Contextualisme et Acceptation Émotionnelle en Thérapie de Couple

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Contextualisme et Acceptation Émotionnelle en Thérapie de Couple
CONTEXTUALISME ET ACCEPTATION EMOTIONNELLE
EN THERAPIE DE COUPLE.
François ALLARD
DEA & DESS de Psychologie Clinique et Psychopathologie
AFTCC , AFFORTHECC & SFTF
DU de Thérapies Cognitives et Comportementales
DESU de Thérapie Familiale et Systémique
Cabinet : 161 rue des Pyrénées - 75020 PARIS.
-
tel : 01 43 70 64 79 ,
[email protected]
RECHERCHE DOCTORALE DE PSYCHOLOGIE CLINIQUE
Directeur de recherche Pr Alain BLANCHET ,
Co-directrice Mme Marie Carmen CASTILLO
Equipe de Recherche en Psychologie Clinique EA 20 27
Université de St Denis- Paris 8
© Copyright François ALLARD – Reproduction non autorisée sans le consentement de l’auteur.
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LE LANGAGE D’ACCEPTATION DE L’AUTRE
INTEGRATIVE BEHAVIORAL COUPLE THERAPY
RESUME : La Psychothérapie Comportementale Intégrative de Couple ( IBCT, Jacobson , Christensen 1996) met l’accent sur
l’acceptation émotionnelle des comportements de l’autre selon les contingences naturelles plus que sur le désir de changement
gouverné par les règles de la thérapie traditionnelle comportementale de couple ( Jacobson, Margolin 1978). Cette thérapie par
façonnement émotionnel est essentiellement comportementale, et s’inscrit dès le début du renouveau contextualiste avec les
recherches empiriques proposées par S Hayes au niveau individuel (Hayes, Jacobson & coll 1994) ; intégratif veut dire
fusionnement des techniques d’acceptation et de changement. Au départ de ces recherches contextualistes sur le processus de
l’acceptation, D Wile (1981) a inversé l’approche du conflit redéfini comme véhicule de changement. L’ IBCT n’est plus dans un
cadre d’éradication ou de modification directe des comportements négatifs mais dans l’expression émotionnelle comme niveau et
levier du changement des contextes
Le processus expérientiel d’exposition thérapeutique au conflit relationnel selon leurs thèmes (Jacobson , Christensen 1996)
influencent les patterns comportementaux verbaux de blâme des partenaires sur les différences et incompatibilités, depuis la
polarisation coercitive (Gottman, Wright.. ) vers des attitudes collaboratrices en changeant les contextes historiques individuels
générateurs des valeurs personnelles ( Contextual shift ).
Modifiant les attributions individuelles externes de responsabilité du conflit ou des blâmes, la promotion du langage de
l’acceptation par le thérapeute en reformulant la problématique émotionnelle du couple s’opère grâce à 4 techniques, Empathic
Joining, Unified Detachment, Tolerance Building et Self Care (Jacobson,Christensen,..1996-2004).
Il s’agit d’opérationnaliser en psycholinguistique le concept du langage d’acceptation tenu par le thérapeute et son impact
thérapeutique de par la fonction du langage et ses dérivés directionnels. Complétant l’analyse de la modification des
comportements verbaux ouverts en IBCT, menée par Cordova (1998) on peut définir la modalité thérapeutique comme l’influence
réciproque de l’interlocuteur sur le locuteur par la fonction d’acte de langage en pragmatique de la communication soit ipso-facto la
fonction d’usage du comportement verbal dans l’expérience de soi et la coconstruction du sens, ce qui nous conduit à utiliser un
dispositif d’analyse de contenu de discours selon A Blanchet, et MC Castillo 2004.
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BUTS DE LA RECHERCHE :
L’approche de la pragmatique du langage d’acceptation émotionnelle de la différence de l’autre et de ses
comportements comme facteur d’intimité et de satisfaction du couple, selon des processus langagiers de réattribution de la responsabilité des blâmes est abordé à titre de mécanisme thérapeutique lors de mises en situation
de discussion sur des objets de conflit (interaction de couple comme unité d’analyse E Gottman). Les outils d’analyse
langagière de la pragmatique de la communication explorent le niveau inter-relationnel verbal.
