Europe : il est temps de tout changer

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Europe : il est temps de tout changer
Europe : il est temps de tout changer
Après la seconde guerre mondiale, les pères fondateurs de l’Europe avaient fait partager aux
peuples européens leur grand rêve d’union, pour que les tragédies du passé ne recommencent
jamais, pour que notre continent, rassemblant ses moyens et ses volontés fasse entendre sa
voix dans le monde, y défende ses idées, ses principes et ses intérêts, pour que nos nations
s’ouvrent les unes aux autres, et tirant ensemble le meilleur parti de leurs forces productives,
s’engagent durablement sur le chemin de la prospérité.
Qu’avons-nous fait de ce grand rêve ?
Beaucoup d’Européens de cœur et de raison se posent désormais cette question : ceux qui ont
répondu oui lorsqu’on leur a demandé d’approuver le Traité de Maastricht ou la Constitution
européenne, parce qu’ils ne voulaient pas sacrifier une si belle espérance, et ceux qui ont dit
non parce qu’ils ne voulaient pas approuver ce qui, à leurs yeux, entraînait l’Europe et la
France sur la voie du déclin.
Sans nier les responsabilités des gouvernements nationaux, à commencer par les nôtres, force
est de constater que trente années de dérives ont condamné l’Europe à devenir une machine
bureaucratique qui réduit, jour après jour, l’espace des libertés et de la démocratie. Trente
années d’aveuglements ont installé durablement sur notre continent le chômage de masse,
l’exclusion, la stagnation économique. Trente années de renoncements ont provoqué une
profonde crise identitaire, mis à mal la cohésion des sociétés, creusé un fossé
d’incompréhension entre les peuples et les responsables politiques, nourri la montée des
populismes et des extrémismes. Si nous ne voulons pas que le rêve tourne au cauchemar et
que reviennent les vieux démons qui ont été à l’origine de tant de malheurs, il faut changer
d’Europe.
Au point où nous en sommes, le temps n’est plus à la valse-hésitation des ajustements à la
marge du mécano institutionnel. L’urgence est aux remises en cause profondes. Notre pays
doit prendre ses responsabilités et demander à nos partenaires de se prononcer. Le risque de
crises circonscrites est moins grand que celui d’une crise générale qui pourrait tout emporter.
Souvenons-nous de la chaise vide du Général de Gaulle qui sauva la politique agricole
commune.
L’austérité aveugle qui détruit la croissance et creuse les déficits, ça ne peut plus durer.
La politique monétaire qui fait peser sur l’Europe tout entière le spectre de la déflation et
ruine la compétitivité de nos entreprises, ça ne peut plus durer.
L’ouverture sans contrepartie à toutes les concurrences déloyales, à tous les dumpings, ça ne
peut plus durer.
La politique de la concurrence qui interdit toute politique industrielle et qui met les
entreprises européennes à la merci de leurs concurrents, tellement plus habiles, c’est un
comble, pour se protéger dans leur pays, ça ne peut plus durer.
La libre circulation poussée à l’excès qui interdit tout contrôle des déplacements de
populations à l’intérieur de l’Europe pouvant mettre en péril la cohésion de nos sociétés et qui
va jusqu’à mettre en concurrence, sur notre sol, nos salariés avec des salariés qui supportent
trois fois moins de charges sociales, ça ne peut plus durer.
Le dumping fiscal et social à l’intérieur de l’Europe, ça ne peut plus durer.
Les frontières extérieures de l’Espace Schengen qui laissent passer des flux d’immigration
incontrôlés, ça ne peut plus durer. L’élargissement sans fin, ça ne peut plus durer.
L’Europe désarmée, l’Europe qui ne défend pas ses intérêts dans le monde, l’Europe qui est la
variable d’ajustement de toutes les politiques de change, de toutes les politiques
commerciales, de toutes les politiques migratoires du monde, l’Europe qui empêche ses
nations de se protéger et qui ne les protège pas, l’Europe qui étouffe sous une masse de
réglementations, l’Europe qui se construit contre les Etats et la souveraineté des peuples, ça
ne peut plus durer.
De ce constat, il nous faut maintenant tirer des conclusions politiques en rupture avec les
atermoiements des dernières décennies. Notre famille politique doit le faire. C’est son devoir
si elle ne veut pas livrer notre pays à des aventures dangereuses et sans lendemain auxquelles
pourraient conduire la colère, et le désespoir de ceux, de plus en plus nombreux, qui souffrent
et qui ont le sentiment de ne plus être maîtres de leur vie.
Ne nous y trompons pas : se résigner à inscrire la politique de la France dans le cadre d’une
construction européenne à la dérive sans le changer profondément serait moralement
inacceptable et politiquement intenable. Cette résignation nous condamnerait rapidement à
l’échec si les Français nous confiaient à nouveau le destin du pays.
Ce qui se joue dans la campagne qui s’ouvre pour les élections au Parlement européen, c’est
d’abord la définition de notre rapport à l’Europe pour pouvoir gouverner demain sans
décevoir aussitôt tous ceux qui nous auront fait confiance.