Mise en page 1 - Le blog de visitcalifornia.fr

Transcription

Mise en page 1 - Le blog de visitcalifornia.fr
GOOD TRIPS
GOOD vInTAGE GETAwAy
1
PALM
SPRINGS
l’oasis
californienne
A deux heures de voiture
de Los Angeles, ce mirage niché
au cœur du désert de Californie
a été, après-guerre, le refuge
de fin de semaine des stars
d'Hollywood. Aujourd’hui,
la capitale du glamour est
devenue, avec ses 120 terrains
de golf, une villégiature d’hiver
pour retraités très aisés,
un Monaco sans la mer dont
les dernières stars sont
les maisons modernistes
construites dans les années 50.
Un fantasme d’architecte.
Par Geneviève Brunet
166
2
En roulant sur le Highway 111 qui
traverse d’un trait d’asphalte le désert
Mojave, on s’enfonce dans une onde
concentrique de chaleur et on se demande
ce qui a pu inciter la jet-society américaine
des années 50 à venir s’égarer dans cet
improbable middle of nowhere. Sans doute
l’office du tourisme lui avait-il vendu les
354 jours de soleil par an garantis sur facture. Les derniers miles de la route traversent une forêt d’éoliennes, dont les pales
s’agitent sur fond de collines rouges
comme autant de bras de personnages
dignes d’un film de Tim Burton, avant
que ne surgisse ce qui s’apparente d’abord
à un mirage : un cirque planté de milliers
de palmiers, sorte de toile peinte faite
d’aplats de couleurs vives sous un ciel bleu
inaltérable, souligné de deux longues avenues butant de part et d’autre sur le vide.
Une Corvette Sting Ray patiente au feu
rouge à côté d’une Chevrolet Impala.
Palm Springs. Décor vintage pour film en
Kodachrome. On a beau entendre vanter
la stupéfiante beauté des canyons rouge
sang autrefois peuplés par les Indiens
cahuillas, les ciels réglisse constellés de
milliards d’étoiles, les boutiques de Palm
Canyon Drive, le téléphérique qui escalade les montagnes de San Jacinto, c’est
cette lecture en Cinémascope qui s’impose. L’image des grosses fortunes de la
côte Est à la recherche, dans les années 20,
d’un nouvel Eldorado, entreprenant
d’arracher à l’étreinte du désert cette
enclave surchauffée. Banquiers et businessmen acharnés à greffer des greens sur
une terre stérile, à arroser les washingtonias, à dompter l’indomptable pour pouvoir baptiser, quarante ans plus tard, ce
singulier mélange de sable et d’humus
« capitale mondiale du golf » (l’on compte
aujourd’hui 120 terrains de golf ).
Un refuge de fin de semaine
Aux prémices de la colonisation de Palm
Springs, les membres de cette belle société
s’étaient contentés de se faire construire des
pseudo-haciendas de style colonial espagnol et de se déguiser en cow-boys lors de
barbecues organisés entre happy few. Mais
lorsque Samuel Untermyer, célèbre avocat
GOOD TRIPS
GOOD vInTAGE GETAwAy
Sausser ou au Cove Club de Frank Portnoy,
dont les habitués se nomment Raymond
Loewy et Howard Hughes.
Le modernisme du désert
4
pHotos : dr – renAUd CALLebAUt – robert doisneAU / GAMMA – rApHo – steve J. benbow / AxioM.
5
1. LA KAUfMAnn HoUse (1946), œUvre
eMbLéMAtiqUe de riCHArd neUtrA.
2. intérieUr de LA CAse stUdy HoUse 22
de pierre KoeniG.
3. 5. et 6. dAns Le pALM sprinGs
des Années 60 révéLé pAr doisneAU,
LA nAtAtion se prAtiqUe
dAns Une pisCine en
teCHniCoLor,
L’entrAîneMent AU GoLf se Conçoit
CoMMe Un sACerdoCe et Les MAqUettes
des viLLAs en ConstrUCtion
sUsCitent LA fAsCinAtion.
