Emploi : L`industrie du transport public et ferroviaire cherche

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Emploi : L`industrie du transport public et ferroviaire cherche
Emploi : L'industrie du transport public et ferroviaire cherche un second souffle (Transport public : juin 20
L'emploi dans la filière industrielle du transport public et ferroviaire a connu ces
dernières années une progression qui risque de marquer un coup d'arrêt. D'où la
recherche de relais de croissance.
Le dynamisme du secteur des transports publics et ferroviaires génère-t-il toujours, en amont de
la chaîne, des créations d'emplois en France ? Autrement dit, si l'on met de côté l'activité créée
chez les opérateurs de transport urbain, (les effectifs ont encore cru de 1,9% en 2012 selon
l'UTP), interurbain et ferroviaires, l'industrie de construction de matériel roulant en profite-t-elle ?
Et plus en amont encore, l'ingénierie hexagonale est-elle toujours tirée par le développement
des infrastructures de transport collectif? A vrai dire, à toutes ces questions, les représentants
de ces secteurs apportent des réponses sinon alarmistes du moins teintées d'attentisme
inquiet. «Certitude, l'emploi dans notre branche a atteint un pic ces dernières années», indique
Sandrine Cheminel, déléguée générale adjointe de la Fédération des industries ferroviaires
industrie ferroviaire (FIF).
Selon la comptabilisation réalisée par la fédération, qui a toutefois un peu de mal à détourer
parfaitement ce secteur (certaines PME sous-traitantes relavant des branches aéronautiques et
automobiles travaillent également pour le rail), l'emploi a connu une progression régulière. «On
est passé entre 2002 et 2012 de 17 000 à près de 21 000 emplois directs - 26 600 si l'on
englobe les poseurs de voie, continue-t-elle, mais le pic est peut- être atteint
». Sous-entendu : la décrue est à redouter pour l'industrie ferroviaire française. En 2012, les
constructeurs ont comptabilisé 2,76 milliards d'euros de chiffres d'affaires contre 1,75 milliard en
2003. Le marché intérieur a généré 2,19 milliards d'euros -le seuil des 2 milliards ayant été
franchi au début de la décennie - tandis que l'export a représenté 572 millions d'euros. Les
équipementiers, de leur côté, ont connu leur plus haut niveau en 2008, la barre du demi-milliard
d'euros ayant été dépassée cette année-là grâce à un export très dynamique (594,8 millions
d'euros au total dont 196 pour l'export). Depuis, l'activité générée par le marché français s'est
un peu essoufflée tout en restant soutenue (546 millions d'euros dont 360 pour la France). Mais
au total, les chiffres 2013 de l'industrie ferroviaire devraient pour la première fois depuis
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longtemps connaître un recul de son chiffre d'affaires.
Les locomotives du secteur
Cette dernière décennie, tirée par les deux locomotives que sont Alstom Transport et
Bombardier, le secteur a vu les cadences dans ses usines être soutenues en particulier par les
commandes ferroviaires réalisées par les régions pour l'achat de nouveaux TER comme le
Régiolis et le Regio 2N. Dans une moindre mesure, les trams Citadis ont aussi joué leur rôle.
Mais du côté de la grande vitesse, l'export reste un débouché décevant et la SNCF ferme peu à
peu son robinet de commandes. Les dernières levées d'option de Duplex ont été obtenues au
forceps et assureront du travail jusqu'à 2019. Au-delà, c'est très flou. Heureusement, la
commande par l'Etat des TET ouvre un nouveau cycle. Quant à la poursuite des commandes
TER à travers des levées d'option, elle est hypothéquée par les moyens financiers des régions
réduits par la crise. Mais l'intervention de la Banque européenne d'Investissement (BEI) dans le
montage du financement comme en Midi-Pyrénées permet de ne pas trop baisser le rythme de
commande.
Il n'en reste pas moins que les constructeurs cherchent à trouver de nouveau relais de
croissance en se redéployant vers de nouvelles activités. L'une des pistes nouvelles pourrait
être l'incursion en France d'Alstom et Bombardier dans l'entretien et la maintenance des trains
en atelier. Ce qui suppose que l'industrie privée empiète sur le domaine de l'entretien du
matériel roulant dont les technicentres de la SNCF et leurs agents ont l'apanage. Une forme de
passage au privé, socialement sensible, qui pourrait se dérouler par le biais de l'activité TER.
En effet, la cogitation est ouverte dans les régions où la hausse mécanique de la facture des
coûts d'exploitation des TER sert d'aiguillon. «C'est une piste, car à partir du moment où une
région choisit com
me
l'Aquitaine de financer et d'être propriétaire d'un atelier de maintenance de TER, on peut avoir
une réflexion pour faire évoluer le mode de gestion des matériels roulants»,
s'interroge Patrick du Fau de Lamothe, membre des commissions chargées des fmances et du
transport au Conseil régional d'Aquitaine.
