BMW adapte l`injection d`eau à des moteurs turbosuralimentés de

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BMW adapte l`injection d`eau à des moteurs turbosuralimentés de
BMW adapte l’injection d’eau à des moteurs
turbosuralimentés de série
6 cylindres TwinPower Turbo technology de la BMW M4 avec injection d’eau dans le collecteur d’admission
Début 2015, BMW a présenté un système d’injection d’eau installé sur le moteur
turbosuralimenté de la M4 « Safety Car » des MotoGP. L’injection d’eau pour refroidir la
masse d’air à l’admission des moteurs suralimentés n’est pas une nouveauté puisque
cette technique fût dans un premier temps employée dans l’aviation, puis sur les moteurs
de rallye et de Formule 1 des années 80s lorsqu’ils étaient également suralimentés. Le
constructeur annonce maintenant qu'il développe cette technologie pour des voitures de
série et il a même trouvé une parade pour auto-alimenter la réserve d'eau. Des projets
similaires sont également en cours chez la concurrence.
L’injection d’eau sous pleine charge supprime la nécessité de retarder l’allumage pour
éviter le cliquetis tout en prévenant une charge thermique excessive qui endommagerait
les pistons, soupapes, turbocompresseur et pot catalytique. Selon l’étude FEV « Water
Injection for Gasoline Combustion Systems », la réduction de température des gaz
d’échappement, proportionnelle à la quantité d’eau admise, peut atteindre 50°C avec un
rapport de masse entre l'eau et le carburant de 50%.
V8 Oldsmobile à injection d’eau-méthanol
En 1962, la première voiture turbosuralimentée de production, l’Oldsmobile F85 Jetfire V8
3.5 de 158 kW (215 ch), comportait un système d’injection d’eau-méthanol dont la
fonction était identique. Si le réservoir d'eau-méthanol venait à se vider, un second
papillon limitait la charge afin de ne pas endommager le moteur. Ce système n’avait pas
été reconduit en 1964 avec la seconde génération de F85 car de nombreux problèmes
avaient été rencontrés, notamment par ce que les propriétaires négligeaient de remplir ce
réservoir !
Ces dernières décennies, aucune application automobile de série n’a vu le jour en raison
de la contrainte du remplissage et du poids du réservoir d’eau.
Injection d’eau sur la M4 « Safety Car » des MotoGP
BMW M4 GTS
Injection d’eau dans le collecteur d’admission
du moteur de la M4 « Safety Car » des MotoGP.
L’injection d’eau est employée depuis début 2015 par BMW sur le moteur de la M4 utilisée
comme « Safety Car » lors des compétitions de MotoGP. Rappelons que le 6 cylindres
TwinPower Turbo Technology de la BMW M4 de série développe 317 kW (431 ch) de 5500
à 7300 tr/min et 550 Nm entre 1850 et 5500 tr/min. L’air d’admission est refroidi par un
échangeur air-eau grâce à un circuit d’eau basse température dédié comprenant un
radiateur frontal et une pompe électrique.
Le motoriste n’indique pas la valeur du supplément de puissance mais précise que cette
solution permet de garantir des performances élevées en cas de température ambiante
supérieure à 20°C et même avec des carburants d’indice d’octane inférieur – par exemple
le RON 95 E10 rencontré dans certains pays où ont lieu les courses de MotoGP à la place
du RON 98. Il ajoute que la consommation est abaissée de 8%, de même que les
émissions de NOx grâce à une température de combustion inférieure de 25°C, sans pour
cela indiquer la procédure de mesure employée.
L’injection d’eau vient en complément de l’échangeur intercooler et est utilisée lors du
fonctionnement sous pleine charge. Lorsque les gouttelettes sont pulvérisées en aval de
l’intercooler, elles passent de l’état liquide à l’état gazeux en absorbant de la chaleur. En
conséquence, l’air admis est plus dense et le moteur reçoit un plus d’oxygène, ce qui
permet d’augmenter la puissance. Trois injecteurs d’eau sont disposés dans le collecteur
d’admission, chacun étant en face de deux cylindres. La pompe qui alimente ces
injecteurs sous 10 bars est pilotée par le calculateur moteur selon les données de charge,
de régime et de température moteur.
Conduit d’alimentation en eau entre le réservoir et
le système d’injection
Le réservoir de 5 litres situé dans le coffre est protégé contre le gel et l’eau dans la
canalisation allant au moteur est retournée au réservoir après chaque arrêt. En utilisation
intense sur circuit où la voiture roule souvent sous pleine charge, ce réservoir est rempli à
chaque plein d’essence, soit une consommation moyenne et approximative de 8% de
celle de carburant. En cas de défaut de fonctionnement du système, le moteur ne pourra
pas délivrer sa pleine puissance.
Passage à un moteur de grande série
Le constructeur travaille maintenant sur une application pour la grande série avec un
système totalement revu : l’injection n’a pas seulement lieu dans le collecteur mais
également en injection directe dans les chambres de combustion. Ce nouveau système a
été installé dans une version non encore commercialisée du trois cylindres essence 1.5
turbosuralimenté qui développe de 150 kW (204 ch) et 280 Nm.
