livre l`espace plastique - Exposition au musée d`art

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livre l`espace plastique - Exposition au musée d`art
Olessia Koudriavtseva-Velmans
L’espace plastique du livre
Edition associative L’ART INTEMPOREL
Paris 2009
L’espace du livre est un espace qui depuis l’existence de l’écriture
attire l’attention des artistes. C’est un espace matériel mais c’est aussi un
espace esthétique qui inspire les artistes par le support qu’il offre. À ce
titre, quand on réfléchit sur les liens entre l’édition de livre et les arts
plastiques, on imagine d’abord le livre illustré par l’artiste. Toutefois, cette
association entre l’image écrite et l’image dessinée du livre est réductrice
puisque la plupart du temps l’image ne fait qu’accompagner le texte. La
question est de s’interroger sur les liens qu’entretiennent les images,
qu’elles soient écrites ou dessinées, dans l’espace du livre d’artiste ?
D’emblée, nous opposons, dans le cas du livre d’artiste, les images
illustrées, celles qui sont placées à côté du texte pour l’accompagner, et
les images décorées, celles qui participent de l’acte de création à part
entière, celles qui sont tout sauf des motifs de décorations. À partir de
l’œuvre de Matisse, nous montrerons comment le peintre, par ses œuvres,
met en scène l’autosuffisance du texte et de l’image. Nous poserons
également la question de l’aspect plastique de ce genre de livre à travers
certains livres d’artistes comme ceux de Sonia Delaunay et de ses robes
poétiques ‘décorées’ avec les vers de ses amis L. Aragon, V. Maïakovski et
T. Tzara, ou ceux de V. Maïakovski qui crée ses poèmes « plastiques »
sous la forme d’affiche ou d’affiche sous la forme de poèmes, avec la
fameuse série satirique Okna ROSTA par exemple. Mais il y a aussi J. Gris
qui compose une nature morte cubiste avec deux compositions parallèles :
celle du texte et celle de la forme plastique pour créer l’image unique d’un
dessin-poème. Le texte et l’image dans le cas de l’œuvre de J. Gris sont
liés par la plasticité unique de l’œuvre qui est poétique et artistique à la
fois. C’est un dialogue des mots et des dessins qui ne s’illustrent pas
réciproquement mais confirment leur réalité :
As de pique
Ce verre
La cendre de la pipe
Bougie éteinte plantée sur mes amours
Matin pluvieux
Et cet ennui qui pèse
Le jeu de cartes où rêve l’avenir. (Juan Gris (1887-1927)
Nature morte avec poème)
Le début du XXe siècle est aussi une période durant laquelle les
écrivains et les poètes sont très impliqués dans les arts plastiques de leur
époque. L. Aragon écrit un ouvrage sur Matisse, G. Apollinaire s’intéresse
au fauvisme et écrit un petit livre de 21 pages intitulé Henri Matisse, 0718 dans lequel il dit à propos de Matisse : « il n’y a pas des rapports
entre la peinture et la littérature, et je me suis efforcé de n’établir à cet
égard aucune confusion »1. En fait, Matisse ne renonce pas aux liens entre
la peinture et la littérature, il montre simplement que « l’expression
plastique est un but, de même que pour le poète l’expression lyrique »2.
Matisse est un artiste pour lequel le livre est une œuvre d’art
plastique à part entière : « Je dis du tableau : son intérêt n’envahit pas le
spectateur, qui doit aller au devant. C’est une image. Comme le livre, sur
le rayon d’une bibliothèque, ne montrant qu’une courte inscription qui le
désigne, a besoin, pour livrer ses richesses, de l’action du lecteur qui doit
le prendre, l’ouvrir et s’isoler avec lui - pareillement le tableau, encerclé
dans son cadre et format avec d’autres tableaux un ensemble sur le mur
d’un appartement ou dans un musée, ne peut être sans que l’attention du
spectateur se concerne spécialement sur lui »3. Dans les deux cas pour
être apprécié, l’objet doit être isolé de son milieu. Ici, il ne s’agit pas de la
plasticité du livre comme un concept autour duquel sont organisés les
espace matériel et spirituel du tableau « encerclé dans son cadre ».
Pourtant dans cette citation que Matisse adressée au critique soviétique
Alexandre Romm, il confirme l’équivalence de l’espace spirituel du livre et
du tableau, équivalence qui demandent au spectateur ou au lecteur
d’activer leurs sens et leurs forces intellectuelles pour plonger entièrement
dans l’œuvre écrite ou dessinée.
Matisse parle souvent du livre comme d’un « espace vital » dans
lequel il puise ses analyses. Il parle aussi d’équivalence entre le tableau et
le livre, entre le lecteur et le spectateur. Il affirme au sein du livre que
« le dessin doit être un équivalent plastique du poème »4. Pour lui, c’est la
réunion de ces deux systèmes informatifs, le texte et l’image qui va
donner au livre, une forme plastique unique : « Chaque œuvre est un
ensemble de signes inventés pendant l’exécution… Sortis de la
composition pour laquelle ils ont été créés, ces signes n’ont plus aucune
action »5. Le texte et l’image unis dans un livre par le peintre et l’écrivain
doivent selon Matisse « agir ensemble, sans confusion mais
parallèlement »6.
