La demande d`autorisation de travaux en copropriété immobilière

Transcription

La demande d`autorisation de travaux en copropriété immobilière
Rubrique d’actualité en droit de la copropriété
Professeur Christian Atias
Février 2012
Avocat
La demande d’autorisation de travaux en copropriété immobilière
1.- En vertu de l’article 25b de la loi n. 65-557 du 10 juillet 1965, « ne sont adoptées qu’à la majorité des voix de tous les
copropriétaires les décisions concernant (…) l’autorisation donnée à certains copropriétaires d’effectuer à leurs frais des
travaux affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble, et conformes à la destination de celui-ci ».
L’article 25-1 institue des règles subsidiaires de majorité.
2.- Le domaine de cette disposition est extrêmement général. Tous les travaux affectant les parties communes ou l’aspect
extérieur de l’immeuble en relèvent ; même les travaux de remise en conformité avec les actes sont soumis à l’exigence
d’autorisation. De rares exceptions sont seulement faites pour les aménagements minimes ou provisoires.
La majorité de l’article 25 de la loi n’est suffisante que si les travaux ne modifient pas l’appropriation des parties communes
– la demande doit émaner d’un copropriétaire titulaire de droits sur les parties communes en cause – et s’ils sont
compatibles avec les caractéristiques d’ensemble de l’immeuble.
La marge de manœuvre, laissée à la majorité, est difficile à apprécier. Il est certain qu’un refus qui ne peut être justifié par
aucun motif sérieux et tiré de l’intérêt général, peut être jugé abusif. Il en est de même si les justifications invoquée sont
sans valeur. Pourtant, c’est une « décision » que l’assemblée générale est appelée à adopter ; dès lors, il ne suffit pas que
toutes les conditions légales soient réunies pour que la majorité perde tout pouvoir d’appréciation et soit contrainte de
délivrer l’autorisation sollicitée.
3.- Aucune clause du règlement de copropriété ne peut valablement dessaisir l’assemblée générale du pouvoir qu’elle tient
de la loi. Seule sa « décision » peut valoir autorisation. L’attitude des copropriétaires qui, par exemple, n’ont pas réagi à la
réalisation des travaux, ne vaut pas, à elle seule, autorisation implicite.
4.- Le demandeur peut contester le refus qui lui est opposé, en sollicitant une autorisation judiciaire. Il dispose d’un délai de
dix ans pour saisir le tribunal à cette fin. Pour l’obtenir, il doit démontrer que le refus n’est pas justifié ; il peut notamment
se prévaloir de l’égalité de traitement, due par le syndicat aux copropriétaires, si certains ont obtenu, de la majorité,
l’autorisation de réaliser des travaux similaires à ceux qu’il projetait d’effectuer.
5.- La forme de la demande d’autorisation revêt une grande importance. La contestation du refus échoue lorsque
l’assemblée générale a pu estimer notamment qu’elle n’était pas suffisamment informée sur les caractéristiques du projet
pour lequel une décision d’autorisation était sollicitée.
6.- La demande d’autorisation résulte d’une lettre recommandée avec accusé de réception, adressée au syndic. L’inscription
à l’ordre du jour de l’assemblée générale est sollicitée.
Elle ne s’impose, pour la prochaine assemblée, que si le syndic la reçoit avant qu’il n’ait envoyé, aux copropriétaires,
l’ordre du jour de la convocation (art. 10, D. n. 67-223 du 17 mars 1967).
7.- Depuis la réforme opérée par le décret n° 2010-391 du 20 avril 2010, doivent être notifiés, au syndic, avec la demande,
un projet de résolution et « un document précisant l’implantation et la consistance des travaux » (art. 10, al. 2, D. 67).
Le syndic a, d’ailleurs, l’obligation de rappeler cette exigence, aux copropriétaires, « à l’occasion de chaque appel de
fonds » qu’il leur adresse (art. 10, al. 3, D. 67).
8.- Ces dispositions nouvelles se voulaient de clarification. Elles comportent, pourtant, des failles. En premier lieu, la
sanction de l’omission, par le syndic, du rappel des dispositions réglementaires n’est pas précisée. Il n’est pas sûr que la
méconnaissance de la disposition de l’article 10, al. 3, du décret permette, au demandeur, d’engager la responsabilité du
syndic ; il n’est pas dispensé de connaître les règles qui s’imposent à lui.
La responsabilité du syndic pourrait peut-être être engagée envers le copropriétaire qui lui aurait adressé une demande nonconforme aux exigences réglementaires, suffisamment à l’avance pour en permettre la rectification, si le destinataire n’avait
pas cru devoir lui rappeler le contenu de l’article 10, al. 2, du décret.
Les copropriétaires qui subiront les frais du contentieux introduit pour contester leur refus, pourront peut-être reprocher
au syndic de n’avoir pas informé le demandeur des conditions à respecter pour pouvoir prétendre à autorisation. Bien que le
syndic ne soit pas lié par contrat à chacun des copropriétaires, sa qualité de professionnel pourrait suffire pour mettre une
obligation d’information et de conseil à sa charge.
Ce qui est sûr, c’est que l’omission du rappel des prescriptions de l’article 10, al. 2, ne saurait fournir une excuse au
copropriétaire qui aurait essuyé un refus, faute d’avoir suffisamment informé les copropriétaires sur son projet, et qui
prétendrait le contester. La faute du syndic ne peut contraindre la majorité à renoncer au bénéfice de l’information requise.
9.- En deuxième lieu, l’article 11-I-7° du décret fait obligation, au syndic, de notifier aux copropriétaires, avec l’ordre du
jour, le « projet de résolution » d’autorisation. Aucune disposition ne lui impose expressément de notifier, dans les mêmes
conditions, le « document précisant l’implantation et la consistance des travaux ». Cette obligation paraît relever de
l’évidence ; ce n’est pas le syndic qui a besoin de ces informations, mais bien les membres de l’assemblée générale.
10.- En troisième lieu, le contenu du document à notifier par le demandeur pourra susciter des difficultés. Il doit, certes,
préciser « l’implantation et la consistance des travaux » ; mais la formule est assez vague. Il appartiendra aux tribunaux
d’apprécier le degré de précision du document fourni. Il doit comporter des informations suffisamment complètes et claires
pour permettre, aux copropriétaires, de statuer en connaissance de cause.