L`Asile des photographies
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L`Asile des photographies
Centred’artÉditeur www.lepointdujour.eu Kermesse, hôpital de Picauville, sans date. Photographe inconnu Du 20 octobre 2013 au 26 janvier 2014 L’Asile des photographies Philippe Artières et Mathieu Pernot Avant-propos En 2010, nous avons été invités à travailler par Le Point du Jour et la Fondation Bon-Sauveur sur les archives de l’hôpital psychiatrique de Picauville, à une quarantaine de kilomètres de Cherbourg. Cette invitation faisait suite à une demande adressée par la Fondation au Point du Jour : les vieux bâtiments de l’hôpital seraient bientôt détruits ; il fallait, d’une manière différente, conserver la mémoire du lieu. Première originalité du projet, c’est une institution médicale qui avait sollicité une institution culturelle installée sur le même territoire. Nous ne savions pas précisément ce que nous trouverions mais on nous avait indiqué qu’un service audiovisuel animé par un infirmier passionné, Léon Faligot, disposait de films et de photographies anciennes ; parallèlement, nous aurions libre accès aux archives écrites de l’hôpital, et notamment aux dossiers médicaux datant parfois d’avant la Seconde Guerre mondiale. En découvrant les centaines d’images, des années 1930 à nos jours, conservées dans ces nombreux cartons, pochettes, classeurs, nous avons eu immédiatement le sentiment d’être tombés sur un trésor oublié. La plupart des images n’étaient pas légendées, on n’en connaissait ni les auteurs, ni les personnes représentées, mais le corpus était formidablement divers et témoignait, outre de la vie d’une institution, de tous les usages du médium : portrait d’identité, photographie d’architecture, imagerie médicale, photographie de vacances, reportage de presse, instantanés domestiques, cartes postales ou images officielles. Très vite, s’est imposée à nous l’idée que ce corpus constituait moins l’histoire en images d’une institution, emblématique de l’évolution de la psychiatrie, qu’une histoire de la photographie vue depuis l’hôpital, lieu de vie à la fois spécifique et banal – une histoire non marginale mais à la marge, une sorte d’asile des photographies. Ainsi, s’établissait une correspondance entre la nature et le sujet de ces images : ici, pas de grands noms, ni le plus souvent d’événements remarquables mais le quotidien d’anonymes ; pas de chefs-d’œuvre bien composés mais l’éclat du réel que la photographie enregistre. Quelques images pouvaient évoquer les « monstres » photographiés en 1971 par Diane Arbus dans des institutions du New Jersey, les fous du vieil asile de San Clemente, en Italie, filmés au début des années 1980 par Raymond Depardon ou encore, un siècle plus tôt, les hystériques du docteur Charcot à l’hôpital de la Salpêtrière à Paris. Néanmoins, pour l’essentiel, les instantanés de Picauville – repas, kermesses, vacances – renvoyaient, eux, à une forme de normalité, celle de l’iconographie familiale. Ils formaient un contrepoint inédit à la vision dramatisée de la « folie », dominante depuis le XIXe siècle. SALLE 1 Plutôt que de nous servir de ce corpus pour faire, chacun de notre côté, notre travail habituel d’historien ou d’artiste, nous avons voulu en faire la matière même d’une élaboration commune au cours des trois ans qu’a duré ce projet. L’exposition et le livre qui en résultent sont des montages où notre vision voisine avec celles des bonnes sœurs, des médecins, des patients et de leurs familles qui, comme nous, ont connu Picauville. L’Asile des photographies ne prétend donc pas à l’exactitude, quoiqu’il s’agisse de documents, ni a fortiori à l’exhaustivité, bien que fidèle à leur diversité. Il traduit avant tout une expérience, la nôtre, inscrite dans une histoire collective, et comme telle multiple. Nous remercions chaleureusement la Fondation Bon-Sauveur ainsi que les « gens de Picauville », de nous avoir offert cette liberté. Philippe Artières et Mathieu Pernot Sauf indication contraire, tous les textes sont de Philippe Artières, extraits de L’Asile des photographies (Le Point du Jour, 2013). Album-souvenir Cérémonies du centenaire du Bon-Sauveur, 1937 Ruines de Picauville / Pont-l’Abbé, 1944 Photographes inconnus « En