1
APOLLINAIRE Guillaume, Henri Matisse.1907-1918, Paris, l’Echoppe, 1993, p.7.
Ibid.
3
MATISSE Henri, Lettre à A. Romm du 17 mars 1934, in Bois Yve-Alain, Matisse et Picasso, Paris
Forte Worth. Flammarion et Kimbell. Art Museum, 1998, p. 80.
4
MATISSE Henri, Ecrits et propos sur l’art, Paris, Hermann, coll. Savoir : sur l’art, 1972, p.
214-215.
5
Ibid, p.248.
6
Ibid, p. 214-215.
2
Dans une lettre à Raymond Escholier, Matisse distingue le livre
décoré du livre illustré. Il marque ainsi la différence entre l’image comme
décoration et l’image comme illustration : « Je trouve juste votre
distinction du livre illustré et du livre décoré, le livre ne doit pas avoir
besoin d’être complété par une illustration imitatrice »1. Parlant du livre
décoré, Matisse estime qu'il ne doit pas y avoir de hiérarche entre
l'écrvain et l'artiste : tous deux travaillent dans le sens de l'oeuvre à
créer. Il exprime également son refus d'une esthétique « mimétique»
imitant le réel. Il préfère réfléchir sur une esthétique sémiotique,
autrement dit une esthétique des « signes plastiques » par laquelle il
communique avec le spectateur de façon libre à travers une syntaxe tirée
des éléments du réel. Il voit alors le livre en tant qu'œuvre composée
d'une « plasticité » conceptuelle dans laquelle l’image écrite équivaut à
l’image dessinée. L’écrivain crée alors ses propres signes plastiques ;
l’artiste inventant les siens. Matisse, dans ses écrits, explique à l’éditeur
Tériade qu'« un grand peintre est celui qui trouve des signes personnels et
durables pour exprimer plastiquement l’objet de sa vision »2.
Si « l’image est un équivalent plastique du poème », alors
l’importance d’un créateur, qu'il soit artiste-plasticien ou écrivain « se
mesure à la qualité de nouveaux signes qu’il aura introduit dans le
langage plastique » comme il le fait remarquer à Aragon3. Matisse cherche
dans ce type de livre une certaine autonomie pour pouvoir faire dialoguer
l’écrivain et le spectateur, dialogue impossible avec l’illustration qui se
contente d'imiter le texte. Dans ce dialogue entre l'artiste et l'écrivain,
Matisse 'suit' le texte de l'écrivain mais il essaie de trouver un équilibre
entre image et texte en vue de mettre à jour une véritable langue
plastique, celle de l’œuvre. C’est ce véritable dialogue qu’il ne l’a pas
trouvé dans La rose de sable de Montherlant, texte qu’il renonce à décorer
en 1937 puisque c’est « un livre où tout est dit », où il ne pouvait «… rien
ajouter. Montherlant matérialise parfaitement ce qu’il voit. Il ne reste pas
de place pour un compliment visuel ».4
Ce que Matisse n’a pas réussi à faire avec Montherlant, il le réussit
avec d’autres écrivains et poètes. Selon ses bibliographes, Matisse décora
près de cinquante textes. Il fit la couverture du n° 9 daté du 15 octobre
1936 de la revue « Minotaure» des édition de Tériade et Skira. La même
année, il fait une maquette composée pour la première fois de motifs
géométriques en papier découpé, découpages qui vont marquer fortement
son œuvre. En décembre 1937, sort la revue « Verve » de Tériade dont
Matisse réalisera trois couvertures : n° 1 ; n° 21-22 ; n° 35-36. Il
participera aussi aux n° 3 ; 4 ; 8 ; 13 ; 23 ; 27-28. Il illustre également
1
2
3
4
Ibid, p.214.
TERIADE, Tériade, Ecrits sur l’art, Paris, Adam Biro, 1996, p. 384.
MATISSE Henri, Ecrits et propos sur l’art, op. cit., p. 172.
