Chantier exceptionnel.
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Chantier exceptionnel.
entreprise btp Chantier exceptionnel Le Grand Stade de Lille défie la gravité La ville de Lille se dote d’un nouveau stade. Un chantier grandiose. Parmi les temps forts des travaux, l’installation du toit a fait l’objet de toutes les attentions pour garantir la sécurité des ouvriers. 32 la charpente métallique a été recouverte par les quatre toitures mobiles de 500 tonnes chacune qui ont été réalisées sur des espaces dédiés à l’extérieur du stade. « Pour simplifier les manœuvres, beaucoup de pièces sont identiques. De gros axes fixent passent trois vérins à câbles (deux de 850 tonnes et un de 650 tonnes), installés sur une palée de hissage. Cette forme en U a servi de guidage pendant la levée du toit. À une vitesse de 3 m/h, la structure a été hissée par paliers, à l’aide de vérins contrôlés par informatique. Dix heures furent nécessaires pour installer la charpente à 24 mètres audessus du sol et la stabiliser Pour les travaux qui nécessitaient d’être réalisés en hauteur, des nacelles mobiles ont été utilisées. t m « c le le s s a le b c s s m c d i t C © Élisa/Valode & Pistre architectes/Atelier Feret Architectures/ Grégoire Maisonneuve pour INRS D ix milles tonnes de tôles, de câbles et d’acier maintenues à plus de 30 mètres de haut par deux mégas poutres de 205 mètres de long et 1 800 tonnes chacune. Le toit rétractable du Grand Stade de Lille, dont la livraison est prévue en juillet prochain, a de quoi impressionner. Sa fabrication et son édification relèvent à la fois du défi technologique et de la prouesse technique et humaine. Assemblée sur place, à l’intérieur du stade, puis hissée par un système de vérins à câbles, cette structure est la première au monde de cette taille à être élevée de cette façon. Le chantier du nouveau stade de la ville de Lille a débuté en mars 2010. Point névralgique du projet, la construction de son toit a démarré très tôt. Dès le début du mois de juillet de cette même année, les premiers éléments des deux mégas poutres ont commencé à être assemblés. Afin de limiter au maximum le travail en hauteur, ces deux structures aux dimensions impressionnantes ont été fabriquées à plat, sur place, à l’emplacement de la future pelouse. Une fois redressées, elles ont été reliées entre elles par quatre poutres transversales de 80 mètres. En août dernier, chef de projet chez Eiffage Construction Métallique. Les axes remplacent également boulons et écrous apparents, certes pour des raisons esthétiques, mais également pour éviter trop de manipulations. Avant son levage, peinture, câbles, réseaux électriques, filins, projecteurs, tuyaux d’eaux pluviales, chéneaux et autres ont enfin été installés sur le toit, depuis le sol ou à trois mètres de hauteur grâce à des nacelles télescopiques (selon l’emplacement sur les poutres). Ainsi assemblé et les poutres et ont évité ainsi de mobiliser l’équivalent de trente-quatre soudeurs, dont les dégagements de fumées auraient rendu l’atmosphère totalement irrespirable », explique Romain Picard, équipé, le toit a été hissé au début du mois d’octobre dernier après pratiquement deux ans de préparation. La charpente repose sur quatre mégas poteaux en forme de U dans lesquels sur des contreventements provisoires. En effet, à ce stade les mégas poteaux ne soutenaient pas encore le toit. Ces structures provisoires furent assemblées là aussi avec des boulons identiques pour limi- Travail & Sécurité – Mars 2012 726 p. 30-39AC.indd 32 21/02/12 10:47 S t t g à r é s e e e e e e t a r s e s t s - © Élisa/Valode & Pistre architectes/Atelier Feret Architectures/ Grégoire Maisonneuve pour INRS é ter les risques de troubles musculosquelettiques (TMS). « En visitant plusieurs fois le chantier et en discutant avec les compagnons, on a cherché les meilleurs outils, pour qu’ils soient le moins lourds et le plus silencieux possible. Alors, pour assembler les 100 000 boulons, les opérateurs utilisent une boulonneuse spéciale dont la conception a été imaginée in situ avec les opérateurs et le service prévention d’Eiffage, machine plus agréable et plus confortable qui génère moins de gestes contraignants », indique Bernard Bonnet, directeur de projet chez Eiffage Construction Métallique. 