l’ouvrant, on espère qu’il contiendra des images des jours de bombardements ; toujours l’envie que la photographie nous ramène à la scène première, qu’avec elle l’on se retrouve soudain un soir de juin 1944. Mais il n’en est rien. Nul cliché du jour le plus long. L’album porte cette absence, ce trou. Il renferme ensemble – et sans doute est-ce une part de sa magie – des photographies d’avant et d’après. Sur les premières, on voit de grandes processions dans les rues du village et dans les allées de l’asile. Des religieuses au regard sévère s’avancent vers le photographe ; elles marchent sans doute en chantant des psaumes ; alentour, il y a une foule ; un peu plus loin des prêtres. C’est le jour de la célébration du centenaire, un jour de 1937. Les sœurs ne savent pas que bientôt la guerre va éclater, que bientôt le décor qu’elles traversent va disparaître ; le photographe ne sait pas qu’il saisit là les derniers instants d’un monde. En tournant la page, on découvrira le même paysage dévasté, un village en ruine, une institution réduite à quelques bâtiments, elle qui en comptait une douzaine. Étrange objet que cet album où les clichés sont collés de guingois, en désordre, comme si le support des images était lui-même victime du chaos représenté. Étonnant montage qui fait de cet objet un vestige. Objet incomplet dont certaines pages manquent, d’où des clichés ont été extraits, laissant comme seules traces des restes de colle. » surélevés, occupent le haut du site, il faut emprunter un grand escalier en pierre ; on le croirait d’apparat avec ses larges marches et ses deux rampes soutenues par des piliers. Ce jeudi, l’escalier est barré d’un haut grillage métallique qui en interdit l’accès « à toute personne extérieure au chantier ». Hôpital de Picauville après les bombardements de juin 1944 Photographe inconnu On reste là, sidéré, à imaginer les patients monter et descendre ces marches à longueur de journée, de mois, d’année. On pense aux articulations douloureuses, au corps qui pèse, à la fatigue quotidienne. En contrebas, une statue en bronze de saint Michel terrassant le dragon renforce encore la solennité austère du lieu. Une fois gravies les marches, le patient devait se trouver à hauteur du saint guerrier, ou plutôt du monstre vaincu. « Il y a les clichés de la catastrophe, ceux des mois qui ont suivi, lorsque les compagnies d’assurance et les responsables de l’État sont venus constater les dégâts, évaluer les travaux à mener et estimer les sommes à verser au titre des dommages de guerre. Les assureurs et le préfet ont dépêché des photographes sur place pour documenter le dossier. Ils ont inventorié les ruines avec la précision d’un archéologue. Ils sont les premiers photographes. Ils ont procédé avec méthode : il s’agit par la photographie de saisir tout ce qui n’est plus. L’enveloppe qui sera jointe au constat contient tous ces clichés ; à partir d’eux, les experts ont sans doute calculé, affiné et validé ce qu’ils avaient in situ estimé. Reste aujourd’hui de cette opération complexe une simple enveloppe avec des tirages. La photographie comme reste d’une activité comptable. » Les Herbes folles, Picauville, 2010 Bâtiments désaffectés de l’hôpital Mathieu Pernot « Pour atteindre le ser vice SainteMarie dont les bâtiments, légèrement Cette violence symbolique a été depuis neutralisée ; la scène a perdu son caractère menaçant : saint Michel est entouré de beaux massifs de fleurs, et un pan incliné permet d’avancer jusqu’à lui pour se placer sous sa protection. » Représentation théâtrale Les Mains ouvertes, Picauville, 1937 Album du centenaire du Bon-Sauveur Photographe inconnu « Sous les amas de pierres, il y a une histoire, celle d’une institution, celle d’une mission. Tout avait commencé deux cents ans plus tôt, avant l’avènement de la psychiatrie moderne, avec une œuvre de bienfaisance. Faire le bien en prenant en charge les dérangés, les aliénés. Se servir de l’invisible, de sa foi, pour fonder un lieu, ouvrir des bâtiments, prodiguer des soins, construire au milieu des marais. Carte postale de la série « Bon-Sauveur de Picauville », sans date. Photographie : Chardey De cette maison de santé, il ne reste rien ; rien sauf un ensemble de photographies qui montrent dans le