Équations différentielles du premier ordre
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Équations différentielles du premier ordre
Équations différentielles du premier ordre "à la Sophus Lie". Guy LAVILLE Université de Caen LMNO 2 mars 2015 Résumé Les équations différentielles du premier ordre sont étudiées à l’aide de leurs symétries, i.e. de leurs groupes d’invariance à un paramètre, groupe R additif. Ceci donne un exemple simple d’étude de structures non-linéaires. L’exposé présente de nombreux exemples. 1 TABLE DES MATIÈRES 2 Table des matières 1 Introduction. 4 2 Généralités sur les EDO du premier ordre. 2.1 Équations et solutions. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.2 EDO du premier ordre avec plusieurs familles de courbes 2.3 Point de vue à trois dimensions. . . . . . . . . . . . . . . 2.4 Variables, variables liées, fonctions. . . . . . . . . . . . . 2.5 Courbes de p et de c discriminant. . . . . . . . . . . . . 2.6 Exemples de calculs de cpd et de ccd. . . . . . . . . . . 3 Groupe de Lie local à un paramètre. 3.1 Groupe à un paramètre opérant sur R2 . 3.2 Générateur. . . . . . . . . . . . . . . . . 3.3 Notion d’invariance . . . . . . . . . . . . 3.4 Invariance infinitésimale. . . . . . . . . . 3.5 Fonction invariante. . . . . . . . . . . . 3.6 Fonction à valeurs translatées. . . . . . . 3.7 Famille invariante de courbes. . . . . . . 3.8 Coordonnées canoniques. . . . . . . . . . . . . . . . intégrales. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 4 5 6 7 8 8 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 10 10 11 11 11 12 13 14 4 Groupes des symétries des EDO du premier ordre 4.1 Prolongation de l’action sur R3 . . . . . . . . . . . . . 4.2 Transformée infinitésimale prolongée. . . . . . . . . . 4.3 Exemples de prolongation. . . . . . . . . . . . . . . . 4.4 Invariance d’une EDO d’ordre 1. . . . . . . . . . . . 4.5 Invariance triviale d’une EDO résolue. . . . . . . . . 4.6 Invariance continue et invariance discrète. . . . . . . 4.7 Invariance et commutateur. . . . . . . . . . . . . . . 4.8 Difficulté de la méthode. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15 15 15 15 16 17 17 18 18 5 Action du groupe sur les solutions. 5.1 Invariance de l’ensemble des solutions. . 5.2 Exemples de l’utilisation de l’invariance. 5.3 EDP et système caractéristique. . . . . . 5.4 Équation différentielle affine. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19 19 20 23 23 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 Recherche d’EDO invariantes par un groupe donné. 24 6.1 Méthode des coordonnées canoniques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 7 Méthodes de résolution d’EDO du premier ordre. 7.1 Méthode de résolution à l’aide des coordonnées canoniques. . . . . . . . . . 7.2 Méthode de résolution par facteur intégrant. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7.3 Invariance et changement de fonction. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25 25 27 29 TABLE DES FIGURES 3 Table des figures 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 yy 02 + (x − y)y 0 − x = 0 . . . . . xy 0 − y(1 − y) = 0 . . . . . . . . y0 − y2 = 0 . . . . . . . . . . . . y 02 (2 − 3y)2 − 4(1 − y) = 0 . . . . xy 0 − y = 0 . . . . . . . . . . . . y 03 − 4xyy 0 + 8y 2 = 0 . . . . . . . x sin(y/x)y 0 − y sin[y/x) − 1 = 0 2xyy 0 − y 2 − x = 0 . . . . . . . . 4y 03 − 6y 02 − 9(y − x) = 0 . . . . y 02 − yy 0 + ex = 0 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 7 8 9 21 22 27 29 31 33 1 INTRODUCTION. 1 4 Introduction. Cet exposé donne l’occasion de présenter un exemple d’étude de situations non-linéaires sans utiliser des approximations. Les symétries des structures et des phénomènes permettent de les étudier plus profondément. Dans l’art classique elles étaient un critère d’esthétique . En physique les symétries sont un outil efficace dans l’élaboration des lois de la nature. Pour les formaliser, les Mathématiques utilisent la notion de groupe opérant sur un ensemble. La structure étudiée ici est l’étude de équations différentielles ordinaires - EDO - du premier ordre. Le groupe utilisé ici est le groupe R additif opérant sur R2 . C’est le plus simple des groupes de Lie, mais il est dégénéré. L’étude des symétries des EDO peuvent servir à trouver des solutions, mais aussi pour comprendre plus profondément leurs structures et les liens qu’elles ont avec d’autres domaines. D’autre part, il est courant, notamment en physique, de partir de certaines symétries et d’en déduire des équations. Ces idées d’études des EDO ont été introduites par Sophus Lie à la fin du XIXème siècle. Il n’y a pas de méthode générale pour résoudre toutes les EDO du premier ordre ... et heureusement ! Car s’il y en avait une, ceci impliquerait que les structures sous-jacentes seraient moins diverses et donc il y aurait beaucoup moins de phénomènes modélisés par ces EDO. La présente étude est faite dans le domaine réel. Dans toute la suite, nous supposerons les fonctions autant de fois dérivables qu’il le faut et même , si nécessaire, analytiques réelles. Les domaines de définition ne seront pas précisés. Les esprits chagrins pourront compléter facilement ...et ils s’apercevront que cela ne sert qu’a diluer les idées. Beaucoup d’exemples ont été tirés de [3]. 