900 compagnons, 80 sous-traitants Sur les palées, et une fois le toit hissé, impossible d’éviter le travail en hauteur. Les garde-corps ont été rehaussés à 1,40 m (au lieu du 1,10 m réglementaire ) et le travail a été réalisé à l’aide des nacelles Assemblée au sol, et recouverte des quatre éléments de toiture mobile, la charpente métallique a été hissée à l’aide de vérins. mobiles. « On ne fait appel aux équipements de protection individuelle (EPI) que lorsque tous les moyens de protection collective ont été épuisés. C’est un métier dangereux et, sur ce chantier, on peut aisément éviter les risques en utilisant des nacelles », souligne Jean-François Pruvost, chargé de prévention et de sécurité pour l’ensemble du chantier. Pendant la durée de l’opération, un périmètre de sécurité de 14 mètres autour de la zone avait été neutralisé et aucune activité humaine n’y était autorisée. Aucun incident n’a été déploré. Du fait de l’immensité du chantier, une impression de vide peut être ressentie. Et pourtant, environ 900 compagnons s’activent chaque jour sur les lieux, salariés du groupe Eiffage ou de l’un de La sécurité au bout du crayon d’architecte L es cabinets d’architecture en charge de la conception du Grand Stade ont voulu intégrer la prévention dès le départ. « Une fois que nous avons une vision globale du projet, nous pouvons affiner et synthétiser les paramètres techniques (et financiers), pour intégrer la prévention dans les plans, explique Jean-Pierre Guérin, responsable du projet pour l’agence d’architectes Valode et Pistre. Mais la vie du projet évolue tout le temps. Il faut donc suivre toutes les étapes de réalisation et, pour ce faire, nous avons besoin des coordonnateurs SPS mais aussi de la Carsat pour développer les bonnes méthodes quand une application stricto sensu de la réglementation n’est pas possible. » C’est ainsi qu’ils ont été amenés à prendre des mesures complémentaires telles que des échelles partagées ou des garde-corps rehaussés en fonction des méthodes de construction et des évolutions techniques. « Avec un bâtiment atypique comme celui-ci, nous devons imaginer des solutions inédites qui intègrent les principes de prévention les plus adaptés. Nous devons rester créatifs », conclut Nicolas Roussel, architecte représentant permanent de l’Atelier Ferret Architectures sur le chantier. Et visiblement, une telle concertation n’arrive pas tous les jours. « Ce n’est pas très fréquent de travailler en collaboration aussi étroite avec les préventeurs, mais il y a un véritable échange, malgré parfois des désaccords entre les intervenants. Le principe était d’avoir toutes les parties prenantes, de la conception à la réalisation, et de trouver un terrain d’entente », reconnaît Jean-Claude Mutel, directeur du projet chez Eiffage TP. Travail & Sécurité – Mars 2012 726 p. 30-39AC.indd 33 33 16/02/12 23:50 entreprise btp Coordonnateur un jour, coordonnateur toujours L Parole libératrice « On ne peut pas éviter la coactivité, il restera toujours des points de friction, donc nous devons choisir une méthode qui ne laisse place qu’aux petites chamailleries quotidiennes et anecdotiques », reconnaît Paul Delplace, directeur des travaux. « Cependant, quand nous constatons trop de coactivités, nous établissons 34 © Élisa/Valode & Pistre architectes/Atelier Feret Architectures/Grégoire Maisonneuve pour INRS ses 80 sous-traitants. « Sur ce type de chantier, on ne doit rien laisser au hasard, prévient Michel Cléach, coordonnateur SPS pour la société OTCC. Il faut expliquer le travail de chacun pour que tout le monde comprenne l’importance et la présence de l’autre. » Dès son arrivée, chaque intervenant reçoit un « accueil de sécurité ». Il s’agit d’une réunion de 40 minutes au cours de laquelle sont expliqués le plan de circulation, les mesures d’appel de secours et la vie sur le chantier. Un livret avec les consignes de sécurité simples et les numéros d’urgence est également remis à chacun. « Nous limitons les groupes à six personnes pour que chacun soit attentif. Cela nous permet aussi de connaître les personnes et d’orienter notre discours en fonction des corps de métier et de leurs tâches », explique Jean-François Pruvost, qui anime ces accueils. « Malgré tout, au quotidien il faut parfois rappeler des gestes simples, comme le port des EPI, en particulier les bouchons d’oreilles », poursuit-il. es trois coordonnateurs SPS de chez OTCC nommés pour le chantier du Grand Stade de Lille ont de quoi se réjouir : l’architecte a intégré, dans la conception de la structure, la coordination de la coactivité lors de la construction de l’édifice. Et pour mener à bien leur mission, cette façon de travailler très en amont du projet est primordiale pour les coordonnateurs SPS. Même si tout n’est pas encore parfait. « Ici, nous jouissons d’une grande écoute mais il faut savoir identifier son interlocuteur. Il y a encore des documents qui nous arrivent trop tard et nous devons les réclamer. Il ne faut pas oublier que nous devons avoir du temps pour les étudier correctement et intervenir le moins possible pendant la construction », remarque Éric Jornod, l’un des CSPS. En effet, si OTCC connaît les plans et les façons de travailler, les trois hommes rappellent qu’ils doivent faire des propositions avant que les problèmes ne se posent. « Comme le chantier est énorme, il faut bien connaître les responsables et les opérateurs pour assurer notre rôle de conseil. Il faut également toujours avoir à l’esprit que nos solutions doivent être maintenues pour les opérations de maintenance », rappellent Vincent Bourgogne et Michel Cléach. des plages horaires différentes selon les activités. En concertation avec les coordonnateurs SPS, nous