ne vous ai point embrassée en partant : qu'avais-je à ménager ? Je ne vous ai point assez dit combien je suis contente de votre tendresse. [...] En un mot, ma fille, je ne vis que pour vous. Dieu me fasse la grâce de l'aimer comme je vous aime ! [...] On voit dans cette lettre que Mme de Grignan était pour sa mère la cause des ses tourments autant que sa raison de vivre. Mme de Sévigné désignait la sincérité comme qualité essentielle des lettres reçues et envoyées. Le souci d'authenticité l'emportait sur la recherche formelle et le respect des conventions épistolières fixées alors. Elle revendiquait son « style négligé », sans correction ni révision, d'une manière spontanée et rapide. Á Paris, mercredi 23 décembre 1671. [...] J'ai reçu votre lettre du 13 ; c'est au bout de sept jours présentement. En vérité, je tremble de penser qu'un enfant de trois semaines ait eu la fièvre et la petite vérole. C'est la chose du monde la plus extraordinaire. Mon Dieu ! D'où vient cette chaleur extrême dans ce petit corps ? Ne vous a-t-on rien dit du chocolat ? Je n'ai point le coeur content làdessus. Je suis en peine de ce petit dauphin ; je l'aime, et comme je sais que vous l'aimez, j'y suis fortement attachée. Vous sentez donc l'amour maternel, j'en suis fort aise. Eh bien ! Moquez-vous présentement des craintes, des inquiétudes, des prévoyances, des tendresses, qui mettent le coeur en presse, du trouble que cela jette sur toute la vie ; vous ne serez plus étonnée de tous mes sentiments. J'ai cette obligation à cette petite créature. Je fais prier Dieu pour lui, et n'en suis pas moins en peine que vous. J'attends de ses nouvelles avec impatience; je n'ai pas huit jours à attendre ici comme aux Rochers. Voilà le plus grand agrément que je trouve ici ; car, enfin, ma bonne, de bonne foi, vous m'êtes toutes choses, et vos lettres que je reçois deux fois la semaine font mon unique et sensible consolation en votre absence. Elles sont agréables, elles me sont chères, elles me plaisent. [...] Est-il possible que les miennes vous soient agréables au point que vous me le dites ? Je ne les trouve point telles au sortir de mes mains ; je cois qu'elles deviennent ainsi quand elles ont passé par les vôtres. [...] Car mon style est si négligé qu'il faut avoir un esprit naturel et du monde pour pouvoir s'en accommoder. Je vous prie, ma bonne, ne vous fiez point aux deux lits, c'est un sujet de tentation : faites coucher quelqu'un dans votre chambre. Sérieusement, ayez pitié de vous, de votre santé, et de la mienne. [...] Mme de Sévigné ne parlait pas seulement de ses sentiments à l'égard de sa fille ; elle lui contait aussi les évènements plus ou moins futiles dont elle était témoin. Á Paris, mercredi 3 février 1672. Cette nuit, Mme la princesse de Conti est tombée en apoplexie. Elle n'est pas encore morte, mais elle n'a aucune connaissance ; elle est sans pouls et sans parole. On la martyrise pour la faire revenir. Il y a trois cents personnes dans sa chambre, trois cents dans sa maison ; on pleure, on crie. Voilà tout ce que j'en sais jusqu’à l'heure qu'il est. Pour Monsieur le Chancelier, il est mort très assurément, mais mort en grand homme. Son bel esprit, sa prodigieuse mémoire, sa naturelle éloquence, sa haute piété, se sont rassemblés aux derniers jours de sa vie. [...] Enfin, sa mort est l'une des plus belles et des plus extraordinaires choses du monde. Ce qui l'est encore plus, c'est qu'il n'a point laissé de grands biens ; il était aussi riche en entrant à la cour, qu'il l'était en mourant. [...] La marquise était aussi très attentive à la mode féminine de son époque. Elle renseigne dans la lettre suivante sa fille sur la nouvelle coiffure en vogue à Paris. Á Paris, samedi 4 avril 1671. Je vous mandai l'autre jour la coiffure de Mme de Nevers, et dans quel excès la Martin avait poussé cette mode ; mais il y a une certaine médiocrité qui m'a charmée, et qu'il faut vous apprendre, afin que vous ne vous amusiez plus à faire cent petites boucles sur vos oreilles, qui sont défrisées en ce moment, qui siéent mal, et qui ne sont plus à la mode précisément que la coiffure de la reine Catherine de Médicis. Je vis hier la duchesse de Sully et la comtesse de Guiche ; leurs têtes sont charmantes : je suis rendue. Cette coiffure est faite justement pour votre visage ; vous serez comme un ange, et cela est fait en un moment. Tout ce qui me fait de la peine, c'est que cette fontaine de la tête, découverte, me fait peur pour les dents ... [...] Imaginez-vous une tête blonde partagée à la paysanne jusqu'à deux doigts du bourrelet : on coupe ses cheveux de chaque côté, d'étage en étage, dont on fait de grosses boucles rondes et négligées, qui ne viennent point plus bas qu'un doigt au-dessous de l'oreille ; cela fait quelque chose de fort jeune et de fort joli, et comme deux gros