2 Généralités sur les EDO du premier ordre. Pour approfondir, voir [2]. 2.1 Équations et solutions. Une équation différentielle ordinaire EDO du premier ordre est la donnée d’une fonction réelle de trois variables réelles f (x, y, y 0 ) = 0 (1) où y est considérée comme fonction de x. Les solutions peuvent être données par une autre fonction réelle de trois variables réelles ϕ(x, y, c) = 0 Géométriquement, c’est la famille des courbes intégrales dans le plan R2 . (2) 2 GÉNÉRALITÉS SUR LES EDO DU PREMIER ORDRE. 5 Une solution φ(x, y) qui ne dépend pas d’un paramètre et donc qui ne fait pas partie d’un cas particulier relevant de l’équation précédente est dite singulière. Une enveloppe de la famille des courbes intégrales est encore une solution de l’EDO. En général, elle donne une solution singulière. Les solutions peuvent aussi être données sous forme paramétrique : données de deux fonctions : x(t) y(t) Une EDO de la forme : y 0 = g(x, y) (3) est dite résolue (par rapport à la dérivée), mais elle présente déjà la linéarité en y 0 . Étant donnée une EDO f (x, y, y 0 ) = 0 au voisinage d’un point où ∂/∂y1 f (x, y, y1 ) 6= 0 on peut appliquer le théorème des fonctions implicites et trouver une EDO y 0 = g(x, y) localement équivalente à l’EDO donnée. Par application du théorème de Cauchy-Lipschitz (si les hypothèses sont satisfaites) nous trouvons localement une solution dépendant d’une seule constante. Trouver les solutions d’une EDO n’a pas de sens bien défini. Par exemple résoudre y 0 = y est impossible si l’on ne connait pas l’exponentielle. Mais cette EDO peut servir de définition à une nouvelle transcendante, l’exponentielle. Il faut plutôt se poser la question : cette EDO possède-t-elle comme solutions des fonctions connues dans un autre contexte ? Introduit-elle de nouvelles transcendantes ? Remarquons que y 02 + y 2 = 0 n’a pas de solution dans le domaine réel. 2.2 EDO du premier ordre avec plusieurs familles de courbes intégrales. Supposons que f (x, y, y 0 ) soit un polynôme en y 0 de degré N . D’après le théorème de d’Alembert-Gauss, nous pouvons factoriser (localement...) ce polynôme : f (x, y, y 0 ) = a(x, y) N Y y 0 − gn (x, y) n=1 chaque EDO du produit donne des solutions ϕn (x, y, cn ) = 0. Il peut y avoir jusqu’à n constantes d’intégration. La frontière entre EDO du premier ordre et EDO d’ordre supérieur est donc comme toutes les frontières, parfois utiles, mais elles doivent rester franchissables. 2 GÉNÉRALITÉS SUR LES EDO DU PREMIER ORDRE. 6 y Par exemple : yy 02 + (x − y)y 0 − x = 0 0 y = solutions 2.3 y−x± x p (x − y)2 + 4xy 2y ( y0 = 1 y 0 = −x/y ( y − x + c1 = 0 y 2 + x2 − c2 = 0 non unicité Figure 1 – yy 02 + (x − y)y 0 − x = 0 Point de vue à trois dimensions. Nous noterons les coordonnées dans R3 par (x, y, y1 ). L’équation f (x, y, y1 ) = 0 définit une surface dans R3 . Une solution (x(t), y(t)) donne une courbe dessinée sur la surface (x(t), y(t), y1 (t) = y 0 (t)). Réciproquement, si une courbe (x(t), y(t), y1 (t)) est dessinée sur la surface, il faut que l’on ait la relation y 0 (t)−y1 (t)x0 (t) = 0 pour qu’elle soit solution. Exemple : xy 0 = y(1 − y) La surface associée est : y1 = y/(1 − y). Cette équation est à variables séparables : dy dx = y(1 − y) x y 6= 0 et y 6= 1 pour y 6= 0 et x 6= 0. Solution singulière : y = 0. dy dx dy − = y 1−y x y ln = ln(x) + k 1−y x y= x 6= c c∈R x+c Pour c = 0 nous avons y = 1. Ce n’est pas une solution singulière. 2 GÉNÉRALITÉS SUR LES EDO DU PREMIER ORDRE. Les courbes planes 7 xy1 − y(1 − y) = 0 (x, 0, 0) (x, x/(x + c), cx/(x + c)2 sont courbes intégrales de cette EDO, les courbes 3d x cx x → x, , x + c (x + c)2 représentent les solutions tracées sur la surface. Quand c → +∞ on trouve la solution singulière y = 0. y1 x x→ x+c y x Figure 2 – xy 0 − y(1 − y) = 0 Si la surface est paramétrée : x(u, v) u 7−→ y(u, v) v y1 (u, v) alors à toute courbe plane correspond une courbe tracée sur la surface. La relation dy − y1 dx = 0 devient : ∂u y du + ∂v dv − y1 (∂u du + ∂v y dv) = 0 Nous obtenons une EDO résolue en sa dérivée : dv = g(u, v) du qui peut permettre d’étudier l’EDO donnée au départ. Une solution v(u) donnera une solution sous forme paramétrique : x u, v(u) y u, v(u) Ceci explique géométriquement parfois certain changements de variables "ad hoc". 