L’acceptation de l’autre est un concept lié aux découvertes cliniques identiques de Jacobson et Christensen vers
1981, contemporaines du systémisme, convergentes avec les travaux de S Johnson et L Greenberg (Emotionnal
Focused Therapy) et avec les débuts de l’exploration de l’acceptation de soi au niveau comportemental individuel
(S.Hayes, ACT). Les deux approches comportementales empiriques « à contre-courant », dans le même retour aux
sources contextualistes du comportementalisme, se démarquent du cognitivisme ou psychologie des contenus,
l’IBCT sur des études de significativité essentiellement clinique, de son efficacité thérapeutique (2004)
INTEGRATIVE BEHAVIORAL COUPLE THERAPY
PRINCIPE D’ACCEPTATION DE L’AUTRE COMME BASE NATURELLE DU COUPLE ET DE LA
COLLABORATION. Certains couples réfractaires aux compromis, sont incapables de suivre la Thérapie
Comportementale « Traditionnelle » de Couple ( TBCT 1978). En 1984 Jacobson n’hésite pas à publier les
résultats thérapeutiques décevants de son propre modèle. D’autre part il lui semble qu’importer ex-cathedra des
techniques thérapeutiques non issues des contextes d’application est à l’origine de ces échecs, l’approche
« technique » du seul changement n’est pas la bonne.
Focaliser sur l’acceptation, moteur de l’intimité, s’oppose à l’escalade du processus de polarisation du conflit
focalisant sur le changement et les différences de l’autre devenues « incompatibles ».
POSITION COMPASSIONNELLE VALIDANTE NON-CONFRONTATIONISTE DU THERAPEUTE IBCT
Elle stimule la collaboration à partir des réactions émotionnelles.
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Jacobson a d’abord introduit les principes de communication en thérapie de couple basée sur les théories de
l’échange social ( Boisvert, Beaudry 2004 ) puis s’est centré sur le focus émotionnel dés 1979, pour lui la compassion
est la voie royale de l’acceptation.
Le format thérapeutique est non-didactique, l’ambition n’est pas normative, la séparation n’est pas l’échec d’une
thérapie, on constitue une expérience de compréhension mutuelle qui modifie le contexte et renforce la proximité.
L’ANALYSE FONCTIONNELLE EN IBCT
Afin de ne pas plaquer des techniques importées, l’AF évolutive s’organise à partir de l’analyse des interactions
dynamiques verbales et non-verbales patient-thérapeute.
Elle porte sur les contingences naturelles afin d’orienter les stratégies de promotion de l’acceptation.
LES RACINES COMPORTEMENTALISTES DE L’AF découlent de l’évaluation contextuelle, en identifiant les
véritables variables de contrôle des interactions du couple ( manque de validation, frustration des besoins...) alors
que la thérapie traditionnelle de couple était orientée sur les variables dérivées (conséquents observables : disputes,
dégradation sexuelle...) visant à changer les comportements contractuellement ou selon des règles.
Les affects sont des indices importants de ces facteurs de contrôle de la relation et de la satisfaction conjugale. Ces
variables contrôlantes sont des classes de renforçateurs qui conditionnent les réactions émotionnelles précises aux
comportements de l’autre (comme la frustration de ce dont l’autre est pourvoyeur ou si ses besoins sont
contrariants) rejoignant le point de vue de S Hayes sur le rôle du langage verbal humain.
LA FORMULATION DU « THEME DU CONFLIT » SPECIFIQUE AU COUPLE
Le Feed-back de la séance 4 après l’évaluation initiale par des questionnaires classiques est une occasion de révéler
le thème du conflit du couple et d’aborder le piège mutuel .
