guide d`exposition - Le Quartier des Arts
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GUIDE D’EXPOSITION Œuvres monumentales entre ciel et terre Du sculpteur Germain Bergeron Détail de l’œuvre Lulunatik, 1970 Une exposition de 14 œuvres monumentales en plein cœur de L’Assomption NÉE DE LA RENCONTRE COUP DE CŒUR DE DEUX ARTISTES, VOILÀ QUE L’ŒUVRE DE L’UN DEVIENT MATIÈRE PREMIÈRE POUR L’AUTRE ET QUE PREND FORME CETTE RÉALISATION HORS DU COMMUN. UNE RENCONTRE COUP DE CŒUR Germain Bergeron, sculpteur des années 60 dans la même mouvance que les Vaillancourt, Trudeau et Bélanger, crée des sculptures gigantesques faites à partir de métal recyclé. Plusieurs sont installées dans des endroits publics au Canada : Vancouver, Calgary, Montréal et maintenant à L’Assomption. En 2010, Germain Bergeron fait la rencontre de Robert Brulotte, designer inspiré et visionnaire de L’Assomption, qui se passionne pour l’œuvre de Bergeron. Robert Brulotte propose de revamper les œuvres que Bergeron entrepose chez lui afin de les mettre en valeur et de les exposer au public. La folie était lancée et rejoint les leaders et gens d’affaires de L’Assomption à qui on propose de créer une exposition des œuvres à ciel ouvert un peu partout dans le centre-ville. © Arsénio Corôa Ce sont donc 14 sculptures monumentales qui ont été restaurées et installées dans le Quartier des arts de L’Assomption. mettre un texte pour faire de la texture et pour calculer le nombre de mots que l’on pourrait intégrer.mettre un texte pour faire de la texture et pour calculer le nombre de mots que l’on pourrait intégrer.mettre un texte pour faire de la texture et pour calculer le nombre de mots que l’on pourrait intégrer.mettre un texte pour faire de la texture et pour calculer le nombre de mots que l’on pourrait intégrer.mettre un texte pour faire de la texture et pour calculer le nombre de mots que l’on pourrait intégrer.mettre un texte pour faire de la texture et pour calculer le nombre de mots que l’on pourrait intégrer.mettre un texte pour faire de la texture et pour calculer le nombre de mots que l’on pourrait intégrer.mettre un texte pour faire de la texture et pour calculer le nombre de mots que l’on pourrait intégrer.mettre un texte pour faire de la texture et pour calculer le nombre de mots que l’on pourrait intégrer.mettre un texte pour faire de la texture et pour calculer le nombre de mots que l’on pourrait intégrer.mettre un texte pour faire de la texture et pour calculer le nombre de mots que l’on pourrait intégrer.mettre un texte pour faire de la texture et pour calculer le nombre de mots que l’on pourrait intégrer.mettre un texte pour faire de la texture et pour calculer le nombre de mots que l’on pourrait intégrer.mettre un texte pour faire de la texture et pour calculer le nombre de mots que l’on pourrait intégrer. GERMAIN BERGERON Né à Sainte-Perpétue-de-Nicolet en 1933, Germain Bergeron produit ses premières œuvres d’art au tournant des années 60 alors qu’il enseigne au Collège Notre-Dame de Montréal. Il est à ce moment frère de la congrégation de Sainte-Croix et côtoie le frère Jérôme Paradis, personnage bien connu au sein de la communauté culturelle pour son ouverture face aux nouvelles pratiques artistiques. Contrairement à ce que son passé clérical pourrait laisser présager, Bergeron ne voit pas en la religion un frein pour son art lorsque vient le temps de produire des créations originales et souvent susceptibles de piquer la pudeur des plus conservateurs. Parmi les créations que Bergeron présente à l’exposition universelle de 1967 à Montréal (année suivant son départ de la vie religieuse), se distingue une immense armature de ferraille représentant le célèbre chevalier Don Quichotte, symbole de justice sociale, d’idéalisme et de comique. D’après Michel Vaïs, lorsque cette statue a été rendue publique, plusieurs n’arrivaient pas à croire qu’il s’agissait de l’œuvre d’un ancien ecclésiastique. La sculpture Don Quichotte représente le chevalier et sa monture de manière disproportionnée et rachitique, donnant l’effet d’un dessin sur l’horizon. Pour Bergeron, ce choix de personnage s’imposait pour l’Expo 67, qui avait pour thème « Terre des Hommes ». Tous pouvaient se reconnaître dans cette figure mythique du combattant de la liberté et aspirant de l’idéal. Près d’une