2.4 Variables, variables liées, fonctions. Il est classique en Mathématiques de distinguer clairement la notion de variable et la notion de fonction. Ce principe est souvent valable, mais pas toujours. Dans la théorie qui nous occupe ici, celle des EDO en général non linéaires, il faut très souvent abandonner ce point de vue. Il faut prendre le point de vue "variables liées", très utilisé par les physiciens, par exemple P V = RN T . 2 GÉNÉRALITÉS SUR LES EDO DU PREMIER ORDRE. 2.5 8 Courbes de p et de c discriminant. La courbe de p-discriminant est obtenue par élimination de y1 du système : ( ) f (x, y, y1 ) = 0 cpd(x, y) = 0 ∂f ∂y1 (x, y, y1 ) = 0 La courbe de c-discriminant est obtenue par élimination de c du système : ϕ(x, y, c) = 0 ccd(x, y) = 0 ∂ϕ ∂c (x, y, c) = 0 (4) (5) Notons : — E(x, y) = 0 équation de(s) enveloppe(s). — P (x, y) = 0 équation des points de rebroussement des solutions. — N (x, y) = 0 équation des points nodaux des solutions. — C(x, y) = 0 équations des points de contact des solutions. Remarquons que les équations E et C donnent des points où il n’y a pas unicité de solution. cpd donne E, P, C et ccd donne E, N, P . Une courbe solution singulière est toujours dans l’équation de p-discriminant. Cette courbe n’est pas nécessairement une enveloppe. 2.6 Exemples de calculs de cpd et de ccd. f (x, y, y 0 ) = y 0 − y 2 = 0 Solution : y = −1/(x + c). cpd est donné par y1 − y 2 = 0 et 1 = 0 et ccd est donné par y(x + c) + 1 = 0 et y = 0. Ces équations n’ont pas de solutions : les courbes correspondantes sont vides. La courbe y = 0 est une solution singulière, mais n’est pas une enveloppe. C’est une séparatrice. y sol. sing. x Figure 3 – y 0 − y 2 = 0 f (x, y, y 0 ) = y 02 (2 − 3y)2 − 4(1 − y) = 0 3 GROUPE DE LIE LOCAL À UN PARAMÈTRE. 9 Cette EDO est à variables séparables : 4(1 − y) 2 y 02 = pour y = 6 2 (2 − 3y) 3 p 3 1 1 dx = ± pour y 6= 0 1−y− √ 2 2 1−y solution : x − c = ±y p 1−y pour y < 1 ϕ(x, y, c) = y 2 (1 − y) − (x − c)2 = 0 cpd(x, y) = (1 − y)(2 − 3y)2 = 0 ccd(x, y) = (1 − y)y 2 = 0 Ici, on peut décomposer facilement : E(x, y) = 1 − y N (x, y) = y P (x, y) = 1 C(x, y) = 2 − 3y y enveloppe points de contacts x points nodaux Figure 4 – y 02 (2 − 3y)2 − 4(1 − y) = 0 d’après [3]. 3 Groupe de Lie local à un paramètre. Nous nous occuperons ici du cas le plus simple où le groupe de Lie est à un paramètre. Bien que ce cas soit dégénéré, il explique le plus simplement la méthode. Notation Nous noterons parfois la dérivée partielle par rapport à x par : ∂x = ∂ ∂x et celle de f par rapport à x par : fx = ∂x f etc... 3 GROUPE DE LIE LOCAL À UN PARAMÈTRE. 3.1 10 Groupe à un paramètre opérant sur R2 . Considérons le groupe (R, +) opérant localement sur R2 : ∗ x x (x, y, ε) 7−→ y y ∗ (x, y, ε) (6) où ε ∈ R est suffisamment petit. Pour ε = 0 nous avons la transformation identité pour −ε la transformation inverse, pour ε1 + ε2 la composition des transformations correspondantes. Remarque : tout groupe de Lie de dimension 1 (à un paramètre) est isomorphe au groupe (R, +). En réalité, nous faisons opérer le groupe sur des ouverts de l’espace affine réel de dimension 2. Nous écrivons R2 et prenons des coordonnées pour ne pas compliquer l’exposé, mais aussi parce que x et y ne sont pas tout à fait symétriques. L’orbite d’un point (x, y) est la courbe : ∗ x (x, y, ε) ε 7−→ y ∗ (x, y, ε) Exemple : ( x∗ (x, y, ε) = y ∗ (x, y, ε) = x 1−εx y 1−εx (7) Les fonctions x∗ et y ∗ sont bien définies pour ε assez petit : pour x > 0 prendre ε < 1/x pour x = 0 prendre ε ∈ R pour x < 0 prendre ε > 1/x Nous avons bien la transformation identique pour ε = 0. Pour la composition : ! ! x x 1 x x 1 x) = 1−(ε1y+ε2 )x 7→ 1−εy 1 x 7→ 1−εy 1 x 1−ε2 x/(1−ε 1 y 1−ε1 x 1−ε1 x 1−ε2 x/(1−ε1 x) 1−(ε1 +ε2 )x 3.2 Générateur. Par dérivation de (6) en ε, nous obtenons : d x∗ (x, y, ε) ξ(x, y) ε=0 = dε d ∗ η(x, y) dε ε=0 y (x, y, ε) (8) C’est l’opérateur infinitésimal associé (unique générateur de l’algèbre de Lie de dimension 1 ). Nous identifierons les vecteurs aux opérateurs différentiels : X(x, y) = ξ(x, y)∂x + η(x, y)∂y 3 GROUPE DE LIE LOCAL À UN PARAMÈTRE. 11 Au premier ordre, nous avons : x∗ = x + εξ + y ∗ = y + εη + (ε) (ε) o o et aussi les formules de Taylor-Lie qui montrent que si l’on connaît le générateur on connait le groupe (ne pas oublier que l’on travaille localement). ∗ x = eεX x y ∗ = eεX y 3.3 Notion d’invariance Soit E un ensemble et G un groupe opérant sur cet ensemble. Un sous-ensemble S de E est dit invariant par G quand : ∀g ∈ G ∀s ∈ S g.s ∈ S Ne pas confondre avec les ensembles de points fixes. Une fonction f est dite invariante par le groupe G quand : ∀x ∈ E ∀g ∈ G f (g.x) = f (x) Exemple. Prenons R2 et le groupe des rotations de centre O. Les cercles de centre O sont invariants, la famille de toutes les droites passant par O est invariante. L’orbite d’un élément x ∈ E est le sous-ensemble {g.x | g ∈ G}. Ce sous-ensemble est évidemment invariant. 