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20ANS 20 ANS de Prix Lucioles Librairie Lucioles 1990 Les éditions Alinea publient un livre d'un écrivain lituanien inconnu au bataillon : Youozas Baltouchis. Jacques et Diane Kolnikoff y croient beaucoup et accompagnent le service de presse qu'ils envoient à Lucioles de ces quelques mots : « voici La Saga de Youza. C'est un roman d'exception, un livre rare et très attachant. Il est traversé, comme une symphonie, par les tumultes et les bruissements de cette terre de Lituanie. » Quel bonheur pour un libraire de découvrir un tel chef d'œuvre pétri de tant d'humanité. Comment la littérature peut-elle à ce point décrire le monde ? A travers le destin de Youza, ce paysan lituanien qui va, à la suite d'une déception amoureuse s'isoler dans un coin perdu du kaïrabalé, c'est toute l'histoire du XXème siècle qui frappe à la fenêtre de ce Youza qui voulait fuir le monde. Et quelle langue ! Quelle prouesse de traduction ! Roman du terroir, roman universel, roman accessible à un très large public. Je me souviens de mon grand-père qui avait aimé ce Youza, paysan comme lui. Je me souviens de Jean Rouaud, lauréat cette année du prix Goncourt pour un premier roman Les champs d'honneur, remettant symboliquement le prix aux éditeurs. Je me souviens des bandes « prix lucioles » bricolées à la va vite, photocopiées et découpées pas toujours très droit ! Je me souviens de l'engouement des lecteurs pour ce chef-d'œuvre, certains en achetant trois d'un coup pour les offrir. Je me souviens de confrères libraires à qui j'avais communiqué mon enthousiasme. La librairie n'était pas informatisée à cette époque et je ne sais pas exactement combien nous avons vendu à Lucioles de « saga », probablement plusieurs centaines (autant que le Goncourt de Jean Rouaud !). Nous n'avions pas réfléchi à la possibilité de décerner chaque année un prix Lucioles et ce sont les lecteurs qui nous en ont donné l'idée… Il n'a jamais manqué, chaque année depuis 20 ans, de livres magnifiques, oubliés par la presse et à qui la lueur des lucioles a donné un peu d'éclat ! Je me souviens avec émotion de la création du « Prix Lucioles des lecteurs » composé dès l'origine en 1997 de lecteurs passionnés, exigeants et conviviaux qui sont, au fil des années, devenus des amis. Quel bonheur de partager cette passion des livres avec des lecteurs enthousiastes, défendant avec énergie leurs choix, toujours respectueux de ceux des autres. Nous ne sommes pas prêts d'oublier ces fous rires, ces joyeuses engueulades, ces furieux emportements… se terminant toujours par des petits plats confectionnés avec amour et des vins délicieusement choisis. Tant il est vrai que le plaisir des sens est indissociable de ces jouissives lectures ! Puissiez-vous partager avec nous ces bonheurs de lecture. Michel Bazin, librairie Lucioles 1 1991 Prix Lucioles : La saga de Youza de Youozas Baltouchis Ed. Alinéa / Pocket (traduit du russe et du lituanien par Denise Yoccoz-Neugnot, collab. Guenovaïté Kachinshkiéné) 1992 Prix Lucioles : Jan Marhoul de Vancura Ed. Ombres (traduit du tchèque par A. Pohorsky, J.F. Chanet) 1993 Prix Lucioles : Le voyageur et le clair de lune d'Antal Szerb Ed. Alinéa (traduit du hongrois par Charles Zaremba et Natalia Zaremba-Husvai) 1994 Prix Lucioles : Cantique des plaines de Nancy Huston Ed. Actes Sud / Babel Je me souviens avec émotion du premier lauréat invité en 1994, une certaine Nancy Huston dont Cantique des plaines nous avait bouleversés. Je revois Nancy lisant des passages de son livre au fond de la librairie débarrassée en quatrième vitesse de tous les présentoirs (à l'époque nous n'avions pas notre espace « Jérôme Lindon ») et le cercle des lecteurs suspendus à ses lèvres. Michel Bazin 1995 Prix Lucioles : De beaux lendemains de Russell Banks Ed. Actes Sud / Babel (traduit de l'américain par Christine Le Bœuf) J'ai découvert la librairie Lucioles à l'occasion de la remise