Mise en page 1

Transcription

Mise en page 1
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40
ans
de
prix
maison
de la
presse
C'est la nouvelle la plus chaleureuse de l'hiver :
Jean d’Ormesson présidera le 40ème Prix
Maison de la Presse. Symbole de la littérature
conviviale, du français comme œuvre d’art
et de la finesse du langage, Jean d'Ormesson
ne faillit pas à sa réputation : il défendra,
une fois de plus, la littérature française.
Pour La Tribune de la Vente, il a accepté d'expliquer
pourquoi il répondait à l'invitation des jurés du Prix Maison de
la Presse et dit tout ce qu'il pense d'un prix qu'il connaît bien.
oudeix
© Sandrine R
Vous êtes un homme de presse et un romancier. Quel lecteur
assidu êtes-vous ?
Oui, j’essaie de lire. Je reçois chaque jour entre dix et vingt livres
nouveaux. J’essaie surtout de lire les livres anciens. Je lis quand
je n’écris pas. Et lorsque j’écris, je m’abstiens le plus possible de
lire. Ou les livres sont médiocres et je perds mon temps. Ou les livres sont trop bons et je me décourage. Mes coups de cœur littéraires demeurent Homère, Chateaubriand, Toulet, Gide, Proust ou
encore Aragon.
Comment abordez-vous la présidence du Prix Maison de la
Presse ?
Avec gaieté et gratitude pour les Maisons de la Presse. Je suis
enchanté de succéder à Franz-Olivier Giesbert, Christophe Barbier et Valérie Toranian.
Vous avez déjà été président en 1979 du Prix Maison de la
Presse ? Quel souvenir en gardez-vous ?
Très bon. Le prix a été accordé à Jeanne Bourin pour La chambre
des dames.
Doit-on donner le même crédit à tous les prix littéraires ?
Trop de livres tuent les livres. Trop de prix tuent les prix. Peut-être
faudrait-il en limiter le nombre et ne garder que le Prix « Maison
de la Presse » !
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SNDP
7 rue du 4 septembre
75002 Paris
© SNDP / Novembre 2009
Comment définiriez-vous des livres récompensés par le Prix
Maison de la Presse ?
Ce sont des livres qui unissent à une qualité littéraire évidente une
lisibilité affirmée. Ce sont des livres qui sont toujours de nature à
entraîner l’adhésion des lecteurs. J’ajouterai que plusieurs des lauréats sont pour moi des amis très proches et parfois intimes.
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40
ans
de
prix
maison
de la
presse
Que pensez-vous de la connexion qui s’opère entre les journaux et les livres au sein des Maisons de la Presse ?
Je suis un défenseur des liens entre les livres et la presse. J’ai moimême essayé d’encourager cette coopération avec la collection de
la bibliothèque du Figaro vendue par les Maisons de la Presse. J’ai
consacré la moitié de ma vie au journalisme et la moitié à la littérature. Je n’ai pas besoin de rappeler la formule d’Oscar Wilde dont
je me suis beaucoup servi : « journalism is unreadable and literature
is unread ». La presse est aujourd’hui dans une situation souvent difficile. Les livres qui ont bien résisté à la crise jusqu’à ces derniers
mois sont eux-mêmes menacés par des techniques nouvelles et
notamment par l’e-book. Il est très utile que presse et livres se prêtent une assistance mutuelle. Les Maisons de la Presse sont le lieu
idéal pour cette collaboration.
Quels conseils donneriez-vous à un jeune écrivain ?
Travailler. Nous savons depuis Flaubert que la littérature, c’est
10% d’inspiration et 90% de transpiration.
Vous avez confié en 1962 : « La crise de la littérature, et plus
particulièrement du roman, vient d'abord sans doute de l'absence de grands écrivains. » Pensez-vous toujours la même
chose ? La littérature française contemporaine est-elle en
crise ?
Je suis souvent un peu irrité d’entendre répéter que les Français
et surtout les jeunes gens ne lisent plus. Au lieu de rejeter la faute
sur les lecteurs, examinons plutôt les auteurs. Il y a naturellement
encore aujourd’hui de très bons écrivains. Il me semble pourtant
que, comparée à la floraison – il est vrai, exceptionnelle – de l’entre-deux-guerres (Proust, Gide, Claudel, Valéry, Aragon, Céline,
Jules Romain, Martin du Gard, Giraudoux, Mauriac, Saint John
Perse… etc.) la période actuelle apparaît moins éclatante. Il faut
ajouter que la montée des littératures étrangères – non seulement
américaine mais sud-américaine, japonaise, chinoise, indienne,
africaine et, en Europe, polonaise, roumaine ou slovène – relativise la littérature française.
Et enfin notre dernière question, le public reconnaît en vous
un sens de l'humour et un épicurien... Cachez-vous vos fêlures ?
Oui bien sûr ! « Il est indigne des grandes âmes de faire part des
troubles qu’elles éprouvent » (Vauvenargues) ■ Propos recueillis
par Marie-Albéric Hallermeyer
SNDP
7 rue du 4 septembre
75002 Paris
La remise du Prix Maison de la Presse 2010 se tiendra à l’hôtel
de la Monnaie (photo ci-contre)