Ce thème Unificateur des zones prototypiques des conflits du couple, est un concept organisateur dont la
formulation dynamique est révisable. Il labellise une classe de réponses et de comportements interconnectés ( sexe
sans affection, partage des taches, superficialité, mutisme, conversations intimes etc..) maintenus par des variables
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proches, en identifiant leurs fonctions similaires dans le conflit de base du couple (distance/proximité,
contrôle/responsabilté, artiste/scientiste..)
On le communique au couple en dévoilant le piége mutuel ou ils se sont enferrés par pression-résistance au
changement à l’issue du processus de polarisation et de la focalisation sur les différences.
Les patterns interactionnels récurrents sont identifiés au fur et à mesure de la thérapie de couple (AF).Plutôt que
d’axer sur les techniques formelles de communication, habiletés sociales, résolution de problème, sans les bannir,
on promeut de préférence l’acceptation au prix de ne pas s’axer sur l’agenda de séance.
On sera donc toujours centré sur les contextes et les évènements, pour réactualiser l’AF.
PROCESSUS VERBAL D’ACCEPTATION
PROCESSUS VERBAL DE POLARISATION
Vouloir obtenir le changement de l’autre, à partir de la focalisation sur ses différences inacceptables, dégénère en
interactions destructrices au travers d’une polarisation des comportements verbaux accusateurs par attribution
stigmatisante à l’autre de la responsabilité des blâmes et critiques. (Bradbury, Finsham 1990) .
Le piège mutuel est l’aboutissement de la volonté d’éradiquer la déficience de l’autre , c’est le prix affectif et
comportemental du devoir de changer l’autre et du devoir de résister au changement demandé par l’autre de
manière impérative, avec perte de crédibilité dans un chapelet de conflits ( réciprocité négative immédiate,
champs de mines , , bombes à retardement) . Face à la mutualité coercitive (G. Patterson 1975) caractéristique des
couples en détresse, la thérapie devient un exercice sur corde raide.
Changer les contextes émotionnels des renforçateurs naturels de ces comportements fait évoluer le conflit, ce
processus est verbal et émotionnel car le conflit émotionnel se maintient verbalement. On aide à se dépolariser du
faux problème , la focalisation sur les différence, pour focaliser sur l’intimité ce qui produit à la fin du travail
d’acceptation un « changement drastique des comportements verbaux » du couple (Jacobson 1996).
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*L.Cordova (1998) a différencié ces facteurs thérapeutiques de ceux des stratégies de changement direct, en
explorant la modification de certains niveaux des comportements verbaux observables, en thérapie. L’éfficacité de
l’IBCT due à l’intégration de l’acceptation, supérieure à la TBCT est confirmée par Christensen ( 2004) dans la
plus importante étude à ce jour en thérapie de couple. Nous nous inscrivons dans cette perspective de recherche.
STRATEGIE D’ACCEPTATION EMOTIONNELLE DE L’AUTRE
Quatre techniques de base pour apprécier la différence de l’autre et en user à titre intime fusionnent avec les
techniques traditionnelles.
- Empathic Joining : le thérapeute reformule compréhensivement le comportement négatif dans le contexte de
l’histoire du couple pour amoindrir la souffrance de l’autre, exposition réciproque au dévoilement de soi (soft self
disclosure) et compréhension mutuelle expérimentée individuellement des différences naturelles, inévitables.
- Unified Détachement : le problème analysé intellectuellement et décrit objectivement par le thérapeute devient un
élément qui les rapproche et les rend capables de discuter : « reconnaissance avec prise de distance que c’est leur
problème ».L’analyse objective s’accompagne par l’auto-observation
- Tolérance Building : si l’acceptation est impossible il faut créer une ambiance thérapeutique pour neutraliser
l’impact des comportements négatifs ou des critiques afin de changement. On récupère plus rapidement des
conflits, indésirables mais acceptables. (exposition au conflit afin d’une désensibilisation en séance, jeu de rôle,
taches, répétition au domicile du comportement problème simulé…)
- Self Care : Tactiques de protection et d’alternatives par auto-dépendance émotionnelle pour prendre soin de soi et
ne pas entrer dans l’escalade émotionnelle ou accroître la détresse du couple, ne pas s’aliéner plus .
