Lire - Serre de la Madone

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LE COURRIER DU JARDIN “SERRE DE LA MADONE” - JARDIN HISTORIQUE CLASSÉ - N° 1 - JUIN 2001
Mahonia
Qui était cet homme ? Qui était ce major Johnston dont nous sommes chargés de
prolonger les volontés ? Il n'est pas inutile de nous poser la question si nous voulons
savoir où nous allons.
La réponse est simple, il ne reste pour ainsi dire rien du major, sinon quelques
anecdotes, la plupart relatives à son mauvais caractère.
Des compagnons d'expéditions botaniques en Asie se souviennent d'un vieux garçon
maniaque. Pas un seul écrit pour exprimer ses intentions, décrire son projet. Non, il
ne reste de lui que ses deux jardins de Hidcote Manor en Angleterre et Serre de la
Madone en France. Nous devons donc les observer très attentivement pour reprendre l'ouvrage là où il a été abandonné.
Entre temps, la nature, qui se soucie peu de nous, a continué son œuvre et quelques
propriétaires intermédiaires ont laissé des empreintes assez faciles à corriger. On ne
restaure pas un jardin comme on restaure un tableau, une statue, une architecture.
Ce premier numéro de notre lettre d'informations fait donc appel à la sagacité de
deux hommes, l'un botaniste, Franklin Picard, qui connaît sur le bout du doigt les jardins de la côte d'Azur, l'autre, architecte en chef des Monuments
historiques, Pierre Antoine Gatier. Chacun à sa manière apporte des
éléments de réflexion. D'autres vont suivre. Louisa Jones, l'écrivain
des jardins, se livre en ce moment pour le compte du Conservatoire
du Littoral à une recherche extensive sur Lawrence Johnston et ses
jardins. Nous lirons ses révélations dans le prochain numéro de
Mahonia et dans un livre à paraître dans quelques mois.
Ainsi, tandis que Benoît Bourdeau et son équipe de jardiniers
ressuscitent le jardin par leur travail minutieux et continu, nous voulons les accompagner avec des analyses, des expertises, des recherches multiples.
Nous vous proposons par ailleurs de prendre connaissance du calendrier des
travaux, de la fréquentation touristique, des recherches botaniques en cours, des
spectacles, concerts et conférences de l'été et l'automne 2001. Serre de la Madone ne
sera pas entièrement restauré avant deux ou trois ans, mais déjà il vit intensément.
Je vous invite, vous aussi, à participer à l'aventure selon vos talents.
Michael Likierman, président de l'Association.
Mahonia
siamensis
CONSERVATOIRE DU LITTORAL
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Carnet de jardin
Stand aux floralies de Monaco
Ça s’est passé hier...
Pierre Reach, Masterclasses - 19 Août 2000
◗ L’association a été invitée par le
Garden Club de Monaco à participer au
4ème salon " Rêveries sur les Jardins " qui
s’est tenu du 11 au 14 mai 2001 sur les
terrasses du Casino. Un millier de
dépliants distribué en 4 jours..
◗ 12 mai 2001 : Visite de Mme Christine
Lazerges, vice-présidente de
l’Assemblée Nationale et présidente
du Conservatoire du Littoral.
◗ Nombre total de visiteurs de février
à fin avril 2001 : 1096 contre 662 en
2000. Depuis la réouverture du jardin
le 11 février 2000, 4012 visiteurs ont
été accueillis.
◗ 14 mai 2001: Installation du chantier
pour la 1ère tranche de restauration
des bâtiments : maison du gardien.
Les travaux débuteront le 5 juin.
La mémoire
du jardin
par Pierre Antoine Gatier
e domaine de la Serre de
la Madone aménagé par
Lawrence Johnston à partir
de 1924, classé d'office au titre de
la loi sur les monuments historiques le 12 décembre 1990, a fait
l'objet de plusieurs études préalables en vue de sa restauration.
Ces études portant sur le clos et
couvert et sur le jardin ont été
commandées par la Direction
Régionale
des
Affaires
Culturelles.
L'étude sur le jardin remise en
novembre 2000 et approuvée
depuis en commission supérieure des monuments historiques
porte sur la totalité du jardin.
Elle s’inscrit dans le prolongement d’une étude réalisée en
1992 sous la direction de Jean
Claude Yvan Yarmola, architecte
en chef des monuments historiques.
L
JARDIN “SERRE DE LA MADONE” - MENTON
Les participants au Masterclasses Août 2000
Les rendez-vous
de demain...
Concerts
Concertset conférence
JUILLET
◗ 13
Donizetti. Dîner à
23H00 supervisé par
Jacques Chibois.
Andreas Scholl à
21H00. Dîner à 23H00
supervisé par Jacques AOÛT
Chibois.
Masterclasses dans le
◗ 20, 21 et 22
cadre du Festival de
Don Pasquale de
Musique de Menton.