3.4 Invariance infinitésimale. La linéarité est un outil pour étudier la non-linéarité. L’idée fondamentale est simple : c’est la notion de dérivation. Pour F : Rn → Rn quelconque mais dérivable, sa dérivée dF (X, ~v ) est linéaire en ~v . Ici, la clef de la théorie de Lie est la suivante. Un groupe de Lie de transformation peut opérer de façon très générale (très non linéaire) sur un ensemble muni d’une structure différentielle. La notion d’invariance est remplacée par la notion d’invariance infinitésimale, qui est une notion de nature linéaire. Un opérateur infinitésimal (générateur) opère linéairement. 3.5 Fonction invariante. Une fonction f définie sur R2 est dite invariante quand : ∀ε ∀(x, y) f (x∗ , y ∗ ) = f (x, y) ceci est équivalent à Xf (x, y) = 0 (9) 3 GROUPE DE LIE LOCAL À UN PARAMÈTRE. 12 Cette équivalence se démontre à l’aide de la formule de Taylor-Lie : ∗ ∗ f (x , y ) = ∞ n X ε n=0 n! Xn f (x, y) L’ensemble des solutions de l’EDP ξ∂x f + η∂y f = 0 est égal à l’ensemble de fonctions invariantes. Considérons l’EDO : dx dy η ηdx − ξdy = 0 ⇔ = ⇔ y0 = ξ η ξ Si f (x, y) = c est solution de l’EDO, alors les variables liées x et y sont telles que : ( fx dx + fy dy = 0 ηdx − ξdy = 0 η ⇒ ∂x f + ∂y f = 0 ⇒ Xf = 0 ⇒ f invariante ξ Ceci est un méthode pour trouver les fonctions invariantes : groupe 7→ X 7→ EDO 7→ solution de l’EDO 7→ fonction invariante. — — — — — — Exemple : Une translation dans R2 . transformation (x, y) 7→ (x + ε, y + 2ε) ∂ ∂ + 2 ∂y générateur X(x, y) = ∂x EDO 2dx − dy = 0 fonction invariante f (x, y) = 2x − y + k f (x + ε, y + 2ε) = f (x, y) ∂ ∂ ∂x + 2 ∂y f (x, y) = 0 — — — — Exemple : Rotation. transformation (x∗ , y ∗ ) = (x cos(ε) + y sin(ε), −x sin(ε) + y cos(ε)) générateur X(x, y) = −y∂x + x∂y EDO xdx + ydy = 0 fonction invariante f (x, y) = x2 + y 2 + k 3.6 Fonction à valeurs translatées. De façon analogue, pour la fonction à valeurs translatées : ∀ε ∀(x, y) f (x∗ , y ∗ ) = f (x, y) + ε ⇐⇒ Xf (x, y) = 1 ceci se montre à nouveau en utilisant le développement en série : ∗ ∗ f (x , y ) = ∞ n X ε n=0 n! Xn (x, y)f (x, y) (10) 3 GROUPE DE LIE LOCAL À UN PARAMÈTRE. 3.7 Famille invariante de courbes. Proposition 1. Les deux familles de courbes définies par ϕ1 (x, y) = a et ϕ2 (x, y) = a2 définissent la même famille de courbes si et seulement si il existe une fonction F telle que ϕ2 (x, y) = F (ϕ1 (x, y)). Démonstration. Si ϕ2 = F (ϕ1 ) alors ϕ2 (x, y) = F (ϕ1 (x, y) = F (a1 ) = a2 . Réciproquement, par changement local de coordonnées : x ϕ1 (x, y) ←→ y β alors, la famille est donnée dans ces nouvelles coordonnées par ϕ1 constant, β variable. Dans ces nouvelles coordonnées, ϕ2 x(ϕ1 , β), y(ϕ1 , β) doit rester constant quand β varie, donc cette fonction ne dépend pas de β soit F cette fonction : ϕ2 = F (ϕ1 ). Définition 1. Une famille de courbes ϕ(x, y) = c est dite famille invariante quand pour toute ε fixé, ϕ(x, y) = c et ϕ(x∗ , y ∗ ) = c∗ représentent la même famille de courbes. Donc, il existe une constante c∗ telle que ϕ(x, y) = c ⇒ ϕ(x∗ , y ∗ ) = C(ϕ(x, y), ε) = C(c, ε) = c∗ Théorème 1. Une famille de courbes ϕ(x, y) = c est invariante si et seulement si il existe une fonction Ω telle que : Xϕ = Ω(ϕ) Démonstration. Si la famille est invariante, alors, pour ϕ(x, y) = c et tout ε : ϕ(x∗ , y ∗ ) = ϕ(x, y) + εXϕ(x, y) + ... = c∗ = C(c, ε) Cette fonction des deux variables (c, ε) étant développée en série de ε, chaque coefficient ne dépend que de l’autre variable c = ϕ(x, y), donc Xϕ(x, y) = Ω(ϕ(x, y)). Réciproquement, Xϕ = Ω(ϕ) X2 ϕ = Ω0 (ϕ)Ω(ϕ) = Ω1 (ϕ) etc... ϕ(x∗ , y ∗ ) = ϕ(x, y) + εXϕ(x, y) + ε/2X2 ϕ(x, y) + ... = c + εΩ(c) + ε/2Ω1 (c) + ... = C(c, ε) = c∗ Corollaire 1. Dans le théorème précédent, on peut supposer que Ω(ϕ) = 1, i.e. Xϕ = 1. 13 3 GROUPE DE LIE LOCAL À UN PARAMÈTRE. Démonstration. On peut toujours remplacer ϕ(x, y) = c par f (ϕ(x, y)) = f (c). Xf (ϕ) = f 0 (ϕ)Xϕ La fonction Ω(ϕ) n’est pas identiquement nulle (sinon chaque surface serait invariante), nous pouvons donc prendre f telle que : f 0 (ϕ) = Exemple : Homothéties. ( x∗ = e ε x y ∗ = eε y 1 Ω(ϕ) X(x, y) = x∂x + y∂y Les cercles x2 + y 2 = R2 forment une famille invariante, X(x2 + y 2 ) = 2(x2 + y 2 ) Mais on peut définir la famille des cercles par 1/2 ln(x2 + y 2 ) = c et nous avons bien : 1 2 2 ln(x + y ) = 1 X(x, y) 2 3.8 Coordonnées canoniques. Théorème 2. Pour tout groupe local de transformation, il existe localement des coordonnées dites canoniques qui simplifient l’action du groupe : ∗ r r x x 7→ ⇐⇒ 7→ s+ε s y∗ y Démonstration. Une solution de l’EDP X(x, y)r(x, y) = 0 donne l’expression invariante r(x, y). De même X(x, y)s(x, y) = 1 donne s(x∗ , y ∗ ) = s(x, y) + ε. Voir (9) et (10). 14 4 GROUPES DES SYMÉTRIES DES EDO DU PREMIER ORDRE 4 15 Groupes des symétries des EDO du premier ordre Références [1] [4] [5]. 