plus grand des détails, l’événement – représentation ou reconstitution. Ces images datent du centenaire de 1937 ; elles ont échappé à la destruction de 1944. On y voit une succession de scènes en costumes, devenues tableaux. C’est une exhibition de reliques, une cérémonie. Les Mains ouvertes raconte la création de l'institution en 1837 par Sophie de Riou, une aristocrate philanthrope qui en deviendra la mère supérieure. Le photographe a saisi la pièce comme telle. Surtout ne pas exprimer un point de vue sur ce qui se passe, mais saisir cet instant unique d’une synchronie parfaite de l’image et du texte. » SALLE 2 Cartes postales, Picauville, 1930-1980 Photographies de Bioret, Chardey, Le Goubey et al. « On croyait devoir faire les sites spécialisés en vente de cartes postales, et, pour notre plus grand bonheur, tout est là ; les séries en entier ; rien ne manque : les promenades en images dans l’institution, les jardins, la chaufferie, la cuisine, les ateliers ; mais ce sont les dortoirs et les chambres individuelles qui sont l’objet du plus grand nombre de clichés. On pourrait, d’année en année, suivre la manière dont chaque espace a été aménagé, modifié, réaménagé... Magie de la carte postale quand elle s’obstine sur Mathieu Pernot, L’Inventaire, Picauville, 2010 des micro lieux. Le classeur les tient en ses pages comme si toutes ces images, faites par l’institution pour produire son autoportrait, ne devaient pas être séparées. Surtout maintenir cette impression de continuité, faire en sorte que la ligne ne soit pas brisée, que les photographies constituent un récit à une seule voix. » Intérieurs, Picauville, 2010 Bloc opératoire, cuisine, escalier bains, dortoir, salle de repos Mathieu Pernot « Cette fois-ci, on s’est fait expliquer l’origine de cette montagne de cailloux gris et rouges : la grande cheminée de brique avait été détruite quelques semaines auparavant ; on ne pouvait la conserver pour des raisons de sécurité, la commission ne tergiverse pas. Des amas de terre et de pierre, il y en a plusieurs sur le site ; on les escalade pour se figurer à quoi pouvait ressembler le paysage avant les récentes destructions. La Fondation change comme elle a changé au fur et à mesure de son histoire, intégrant de nouveaux bâtiments, supprimant les plus vétustes ; la guerre a fait le reste. En parcourant ces allées, à nouveau au milieu des ruines, on réalise soudain qu’on est les témoins de la fin d’une époque de la psychiatrie ; les grilles rouillées sont empilées dans un coin, et une protection provisoire est dépliée pour interdire l’accès à ce qui n’existe déjà plus. » « Hôpital psychiatrique. Plan directeur » Picauville, années 1950 Dossier préparatoire aux travaux Photographe inconnu « Monsieur le Dr. Gosselin donne lecture d’un rapport au nom de la commission d’Assistance et d’Hygiène, sur le fonctionnement en 1944 de l’hôpital psychiatrique du « Bon-Sauveur ». Malgré les événements de 1944, l’hôpital psychiatrique du « Bon-Sauveur » a su fonctionner au mieux. Sur 203 entrées, il y a eu 108 sorties. Les sœurs méritent des félicitations pour leur belle attitude et leur sang-froid pendant la bataille. L’une d’elles a été tuée, on a aussi à déplorer la mort d’un infirmier. Il ressort d’autre part de la lecture de ce rapport qu’il est devenu nécessaire de créer un service ouvert, c’est-à-dire un service non soumis à la loi de 1838 sur l’internement (certificat médical timbré concluant à l’internement) qui serait considéré comme un hôpital libre pour maladies mentales. Ce ne serait pas quelque chose de nouveau – ces services existant dans d’autres régions. Il n’en coûterait rien au département en ce qui concerne la construction et l’aménagement, il y contribuerait en participant au prix de journée qu’il paye de toute façon. Il en résulterait des avantages, car les familles et les médecins répugnent à placer les malades suivant la loi de 1838 et ne les conduisent que lorsqu’ils ne peuvent plus les garder dans les familles, ils sont alors devenus incurables et aussi peuvent vivre des années à l’asile d’aliénés, en attendant leur mort, alors que pris plus tôt, ils auraient pu être rendus à leur famille, à la société, à leur travail. Pour les malades à la charge du département, il en