Le Processus d’acceptation se substitue comme une sorte d’expérience émotionnelle de compréhension mutuelle et
empathique, antagoniste à la polarisation par l’intervention essentiellement verbale du thérapeute reformulateur,
nous explorerons son niveau langagier.
Le travail d’acceptation des patients, phénomène représentant la base naturelle du « couple heureux », est soutenu
par le thérapeute. Par sa capacité de lire l’expression émotionnelle, par la validation de la souffrance qui devient
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compassion, il redonne sens à la relation. La communication non-défensive satisfait les besoins et valeurs
individuelles de base et les stratégies naturelles de succès du couple.
FAÇONNEMENT DES COMPORTEMENTS VERBAUX
EMOTIONNELS DU COUPLE.
Générés selon les contingences naturelles, les comportements apparaissent plus sincères, moins contraignants et
plus authentiques, plus acceptables que les changements « forcés » des comportements formels ou gouvernés par
les règles qui se manifestent par leur lisse compliance aux consignes qui ne viennent pas à bout de la polarisation :
peut-on simuler la tendresse ?
On utilisera toujours les modules classiques pour certains couples.
Le thérapeute guide le couple en mettant l’accent sur l’expérience émotionnelle de celui qui écoute la requête ou la
plainte, en accentuant les descriptions personnelles de chacun....
La formulation permanente par le thérapeute clarifie les sources véritables de la détresse, sans mobilisation de la
défensivité, le couple est amené à dialoguer, à collaborer, à faire des compromis .
L’acceptation, en contournant le problème fait du conflit un véhicule d’intimité qui finit par les rapprocher ( D Wile
1981). L’appréciation des différences aboutit à voir le conflit comme constructif, comme opportunité plutôt qu’à
l’éliminer. Co-produit naturel du processus, on met fin à la dépendance aux changements désirés-forcés .Puisque
« des conflits » il s’en reproduit chez tout couple donc apprendre à savoir le gérer est le plus simple.
LE LANGAGE DE L’ACCEPTATION :
Processus et objectif de la thérapie par des stratégies discursives et de formulation des discussions, générales ou sur
des événements, le langage de l’acceptation doit accentuer l’expérience propre de la personne plutôt que porter
sur les actes du partenaire. Pour maintenir le focus thérapeutique on usera du langage idiosyncrasique du couple.
En faisant comprendre, créant du vivant, des métaphores, on va nourrir une nouvelle expérience fondatrice du
problème qui devient source de force et de proximité.
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Encourager la révélation de la vulnérabilité de l’interlocuteur aide à développer l’empathie et l’intimité du
locuteur. Seul le thérapeute peut structurer verbalement la contrepartie souple des émotions dures divulguées sans
leurs composantes agressives (derrière la colère, la blessure, sous les pavés la plage). « S’il n’a plus à manifester
sa défensivité, l’auditeur devient capable d’écouter plutôt que demander de changement ».
L’approche pragmatique traite exactement des types d’interactions.
Changement indirect : Modelé par le travail de formulation langagière accompagnant cette autre forme de
changement qu’est l’acceptation, le patient sera plus motivé à comprendre l’autre plutôt qu’à le repousser et
finalement sera plus motivé à changer.
L’intervention comportementale est (inter)-active. Pour être crédible et que sa perspective prenne part à l’histoire
du couple, le travail de formulation langagière doit d’abord être laissé au thérapeute. Par exemple le thérapeute
contrôle le contexte ou le stimulus aversif est expériencié graduellement pour accroître la tolérance.
*Le niveau individuel de l’acceptation de ses émotions dans la confrontation aux différences, est l’alternative à
l’évitement de l’expérience de l’évènement lié au stimuli aversif . Par frustration, désir de changer l’autre, la
personne focalise sur ses ressentis négatifs, les refuse donc n’est pas présente à soi par refus du contact avec ses
expériences privées et avec les évènements (S Hayes1992) et finalement refus du contact intime avec l’autre.
