Discours de Manuel Valls

Transcription

Discours de Manuel Valls
Conseil local citoyen de la laïcité
Evry – lundi 17 octobre 2016
Allocution de Manuel VALLS, Premier ministre
Important : seul le prononcé fait foi
Madame la préfète,
Monsieur le maire, cher Francis CHOUAT,
Monsieur le Président du Conseil local de la laïcité, cher Maurice BENSOUSSAN et permettez-moi de
saluer aussi les membres, chacun des membres du Conseil local
Mesdames, messieurs les élus,
Mesdames, messieurs,
Mes chers concitoyens,
C’est un grand plaisir pour moi vous pouvez le comprendre d’installer, avec vous, ce Conseil local
citoyen de la laïcité – trois mois après la décision du conseil municipal.
Vous connaissez mon engagement à soutenir partout – à Évry bien sûr, mais aussi– ces initiatives qui
placent la laïcité au cœur de la vie de la cité
1. La laïcité, c’est la France …
Mais parler de laïcité, en prenant l’exemple de cette ville d’Evry, ma ville dans cette salle où il y a eu
tant de débats. Ceux du Conseil municipal bien sûr, mais aussi les débat passionnés à l’occasion de ces
rendez-vous de l’éthique, cette salle où nous étions marqués par l’émotion à l’occasion des vœux à la
population en 2015, quelques heures, quelques jours après les attentats de Charlie Hebdo de l’Hyper
Casher, cette salle où nous avons eu un débat poignant en novembre de cette même année 2015, vous
le rappeliez Monsieur le Maire un débat passionné, grave, des questions des citoyens d’Evry après ces
terribles attentats et tout ce que cela pouvait représenter comme questions, cette salle remplie
d‘ailleurs de symboles républicains. Parler de laïcité, donc dans cette salle, ici à Evry, c’est, je le crois,
aborder un sujet beaucoup plus vaste. C’est parler de notre pays, de sa spécificité, de son unicité … et
de son unité, aujourd’hui, bien mise à mal.
La laïcité, c’est la France. Et Parler de laïcité, c’est parler tout simplement de la France.
Certes, il y a la devise républicaine – liberté, égalité, fraternité. Ces principes sont au cœur de ce que
nous sommes et de toutes les démocraties. Mais la laïcité, c’est le supplément d’âme de la France,
celui qui fait que nous sommes singuliers, qui fait aussi que nous sommes parfois, je reviens du Canada,
incompris à l’étranger, mais celui qui fait que cette singularité nous donne une place à part dans
l’universel.
La laïcité, ce n’est pas une valeur abstraite, lointaine … une langue morte …
Non, la laïcité, c’est la philosophie pratique de notre République. Car notre République ce n’est pas
qu’un schéma institutionnel … Des Républiques, ça court le monde …et puis il y a des monarchies qui
sont des démocraties.
Mais, en France, en plus, il y a ces principes fondamentaux. Il y a cette grande loi de 1905 qui prolonge
1789 et la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. Il y a notre Constitution qui dit que « la
France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale », et chaque mot compte. La
République, parce qu’elle est laïque – et d’abord en effet dans nos écoles ! – est émancipatrice.
Donc oui : il faut revendiquer cette histoire, cette singularité, cette exigence. Et donc je le crois, cette
modernité !
Trop souvent, on affuble la laïcité d’adjectifs pour mieux la tordre ou la soumettre à d'autres modèles
qui ne sont pas la France, ou en tout cas qui en sont très éloignés.
On la veut « ouverte » … je ne sais pas bien ce que cela veut dire … on la dit « revancharde » … je ne
sais pas bien ce que cela veut dire non plus … et pour dire simplement les choses, en voulant à tout
prix la qualifier, on l’affaiblit !
La laïcité, c’est tout simplement la laïcité. Sans épithète, ni petites dérogations ! Mais cela mérite des
explications.
Elle est cette force qui nous rassemble, qui fait que nous formons une même communauté nationale
de femmes et d’hommes, libres et égaux en droits ; une communauté de citoyens qui, au-delà de tous
les particularismes, de tous les parcours se retrouvent dans un idéal commun, et avancent, c’est bien
ça le sujet, dans une même direction.