résulterait une économie notable. La commission de la Santé et de l’Hygiène émet à l’unanimité de ses membres le vœu qu’un service ouvert soit créé au Bon-Sauveur. » Conseil général du Calvados Rapport médical sur le fonctionnement en 1944 de l’hôpital psychiatrique du Bon-Sauveur L’Inventaire, Picauville, 2010 Objets trouvés sur le site de l’hôpital Mathieu Pernot « Établir un inventaire des objets. Chercher les masques des bals costumés, identifier le nom des patients auxquels étaient destinés les gobelets situés sur les plateaux des traitements et revoir les dessins que René Leichtnam adres s ait à François Mit terrand. Photographier les appareils photos et projecteurs de films abandonnés. Constituer une archéologie des appareils qui ont vu. » Mathieu Pernot Plans d’une cité imaginaire Picauville, années 1980 Dessins de René Leichtnam « Dispersés dans les salles de l’ancien hôpital, des rouleaux de papier raisin ; nous les avons déroulés sans trop savoir ce qui pouvait s’y cacher. Et soudain la cité de René Leichtnam a surgi avec ses pavillons, ses maisons identiques, ses immeubles, son stade… Soudain dans ce lieu voué à la destruction, dans l’espace même de l’enfermement, quelqu’un avait imaginé un dehors, quelqu’un s’était rêvé bâtisseur. » SALLE 3 Religieuses de la communauté Espérance de Picauville, 1950-1970 Photographes inconnus « Traces vivantes de l’origine de l’institution, elles ne sont pas seulement des personnages sur les images. […] Les cloîtrées se prennent en photo dans chacune de leurs occupations, marchant dans le jardin, à la cuisine, à la laverie... Elles n’hésitent pas non plus à se mettre en scène dans des poses parfois inattendues. Ces clichés servent aussi à la production d’images pieuses. Ou bien les carmélites en font des albums que l’archiviste conserve. C’est souvent l’une d’entre elles qui sera la seule auteure des images ; ce sera la photographe. Lorsque la communauté est de sortie, son activité s’intensifie, elle mitraille. aube ; il y a une absente, une sœur morte ou alitée à l’infirmerie. La photographie ne viole aucun interdit ; elle se tient dans les limites de la Règle, mais elle permet un petit écart, un infime plaisir. » Patients dans la cour du service hommes, Picauville, sans date Photographe inconnu (tirages modernes) Patients dans la cour du service hommes, Picauville, sans date Auteur inconnu (film numérisé) Involontairement, on expose alors un autre visage de la vie religieuse, celle d’une communauté de filles qui s’amuse, rigole parfois ; une vie joyeuse en somme. Lors des sorties avec les patients, la photographie capte aussi une étrange complicité entre les deux communautés ; les corps et les uniformes semblent moins rigides, on sent des affinités et des complicités. On se donne la main, on se tient par l’épaule. On y affectionne beaucoup le portrait de groupe. […] « On a profité d’un passage dans l’épaisse haie de buis pour contourner les barrières métalliques et rejoindre la cour. L’herbe y a été fauchée récemment ; il n’y a plus de Sainte Vierge sur le socle de pierre, la statue a dû être mise à l’abri. La pancarte portant le mot « Lourdes » paraît, elle, anachronique ; on la croirait d’hier à côté du long banc dont les planches ont été abîmées, érodées. À peine assis, on découvre que cette cour est certes bordée de deux grands murs mais qu’une double rangée de frênes l’ouvre sur un ailleurs. Soudain, le mur d’enceinte que l’on aperçoit apparaît dérisoire car, derrière, il y a les marais, l’eau et plus loin la mer. La cour est, cet après-midi comme tous les jours, vide ; seules quelques fleurs de printemps tapissent la pelouse. […] Ces photographies n’ont pas pour vocation de sortir de l’institution, mais sans doute, à date régulière, de produire un instantané de la communauté ; souvent à de rares détails, le cliché est le même d’une année sur l’autre. Elles sont à la même place ; elles portent la même Cette autre cour est fermée ; en débouchant du petit couloir qui y mène, on ressent l’étrange présence de ceux qui, pendant au moins cinquante ans, l’ont occupée. Ils nous environnent. On pourrait tourner la tête et voir à quelques pas, un jeune homme agenouillé regardant Mathieu Pernot, Le Dortoir des agités, Picauville, 