4. Une CHevroLet vintAGe éCArLAte.
7. L’HôteL rivierA pALM sprinGs.
7
6
et homme du monde, reçoit son ami Albert
Einstein dans sa résidence d’hiver, puis
Clark Gable et Carole Lombard durant
leur lune de miel, en 1939, le toutHollywood débarque. Dans cette maison
adossée aux rochers et baignée de cascades,
devenue la bucolique auberge e willows,
on peut visiter la chambre du couple d’acteurs légendaire. Sur cette terre manucurée,
à la fois assez éloignée des photographes et
assez proche des studios – les contrats
d’alors imposaient aux acteurs de ne pas
s’éloigner de plus de 100 miles des studios
en période de tournage –, les stars viennent
passer leurs fins de semaines. Darryl F.
Zanuck, David O. Selznick, Cary Grant,
Gloria Swanson s’installent dans le quartier
de Movie Colony ; Robert wagner et
nathalie wood, à La Mesa ; Elvis Presley,
dans Chino Canyon… Il est alors courant
de croiser Steve McQueen à l’heure du café
sur Palm Canyon Drive et de voir, à la nuit
tombée, Zsa Zsa Gabor trinquer avec Kim
novak, Dean Martin, Spencer Tracy ou
Katharine Hepburn au Chi Chi Club
d’Irwin Schuman, au 139 Club d’Earl
Derek Lam a fait de Palm
Springs sa source d’inspiration pour sa collection 2012.
de walter Gropius et Mies van der Rohe,
ces jeunes talents californiens imposent
aux tycoons d’Hollywood, plutôt habitués au style Tudor, des maisons informelles, minimalistes, bétonnées. Mais
qu’importe, ici on se lâche… Ces pionniers avides de nouveauté et de fantaisie
s’adonnent avec gourmandise à ce qu’on
appellera le « modernisme du désert », qui
désigne sans doute autant un style architectural qu’un art de vivre. John Lautner
et Richard neutra, élèves de Frank Lloyd
wright, Albert Frey, émule de
Le Corbusier, et william F. Cody,
Donald wexler, Charles DuBois ou
encore william Krisel vont couvrir la ville
de bâtiments publics et de résidences privées. Ces constructions mid-century font
l’apologie des lignes horizontales, de la
t
3
Quand Irwin Schuman et son frère Mark
ouvrent le Riviera Hotel en 1952, ils prennent l’habitude de hisser les couleurs pour
annoncer la présence de Sinatra. « e
voice » est un pilier de Palm Springs. A
peine arrivait-on en ville, que déjà on
entendait raconter ces petits matins où le
macadam se trouvait jonché de la garderobe d’Ava Gardner, flanquée à la rue par
le crooner au cours de l’une de leurs disputes légendaires… Twin Palms, la villa
du 1148 East Alejo Road, retient son
souffle sur son aura sulfureuse. Le matériel d’enregistrement installé par Capitol
Records est toujours en place, comme
la bouteille de Jack Daniels entamée,
sur le buffet. Mais tout le monde est
aujourd’hui parti, et la piscine en forme
de piano, où se tenaient les fiestas les plus
débridées, se languit sous le soleil.
Frank Sinatra a commandé cette maison
en 1947 à Stewart williams, l’un de
ces nouveaux architectes débarqués de
Beverly Hills dans le sillage des stars.
nourris par les réalisations européennes
167
GOOD TRIPS
GOOD vInTAGE GETAwAy
Plonger dans Palm Springs
Se renseigner
sur www.visitpalmsprings.com
et sur www.visitcalifornia.fr
Y aller
deux compagnies proposent des vols
directs paris – Los Angeles : Air france
et Air tahiti nui.
www.airfrance.fr
http://fr.airtahitinui.com
directours propose, dans le cadre
d’un séjour aux etats-Unis sur la côte
ouest, une extension de 3 nuits à l’hôtel
parker, à partir de 289 € par personne,
avec voiture de location, au départ
de Los Angeles. www.directours.com
1
2
Modernisme
Chaque année, une semaine
du modernisme se déroule en février
à palm springs.
www.modernismweek.com.
tout savoir sur le modernisme
du désert : www.psmodcom.org
robert imber, le spécialiste
de l’architecture locale, propose
des visites guidées de la ville.