à Russel Banks du prix Lucioles pour son roman, De beaux lendemains, dont j'avais eu le bonheur d'être la traductrice. Après avoir été émerveillés par le charme de la ville - et le petit « temple romain » qui fait face à la librairie -, nous l'avons été encore plus, Hubert Nyssen et moi, par la librairie elle-même, l'évident amour de la lecture qui y est partout sensible, et les gens chaleureux et enthousiastes qui l'animent. Ce souvenir nous est resté précieux et je remercie Michel Bazin et ses collaborateurs d'être là et de faire, si bien, ce qu'ils font. Christine Le Bœuf, traductrice 1996 Prix Lucioles : La gloire des Pythre de Richard Millet Ed. Pol / Folio La famille Pythre, au siècle dernier en Corrèze, sur le plateau de Millevaches. André Pythre quitte ce plateau pour s'installer, avec «une demeurée, une 2 innocente », de l'autre côté du plateau, le bout du monde. On va suivre trois générations de cette famille, plus proche des morts que des vivants. Dans ce trou ignoré du monde, ce pays sent la mort. Cette puanteur colle à la peau des personnages toute leur vie. De la même façon, elle nous poursuit longtemps après la lecture de ce roman : on plonge dans l'univers de la mort et de son insupportable odeur. Richard Millet nous entraîne avec un rythme envoûtant chez des « taiseux » hors du commun, dans un roman noir, farouche, bestial, talentueux. Ni rire, ni bonheur, seulement de la maudissure. Mireille Baudrand 1997 Prix Lucioles : La mandoline du capitaine Corelli de Louis de Bernières Ed. Denoël / Folio (traduit de l'anglais par Fanchita Gonzales-Batlle) Prix des Lecteurs : Le liseur de Bernhard Schlink Ed. Gallimard / Folio (traduit de l'allemand par Bernard Lortholary) 1998 Prix Lucioles : Le grand passage de Cormac McCarthy Ed. de l'Olivier / Points (traduit de l'américain par François Hirsch, Patricia Schaeffer) Au téléphone « Nous venons d'attribuer le prix Lucioles 1997 à Cormac McCarthy pour son dernier roman, Le Grand Passage. Peux-tu lui demander s'il accepterait de se rendre à Vienne pour recevoir son prix ? » Jusque là, j'avais toujours considéré Michel Bazin comme un homme plutôt sensé. Je m'efforçai de lui faire comprendre que Cormac McCarthy ne pouvait en aucun cas répondre à son invitation : comme Pynchon et Salinger, McCarthy avait cessé depuis longtemps d'apparaître en public, et réduit à presque rien tout contact professionnel. Devant sa déception, je promis à Michel d'écrire à l'auteur pour lui transmettre officiellement l'invitation - qui sait, l'ermite de Santa Fé daignerait peut-être faire une exception pour lui ? Une semaine plus tard, une jeune personne en stage à l'Olivier frappa à la porte de mon bureau pour me signaler qu'un certain McCarthy demandait à me parler. « OK, dis-je, agacé. Dites à ce monsieur que je n'ai pas le temps de répondre à ce genre de blagues téléphonique. » Deux minutes ne s'étaient pas écoulées qu'elle revenait à la charge : « Il insiste. » Saisi d'un pressentiment, je pris la communication : c'était LUI ! 3 La conversation qui suivit est restée gravée dans ma mémoire. Contrairement à la légende, Cormac McCarthy est un homme affable et d'une politesse exquise. Il commença par m'expliquer que cette distinction était pour lui de la plus haute importance, et qu'il aurait volontiers fait le déplacement si sa femme n'avait pas été sur le point d'accoucher. Puis il me pria de bien vouloir descendre à Vienne pour recevoir le prix en son nom. J'acceptai, évidemment. Il me demanda si le livre se vendait bien , et dans quel genre de librairies (chaînes ? librairies indépendantes ?), m'interrogea sur l'accueil de la critique (que disait Le Monde ? et Libération ?). Bref, il se montra curieux et informé de tout. Il enchaîna sur le prochain volume de la « Trilogie des confins », et me demanda si le titre qu'il avait retenu, Cities of the Plain, ne risquait pas de poser un problème. « - Un problème ? dis-je . Quel problème ? - Je veux