Droits d`exploitation audiovisuelle

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Droits d`exploitation audiovisuelle
Normes comptables
LES DROITS D'EXPLOITATION AUDIOVISUELLE
DES SOCIÉTÉS SPORTIVES : UN ACTIF ?
vigueur dans les comptes des exercices
ouverts à compter du 1er janvier 2005,
issues du règlement CRC n° 2004-06.
Selon ces dispositions, un actif est un élément identifiable du patrimoine ayant
une valeur économique positive pour
l'entité, i.e. un élément engendrant une
ressource que l'entité contrôle du fait
d'événements passés et dont elle attend
des avantages économiques futurs.
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Le Conseil national de la comptabilité,
consulté par le ministère des Sports,
a précisé dans l'avis n° 2005-01 du
24 mars 2005 (texte intégral dans ce
numéro p. 49) le traitement comptable
des droits d'exploitation audiovisuelle
cédés à titre gratuit par les fédérations
aux sociétés sportives, en application
de la loi du 1er août 2003. Les sociétés
en cause peuvent notamment être des
sociétés anonymes à objet sportif.
La loi du 1er août 2003, tout en attribuant
aux ligues professionnelles l'exclusivité
de la commercialisation des droits
d'exploitation audiovisuelle, prévoit
une répartition des produits liés à cette
exploitation entre les fédérations, les
ligues et les sociétés sportives. La part
revenant aux sociétés sportives est
redistribuée selon un principe de
mutualisation sur la base de critères
fondés sur leurs performances sportives et
leur notoriété, celles-ci étant notamment
liées aux résultats sportifs et à la
capacité à attirer des spectateurs.
L'avis du CNC observe que, tant que
ces critères sont respectés, les sociétés
sportives, ayant bénéficié du transfert
de la propriété des droits d'exploitation
audiovisuelle, conservent le contrôle de
ces droits. Il note que, par rapport à la
situation antérieure au transfert gratuit
des droits, celui-ci n'engendre aucun
flux de trésorerie complémentaire. Il n'a
pour effet que de sécuriser la situation
juridique d'un élément particulier du
fonds de commerce des sociétés sportives.
Les textes en présence
La question est de savoir si le transfert à
titre gratuit des droits d'exploitation
audiovisuelle justifie l'inscription d'un actif
au bilan des sociétés sportives. Elle offre
au CNC l'occasion de mettre en œuvre les
nouvelles dispositions du PCG entrées en
R.F.C. 377 Mai 2005
S'agissant d'une immobilisation incorporelle la condition d'identifiabilité est
acquise si l'une des deux conditions suivantes est remplie :
• l'immobilisation incorporelle est séparable des activités de l'entité, c'est-à-dire
susceptible d'être vendue, transférée,
louée ou échangée de manière isolée ou
avec un contrat, un autre actif ou passif ;
• elle résulte d'un droit légal ou contractuel même si ce droit n'est pas transférable
ou séparable de l'entité ou des autres
droits et obligations (article 211-3).
Pour qu'une immobilisation incorporelle
puisse être comptabilisée à l'actif, il
convient que les deux conditions suivantes soient réunies : il est probable que
l'entité bénéficiera des avantages économiques futurs et le coût ou la valeur des
droits peut être évalué avec une fiabilité
suffisante (article 311-1).
Enfin, le CNC rappelle deux autres dispositions du PCG : d'une part, les actifs acquis
à titre gratuit sont comptabilisés à leur
valeur vénale (article 321-1), d'autre part,
la valeur vénale est le montant qui pourrait
être obtenu à la date de clôture, de la
vente d'un actif lors d'une transaction
conclue à des conditions normales de marché, sous déduction des coûts de sortie.
Les conclusions du CNC
Sur la base de ces textes, le CNC formule
les conclusions suivantes :
• les droits d'origine légale, tels que les droits
d'exploitation audiovisuelle, constituent des
immobilisations incorporelles, puisqu'ils
remplissent l'une des deux conditions
d'identifiabilité mentionnées ci-dessus ;
• au cas particulier, comme il n'apparaît
pas possible de donner une valeur aux
droits d'exploitation audiovisuelle, tout au
moins avec une fiabilité suffisante, ceux-ci
ne peuvent être comptabilisés à l'actif.
Pour parvenir à cette seconde conclusion,
le CNC constate que le seul effet de la cession gratuite des droits aux sociétés sportives est de réduire la prime de risque sur
les flux futurs de trésorerie leur revenant et
de réduire ainsi le taux d'actualisation à
retenir pour valoriser les recettes futures
provenant de l'exploitation audiovisuelle.
Pour des flux de trésorerie restés identiques avant et après le transfert gratuit
des droits d'exploitation audiovisuelle,
ceux-ci auraient pu dès lors être valorisés
comme le différentiel de valeur provenant
de la réduction du taux d'actualisation.
Toutefois, à défaut de marché pour ce
type de droits et de référence pour déterminer la réduction du taux d'actualisation,
il n'a pas paru possible au CNC de parvenir à une fiabilité suffisante de l'évaluation,
ce qui interdit dès lors de comptabiliser
ces droits à l'actif des sociétés sportives.
Cette conclusion permet au CNC de ne
pas avoir à trancher la question de la
contrepartie de cet actif, dans l'hypothèse
où il aurait pu être valorisé : profit ou subvention d'investissement versée en nature,
comme l'IAS 38 nous invite à l'envisager.
L'approche des IFRS
Du fait d'une règle plus expéditive, la
norme IAS 38 sur les immobilisations
incorporelles aboutit à la même conclusion : une immobilisation incorporelle ne
peut entrer au bilan que pour une valeur
correspondant à son coût (§ 24). On en
déduit qu'à défaut de coût, ce qui est le
cas des droits d'exploitation audiovisuelle,
une immobilisation incorporelle obtenue
gratuitement est inscrite pour une valeur
nulle à l'actif.
Toutefois, s'agissant de droits obtenus
d'une autorité publique, le paragraphe 44
de la norme IAS 38 confirme une option
ouverte par la norme IAS 20 sur les subventions publiques au paragraphe 23. Ces
droits peuvent être comptabilisés à l'actif :
• à leur juste valeur en contrepartie au
passif d'une subvention d'investissement ;
• à une valeur symbolique, augmentée
des coûts directs nécessaires pour qu'ils
puissent être utilisés.
■ Benoît LEBRUN
Associé Salustro Reydel