Ibid, p. 214.
les livres Pasiphaé de Ronsard, Repli de Charles d’Orléans et Jazz. Entre
1941-1943, Matisse travaille sur tous ces livres en même temps : « Il
n’avait pas encore achevé son Ronsard, il allait entreprendre Baudelaire, il
s’était laissé emporter par Charles d’Orléans »- explique Louis Aragon.1
L’élaboration du Florilège des Amours de Ronsard comportant cent vingthuit lithographies originales a duré sept ans. « Son chemin vers Ronsard,
Matisse l’a trouvé tout seul. Peut-être lira-t-on Ronsard autrement, après
Matisse »…- remarque Lydia Delectorskaya.2 Mais c’est en 1932 que
Matisse réalise son « premier livre »3 décoré de poésies de Mallarmé. Il
travaille simultanément sur le panneau de La danse commandé par un
collectionneur américain Barnes. Ces deux travaux parallèles se
pénétraient et s’influent. Ils montrent vraiment que le dessin est
l’équivalent de la poésie. À propos de La danse, Matisse déclare : « Mon
but a été de traduire la peinture en architecture, de faire la fresque
l’équivalent du ciment ou de la pierre »4. Matisse travaille à cette époque
sur la plasticité dans l’espace du livre et dans l’espace de l’architecture.
Cette recherche esthétique trouve sa véritable expression dans les
décorations qu’il entreprend des poèmes de Mallarmé. Ce travail lui
permet de passer d’une esthétique imitatrice fondée sur la mimesis à une
esthétique sémiotique avec toutes les contradictions de l’œuvre
transitoire. Lors de conversations avec Aragon, Matisse souligne que ce
poème de Mallarmé révèle son esthétique des signes plastiques5.
Matisse choisit le poème de Mallarmé « Las de l’aimer repos… » pour
bien marquer les liens entre poésie et peinture :
« Imiter le chinois au cœur limpide et fin
De qui l’extase pure est de peindre la fin
Sur ses tasses de neige à la lune ravie
D’une bizarre fleur qui parfume sa vie… »6
Pour cela, Matisse dessine une main qui décore une tasse en
porcelaine, métaphore traduisant l’imbrication entre les vers du poète et
le travail de décoration de l’artisan chinois. Matisse réalise ainsi le livre
totalement, de sa mise en page au choix des rehaussés de lettrines en
apportant un soin tout particulier dans les rapports visuels entre l’image
et le texte. « Il est le premier à avoir considéré chaque double page dans
son ensemble, sans qu’il y ait domination de l’image sur le texte ou
1
ARAGON Louis, Henri Matisse, roman, Paris, Gallimard, 1998, p. 325.
DELECTORSKAYA Lydia, l’Apparente facilité, Henri Matisse : peintures de 1935-1939, Paris,
Adrien Maeght éditeur, 1986, p. 72.
3
MATISSE Henri, Ecrits et propos sur l’art, op.cit., p. 211.
4
MATISSE Henri, Ecrits et propos sur l’art, op.cit., p.140.
5
ARAGON Louis, Henri Matisse, roman, op. cit., p. 512.
6
MALLARME Stéphane. Poésies, Poésie, Paris, Gallimard, 1992, p.16.
2
réciproquement », explique la conservatrice du Musée Matisse dans le
catalogue de l’exposition « Matisse et Tériade ».1
Dans ce cas précis, il y a une contradiction dans l’esthétique
matissienne. Cette image est bien mimétique, c’est une illustration qui
imite le texte de Mallarmé qui fait appel directement à la mimésis. Dans
« Imiter le chinois… », il continue cette même perspective :
« Serein je vais choisir un jeun paysage
Que je peindrais encore sur les tasses, distrait
Une ligne d’azur mince et pâle serait
Un lac, parmi le ciel de porcelaine nue. »2
En fait, Matisse établit-il une équivalence plastique entre un paysage,
un lac et un ciel ou s’agit-il toujours d’une illustration ? La réponse se
trouve dans l’image vide. On voit une arabesque inachevée qui est la
visualisation d’un acte créatif. Cet acte est mimétique dans la mesure où
le chinois reproduit un lac, alors qu’il est sémiotique dans le dessin de
Matisse qui, lui, s’inspire de la nature. Cette image vide traduit
l’inachèvement des traits ce qui permet d’activer une vision intellectuelle
chez le spectateur en vue de visualiser l’écriture du poème de Mallarmé,
mais aussi la construction de l’« icono-poème » proposée par Matisse.
Matisse oscille ainsi entre le texte et l’image, entre deux esthétiques
mimétique et sémiotique. Finalement, on en arrive à se demander si ses
images sont des illustrations ou des décorations du texte ?
Matisse répond en montrant que le livre est impossible sans un
dialogue harmonieux entre l’image et le texte. L’harmonie dont rêve
Matisse permet aussi de montrer la relation impossible entre l’artiste et le
producteur de livre, entre le livre en tant qu’œuvre unique et le livre
comme objet de série. Dans ses lettres, Matisse évoque son insatisfaction
à l’égard de la réalisation finale des livres en série. Le livre ainsi décoré
perdrait sa plasticité dès lors qu’il deviendrait un produit commercial.