2010 fixement un point de la dalle ; à gauche, sur le banc, un patient plus vieux serait allongé, fumant une cigarette les yeux fermés ; devant, pourrait passer un troisième homme qui ferait les cent pas, en répétant la même phrase. » Le Dortoir des agités, Picauville, 2010 Installation réalisée et photographiée par Mathieu Pernot sur le site de l’hôpital « Faire revenir les fantômes de l’image. Ces fantômes sont agités et les images violentes. L’installation Le Dortoir des agités évoque les premières représentations photographiques de la folie : les hystériques du docteur Charcot à l’hôpital de la Salpêtrière à la fin du XIXe siècle. L’installation a été réalisée dans les anciens dortoirs d’un bâtiment désaffecté. Attachés par des cordes aux lits, les matelas sont en proie à des convulsions, traversés par l’histoire des corps en souffrance. Le dortoir est à nouveau habité. » Mathieu Pernot Portraits de patients, sans date Photographe inconnu Correspondance, dossiers médicaux et documents administratifs Picauville, 1900-1980 « La composition des dossiers surprend par l’omniprésence des images et pourtant par la rareté des portraits photographiques. Le bertillonnage, cette technique qui a consisté à ficher par milliers des individus, ne fait partie des pratiques ni de l’aliénisme fin de siècle ni de la psychiatrie du premier xx e siècle. Cela ne signifie pas pour autant qu’elle n’a pas stigmatisé ces populations, qu’elle n’a pas montré du doigt les troubles et les délires, qu’elle n’a pas exercé sur eux des violences ; mais l’œil photographique n’a pas été, avant le moment nazi, l’instrument de cette exclusion. […] O n c o m p re n d a i n s i p o u r q u o i à Picauville, comme dans la majorité des institutions de prise en charge de la maladie mentale, il n’y eut pas de studio de prises de vue, pas de tabouret à cet effet, pas de fond neutre. L’image du malade dans le dossier n’est pas, ou rarement, photographique ; elle est accumulation de signes. Sur du papier pelure, un médecin a noté jour après jour, séance après séance, ses observations ; ses notes n’avaient pas vocation à être lues par d’autres, elles constituaient les traces d’un travail en cours ; presque illisibles. On y reconnaît quelques mots : aucun jargon médical ici, mais des mots simples, crus, presque grossiers. Plus loin, des courriers reçus de la famille. » SALLE DE PROJECTION Excursions, 1960-1970 Auteur inconnu (film numérisé) Kermesses, bals masqués et sorties, 1960-1980 Photographes inconnus (duplicata de diapositives) « Ce sont les images des groupes, souvent en extérieur, faites pour être regardées collectivement : des diapos qui font soirées, des diapos qui sont projetées en grand quelques se maines après les vacances. Occasion de se souvenir de moments singuliers : les sorties, les fêtes, les séjours audehors... […] On sort de soi, des rôles ordinaires : dans l’institution même, par les jeux, les déguisements, les repas de fête ; à l’occasion de la kermesse, c’est le monde du dehors qui entre à l’intérieur. Pendant l’été, c’est l’hôpital qui part en vacances. On est en groupe, en couple, presque en famille. Comme un équivalent de la vie au-dehors où parfois pourtant un mari, une femme, des parents vous attendent et qu’on voudrait rejoindre. On part. On fait sa valise et on monte dans l’autobus du Bon-Sauveur. […] Bien sûr, au cours du printemps, quand les beaux jours arrivent, on fait des excursions, ces longues journées dehors avec le fameux pique-nique préparé par la cantinière : à Saint-Malo, au zoo, au pont de Tancarville... Mais l’été c’est différent, nul besoin de visiter, de s’activer, de manger sur ses genoux ; on déménage au-dehors – on s’installe pour au moins deux semaines au fort de Ravenoville, la maison de vacances. Le temps est alors rythmé autrement ; ce ne sont plus les rendez-vous avec le médecin qui ponctuent la vie quotidienne ; on n’attend plus les visites, il n’y en aura pas – vacances aussi pour les familles. Désormais, ce seront la baignade, les repas et les jeux. Tout s’achève par la fête de fin de séjour... » Répères chronologiques Fondation Bon-Sauveur de Picauville 1837 – Février. Installation de cinq sœurs au château Bertin de Picauville. 