UNE THEORIE COMPORTEMENTALE
DE L’USAGE FONCTIONNEL DU LANGAGE
Pour S Hayes essayer de réguler ses émotions est une cause majeure de psychopathologie, ce should est un faux
besoin désirable culturellement, comme l’auto-prophétie de l’épanouissement ou du contrôle de l’angoisse, des
émotions « négatives » qui commandent de supprimer-éradiquer toute pensée émotionnelle inconvenante. Nous
réagissons aux mots que nous utilisons pour décrire et interpréter les expériences, comme s’ils étaient ces
expériences elles-mêmes . Cette fonction d’équivalence entre symbole et référent date de l’acquisition du langage
et des règles comportementales par un transfert mutuel de fonction ( Skinner 1956). Le langage est source
d’évitement. Ces règles verbales ou comportementales guident ces efforts délibérés de changement par évitement.
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Il y a donc une barrière verbale à l’acceptation, car par le langage, l’humain reproduit ce qui n’a jamais été
expérimenté et cautionne l’idée que « pour être heureux » il y a quelque chose dans son histoire qui doit être
changé, c’est un leurre verbal.
Le couple est hypersensible aux mots, qu’on adresse à l’autre en cherchant les stimulis les plus aversifs dont
résonnent les émotions. Ce qu’on cherche à éviter pour soi devient immédiatement ce que l’autre cherche à
provoquer pour éviter à son tour, tout est falsifié par le langage de blâme.
Dans les thérapies centrées sur des contenus, on focalise sur l’essai de changer l’évènement verbalisé lui-même
comme problématique. Le retour de l’évènement est alors traumatisant et sensibilisant.
Dans les thérapies centrées sur les contextes on utilise la formulation verbale qu’il y a des évènements
problématiques conduisant au faux besoin de désirer changer l’évènement. C’est l’apport de l’IBCT
La pragmatique de la communication va permettre d’étudier les niveaux langagiers interlocutoires propre aux états
mentaux et émotionnels qui relèvent de cette barrière verbale à l’acceptation.
L’acceptation comme tolérance aux significations des émotions, se manifesterait spécifiquement par certains
marqueurs langagiers au travers des échanges, de la prise du sens entre les interlocuteurs lors des conversations
thérapeutiques, à saisir in status nascendi.
PRAGMATIQUE DU LANGAGE
LANGAGE ET PSYCHOLOGIE PRAGMATIQUE
A partir du pôle linguistique elle s’intéresse à l’étude des phénomènes langagiers en situation ; c’est une sciences
du langage pour la recherche ( Pierce, Searle )
a- Le langage est lui-même support des interactions cliniques, donc la pragmatique peut permettre d’explorer le
cadre des échanges thérapeutiques.
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b- La plupart des troubles s’exprimant par le langage, M.C. Castillo (1998), propose de les analyser selon les
contenus exprimés dans les discours afin d’accéder à sa fonction d’utilisation pour le sujet, en fait sa forme et son
usage (la négation dans la thérapie des dépressions MC. Mirabel Sarron 1998) ou dans les manifestations de
l’organisation du langage dans les étude sur les schizophrénies.
c- L’usage du langage présuppose des compétences pragmatiques apprises qui permettent d’interpréter le sens des
communications (aspect sémantique). Dans les actes de langage, ces compétences sont inséparables de l’altérité et
des contextes d’énonciation.
Le contexte « interlocutoire » ouvert pour A Blanchet (2005) : Le langage ne reflète pas statiquement la pensée,
parler signifie aussi agir et cette activité de penser en acte sert d’instance de pilotage à la production discursive.
Le langage n’est pas un code qui traduit la pensée mais c’est un outil qui la forge.
