Et si le Qatar rachetait le Luxembourg

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Et si le Qatar rachetait le Luxembourg
DEXIA, KBL ET LE QATAR 9
Photo : martine may
mardi 11 octobre 2011
Quand le Cheik Hamad bin Jassem bin Jabor al Thani se déplace au Luxembourg pour rencontrer Jean-Claude-Juncker, économie et politique sont étroitement liées.
Et si le Qatar rachetait le Luxembourg
Se construire un hub de transport aérien (Cargolux) et une place financière reconnue (BIL, KBL) fait partie
d'un plan stratégique économique du Qatar, qui a trouvé avec le Luxembourg son allié parfait.
Et si le Qatar était en train de se servir
du Luxembourg pour mettre en place
sa stratégie de diversification économique? C'est en tout cas ce qui se disait hier dans le Golfe après le rachat
de la BIL et KBL.
De notre journaliste
Delphine Dard
L
e Qatar en investissant massivement en Europe depuis quelque temps fait grandement parler
de lui. Ce n'est plus un secret pour
personne aujourd'hui, le pays, en
passe de devenir le premier exportateur au monde de gaz naturel liquéfié, a une vison très réaliste de
son économie. Il sait qu'il peut
compter sur encore deux décennies
de fastes grâce à cette richesse naturelle mais devra par la suite miser
sur la diversification économique
pour assurer la pérennité de ses richesses.
L'annonce du rachat quasi simultané hier de la KBL puis de la BIL
par des intérêts qatariens liés à la famille royale al Thani et ce quelques
mois après l'entrée de Qatar Air-
ways, elle aussi liée à la dynastie régnante, dans Cargolux, faisait réagir hier, Benjamin de Seille, fondateur de la société luxembourgeoise
GBN, qui aide les entreprises européennes à se développer dans le
Golfe et inversement les Arabes à se
positionner en Europe. Contacté
par Le Quotidien, il a lui-même fait
un tour d'horizon dans la journée
de quelques-uns de ses contacts
dans le Golfe.
Si Cargolux ou KBL n'évoquent
pas grand-chose aux businessmen
de la péninsule arabique, Dexia est
une banque connue et il leur paraît
clair aujourd'hui que le Qatar est en
train d'utiliser le Luxembourg pour
asseoir sa stratégie.
Selon ses contacts, le Qatar a mis
en route en mars dernier son «National Vision 2030». Il s'agit d'un
plan de grande envergure de diversification économique pour le pays
qui repose sur cinq piliers : l'économie de la connaissance, hub de
transport aérien, un centre régional
financier, le tourisme d'affaires et
une politique d'industrialisation.
On comprend alors beaucoup
mieux pourquoi le Qatar investit
aujourd'hui tant au Luxembourg.
Le ministre des Finances, Luc Frieden, qui était en visite dans l'émirat
indépendant un mois avant la mise
en place du plan, est lui aussi sans
aucun doute au courant des velléités du pays. Les tractations pour
l'entrée de Qatar Airways dans le
capital de Cargolux datent du printemps et collent tout à fait avec le
souhait du pays de se construire un
hub de transport aérien.
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Deux pays, une
stratégie commune
Lors de la finalisation de l'entrée de Qatar Airways au capital de
Cargolux, Jean-Claude Juncker
avait reçu la visite de son homologue qatarien, le cheik Hamad bin
Jassem bin Jabor al Thani, qui avait
manifesté son intérêt pour la place
financière luxembourgeoise. Quelques mois plus tard, voilà que la famille régnante al Thani du Qatar rachète la BIL et la KBL, de quoi sans
doute créer des plateformes entre
l'Europe et la péninsule arabique
Une stratégie en trois points
Le Qatar prépare ses investissements pour l'avenir en misant
aussi sur la diversification, le prestige et la rentabilité.
S
elon Benjamin de Seille (photo),
fondateur de GBN au Luxembourg et spécialiste du Golfe, le Qatar fonctionne selon trois types
d'investissement : la diversification, le prestige et la rentabilité.
Premier type d'investissement : la
diversification. Le Qatar investit en
Europe parce qu'il a besoin de diversifier ses intérêts financiers. Ces
investissements sont réalisés pour
créer des synergies avec le pays. Qatar Airways qui investit dans Cargolux est l'exemple type. La compagnie représente un pont parfait entre l'Europe et l'Asie et elle voit
dans Cargolux l'opportunité de
créer des synergies pour le fret au
Qatar entre l'Europe et l'Asie. Ce
type d'investissement n'est pas purement financier : c'est également
stratégique. Le Qatar achète aussi
des terres fertiles en Afrique en se
disant qu'après l'ère du gaz, elles lui
permettront de continuer à bien
nourrir sa population, même en cas
de sécheresse.
