Hypothèses et Réalisme - Philosophy of the Social Sciences
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Hypothèses et Réalisme - Philosophy of the Social Sciences
519 Hypothèses OMAR Dans et Réalisme F. HAMOUDA, , Economics, Glendon College-York University, Toronto, Ontario, Canada M4N 3M6 article« Le realisme des hypotheses et la Partial Interpretation Philippe Mongin reexamine les concepts de realisme et de l’instrumentalisme en science sociale et plus particulièrement en économie. Malgr6 que son analyse prend comme depart les theses fondamentales de 1’essai classique de Milton Friedman Methodology of Positive Economics ( 1953) et ne se préoccupe que de certains aspects de la microeconomie, son etude s’adresse au probleme methodologique de 1’etat de la science empirique en economie. Toute sa discussion s’articule autour de la notion de verification. Bien que sa these soit discutable, l’article de Mongin est doublement interessant. D’une part, il met 1’accent sur les preoccupations qu’a une nouvelle generation d’economistes face aux fondements philosophiques et aux difficult6es conceptuelles de leurs theories. D’autre part, s’adressant aux philosophes, il soulèvera peut-etre l’intér1 de ces derniers et permettra possiblement un d6bat sur les questions communes aux deux disciplines. Comme les problemes qu’elle est suppos6e 6tudier, p6riodiquement la discipline economique elle-meme subit des crises internes, il en est actuellement le cas. II faudrait peut-etre rajouter que les 6conomistes en general n’ont jamais 6t6 a 1’aise avec les fondements philosophiques de leur discipline. Chaque fois qu’il était possible, les questions 6pineuses etaient soit 6cart6es par simplification excessive ou tout simplement consid6r6es comme 6tant hors de leur comp6tence. II n’est donc pas 6tonnant que lorsque ses eaux sont troublees la theorie economique se retrouve quelque peu en d6sarroi. Il est donc normal de s’interroger sur la raison d’etre de cette confusion. Pour comprendre l’ampleur de cette incertitude il est utile de situer le probleme de la methodologie 6conomique dans son contexte general. L’objet de l’economie est d’etudier la dynamique de la creation et la r6partition de la richesse. Les auteurs classiques, par example J. S. Mill et L. Walras, distinguaient la relation création (ou production) de celle de la répartition. La premiere relation est technique. Elle consiste en une interaction entre l’ homme et la nature; elle essaie de faire comprendre comment produire des biens et des son View >>, services tout compte de la contrainte de ressources limitees. La effet etre consideree comme un processus m6canique o6 l’utilisation des facteurs limites combines avec des technologies donn6es d6terminent des produits donn6s. L’approche scientifique semble dans ce cas attrayante pour 6tudier les notions techniques telles que l’optimalit6, 1’efficacit6, la croissance economique etc. La deuxi6me relation est sociale, c’est une interaction entre l’homme et l’ homme. Dans ce cas, 1’6conomiste essaie de comprendre les mécanismes qui determinent comment le gateau (ou le produit) est (ou doit etre) partage aussi bien entre individus qu’entre differents groupes sociaux, regions, nations et aussi entre generations. Differente de la pr6c6dente, la deuxieme relation comporte des considerations 6thiques, morales, politiques qui compliquent considerablement l’analyse. Elle ne peut pas etre abord6e de la meme maniere. en production peut tenant en 520 Ces deux relations sont, bien sur, imbriqu6es l’une dans 1’autre et forment une dynamique de relations sociales tr6s complexe. Cette structure se complique davantage puisqu’elle comporte aussi une dimension physique qui met en relation des elements tels que machines, outils, terre, matiere premiere, energie, produit etc., et une dimension humaine qui met en evidence les notions de besoin, satisfaction, utilite, etc. Cette dynamique economique depend non seulement des comportements, reactions, anticipations et decisions apparemment pragmatiques des individus qui composent la societe mais aussi de leur perception et de leur comprehension de ce qu’est la realite du monde. A cette derniere consideration se greffe une dimension ideologique. Comment les 6conomistes, face a cette problematique, abordent-ils leurs theories ? Quelle signification doit-on attacher a leur d6march6? Peut-on isoler une partie de cette dynamique et la soumettre comme en science exacte a une analyse axiomatique? Peut-on lui appliquer des tests empiriques? Les economistes sont divises d’une facon tr6s inegale quant a leur approche methodologique. On peut se limiter a certaines ecoles de pensee. Certains economistes favorisent la dimension humaine et sociale de 1’economie et refusent 1’approche mecanique et deterministe. L’individu est intelligent et imprevisible. Comme il est 1’element central de decision 6conomique, la discipline economique elle-meme ne peut etre consideree comme science de la meme facon que la physique ou 1’astronomie (c’est la position de Keynes, Shackle). Bien que cette ecole admet que certaines tendances historiques semblent se r6p6ter, les evenements economiques sont uniques et doivent etre interpretes dans leur contexte propre. Les phenomenes macroeconomiques tels que 1’inflation, les recessions et la stagflation (ou meme ceux de la microeconomie comme la production, la