Matisse déclare sa grande déception au sujet des poésies de Mallarmé
imprimées par Roger Lacourière : « J’ai reçu il y a quelques jours un
exemplaire de vente du Mallarmé. Il m’a paru évident que les gravures
sont égalisées dans leurs traits et vidées, et comme exsangues, en un mot
elles m’ont fait l’effet de cadavres »3. Cela n’est pas l’unique déception de
Matisse à propos de son rêve de livre harmonieux. La première réalisation
de son livre Jazz était d’ailleurs un échec : « C’est absolument raté. Je
1
SZYMUSIAK Dominique, Matisse et Tériade, le peintre et le poète, in Matisse et Tériade,
Catalogue de l’exposition au Musée de Matisse, Cateau – Cambrésis 14 décembre 1996- 2 mars
1997, Arcueil, Anthèse, 2002, p.57.
2
MALLARME Stéphane, Poésies, op. cit., p.17.
3
MATISSE Henri, brouillon de la lettre, Archives d'Henri Matisse, Paris.
crois que ce qui gâte absolument est la transposition qui leur enlève (aux
découpages) la sensibilité sans laquelle ce que je fais n’est rien »1.
Jazz est à la fois une œuvre d’art plastique incorporée dans l’espace
matériel du livre et un livre réalisé en tant qu’une œuvre plastique. Jazz
est sorti en septembre 1947. C’est une création comportant 146 pages
dont 20 planches sont réalisées à partir de découpages en trois couleurs :
noir, bleu, rouge. Ces découpages ont été finalement réalisés par des
pochoirs en utilisant des encres de la même marque que des gouaches
utilisées dans l’exécution des découpages originaux. Les textes sont tous
écrits de la main de Matisse en écriture monumentale. Cela n’était pas
prévu dans le premier projet qui devait contenir seulement des dessins
sur vingt planches. En 1946, Matisse, selon le témoignage de Lydia
Delektorskaya, donne à Jazz le format d’un livre. Les grandes images
constituent des doubles pages pour neutraliser les espaces blancs entre
eux. Il y place les textes qu’il écrit à la main pour « décorer les pages »,
mais ces images ne doivent « en aucun cas donner l’illusion
d’illustration »2. Pour lui, « les textes sont un fond sonore » puisque ce
livre est construit comme un « morceau de musique » sur un rapport de
blanc, de noir et des couleurs que Matisse appelle des « improvisations
chromatique et rythmique »3. Les pages d’écriture se composent de
plusieurs textes brefs sans rapport entre eux, ni avec les images. Matisse
tenta de conférer à son écriture les qualités de son dessin, c’est pour cela
qu’il en fait plusieurs comme si l’écriture était une image. Matisse
construit ainsi des improvisations. Les textes et les images sont les
réflexions du peintre constituées « de remarques, de notes prises au cours
de mon existence de peintre ».4 Cette œuvre est le fruit des réflexions
esthétiques de l’artiste que l’on retrouve dans des lettres, des interviews,
dans les Notes d’un peintre de 1908, et dans les Notes d’un peintre sur
son dessin de 1939.
Dans Jazz, il affirme son esthétique non mimétique : «… l’esprit
humain. L’artiste doit approcher toute son énergie, sa sincérité et la
modestie la plus grande pour écarter pendant son travail les vieux
clichés... »5. Il refuse aussi toutes sortes d’imitations en vue de créer ses
propres signes. C’est pour cette raison que Matisse a choisi une écriture
autonome et individuelle, une écriture qui n’est pas droite, une écriture
qui monte et qui descend, la ligne étant tantôt grosse, tantôt mince. Son
texte n’imite pas les images qui existent en parallèle. Il ne cherche pas la
symétrie. Son texte n’est pas un tableau encadré et fini.
1
2
3
4
5
MATISSE Henri, Ecrits et propos sur l'art, op. cit., p.240.
MATISSE Henri, Ecrits et propos sur l’art, op. cit., P.240.
Idem.
Idem.
MATISSE Henri, Jazz, Paris, Tériade éditeur, 1947, p. 90.
Son texte n’est même pas délimité par les marges de la page. Dans
certains passages, la phrase ne se finit pas sur une page, elle nous
conduit vers une page précédente ou suivante.
Le Cœur, Icare, l’Avaleur de sabres, Le Cow-Boy sont des nouveaux
signes plastiques qui n’imitent pas le texte. Il s'agit d'une autre écriture,
une écriture sémiotique. Chaque image doit être lue en tant que
texte, lettre par lettre. C’est pourquoi Matisse choisit l’écriture
pictographique. Dans chaque pictogramme, il transmet une impression
que l'on retrouve dans le texte. Matisse explique par ce moyen le rôle que
les images sont amenées à tenir dans un livre : « Il ne s’agit pas
d’enjoliver un texte mais être un équivalent plastique du poème »1. Cette
équivalence se retrouve dans la table des matières qui est en même
temps une table des images.
1
MATISSE Henri, Ecrits et propos sur l’art, op. cit., p.214-215.