dire : avec Proust. » Il m'apprit que Cities of the Plain désignait, dans la Bible, Sodome et Gomorrhe, qui se trouve être le titre d'un des volumes de la Recherche. Puis il voulut connaître mon opinion sur les mérites respectifs de l'ancienne traduction de Proust par Scott Moncrieff (Remembrance of Things Past) et de la nouvelle traduction parue récemment chez Penguin (In Search of Lost Time). Embarrassé, je tentai de m'en sortir en émettant une hypothèse saugrenue : y avait-il donc un rapport entre sa Trilogie et l'œuvre de Proust ? Et si oui, lequel ? Ma question sembla l'amuser beaucoup. « Devinez ! », dit-il. Depuis, j'ai réfléchi à cette hypothèse. Plus le temps passe, plus elle me semble pertinente. Je pense même avoir trouvé la réponse. Si vous voulez la connaître, il faudra vous montrer patients. En effet, j'en réserve la primeur à Cormac McCarthy lui-même. J'envisage de lui téléphoner, disons dans un avenir proche. Olivier Cohen, directeur des éditions de l'Olivier Prix des Lecteurs : Antigone de Henry Bauchau Ed.Actes Sud / Babel Je me souviens des mots d'Henry Bauchau (Prix Lucioles des lecteurs pour Antigone en 1998) que Françoise Nyssen, la directrice d'Actes Sud avait lus : « Chers amis, je vous remercie de l'intérêt que vous avez porté à mon livre et de l'honneur que vous m'avez fait. J'aurais aimé me trouver parmi vous et regrette que mon état de santé ne me l'ait pas permis. Flaubert a écrit : « Un livre est pour moi une façon de vivre ». Si je vous parle aujourd'hui de la lumière Antigone et même de la lumière Antigone en lumière acharnée c'est parce qu'elle a été pour moi aussi une façon de vivre. » Michel Bazin 4 1999 Prix Lucioles : La source cachée de Hella S. Haasse Ed. Actes Sud / Babel (traduit du néerlandais par Annie Kroon) Prix des Lecteurs : Le seigneur des porcheries de Tristan Egolf Ed. Gallimard / Folio (traduit de l'anglais par Rémy Lambrechts) Je n'ai lu La source cachée qu'une seule fois et je me souviens encore avec une précision rare de la première page de ce livre. Le roman s'ouvre sur une description troublante et d'une grande douceur d'un domaine que le narrateur découvre en même temps que nous. Cela a quelque chose de magique et l'on s'attend à tout instant à voir apparaître une fée au détour d'un buisson. Arrivé là pour se débarrasser des vieux fantômes de sa femme, l'homme se laisse envoûter par la présence partout sensible de sa bellemère, jeune femme romantique, tragiquement tourmentée et trop tôt disparue. De jour en jour il repousse le moment de repartir vers son univers cartésien et réglé pour se laisser porter par la magie du lieu. La source cachée est un livre romantique, son écriture est à l'image d'Hella S. Haasse, douce, posée, discrètement brillante et marquante comme un fer dans la mémoire. Quant au Seigneur des porcheries, il fut pour moi une révélation en littérature, c'était la première fois que je me disais consciemment : "un livre peut faire ça". Et "ça" était un sentiment de jouissance explosif, une envie de tout casser, une empathie mémorable avec le héros, laid, mal-aimé, prêt à lever une armée de gueux et de bras cassés détruits par la vie et de foutre le feu à la bêtise, la méchanceté, l'ignorance crasse, la bigoterie,c'est à dire contre tout et tout le monde au final. Juste pour qu'on le laisse enfin en paix. Le roman possède toute l'énergie, toute la violence, toute la rebellion et tout le rire que seul un écrivain de premier plan peut transmettre avec autant de force et ce "trop tôt disparu", cet écorché vif n'aura pas eu le temps de nous laisser grand chose d'autre que cette torche incendiaire contre la connerie humaine. Michel Edo 2000 Prix Lucioles : La fille de l'homme au piano de Timothy Findley Ed. Serpent à Plumes / Folio (traduit de l'anglais par Isabelle Maillet) Prix des Lecteurs : Naufrages d'Akira Yoshimura Ed. Actes Sud / Babel (traduit du japonais par Rose-Marie Makino-Fayolle) 5 2001 Prix