4.1 Prolongation de l’action sur R3 . Notons (x, y, y1 ) (au lieu de (x, y, z)... ) les coordonnées de R3 . Nous allons prolonger l’action du groupe en utilisant la notion de transformation de contact. Fixons ε et calculons les différentielles : ( ∗ ∂x∗ dx∗ = ∂x ∂x dx + ∂y dy ∗ ∂y ∗ dy ∗ = ∂y ∂x dx + ∂y dy Pour préserver les relations de contacts, il faut que y1 et y1∗ satisfassent à : dy = y1 dx dy ∗ = y1∗ dx∗ Nous définirons donc y1∗ (x, y, ε) par : y1∗ = 4.2 yx∗ + yy∗ y1 dy ∗ = dx∗ x∗x + x∗y y1 (11) Transformée infinitésimale prolongée. Nous définirons le coefficient η (1) comme nous avons définis ξ et η : d (1) y1∗ (x, y, ε) η (x, y) = dε ε=0 Cette dérivation donne : η (1) = ηx + (ηy − ξx )y1 − ξy y12 (12) D’où le générateur (l’opérateur infinitésimal) prolongé : X(1) (x, y) = ξ(x, y)∂x + η(x, y)∂y + η (1) (x, y)∂y1 4.3 (13) Exemples de prolongation. Groupe des translations parallèlement à l’axe des x : ∗ x = x+ε X(x, y) = ∗ y = y (1) ∗ ∗ X (x, y) = dy dy = dx = y1 y1 = dx∗ Groupe des rotations : ∗ x = x cos(ε) + y sin(ε) y ∗ = −x sin(ε) + y cos(ε) y ∗ = − sin ε)+y1 cos(ε) 1 cos(ε)+y1 sin(ε) ( ∂ ∂x ∂ ∂x ∂ ∂ − x ∂y X(x, y) = y ∂x ∂ ∂ X(1) (x, y) = y ∂x − x ∂y − (1 + y12 ) ∂y∂ 1 4 GROUPES DES SYMÉTRIES DES EDO DU PREMIER ORDRE 4.4 16 Invariance d’une EDO d’ordre 1. Définition 2. L’EDO f (x, y, y 0 ) = 0 est dite invariante par le groupe local de transformation (x, y) 7→ (x∗ , y ∗ ) quand le prolongement de l’action (x, y, y1 ) 7→ (x∗ , y ∗ , y1∗ ) est tel que : f (x, y, y1 ) = 0 =⇒ ∀ε f (x∗ , y ∗ , y1∗ ) = 0 Géométriquement, la surface définie par l’équation est invariante par l’action du groupe prolongé. Si l’EDO est invariante, alors : d f (x∗ , y ∗ , y1∗ ) = 0 dε ε=0 Donc : X(1) f = 0 (14) Mais la réciproque est un peu subtile. Prenons f (x, y, y1 ) = (y1 − x)2 = 0, les dérivées partielles sont toutes nulles pour les (x, y) tels que f (x, y, y1 ) = 0 : (y1 − x)2 = 0 ⇒ ∂x f (x, y, y1 ) = 0, ∂y f (x, y, y1 ) = 0, ∂y1 f (x, y, y1 ) = 0 Pour tous les X, nous avons f = 0 ⇒ Xf = 0, mais f n’est pas invariante par tous les groupes possibles. Pour éviter ce comportement, il faut imposer que pour f = 0, les dérivées partielles ne sont pas toutes nulles. Une équation de la forme y 0 = g(x, y) satisfait toujours à cette hypothèse. Une EDO résolue en y 0 possède une structure beaucoup plus simple que f (x, y, y 0 ) = 0. Sous l’hypothèse indiquée l’invariance est équivalente à : f (x, y, y1 ) = 0 ⇒ X(1) f (x, y, y1 ) = 0 Exemples. L’EDO y 0 = g(x) est invariante par le groupe de translation parallèlement à l’axe des y : ∗ ( x = x ∂ X(x, y) = ∂y ∗ y = y+ε ∂ ∗ X(1) (x, y) = ∂y y1 = y1 L’EDO y 0 = g(y/x) est invariante par le groupe d’homothéties : ∗ ( x = eε x ∂ ∂ X(x, y) = x ∂x + y ∂y ∗ ε y = e y ∂ ∂ ∗ X(1) (x, y) = x ∂x + y ∂y y1 = y1 4 GROUPES DES SYMÉTRIES DES EDO DU PREMIER ORDRE L’EDO y 0 = y 2 /(x3 ) + (y + 1)/x est de type Riccati. Il est bien connu que ces équations sont associées au birapport, donc à la notion de transformation projective. L’EDO est invariante par le transformation projective (7) : x ∗ x = 1−εx y (15) X(1) = x2 ∂x + xy∂y + (−xy1 + y)∂y1 y ∗ = 1−εx ∗ y1 = (1 − εx)y1 + εy Nous pouvons vérifier l’invariance : y2 (1 − εx)2 y/(1 − εx) + 1 (1 − εx)y1 + εy − + (1 − εx)2 x3 x/(1 − εx) 2 3 y (1 − εx) (1 − εx)y + εxy + 1 − εx = (1 − εx)y1 + εy − (1 − εx) 3 + x x3 x 2 y+1 y + εy − εy = (1 − εx) y1 − 3 + x x ou encore : y2 y+1 x ∂x + xy∂y + (xy1 + y)∂y1 y1 − 3 − x x 1 1 1 x2 y = 2 (3y 2 + x2 y + x2 ) + 2 (−2y 2 − x2 y) − 2 (y 2 + x2 y + x2 ) + 2 = 0 x x x x 2 4.5 Invariance triviale d’une EDO résolue. Considérons l’EDO y 0 = g(x, y). Prenons ξ(x, y) quelconque et posons η = gξ. η (1) = ηx + (ηy − ξx )y1 − ξy y12 = gx ξ + gξx + (gy ξ + gξy − ξx )y1 − ξy y12 d’où la forme infinitésimale de l’invariance : X(1) (y1 − g) = −ξgx − gξgy + gx ξ + gξx + gy gξ + g 2 ξy − gξx − ξy g 2 = 0 Les invariances triviales sont inutiles. 4.6 Invariance continue et invariance discrète. L’invariance au sens précédent est un invariance "continue". Elle dépend d’un paramètre définit dans un voisinage de 0 dans R. L’invariance discrète est issue d’un groupe fini ou dénombrable. Exemple : Groupe {+, −} : ( x∗ = −x y ∗ = −y 17 4 GROUPES DES SYMÉTRIES DES EDO DU PREMIER ORDRE Exemple : Groupe {Z, +} : ( x∗ = x + n2π y ∗ = y + n2π 4.7 18 n∈Z Invariance et commutateur. Considérons une EDO résolue en y 0 : p(x, y)dx − q(x, y)dy = 0 Considérons l’opérateur associé : A(x, y) = q(x, y)∂x + p(x, y)∂y Soit y(x) solution de l’EDO et Φ une solution de AΦ = 0. Alors Φ est un intégrale première de l’EDO puisque nous avons : d Φ(x, y(x)) = ∂x Φ(x, y(x)) + y 0 (x)∂y Φ(x, y(x)) dx q x, y(x) ∂x + p x, y(x) ∂y Φ(x, y(x)) = q x, y(x) =0 Proposition 2. S’il existe une expression λ(x, y) telle que : [X, A] = λA (16) alors l’EDO y 0 = p/q est invariante par le groupe de générateur X. Il y a beaucoup de groupes qui laissent invariante cette EDO. Soit µ(x, y) une expression quelconque : [X + µA, A] = [X, A] + [µA, A] = λA Tous les groupes de générateurs X + µA laissent cette EDO invariante. 