bouquets de cheveux de chaque côté. Il ne faut pas couper les cheveux trop courts ; car, comme il les faut friser naturellement, les boucles qui en emportent beaucoup ont attrapé plusieurs dames, dont l'exemple doit faire trembler les autres. On met les rubans comme à l'ordinaire, et une grosse boucle nouée entre le bourrelet et la coiffure ; quelquefois on la laisse traîner jusque sur la gorge. Je ne sais si nous vous avons bien représenté cette mode ; je ferai coiffer une poupée pour vous envoyer ; et puis, au bout de tout cela, je meurs de peur que vous ne vous ne daignez point prendre toute cette peine et que vous ne mettiez une coiffe jaune comme une petite chère. Ce qui est vrai, c'est que la coiffure que fait Montgobert n'est plus supportable. Du reste, consultez votre paresse et vos dents ; mais ne m'empêchez pas de souhaiter de pouvoir vous voir coiffée ici comme les autres. Je vous vois, vous me paraissez, et cette coiffure est faite pour vous ; mais qu'elle est ridicule à de certaines dames, dont l'âge ou la beauté ne conviennent pas ! (Fontaine : fontanelle. Partagée à la paysanne : présentant une raie au milieu. Bourrelet : tortillon de cheveux ramassés en chignon. Emportent : séduisent. Chère : précieuse) La marquise commente la vogue du chocolat qui se répand à la cour de Versailles. Emilie Lettre du 12 juillet 1671. Vous ne vous portez point bien, vous n'avez point dormi : le chocolat vous remettra. Mais vous n'avez point de chocolatière, j'y ai pensé mille fois : comment ferez-vous ? Deux mois plus tard, la marquise a changé d'avis. Lettre du 15 avril 1671 Je veux vous dire ma chère enfant, que le chocolat n'est plus avec moi comme il était, la mode m'a entraînée, comme elle fait toujours : tous ceux qui m'en disaient du bien m'en disent du mal. On le maudit, on l'accuse de tous les maux qu'on a, il est la source des vapeurs et des palpitations : il vous flatte pour un temps et puis allume tout d'un coup une fièvre continue qui vous conduit à la mort. Elle explique à sa fille, enceinte, les risques que peut lui faire courir ce poison. Lettre du 13 mai 1671 Je vous en conjure, ma très chère bonne et très belle, de ne point prendre de chocolat, je suis fâchée avec lui personnellement. Il y a huit jours, j'eus seize heures durant une colique qui me fit toutes les douleurs de la néphrite. En l'état où vous êtes, il vous serait mortel. La marquise ayant eu une crise de rhumatisme en janvier 1676, les médecins lui ordonnent au printemps suivant une « saison » à Vichy ; elle y découvre la douche. A Paris, jeudi 28 mai 1676. J'ai commencé aujourd'hui la douche : c'est une assez bonne répétition du purgatoire. On est nue dans un petit lieu sous terre, où l'on trouve un tuyau de cette eau chaude, qu'une femme vous fait aller où vous voulez. Cet état où l'on conserve à peine une feuille de figuier pour tout habillement, est une chose assez humiliante. [...] Représentez-vous un jet d'eau contre quelqu'une de vos pauvres parties, toute la plus bouillant que vous puissiez imaginer. On met d'abord l'alarme partout, pour mettre en mouvement tous les esprits ; et puis on s'attache aux jointures qui ont été affligées ; mais quand on vient à la nuque du cou, c'est une sorte de feu et de surprise qui ne se peut comprendre ; cependant, c'est là le noeud de l'affaire. Il faut tout souffrir, et l'on souffre tout, et l'on n'est point brûlée, et on se met ensuite dans un lit chaud, où l'on sue abondamment, et voilà ce qui guérit. En 1690, la marquise de Sévigné, rejoignit sa fille à Grignan, qui devait affronter la maladie et des difficultés financières. Elle ne la quitta plus et mourut près d'elle le 17 avril 1696, à 70 ans. Comment lit-on la marquise de Sévigné aujourd’hui ? Quelle place occupe-t-elle dans notre mémoire ? Virginia Woolf (1882-1941) avait peut-être raison quand elle écrivait : « Cette grande dame, cette robuste et féconde épistolière qui, à notre époque, aurait sans doute été une romancière parmi les plus grands, prend plus de place dans la conscience vivante des lecteurs d’aujourd’hui que tout autre personnage de son époque disparue. » Bibliographie. « Correspondance de Madame de Sévigné» en trois volumes. Sous la direction de Roger Duchêne. La Pléiade. « Lettres de Madame de Sévigné. Lettres de l’année 1671 ». Cécile Lignereux. PUF. « Ecrire au temps de Madame de Sévigné ». Roger Duchêne. Vrin. « Madame de Sévigné », biographie. Roger Duchêne. Tallandier. « Le savoir-faire épistolaire de Madame de Sévigné » Cécile Lignereux. PUF. Sites. Salle Mme de Sévigné, musée Carnavalet, rue Sévigné, Paris. Château de Grignan, Drôme. Festival de la correspondance. La 20ème édition du festival de la correspondance aura lieu du 30 juin au 5 juillet 2015 sur le thème "Avoir 20 ans : jeunesse et correspondances". Château des Rochers –Sévigné, Ile-et-Vilaine.