décennie plus tard, en 1976, l’un des architectes de la station de métro Monk à Montréal, Marc Bélanger, lui confie la tâche de produire une œuvre pour la station qui ferait hommage aux travailleurs du métro décédés pendant sa construction. Bergeron opte plutôt pour une création qui honorera tous les travailleurs ayant participé à bâtir ce réseau souterrain et décide alors de produire Pic et Pelle : deux structures élancées, d’une hauteur de près de deux AVEC DES MOYENS LIMITÉS, IL PARVIENT À CONSTRUIRE LES CARACTÉRISTIQUES ESSENTIELLES DE NOS FAIBLESSES HUMAINES : VANITÉ, ORGUEIL, SYBARITISME ET FASTE. LE MÉTAL, CE MATÉRIEL FROID, RIGIDE ET GRINÇANT, DEVIENT, PAR LES MAINS DE BERGERON, D’UNE GRACIEUSE SOUPLESSE RÉCHAUFFANT LES ESPRITS DANS UNE VALSE QUE CHACUN PEUT DIRIGER À SON GRÉ. étages au milieu desquelles des milliers de personnes circulent chaque jour en se rendant au boulot. L’imposante stature de cette œuvre, représentant des travailleurs à l’ouvrage, soulève l’admiration du passant et monumentalise le travail ardu de tout ouvrier. Malgré le format souvent imposant des œuvres de Germain Bergeron, une profonde humilité se dégage de ces structures figées dans une mobilité poétique. Comme pour ses pairs Armand Vaillancourt et Yves Trudeau (pour ne nommer qu’eux), l’amour de l’Homme et l’engagement social de l’artiste émanent de ses sculptures. Comme l’a écrit Réa Montbizon : « Avec des moyens limités, il parvient à construire les caractéristiques essentielles de nos faiblesses humaines : vanité, orgueil, sybaritisme et faste. » Le métal, ce matériel froid, rigide et grinçant, devient, par les mains de Bergeron, d’une gracieuse souplesse réchauffant les esprits dans une valse que chacun peut diriger à son gré. Mystérieuses dans leur forme, quelquefois gênantes par leurs atouts, ces sculptures finissent inévitablement par faire en sorte qu’un sourire s’esquisse sur le visage de celui qui les regarde, rendant ainsi le passant complice de l’artiste. Dans le cadre du projet « Oeuvres monumentales entre ciel et terre », 14 œuvres de Bergeron sont installées dans divers lieux du Quartier des Arts de L’Assomption. Libres au grand air, ces sculptures se donnent à chacun et permettent de s’adonner à une aventure culturelle et historique en milieu urbain. Les marcheurs de tous genres apprécieront sans doute les rêveries et les émotions auxquelles font place ces nobles sculptures de fer. CONTEXTE HISTORIQUE Sur les plans tant social que culturel, les années 60 et 70 sont pour le Québec une période riche en transformations et en bouleversements. L’accession au pouvoir du gouvernement de Jean Lesage à la tête du Québec, dans la nuit du 4 au 5 juillet 1960, met fin à un règne politique de plus de 15 ans de l’Union nationale (longtemps dirigée par Maurice Duplessis) et fait entrer la province dans ce que l’histoire a nommé « la Révolution tranquille ». Socialement, cette révolution implique la remise en question des valeurs conservatrices jusqu’alors prédominantes. Une libéralisation accrue de la société s’amorce, ce qui notamment permettra l’épanouissement du secteur culturel québécois. En 1948, un groupe d’artistes et d’intellectuels appelé « les Automatistes » fait paraître un manifeste intitulé Refus global. Ce manifeste, écrit par Paul-Émile Borduas et cosigné par sept femmes et huit hommes, est en quelque sorte un appel à la population dans lequel on prône l’abandon d’un Québec traditionnel dirigé par un clergé trop puissant. Les signataires souhaitent embrasser l’avenir; briser les chaînes de la tradition et libérer la créativité. Condamnées par les autorités et censurées par la presse, les idées inhérentes au manifeste seront étouffées tout au long de la décennie qui allait suivre. Cependant, le contexte socio-historique des années 60 et 70 sera favorable à leur éclosion, ce qui participera à une effervescence artistique sans précédent dans l’histoire du Québec. De nombreux artistes de cette période délaissent les médiums traditionnels, tels que la peinture, pour se tourner vers la création de happenings, comme avec Serge Lemoyne, ou encore d’environnements artistiques au sein desquels le spectateur peut évoluer et participer à la création, tel que c’était le cas avec les « Mousseauthèques », des environnements multimédias aux allures