DemainOnline: "L`État profond" s`en prend à Rachid Niny

Transcription

DemainOnline: "L`État profond" s`en prend à Rachid Niny
«L’État profond» s’en prend à Rachid Niny
Une d'Al Massae qui circule sur le net
Casablanca. - Maintenant c’est clair. Après s’être entortillé avec des accusations futiles, « outrage à
fonctionnaire » et production de « fausse preuve relative à une infraction imaginaire » (articles 263, 264 et 266
du code pénal), qui ne méritaient vraiment pas qu’on embastille un journaliste, le Makhzen, ou bien L’État
profond, puisque que c’est ainsi qu’il faut appeler cette nébuleuse qui gouverne le pays cachée derrière le
trône, a enfin trouvé le moyen pour justifier l’incarcération de Rachid Niny, le directeur du quotidien Al
Massae.
Selon une dépêche de l’agence de presse officielle MAP, seule apte à parler au nom de cet État profond, le
procureur du roi près le tribunal de première instance de Casablanca a « reçu » jeudi une plainte contre Rachid
Niny pour « publication d’allégations et de faits erronées et montés de toutes pièces ayant suscité la panique
parmi les citoyens et apologie au terrorisme ».
C’est la massue contre Niny et son journal, devenus indociles ces derniers temps et fouinant là où il ne fallait
pas, déterrant par exemple un dossier de corruption impliquant directement Fouad Ali El Himma, « l’ami du
roi » et fondateur du PAM, le « parti du roi« . Ou osant dénoncer les méthodes de la DST, la police politique.
Niny et Al Massae seraient aussi, selon certaines sources, les victimes d’un règlement de comptes, de haut vol,
entre deux favoris du roi, Fouad Ali El Himma et Mohamed Mounir Majidi. Ce dernier se trouvant actuellement
« en vacances » dans un appartement de Miami, dans l’État de Floride, peut-être provisoirement touché.
La providentielle plainte dont parle le procureur de Casablanca a été déposée, nous dit-on, par « cinq
fonctionnaires de la sûreté nationale, victimes des actes terroristes survenus à Hay El Farah à Casablanca, le 10
avril 2007, ainsi que par la veuve de l’inspecteur de police feu Mohamed Zinbiba tué dans ces actes criminels
». Quand on sait qu’aucun fonctionnaire de l’État, et encore moins un membre des forces de l’ordre, ne peut
déposer plainte contre quiconque sans l’encouragement de la hiérarchie, on est convaincu que l’État profond a
décidé de sortir les grands moyens pour abattre un journaliste.
Car, que viennent faire dans ce dossier de règlement de comptes des fonctionnaires de police victimes des actes
terroristes survenus à Casablanca il y a quatre ans? Idem pour la veuve du policier.
Selon l’acte d’accusation ces providentiels plaignants ont exprimé leur colère du contenu des articles parus ces
derniers temps dans le quotidien « Al Massae » sous la plume Rachid Niny, qui ne cesse d'exprimer son soutien
à tous les détenus de la Salafiya Jihadiya et de mettre en doute qu’ils étaient derrière les actes terroristes
précités ».
Voilà maintenant que mettre en doute que la Salafia Jihadia, ou quiconque, soit derrière les attentats qui ont
ensanglanté le Maroc ces dernières années est constitutif d’un délit relevant du pénal. Est-ce qu’on est en face d’un
nouveau délit de négationnisme qui n’existe pas dans nos textes de loi ?
Et puis si on doit poursuivre Rachid Niny pour ce délit fabriqué dans les officines noires du régime, pourquoi
ne pas le faire aussi avec le patron du Parti de la justice et du développement (PJD), Abdelilah Benkirane, qui
depuis quelques années dit la même chose au sujet des attentats du 16 mai 2003, et qui va même plus loin en
accusant à demi-mots un certain entourage?
À moins que l’État profond ne soit pas intéressé par Benkirane, mais plutôt par Rachid Niny.
Ce dernier disait toujours, et il le croyait, qu’il n’avait aucun problème ni avec le roi ni avec le régime, et que la
liberté d’expression au Maroc était totale tant qu’on ne s’attaquait pas à ces deux dogmes.
Du fond de sa cellule, il a peut-être rectifié sa vision des choses et compris que le problème dans ce pays ce sont
justement ces deux dogmes qu’il s’est toujours interdit d’attaquer dans ses écrits.
Pour terminer, il faut signaler, malheureusement, que la plupart des journalistes marocains n’ont pas caché leur
satisfaction de voir leur confrère incarcéré pour des faits de presse. Et même un homme d’affaires, Karim Tazi,
qui se dit membre à part entière du mouvement du 20 février, a déclaré au quotidien Assabah que « la détention
de Niny était la bienvenue ».
Nous, à Demain, bien entendu, même si on peut comprendre la colère de beaucoup contre certains écrits de Niny,
nous ne partageons pas ces opinions vengeresses.
Ali Lmrabet
URL courte: http://www.demainonline.com/?p=3672