L’étude comportait plusieurs
objectifs :
• préciser la nature du paysage
sur le site avant l’intervention de
L. Johnston, identifier ses
composantes
végétales
et
hydrauliques, comprendre le
fonctionnement du lieu,
• déterminer la manière dont
L. Johnston a réutilisé et réorienté les potentialités du site pour
servir sa composition,
• essayer de situer le jardin dans
le mouvement paysager de
l’époque,
• identifier les différents espaces
du jardin et les situer dans l’ensemble global de la propriété.
Pour atteindre ces objectifs,
l’étude a mêlé travail de terrain
et travail sur les documents d’archives, publiques ou privées.
Les archives concernant ce
domaine sont rares. D'une part,
L. Johnston a la réputation d’avoir peu écrit ou dessiné, d'autre
part la gestion de ses biens
mobiliers après sa mort s'est traduite par une dispersion
presque irrémédiable.
Septembre
◗ 15
Dans le cadre des
Journées du
Patrimoine,
conférence par Pierre
Lieutaghi :
“La flore, témoin de
l’évolution du paysage
méditerranéen”.
En revanche, à l’instar de nombreux jardins ou maisons du
début du siècle, Serre de la
Madone a bénéficié d’un intérêt
de la part de photographes,
amateurs ou professionnels, qui
ont à différentes époques fixé
scènes ou composition reflétant
les transformations du jardin.
Les campagnes de photographies aériennes réalisées à
partir de 1948 donnent en outre
d'intéressantes informations sur
le domaine.
Nous avons pu avoir accès aux
différents fonds, publics ou
privés suivants : fond Giletta,
conservé aux archives photographiques du ministère de la
culture. Giletta, photographe
niçois a réalisé une campagne
de photographies pour un
numéro spécial de la Gazette
illustrée des amateurs de jardins
publié en 1936 sous la direction
d'Ernest de Ganay sur les
jardins du midi, fonds appartenant à Jacques Rodolphe de
Wurstemberger, propriétaire de
1967 à 1986 qui contient de
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L’ e s p r i t d e l a S e r r e …
nombreuses photographies prises vers 1931, date d’acquisition
de la maison principale et des
photographies plus récentes
montrant l'évolution de la végétation à la fin des années 1980,
fond appartenant à un ancien
jardinier Jacky Quarzi.
L'étude du cadastre ancien et
des matrices a permis de préciser la constitution du domaine et
de mettre en évidence la durée
de réalisation du projet conçu
par L. Johnston.
Un travail important d'archéologie de surface a été réalisé sur le
domaine pour retrouver les traces des aménagements aujourd'hui disparus, réseau hydraulique, volière, escaliers ou cheminements, traces de taille sur
les végétaux.
Ce travail de recherche tous
azimut et la confrontation des
résultats ont permis de mieux
comprendre la composition du
jardin et son aménagement. Il
illustre la méthodologie retenue
pour l'approche d'un jardin
historique contemporain et met
en évidence, une nouvelle fois,
l'importance d'une collaboration
étroite avec les différents
acteurs du jardin : témoins de sa
réalisation, jardiniers, utilisateurs etc.
Le parti de restauration proposé
vise à retrouver et à assurer la
pérennité de la composition
initiale, assemblage d’éléments
fonciers indépendants en un
domaine aux différentes entités
contrastées aux fonctions déterminées, tout en proposant des
adaptations liés à son usage
actuel ◆
Stand aux floralies de Monaco
Le Mahonia
notre
emblème.
horticulteur américain (le " Mc "
veut dire " fils de "), peut sembler quelque peu obscur. Mais il
suscite un écho plus prestigieux
en France où le général Mc
Mahon,
descendant
d'une
famille irlandaise, s'est particupar William Waterfield
lièrement illustré. C'est lui qui
conduisit les troupes françaises
armi les soixanteà la bataille de Sedan qui ne fut
dix espèces de
pas des plus glorieuses, mais
Mahonia qui ont été
dont on se souvient dans l'hisrécemment séparées du genre
toire européenne. Plus tard, il
Berberis, la plus spectaculaire est
devint
président
de
la
peut-être le Mahonia siamensis,
République.
dont le nom est associé à celui
Ainsi, le nom de notre
de Serre de la Madone. Dans
magazine,
Mahonia, a une résoleur ouvrage Conservatory and
nance
non
seulement à Menton
indoor plants (vol. I, p. 23), Roger
mais dans toute
Phillips
et
la France et, plus
Martyn
Rix
Une
des
plus
loin encore, en
mentionnent
Irlande et aux
que " cette
belles plantes
États-Unis ◆
belle espèce
P
de la Côte d’Azur…
a été découverte par Kerr
en Thaïlande, mais les spécimens cultivés dans le jardin de
Lawrence Johnson [sic], près de
Menton, ont été récoltés par luimême au Yunnan. À Menton, ils
fleurissent en janvier et février. "
Ils forment un magnifique
ensemble dans les jardins de la
ville (on en trouve un beau spécimen au Clos du Peyronnet,
probablement originaire du jardin de Johnston et distribué par
ses soins). Ils sont pour ainsi
dire inconnus en dehors de cette
zone. Cette rareté peut s'expliquer : l'espèce fleurissant en
hiver, elle n'a pas intéressé les
estivants ; elle est trop piquante
pour les mains douces ; elle
pousse trop lentement pour les
retraités et elle est trop sensible
au froid pour les jardiniers des
régions
moins
clémentes.