de discothèques créés par Jean-Paul Mousseau. Il y a, au coeur des pratiques artistiques de l’époque, la volonté de rendre l’art accessible en le faisant sortir de ses lieux ordinaires, représentés entre autres par la galerie et le musée. Le désir de favoriser sa démocratisation, par exemple en faisant entrer l’art dans le quotidien par diverses stratégies de diffusion, anime également les acteurs de la création des années 60 et 70. Ainsi, l’art devient pour plusieurs artistes un vecteur politique, une façon de s’impliquer socialement. L’art, souvent perçu comme une forme d’élitisme lorsqu’il est restreint au jeu entre artiste, collectionneur et critique, sort dans la rue pour que tous puissent en jouir. La culture populaire devient une source d’inspiration pour la création, que ce soit sous forme de dérision des icônes conservatrices ou pour participer à la valorisation d’une identité nationale. Les structures monumentales créées par Germain Bergeron, dont plusieurs peuvent être vues dans la ville de L’Assomption, viennent s’inscrire dans cet esprit de liberté et d’accessibilité à l’art. Repérables de loin, ces œuvres de métal recyclé sont conçues pour être expérimentées par tous ceux qui ont la chance de croiser leur chemin. Trop imposantes pour être enfermées dans les voûtes d’un musée, les sculptures de Bergeron se donnent au plaisir de chacun et représentent encore à ce jour cet esprit de l’art pour tous. L’ANGE DU JUGEMENT DERNIER 1 Médium : Métal recyclé Année de création : 1978 Mécènes : Construction Gestion Frédélie inc. et Brûlerie du Roy à L’Assomption À la sortie du Théâtre Hector-Charland, un guide d’exposition en main, on aperçoit à gauche la sculpture d’un ange qui, au premier abord, semble d’une grande douceur. De longues jambes fines, une délicate poitrine, une courte robe rouge et une auréole, la féminité de cet ange de fer le rend d’une sensualité particulière. Toutefois, la Bible présente les anges comme étant des êtres asexués, ou du moins comme des « fils de Dieu puisqu’ils sont fils de la résurrection » [Luc, 20, 36]. Voilà un premier élément venant chambarder les interprétations possibles de cette œuvre. Le titre de cette sculpture, L’Ange du jugement dernier, référant au thème biblique du jugement [Matthieu, 25, 31-46], qui fut entre autres repris par Michel-Ange pour peindre le mur de l’autel de la chapelle Sixtine à Rome, vient à nouveau perturber la lecture de l’œuvre. En effet, cet épisode correspondrait au moment où Dieu, le jour du Jugement, aidé de ses anges, séparera les Hommes ayant mérité la vie éternelle de ceux méritant le châtiment éternel. Pourquoi, à première vue, tant de douceur pour représenter un ange devant accomplir une tâche aussi ingrate? Les interrogations persistent lorsqu’on prend conscience des pièces de ferraille utilisées pour composer la structure : la tête d’une broyeuse agricole en guise de robe, une hélice lui servant d’ailes et le différentiel d’un véhicule comme cou et tête du personnage. En utilisant cet attirail mécanique pour construire un ange aussi charmant, Bergeron arrive à représenter la violente scission découlant de cet épisode biblique : bonheur infini pour les uns, souffrance à jamais pour les autres. Les œuvres de Germain Bergeron, par leurs formes excentriques et démesurées, paraissent souvent comme des rêveries insolites, des pièces totalement surréalistes. Eh bien l’œuvre intitulée Ô-Miro Dali Cass-Ô, que l’on retrouve du côté est du Théâtre Hector-Charland à l’intersection de la rue Sainte-Anne et du boulevard de l’Ange-Gardien, ne fait pas exception à la règle! Le titre lui-même rappelle les noms de Joan Miró et de Salvador Dali, deux artistes ayant pendant un temps été liés au mouvement surréaliste. Le procédé de création surréaliste consiste essentiellement à utiliser, peindre, sculpter, écrire, etc., tout ce qui vient à l’esprit sans y exercer de contrôle raisonnable visant à en donner une explication logique. Le rêve, la sexualité, la spiritualité ainsi que plusieurs autres thèmes échappant à la raison ou étant des éléments tabous de la société y sont explorés. La présente œuvre de Bergeron est grandement inspirée de cette exploration exempte de contrôle raisonnable. Par exemple, une tête et un corps aux formes triangulaires cohabitent avec la rondeur des cuisses