Les indicateurs langagiers traduisent alors un processus de construction et un certain rapport à l’auditeur et au
contexte. C’est à partir de leur inscription dans un contexte que le sens est attribué aux mots et que les
significations sont construites par les acteurs du dialogue
Le contexte « comportemental » couvert pour Jacobson (1996) est la composante de l’influence exercée par les
apprentissages historiques, les expériences s’ajoutent et changent le contexte de telle manière que ça produit des
mouvements qui influencent la personne longtemps après.
Coïncidence des contextes : L’impact thérapeutique en IBCT consistera à influencer verbalement le comportement
verbal du couple par des expériences que le thérapeute peut orchestrer (Contextual Shifst , Jacobson, Christensen).
Le contexte discursif organise les glissements contextuels chez les interlocuteurs par experiencing.
LA PSYCHOLINGUISTIQUE PRAGMATIQUE.
C’est l’étude du langage en situation qui intègre le rôle des utilisateurs et les situations ou il est utilisé.
Elle intégrerait le processus d’acceptation de l’autre à la logique de l’enchaînement du discours correspondant à la
séquenciation des pensées ou la réponse de l’auditeur a une part prépondérante dans l’imputation du sens des
énoncés, elle est susceptible d’influencer la pensée supposée du locuteur calculant l’effet de son énoncé, donc une
partie de sa signification rétroactivement dans la réponse de l’autre, l’opérant langagier étant le support de sens
dans l’acceptation de l’autre et de ses émotions propres.
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C’est aussi vrai du processus de polarisation des comportements verbaux coercitifs, mais on voit que le processus
interactif du langage de l’acceptation est le quasi-parangon, n’en étant pas l’application thérapeutique, des théories
interlocutoires de la pragmatique de la communication qui se penche sur l’acte de parole et son effet de sens.
FONCTION THERAPEUTIQUE DU LANGAGE
Chez le sujet énonciateur, l’engrenage de l’acte sur la pensée permet ce que A. Blanchet nomme une
réorganisation du mode de pensée et du processus de régulation du discours, dans les thérapies « verbales » d’où
les théorie de l’influence en thérapie.
Le processus d’harmonisation du discours thérapeute/patients (L. Masse 1998) serait modelé par le thérapeute
IBCT ou les bons marqueurs thérapeutiques apparaissent lorsque le couple intègre et utilise quasi-littéralement les
formulations verbales du thème de leur conflit proposées par le thérapeute
Une modification thérapeutique du comportement verbal, entraîne bien une modification des états mentaux et une
réorganisation émotionnelle, selon la théorie de l’intention sémantique de S. Hayes (1992) Le processus
d’acceptation se traduit ipso-facto par des modifications du langage dans la relation thérapeutique (C . Lecomte) et
sous la forme d’états mentaux ( pleine conscience )
L’acceptation de soi se conjugue à l’intention sémantique,
l’acceptation de l’autre avec l’intention pragmatique.
LE DIALOGUE THERAPEUTIQUE AU SENS PRAGMATIQUE
La modalité dialogique de négociation des conflits du couple peut s’envisager au travers des principes de base de la
psycholinguistique tels que proposés par A. Blanchet et C. Chabrol (1999) :
Tous les processus psychologiques sont latents et inférés à partir de leurs manifestations langagières et
comportementales renvoyant à l’intentionnalité, aux schémas, émotions, scripts, représentations, ces phénomènes
mentaux sont des produits des interactions ou les acteurs sociaux se constituent comme sujets. Les actes de parole,
participent des buts et des enjeux des interactions sociales (pragmatiques) et au projet de sens des sujets
(sémantique).
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Ils s’articulent dans le langage interlocutoire comme des produits enchaînés les uns aux autres selon des principes
déduits naturellement des structures d’échange qui contribuent eux-mêmes à modifier les projets de sens des sujets
en situation et à terme des représentations de soi, du monde, des autres .
Les patients en thérapie tendent aussi à structurer leur matériel discursif selon les modes implémentés par
l’influence du thérapeute.
S’il y a élaboration empirique et intégration progressive du concept d’acceptation par le couple lui même, ce type
d’implémentation ou de changement apparaît donc dans l’évaluation d’un certain nombre de marqueurs langagiers
spécifiques qui pourraient constituer une connaissance originale des indicateurs du changement induit.
