L`enfer du bagne de Con Dao
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L`enfer du bagne de Con Dao
L'enfer du bagne de Con Dao Un magnifique site naturel... dédié au bagne et à l'emprisonnement Tout d'abord, décrivons la topographie de l'île de Con Dao, avant d'envisager son histoire, et nos impressions après y avoir passé un court séjour. Con Dao, est un archipel comprenant seize îles montagneuses qui représentent une superficie totale de 75 km² pour une population d'environ 7000 habitants. Elle est située au sud-est d'Ho Chi Minh Ville, à environ 230 km, dans la Mer de l'Est ainsi nommée par les Vietnamiens, soit pour nous une petite heure d'avion. La principale île du groupe est Côn Son, dont le bourg principal s'appelle, du nom de l'archipel, Con Dao. Ses habitants se plaisent à lui trouver une forme d'ours et, pour l'une de ses extrêmités, située à côté du resort « Six Senses », le profil d'un éléphant. Mais elle est surtout tristement célèbre pour le bagne de Poulo Condor qu'elle a abrité. Une sombre histoire marquée par l'incarcération D'après une tradition orale vietnamienne, dès le XVIIIè siècle, alors que le Vietnam est divisé en plusieurs seigneuries et connaît d'importants troubles politiques,le futur empereur Gia Long, Nguyên Anh,[insérer une note : empereur fondateur de la dynastie des Nguyen] décide d'exiler sa femme sur l'archipel, en 1784, car celle-ci avait refusé d'envoyer leur fils, le prince Canh, demander une aide militaire au roi de France, Louis XVI, à Versailles, en compagnie de missionnaires français. Le corps de sa femme fut, sur son ordre, jeté à l'eau et l'île où elle avait été exilée porte désormais le nom de Hon Bà, l'île de la Dame. Par la suite, dans la deuxième moitié du XIXè siècle, le Vietnam est conquis progressivement par la France et dès le début de la colonisation dans le sud du pays, en 1862, la construction d'un bagne est décidée par l'administration coloniale française. Au fil du temps le destin de l'île s'affirme. Ainsi sur l'île principale existaient plusieurs prisons. Elles seront d'abord utilisées par l'administration coloniale française jusqu'en 1954 puis de de 1954 à 1975 par le régime du Vietnam du Sud, alors soutenu par les Etats-Unis. Le bagne servait de prison principalement pour des hommes et des femmes, opposants politiques au pouvoir en place. Ainsi de nombreux leaders politiques vietnamiens y ont été emprisonnés pendant toute la période coloniale. Et puis Võ Thi Sáu, véritable héroïne nationale du Vietnam, souvent comparée à Jeanne d'Arc, a été la première jeune femme exécutée sur l'île le 23 janvier 1953. Un culte lui est rendu sur l'île, à la tombée de la nuit dans le cimetière de Hang Duong, aménagé à la mémoire des déportés et des disparus. Une anecdote raconte qu'au moment de son exécution, elle mit une fleur dans ses cheveux, symbole de sa résistance jusqu'au bout, par l'affirmation malgré tout de sa féminité. Sur l'île principale de Con Son, derrière la jetée et le bord de mer, au premier abord, les vieilles maisons coloniales reconverties en café ou en restaurant, ne laissent rien deviner de la présence des bagnes. De même, dans le bagne Trai Phu Tuong, la petite porte et le haut mur, que l'on découvre au bout d'un chemin en terre, permettaient de dissimuler les cages à tigre en cas de visites inopportunes. Derrière ce mur, les détenus étaient entassés dans de petites cellules ouvertes vers le haut, attachés les uns aux autres par des chaînes. Ils y étaient frappés, torturés violemment,forcés à travailler dur. L'administration coloniale française a construit 120 cellules de ce type, ensuite détruites en 1970, puis elles ont été reconstruites par le régime du Vietnam du Sud pendant la guerre du Vietnam et leur nombre a été augmenté à plus de trois cents cellules. Une seule prison pouvait contenir jusqu'à mille prisonniers pendant la colonisation française et deux mille lors de la guerre du Vietnam. On estime que leur nombre a atteint à la fin des années 60 environ 10 000 détenus. Au total, on compte plus de 2 000 prisonniers morts de 1862 à 1975 dont 914, exécutés sur la jetée du débarquement. Parmi ces déportés, des femmes et des enfants dont les deux jeunes adolescentes, Tan et Tao, qui ont inspiré Anna Moï pour son roman Riz Noir(italique). Impression sur le bagne Trai Phu Tuong En arrivant dans les prisons, nous avons tout de suite compris la torture qu'avaient endurée les prisonniers en étant incarcérés à Poulo Condore. Nous avons eu accès à leurs cellules, ce qui a suscité en nous tristesse et compassion. Les mannequins, les explications du guide, les photographies d'époque, nous ont permis de ressentir leur souffrance. Lors de cette visite nous avons mieux compris le récit intitulé Riz Noir, qui raconte l'épouvantable histoire de deux adolescentes emprisonnées au bagne durant la guerre du Vietnam. « Autour de moi, le silence s'est étalé après le tumulte de la journée, les claquements des portes, les bruits de chaînes et les cris. », Riz Noir, Anna Moi. « Après nous avoir menées à nos cachots, et avoir enchaîné nos pieds au barres de fer scellées à l'extrémité du bloc-lit en ciment, les gardiens nous ont laissées tranquilles. », Riz Noir, Anna Moi. « Le bloc de ciment qui sert de lit est froid. », Riz Noir, Anna Moi. « Quelques tentatives d'interjections de geôle à geôle sont punies par les baïonnettes en bambou et le silence s'installe. », Riz Noir, Anna Moi. Chloé Quesne & Alexandre Roiné 2nd B & A