C’est comme cela que l’ont voulu ses inventeurs, parmi d’autre, BUISSON, BRIAND, JAURÈS,
CLÉMENCEAU. Au sortir de la terrible affaire DREYFUS, se rappelant des guerres, des divisions qui, au
cours des siècles, avaient rendu la France exsangue, ils nous ont laissé un héritage exceptionnel, en
posant quelques règles très claires, elles sont modernes, elles sont contemporaines, elles sont plus que
jamais d’actualité : chacun a le droit de croire ou de ne pas croire ; la religion n’a pas d’emprise sur la
société, et l’État pas d’emprise sur la religion. Il y a une séparation entre la sphère publique, où
personne ne peut imposer à l’autre ses croyances, où ne prévaut aucune vérité révélée, et la sphère
privée, où les choix spirituels de chacun peuvent s’exprimer.
La laïcité nous rassemble. Elle apaise, protège, libère !
Et Pour reprendre cette jolie formule, elle n’est pas « un glaive, elle est un bouclier ». Un bouclier
contre les revendications – et leurs complices passifs – qui veulent étouffer les individus sous le poids
d’un ordre social et moral.
Alors, nous devons donner un coup d’arrêt à ces contestations quotidiennes, à ces petits défis
permanents lancés à ce qu’est la France, vous pouvez le vivre ici à Evry, comme ailleurs, et en premier
lieu l’égalité entre les femmes et les hommes. Et ici il y a des femmes qui se battent depuis très
longtemps pour leurs droits. Ce sont les petites démissions du quotidien qui se transforment en un
renoncement généralisé. Et Cela, vous le savez, je le refuse. C’est pour cela qu’il faut des lois, c’est
pour cela que j’ai voté, comme parlementaire des lois de 2004 sur les signes religieux dans les écoles
ou de 2010 sur le voile intégral dans l’espace public.
Mais je veux quand même vous donner une conviction, pour combattre l’obscurantisme, le combat
des Lumières, de l’émancipation, un combat culturel, vaut mieux de toute façon que trop de
règlementation. La Liberté c’est la règle et elle doit être bornée bien sûr, par la loi. Mais la laïcité n’a
rien à voir avec une conception tracassière. Nous devons être intelligent, et collectivement et nous
appuyer sur l’expérience des élus, sur la pratique au quotidien. Et de ce point de vu là, le travail que
vous engagez est tout à fait essentiel, sur l’accompagnement des élèves, sur la question des menus à
la cantine, sur les pratiques sportives, sur toutes ces questions. C’est l’intelligence du terrain, c’est
l’intelligence collective, c’est le dialogue, c’est l’ouverture, c’est la tolérance, c’est le rassemblement,
qui doivent permettre d’avancer.
La laïcité fait que, sur cette terre aux racines chrétiennes, qui a vu naître tant de grandes consciences
à la fois chez les catholiques mais aussi chez les protestants, dans cette terre qui a la plus vieille
communauté juive d’Europe, dans cette terre où l’Islam est la seconde religion, dans cette terre, dans
ce pays, celui de la philosophie des Lumières et de la Révolution de 1789 que je rappelais, dans cette
terre la laïcité fait que nous soyons tous ensemble, libres, fiers de nos origines – auxquelles il n’y a pas
à renoncer, cela n’aurait aucun sens – et fiers surtout d’être Français.
Et parce qu’il y a ces attaques, ce déchainement qui vise toujours à pointer du doigt, à trouver des
boucs-émissaires, moi je veux m’adresser plus directement et le faire ici à Evry a tout son sens, aux
millions de musulmans français, femmes et hommes, qui pratiquent leur culte dans le respect le plus
absolu des valeurs de la République, des valeurs de la France.
L’Islam de France, comme toutes les autres religions, a toute sa place en France. C’est le fait de notre
histoire, avec ses drames, ses parts d’ombre, ses moments de gloire, c’est le fait de notre immigration
qui a été une chance pour notre pays. L’Islam – je l’ai déjà dit – est une part indissociable de nousmêmes ; une part de notre culture et désormais de nos racines.
L’Islam certes rencontre et pose des défis considérables à nos sociétés modernes, mais il n’est pas le,
LE problème à travers lequel la République se redéfinit, et il n’est pas le problème qui poserait toutes
les difficultés au pays.
Je connais les blessures, les amalgames insupportables, mais aussi les pressions communautaristes,
intégristes, la violence de l’islamisme radical dont sont victimes nos compatriotes de religion ou de
culture musulmane et qui n’aspirent qu’à une seule chose comme tous les autres : vivre
tranquillement, ici, en France, dans leur pays. Et je veux leur dire du fond du cœur et avec une part
d’émotion, ici à Evry et je leur dis que la laïcité n’est pas dirigée contre eux, mais au contraire est là
pour les aider, les protéger.