1838 – Construction et acquisition de maisons voisines du château. 1847 – Les effectifs s’élèvent à 150 personnes. 1850 – Sophie de Riou devient mère supérieure de l’établissement. 1852 – Le droit de recevoir et de soigner des aliénés est officiellement accordé. 1870 – Le Bon-Sauveur se voit charger d’héberger des troupes et de porter secours aux réfugiés, malades et blessés. 1956 – Le bâtiment de l’école technique et de l’internat ouvre ses portes à 90 élèves. Chauffage central dans l’hôpital et les autres bâtiments. 1957 – Nouvel habit des sœurs. Nouveaux garages et bureaux pour l’administration et l’économat. 1963 – Arrivée de deux cents malades de l’hôpital algérien de Blida à la suite des accords d’Évian et de l’indépendance de l’Algérie. 1964 – Mise en place du plan de sectorisation du département de la Manche : quatre secteurs sont attribués à l’hôpital de Picauville. Ouverture d’une école d’infirmiers. 1970 – 900 malades. 1972 – Février. Inauguration des nouveaux bâtiments. 1901 – Ouverture d’un orphelinat qui ferme en 1903. 1981 – La Fondation Bon-Sauveur prend le relais de la communauté religieuse pour la responsabilité et la gestion de l’hôpital. 1906 – 27 janvier. Autorisation d’ouvrir 1 000 lits (400 hommes et 600 femmes). 1985 – Ouverture de la nouvelle maison de retraite. 1937 – Célébration du centenaire. 1990 – Ouverture d'une antenne psychiatrique d'urgence à l'hôpital Pasteur de Cherbourg 1943 – Avril. Arrivée de 150 malades de Stephansfeld (Bas-Rhin). 1944 – Juin. Destruction presque totale de l’hôpital par les bombardements. 1946 – Juin. 81 sœurs à la communauté. 1950 – Juillet. Bénédiction de la première pierre de la chapelle. 1952 – 785 malades. 1955 – Juillet. Achat du fort de Ravenoville, au bord de la mer. 2002 – Installation du service d'archives dans le bâtiment abritant jusqu'alors le service Sophie de Riou, déménagé, lui, à La Glacerie. 2010-2011 – Démolition de plusieurs bâtiments sur le site de Picauville 2012 – 155 lits sur les trois sites gérés par la Fondation Bon-Sauveur (La Glacerie, Picauville, Valognes) dont 62 lits à Picauville. Biographies Projections Mathieu Pernot a, entre autres, exposé à la Cité nationale de l’histoire de l’immigration (2009), au musée Nicéphore-Niépce (2007) et aux Rencontres d’Arles (2007, 2002 et 1997). Il est l’auteur de dix livres depuis Tsiganes (Actes Sud, 1999). Après Le Grand Ensemble en 2007, Le Point du Jour publiera, début 2014, La Traversée à l’occasion de la rétrospective de Mathieu Pernot au Jeu de Paume. Dans le cadre du Mois du film documentaire, en partenariat avec la bibliothèque Jacques-Prévert Directeur de recherches du CNRS à l’EHESS, Philippe Artières a publié La Vie écrite. Thérèse de Lisieux (Les Belles Lettres, 2011), D’après Foucault. Gestes, programmes, luttes, avec Mathieu Potte-Bonneville, (Les Prairies ordinaires, 2007) et Le Livre des vies coupables. Autobiographies de criminels, 1896-1909 (Albin-Michel, 2000). En 2013, il a dirigé, au Point du Jour, La Révolte de la prison de Nancy. 15 janvier 1972. 16h : La Devinière de Benoît Dervaux (2001, 90 min.) Livre 15h : Titicut Follies de Frederick Wiseman (1967, 84 min.) L'Asile des photographies Format : 28 x 21 cm (relié) 288 pages, 176 photographies 38 euros 17h : Les Jardins d’Abel de Sergio Zavoli (1968, 27 min.) Rencontres 20h30 : Histoire de Paul de René Féret (1975, 81 min.) Jeudi 21 novembre à 18h30 Conférence de Philippe Artières « Des archives, pour quoi faire ? » samedi 30 novembre Samedi 25 janvier Journée d'études « La psychiatrie aujourd'hui » vendredi 8 novembre 20h30 : Histoires autour de la folie de Paule Muxel et Bertrand de Solliers (1993, 210 min. ) samedi 9 novembre 14h : La Terre de la folie de Luc Moullet (2010, 90 min.) 18h : Le Fils de la famille de Mickaël Hamon (2012, 59 min.) En présence du réalisateur 21h : Regard sur la folie de Mario Ruspoli (1961, 48 min.) Valvert de Valérie Mréjen (2008, 52 min.) dimanche 10 novembre 11h : La Moindre des choses de Nicolas Philibert (1997, 104 min.) San Clemente de Raymond Depardon et Sophie Ristelhueber (1982, 100 min.) 15h & 20h30 : Couleurs folie d'Abraham Ségal (1986, 13 min.) La Beauté crue de Hervé Nisic (2008, 65 min.) L'Apothéose d'Arthur Bispo do Rosario de Maione de Queiroz Silva (2004, 26 min.)