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Du PSG
à EADS
Le Qatar investit aussi pour le
prestige et pour accroître sa notoriété. Ainsi, le pays investit dans des
clubs de football comme le PSG en
France ou le Barça en Espagne et devient ainsi le seul sponsor à voir son
nom apparaître sur le maillot des
joueurs catalans qui ne comportait
que la mention «Unicef». Le prestige, c'est aussi acheter des hippodromes, le Casino de Cannes ou obtenir l'organisation de la Coupe du
monde de football et promettre de
faire des stades démontables qui seront ensuite emmenés en Afrique.
Cette opération va lui coûter beaucoup plus d'argent qu'elle ne va rapporter mais en termes de prestige et
de visibilité, c'est inégalable, sur-
tout quand on sait que le pays veut
développer le tourisme d'affaires.
Le Qatar investit également parce
que c'est rentable et pour faire fructifier ses gazodollars. C'est notamment le cas de ses prises de participation dans Credit Suisse, dans les
chocolats Galler en Belgique ou encore dans les multinationales
comme Suez ou Veolia. Quand enfin le Qatar s'intéresse aux 15 % que
Daimler détient dans EADS, c'est
très certainement aussi pour développer sa politique industrielle.
avec le savoir-faire luxembourgeois,
pour permettre au Qatar d'ériger
son centre régional d'affaires.
Lors de cette visite, les Qatariens
ont aussi signé un memorandum of
understanding avec SES pour créer des
platefomes de satellites au MoyenOrient et ainsi... amorcer leur politique d'industrialisation.
Selon Benjamin de Seille, si le Qatar
est aussi réactif aujourd'hui pour
trouver des investissements qui servent ses intérêts, c'est que la première
phase de son plan de diversification
économique qui doit avoir lieu
jusqu'en 2016 est dotée de moyens
vertigineux : dans le Golfe, on raconte que le Qatar va investir d'ici
cette échéance 40 % de ses dépenses
annuelles dans la diversification économique, soit 18 milliards de dollars.
Pour le spécialiste de GBN, il est de
plus en plus évident que le Qatar est
un pays qui a conçu une stratégie
d'investissement de long terme très
sophistiquée, très loin du train de
vie tape-à-l'œil de Dubai, qui brûle
un peu la chandelle par les deux
bouts.
Et en matière de stratégie, le Qa-
tar, qui est actionnaire à hauteur de
35 % de Cargolux, ne peut pas ne
pas avoir pensé qu'en rachetant la
BIL, il met la main sur une participation de la banque de 13,14 % au
sein du capital de Luxair, qui est
elle-même actuellement encore
l'actionnaire principal de Cargolux
avec 43,4 % du capital. De là à en
conclure que le Qatar rachète d'une
certaine manière le Luxembourg, il
n'y a qu'un pas... Toutefois, la situation est plus complexe qu'il n'y paraît, le Luxembourg n'est pas le seul
pays dans lequel l'émirat investit
massivement. Mais le Grand-Duché
de par sa petite taille et sa physionomie a beaucoup de points communs avec l'émirat et pourrait lui
aussi se servir intelligemment de lui
pour mieux se faire connaître dans
les pays du Golfe et ainsi développer
de manière plus internationale la finance islamique. Car le Luxembourg a lui aussi un plan de diversification économique et ces deux
pays qui pensent à long terme et
ont mis en place des stratégies d'investissement très élaborées ont décidément beaucoup à partager.
Une vision nationale pour 2030
Pour se développer de manière
stratégique, le Qatar s'est doté
d'un plan intitulé «National Vision 2030». Il doit permettre au
pays de se moderniser tout en
préservant ses traditions, de répondre aux besoins des générations futures, de contrôler sa
croissance et son expansion, de
contrôler la venue de main-d'œuvre étrangère en fonction de son
savoir-faire, et de promouvoir
une croissance économique qui
ne nuit pas au social et à l'environnement. Le plan entre dans sa
première
phase
(2011-2016).
Parmi les secteurs stratégiques
sur lesquels le pays mise, il y a
l'économie de la connaissance, le
transport aérien, un centre régional financier, le tourisme d'affaires ou encore l'industrialisation.
Les investissements massifs du
pays en Europe n'ont pas une visée hostile, il s'agit surtout pour
le Qatar de sécuriser son avenir.
FINAGRA S.A., SPF
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R.C.S Luxembourg B 24.500
ASSEMBLEE GENERALE EXTRAORDINAIRE
Mesdames et Messieurs les actionnaires sont priés d'assister à l'Assemblée Générale Extraordinaire
qui se tiendra le 24 novembre 2011 à 15h00 au siège social avec pour
ORDRE DU JOUR
- Délibération et décision sur la dissolution éventuelle de la société conformément à l’article 100 de la loi
du 10 août 1915 sur les sociétés commerciales.
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Le Conseil d'Administration