Et L’Etat, que j’incarne aujourd’hui comme Premier ministre de la France, est là, à leur côté pour les
protéger. Il nous revient de bâtir avec les musulmans de France cet islam de France, qui délivré de son
poison salafiste, est pleinement compatible avec la démocratie, et qui rayonnera plus encore dans le
monde, comme il le fait aujourd’hui en exposant notamment, les trésors des civilisations orientales,
arabes et islamiques, si riches, si vivantes au Louvre ou comme le démontre quotidiennement les belles
expositions de l’Institut du Monde Arabe, présidé par Jack LANG. Ici à Evry par ces différentes origines,
on connait cet Islam des Lumières, qui a tant fait pour l’écriture, la culture, les sciences. Ici nous avons
partagé dans cette salle, la même émotion représentée par la libération de Tombouctou joyau
évidemment de l’islam africain. Ici vous êtes nombreux à être fiers des grandes mosquées du Maroc,
ou de celle d’Istanbul, ou de Tunisie ou d’Algérie. Cette fierté elle existe et l’Islam fait partie de notre
civilisation, de notre patrimoine. La République donc protège. Elle ne tolère pas et ne tolérera jamais,
les mots, les insultes, les gestes, les actes, racistes, xénophobes, antimusulmans, antisémites, antichrétiens qui contestent les choix spirituels des citoyens de ce pays. Chaque acte antimusulman,
chaque acte antisémite, chaque acte anti-chrétien est un acte contre la France.
Affirmer l’autorité de l’Etat, être une République laïque, et c’est là où j’adresse ce message au fond du
cœur de chacun de mes concitoyens ce n’est pas supprimer le fait religieux. Affirmer l’autorité de l’Etat,
être une République laïque ce n’est pas supprimer le fait religieux. Ceux qui le pensent ne sont, par
exemple, jamais venus à Evry ! Il suffit, de sortir de cette salle, de lever les yeux, pour voir une
cathédrale, la seule construite au XX e siècle, une mosquée, celle d’Evry-Courcouronnes, une
synagogue, celle du Bras de fer, une pagode, ou tous les temples qui existent ! Il suffit de prendre la
rue Léopold Sédar Senghor, homme a la double culture, qui relie le centre-ville d’Evry, c’est-à-dire la
cathédrale à la mosquée d’Evry-Courcouronnes. Ou il suffit de se rappeler de ces trois enfants du
Maroc, Monseigneur DUBOST, Michel SERFATY, ou Khalil MERROUN pour dire ici ce qu’est la laïcité au
quotidien.
Alors, il y a toujours, ici ou là, des difficultés, des incompréhensions, des revendications
communautaristes, mais à Evry, comme je crois dans la plupart des villes de notre pays, les gens vivent
et doivent pouvoir vivre pleinement leur religion quand ils croient, et pleinement aussi d’ailleurs leur
vie intérieure quand ils ne croient pas. Ici les gens ne rasent pas les murs – comme certains journaux
anglo-saxons ont pu le laisser entendre – , ils sont dignes, fiers de leur racines et surtout fiers de la
France et de sa République !
Voilà ce qu’est la réalité du terrain. Voilà pourquoi je voulais être avec vous aujourd’hui. Donner à
chacun sa juste place, la possibilité de s'épanouir tout en respectant chacun, voilà un des engagements
de ma vie ! Et nos concitoyens de tradition, de culture musulmane, comme les autres doivent pouvoir
partager un sentiment d’espérance, d’optimisme mais surtout un sentiment d’appartenance. Et celuici ne peut s’établir que sur la base d’un projet pour le pays, pas d’un projet religieux, d’un projet pour
le pays, pour la France également profondément partagé.
Dans notre monde où s’infiltrent partout les fondamentalismes, les communautarismes, les
radicalismes les plus abjects, nous avons un défi à relever : un défi de civilisation auquel la France et
l’humanité tout entière sont confrontées.
Ce défi de civilisation, ce n’est pas un continent contre un autre, une culture contre une autre, une
religion contre une autre … C’est l’universalisme, et en premier lieu je crois, l’universalisme républicain,
si français contre les fondamentalismes, les obscurantismes.
