Chapitre IV L`impossible restauration (1815

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Chapitre IV L`impossible restauration (1815
INTRODUCTION A L’HISTOIRE DES RELATIONS INTERNATIONALES – LE MARS
Chapitre IV
L’impossible
restauration (1815-1848)
INTRODUCTION – LE XIXE SIECLE
La première partie du XIXe siècle se distingue par divers traits :
La gestion de l’héritage révolutionnaire. Ce dernier est multiforme : idées,
nouvelle carte européenne, le réveil du nationalisme de certaines régions, mais
aussi gestion politique de cet héritage par une tentative de restauration contrerévolutionnaire. Ainsi, en France, une monarchie est mise en place, le roi est
Louis XVIII, frère cadet de Louis XVI. Mais dès le début cette restauration
n’est pas complète : Louis XVIII doit accepter l’octroi d’une charte, avec des
élections, un parlement, sur la base d’un suffrage très réduit.
L’essor des nationalités : Italie, Allemagne, nationalités des empires… bougent
tout au long du siècle.
Le romantisme, qui a pu soutenir à la fois la restauration, l’essor des nationalités
et, après 1848 surtout, même la démocratie.
Les progrès de la science : tout au long du XIXe siècle, la science permet des
avancées jusqu’alors inimaginables. Accompagne l’industrialisation de l’Europe
de l’Ouest, des États-Unis. A des conséquences sur le fait religieux (épopée de
Gilgamesh : récit du déluge antérieur à la Bible) et l’essor du positivisme, mais
aussi sur le domaine des idées.
Le XIXe siècle est aussi le siècle de l’essor des idéologies : autour de Hegel,
Marx, du socialisme utopique, nationalisme, libéralisme… La réflexion sur la
question sociale est importante.
L’Europe continue de découvrir le reste du monde, en est, jusqu’en 1919, le
centre.
I. L’EUROPE DE LA SAINTE ALLIANCE
Congrès de Vienne : septembre 1814-juin 1815. Le but est d’affaiblir la France sans trop
la diminuer et de répondre aux ambitions rivales des vainqueurs. Le Congrès ne prend aucun
compte des aspirations nationales. Volonté de réaction : revenir sur la Révolution française par
une restauration de l’ancien régime. La traduction internationale de cette volonté de Réaction est
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la « Sainte Alliance » : maintenir les trônes, assistance mutuelle des princes contre les tentatives
révolutionnaires. Le penseur de ce système est le chancelier autrichien Metternich. Le système
fonctionne jusqu’en 1823 et se gâte par la suite.
1. L’action du Congrès de Vienne
Idée de reconstruction :
Tourmente révolutionnaire a détruit les cadres territoriaux et les structures
sociales de l’Europe,
Une Restauration pure et simple de l’ordre d’avant-1789 semble impossible car :
Révolution et Empire ont fait naître en Europe des États modernes
dont l’efficacité est bien meilleure que celle des entités antérieures,
Émergence du principe de nationalité, d’abord contre les Français,
désormais risque de se retourner contre les Monarchies réactionnaires,
Les souverains
territoriales.
vainqueurs
espèrent
engranger
des
conquêtes
Les décisions du Congrès de Vienne sont prises essentiellement par quatre hommes : le
tsar Alexandre, Metternich, Castlereagh (Foreign Office), et le représentant prussien Hardenberg.
Opposition entre Russie et Angleterre : la première rêve d’un ordre européen qu’elle pourrait
dominer, l’Angleterre entend assurer son hégémonie dans le domaine maritime, impliquant la
notion d’équilibre européen. La Prusse soutient la Russie, l’Autriche l’Angleterre. Le Français
Talleyrand évite à son pays de faire trop les frais de ces rivalités entre vainqueurs.
Le Congrès de Vienne forge une nouvelle carte de l’Europe, l’Angleterre ayant
globalement imposé ses vues avec quelques concessions aux Russes et Prussiens :
Un grand royaume des Pays-Bas est créé (équivalent des Pays-Bas et de la
Belgique) pour mettre Anvers à l’abri de la puissance française,
L’Angleterre obtient Helgoland(île au large du Danemark et de l’Allemagne), et
des points d’appui coloniaux : Guyane, Antilles, Maltes, les îles Ioniennes, Le
Cap, Ceylan, île Maurice.