Il invente ainsi un signe plastique pour chaque titre de chapitre pour
que l’image devienne un équivalent du mot. Pourtant l’image n’imite pas
le mot comme le mot n’explique pas le contenu du texte. Il s’agit
d’improvisation décorative. Comme Jazz est tout d’abord un livre
décoratif, Matisse couvre les pages avec des textes. Pour lui, « les textes
sont un fond sonore »1, non seulement par rapport aux images, mais
aussi par rapport à ses intentions esthétiques. Pour créer ces imagespictogrammes, Matisse trouve des formes très laconiques, même s’il n’a
pas l’intention de simplifier le contenu, ni même de faciliter la lecture
de Jazz comme œuvre d’art plastique : « Je ne fais pas de différence entre
la construction d’un livre et celle d’un tableau et je vais toujours du simple
au composé, mais toujours prêts aussi à concevoir dans le simple »2. En
faisant cela, il se dirige vers l’abstraction, non pas pour renoncer à la
réalité, mais pour proposer un modèle visible et lisible à la fois. Il veut
créer un livre destiné à tout le monde et compréhensible pour toutes
générations. Il va trouver cette langue universelle dans l’art décoratif qui
allie force de l’abstraction et construction géométrique.
1
2
Idem, p.240.
MATISSE Henri, Ecrits et propos sur l’art, op. cit., p.213.
Jazz, qui devait s’appeler à l’origine Cirque, présente une table des
matières des images. Toutes les formes : le loup, Icare, formes,
l’enterrement de Pierrot, les codomas, la nageuse dans l’aquarium,
l’avaleur de sabres, le cow-boy, le lanceur de couteaux sont exécutés en
couleurs pures, les personnages étant découpés dans un papier de
couleur. Par ces couleurs, Matisse introduit des « cristallisations de
souvenirs du cirque, des contes populaires ou des voyages »1. Mais en
même temps, c’est une véritable théorie des couleurs que Matisse
formule : « Jazz est plus qu’un simple ouvrage illustré, Jazz se voulait un
livre sur la couleur, un manuscrit moderne qui retrouve la splendeur des
enluminures médiévales en peinture »2. Cette remarque de Dominique
Szymusiak est tout à fait juste. Matisse exprime, dans ces couleurs pures
et vives, tout l’esprit décoratif qui est très proche de celui de l’art du
Moyen Âge.
Le rapport entre l’image et le texte dans les livres du Moyen Age n’est
pas si simple qu’on pourrait le croire. Même si l’image est à comprendre
en rapport avec le texte, donné ou implicite, elle possède sa propre
structure et son propre fonctionnement à travers la disposition des figures
et les relations formelles ou symboliques qu’elles entretiennent entre
elles. L’image n’est ni réductible à la représentation de réalités sensibles,
ni la simple illustration d’un texte. Certes, le texte peut être donné en
même temps que l’image, à coté d’elle, il peut être placé dans l’image
même (initiales, inscriptions, phylactères), ou être implicite, par exemple,
dans le cas de scènes bibliques connues de tous.
Les textes et les images dans les cadres d’une œuvre complètent
l’information et relèvent son importance avec les moyens décoratifs,
figuratifs ou abstraits. Il n’y a pas de différence entre les mondes terrestre
et céleste. Pour cette époque les mondes réel et surréel sont la réalité
même, c’est la vérité absolue dans laquelle les artistes sont absolument
sûrs.
L’envie de décorer les objets utilitaires et les œuvres d’art s’explique
par la nécessité de charger un objet avec une information négative ou
positive pour, par exemple, chasser les mauvais esprits. Cette logique
apparue dans l’art préhistorique se développe énormément au Moyen Age
et reste toujours, peut être inconsciemment, dans l’esprit des artistes du
XX siècle et notamment chez Matisse.
Le caractère central de la figuration dans l’art chrétien ne doit pas
faire oublier l’importance de la dimension ornementale dans l’image
médiévale. Les motifs géométriques ou végétaux, échos formels ou
chromatiques, sont en effet essentiels à la dynamique, au rythme, au
symbolisme, à la fonction de l’image. C’est ainsi que les bordures en
1
Idem, p.240.
SZYMUSIAK Dominique, in «Jazz » ou improvisation chromatique, par Bertrand Galimard Flavigny,
in Spectacle du Monde.Matisse, n° 17 (hors – série), 2005, p. 44.
2
feuilles d’acanthe des ivoires ou des miniatures carolingiennes sont une
référence idéologique à la puissance de l’antique Rome. Les « pages–
tapis » des manuscrits irlandais et anglo–saxons du VIII siècle déclinent le
motif de la croix dans une extraordinaire profusion de spirales, d’oiseaux
et d’êtres hybrides. L’ornemental est encore abondamment présent dans
l’orfèvrerie, gemmes et métaux sont en effet les indices de la corporéité
sacrée des reliques contenues dans la châsse du mystère de la passion
symbolisée par La Croix, ou encore de la splendeur de La Jérusalem
céleste dont tout chrétien souhaite avoir ici–bas un avant-goût. Tel est le
projet de l’abbé Suger à Saint–Denis dans les années 1140.