Cet universalisme, la France l’a toujours porté. C’est au cœur de ce que nous sommes, de nos valeurs
collectives d’ouverture, de tolérance, de générosité, de bienveillance, nous en avons besoin. Nous
vivons une crise économique, politique, sociétale, morale depuis si longtemps, et nous devons y
répondre par des valeurs collectives, pas par une mesure, par des valeurs collectives, en donnant du
sens. Et c’est au nom de ces valeurs d’ailleurs, que la France est la France ne l’oublions jamais, et c’est
pour ça que je suis fier de ce qui a été engagé depuis 2012, par le Président de la République. C’est au
nom de ces valeurs que la France a répondu à l’appel désespéré des minorités d’Orient, chrétiens,
yézidis, victimes de persécutions massives, de tortures, de viols, de dégradations. Lisez le témoignage
bouleversant du Père DESBOIS qui avait déjà beaucoup travaillé sur l’antisémitisme et sur le drame de
la Shoah et qui s’est penché aujourd’hui sur ces drames qui sont dans l’actualité. Et n’oublions jamais
non plus que les premières victimes du terrorisme islamistes sont les musulmans eux-mêmes d’abord.
Et au moment même où des opérations militaires d’envergure s’engagent autour de Mossoul, en Irak,
je veux assurer ici que la mobilisation de la France ne faiblira pas. C’est ça la France, intervenir au Mali,
pour sauver ce pays ami, participer des coalitions, qui veulent écraser l’état islamique, qui veulent
écraser Daesh, et qui veulent libérer ces peuples.
Identité heureuse ou malheureuse ? …c’est le débat parfois. La question n’est pas là … je ne le crois
pas, mais je veux moi un patriotisme affirmé ! Des Français sûrs de ce que nous sommes, attachés à
leur pays, et fiers de la France. Et dans cette même salle, Francis CHOUAT le rappelait nous avons
célébré, ces nouveaux français, venant de tous les pays du monde, de tous les continents, de toutes
les couleurs, de toutes les religions, mais qui étaient heureux de pouvoir partager cette entrée dans la
communauté nationale, et qui chantaient, mieux parfois que les conseillers municipaux, la
Marseillaise.
Nous avons besoin de ce patriotisme affirmé que nous avons senti après les attaques terroristes. On a
brandi avec fierté le drapeau tricolore, on a chanté la Marseillaise, on s’est revendiqué de la France,
pas une France recroquevillée, rabougrie mais une France ouverte, généreuse. Il y a ce sursaut, cet
élan de notre jeunesse qui veut s’engager, être utile à son pays. Il faut lui en donner les moyens,
permettre à tous les citoyens qui le souhaitent de faire des missions de service civique et vous avez
été pionniers ici à Evry, service civique j’en suis convaincu qu’il faudra à terme rendre obligatoire, tous
ces citoyens qui veulent s’engager au sein de la garde nationale, annoncée par le Chef de l’état.
2. … la France que nous voulons !
La laïcité c’est ce qui, avec la liberté, l’égalité, la fraternité, fait la force de notre modèle républicain.
J’entends parfois qu’on parlerait trop de République … qu’elle serait ringarde ou dépassée … Moi, je
crois, comme vous, Monsieur le Maire, au contraire, que l’on n’en parle pas assez. Et que quand on en
parle, parfois on n’en parle pas comme il faudrait. D’ailleurs, nombreux qui se disent « républicains »
font tout, par leurs déclarations, leurs attitudes, pour s’écarter de ses principes !
Quand nos concitoyens demandent plus d'égalité entre hommes et femmes, femmes victimes des
violences, ne l’oublions pas et ici il y a eu toujours un travail de très grande ampleur pour aider ces
femmes quand ils nous disent craindre les divisions et les fractures, elles sont là, qui minent notre
société, quand ils nous demandent de remettre en route, comme on dit l'ascenseur social ... il n'y a
pas trop de République! Il y a au contraire, je le crois une attente forte pour toujours plus de
République ! et la République elle a un avantage, c’est qu’elle rassemble.
Parler de la République, faire aimer - et faire respecter ! - la République, c’est montrer combien elle
doit agir concrètement pour chacun. Notre devise, ce ne sont pas de mots creux ! Des promesses en
l’air. Beaucoup le pense d’ailleurs et parfois s’éloigne de cette République et même de la démocratie.
Non elle doit être une exigence concrète de chaque instant.
La liberté, c’est notamment celle de pouvoir vivre tranquillement, sans être inquiété, menacé. La
sécurité c’est la première des libertés. La République, c’est d’abord la sécurité pour tous et partout. Il
n’y pas de zones de non droit où certains pourraient imposer leurs règles. Nous l’avons toujours
compris ici à Evry et nous l’avons fait dès 2001, la grande priorité.