Russie : Finlande est enlevée à la Suède (qui obtient la Norvège), ce qui permet
au tsar de contrôler la Baltique, annexion de la Bessarabie (lui permet de se
rapprocher des Détroits, aujourd’hui Moldavie et Ukraine), les deux tiers de la
Pologne dont Varsovie.
Prusse : Poméranie, Posen, partie de la Saxe, annexion de la plus grande partie
de l’Allemagne rhénane. Elle est désormais une grande puissance à part entière.
Autriche devient la clé de voûte de ce nouvel ordre européen : renonce à des
possession trop éloignées du cœur de son territoire (Belgique, enclaves
allemandes). Regroupe géographiquement son territoire : Tyrol, Lombardie,
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Venise, Dalmatie : bloc compact dominant partie sud de l’Europe centrale et
l’Adriatique. L’empereur d’Autriche préside la Confédération germanique,
reliquat du Saint Empire dissout.
France perd ses conquêtes révolutionnaires et impériales. Prusse n’a pu réaliser
son abaissement, Angleterre et Russie n’en voulant pas. Mais doit payer une
lourde indemnité de guerre, occupation militaire jusqu’en 1818. Est entourée
d’États-tampons : Pays-Bas, Prusse rhénane, Confédération helvétique,
Royaume du Piémont. La diplomatie française ne peut désormais avoir pour
but que la destruction de l’ordre du Congrès de Vienne.
La France utilise alors l’argument des « nationalités brimées » : Schleswig allemand est
incorporé au Danemark, Belges catholiques soumis à un roi protestant, Norvégiens deviennent
suédois sans être consultés, peuples chrétiens des Balkans sous autorité du sultan ottoman,
Pologne, Italie… Cette dernière reste morcelée, sous domination autrichienne.
Le Congrès de Vienne assure à l’Europe 40 ans de paix, jusqu’en 1848 et la mise en place
quelques années plus tard du Second Empire en France. Mais la volonté d’ignorer les nationalités
est à l’origine de multiples secousses (1830, 1848, etc).
Cet ordre européen est contre-révolutionnaire :
La Russie reste un pays fondé sur le servage, où la parole du tsar tient lieu de
loi : régime qui reste absolutiste. Développement de sociétés secrètes, autour
d’officiers et intellectuels qui aimeraient importer certaines idées politiques de la
Révolution française, prônant développement de l’instruction du peuple, fin du
servage, etc. D’où, à la mort du tsar Alexandre en 1825, une agitation
révolutionnaire se développe mais est rapidement et brutalement réprimée.
Cependant, Russie tend à s’isoler hors de l’Europe, considérée comme ayant
civilisation différente.
L’Autriche : garante de la pérennité de l’ordre européen. Metternich raisonne
comme au XVIIIe siècle, en termes d’équilibre européen. Se défie des idées
révolutionnaires et du romantisme. Respect tradition. Préserver l’ordre social
existant. Correspond aux intérêts du royaume : éviter toute remise en cause de
l’ordre européen par le principe des nationalités, qui affaiblirait l’Autriche,
composée de nombreuses nationalités. Allemands, Magyars, Slaves (Slovaques,
Croates, Serbes), Roumains. Entraîne administration lourde et complexe, pas de
contrôle du pouvoir par système représentatif. Large place à l’arbitraire.
Décisions prises par l’Empereur qui choisit ses conseillers. Inertie
administrative. Autonomie des provinces. Le tout débouche sur un régime
anarchique tempéré par un despotisme policier.
Allemagne : Metternich entrave toute proposition d’unification, même vague,
de l’Allemagne. 38 États sont réunis dans une vague Confédération germanique.
Diète à Francfort, présidée par l’Autriche, sans ressources propres. Autriche
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impose ses décisions. Prusse y joue le rôle le plus réactionnaire. Absolutisme
centralisateur de Frédéric-Guillaume III (1797-1840). Allemagne du Sud :
bourgeoisie émergente, oasis libérale, avec octroi de constitutions et suffrage
censitaire. Professeurs, fonctionnaires et étudiants font émerger l’idée d’une
unité allemande, liée à des revendications libérales.
Italie : les souverains des sept royaumes italiens mettent en œuvre une vive
politique réactionnaire. En conséquence, association du libéralisme et de l’unité.