La pratique de l’analyse de contenu permet de rendre compte d’un des fonctionnements de la pensée autrement
inaccessible au travers d’un « ensemble d’index et de signes dont le sens est constitutif de l’effet qu’il produit sur
l’autre et donc en retour sur celui qui l’énonce » selon Blanchet et Ghiglione (1991).
Ce phénomène psycholinguistique est insécable de l’objet d’étude en interaction permanente, ici le couple.
- Elle vise une description objective non-interprétative des phénomènes discursifs
- Elle utilise des catégories linguistiques fonctionnelles non arbitraires et thématiques
- Elle est une procédure quasi-automatique de traitement des données.
L’ANALYSE LINGUISTICO-PRAGMATIQUE
Une connaissance formelle des processus langagiers, permet d’identifier et de dénombrer les indices langagiers
renvoyant à l’expression verbale des états psychologiques, émotionnels, cognitifs.
Le signe linguistique est utilisé comme symbole pour parler d’autre chose, de nature différente. ( B. Lamboy 1998)
Les approches linguistiques ont une théorie de l’objet en analysant les phénomènes langagiers avec des référents
théoriques et des outils méthodologiques adaptés à ce type d’observable. L’approche linguistique fonctionnelle
associe les formes linguistiques et les significations mentales. L’analyse pragmatique fonctionnelle des indicateurs
langagiers vise à définir les formes langagières qui rendent compte des états mentaux et propose de modéliser
l’expression explicite des états mentaux dans les discours.
Il y a 3 grandes fonctions du langage ( Ghiglione, Blanchet 1991)
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- La fonction référentielle qui définit et identifie les objets dont on parle et/ou le signe linguistique renvoie à la
réalité extra linguistique , noms, prénoms, prédicats, joncteurs substantifs de sentiment d’attitude, de perception,
épistémiques (idée, colère, envie) adjectifs qualificatifs, subjectifs (tristes, conscient, gentil..) adverbes subjectifs
(amoureusement...) verbes psychologiques.
Ces formes langagières peuvent être catégorisées en fonction de l’état mental auquel elles se référent ; il y a 5
grandes classes d’états mentaux ( cognitions, émotions, volition, impression-sensation, évaluation).
- La fonction modale explicite les attitudes ou états mentaux à l’égard de l’objet, du monde dont parle le locuteur
(ses propres états mentaux par exemple) et à l’égard de son interlocuteur, processus réalisé au travers des formes
lexicales et syntaxiques, (modalisateurs verbaux, adverbiaux, prédicats modaux, modes et temps verbaux) .
- La fonction illocutoire du langage permet d’agir et d’altérer l’état de l’interlocuteur soit d’accomplir des actes,
assurée par des verbes performatifs et des mécanismes interlocutoires d’implicitation ; ici la condition de sincérité
de Searle (1985) est un lien entre acte de langage et état mental, soit les états intentionnels ou on affirme l’état
psychologique correspondant à l’acte de langage.
L’analyse pragmatique fonctionnelle des indicateurs langagiers est d’un grain plus fin que l’observation
concomitante du comportement verbal pour connaître la signification émotionnelle du concept d’acceptation de
l’autre, pour explorer l’efficacité du processus thérapeutique du langage de l’acceptation.
LA VALIDATION SPECIFIQUE DU
TRAVAIL DE L’ACCEPTATION DE L’AUTRE
Si la TBCT est suppressive des émotions négatives, il ne faut pas oublier que Jacobson a privilégié dès 1986,
l’affect expression et l’intégration de l’affect focused en thérapie de couple.
Le déploiement des comportements verbaux liés à l’acceptation altère le contexte en séance thérapeutique pour
faire mouvement depuis la confrontation à l’adversaire vers l’engagement à la collaboration envers la différence (
référence de l’entraînement formel à la communication).