Lucioles : Quelques-uns des cent regrets de Philippe Claudel Ed. Balland / Folio Prix des Lecteurs : Derrière la colline de Xavier Hanotte Ed. Belfond / Espace Nord Philippe Claudel écrit la beauté des vies ordinaires, il les magnifie. Elles sont simples et belles. Dans Quelques-uns des cents regrets, un homme revient dans sa ville natale pour assister à l'enterrement de sa mère qu'il a abandonnée seize années plus tôt parce qu'elle refusait de lui révéler l'identité de son père. Quelques-uns des cent regrets est le secret improbable d'une mère qui, par pudeur, par amour, n'a pas osé dire la vérité à son fils, le nom de son père. Ce nom, elle l'a écrit doucement sur un papier fermé « dans une enveloppe blanche, mince, fragile ». Sur cette enveloppe, elle a écrit : « de sa belle écriture maladroite et ronde : voilà ce que tu voulais tant connaître. » L'écriture de Philippe Claudel, patiente, humaine est d'une incroyable beauté. Il donne grâce à la nostalgie et sublime la mélancolie. Elle dit très justement la beauté des vies simples, des non-dits, des retenues, de l'Amour ; elle exalte leur temps. Philippe Claudel écrit des émotions douces. Il écrit la vie, notre vie avec délicatesse et sensualité. Bernard Foltz Le prix Lucioles est le premier prix véritable que j'ai reçu. Lorsque je dis véritable, je veux dire sincère et sans calcul. Le fait qu'il soit décerné par des lecteurs et des fidèles d'une belle librairie est une garantie d'honnêteté, ce qui n'est hélas pas toujours le cas lorsqu'il s'agit des récompenses littéraires et en particulier des plus connues d'entre elles. Chaque livre établit une communauté: initiée par l'auteur, elle rassemble en son sein un nombre plus ou moins important de personnes qui ont en commun le voyage dans le livre lu. En ces temps d'individualisme et d'égoïsme, les livres peuvent jouer ce rôle qui consiste à relier, à unir, à faire dialoguer, et inventer un prix de lecteurs, l'animer, le faire vivre, c'est prolonger les mots écrits, les faire sonner, leur donner une chair et un sang qui bat. Lorsque Quelques-uns des cent regrets avait été couronné par le Prix Lucioles, j'en avais été encore plus particulièrement heureux car ce roman était passé un peu inaperçu à sa sortie. La preuve aussi que ce prix se défie des modes et des engouements médiatiques, mais va chercher des livres abandonnés, secrets, délaissés, pour leur donner une autre chance. Celle d'être découvert et parfois de durer. Chaque fois désormais qu'on me fait dédicacer ce roman, j'ai une petite pensée pour les lecteurs de Lucioles, pour les libraires amis qui font vivre cette belle librairie, pour les bons moments d'échange, et notamment avec Xavier Hanotte, lauréat du 6 prix des lecteurs cette année-là, les sourires, les poignées de main, les verres entrechoqués sous le ciel de Vienne. Merci à toutes et à tous, et que continue donc l'humaine aventure! Philippe Claudel, écrivain 2002 Prix Lucioles : La femme Dieu d'Yves Bichet Ed. Fayard Prix des Lecteurs : Art brut d'Emile Brami Ed. Ecriture Bègue, manchot, pratiquement analphabète, interné avantguerre et vivant depuis quarante ans dans le pavillon de l'hôpital psychiatrique dans lequel il a été « soigné » Emile Lepère -dit « le père Mimile »- « comme Dieu le Père luimême, ce qui n'est pas rien pour un créateur » est une énigme. Emile Lepère peint ; il est devenu un artiste renommé. « Sa folie », grande inspiratrice, est ce cadeau que les dieux lui ont fait pour « lui apprendre à regarder autrement le monde ». L'art Brut du père Mimile n'est pas né et n'a pas évolué par hasard. Il est sa vérité, son unique moyen d'expression ; l'expression figée et silencieuse des traumatismes du Mal. Bernard Foltz 2003 Prix Lucioles : Au sud de la frontière, à l'ouest du soleil d'Haruki Murakami Ed. Belfond / 10.18 (traduit du japonais par Corinne Atlan) Traducteur au Japon de Scott Fitzgerald, John Irving, Raymond Carver, H. Murakami est surtout un