Autriche influence prédominante, suscite cette politique de réaction. Police
omniprésente, peu de corps représentatifs. Forte réaction également dans l’État
le plus indépendant de l’Autriche : le Piémont-Sardaigne, cœur de la future
unité. Toutes les lois inspirées par la Révolution sont annulées. Réaction forte
également dans les États du Pape (renvoi des Juifs dans leurs ghettos). Ailleurs,
politique réactionnaire est mâtinée d’une politique de conciliation (Les DeuxSiciles).
Europe de l’Ouest : comme dans l’Allemagne du Sud et en Italie, la Bourgeoisie
est suffisamment influente pour entraver la réaction. Angleterre industrialisée et
dont le régime n’est plus depuis longtemps absolu : impossible retour à l’ordre
du XVIIIe siècle. Les conservateurs qui se sont imposés pendant les guerres
impériales, qui ont fait voter les Corn Laws qui engendrent renchérissement du
coût du pain sont contestés, doivent réprimer la contestation qui se développe
de 1815 à 1822. Mais ont l’intelligence d’introduire au gouvernement des
réformateur à partir de 1822 (Canning) : Angleterre prend alors ses distances
avec la Contre-Révolution et l’ordre du Congrès de Vienne, première faille dans
le système de Metternich.
2. La Sainte Alliance
Ambiance contre-révolutionnaire se traduit par la Sainte Alliance. Tentative
d’organisation d’un concert contre-révolutionnaire entre les souverains européens de 1815 à
1823. Trois démarches différentes :
Traité de la Sainte-Alliance : 26 septembre 1815, à l’initiative du tsar Alexandre :
tsar, Prusse et Autriche. Rester uni, faire triompher principes chrétiens sur la
Révolution. Traduction concrète de ce traité :
Pacte de Chaumont du 20 novembre 1815 : réunions régulières des vainqueurs
de Napoléon pour éviter reprise révolutionnaire en France. Série de Congrès de
1818 à 1822.
Metternich impose idée selon laquelle le premier principe de la Sainte Alliance
est « le maintien de toutes les institutions existant légalement » : système
Metternich : implique intervention militaire d’une Puissance en cas de
mouvement révolutionnaire. Va bien au-delà de la France.
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En 1818, la France des Bourbons restaurés est intégrée à ce système de Sainte Alliance.
Les congrès suivants permettent répression d’un mouvement libérale se développant en
Allemagne du Sud qui permet à l’Autriche d’imposer épuration universitaire, arrestations
d’intellectuels, censure de la presse en Allemagne du Sud. En 1820, intervention à Naples ou le
frère du roi d’Espagne est renversé, pour le rétablir. Soutien autrichien à une intervention
militaire française (Chateaubriand) en Espagne pour soutenir la monarchie espagnole bourbon
qui vacille à cause d’un mouvement libéral et de la perte des colonies sud-américaines.
Cette intervention provoque la méfiance des Britanniques. France prête à rétablir autorité
espagnole en Amérique du Sud : veto anglais, soutenu par les États-Unis (doctrine Monroe). La
Sainte Alliance a vécu. Cette faille ouvre la voie aux mouvements nationaux et libéraux.
II. LA REPRISE DE L’EXPANSION COLONIALE EUROPEENNE
Indépendance des colonies espagnoles et portugaises d’Amérique latine de 1818 à 1824.
Colonialisme ancien, mercantiliste et esclavagiste, est attaqué en Europe pour des raisons
humanitaires et économiques. Expansion européenne reprend, d’un caractère modéré sur la
période étudiée pour le moment (Inde et Algérie). Traite des Noirs est interdite par l’Angleterre
en 1807 et confirmée par le Congrès de Vienne en 1815. Première vague de décolonisation, à
l’exception d’Haïti, ne concerne cependant que des colons européens. Esclavage est
progressivement aboli : 1833 dans les colonies britanniques, 1848 dans les colonies françaises
(seconde abolition : celle de la Révolution a été annulée par Napoléon). Il y a aussi des raisons
économiques à ce recul du colonialisme : paix et accroissement des échanges internationaux
semblent désormais plus importants que le colonialisme, qui crée des entraves à ces échanges.
Déclaration Monroe en 1823 semble confirmer désuétude du colonialisme, en tout cas en
Amérique.