Néanmoins, avec son écorce
profondément fissurée, ses
grands épis floraux jaunes très
parfumés et ses feuilles épineuses, c'est une des plus belles
plantes de la Côte d'Azur.
Son nom générique,
Mahonia, en l'honneur de
Bernard Mc Mahon (1775-1816),
Special note for anglosaxon people :
if Mc Mahon was not exactly wild
geese, at least might be considered
wild moorhen.
JARDIN “SERRE DE LA MADONE” - MENTON
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Témoignage...
Vingt ans
après
par Franklin Picard
e jardin Serre de la
Madone représente, à divers titres,
un cas exceptionnel dans l'histoire du jardinage et, en particulier, par ce qui a trait à l'introduction des végétaux exotiques
sur la Côte d'Azur.
Quand on visite ce jardin
aujourd'hui, on ne réalise pas
suffisamment quelles étapes
ont jalonné son histoire. En ce
qui me concerne, j'ai l'impression de l'avoir toujours connu.
Ce qui est très curieux, c'est
que, tout jeune, pendant les
vacances de Pâques dans le
Midi, j'allais respirer avec tant
de joie le parfum du Jasminum
polyanthum qui embaumait le jardin de ma grand-mère. J'ignorais
alors que cette plante grimpante au parfum si suave avait été
introduite
par
Lawrence
Johnston à Serre de la Madone.
Je me rappelle qu'au
cours de ma première visite,
vers la fin des années 1980, j'avais été particulièrement frappé
par la grande hauteur de nombreux arbres ainsi que par l'atmosphère de fraîcheur, mais
aussi de relatif abandon, qui
L
Serre de la Madone
Propriété du Conservatoire
du Littoral
Jardin historique classé créé
par Lawrence Johnson en 1924.
74, route de Gorbio
06500 Menton - France
Tél. et Fax : (+33) 04 93 57 73 90
www.SerreDeLaMadone.com
imprégnait les lieux. Quelques
années plus tard, je fis une nouvelle visite avec Jean-Hubert
Gilson qui s'occupait, à cette
époque, des jardins de Menton
et déployait un grand talent
pour les faire connaître et
apprécier. À l'annonce du classement de Serre de la Madone
comme Monument historique,
je ressentis à la fois un grand
soulagement pour ce jardin
menacé de disparition et la portée considérable de cette décision prise contre l'avis du propriétaire, ce qui n'était encore
jamais arrivé en France pour un
jardin.
J'ai revu plusieurs fois
Serre de la Madone et je ne puis
m'empêcher de citer ici un certain nombre d'arbres et arbustes qui m'ont particulièrement
intéressé parce qu'ils sont soit
uniques en Europe, soit rarissimes, ou tout simplement superbes. Je pense ainsi à l'extraordinaire Quercus leucotrichophora, proche de l'entrée, dont je ne
connais en Europe aucun spécimen aussi bien développé ;
j'évoque le Calodendron capense
avec ses fleurs si belles qu'elles
rappellent les orchidées, les
deux magnifiques Podocarpus (le
P. gracilior est unique en France),
l'énorme Magnolia Delavayi, le
Pittosporum heterophyllum (bien
identifié, tous les autres cultivés
en France sous ce nom étant des
P. truncatum), le Cupressus funebris,
les Pittosporum floribundum aux
fleurs jaunes et au parfum
piquant (il en a existé au jardin
botanique Les Cèdres, à SaintJean-Cap-Ferrat, avant le grand
froid
de
1985),
et
le
Dichotonanthes tristaniicarpa de 70
ans ! Je croyais être le premier à
l'avoir introduit en France jusqu'au jour où je fus détrompé en
voyant le superbe spécimen de
Serre de la Madone.
Je pourrais en citer encore
un grand nombre, depuis le
magnifique Stenocarpus sinuatus
jusqu'au luxuriant Oreopanax
Epremesnilianus, mais je voudrais
surtout dire combien je suis
heureux de faire partie de cette
nouvelle Association des amis
de Serre de la Madone, car je
sais que ce jardin est aujourd'hui entouré de beaucoup de
respect et de compétences.
L'enthousiasme et le
talent de Benoît Bourdeau et de
ses collaborateurs font vraiment
plaisir à voir, et ce serait une
grande joie pour moi, s'ils le
souhaitent, d'apporter mon "
grain de pollen " à cette magnifique aventure ◆
Ficus sycomorus
“Mahonia”
Lettre trimestrielle
Directeur de la publication :
Michael Likierman
ISBN en cours
Crédit photos : Benoit Bourdeau,
C. Merle, Caroline Cambus.
Réalisation graphique : Dynactis
Impression : Graphique Service,
impression sur du papier recyclable
blanchi sans chlore
Avec le concours de la Ville de Menton, du Conseil Général des Alpes-Maritimes,
de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, du Ministère de la Culture et de la Fondation Electricité de France.
CONSERVATOIRE DU LITTORAL