et des bottes du personnage, une dualité formelle quelque peu déstabilisante pour l’oeil de celui qui regarde. Cette sculpture fait également rivaliser le masculin et le féminin, alors que le visage du personnage est muni d’une longue moustache et que les lignes très suggestives de ses cuisses rejoignent un triangle inversé pouvant être associé à un sexe féminin. Avec cette sculpture à l’allure théâtrale et excentrique tirée de son imagination, Bergeron permet au spectateur de donner lui-même du sens à cette organisation hétérogène, d’en tirer ses propres conclusions. Enfin, tout n’est pas noir ou blanc... Ô-MIRO DALI CASS-Ô 2 Médium : Métal recyclé Année de création : 1990 Mécène : Hebdo Rive Nord TRANSIRE 3 Médium : Métal recyclé Année de création : 1978 Mécène : C.E. Malouin & Fils inc. En quittant Ô-Miro Dali Cass-Ô, on aperçoit une grande structure de couleur terre se trouvant tout au fond de la rue Saint-Joachim. De près, la pose de cette sculpture aux formes minces et ouvertes laisse croire en un Christ en croix. En effet, les bras à l’horizontale, les pieds superposés, les côtes saillantes et la forme circulaire qui surplombe la tête (forme rappelant une couronne d’épines) appuient cette observation. Cependant, si Transire est bien une représentation du Christ, elle n’a rien à voir avec ce à quoi la chrétienté a habitué ses croyants, à commencer par son sexe apparent. À part quelques exceptions, la pudeur de l’Église a toujours impliqué que l’on recouvre le sexe du Christ sur la croix comme dans toute autre représentation. Ainsi, les représentations de Jésus crucifié sont toujours pourvues ne serait-ce que d’un mince morceau de draperie pour cacher son sexe, et ce, même si les crucifiés de l’époque romaine étaient dans une complète nudité. Autre fait inhabituel pour ce genre de représentation : le visage du personnage est complètement lisse; aucun trait ne suggère l’apparence du Fils de Dieu, laissant ainsi toute la place à l’imagination du spectateur pour compléter l’image. Si cette structure aux apparences de construction en pâte à modeler est réellement une représentation du Christ osée par un ancien frère de la congrégation de Sainte-Croix, il s’agit certainement de l’une des représentations du Fils de Dieu les plus humbles à avoir été produites. LA BALLERINE 4 En revenant au boulevard de l’Ange-Gardien, on tourne à droite pour surprendre une ballerine semblant faire ses échauffements. Élancée et de la même hauteur que l’immeuble auquel elle fait dos, elle jette un regard surpris à celui qui la découvre et l’observe des pieds à la tête. Son visage triangulaire et ses yeux globuleux témoignent de l’état de stupéfaction dans lequel elle paraît être, saisie par la gêne de se faire épier pendant son exercice. Cet étonnement de la danseuse est d’autant plus étrange qu’elle pourrait broyer le passant d’un simple mouvement de « tour piqué ». Ses seins à la vue de tous ajoutent au sentiment d’embarras qui émane de la sculpture, une timidité susceptible d’entraîner un certain malaise chez celui qui la regarde. De couleur écarlate, cette femme de fer aux longs cheveux en boyaux tient en précaire équilibre sur sa jambe droite, comme si elle hésitait entre terminer sa figure d’arabesque et reposer son pied gauche au sol. Ces éléments réunis font en sorte que, malgré sa petitesse comparativement à la taille colossale de La Ballerine, l’observateur domine la sculpture. Cependant, même s’il a le dessus de la situation, le spectateur se sentira voyeur devant cette structure immobile qui s’offre à tous malgré elle. Médium : Métal recyclé Année de création : 1969 Mécènes : Bistro L’Ange cornu et Marché de Noël de L’Assomption LE ZYGOTE GIGOTE 5 Médium : Métal recyclé Année de création : 1971 Mécènes : Chez Mariki’Art et Ginette Lafortune À quelques pas de La Ballerine, une étrange créature de ferraille attend le marcheur. Il s’agit de Le Zygote gigote, une sculpture aux allures d’hybride ressemblant à la fois à un papillon désarticulé et à un humanoïde surexcité. Zygote est d’ailleurs le nom donné à un être vivant lors de son premier stade de développement à lasuite de la fécondation, un être qui pourrait très bien ici résulter d’un croisement d’espèces. Ce personnage aux couleurs verte, rouge et ocre semble directement provenir d’un récit de science-fiction. Haut sur pattes, affublé de petits bras et d’un tronc court et trapu soutenant une large tête symétrique à son appendice dorsal, cet être fantastique semble vouloir s’animer et interagir avec tous ceux qu’il croise. Comme l’a écrit Guy Robert à propos des créatures imaginaires de Bergeron : « La fantaisie [...] balaie de sa brise rafraîchissante la rouille des rebuts [...]