Contact : [email protected]
t
3
A lire
en novembre 1960, doisneau réalise
un reportage sur la construction
des golfs à palm springs pour
le magazine Fortune. Au-delà de
l’expansion des greens sur le désert, il
donne à contempler la fresque colorée
de cette planète artificielle, cruel
refuge des riches retraités américains.
L’influence que neutra exerca sur
l'architecture d’après-guerre tient
à sa figuration des interactions entre
l’homme et la nature qu’il illustre par la
continuité entre l’intérieur et l’extérieur.
Palm Springs 1960, r. doisneau
et J.-p. dubois, flammarion, 2010.
Neutra, b. Lamprecht, taschen, 2004.
168
1. Une viLLA AU MUr rose orné d’Un
espAdon, soUs Un pALMier soLitAire.
2. Le JArdin ensoLeiLLé de L’Horizon
HoteL de wiLLiAM f. Cody (1952).
3. CoMMe Un nid d’AiGLe, LA MAison
symétrie, de la lumière et préservent l’intimité de leurs célèbres occupants derrière
des claustras. Charpentes métalliques,
baies coulissantes, circulation indoor/outdoor signent cet âge d’or. Seule note d’excentricité dans leurs réalisations inspirées :
les toits. En forme de vague, d’aile delta,
de fusée, de papillon, posés en équilibre
comme des chapeaux de starlettes, ils
détournent l’austérité du Bauhaus vers
une allégresse californienne.
Edgar Kaufmann (déjà propriétaire de la
géniale Fallingwater de Frank Lloyd
wright en Pennsylvanie) ; la Honeymoon
Hideaway d’Elvis ; l’iconique station de
téléphérique ou encore l’hôtel de ville ; la
Loewy House et la célèbre Frey House II
d’Albert Frey ; la Elrod House de John
Lautner ou la maison de Bob Hope, sorte
de soucoupe volante à toit incurvé qui a
servi de décor aux films Diamonds Are
Forever, e Big Lebowski, Charlie’s
Angels… On arpente cette ville de piscines
comme emporté dans un vertige à la
David Hockney. En remontant la
Claudette Colbert Road, on tente de saisir l’écho d’un monde évaporé. On pense
à Jacques Tati, observateur d’une société
qui émerge, imaginant Mon oncle sur fond
de villa Arpel où Mme Arpel n’a le droit
Une ville de piscines
Chino Canyon, quartier accroché à flanc
de colline avec vue panoramique sur la
vallée, devient le laboratoire expérimental
de cette fulgurante aventure. On y
trouve : la Kaufmann House, commandée
à Richard neutra en 1947 par le magnat
en sUrpLoMb de LA vALLée offre
Un eMpLACeMent idéAL AU MoMent
de LA pAUse CoCKtAiL et de LA détente.
GOOD TRIPS
GOOD vInTAGE GETAwAy
de mettre la fontaine en marche que pour
les invités. On pense à Montand et à
Marilyn, à Arthur Miller évacuant sa
femme à Palm Springs, où elle pose,
comme les copines, en maillot et bonnet
de bain à fleurs, au bord de bassins où personne ne nage. On se rappelle Robert
Doisneau, invité en 1960 par le magazine
Fortune à réaliser un reportage sur le développement des mégagolfs dans le désert,
qui s’amuse à fixer sur la pellicule ces
miroirs figés où flottent des cygnes gonflables. Sur ses images, les hommes sont
en smoking blanc, les femmes portent des
robes de radzimir bleu ciel et des étoles de
zibeline par 45 °C à l’ombre. «Tu peux
imaginer les maisons, écrit-il à son ami
Maurice Baquet. Piscines dans le salon pour
deux vieillards, jardins de plastique, faux
Utrillo dans les cabinets […], des tapis où je
me tords les chevilles. »
Vivre vintage
4
Le comble de l’exotisme
De ces villas de cinéma, les stars finissent,
à la fin des années 60, par s’envoler. Alors
que le Case Study Houses Program, visant
à démocratiser la construction de maisons
modernes, bat son plein, la jet-set quitte la
place. Faut-il y voir une relation de cause
à effet ? George et Robert Alexander, Jack
Meiselman lancent ces condominums
proprets où s’engouffre la vague des
résidences secondaires. Le vulgum pecus
accède au modernisme. Comme une
bande d’oiseaux migrateurs, les stars et les
milliardaires quittent la place pour
conquérir de nouveaux territoires, abandonnant derrière eux gazons et bouées,
laissant la ville s’engloutir dans le silence
du désert. Il faudra attendre les années 90
pour que, tandis qu’un engouement pour
le style Art déco remet Miami à la mode,
la réhabilitation du modernisme réveille
Palm Springs d’un baiser magique.