immense écrivain, auteur de romans tels que La ballade de l'impossible, Kafka sur le rivage (Prix Lucioles des Lycéens 2007)… En 2002 parait Au sud de la frontière, à l'ouest du soleil, l'occasion de découvrir un petit bijou littéraire. Une situation stable, ancrée dans le quotidien de la vie, une famille apparemment unie ; lorsque l'époux modèle, Hajime, rencontre son premier amour de jeunesse, le roman bascule dans une forme de surréalisme empli de poésie et de fraîcheur. La quête de l'essentiel entre songe et réalité, le lien passionnant entre deux personnages attachants qui se croisent et se décroisent, repoussent toutes les frontières du voyage intérieur dans lequel Murakami nous entraîne avec subtilité… Alain Bélier 7 Prix des Lecteurs : Un ami parfait de Martin Suter Ed. Bourgois / Points (traduit de l'allemand par Olivier Mannoni) Victime d'une agression, Fabio Rossi se réveille à l'hôpital après un trou amnésique de cinquante jours… Commence alors un véritable thriller qui le verra soupçonner son meilleur ami. Et le lecteur, selon une des lois du genre, n'en sait pas plus que le héros lui-même… Au-delà de l'intrigue romanesque, ce qui intéresse surtout l'écrivain suisse allemand Martin Suter, c'est l'exploration de la mémoire dans ses manifestations pathologiques (Alzheimer dans son premier roman Small world, amnésie ici) qui peut déboucher sur une découverte de soi… ou d'un autre soi-même. Comme le dit le docteur Loiseau à Fabio : « En chacun de nous sommeille notre propre contraire. Et presque chacun de nous arrive, à un certain moment de sa vie, au point où il vérifie s'il ne s'agit pas par hasard de sa véritable personnalité. » Pierre Domeyne Prix nouvelles : La brûlure des cordes (Million Dollar Baby) de F.X. Toole Ed. Albin Michel / Livre de Poche (traduit de l'américain par Bernard Cohen) 2004 Prix Lucioles : La douleur de Manfred de Robert Mcliam Wilson Ed.Bourgois / 10.18 (traduit de l'anglais par Brice Matthieussent) Prix des Lecteurs : La part des chiens de Marcus Malte Ed. Zulma / Folio Prix nouvelles : Le meilleur des mondes de Quim Monzo Ed. J. Chambon (traduit du catalan par Edmond Raillard) 2005 Prix Lucioles : Le son de ma voix de Ron Butlin Ed. Quidam (traduit de l'anglais Valérie Morlot) Il s'appelle Morris Magellan, du nom du célèbre navigateur portugais qui le premier, effectua le tour du globe au début du XVIe siècle. Lui n'est pas marin mais cadre dirigeant d'une biscuiterie en Écosse, et il se retrouve un soir lancé sur l'océan tumultueux de la dépression alcoolique. Et il n'est écrit nulle part que tous les Magellan retrouvent un jour leur port d'attache. 8 Le Son de ma voix est le récit bouleversant d'un nostalgique maladif qui ne rêve que de stabilité, d'immuabilité, un personnage superbe qui, ne pouvant empêcher la ronde des saisons de l'éloigner chaque jour un peu plus de son origine, son point de départ, largue les amarres une nuit pour le plus douloureux des voyages sur flots toxiques. François Reynaud Prix des Lecteurs : Le vent qui siffle dans les grues de Lidia Jorge Ed. Métailié (traduit du portugais par Geneviève Leibrich) Milène, le personnage principal est une jeune fille étrange dont les perceptions, d'une lucidité dérangeante, ne peuvent être mises en mots. Les mots qu'elle entend ne sont pas les siens, ils ne disent pas ce qu'elle voit et ressent. Le cousin Jao Paulo a bien essayé de lui faire admettre que pour parler il faut utiliser les mots des autres ! Personne dans cette famille n'aurait donc intérêt à entendre et croire ce que dit Milène ? Quand elle rencontre Antonino Mata et le suit sur le chantier, elle l'aime, ils s'aiment entre terre et ciel bercés par la musique du vent qui siffle dans les grues. Lidia Jorge nous livre un magnifique roman dont le souffle, l'énergie et la poésie continuent de nous habiter bien après la dernière page. Jacqueline Doulcet 2006 Prix Lucioles : La chorale des maîtres bouchers de Louise