. » Cet être est-il surpris, heureux ou angoissé de se faire observer? Difficile à dire, mais il est évident qu’il est débordant d’excitation. Justement, les pièces mécaniques choisies par Germain Bergeron pour constituer le corps de cette créature, telles que les bielles servant de bras et de cuisses, transmettent véritablement l’idée de mouvement, l’effet de gigotement du zygote, comme le mentionne son titre. De plus, le spectateur pourra avoir l’impression que si cette sculpture se mettait réellement à bouger, un tintamarre foudroyant, causé par le frottement du métal, résonnerait partout dans la ville. Amusant et intrigant, cet assemblage de ferraille alimentera l’imagination de tous. MA MAIN 6 En poursuivant sa marche sur le boulevard, à mi-chemin entre les rues Sainte-Anne et Saint-Joseph, on retrouve l’œuvre intitulée Ma main. Cette sculpture monochrome de couleur verte est constituée de trois éléments distincts facilement identifiables, à commencer par une roue en acier servant de base à l’ensemble. Ce qui paraît être un essieu est soudé sur cette roue en guise de piédestal à la pièce de résistance de l’œuvre : l’extrémité dentelée d’une pelle d’excavation mécanique. Cette pièce, rappelant la forme d’une main par les cinq dents qui la composent, est plus large que haute et semble usée dans ses articulations qui semblent figées. Une inflexibilité et une dureté se dégagent de cette pelle dentelée, alors que Bergeron a produit tant d’oeuvres où la ferraille, malgré sa fermeté, a un aspect si malléable. Des cinq sens, celui qui peut nous sembler le plus réel, le plus tangible, est certainement le toucher. C’est avant tout avec les mains que l’on touche, que l’on salue les gens et caresse les visages... Dans le monde réel, on peut difficilement imaginer quiconque souhaiter tenir dans les siennes cette main glaciale et tranchante. Toutefois, cette pièce aux allures de trésor archéologique réchauffe les esprits par son incohérence. Médium : Métal recyclé Année de création : 1982 L’ENCEINTE 7 Médium : Métal recyclé Année de création : 1975 Mécène : Desjardins Caisse Pierre-Le Gardeur De l’autre côté du boulevard de l’Ange-Gardien, on retrouve ce qui semble être la représentation d’un individu appuyé nonchalamment contre le mur d’un édifice. La posture du personnage, mains croisées sur le ventre et tête légèrement inclinée, laisse croire qu’il se trouve dans un moment d’interrogation. La forme circulaire de la tête, assise sur un corps aux arêtes multiples et au format disproportionné, est dirigée de façon à ce que le regard du personnage soit posé sur son abdomen, au milieu duquel se trouvent deux ouvertures. Curieux de voir ce qui s’y trouve, on monte sur le socle de l’œuvre pour y découvrir ce qui ressemble au curieux fœtus d’un enfant de fer. Cette découverte, passablement troublante, peut provoquer un mouvement de recul de la part de l’observateur chez qui les interrogations fusent : est-ce l’image métaphorique d’une femme admirant sa progéniture? Celle d’une future mère pensant à l’être qu’elle mettra bientôt au monde? Ou plutôt la troublante représentation de la perte de l’enfant qu’elle portait? Une beauté déroutante se dégage de cette œuvre, une sorte de fragilité contredisant la rigidité du matériel qui la compose. Celle-ci est d’autant plus forte lorsqu’on prend connaissance du titre : L’Enceinte. En effet, l’utilisation de l’article « L’ » dans le titre met l’accent sur la situation particulière du personnage représenté. Cette particularité sémantique indique en quelque sorte l’idée que cette femme au ventre habité est pointée du doigt, comme s’il y avait quelque chose d’illégitime dans sa situation. Malaise et compassion se mêlent alors à la composition ludique de la pièce de ferraille, ouvrant la voie à de nombreuses interprétations. Un peu plus à l’est sur le boulevard de l’Ange-Gardien, face au Collège de l’Assomption, une impériale statue