N°27 - A vue d`oeil

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N°27 - A vue d`oeil
Livres en vue, N° 27
Cyber-gazette de Juillet 2012
Liaisons littéraires (2/2) :
Les novélisations
A
vue
d’œil
S
i le terme « adaptation » est aisément compréhensible par
les néophytes, peu nombreux sont ceux qui, hormis le
cercle restreint des professionnels de l’édition et du cinéma,
connaissent la signification exacte de «novélisation». Ce drôle
de néologisme, inspiré du mot anglais novelization, désigne en
fait un type particulier d’adaptation : plutôt que de transformer
un roman en scénario, la novélisation transforme à l’inverse un
scénario en roman.
À paraître en septembre :
Rêves dorés
Là est la danse
La Nuit de l’accident
La Dernière Conquête
du major Pettigrew
La Faute de Madame le Maire
L’Autre Rive du monde
Deux
Les Filles de l’ouragan
La Dentellière de la brume
Les Sœurs Ribelli
Le Mystère Sherlock
Les Affligés
Les Dix Enfants que
madame Ming n'a jamais eus
Les Mystères de Camille
Mon doudou divin
Un bon musulman
Une seconde vie
L’Aviateur anglais
En vieillissant les hommes pleurent
Cahier de l’été indien
La Muraille de lave
L’Enfant témoin
L’Œil du léopard
Pour seul cortège
Venez découvrir ici nos
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U
ne adaptation à rebours
en somme, qui n’a rien
d’un phénomène nouveau ou
rare, comme pourrait le laisser
supposer son peu de notoriété. Ainsi que le démontrent
de récentes études universitaires sur ce sujet jusqu’ici peu
exploré, la novélisation est de
fait presque aussi ancienne
que le cinéma lui-même, et les
premiers exemples concrets
se retrouvent aux États-Unis
dès l’essor du cinéma… muet,
au tout début du XXe siècle.
Les studios Hollywoodiens en
firent même un phénomène
de masse dès les années 30,
en adoptant une politique de
novélisation systématique de
tout film ayant un fort potentiel
commercial. Cette habitude a
été couronnée par l’engouement
du grand public jusqu’à l’avènement de la vidéo au milieu
des années 1980.
D
ès lors, comment ne pas
s’étonner qu’une pratique
aussi installée soit méconnue,
voire obscure? La réponse est
simple: le genre souffre d’une
réputation épouvantable! Un
peu à la manière des «nègres»,
(ces écrivains clandestins qui
rédigent à la place de nombre
de célébrités des ouvrages
que ces dernières signeront
«officiellement»), la novélisation
est perçue comme lucrative,
certes, mais également opportuniste et peu créative.
Elle ne serait qu’un pis-aller
mercantiliste à la limite du
honteux, auquel les éditeurs
recourent avec un maximum
de discrétion. Les « vrais »
écrivains regardent le genre le
plus souvent avec un mépris
abyssal, tout comme le célèbre
romancier anglais Jonathan
Coe déclarant à son propos
dans une interview qu’il était
«le bâtard de la littérature et
du cinéma».
D
eux reproches principaux
sont le plus souvent mis
en avant par ceux, lecteurs ou
critiques, qui fustigent cet
objet littéraire hybride: un côté
bâclé et un rapport parfois très
lointain avec le film dont il
porte les couleurs. S’il est vrai
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ventes
Le Brouillard de l’aube
Du domaine des Murmures
Veuf
Les Souvenirs
Le Poil et la plume
Le Langage secret des fleurs
Rêves en bleu
La Pomme bleue
Un chemin de rocailles
Limonov
Le cas Sneijder
La Femme au miroir
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Plaisirs de lecture
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Je m’appelle Lotte et j’ai huit ans
Fleur de béton
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que la qualité moyenne des
novélisations, (soyons honnêtes),
laisse le plus souvent à désirer,
il convient de bien prendre en
considération les très fortes
contraintes qui pèsent sur ceux
et celles auxquels on refuse le
statut d’écrivain. Ils doivent
relever le défi de mener à bien
cette tâche ingrate avec un
facteur temps drastique: en
moyenne, délais d’impression
et de distribution obligent, un
auteur de novélisation dispose
d’environ 6 semaines pour
mener à bien sa rédaction.
Une «gestation» absolument
dérisoire quand on sait qu’il
est tout à fait admis de passer
plusieurs années à écrire un
roman. Ce délai raccourci est
imposé par les rouages commerciaux de la stratégie de
lancement d’un film: la sortie
en librairie du roman doit absolument correspondre à celle
du film en salles… Ce qui
oblige l’auteur à écrire sans
avoir vu le film, en tournage à
cette période. Il n’a donc d’autre
choix que de se fonder strictement
sur le scénario, au risque de
produire un texte très différent
du film, puisqu’il est souvent
d’usage de le modifier au fil
du tournage, sans parler des
directions narratives inattendues
et des changements parfois
sévères qu’amène le montage,
véritable phase de «réécriture»
d’un film.
C. Clarke, une des légendes de
la science-fiction américaine, a
été salué par la critique pour
sa novélisation de 2001 L’Odyssée
de l’Espace, le chef-d’œuvre
de Stanley Kubrick. Il est vrai
que Clarke, outre son statut
de romancier déjà reconnu,
était aussi l’auteur du scénario,
écrit en parallèle du roman.
Dans la même veine des novélisations réussies, Le Discours
d’un Roi (paru chez À vue d’œil)
s’impose sans conteste: loin
d’une tentative médiocre pour
capitaliser sur le triomphe
international du film (Oscars
du meilleur film et du meilleur
acteur pour Colin Firth), le livre
le prolonge et le complète en
se basant sur les archives et
les journaux privés et exclusifs
de Lionel Logue, l’orthophoniste
atypique qui soigna le bégaiement
de George VI. Ses auteurs n’ont
rien à voir avec des plumitifs
anonymes, puisque le roman
est signé par Mark Logue, petitfils de Lionel, et Peter Conradi,
universitaire britannique réputé
pour ses biographies de
référence sur Iris Murdoch et
Dostoïevski, entre autres.
Passionnant et émouvant, il
éclaire notamment d’un jour
nouveau, peu abordé à l’écran,
le rôle central joué par la future
Reine Mère. Un plaisir de lecture
à recommander sans hésiter à
ceux qui ont vu et aimé le film,
mais aussi à tous les autres.
C
our conclure ce dossier
sur littérature et cinéma,
un avis personnel… Toutes,
ici, aimons bien mieux lire le livre
avant de voir le film, pas vous?
ertaines novélisations,
cependant, échappent à
l’opprobre généralisé, et sont
considérées comme des œuvres
littéraires à part entière. Arthur
P