Erdrich Ed. Albin Michel / Livre de Poche (traduit de l'américain par Isabelle Reinharez) Dans cette grande fresque romanesque, d'une rare maîtrise, Louise Erdrich nous fait vivre trente ans de la vie d'une famille d'immigrés allemands aux États-Unis. Ces Européens, blessés par la Première Guerre mondiale, vont poser les bases d'une nouvelle vie qui leur fera croiser le chemin de personnages aussi étranges qu'attachants. Avec un sens consommé du lyrisme et du pathos, l'auteure nous invite à suivre leurs destinées tourmentées, faites de grands bonheurs mais aussi de tragédies. Elle nous fait ainsi découvrir par le petit bout de la lorgnette -une lorgnette intime et sensible- tout un pan de l'histoire des Etats-Unis. Lionel Mignerot 9 Prix des Lecteurs : Un monde vacillant de Cynthia Ozick Ed. de l'Olivier / Points (traduit de l'américain par Jacqueline Huet et Jean-Pierre Carasso) 2007 Prix Lucioles : La vie rêvée des plantes de Lee Seung-U Ed. Zulma / Folio (traduit du coréen par Choi Mikyung et Jean-Noël Juttet) Un roman qui se lit comme une quête de silence, un chemin vers l'apaisement et la paix intérieure que semble précisément rechercher Kihyon, jeune homme en quête de rédemption et narrateur de cette histoire toute entière bâtie sur la culpabilité qu'il éprouve envers le sort réservé à son frère aîné, Uyhon. Celui-ci, amputé des jambes après avoir sauté sur une mine lors d'un exercice militaire, vit dans l'ombre du jeune homme passionné qu'il était avant l'accident. Alors amateur de photographie clandestine et amoureux d'un jeune fille nommée Yun Sunmi dont la beauté rendra fou de jalousie son petit frère, il vit à présent cloué sur un fauteuil roulant, renfermé sur lui-même dans un silence qui le confine, semble-t-il, à des années lumière du passé joyeux et prometteur qui fut sien. François Reynaud Prix des Lecteurs : Samedi de Ian McEwan Ed. Gallimard / Folio (traduit de l'anglais par France Camus-Pichon) Samedi est un jour ordinaire dans la vie du neurochirurgien Henry Perowne : le rituel des courses, la visite à sa vieille mère en maison de retraite, la partie de squash avec un ami… Et, soudain, voici que tout bascule à la suite d'un banal accrochage automobile. La violence surgit dans le quotidien d'une vie familiale bien réglée… Ce roman d'un des plus grands écrivains anglais actuels (Expiation, Sur la plage de chesil) peut se lire comme un thriller, mais aussi bien comme une réflexion sur la fragilité de nos vies, sur le fonctionnement du cerveau ou sur le chaos de la société occidentale. Pierre Domeyne Prix Nouvelles : Un sentiment d'abandon de Christopher Coake Ed. Albin Michel / Livre de poche (traduit de l'américain par Michel Lederer) 10 2008 Prix Lucioles : Blessés de Percival Everett Ed. Actes Sud / Babel (traduit de l'anglais par Anne-Laure Tissut) Le traducteur est un solitaire. Absorbé dans le texte jusqu'à la remise de sa version, il ne revoit le jour qu'avec elle. Pourtant, invitée à Vienne par la librairie Lucioles avec l'auteur américain Percival Everett, dont le roman Blessés s'était vu décerner le prix Lucioles 2007, j'ai découvert une communauté de lecteurs soudée autour de libraires fiables et généreux, qui œuvrent à transmettre leurs passions. La sincérité de l'échange et sa finesse, entre un public ému de rencontrer l'auteur d'une œuvre pour eux inédite, et le dit-auteur, peu accoutumé, dans son pays, à réaction si subtile à son art, m'ont fait comprendre la nature commune de notre entreprise : auteurs, libraires et traducteurs sommes des passeurs, mus par l'élan du partage. La librairie de Vienne est de ces lucioles dont la survivance, George Didi-Huberman il y a peu l'a souligné, importe tant, luisance persistante, rassurante dans un paysage toujours menacé d'être gagné par les ténèbres. Anne-Laure Tissut, traductrice Prix des Lecteurs : A moi pour toujours de Laura Kasischke Ed. Bourgois / Livre de poche (traduit de l'anglais par Anne Wicke) Prix