Il paraît qu’avec un peu de chance on peut
croiser Trini Lopez ou Kirk Douglas, voire
John Travolta ou Tom Ford, tous férus d’architecture. Mais ce sont les maisons qui
sont les stars de Palm Springs aujourd’hui,
et non plus leurs propriétaires. S’approprier
une neutra ou une Lautner est devenu un
must pour retraités hyperaisés de la côte
Ouest, mêlés à une communauté gay
refluant de San Francisco vers ce meilleur
des mondes, sorte de bulle à la Armistead
Maupin. Pas d’embouteillages, pas de
5
4. LA wALter wHite HoUse, réALisée
pAr LA G. ALexAnder CoMpAny en 1955.
5. L’Horizon HoteL de w. f. Cody.
6. Le deL MArCos de w. f. Cody (1947).
stress, pas de criminalité, pas de smartphone vissé à l’oreille… juste un ennui
rafraîchissant. Et tous ces petits restaurants
sympas où tout le monde se salue, ces boutiques vintage, ces galeries et ces antiquaires
spécialistes des années 40, 50 et 60, avec
des meubles des Eames, de nogushi,
d’Alvaar Aalto, de Bertoia, de Le Corbusier
ou de Mies van der Rohe comme s’il en
pleuvait, forment un comble de l’exotisme
dans cette enclave du bout du monde qui,
de nouveau, attire le regard. Le styliste
Derek Lam a fait de Palm Springs sa source
d’inspiration pour sa collection printempsété 2012 et les cahiers de tendance déco
imposent cette saison une palette Palm
Springs très colorée… Le temps s’accroche
au mirage du désert… et e Good Life se
n
complaît dans sa jolie nostalgie.
plusieurs hôtels mid-century proposent
des meubles authentiques
et des piscines miroir.
Orbit In. L’hôtel semble être figé
en 1957, année de sa construction,
mais les chambres pimpantes ont été
récemment refaites avec du mobilier
bertoia. La suite frey dispose d’une vue
privilégiée sur la frey House.
562 West Arenas, Palm Springs.
Tél. +1 (760) 323-3599.
www.orbitin.com
Del Marcos. Cette adresse cultive
un style fifties chic avec ses reps,
sa palette orange-moutarde-vert
bouteille et ses lampes George nelson.
225 West Baristo Road.
Tél. +1 (800) 676-1214.
www.delmarcoshotel.com
Movie Colony. organisé autour de frais
patios, cet hôtel distille une ambiance
musicale et festive.
726 North Indian Canyon Drive.
Tél. +1 (760) 320-6340.
www.moviecolonyhotel.com
Parker. Ce somptueux resort essaime
les cultissimes fauteuils AA d’Airborne
dans son parc. La faune trendy
de Los Angeles y déboule le week-end.
4200 East Palm Canyon Drive.
Tél. +1 (760) 770-5000.
www.theparkerpalmsprings.com
Sinatra House. Le lavabo où sinatra
avait brisé une bouteille de champagne
lors d’une scène de ménage a gardé
son estafilade, le tourne-disque diffuse
les mélodies du crooner, le wi-fi
fonctionne et un concierge privé
supervise votre séjour.
1148 Alejo. Tél. +1 (877) 318-2090.
www.sinatrahouse.com
www.beaumondevillas.com
6
169

Documents pareils