de fer attend le visiteur au milieu des arbres. Intitulée Le retour du grand monarque, cette œuvre filiforme de Germain Bergeron se donne en paradoxe à son visiteur. En effet, sa morphologie ludique, faisant penser à un dessin animé à saveur comique, détonne avec le titre, lequel, de prime abord, devrait imposer le respect hiérarchique. Muni de courtes jambes, d’un long corps courbé et d’un cou si étiré qu’on sent qu’il pourrait rompre à tout instant, ce personnage distordu transmet l’impression de sa désuétude. Sa tête voutée fixe le sol et ne communique pas la fierté et la force que devrait normalement dégager un monarque. Malgré tout, il tient fermement son sceptre dans sa main gauche et une croix est fixée à son avant-bras droit, un peu comme si elle y était tatouée. La base triangulaire servant de socle à l’œuvre est dotée de trois roues dont aucune ne se dirige dans la même direction, de sorte que l’unique mouvement que ce « char royal » pourrait faire serait un mouvement circulaire infini. Cette idée de rotation est-elle là pour permettre aux sujets du roi de l’admirer sous tous ses aspects, telle une icône, ou plutôt pour signifier son incapacité à aller de l’avant? La réponse semble évidente, et la dérision d’un personnage qui, historiquement, avait tous les pouvoirs, brise les chaînes du passé par son ironie et se rit de cette hiérarchie désormais archaïque. LE RETOUR DU GRAND MONARQUE 8 Médium : Métal recyclé Année de création : 1985 Mécène : Collège de l’Assomption WOPÉTAL 9 Médium : Métal recyclé Année de création : 1967 Quelques mètres plus loin, toujours sur le boulevard de l’Ange-Gardien, un être de nature inconnue est juché sur son perchoir et guette le passant. La sculpture de Germain Bergeron intitulée Wopétal fait partie des différents bestiaires, c’est-à-dire des créatures étranges et mystiques souvent imaginaires que l’artiste a su créer. À ce sujet, Guy Robert a écrit que par l’exploration que fait Bergeron du répertoire bestiaire, « l’oiseau devient le dépositaire de nos rêves de vol, d’évasion et d’ailleurs, et évoque le mythe d’Icare », cet homme de la mythologie grecque qui était parvenu à voler grâce à des ailes de cire qui ont malheureusement fondu lorsqu’il s’est trop approché du Soleil. La créature que Bergeron appelle Wopétal a peut-être des allures d’oiseau, mais ne semble guère pouvoir s’envoler avec ses ailes trop courtes et ses énormes pattes. Cependant, même si elle ne pouvait s’envoler, cette bête semblant provenir de la préhistoire pourrait sans doute survivre dans un monde des plus barbares grâce à sa carrure tranchante et à son bec acéré. Étrangement, ce qui aurait pu être en d’autres cas le symbole de la virilité et de la puissance de l’animal, son sexe masculin devient ici la zone de son corps la plus fragile, la plus exposée aux attaques ennemies en pendouillant ainsi dans le vide. LULUNATIK 10 À l’entrée principale du Cégep régional de Lanaudière sur la rue Dorval, un personnage farfelu aux couleurs vives accueille les étudiants. De la même lignée de personnages de science-fiction que Le Zygote gigote, l’œuvre de Bergeron intitulée Lulunatik est à la fois intrigante et amusante. Comme son titre le suggère par son jeu de mots, la présente sculpture laisse présager une personnalité instable par les éléments qui la composent. Les pièces circulaires de couleurs rouge, orange et jaune, formant toute la partie inférieure de son corps, semblent lui permette de tournoyer dans tous les sens. Ces mêmes pièces paraissent pouvoir s’emboîter les unes dans les autres, telles des poupées russes, afin que Lulunatik arrive à se baisser et à s’élever comme il le souhaite. L’idée que sa tête, formée d’un différentiel automobile, balancerait au moindre contact est transmise par le fait qu’elle est supportée par un cou construit d’un ressort en spirale. Ses oreilles, faites de cette même pièce, accentuent cette impression d’instabilité. Finalement, l’hélice qui lui sert de chapeau, ou peut-être de générateur d’énergie, vient compléter l’idée de motricité si présente dans l’œuvre. Avec ses apparences de vire-vent vire-poche, ses grands yeux et son nez jaune, ses pièces colorées et rigolotes ainsi que ses allures d’extra-terrestre débordant d’énergie, Lulunatik est un personnage ludique et attachant que plusieurs