avons préféré ce système à l’immobilisation de la zone de travail », continue-t-il. Une infirmerie a été installée sur place. À ce jour, on ne déplore que des petits accidents, comme des coupures ou des coups de marteau. L’une des grandes forces de ce chantier est le dialogue. Le bétonnage de l’intérieur des mégas poteaux a été réalisé par équipes de deux. « Nous organisons des réunions de coordination au moins toutes les deux semaines pour concevoir des méthodes de travail que nous transmettons ensuite au personnel. Il faut organiser et canaliser les différentes entreprises et métiers », explique Paul Delplace. La transparence est le mot d’ordre. Mais pour cela, un long travail de préparation est nécessaire. « La Carsat NordPicardie a fait partie du projet dès le départ. Nous avons œuvré avec l’OPPBTP et l’inspection du travail pour faire évoluer les mœurs en rappelant les réglementations et en proposant des solutions comme l’utilisation optimale des outils ou l’installation de passerelles ou de garde-corps sur certaines zones », remarque Alain Reffas, ingénieur-conseil à la Carsat Nord-Picardie. La prévention semble porter ses fruits puisque, d’après Jean-François Pruvost et les trois coordonnateurs SPS désignés sur le chantier, le nombre de réprimandes et de situations dangereuses diminue au fur et à mesure que le chantier avance. Finitions en béton Avant de poser définitivement la charpente métallique sur les mégas poteaux, il a fallu en bétonner l’intérieur. Tour à tour, les compagnons ont installé un coffrage sur chacun d’eux. Puis, à deux sur une passerelle de bétonnage, ils vont guider le béton et le vibrer. Les passerelles sont étroites, l’espace entre la charpente et le poteau empêche le compagnon de glisser dans celui-ci et une nacelle télescopique permet d’acheminer le matériel. « Comme il s’agit de grands travaux, chaque compagnon a suivi une formation appelée “Savoirs minimums de sécurité” et, en prévision de cette Travail & Sécurité – Mars 2012 726 p. 30-39AC.indd 34 17/02/12 22:50 © Élisa/Valode & Pistre architectes/Atelier Feret Architectures/Grégoire Maisonneuve pour INRS r s s e u r t r u à n t r. s, t t . s n e e Une boîte à spectacles L a charpente métallique repose sur les quatre mégas poteaux, cachés dans leur habillage, pour donner l’impression d’un élément en lévitation. Le toit se ferme en 30 minutes. L’autre caractéristique exceptionnelle du stade, dont la capacité totale est de 50 400 spectateurs, est la « boîte à spectacles » : le sol se soulève sur une moitié de terrain pour ensuite être glissé sur l’autre moitié à l’aide de vérins. L’espace libéré laisse alors la place à 5 500 sièges supplémentaires et à une scène qui pourra ainsi accueillir des événements culturels et sportifs de toute nature. Une transformation unique au monde. opération, nous avons orienté notre discours pendant le quart d’heure de sécurité sur ce thème », explique Jean-Bruce Buisson, conducteur des travaux de gros œuvre chez Eiffage TP. Au même moment, sur chaque partie latérale de la charpente, étaient installés une dizaine de fléaux hauts sur les 66 prévus. Il s’agit de structures métalliques reliant la toiture du stade à son enveloppe latérale. « On construit une nappe d’une dizaine de fléaux que nous stabiliserons en même temps. Ils sont brochés ou boulonnés. Pour restreindre la manipulation d’outils en hauteur, là encore, nous avons installé les vis et les écrous au sol », décrit Jean-Pierre Gerner, directeur métier ponts et ouvrages d’art, chez Eiffage Construction Métallique. Pour cette tâche, trois types de nacelles différents ont été utilisés : la nacelle araignée qui Pour faciliter la fixation des fléaux, les vis et les écrous ont été installés au sol avant la montée des structures. La mise en place des fléaux a été réalisée par des grues guidées par un opérateur en poste au niveau des points de fixation. de conduite sont habilités à monter à bord. Le contrôle est très strict. « Les opérateurs, serrent les boulons avec une clé hydraulique, bien plus facile à manier qu’une clé dynamométrique », poursuit Jean-Pierre Gerner. Et pourtant, quelques mauvaises pratiques ont la vie dure. « Les opérateurs doivent être attachés à la nacelle, mais, comme c’est une réglementation assez récente, il faut la rappeler régulièrement. Tout comme le port du casque obligatoire depuis quelques années, c’est une pratique qui entrera bientôt © Élisa/Valode & Pistre architectes/Atelier Feret Architectures/Grégoire Maisonneuve pour INRS t n t s e t e s s s n a s’adapte à la surface des gradins, la nacelle télescopique, jusqu’à 42 mètres de haut, et la nacelle de grande hauteur, entre 50 et 100 mètres de haut. Seuls les opérateurs ayant leur Certificat d’aptitude à la conduite en sécurité (Caces) et leurs autorisations dans les mœurs », conclut-il, confiant. Avec un tel stade, les joueurs du LOSC n’ont plus qu’à réaliser des prouesses sportives ! Joël Clergiot Travail & Sécurité – Mars 2012 726 p. 30-39AC.indd 35 35 17/02/12 22:53