Angleterre : possède Canada, possessions en Amérique du Sud et dans les Antilles
(Honduras et îles), possessions en Afrique occidentale, Inde, Australie (colonie pénitentiaire).
Politique coloniale n’est pas cohérente, mais par le biais de fonctionnaires coloniaux, de
marchands, de missionnaires, de sociétés d’émigration, des initiatives locales sont prises
agrandissant cet empire, avalisées après coup par le Parlement et le gouvernement : Nouvelle
Zélande (1840), développement de comptoirs en véritables colonies en Afrique occidentale,
extension de l’Afrique du Sud, extension des possessions indiennes, acquisition de Singapour
(relations commerciales avec la Chine et la Malaisie) et Hong-Kong (première guerre de l’opium
en 1842).
Libéralisation du commerce colonial, fin du régime de l’Exclusif. Abolition de l’esclavage
suivie d’une politique de lutte contre la traite clandestine. Politique d’administration plus libérale
dans les colonies « blanches » (Canada, Océanie). Différent en Inde : reste gérée par une
compagnie commerciale, la « Compagnie des Indes orientales », dont les privilèges sont pour
partie abolis en 1833, mais qui garde la main sur l’administration jusqu’en 1858. Mais ruine
commerciale de l’artisanat indien par la vente de produits industriels britanniques.
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En France : perd presque entièrement son premier empire colonial lors des guerres
franco-britanniques de Louis XV à Napoléon (Canada, territoires en Inde). Reste des îles et des
comptoirs en 1815 : Saint-Pierre-et-Miquelon, Martinique, Guadeloupe, Guyane, Réunion,
comptoirs sénégalais (Gorée et Saint-Louis), comptoirs indiens (Pondichéry, Chandernagor, etc).
Interdiction de la traite des Noirs, déclin économique des Antilles : l’ancien colonialisme
mercantiliste décline. La reprise de la conquête se fait sous Charles X (1824 à 1830), qui, quelques
jours avant sa chute, envoie une expédition militaire s’emparer d’Alger en juillet 1830. Algérie est
alors État vassal des Ottomans. Le but français est d’abord un but de politique intérieure :
opposition vive contre la Restauration, veut atténuer cette opposition par une conquête
victorieuse, c’est un échec : le régime chute à la fin de juillet 1830. Il n’y avait pas d’intention de
conquête systématique de l’Algérie. Cette dernière va se faire progressivement, par la Monarchie
de Juillet (Louis-Philippe 1830-1848). Occupation restreinte des zones côtières. Puis résistance
d’Abd el-Kader, avec défaites, massacres de colons, et, du coup, en 1840-1847, occupation
presque complète du pays. Capture d’Abd-el Kader puis fin de la colonisation dans les années qui
suivent. Rare exemple français de tentative de colonie de peuplement. Installation de colons
européens. Sans plan d’ensemble cohérent. À partir de 1843, le plan de colonisation est plus
méthodique encore.
Hors Algérie, politique coloniale française est particulièrement prudente : comptoirs en
Afrique occidentale (Côte d’Ivoire, Gabon), océan indien (Madagascar, Mayotte) et Pacifique
(Tahiti). Immobilisme dans les vieilles colonies. Pas de libéralisation du commerce colonial.
Politique plus libérale de 1848 à 1851 : abolition de l’esclavage, représentants de la
République élus par les colonies, etc. Acquisition des droits civiques chez les anciens esclaves
reste cependant purement théorique. En Algérie, transformée en trois départements, seuls les
colons français peuvent voter, exclusion des Musulmans et des Juifs.
III. LA QUESTION DES NATIONALITES
Après la rupture du système Metternich, l’Europe connaît une vague révolutionnaire, se
manifestant par une transformation partielle de la carte européenne et par un changement de
régime en France. L’Allemagne, l’Italie et la Pologne connaissent cependant de durs échecs
menant en 1833 à un pacte solennel des puissances proclamant leur volonté de secourir tout
souverain légitime menacé par des courants libéraux et nationaux.
1. La question d’Orient
L’empire Ottoman est en déclin, annoncé depuis la fin du XVIIIe siècle, continué dans la
première moitié du XIXe. Constantinople arrive de mois en mois à faire respecter son autorité sur
un territoire couvrant l’Asie mineure, le Moyen-Orient, l’Afrique du Nord et les Balkans.