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La comparaison intra-modèle de Cordova (1998) comparant les techniques de changement et d’acceptation, a
différencié l’impact de la stratégie de l’acceptation en IBCT sur la communication
Il a montré des différences structurelles affectant les niveaux initiaux d’expression émotionnelle verbale en
séance, à partir des 2 techniques principales du travail d’acceptation (Cordova 1999) Empathic Joining évocatrice
de la proximité émotionnelle empathique.
-Soft Expression : émotions douces , amour, vulnérabilité... génératrice d’un environnement de non-hostilité
versus Hard Expression : expression d’émotion dures , mépris, colère... générant représailles défensives) et
Détachement Unifié (DU) qui encourage à se joindre ensemble face au problèmes insolubles communs, conducteur
par hypothèse de l’engagement dans le problème (EP, ex : contre-blâmes croisés, revendication/repli....)
Ces 4 variables analysées à partir d’une grille de cotation des comportements verbaux ont montré la spécificité des
facteurs d’évolution de ces comportements liés au processus d’acceptation.
UNE METHODOLOGIE PRAGMATIQUE D’ANALYSE DU PROCESSUS THERAPEUTIQUE
La mise en évidence du mécanisme de l’acceptation chez les patients doit se compléter par un type d’analyse
linguistico-pragmatique .
La grille catégorielle d’observation des comportements verbaux utilisée par Cordova,(1998) est auto-référente, elle
détermine son propre objet d’étude ; ce qui est découvert est une construction entre les comportements induits par
le chercheur, la théorie du processus sous-jacent, son analyse et son codage, l’objet d’étude est surimposé sur
l’objet manifeste. Cette centration sur l’objet d’étude assure à l’étude de Cordova une grande pertinence clinique
mais le cadre théorique pré-existant est externe aux phénomènes langagiers dont nous avons montré l’intérêt.
Néanmoins il signale bien l’existence d’un processus thérapeutique par influence verbale, de modification au
niveau du mécanisme et des échanges langagiers, observables composé de marqueurs langagiers.
S’il y a une relation entre la décroissance des discussions non-blâmantes et la croissance de l’expression des
émotions souples avec décrue de la détresse conjugale, c’est que le langage de l’acceptation, représentatif de ce qui
correspond psychologiquement à l’acceptation de l’autre, a été intégré (il est modélisé, le thérapeute lui-même
doit être acceptant même du non-désir d’acceptation ).
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L’analyse pragmatique focalise sur des indices langagiers (M C Castillo, Mirabel Saron et Blanchet 1992) comme
l’approche procédurale avec classification des interventions langagières du thérapeute ( A Blanchet,1997) selon
l’objectif discursif recherché et le type de relation unissant le discours du thérapeute à celui du patient. On peut
donc s’intéresser à ce processus spécifique au niveau de la recherche, sans préjuger de ce qui est vraisemblable,
que pour accepter l’autre il faut s’accepter soi-même et réciproquement, le langage en est sa meilleurs expression .
CONCLUSION PROVISOIRE
Fondée sur une description objective des phénomènes langagiers et psychologiques qu’on peut recueillir dans les
verbatims des protagonistes, appliquer la pragmatique de la communication a aussi l’avantage d’être non-partialle,
reproductible et systématique. Explorer l’acceptation interactive par sa correspondance avec des marqueurs
langagiers, complète les recherches de la neuro-psychologie cognitive sur la Mindfullness (C André 2005).
* Neil.S Jacobson ex-président de l’association américaine de promotion des thérapies
comportementales, a été un pionnier du contextualisme et des études empiriques sur le concept
d’acceptation, pionnier de l’intégration de l’expression des émotions dès 1981. Chef de fil de la
recherche en thérapie de couple en 1991, redéfinissant l’évaluation des résultats thérapeutiques par la
significativité de l’efficacité clinique vraie et à laquelle il a soumis son premier modèle de thérapie
comportementale de couple en 1984, il avait introduit l’entraînement à la communication en 1979, le
rôle des émotions. Andrew Christensen a poursuivi la validation de l’IBCT après 1999…
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