Les actes odieux, Madame la préfète, nous étions ensemble, commis contre des policiers à Viry , il y a
quelques jours, en témoignent, il ne faut pas se voiler la face : il y a beaucoup de violence dans notre
société, il nous reste du chemin à parcourir ! Il faudra encore du temps et de la persévérance pour que
la politique initiée en 2012 – fermeté, moyens pour la police et la gendarmerie, travail de proximité –
parvienne à réparer dix années d'abandon.
La liberté, c’est aussi permettre à chacun de choisir sa vie, de mener à bien ses projets, sans être
entravé parce qu’on n’habite pas dans la bonne ville, parce qu’on n’a pas la bonne couleur de peau,
pas le bon nom de famille, pas les codes … C’est pour cela que j’avais parlé d’apartheid social territorial,
ethnique en2015, ça avait surpris certains, pas les Evryens parce qu’ils m’ont souvent entendu
prononcer ces mots, et parce que c’est le fruit de mon expérience.
Je sais à quel point vous tous ici vous vous investissez pour cela, pour faire vivre la République et pour
lutter contre ces ségrégations, élus, associations, syndicats, corps intermédiaires, si indispensable à
une démocratie, conseils citoyens …
L’égalité, ensuite c’est donner à tout le monde les mêmes chances.
L’école Aimé CESAIRE, ce grand poète martiniquais, grand poète de la négritude, cet ami de Léopold
Sédar Senghor, que je citais tout à l’heure, l’école Aimé Césaire, inaugurée, ici, à Evry, il y a quelques
semaines le montre : depuis quatre ans, nous avons investi massivement pour l’école, car c’est dès le
plus jeune âge qu’il faut combattre les inégalités, à l’école primaire, puis au collège. Moi je suis fier de
ce que nous avons fait pour notre Education, pour notre jeunesse, comme Maire mais aussi comme
Premier ministre et je sais qu’il reste beaucoup à faire pour lutter contre ces inégalités.
Liberté, égalité, et bien sûr fraternité, cette valeur souvent oubliée alors que Monseigneur– l'appel des
évêques de France le rappelait magnifiquement la semaine dernière – elle dit tant de ce que nous
sommes. La République tend la main, elle est là en cas de coup dur.
Le problème de ce pays, c'est le chômage, pas les chômeurs, le problème de ce pays c'est la précarité,
pas les précaires ! Et notre problème, ce sont ceux qui veulent enlever des protections, sabrer dans ce
qu'ils appellent avec mépris « le social », mais qui pour des millions de nos concitoyens, car il y a 7 à 9
millions de nos concitoyens qui vivent avec moins de 1000 euros par mois, pour des millions de nos
concitoyens cela veut dire un minimum social, cette garantie qui permet de vivre.
Dans les semaines qui viennent je me battrai contre tous ceux qui martèlent ce mot d'assistanat ...pour
décrire ces dispositifs, qui faut faire évoluer et c’est pour ça que je veux que l’on avance que l’on
expérimente le revenu universel garanti. Et j’opposerai toujours à ce mot, porte de mépris celui des
solidarités !!! Bien sûr qu'il y a des abus des fraudes ... il faut les combattre. Ça existe mais on ne choisit
pas d'être chômeurs, on ne choisit pas de vivre des minimas sociaux.
Sur tous ces sujets, beaucoup a été fait. Je pense en particulier au texte de loi égalité et Citoyenneté,
actuellement en débat. Un projet de loi important, dont on n’a sans doute pas assez parlé, qui continue
de bâtir une République ferme – ferme sur la laïcité, et très ferme aussi sur la lutte contre les
discriminations – contre le racisme, pour avoir un logement, pour rentrer dans une grande école, pour
obtenir un emploi et selon aussi sa couleur de peau, selon son nom, selon l’adresse, et les jeunes
Evryens savent de quoi je veux parler on n’a pas les mêmes chances mais une République aussi ouverte
et généreuse, avec un seul objectif : que tous ceux qui jouent le jeu s’en sortent.
Dans les semaines qui viennent j’entends redire avec force ce que nous voulons pour la France, pour
ce pays que nous aimons, pour lequel nous nous sommes engagés.