Cette culture visuelle et une culture de la couleur. Le système
traditionnel antique des couleurs, fondé sur le noir, le rouge, le blanc
évolue à partir du XII siècle, en faisant place au bleu, au vert, puis aux
autres couleurs. Les inventions de la xylographie et de l’imprimerie au XV
siècle modifient le système culturel et le rapport entre l’écrit et l’image au
profit d’une « culture du noir et blanc ». Matisse qui est issu de cette
culture « du noir et blanc » cherche un équilibre entre la ligne et la
couleur pures qu’il voit comme les supports principaux pour ses œuvres
décoratives.
Matisse, en créant une nouvelle esthétique non mimétique de l’art
décoratif basé sur les signes plastiques abstraits, n’arrive pas à se libérer
de l’influence de l’art le plus abstrait et le plus décoratif de l’histoire de
l’art : l’art du Moyen Âge. Contrairement à plusieurs artistes du XXe siècle
comme Picasso, Gris, Masson qui illustraient des livres d’écrivains
contemporains, Matisse a toujours eu une préférence pour la littérature
classique. Il s’en sentait proche à la manière des poètes du Moyen Âge
comme C. d’Orléans ou P. Ronsard. C’est pourquoi il décore Le Florilège
des amours de Ronsard et Les Contes du duc d’Orléans. Comme c’était le
cas avec les livres médiévaux, Matisse choisit une écriture manuscrite
pour exprimer la singularité de la main de l’artiste.
Avec son livre Jazz, il fait renaître une esthétique décorative qui
s’appuie sur des formes ornementales et stylisées afin de réveiller la
mémoire intemporelle du spectateur pour toucher l’univers des sentiments
humains. Pour réussir cela, Matisse active tous les sens : la vue, l’ouïe, le
toucher. Il crée une œuvre qui attire le regard par ses couleurs vives, par
l’asymétrie de ses formes, par sa simplicité, par son refus d’imiter la
nature. C’est à ce titre que des parallèles entre art décoratif, art populaire
et art médiéval peuvent être établi. Matisse fait renaître certaines
conceptions d’artistes du Moyen Âge qui imaginent un autre monde plus
coloré, plus brillant, plus joyeux ou plus terrible, plus impressionnant que
le monde terrestre. Ce monde céleste est tellement incomparable qu’il ne
peut être qu’abstrait. Pourtant pour Matisse comme pour d’autres artistes
médiévaux, il est possible de traduire par la peinture cette autre réalité à
condition toutefois que le peintre aille chercher l’abstraction. Par
l’abstraction, Matisse va sacraliser l’image. En ce sens, l’ouverture sur le
monde est très importante. Elle permet d’atteindre d’autres lieux, d’autres
réalités hors de ce monde terrestre. Le livre va d’ailleurs jouer ce rôle
d’ouverture sur le réel, et Matisse est probablement l’un des premiers
artistes du XXe siècle à tenter, par sa création plastique, le dépassement
des frontières temporelles et géographiques. Les recherches de Matisse
trouvent leurs racines dans l’âge d’or de l’art plastique, période durant
laquelle les images ont été aussi riches de sens que les textes. Plusieurs
œuvres de l’art occidental et oriental de l’époque médiévale vont ainsi
s’organiser autour de cette conception, les œuvres chrétiennes inspirées
des textes sacrés par exemple.
Les retables occidentaux du Moyen Âge tardif composés de diptyque,
triptyque ou polyptyque recouvert d’une couverture reprennent cette idée
d’un livre que l’on pouvait ouvrir ou fermer selon les moments intimes de
la lecture. À l’intérieur du retable, l’espace est très organisé. Chaque
tableau est une page, chaque objet est un mot symbolique, chaque
personnage est une phrase. Tout est composé comme des lignes aplaties
sur une page. La perspective inversée où les lignes de fuite convergent
vers le spectateur est nécessaire dans ce cas-là pour que le spectateur
commence la lecture par le haut. Par les lignes secondaires, le spectateur
arrive ensuite vers le bas de la « page » où il s’agit des personnages et
des événements principaux.
À l’opposé, l’iconostase dans l’église orthodoxe n’a pas cette structure
de livre qu’il faut ouvrir pour lire. L’iconostase est déjà ouverte devant le
spectateur. C’est un livre prêt à lire. Il n’y a pas d’action mystérieuse pour
arriver à la découverte d’un autre. Il s’agit plutôt d’une impression de
présence permanente dans ce monde sacré. La visualisation du monde
céleste lorsqu’on est devant l’iconostase est immédiate.