Nouvelles : Déjeuner de famille de John Cheever Ed. Losfeld (traduit de l'américain par Dominique Mainard et Florence Levy-Paoloni) 2009 Prix Lucioles : La chambre de Mariana de Aharon Appelfeld Ed. de l'Olivier / Points (traduit de l'hébreu par Valérie Zenatti) Dès les premières lignes, le lecteur est saisi par un rythme, une douceur, par ce que l'auteur, le grand écrivain israëlien Aharon Appelfeld, appelle « la musique des mots simples » qui, dit-il, le conduit vers les visions de son enfance. C'est bien de l'enfance qu'il s'agit ici, en effet, sur fond de deuxième guerre mondiale. Fuyant avec sa mère le ghetto et la menace de la déportation, Hugo, jeune garçon d'une dizaine d'années, est confié à une femme, Mariana, qui travaille dans une maison close. Commence alors pour lui une drôle de vie dans un réduit glacial qu'il ne doit quitter sous aucun prétexte… Appelfeld, qui avait l'âge de Hugo lorsqu'il s'évada du camp de Transnitrie, en 1942, est tout entier dans cette histoire initiatique racontée avec une grande simplicité, sans pathos ni didactisme. Dans ce très beau roman, Appelfeld maîtrise totalement l'art du non-dit : tout se lit, et se dit, à travers un rai de lumière, une branche d'arbre qui bourgeonne, un morceau de fromage ranci au fond d'une valise, une émotion dans un corps qui s'éveille, un éclat de voix inquiétant dans la chambre d'à côté… Pierre Domeyne 11 Prix des Lecteurs : Dans les veines ce fleuve d'argent de Dario Franceschini Ed. de l'Arpenteur / Folio (traduit de l'italien par Chantal Moiroud) Prix Nouvelles : Bic et autres shorts de Vitaliano Trevisan Ed. Verdier (traduit de l'italien par Jean-Luc Defromont) Les nouvelles de ce recueil révèlent un monde intérieur et une tentative de saisir ces impressions fugaces qui s'estompent à peine essaye-t-on de les nommer. Le langage est au cœur de ce livre bâti sur une cinquantaine de récits très brefs, mettant en scène tantôt un sentiment, une action et tantôt un souvenir, une vie passée. Entre conte philosophique et récit intimiste, Trevisan rend compte du déracinement, de la solitude, du travail, des impasses du monde moderne. La forme est musicale, rythmée, scandée. Le terme « short » est directement lié à la musique puisqu'il désignait, dans les années quarante, ces courts métrages qui présentaient des morceaux de jazz. On retrouve dans ces textes ce mélange de construction rigoureuse et de liberté aventureuse, d'improvisation libre. Renaud Junillon 2010 Prix Lucioles : Terre des affranchis de Liliana Lazar Ed. Gaïa / Babel Recevoir un prix littéraire pour son premier roman est gratifiant et encourageant. Le livre échappe à son auteur dès son édition et grandit grâce au soutien des lecteurs. Et si les prix des lecteurs sont une reconnaissance du public, un prix des libraires comme le Prix Lucioles est une reconnaissance des professionnels du livre. Car les libraires ne sont pas des lecteurs comme les autres. A chaque fois que l'un d'entre eux me confie avoir recommandé mon livre, j'ai le sentiment d'avoir reçu un nouveau prix. Terre des Affranchis doit son succès à tous ces professionnels qui l'accompagnent depuis plus d'une année. Liliana Lazar, écrivain Prix des Lecteurs : Julius Winsome de Gerard Donovan Ed Seuil /Points (traduit de l'anglais par Georges-Michel Sarotte) Prix Nouvelles : Le koala tueur de Kenneth Cook Ed. Autrement (traduit de l'anglais par Mireille Vignol) 12 pour nous contacter : tél. 04.74.85.53.08 / fax. 04.74.85.27.52 / [email protected] Retrouvez-nous sur : www.librairielucioles.fr La librairie Lucioles fait partie du groupement de libraires indépendants Initiales et de l'Association des Librairies Spécialisées Jeunesse (A.L.S.J.) : pour tout renseignement, connectez-vous à www.initiales.org et www.alsj.citrouille.net Cette plaquette a été réalisée avec le concours de la DRAC et de la région Rhône-Alpes. Imprimerie de la Tour - 38200 Seyssuel 13, place du palais - 38200 Vienne