aune comme la couleur du soleil, son éclat et sa chaleur. Couleur

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aune comme la couleur du soleil, son éclat et sa chaleur. Couleur
J
aune comme la couleur du soleil, son éclat et sa chaleur. Couleur qui, par ailleurs,
symbolise dans notre culture judéo-chrétienne, la mauvaise réputation, le déviant ou le
traître. Couleur ambiguë, donc, le jaune est, selon les peuples et les époques, l’attribut
des dieux ou le signe de l’exclusion.
L’obtention de pigments jaunes est extrêmement variée, en fonction des
lieux et des époques. L’ocre jaune fait certainement partie des plus
anciens, il accompagne fidèlement l’homme dans son histoire depuis le
Néolithique. Liée à de la gomme d’acacia, de la cire, du jaune d’œuf ou
du suc d’orchidée sauvage, l’ocre jaune sera utilisé avant tout pour
évoquer l’astre solaire. Dès le milieu du III e millénaire, les Egyptiens
L’orpiment
recherchent d’autres pigments jaunes. Ils découvrent l’ orpiment pigment naturel dérivé de l’arsenic- et le jaune de Naples, obtenu par
calcination de plomb et d’oxyde d’antimoine. L’usage de l’orpiment est
très apprécié jusqu’au XIX e siècle, où il est interdit et remplacé par un
colorant synthétique, le jaune de cadmium. Employé dans les verreries
mésopotamiennes et égyptiennes, le Jaune de Naples a, quant à lui, été
abandonné à l’Antiquité pour réapparaitre au Moyen Age. Les capacités
tinctoriales des plantes ont aussi été exploitées, notamment la gaude,
utilisée dès le Moyen Age dans toute l’Europe jusqu’à l’Afrique du
Nord. Elle était moins onéreuse que le safran. En effet, pour avoir des
teintes d’un jaune éclatant, on utilise depuis très longtemps le safran ,
extrait du pistil du crocus. Mais la récolte du crocus est laborieuse, il faut
ensuite sécher les stigmates minuscules du pistil. Le safran est donc une
Le safran, extrait du crocus
denrée de luxe. On a donc cherché à imiter son effet avec le curcuma, le
carthame ou encore les stigmates de maïs. Mais la couleur du safran
étant irremplaçable, les safranières se multiplièrent en France, au début
du XXe siècle, d’où il fut exporté dans le reste de l’Europe.
Les Grecs et les Romains font fréquemment usage du jaune. Les étoffes
teintes au safran habillent les muses et les prêtres. Cette couleur sera
portée par les jeunes romaines, lors des cérémonies de mariage. En
Orient, par contre, le jaune remplace le rouge d’Occident. Il incarne le
pouvoir des Empereurs chinois, du Bouddha et revêt les soldats de
l’armée de l’Empire du Soleil Levant.
Ce fragment de rouleau impérial chinois remonte
au règne de l’Empereur Qianlong (XVIIIe siècle)
C’est à partir du début du Moyen Age que l’Occident dénigre
cette couleur. C’est l’or qui est utilisé pour représenter la
lumière, la puissance divine et le soleil. L’or donnera un
caractère sacré aux mosaïques byzantines et un caractère
luxueux à la peinture de la fin du XIX e siècle et du début du
XXe siècle.
Cette peinture de G. KLIMT représente Danae (1907)
que Zeus séduit sous la forme d’une pluie d’or.
Le jaune devient donc la couleur de l’infamie. La maison des
faux-monnayeurs est peinte en jaune, les chevaliers félons
reçoivent des vêtements jaunes, les hérétiques sont habillés
de jaune. Dans toutes les peintures médiévales et de la
Renaissance, Judas est reconnaissable, à sa toge jaune. C’est
lui qui transmet sa couleur symbolique à l’ensemble de la
communauté juive. Puis, à partir du XIII e siècle, les conciles
chrétiens imposent que les Juifs portent un signe distinctif,
la rouelle, qui sera remplacée par l’étoile jaune de David.
GIOTTO, Le baiser de Judas, chapelle de Padoue
(XIVe siècle)
Gauche : Détail d’une enluminure (sorcière), XIIIe siècle
Droite : Détail d’une aquarelle (juif de Worms), XVIe siècle
Au XIXe siècle, faisant partie des couleurs primaires, le jaune gagne en importance et perd légèrement sa
connotation péjorative. Sous l’Empire, il redevient à la mode et on l’utilise pour des décorations riches, vives
et stimulantes. Mais il gardera à jamais les marques de son discrédit.