Désordre des finances, administration désorganisée, gouverneurs locaux tentés par la sécession,
etc.
Puissances européennes rêvent de cette décadence : la Russie veut les Détroits, France
conquiert l’Algérie et étend son influence en Syrie et en Égypte, l’Autriche aimerait dominer
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l’ensemble du Danube. L’Égypte, dirigée par Méhémet Ali devient très largement autonome et
déstabilise encore l’Empire ottoman.
À partir de 1821, la Grèce entre en révolte et obtient son indépendance en 1829.
L’Égypte envahit alors la Syrie en 1831 et déstabilise la Méditerranée orientale. Égypte obtient en
1833 la Syrie, le tsar obtient la fermeture des Détroits en cas de guerre. Reprise de la guerre en
1839 : or, cette fois, l’Égypte est soutenue par la France contre les autres puissances européennes
et la guerre en Europe menace. France finit par reculer. Mais la question d’Orient est
déstabilisatrice pour l’ordre européen. Mais la question des nationalités se développe d’abord en
Europe.
2. L’éveil des « nationalités » européennes
Deux sources à ce mouvement : la Révolution française (communauté nationale formée
de citoyens, détentrice de la souveraineté contre le sujet fidèle au roi par amour de la Patrie).
Entraîne la proclamation du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Elle a aussi suscité une
réaction contre elle dans les territoires qu’elle a soumis, puis sous l’Empire.
Mais ce mouvement des nationalités s’inspire également d’une philosophie politique
s’inspirant du retour aux traditions : en Allemagne, intellectuels estiment que la nation est une
réalité vivante, plongeant ses racines dans le passé de la communauté germanique (importance de
l’État : cf. Hegel). Dans d’autres régions, on fait appel à la notion de défense de la langue :
Bohême, Hongrie, Croatie, Pologne, Balkans. La religion est importante (Pologne).
Se traduit par une agitation qui connaît des poussées importantes et voit de nouveaux
États émerger.
Peuples chrétiens des Balkans : 1804-1829 agitation constante en Serbie, qui
aboutit à l’octroi d’une autonomie importante.
Indépendance de la Grèce en 1829, s’inspire des révoltes serbes notamment.
Aussi d’une nouvelle puissance économique en Méditerranée orientale
(armateurs et commerçants grecs : émergence d’une bourgeoisie). Parallèlement,
mise en valeurs de la langue et culture grecque. Guerre se développe de 1820 à
1829, enflamme l’Europe romantique (Byron qui y meurt, Hugo, Delacroix).
Indépendance est liée à l’intervention du tsar contre l’Empire en faveur des
Grecs. Angleterre et France soutiennent.
Indépendance grecque est un tournant : des membres de la Sainte Alliance sont
intervenus en faveur d’un mouvement national.
Début d’un mouvement fort des nationalités. Les premières victimes en sont les
Bourbons français, mais ce mouvement est, à l’exception de la France et de la Belgique, un échec.
3. La révolution de 1830
Juillet 1830, Trois glorieuses : chute de la Restauration, mise en place d’un
régime plus libéral, la Monarchie de Juillet
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Royaume des Pays-Bas : religions, langues et intérêts économiques divergents.
Partie belge (néerlandophone et francophone, mais catholique) contre politique
économique libérale du royaume. Entraîne un mouvement revendicatif.
Industriels wallons (sidérurgie) demande une protection économique. Annonce
de la révolution française transforme mécontentement en révolution. SainteAlliance refuse d’intervenir, (Russie entravée par la révolte polonaise). En 1830,
la Belgique est indépendante, grâce à l’accord de l’Angleterre et de la France.
Révolte polonaise : Russie veut aider la Belgique, lève des troupes en Pologne,
entraîne une insurrection, qui dure plusieurs années. Indépendance proclamée
en 1831. Répression terrible, régime militaire, exécutions, déportations en
Sibérie, etc. Pas d’intervention : Prusse et Autriche craignent pour leur propre
partie de la Pologne, France et Angleterre soutiennent les Polonais, mais
n’interviennent pas.
Italie et Allemagne : agitation en 1830 et 1831. Très vite réprimé par
Metternich.