4.8 Difficulté de la méthode. Une EDO étant donnée, comment trouver des groupes d’invariance ? Il n’y a pas d’algorithme général car il faut trouver le groupe ou son générateur, donc f (x, y, y 0 ) étant donné, il faut trouver ξ et η satisfaisant à l’EDP : X(1) f = ξfx + ηfy + ηx + (ηy − ξx )f − ξy f 2 fy1 = 0 Trouver des solutions particulière à cette équation peut s’avérer difficile. De plus, il ne faut pas avoir une invariance triviale 4.5 . 5 ACTION DU GROUPE SUR LES SOLUTIONS. 5 5.1 Action du groupe sur les solutions. Invariance de l’ensemble des solutions. Théorème 3. Si une EDO est invariante par un groupe, alors par action de ce groupe, une solution se transforme en une solution. Démonstration. La transformation : ∗ x x 7−→ y y∗ laisse invariante f (x, y, y 0 ). Prenons les solutions sous forme paramétrique : dy(t) x(t) =0 t 7→ alors ∀t f x(t), y(t), y(t) dx(t) Introduisons les notations abrégées : x∗ (t) = x∗ x(t), y(t), ε y ∗ (t) = y ∗ x(t), y(t), ε Ces fonctions sont solutions puisque, par invariance : dy ∗ (t) ∗ ∗ ∀t f x (t), y (t), ∗ =0 dx (t) Remarque : une solution invariante n’engendrera pas d’autre solution. Si les solutions sont données implicitement par ϕ(x, y, c) = 0 alors ϕ(x∗ , y ∗ , c) = 0 engendrera encore des solutions.Pour démontrer ceci, partons de l’équivalence des définitions implicite et paramétrique d’une courbe : x(t) ϕ(x, y, c) = 0 ⇐⇒ y(t) Si ceci définit une solution de l’EDO alors ∗ x (t) y ∗ (t) est encore une solution, et donc ϕ(x∗ , y ∗ , c) est une famille à deux paramètres de solutions. Si l’EDO est résoluble en y 0 elle ne dépend que d’un paramètre et il y aura confluence des deux constantes en une seule. La constante d’intégration c et le paramètre du groupe ε peuvent être considérés comme identiques de la façon suivante. Considérons l’EDO résolue y 0 = g(x, y) invariante par (x, y) 7→ (x∗ , y ∗ ). Si une solution particulière non invariante s’écrit y(x) alors la solution générale sera y ∗ (x, y(x), ε) et ε = c est la constante d’intégration. 19 5 ACTION DU GROUPE SUR LES SOLUTIONS. Exemple : Une EDO de type h(x, y 0 ) = 0 où x n’intervient pas explicitement est invariante par : x∗ = x + ε, y ∗ = y, y1∗ = y1 La méthode de résolution est classique. t = y0 h(y, t) = 0 donne une représentation paramétrique de y y 0 (t) dx = dt t Z t 0 y (s) x∗ (t) = x(t) + ε = ds s a t= dy dt dt dx De même pour une EDO du type l(x, y 0 ). t = y0 dy dt t= dt dx Z t tx0 (s)ds y(t) = l(x, t) = 0 y 0 (t) = tx0 (t) y ∗ (t) = y(t) + ε a 5.2 Exemples de l’utilisation de l’invariance. xy 0 = y C’est une équation homogène. Groupe d’invariance : ∗ ε x = e x y ∗ = eε y ∗ y1 = y1 Solution évidente y = x. Mais cette solution est elle-même invariante, elle n’en donne pas d’autre. Utilisons un autre groupe d’invariance : ∗ x = x y ∗ = eε y ∗ y1 = eε y1 20 5 ACTION DU GROUPE SUR LES SOLUTIONS. 21 alors y = x engendre eε y = x, i.e. y = cx, à priori avec c > 0. Utilisons l’invariance discrète de l’EDO : ( x∗ = −x y∗ = y y1 Cette invariance appliquée à la solution eε y = x, ainsi que la solution y = 0 montrent que y = cx est solution pour tout c ∈ R. Remarquons que eε y = cx ⇔ y = e−ε cx, confluence des deux constantes. La surface est la seule quadrique réglée, c’est le paraboloïde hyperbolique. xy1 = y (x, kx, k) y x Figure 5 – xy 0 − y = 0 y 03 − 4xyy 0 + 8y 2 = 0 Cette équation possède aussi une certaine homogénéité. Le groupe d’invariance se devine en remarquant que : 2×3=1+3+2=3×2 ∗ ε x = e x y ∗ = e3ε y ∗ y1 = e2ε y1 X1 = x∂x + 3y∂y + 2y1 ∂y1 puisque : (e2ε y1 )3 − 4eε xe3ε ye2ε y1 + 8(e3ε y1 )2 = e6ε (y13 − 4xyy1 + 8y 2 ) Nous avons une solution particulière y = (x − 1)2 , par action du groupe, nous obtenons : e3ε y = (eε x − 1)2 y = e−ε (x − e−ε )2 y = c(x − c)2 La symétrie discrète x∗ = −x, y ∗ = −y, y1∗ = y1 montre que la solution trouvée est valable non seulement pour c > 0 mais pour tout c. Calculons le ccd (2.5). ( y − c(x − c)2 =0 2 −(x − c) + 2c(x − c) = 0 5 ACTION DU GROUPE SUR LES SOLUTIONS. 22 La seconde équation donne x = c et x = 3c. La solution y = 0 est déjà dans la famille. Nous trouvons une solution singulière, invariante et qui n’est pas enveloppe : y− 4x3 =0 27 Calculons la cpd (2.5). ( y13 − 4xyy1 + 8y 2 = 0 3y12 − 4xy = 0 y 3/2 (−2x3/2 + 33/2 y 1/2 ) = 0 Nous retrouvons les courbes y = 0 et y = 4/27x3 y x solution singulière Figure 6 – y 03 − 4xyy 0 + 8y 2 = 0 Contre-exemple. Famille invariante de solutions d’une EDO non-invariante. y 02 + (y 2 − y)y 0 − y 3 = 0 (y 0 − y)(y 0 + y 2 ) = 0 ( x∗ = x + ε x y = c1 e invariance : ou y∗ = y ( x∗ = x y ∗ = eε y 5 ACTION DU GROUPE SUR LES SOLUTIONS. 