Bail rural et société - Chambre d`Agriculture de la Vienne
Transcription
Bail rural et société - Chambre d`Agriculture de la Vienne
Chronique Juridique 08/03/2011 Pour parution Vienne Rurale 10/03/2011 Bail rural et société La volonté de mettre en commun l’exploitation de terres agricoles est un des arguments qui amène certains agriculteurs à constituer une société. Bien que le statut du fermage interdise la cession des baux et la sous location, ce principe n’interdit toutefois pas au fermier d’exploiter des terres louées au travers d’une société agricole qu’il crée ultérieurement à la souscription du bail ou qu’il rejoint lors de la signature d’un bail. Nous allons donc voir les différentes opportunités s’offrant au fermier ainsi que les démarches qu’il devra entreprendre. Conditions de la mise à disposition d’un bien loué Au regard de l’article L. 411-37 du Code Rural, le fermier membre d’une société d’exploitation agricole peut mettre à la disposition de celle-ci les terres louées dont il détient la jouissance en vertu d’un bail rural à condition qu’il participe de manière effective et permanente à leur mise en valeur. La société bénéficiaire de la mise à disposition devra avoir un objet principalement agricole, être dotée de la personnalité morale et ce quelque soit sa forme juridique (SCEA, EARL…). Son capital social devra être détenu majoritairement par des personnes physiques. La mise à disposition d’un bien loué dans les mêmes conditions au profit d’un GAEC est soumise à l’article L. 323-14 du Code Rural sachant que l’obligation est faite à tous les associés de travailler en commun. Information du bailleur Le fermier devra aviser son propriétaire par lettre recommandée avec accusé de réception au plus tard dans les deux mois qui suivent la mise à disposition. La notification devra permettre au bailleur de connaître le nom de la société, le Tribunal de Commerce auprès duquel est immatriculée la société ainsi que les parcelles mises à sa disposition. Le fermier aura l’obligation d’informer le propriétaire de tout changement concernant ces éléments ainsi qu’en cas de fin de mise à disposition du bien loué. Une nouvelle notification devra parvenir au propriétaire dans les deux mois suivants tout changement de situation par lettre recommandée avec accusé réception. Conséquences La mise à disposition d’un bien loué ne transfère pas à la société le droit au bail. Le fermier reste seul titulaire du bail qui lui a été consenti et demeure l’unique interlocuteur du bailleur. La durée de la mise à disposition ne peut pas être supérieure à la durée pendant laquelle le fermier reste titulaire du bail. La mise à disposition ne modifie d’ailleurs en rien les droits du bailleur. Le preneur, ses coassociés ainsi que la société sont tenus indéfiniment et solidairement de la bonne exécution du bail. Il faut noter que la mise à disposition d’un bien loué ne permet pas au fermier de se voir attribuer des parts sociales de la société. La mise à disposition de bien loué est souvent pratiquée par les fermiers car s’ils se retirent de la société, elle leur permet de poursuivre seul l’exploitation des terres. Attention, la mise à disposition de terres par un associé fermier prendra fin dès lors qu’il fera valoir ses droits à la retraite. Il sera donc nécessaire qu’il prenne ses dispositions pour céder son bail, négocier avec le bailleur un nouveau bail avec la société ou un des associés exploitants ou encore délivrer congé à son propriétaire. L’apport du droit au bail L’article L. 411-38 du Code Rural offre la possibilité au fermier d’apporter son droit au bail au profit d’une société agricole (SCEA, EARL, GAEC….) à la condition qu’il obtienne préalablement l’agrément personnel du bailleur (une simple information ne suffit pas). En cas de refus de ce dernier aucun recours ne peut être intenté devant le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux. Conséquence, la société devient seule titulaire du bail et se substitue au fermier qui perd l’ensemble de ses droits. Le bail rural étant dépourvu de valeur patrimoniale, l’apport du droit au bail à une société d’exploitation agricole ne peut pas permettre au fermier d’obtenir des parts sociales. Enfin, en cas de retrait de la société de l’associé ayant fait un apport de son droit au bail, la société continuera l’exploitation des biens loués. Ce choix là ne sera envisagé qu’après en avoir mûrement pesé les conséquences. Anthony ARLOT, Juriste Chambre d’Agriculture de la Vienne