Mouvement qui pousse Prusse, Autriche et Russie à renouveler la Sainte Alliance :
septembre 1833 : proclament leur droit de secourir tout souverain légitime qui ferait appel à leur
concours.
France et Angleterre, d’un autre côté, s’emploie à favoriser mise en place monarchie
constitutionnelle au Portugal et en Espagne. Sainte Alliance, ainsi, n’a pas réussi à entraver une
poussée des mouvements nationaux. Mais la fièvre révolutionnaire de 1830 n’est qu’un prélude à
celle, d’une autre ampleur, de 1848.
IV. LE PRINTEMPS DES PEUPLES
Idées révolutionnaires et nationales fermentent. Crise économique de 1844 à 1848 les
favorise. Entraîne notamment la chute du garant de l’ordre de Vienne : Metternich. Prusse et
Autriche sont rivales dans le cadre de l’aspiration de l’unité allemande.
1. Origines du mouvement révolutionnaire
Autriche : retard industriel et commercial sur la France et l’Angleterre.
Bourgeoisie moins développée mais revendicative. Demande Constitution,
appuyée par les centres urbains et les étudiants. Metternich s’y oppose, et
bénéficie de l’appui de la police, de la noblesse, de l'administration, du clergé. À
l’extérieur, position diplomatique forte grâce au soutien sans faille de la Russie.
Mais le problème est intérieur : 27 millions d’habitants, dont seulement 8
millions d’Allemands.
Hongrie revendique autonomie, ciment de sa revendication étant la langue,
autour d’une opposition économique, politique nationale. Nationalisme
hongrois s’oppose à l’émancipation des Slaves d’Autriche.
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Sentiment national pressent chez les Slaves. Renaissance nationale tchèque,
développement de la langue dans les années 1840.
Allemagne : Confédération germanique, milieux intellectuels et bourgeois
s’opposent à domination autrichienne. Aspirations libérales. Philosophie
d’Hegel. Par contre, unité économique a progressé : Zollverein. Renforce le roi de
Prusse : question nationale se double d’une rivalité austro-prussienne.
Italie : 7 États sans liens fédéraux. Deux d’entre-eux sont hors de la domination
autrichienne : le Piémont-Sardaigne et les États papaux. Tous les États sont des
régimes absolutistes. Pas de représentation. Opposition se retrouve dans le
Risorgimento après 1830. Mouvement intellectuel anti-autrichien et libéral, mais
fortement divisé. Émergence de grandes figures (Mazzini, républicain et
jacobin). D’autres prônens une fédération sous présidence du pape. 1846 :
nouveau Pape, Pie IX, réforme ses États dans un sens libéral est suivi par le roi
de Piémont et le grand-duc de Toscane.
Éclate alors à Palerme une révolte qui inaugure une vague révolutionnaire, le « Printemps
des Peuples ». Elle est suivie à Paris d’une révolution parisienne de très grande portée (fin de la
monarchie de Juillet, début de la IIe République et par la suite le chemin vers le Second Empire).
2. La vague révolutionnaire
Autriche (mars-octobre 1848)
Double phénomène : révolution libérale et revendications nationales chez les minorités.
Éclate en mars 1848. Metternich doit partir. L’Empereur accorde des réformes : Constitution
octroyée en avril, émeutes continuent en mai pour demander suffrage universel. Un Parlement
constituant est convoqué.
Triomphe des libéraux à Vienne encourage revendications nationales en Bohême et
Hongrie. À partir d’avril 1848, Tchèques demandent une autonomie (pas d’indépendance). Mars :
Magyars demandent un gouvernement séparé. Se dote d’une constitution, d’un gouvernement et
d’une capitale (Pest). Mais Honrgie refuse d’accorder des droits aux minorités slaves et latines :
Croates, Roumains et Serbes s’agitent. Ces minorités protestent à Vienne, qui peut reprendre
l’initiative. Un gouverneur autrichien est envoyé en Hongrie en septembre 1848, massacré par la
foule. Tentative de répression par Vienne en octobre, qui se traduit par une émeute à Vienne
même : la Cour doit fuir la ville, l’Empire est menacé de dislocation.