formation de prix et 1’echange) peuvent etre expliques par des theories generales (au sense large du terme) avec une grande marge d’interpretation. Dans cette approche il n’est pas question d’invoquer la notion de loi economique ou de verification empirique. L’economie dominante d’aujourd’hui, par contre, opte pour une demarche scientifique. Explicitement ou implicitement la majorite des 6conomistes soutiennent d’une part, que c’est la relation de production qui prime et la r6partition n’est qu’une consequence, d’autre part, comme 1’aspect mecanique et technique des relations economiques semble evident a etablir, ils supposent alors que les phenomenes economiques r6pondent a des lois de la nature donc doivent etre investigu6s scientifiquement. Ils pr6conisent que la theorie economique doit etre rigoureuse, elle a besoin d’une logique interne mais aussi de comportement coherent et syst6matique des agents qu’elle est suppos6e 6tudier. Comme la precedente, la dimension humaine est centrale dans cette demarche mais elle est reduite a l’homo economicus. C’est à partir d’un individu 6conomique conqu, comme un etre supra naturel, que decoule la plupart des hypothèses economiques de rationalité et de comportement, qui renforcent à leur tour toutes les premisses de base du positivisme economique. Il y a une autre bifurcation importante dans cette deuxieme approche qui se veut scientifique. L’ecole de 1’6conomie mathematique se reclame de 1’apriorisme. Les tenants de cette approche sont plus concernes par l’idealisme, 1’esth6tique et la coherence mathematique de leurs theories que de la realite economique. L’exemple le plus populaire est le modele d’equilibre general d’Arrow-Debreu. Ces derniers ne sont pas du tout int6ress6s a la verification empirique. L’ecole de 1’econometrie par contre pr6conise 1’approche empirique, et ainsi soumet les theories economiques (qui souvent ne sont que des specifications ad hoc) a des tests de verification. C’est dans cette derniere perspective que se situe le texte de Mongin. 521 Mongin croit a 1’approche scientifique en 6conomie. Il soutient que les theories economiques doivent etre basees sur des premisses qui refletent la realite qu’il qualifie de vraies. Les hypotheses doivent etre soumises a des tests rigoureux et les conclusions des theories economiques devraient decouler de la veracite des premisses. Il montre qu’il est possible par un remaniement de la syntaxe et de la semantique de distinguer les termes theoriques des termes observables, et d’arrivera des propositions explicandum purement empiriques. Mongin rejette la demarche economique qui consiste a sauver des lois generales refutees en les reformulant comme de vraies lois dans certains domaines sous pretexte que les hypotheses de base dont elles-meme restrictives. Il rejette aussi la demarche de la non-verification sous pretexte que certains aspects des hypoth6ses fondamentales sont non-observables. Ces d6marches, d’apres lui, font obstacle au role du test empirique et donnent trop de liberte s6mantique aux modelisateurs. Mongin revele avec raison les faiblesses de 1’approche empirique telle qu’elle est pratiqu6e par une partie des 6conomistes orthodoxes. Il ne s’est, malheureusement, adresse qu’a une partie de la discipline economique : la microeconomie. Son analyse souleve beaucoup de questions aussi bien au niveau de sa propre demarche que de celles qu’il etudie. L’interpretation du langage philosophique tel qu’utilise par les deux disciplines reste a clarifier. Malheureusement, 1’espace limite alloue a ce commentaire ne permet pas de faire une analyse detaillee du texte de Mongin, mais simplement de s’en tenir à quelques questions pertinentes a son etude. Pour bien cerner cette problematique il faudrait d’abord s’entendre sur la signification des concepts utilises et repondre aux questions suivantes. Par exemple : Y a-t-il une distinction entre le realisme des hypotheses et le réaUsme du philosophe? Qu’est ce que la realite 6conomique? Comment distinguer les termes theoriques des termes observables? Dans quel sens un niveau de prix, un indice de productivit6 ou un cout moyen ou meme des donn6es statistiques sont-ils observables? Faut-il, avec la clause « Ceteris Paribus », couramment utilisee, interpreter les hypotheses economiques comme fausses, restrictives ou bien g6n6rales? Y a-t-il une difference entre la methode empirique et 1’empirisme philosophique? Dans quel sens la m6thode économétrique, qui consiste a specifier un modele quelconque d’une fagon ad hoc et a lui appliquer une serie de donnees statistiques, constitue-t-elle un test empirique? Quel sens donner a la verification 6conomique? Qu’est ce qu’une loi 6conomique? Est-ce que la loi de 1’offre et de la demande, la loi des rendements decroissants, la loi de 1’utilite marginale decroissante en economie s’interpretent de la meme fagon que la loi de la gravite en physique? Quel est le role de l’intuition en 6conomie? Peut-on parler de prediction en 6conomie? Voila bien des questions qui m6ritent une explication. Leur clarification permettrait de comprendre les difficultes conceptuelles des theories économiques et de mieux saisir le travail de Mongin. Il semblerait que si le d6bat est approfondi il n’est pas certain que la these de Mongin aboutirait a renforcer la notion de verification en economie mais plutot la remettrait en question.