La France, c’est la confiance dans l’Etat, à qui l’on doit donner les moyens d’agir, avec ses
fonctionnaires, ses services publics, et ses services publics locaux notamment. Il faut un Etat fort, c’està-dire moderne, efficace, présent dans tous les territoires.
La France, c’est ce modèle social protecteur, qu’il faut évidemment faire évoluer, réformer, mais qui
nous est envié. Nous avons fait la preuve qu’on pouvait l’adapter, le réformer, car le monde du travail
change, notre démographie évolue, les risques de la vie ne sont plus les mêmes. Il y a la Révolution
numérique bien évidemment. La France, c’est la Justice sociale, c’est-à-dire que le travail, le mérite, le
talent doivent permettre à chacun de s’élever, de s’émanciper.
La France, c’est aussi le génie de nos institutions, de notre démocratie, les institutions de la Ve
République voulues par le Général De Gaulle qu’il faut respecter. C’est pour ça qu’il faut en
permanence réhabiliter l’idéal de la gouvernance.
La France, c’est ce grand peuple, né d’une adhésion volontaire à des valeurs – bel héritage de la
Révolution Française ! –qui ne gomme pas évidemment le passé, vous connaissez ces mots de Marc
BLOCH, sur on n’est pas totalement français ou on ne se sent pas totalement français si on n’a pas
pleuré à l’évocation du sacre de Reims ou à la fête de la Convention. La France c’est une adhésion à
des valeurs, à une histoire, à une même envie d’avancer ensemble, et non pas d’un déterminisme
héréditaire … Enfermer un peuple dans des racines fantasmées, c'est le diviser et l'empêcher d'aller de
l'avant! C’est pour ça qu’il faut remettre en permanence la France en récit, l’histoire de France, à
condition qu’elle ne soit pas caricaturée, toute l’histoire de France sans rien occulter. Elle est
essentielle pour notre jeunesse, pour savoir d’où nous venons et bien sûr où nous allons.
La France, c’est ce grand pays, que nous tous ici, avec notre histoire, nos racines, et vous connaissez
les miennes et notre attachement à la République nous formons.
Et la France, enfin, c’est cette laïcité que vous incarnez ce soir avec force et dignité, c’est cette laïcité
que nous chérissons et qui est ce lien si particulier, si indéfinissable, si fort entre les français de toutes
les religions, de toutes les convictions, de toutes les conditions. Chers amis, La laïcité ne choisit pas
entre ses enfants, elle chérit tous les Français sans distinctions et c’est pour cela que nous la chérissons
en retour ! C’est pour ça que nous devons la chérir en retour.
Tous les enfants de nos quartiers populaires, ici à Evry, tous nos enfants et dans toute la France, sont
pleinement des enfants de la république !
Pour faire France, nous avons besoin, la Nation a besoin, les français ont besoin d’un projet dans lequel
chacun puisse au quotidien se réinventer. Et ce projet c’est cette République laïque, cette République
sociale, cette République ferme, cette République qui affirme l’autorité, mais cette République aussi
généreuse et bienveillante.
Et moi je crois que dans les semaines qui viennent, il faudra savoir porter haut ces questions, ces
principes. Être forts, être dignes dans nos débats, porter plus haut la politique et le pays, ne jamais
abaisser notre exigence. Je redoute parfois les débats dans notre pays, je trouve que nous ne sommes
pas souvent, trop souvent, à la hauteur des grandes questions qui se posent à la France. La menace
terroriste, les défis migratoires, et la France doit accueillir ceux qui fuient la guerre, c’est ça le droit
d’asile, le défis du changement climatique, les grands défis économiques et sociaux, les problèmes du
quotidien de nos compatriotes, le logement, la santé, l’école. Nous devons être à la hauteur de cette
attente, et c’était prévu depuis longtemps, en participant à l’installation de ce Conseil local de la laïcité,
en vous remerciant de faire vivre le Pacte Républicain et laïc ici à Evry, c’est ce message, ce message
d’espérance que je voulais porter. La France comme à Evry a besoin de rassemblement et d’espérance
et tout ce que j’ai appris ici à Evry j’essaie modestement bien sûr avec des réussites et des erreurs,
mais j’essaie de le mettre en œuvre pour mon pays. Mais j’ai besoin de revenir régulièrement ici pour
me ressourcer parce que chacun d’entre nous a besoin de revenir à ses sources, pour être plus fort,
pour les grands combats du moment. Merci à tous ! Bravo !
Bon travail à ce Conseil local citoyen de la laïcité. Bon travail à chacun et chacune d’entre vous !