23 L’EDO n’est pas invariante par le second groupe. ( x∗ = x + ε 1 y= invariance : x + c2 y∗ = y L’EDO est invariante par le groupe commun aux deux familles. 5.3 EDP et système caractéristique. Pour trouver une solution de l’EDP Xu = (ξ∂x + η∂y )u = 0 on peut résoudre l’EDO associée dite système caractéristique : dx dy = ξ η Montrons que cette EDO est invariante par le groupe de générateur X : η ξ (1) 2 y1 − X = (ξ∂x + η∂y + ηx + (ηy − ξx )y1 − ξy y1 ∂y1 y1 − η ξ ξηy − ηξy ξηx − ηξx η η2 = −ξ − η + η + (η − ξ ) − ξ =0 x y x y ξ2 ξ2 ξ ξ2 Soit u(x, y, c) = 0 la famille des solutions. Elles sont invariantes : Xu = 0 5.4 Équation différentielle affine. L’équation différentielle affine y 0 + p(x)y = q(x) a pour ensemble de solution un espace affine (ici de dimension 1). Elle a pour équation linéaire associée y + p(x)y = 0. Celleci a pour ensemble de solutions un espace vectoriel (ici de dimension 1) qui est l’espace vectoriel associé à l’espace affine. Donnons la traduction obscurantiste bien connue : la solution générale de l’EDO complète = solution particulière de l’EDO complète + solution générale de l’EDO homogène (ou sans second membre) associée. C’est la traduction de : pour tout A : ∀M ∃~v M = A + ~v Ceci se montre facilement dans notre contexte. Considérons le groupe : ∗ x = x R y ∗ = y + εe− p(x)dx R ∗ y1 = y1 − εp(x)e− p(x)dx L’EDO est bien invariante : y1∗ + py ∗ − q = y1 − εpe− R pdx + py + pεe− R pdx − q = y1 − py − q 6 RECHERCHE D’EDO INVARIANTES PAR UN GROUPE DONNÉ. Soit y = φ(x) une solution particulière de l’EDO affine, alors (si elle n’est pas invariante ...) y ∗ = φ(x∗ ) donnera la solution générale : y + εe− R pdx = φ(x) ou encore : y = φ(x) + ce− 6 R p(x)dx Recherche d’EDO invariantes par un groupe donné. Souvent, les symétries d’un phénomène à étudier sont connues, et l’on cherche les équations décrivant de phénomène. Les équations doivent être invariantes par ces symétries. 6.1 Méthode des coordonnées canoniques. Cherchons des EDO f (x, y, y 0 ) = 0 invariantes par un groupe donné de générateur X. Soit r et s les coordonnées canoniques : ( ( r∗ = r Xr = 0 ∗ s =s+ε Xs = 1 EDO invariante s0 = g(r). Revenons aux coordonnées de départ : sx (x, y) + sy (x, y)y 0 = g r(x, y) 0 rx (x, y) + ry (x, y)y Exemple. Groupe des rotations. ( p r = x2 + y 2 s = arctan(y/x) ds = g(r) dr dr = 2xdx+2ydy √ 2 2 ds = x +y xdy−ydx x2 +y 2 D’où les EDO : p xdy − ydx 1 1 = p g( x2 + y 2 ) xdx + ydy 2 x2 + y 2 xy 0 − y = h(x2 + y 2 ) yy 0 − x yh(x2 + y 2 ) − x y 0 = xh(x2 + y 2 ) − y 24 7 MÉTHODES DE RÉSOLUTION D’EDO DU PREMIER ORDRE. 7 Méthodes de résolution d’EDO du premier ordre. 7.1 Méthode de résolution à l’aide des coordonnées canoniques. Données : une EDO résolue en sa dérivée y 0 = g(x, y) et un groupe d’invariance (x, y) 7→ de générateur X. Soit (r, s) les coordonnées canoniques. (x∗ , y ∗ ) sx + sy g(x, y) sx + sy y 0 ds = = = F (r, s) dr rx + ry y 0 rx + ry g(x, y) Le changement de variables donne comme invariance pour cette EDO : r r 7→ s s+ε Donc F est indépendant de s. L’EDO se résout par quadrature : ds = F (r) dr Z r s(r) = F (ρ)dρ a Z r(x,y) s r(x, y) = F (ρ)dρ a Exemple : EDO affine. y 0 + p(x)y = q(x) Soit φ une solution particulière de l’EDO linéaire associée : φ(x) = e− Rx a p(t)dt Groupe : ∗ x y∗ ∗ y1 =x = y + εφ(x) = y1 + εφ0 (x) ( X(x, y) = φ(x)∂y X(x, y) = φ(x)∂y + φ0 (x)∂y1 Coordonnées canoniques : ( Xr = 0 Xs = 1 ( r=x y s = φ(x) r=x x 7−→ y s = φ(x) y 25 7 MÉTHODES DE RÉSOLUTION D’EDO DU PREMIER ORDRE. L’EDO devient : −y φ(x) + p(x)φ(x) sx + sy f (x, y) ds(x, y) q(x) q(x) = = + = 2 dr(x, y) rx + ry f (x, y) φ(x) φ(x) φ(x) Z x y q(t) = s(x, y) = dt φ(x) φ(t) b Z x Rt R − ax p(t)dt q(t)e− a p(u)du dt + y = ce b Ceci redonne la méthode de variation de la constante. Exemple. EDO à variables séparables. y 0 = a(x)b(y) Considérons le groupe de générateur : X= 1 ∂x a en utilisant (12) X(1) = 1 a0 b ∂x + ∂y a(x) a 1 l’EDO est bien invariante : a0 b a0 b 1 ∂x (y1 − ab) = − + =0 a a a Coordonnées canoniques : ( Xr = 0 prenons r= Xs = 1 prenons s= Ry Rty1 t2 ds b(s) a(s)ds l’EDO devient dans les nouvelles coordonnées : ds a = 1 =1 dr b ab Z y t2 s−r =0 Z y ds a(s)ds − =0 t1 b(s) Autre exemple : x sin y x y 0 − y sin y x ad hoc ! 26 7 MÉTHODES DE RÉSOLUTION D’EDO DU PREMIER ORDRE. 27 groupe d’invariance (15). Nous avons bien invariance : y y x y sin (1 − εx)y 0 + εy − sin −1 1 − εx x 1 − εx x y y εxy sin xy − y sin xy + (1 − εx)y sin 0 = x sin y − y sin −1+ x 1 − εx x y 0 y = x sin y − y sin −1 x x y x y coordonnées canoniques : ( (x2 ∂x + xy)r = 0 (x2 ∂x + xy)s = 1 ( r = xy s = − x1 x L’EDO donnée peut s’écrire : xdy − ydx 1 = dx sin xy ds = sin(r) dr s = cos(r) − c y 1 cos =c− x x Figure 7 – x sin(y/x)y 0 − y sin[y/x) − 1 = 0 7.2 Méthode de résolution par facteur intégrant. Données : une EDO résolue en sa dérivée y 0 = g(x, y) et un groupe d’invariance (x, y) 7→ de générateur X. Nous pouvons toujours écrire une EDO du premier ordre résolue en sa dérivée sous forme d’une différentielle : (x∗ , y ∗ ) p(x, y)dx − q(x, y)dy = 0 On appelle facteur intégrant une fonction µ telle que la différentielle : µ(x, y)p(x, y)dx − µ(x, y)q(x, y)dy 7 MÉTHODES DE RÉSOLUTION D’EDO DU PREMIER ORDRE. 