L’iconostase s’organise alors comme une page ou plutôt comme un
livre ouvert rempli des textes. Le texte est constitué des lignes
horizontales qui peuvent contenir au moins trois registres. Il existe aussi
des iconostases qui contiennent sept registres : le registre comportant des
figures de prophètes qui tiennent les volumens1 sacrés ; le registre des
douze grandes fêtes de la liturgie byzantine (autrement appelé
dodekaorton, il peut compter jusqu’à seize fêtes) qui sont disposées de
gauche à droite selon la chronologie : La Trinité, L’Annonciation, La
Nativité et Le Baptême, La Présentation au temple, La Résurrection de
Lazare, L’Entrée à Jérusalem et La Crucifixion, La Descente aux enfers,
1
Volumen – lat. rouleau
L’Ascension, La Transfiguration et La Dormition de la Vierge ; ensuite le
registre de deesis1 qui présente la prière d’intercession des saints, Saint
Jean-Baptiste, La Vierge, des archanges et des saints, ils sont disposés en
deesis par rapport à l’icône centrale du Christ tout-puissant sur son
trône ; le registre inférieur où est représenté le contact direct avec les
fidèles, c’est le registre local, surtout consacré à l’église. Cette partie
inférieure de l’iconostase concentre certaines informations comme le nom
de l’église et le saint local. Ces compositions portent sur des personnages
ou les événements importants comme par exemple l’assemblée des
anges, les saints hiérarques adorés dans la région, La Nativité,
L’Exaltation de la Sainte Croix.
L’iconostase qui est une concentration d’informations plastiques avec
ses représentations de figures de saints, ses événements bibliques, mais
aussi d’informations écrites (textes sacrés écrits sur des volumen tenus
par des patriarches, des prophètes, parfois par la Vierge et Saint Jean
Baptiste, les apôtres et les martyrs. Les martyrs sont représentés plutôt
avec des textes qu’avec l’objet qui a servi à les martyriser. L’iconostase se
présente finalement comme la synthèse de textes sacrés, une sorte
d’équivalent synthétique de la Bible parfaitement structuré. Dans les
registres supérieurs se trouvent les héros de L’Ancien Testament (les
patriarches et les prophètes), ensuite Le Nouveau Testament (la vie
terrestre de la Vierge et du Christ). Après viennent les représentations des
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Deesis – « prière d’intercession » de la Mère de Dieu, des apôtres et des saints se tenant
aux côtés du trône de Jésus-Christ.
Saints, de la Vierge et du Christ dans le royaume céleste. Dans la partie
centrale de l’iconostase se trouvent les images principales : La Trinité
présentée par le Père, le Fils et le Saint-Esprit, la Mère de Dieu est
représentée dans la gloire, dans le registre au-dessous du deesis, l’icône
centrale est celle du Christ en trône entre les puissances angéliques. Cette
partie centrale correspond à un axe qui symbolise à la fois la reliure de la
couverture du livre, mais aussi les marges qui sont placées dans le centre.
Ces marges rejoignent les deux parties latérales comme si c’était deux
pages. Dans ces marges se trouve l’information la plus importante. Dans
le centre du registre inférieur sont placées les portes royales, c’est ici
qu’est représentée l’idée du passage dans l’autre monde. C’est ce monde
que l’on découvre par la lecture de l’œuvre. D’ailleurs, les portes royales
sont toujours fermées, et c’est seulement pendant la Liturgie Divine
qu’elles s’ouvrent pour que le prêtre accède au sanctuaire (le bema) là où
se trouvent les attributs eucharistiques. Le prêtre prononce alors les
prières à l’intention des bienfaiteurs. L’importance de la parole, des mots
sacrés qui conduisent vers le monde céleste sont décrits sur les portes
royales.
La partie supérieure des portes est une représentation plastique de la
parole prononcée. C’est la composition de l’Annonciation. L’Archange
Gabriel adresse ses paroles à la Vierge. Souvent Marie y est présentée
deux fois : la grande portrait de la Vierge qui reçoit la parole de Gabriel et
la petit portrait qui décrit les événement antérieurs à l’Annonciation. Marie
en prière dans le sanctuaire s’adresse à Dieu. L’Annonciation souligne
l’intimité du mot prononcé, exclusivité que le porteur de parole transmet
au destinataire. Les paroles de Gabriel restent réservées à Marie, tandis
que le mot écrit par des évangélistes qui sont présentés au-dessous de la
composition d’Annonciation est réservé aux fidèles. Saint Jean dicte à
Prochore son Évangile ou l’Apocalypse alors que l’apôtre Matthieu tient un
volume, le codex de l’Évangile est, lui, posé sur un petit lutrin. Les
évangélistes Luc et Marc siègent sur les trônes devant les tables où sont
posés les instruments pour écrire : des petits récipients pour l’encre, des
ciseaux, des lames pour gratter les pièces de parchemin. C’est par
l’intermédiaire des textes écrits par les Saints Évangélistes que l’on peut
entrer dans l’autre monde. Cet autre monde, les anciens maîtres, les
créateurs des icônes et des retables ne peuvent pas l’imiter ; il est loin de
leur propre réalité quotidienne. Pour présenter le monde divin, les artistes
de l’époque créent un équivalent plastique du texte décrivant tous les
détails importants, et le spectateur doit pouvoir lire cette langue plastique
qui est aussi belle que le texte. C’est pourquoi le monde divin est décrit au
moyen des décors dans lesquels les couleurs jouent un rôle symbolique :
le rouge est la couleur des passions, du sang du Christ, le pourpre est la
couleur de la reine céleste, l’or est la lumière divine. Les formes et les
compositions sont des signes plastiques qui deviennent canoniques, ils
créent la langue iconographique : chaque composition est un mot, chaque
détail est une lettre, chaque composition est une phrase, ils sont
organisés comme dans un texte avec le respect de la ponctuation.