BMW avance de nombreux avantages :
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La réduction de la température de combustion diminue le risque de cliquetis. En
conséquence, le rapport volumétrique a pu être augmenté à 11,0 :1, au lieu de 9,5
:1 sur la version d’origine, ce qui accroît le rendement sur toute la plage
d’utilisation du trois cylindres.
Le point d’allumage pouvant être avancé et la pression de suralimentation accrue,
la puissance maxi passe à 160 kW (218 ch, soit +7%) et le couple bondit à 320
Nm, un gain de 13% ! A pleine charge, la masse d’eau injectée atteint 30% de
celle d’essence. Le constructeur précise que, selon l’objectif du projet, il est
possible d’optimiser au choix la puissance ou la consommation.
Le rendement est optimisé aussi en cas d’utilisation d’essence à bas indice
d’octane (RON 95). Par ailleurs, cet avantage permet d’envisager l’application de
cette technologie à l’échelle mondiale.
La température de combustion abaissée permet de renoncer à un enrichissement
du mélange dans les plages de charge élevée. L’économie en consommation se
chiffre à 8% dans ce cas. En outre, l’effet de refroidissement réduit les contraintes
thermiques sur les pistons, les soupapes, le pot catalytique et le
turbocompresseur.
Les températures plus basses du cycle réduisent la production de substances
polluantes.
Exemple d’un résultat obtenu
Le système d’injection est fourni par Bosch. Son développement a fait appel à la fois au
département « injection d'essence » et à celui qui a mis au point le système de catalyse
des NOx par système SCR sur les diesels. Ce second département utilise en effet son
expérience du stockage de liquide – en l’occurrence l’AdBlue pour l’application SCR – et
de la gestion des basses températures pour proposer une solution adéquate. Par exemple,
le liquide est chauffé en sortie de réservoir par des résistances électriques.
La masse d’eau est mélangée à l’essence juste en amont des injecteurs, ce qui a demandé
un dispositif de calibrage des deux liquides. Les injecteurs ne sont pas spécifiques malgré
la présence d'eau dont le pourcentage varie de 0 à 30% selon les conditions d’utilisation.
Gestion de l’eau
La gestion du niveau d’eau ne doit pas être une contrainte pour les conducteurs. Selon
BMW, même à haute vitesse sur autoroute, le réservoir d’eau de 25 litres ne serait vidé en
moyenne qu’après 5 pleins d’essence.
Le constructeur développe par ailleurs un moyen d’auto-alimenter ce réservoir en
récupérant la condensation du système de climatisation. Cette solution s’adapte
particulièrement bien à ce concept car la consommation d’eau est bien plus élevée
lorsque l’air ambiant est chaud.
Si la température extérieure passe en dessous de 0°C, l’eau des conduites est refoulée
dans le réservoir dès que le moteur est coupé pour éviter le givrage et la corrosion des
composants. Le réservoir d’eau est logé dans un endroit qui n'est pas en contact avec
l'environnement extérieur.
Plusieurs projets similaires en cours
Plusieurs projets d’injection d’eau pour repousser les limites du cliquetis sont en cours.
Une étude conduite par la société d’ingénierie FEV a montré qu’en cas de mélange pauvre,
les émissions de NOx pouvaient être réduites mais que celles de HC étaient augmentées.
Elle indique également que le point de meilleur rendement peut être abaissé de 3,5%,
voire encore plus si en mélange pauvre le catalyseur à piège de NO x doit être régénéré
moins fréquemment.
Bosch annonce pour sa part une réduction de la consommation de 4% sur le cycle NEDC
et un développement sur un moteur expérimental a permis d’atteindre une baisse de 13%
à 5000 tr/min sous une PME de 20 bars. L’équipementier allemand précise que ce gain
serait supérieur en cycles WLTC et RDE.
Hyundai et l’Institut des sciences et technologies avancées de Corée (KAIST – Korea
Advanced Institute of Science and Technology) développent ce concept sur un 1.6
turbocompressé. L’eau est injectée à 50 bars directement dans les cylindres alors que
l’essence est pulvérisée dans les tubulures d’admission. Des injecteurs prévus
initialement pour l’essence sont employés pour l’eau et ils s'ouvrent 120° de vilebrequin
après le PMH. Le rapport volumétrique est particulièrement élevé sur ce prototype : 13,5
:1. Une baisse des températures des gaz dans la chambre de combustion et à
l'échappement a été mesurée, ce qui a permis d’augmenter l’avance à l’allumage et de
réduire la consommation, mais le constructeur n’annonce pas de chiffre. Hyundai précise
que les avantages sont moindres à haut régime et qu’une masse d’eau trop élevée
détériore le rendement.
Voir également notre dossier Moteurs essence à 200 kW/l et 200 g/kWh, est-ce
possible ?
Auteur : Yvonnick Gazeau
Sources : BMW, Bosch, FEV, Hyundai

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