aimeraient bien ramener à la maison. Médium : Métal recyclé Année de création : 1970 Mécène : Cégep régional de Lanaudière à L’Assomption HALTÉROPHILE 11 Médium : Métal recyclé Année de création : 1968 Mécène : Supermarché IGA Crevier L’Assomption inc. En poursuivant sa marche sur la rue Dorval, à l’entrée du stationnement du complexe sportif, on rencontre un haltérophile géant en pleine action. La finesse du personnage, construit à partir de formes minces et cylindriques, contraste avec le sport exigeant qu’il pratique. Les jambes en position de fente, les bras pliés, le dos courbé et la tête regardant vers le ciel, l’athlète est capturé par l’artiste dans le dernier mouvement de son épaulé-jeté, l’un des deux mouvements évalués lors d’une épreuve d’haltérophilie. Cette étape de l’exercice, précédant l’extension complète du corps avec les bras en flèche vers le haut, correspond au moment où les membres de l’haltérophile sont le plus en torsion, formant ainsi un ensemble de diagonales exprimant toute la difficulté de l’activité. Figé dans cette position, Haltérophile de Bergeron relève du dessin d’observation, alors que l’artiste est parvenu à saisir en détail la complexité du mouvement. Constatant que la barre plie sous le poids des disques, l’instant semble pénible pour l’athlète et on se demande s’il arrivera à compléter son levé ou si la barre, qu’il n’est pas encore tout à fait parvenu à empoigner, lui glissera des mains. La précarité de la situation invite l’observateur à compléter la scène par sa propre imagination. Souhaitonslui quand même de réussir son levé... LE GOLFEUR 12 Toujours dans le stationnement du centre sportif, tout près de la rue SainteAnne, un second athlète en pleine action attend qu’on l’observe. Encore une fois, Le Golfeur créé par Germain Bergeron témoigne de la qualité de ses observations quant à la complexité de l’élan du golfeur. En effet, la structure d’acier présente un joueur gaucher complétant l’exécution de son mouvement. En premier lieu, il est possible de constater que le personnage exécute bien son transfert de poids alors que son pied droit est à plat et que sa jambe gauche, légèrement fléchie, se termine par un pied en pointé. Sa tête et ses hanches, bien droites, regardent vers la cible, tandis que son torse et ses épaules indiquent qu’il est en toute fin de rotation. Dans cette grande structure, les lignes parfois déformées et disproportionnées côtoient l’élégance et le chic souvent associés à ce sport. Cependant, il est intéressant de noter la touche humoristique propre à Bergeron qui a représenté son golfeur avec des fesses rebondies. Le golf, considéré comme un sport mondain, connaît une réglementation stricte, particulièrement en ce qui a trait à l’habillement de ses adeptes. En représentant son golfeur avec un tel fessier, l’artiste se moque délicatement de cet orgueil propre à la race humaine quant à certains aspects de nos vies. Médium : Métal recyclé Année de création : 1992 Mécènes : Les familles Borja Brulotte Charest Dupont Laurier Roy PIETÀ 13 Médium : Métal recyclé Année de création : 1977 Mécène : Aux Jardins de la rivière En quittant le centre sportif, on tourne à gauche sur la rue Sainte-Anne pour ensuite se diriger vers la droite sur Saint-Étienne. Deux rues plus loin, au parc LeSueur, est installée Pietà, une œuvre dont le titre se rapporte au thème chrétien de la Vierge pleurant son enfant mort sur la croix. De nombreux artistes de la Renaissance, tels Raphaël vers 1505, ont utilisé ce thème de la Vierge de pitié, tant en peinture qu’en sculpture. Traditionnellement, ce thème présente la Vierge Marie habillée d’une grande tunique cachant l’ensemble de son corps. Sur ses genoux repose le corps du Christ que ses persécuteurs viennent de descendre de la croix. Elle le tient dans ses bras alors qu’il a les yeux fermés, donnant l’impression qu’il dort d’un profond sommeil. De plus, il est systématiquement habillé d’un cache-sexe (périzonium) en raison de la pudeur traditionnelle de l’Église. Ce que Bergeron a décidé de faire avec sa Pietà est essentiellement le contraire! Tout d’abord, on remarque que Marie, le personnage agenouillé, n’a pas de bras pour tenir son fils, alors que son corps de fer, entièrement nu, dévoile de petits seins ainsi que son sexe. Elle regarde Jésus, avec