28 soit une différentielle exacte, i.e. il existe une expression U (x, y) telle que : dU (x, y) = µ(x, y)p(x, y)dx − µ(x, y)q(x, y)dy Alors U (x, y) = c donnent des solutions. Supposons que l’EDO soit invariante par un groupe de générateur X = ξ∂x + η∂y . Montrons que : 1 µ= pξ − qη est un facteur intégrant. Soit V (x, y) = c une famille de solutions dont chaque membre ne soit pas invariant. p dx 0 = dV = Vx dx + Vy dy = Vx dx + Vy dx = (qVx + pVy ) q q (17) La famille étant invariante, quitte à changer V en f (V ), nous pouvons supposer que nous avons : XV = ξVx + ηVy = 1 (18) En résolvant le système (17) (7.2) : ∂V p = ∂x pξ − qη ∂V q = ∂y pξ − qη Nous avons bien un facteur intégrant : dV = 1 (pdx − qdy) = 0 pξ − qη Exemple. 2xyy 0 − y 2 − x = 0 ∗ 2ε x = e x y ∗ = eε y ∗ y1 = e−ε y1 X(1) (x, y, y1 ) = 2x∂x + y∂y − y1 ∂y1 Facteur intégrant : 1 1 1 = = 2 pξ + qη (x + y 2 )2x − 2xyy 2x Nous pouvons prendre : 1 x2 7 MÉTHODES DE RÉSOLUTION D’EDO DU PREMIER ORDRE. 29 Nous obtenons la forme différentielle exacte : x + y2 xy dx − 2 2 dy = 0 2 x x dx 2xydy − y 2 dx =0 − x x2 y2 d ln(|x|) − =0 x x = cey 2 /x Remarquons la confluence des constantes : 2ε y 2 /(e2ε x) e2ε x = cee x = e2ε cey 2 /x y x3/4 √ x x √ − x −x3/4 Figure 8 – 2xyy 0 − y 2 − x = 0 7.3 Invariance et changement de fonction. Avertissement. Il ne s’agit pas d’une méthode de résolution, mais d’une possibilité qui fonctionne parfois. L’invariance permet parfois de savoir quel changement de fonction il faut effectuer. 7 MÉTHODES DE RÉSOLUTION D’EDO DU PREMIER ORDRE. Une EDO invariante par : ε x∗ = e x y∗ = eε y y1 ∗ = y1 est homogène : y 0 = g(y/x). La variable v = y/x est invariante et sera prise comme fonction inconnue. y0 = v0x + v v 0 x + v = g(v) dv dx = g(v) − v x y = vx est à variables séparées. Autre exemple. Une EDO f (x, y, y 0 ) = 0 invariante par x∗ = x + ε, y ∗ = y + ε, y1∗ = y1 pourra se mettre sous la forme g(y − x, y 0 ) = 0 et on prendra comme nouvelle fonction inconnue v = y − x. 4y 03 − 6y 02 − 9(y − x) = 0 est invariante par ce groupe. v = y − x ⇔ y0 = v0 + 1 L’EDO devient : 4(v 0 + 1)3 − 6(v 0 + 1)2 − 9v = 0 Posons t = v 0 + 1, v est définie paramétriquement : 4 2 v = t3 − t2 9 3 Nous allons obtenir x paramétriquement par une quadrature : t−1= dv dx dx = 4/3t2 − 4/3t t−1 intégrons sans tenir compte des constantes ( 2 x = 2t3 y − x = 49 t3 − 32 t2 d’ou la solution particulière : r y=± 2 3/2 x 3 30 7 MÉTHODES DE RÉSOLUTION D’EDO DU PREMIER ORDRE. par invariance, famille des solutions r (y − c) = ± 2 (x − c)3/2 3 Système donnant la cpd : ( 4y1 − 6y12 − 9(y − x) = 0 12y12 − 12y1 = 0 y1 = 0 ⇒ y − x = 0 2 y1 = 1 ⇒ y − x − 9 Système donnant la ccd : ( 3(y − c)2 = 2(x − c)3 y − c = (x − c)2 3(x − c)4 = 2(x − c)3 x − c = 0 ⇒ y − x = 0 2 2 x−c= ⇒y−x− 3 9 rebroussements enveloppe Figure 9 – 4y 03 − 6y 02 − 9(y − x) = 0 Autre exemple. y 02 − yy 0 + ex = 0 31 7 MÉTHODES DE RÉSOLUTION D’EDO DU PREMIER ORDRE. Groupe : ∗ x = x + 2ε y ∗ = eε y ∗ y1 = eε y1 X(x, y) = 2∂x + y∂y + y1 ∂y1 Invariance : (eε y1 )2 − eε yeε y1 + ex+2ε = e2ε (y12 − yy1 + ex ) ou encore : (2∂x + y∂y + y1 ∂y1 )(y12 − yy1 + ex ) = 2(y12 − yy1 + ex ) Remarquons que ye−x/2 est invariant ; posons : y = ex/2 u ceci élimine la dépendance explicite en x u02 − u2 +1=0 4 posons t = u0 u2 = 4(t2 + 1) du dt t= dt p dx u = ±2 t2 + 1 2 x = ± Argsh(t) + k +1 x−k sinh = ±t 2 x−k u = ±2 cosh 2 x−k x/2 y = ±2e cosh 2 1 −k/2 x y = ±e e + −k/2 e dx = ± √ t2 Ce qui nous donne la solution générale : y = cex + 1 c ∀c ∈ R{0} 32 RÉFÉRENCES Cherchons les solutions singulières y = ψ(x) parmi les courbes invariantes du groupe d’invariance. 33 y enveloppe y ∗ −ψ(x∗ ) = eε y−ψ(x+2ε) = X(y−ψ(x)) Prenons X = eε et ψ(x + 2ε) = eε ψ(x) donc ψ(x) = kex/2 . Remplaçons y = kex/2 dans l’équation. Nous trouvons k 2 = 4. Finalement, y = ±2ex/2 sont solutions singulières. Nous aurions pu trouver ces solutions singulières en calculant : ( y12 − yy1 + ex = 0 2y1 − y = 0 cpd = y 2 − 4ex = EP C 2 ( y − cex − 1c = 0 −ex + c12 = 0 x enveloppe ccd = y 2 − 4ex = EN 2 P 3 E(x, y) = y 2 − 4ex = 0 Figure 10 – y 02 − yy 0 + ex = 0 Références [1] G.W.Bluman, S.Kumei Symmetries and differential equations Springer-Verlag 1989. [2] E.L.Ince. Ordinary differenrial equations. Longmans,Green and Co 1926, réimpression Dover. [3] M.Krasnov,A.Kissélev,G.Makarenko Recueil de problèmes sur les équations différentielles ordinaires. Mir 1978, traduction 1981. [4] H.Stephani Differential equations. Their solutions using symmetries Cambridge 1989. [5] P.E. Hydon Symmetry Methods for Differential Equations Cambridge 2000.