Résumé Histoire de l`abolition de la peine de mort, dans les six pays
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Résumé Histoire de l`abolition de la peine de mort, dans les six pays
Résumé Histoire de l’abolition de la peine de mort, dans les six pays fondateurs de l’Union européenne Thèse de Doctorat en Histoire contemporaine (CEMMC) Université Bordeaux Montaigne Marie Bardiaux-Vaïente, Sous la direction de Bernard Lachaise Julie Le Quang Sang en 2001, dans son ouvrage La Loi et le bourreau, estime que la question de l’abrogation définitive de la sanction capitale en Europe est encore tout à fait d’actualité et qu’elle reste « un vaste chantier à explorer1 ». Or, l’abolition du châtiment suprême est aujourd’hui devenue une des valeurs fondamentales et un des particularismes de l’Union européenne. En sciences humaines ou juridiques, les questionnements liés à la sanction capitale sont généralement les suivants : l’étude des nations non abolitionnistes, les écrits historiques des peuples aujourd’hui abolitionnistes et anciennement rétentionnistes, ainsi que quelques opuscules pro-peine de mort. Nous avons mené une étude comparée entre les six pays fondateurs de l’Europe communautaire : France, Allemagne (ex-RFA), Italie, Pays-Bas, Belgique et Luxembourg. L’histoire et la culture communes à ces Six ont abouti à ce qu’aujourd’hui tout Européen est le citoyen, l’habitant d’une entité quasi indéfinissable, d’un territoire multiple en recherche d’identité, mais abolitionniste. Selon les dictionnaires Larousse et Robert, le terme abolition est synonyme de « suppression » ou d’« annulation ». Il s’agit d’un vocable à usage juridique. Abolir une loi, 1 Julie Le Quang Sang, La Loi et le bourreau : la peine de mort en débats (1870-1985), Paris, L’Harmattan, Coll. Logiques sociales, 2001, p. 223. c’est l’abroger. Abolir la peine de mort, c’est l’annuler. Voilà aujourd’hui ce dont l’Union européenne est partisane. Or, comment les six premiers États vecteurs de l’UE sont-ils parvenus à imposer une telle clause morale, du sein de leurs propres institutions jusqu’au cœur législatif et idéologique de l’Union. Aujourd’hui, l’abolition est devenue une condition sine qua non d’entrée dans l’UE. Par l’unicité et le croisement infléchi par l’Europe, de quelles histoires nationales est-on parvenu à cet entendement effectif ? Qui sont les artisans de cette pensée : les hommes, les réseaux, les mouvements politiques ou idéologiques ? C’est dans cette optique que les six pays fondateurs sont étudiés : à travers le constat de convergences et de divergences nationales exprimant les causes ou conséquences qui ont permis ou retardé l’abrogation de la sanction capitale. Pour chacun d’entre eux surgit la compréhension des mécanismes qui ont habilité cet abolitionnisme. Or, Il existe des mises en parallèle ou en opposition. Ainsi, certains événements extrêmes – le fascisme et les événements de la Seconde Guerre mondiale – ont été des catalyseurs, au XXe siècle, d’une réponse rapide à la question de l’abolition pour certaines nations. Elle devient parfois évidente et nécessaire à la société civile, après des tragédies historiquement uniques. Par le biais de l’Histoire des mentalités, au travers des débats parlementaires, nationaux et européens, des mémoires des acteurs politiques de l’abolition, de la presse et des revues, des sources audiovisuelles (INA), mais aussi des sources orales (interviews) et des textes et lois entérinés ou non, notre étude prend sens. Le matériau de recherche, très dense, met en exergue un ensemble de composants déterminants et nombreux pour chacun des Six, permettant une analyse globale de cette question. L’élaboration biographique des artisans de cette pensée : leurs réseaux, leurs filiations, leur histoire personnelle avec le crime légal. En substance, qui sont les hommes forts de la récente pensée abolitionniste en Europe, et pour quelles raisons se sont-ils impliqués dans une telle cause ? Par ailleurs, leur engagement européiste est-il indissociable de l’abolitionnisme, et réciproquement ? Il a été nécessaire de diversifier et d’enrichir notre approche tant sur la question de l’abolition de la peine de mort que sur celle de l’histoire juridique de la construction européenne. Ce chapitre juridique est essentiel à un abord le plus exhaustif possible. En effet, il apparaît aujourd’hui indéniable que le travail de l’historien contemporain n’est ni celui de l’hagiographe, ni celui du conteur événementiel : il existe une réelle transversalité des connaissances qu’il nous importe de mettre en liens. C’est à travers les autres sciences humaines, mais aussi du droit, qu’existent toutes les sources et tous les appuis utiles à la bonne compréhension d’une telle problématique. L’histoire de la peine de mort et de son abolition s’inscrit également dans l’histoire et la philosophie du droit, l’histoire des mentalités, les sciences politiques et ce que l’on pourrait nommer l’Histoire civique. Cette dernière correspond aux fondamentaux idéologiques d’une société de droit, elle est « la marque d’une appartenance à une même collectivité au service d’une même nation ou des mêmes idéaux2. » L’abolition de la sanction capitale est l’œuvre d’hommes particuliers, mais appartenant tous à un contexte national, qu’il soit économique, social, intellectuel ou juridique. Cette étude n’a donc de sens qu’à l’aune de l’ensemble de ces nombreux facteurs. Après quelques rappels historique de ce qu’était la peine de mort en Europe depuis l’Antiquité, ce travail se penche avec précision sur l’éclosion de la valeur abolitionniste au XIXe siècle, puis sur les mécanismes d’abolitions au XXe siècle, et ce toujours sous le prisme convergences/divergences pour les six États référents. Enfin nous concluons par l’analyse de l’institutionnalisation de l’abrogation dans l’Europe politique. L’abolition de la peine de mort est aujourd’hui devenue une des valeurs fondamentales de la civilisation européenne. 2 Jean-Pierre Chevènement, Discours lors des États généraux du civisme, Paris Sorbonne, 1986.