Italie
Recrudescence d’une effervescence commencée dans les mois qui précèdent, à l’annonce
de la révolution française de février 1848. Puis annonce de la démission de Metternich. Milan :
Cinq jours en mai 1848 : émeutes, retrait des troupes autrichiennes de Vénétie. Princes protégés
par l’Autriche doivent fuir. Piémont-Sardaigne déclare alors la guerre à l’Autriche, pour tenter
d’unifier l’Italie. Envahit le Piémont, soutenu par des patriotes italiens. Mais Pape refuse de
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joindre le mouvement national, du coup affaibli. En mai cependant, la Lombardie est délivrée de
l’occupation autrichienne.
Allemagne
Mouvement libéral et national. Du Sud vers le Nord, manifestations se développent dans
la mouvance de la révolution parisienne de février 1848. Manifestations en Prusse. Roi FrédéricGuillaume IV promet alors l’élection d’une assemblée constituante au suffrage universel, qui se
réunit fin mai. Parallèlement une assemblée auto-constituée se réunissant à Francfort
(Vorparlament) demande l’unité allemande et la réunion d’une assemblée constituante (suffrage
presque universel). Nouvelle assemblée est élue et se réunit à Francfort. Un Gouvernement est
mis en place, sous direction d’un archiduc Habsbourg Jean.
Après phase d’agitation, phase de reflux :
3. L’arrivée de l’automne
Autriche
Va devoir son salut à la fidélité de l’armée. Dès juin 1848, une dictature militaire est mise
en place à Prague. En octobre 1848, quand la situation se dégrade : Vienne est reprise le 1er
novembre, les représailles sont sanglantes : un député du Parlement de Francfort est même
fusillé. Le nouveau Chancelier, Schwarzenberg, force l’abdication de Ferdinand, qui a octroyé une
Constitution, qui est remplacé par François-Joseph, âgé de 18 ans. Nouvelle Constitution est
octroyée en 1849, s’appliquant également à la Hongrie et à la Lombardie : Parlement élu à un
suffrage restreint, avec des pouvoirs restreints. Constitution temporaire : en décembre 1851 :
nouveau régime la rend de fait caduque. Institutions sont centralisées, unité politique et
économique du pays est centralisée. La monarchie est renforcée. En 1849, avec l’aide du tsar, la
Hongrie est violemment réprimée.
Italie
Reflux du Piémont dès juillet 1848 : victoire du maréchal autrichien Radetzky. Août
1849 : Piémont contraint à l’armistice. Agitation républicaine s’ensuit, notamment à Venise.
Insurrection dans les États papaux pousse à mise en place d’une République dirigée par Mazzini.
Le Piémont reprend la guerre. Le tout échoue à partir de mars 1849 : roi du Piémont échoue et
abdique en faveur de son fils Victor-Emmanuel II, qui est protégé contre l’Autriche par la France
et l’Angleterre. Mais Autriche se rétablit dans les autres parties de l'Italie. États pontificaux sont
rétablis par Louis-Napoléon Bonaparte, président de la République française. Juin 1849, Pape est
rétabli contre Garibaldi.
En 1850, dans toute l’Italie, politique répressive, sauf dans le royaume du PiémontSardaigne : devient le centre de ralliement des patriotes italiens.
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Allemagne
Réaction débute en Prusse. Frédéric-Guillaume IV dissout le parlement en décembre
1848, octroie une Constitution avec un nouveau Parlement, dont les pouvoirs sont faibles. Peut
s’appuyer sur les propriétaires terriens qui craignent influence des démocrates et des Allemands
de l’Ouest et du Sud.
Parlement de Francfort : nombreux débats sur l’État allemand futur unifié. Divisé,
problème des duchés danois du Slesvig et de Holstein. Émeute d’extrême-gauche contre lui, alors
qu’il ne peut les réprimer. Enfin, conception de Grande Allemagne et de Petite Allemagne. En
mars 1849, FG IV est élu empereur d’Allemagne. Refus du roi de Prusse : couronne ne peut venir
que des Princes, pas d’une assemblée élue. Le Parlement est dissout.
La Prusse tente ensuite en 1849 et 1850 d’établir union allemande, proposée par les
Princes, autour de FG IV. En 1850, l’envoyé prussien à Olmütz cède face à
Schwartzenberg « reculade d’Olmütz ». FG IV doit renoncer à ses projets. Ordre de 1815 est
finalement rétabli. Mais l’unité allemande ne peut désormais se faire que par opposition entre
l’Autriche et la Prusse.
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