Made in France
A l'évidence, les industriels du ferroviaire veulent éviter le scénario noir qu'ont connu leurs
homologues de la filière du bus et de l'autocar. Celui d'une fonte du réseau. Après la chute du
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mur de Berlin, nombre d'industriels ont délocalisé leur production à l'est de l'Europe pour
abaisser les coûts de production et l'évolution darwinienne a conduit à des fusions entre
constructeurs en France, le résultat étant la disparition des marques Renault puis Irisbus au
profit d'Iveco. Résultat: aujourd'hui, les réseaux urbains et interurbains se nourrissent
majoritairement de bus et d'autocars fabriqués à l'étranger. «Je n'ai pas de comptabilité précise,
mais on est largement au-delà des 60% du parc immatriculé en France produit à l'étranger
», indique Christian Giraudon, chargé de la commission bus et autocar au sein de la Chambre
syndicale internationale des métiers de l'auto­mobile et du motocycle(CSIAM) et directeur des
ventes en France du constructeur Otokar. Cette proportion est toutefois à corriger en fonction
des segments, les réseaux urbains gérés par les élus étant plus enclins à acheter français, pour
peu qu'il reste des fabricants implantés dans le pays. Iveco fournit le gros des emplois, suivent
loin derrière Trouillet et Durisotti pour les minibus. Iveco incarne donc une filière. «
Nous employons 1300 personnes à l'usine d'Annonay qui produit aussi pour l'export (elle vient
d'emporter un contrat pour fournir près de 151 bus au GNV pour la ville de Bakou en
Azerbaidjan, ndlr), 500 personnes à l'usine d'Heuliez en Vendée, 300 au centre de recherche
bus Iveco de Vénissieux
», détaille Nicolas Tellier, porte-parole d'Iveco Bus. S'ajoutent 150 personnes du réseau
commercial et d'entretien. Face à la concurrence des bus de l'étranger, le constructeur met en
avant le label OFG, Origine France garantie. D'ailleurs, dans ce registre, le virage programmé
par le STIF et la RATP, donneurs d'ordre majeur, pour passer progressivement à une flotte de
bus propres (hybrides puis tout électriques) est destiné à susciter l'émergence d'une filière
française capable de rivaliser à l'export sur ce créneau d'avenir.
La filière ingénierie
Placé aux avant-postes, le secteur de l'ingénierie des infrastructures transport public et
ferroviaire est de son côté très sensible aux infléchissements des politiques publiques. Il
constitue ainsi un bon indicateur. En France, cette industrie de matière grise a un poids certain.
Les statistiques de l'INSEE ne sont pas très précises mais la fédération professionnelle Syntec
Ingénierie estime à quelque 10000 le nombre de salariés liés à l'ingénierie d'infrastructure de
transport et à 1 milliard d'euros le chiffre d'affaires produit en France. Comment vont évoluer les
effectifs? «Il est certain que le secteur a connu une trajectoire dynamique mais plusieurs
incertitudes pèsent sur l'avenir de l'activité», analyse, Karine Leverger, déléguée générale de la
fédération professionnelle Syntec Ingénierie. La plus évidente est le financement des
infrastructures lié à la taxe poids lourds qui doit en principe apporter 800 millions d'euros par an
à l'Agence de financement des infrastructures de France et dont l'avenir est plus qu'incertain. «
Or, la troisième vague de projets de transport en commun en site propre en dépend directement
», s'inquiète Nicolas Jachiet, le président d'Egis. Autre impact de l'arlésienne de la taxe poids
lourds: les études liées aux projets de contrats de plan Etat risquent d'être retardées. Tout n'est
pas noir, pour autant, les premiers marchés passés par la Société du Grand Paris, qui ont fourni
des contrats à quasiment tous les acteurs français (Egis, Systra, Ingerop, Setec, etc.),
permettent à ces sociétés d'ingénierie de repositionner sur ce nouveau filon les ingénieurs
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affectés aux lignes à grande vitesse ou aux projets de TCSP de province. De quoi assurer un
maintien de l'emploi.
Outre la question de la taxe poids lourds, l'autre inquiétude touche aux questions sociales ou
fiscales: instabilité du régime de crédit impôt recherche, instabilité du coût du travail auquel
l'ingéniérie est très sensible, la masse salariale représentant l'essentiel des coûts de
l'ingénierie. Autant de données qui peuvent impacter le maintien en France de production
effectuée pour l'export. «Il est certain que ce curseur joue sur la compétitivité des entreprises
françaises qui affrontent des concurrents des pays émergents
»,
souligne Syntec Ingenierie.
Marc Fressoz
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