des yeux sortis de leur orbite, posé sur sa cuisse gauche dans une posture témoignant de la souffrance qu’il a endurée. Le rendu de son visage donne à voir une bouche grande ouverte, et contrairement aux représentations habituelles, ses yeux semblent être restés ouverts. Connaissant le passé ecclésiastique de Bergeron, on devine que son souhait n’était pas de porter en dérision cette scène de souffrance. Avec cette simplicité de représentation, il réussit plutôt à humaniser l’enfant de Dieu et sa mère tels qu’ils auraient existé. L’ANGE 14 En quittant le parc Le Sueur, on monte la rue Notre-Dame jusqu’à la rue St-Pierre pour découvrir la dernière sculpture du parcours, située devant la Maison de la culture et qui s’intitule L’Ange. Le mot « ange » possède une connotation généralement douce, référant à un être divin et protecteur. Les anges sont idéalisés par le commun des mortels, de telle sorte qu’ils sont métaphoriquement mis sur un piédestal afin que l’on puisse mieux les admirer. L’Ange de Bergeron est aussi sur un piédestal, bien réel celui-là, mais ressemblant plutôt à un perchoir duquel ce personnage ténébreux pourra s’élancer pour punir les fautifs. Sans bras et sans visage, auréolé d’une lame de scie circulaire et prêt à sauter sur les brebis égarées, cet ange impose la crainte plutôt que la quiétude. Dans son dos, ce que l’on peut voir comme étant ses ailes ressemble à une anse qu’un être supérieur pourrait empoigner pour mieux contrôler ce personnage à l’auréole tranchante. Malgré ses allures de réverbère, on doute de la capacité de cet être à illuminer les âmes. Ne serait-il pas plutôt un mauvais ange? Un démon, comme les anges du mal sont définis dans la Bible? En fait, la différence entre ange et démon tient dans une délicate conception impliquant, comme tant d’autres choses, que l’un nécessite l’existence de l’autre pour se définir. À ses côtés, sommes-nous en mesure de dire ce que l’on est? Médium : Métal recyclé Année de création : 1984 PARCOURS DE L’EXPOSITION 1 L’Ange du jugement dernier 5 Le Zygote gigote 2 Ô-Miro Dali Cass-ô 6 3 Transire 4 La Ballerine 9 Wopétal 12 Le Golfeur Ma Main 10 Lulunatik 13 Pietà 7 L’Enceinte 11 Haltérophile 14 L’Ange 8 Le Retour du grand monarque 3 Rue Sainte-Ursule Théâtre 2 Hector- Charland 5 Rue Sainte-Anne Rue Saint-Joseph Rue Notre-Dame Rue du Portage 7 4 1 Boulevard de l’Ange-Gardien 9 8 Collège de l’Assomption Cégep régional de 10 Lanaudière à L’Assomption 14 Rue Saint-Pierre 11 12 Rue Saint-Étienne 13 Rue Dorval 6 Remerciements M. Germain Bergeron Mme Nicole Mercier mes M Sophie et Roxanne Bergeron M. Robert Brulotte M. Winston McQuade M. François Renaud Le ministère de la Culture et des Communications du Québec La Ville de L’Assomption La MRC de L’Assomption Xstrata Cooper Canada Les 20 mécènes : Bistro L’Ange cornu, Brûlerie du Roy à L’Assomption, Cégep régional de Lanaudière à L’Assomption, Chez Marikit’Art, Collège de l’Assomption, Corporation Hector-Charland, Caisse Desjardins Pierre-Le Gardeur, Les familles Borja, Brulotte, Charest, Dupont, Laurier et Roy, Gestion Frédélie inc., Ginette Lafortune, Hebdo Rive Nord, Les Jardins de la rivière, Malouin CE & Fils inc., Marché de Noël de L’Assomption, Supermarché IGA Crevier L’Assomption inc. BIBLIOGRAPHIE : Paul-Émile Borduas, Refus global et autres écrits, Montréal, Éditions Typo, 2010 (1948), 301 p. Réjean-Bernard Cormier, « Des artistes de leur temps », ETC, n° 48, 1999-2000, p. 35-37. André Martin, « Frère Jérôme : De l’art de la pédagogie et de la pédagogie de l’art », Vie des Arts, vol. 25, n° 99, 1980. Réa Montbizon et Claude-Lyse Gagnon, « À Montréal », Vie des Arts, n° 44, 1966, p. 88-89. Guy Robert, Bergeron aède de la ferraille, Montréal, Association des sculpteurs du Québec, 1972. Marcel Saint-Pierre, « A Quebec art scenic tour and his ‘contradictions itinérantes’ », Québec Underground, 1962-1972, tome 2, Les Éditions Médiart, Montréal, 1973, p. 448-471. Michel Vaïs, « Don Quichotte et l’invention artistique », Jeu : revue de théâtre, n° 89, (4) 1998. « Les artistes du métro de Montréal : Germain Bergeron », Métro, 28 octobre 2003, p. 9. Rédacteur : Pierre-Charles Monahan / Correctrice : Sylvie Lemay / Photographe : Arsénio Corôa / Conception et mise en page : Anne-Marie Charest Suivez L’Art en plein air à L’Assomption sur