Il faillait être initié dans la langue de ces symboles. Notre époque a
ses propres symboles dans lesquels il faut exister pour les comprendre ;
ces symboles traversent les vies des générations contemporaines,
dépassent les frontières, ces symboles deviennent « la religion globale ».
L’art du Moyen Age a été basé sur « les hiéroglyphes religieux », sur
« la théologie de l’art », mais ce n’est pas uniquement la question de la
puissance de l’église, c’est la question de la langue esthétique du Moyen
age qui a été compréhensible pour les générations qui leur étaient
contemporaines. La particularité de cette langue est dans l’absence de la
différence du monde réel et du monde imaginaire, de la réalité et de la
fantaisie. Cette esthétique est basée sur sa propre réalité où la « poésie »
et la « vérité » ne sont pas encore séparées, cette esthétique essaye de
retrouver Matisse.
Les signes plastiques dont Matisse parlait à propos de Jazz avaient
déjà été découverts par les artistes du Moyen Âge. Les anciens maîtres les
utilisaient en tant que codes plastiques. Ils connaissaient parfaitement la
force des pictogrammes connus des anciennes civilisations. La plasticité
de la parole prononcée se réalise alors sous la forme d’une image. Elle
conduit les artistes vers l’équivalence plastique du texte et ensuite du
livre. Les retables et les iconostases sont deux exemples du livre plastique
qui permet de construire un équilibre entre l’information écrite et
l’information dessinée. Les artistes du Moyen Âge ont ainsi trouvé une
équivalence entre l’œuvre d’art plastique et le livre. Leurs créations sont
le rêve incarné de Matisse concernant l’œuvre décorée.
Bibliographie
APOLLINAIRE Guillaume, Henri Matisse 1907-1918, Paris, l’Échoppe, 1993.
ARAGON Louis, Henri Matisse, Paris, Gallimard, 1998.
BOIS Yve-Alain, Matisse et Picasso, Paris, Forte Worth, Flammarion et
Kimbell, Art Museum, 1998.
DELECTORSKAYA Lydia, L’Apparente facilité, Henri Matisse : peintures de
1935-1939, Paris, Adrien Maeght éditeur, 1986.
Fond d’archives : Archives Henri MATISSE, Paris.
GALIMARD FLAVIGNY Bertrand, « Jazz » ou improvisation chromatique, in le
Spectacle du Monde. Matisse, n° 17 (hors – série), 2005, p.40-45.
MALLARME Stéphane. Poésies, Poésie, Paris, Gallimard, 1997, p.16-17.
MATISSE Henri, Jazz, Paris, Tériade éditeur, 1947.
MATISSE Henri, Ecrits et propos sur l’art, Paris, Hermann, coll. Savoir : sur
l’art, 1972.
Matisse et Tériade, Catalogue de l’exposition au Musée de Matisse, Cateau
– Cambrésis 14 décembre 1996- 2 mars 1997, Arcueil, Anthèse, 2002.
TERIADE, Ecrits sur l’art, Paris, Adam Biro, 1996.
Illustrations
Ill. 1 – Matisse Henri (1869-1954), Le coeur de la série : Jazz (1947),
MNAM, Paris.
Ill. 2 - Matisse Henri (1869-1954), Le cow-boy de la série : Jazz
(1947), MNAM, Paris.
Ill. 3 - Matisse Henri (1869-1954), Icare de la série : Jazz (1947),
MNAM, Paris
Ill. 3 - Matisse Henri (1869-1954), L’avaleur de sabres de la série :
Jazz (1947), MNAM, Paris.
Ill.4 – Matisse Henri (1869-1954), Table des images, Table des
matières pour le livre Jazz (1947), Musée Henri Matisse, Nice.
Ill.5 – Cathédrale de la Trinité, Ipatievsky monastère, Kostroma.
Ill.6 – Portes royales (les années 60-70 du XVI siècle), Musée Andreï
Roublev, Moscou.
Sur la couverture - Matisse Henri (1869-1954), La nageuse dans
l’aquarium de la série : Jazz (1947), MNAM, Paris

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