Moral(e)enberne - societe des lecteurs du monde

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Moral(e)enberne - societe des lecteurs du monde
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décryptages DIALOGUES
Samedi 8 septembre 2012
Moral(e) en berne
Médiateur
A
Pascal Galinier
près le président normal, le
ministre moral… Les premiers pas des socialistes de
retour au pouvoir, quatre
mois après l’élection de
François Hollande, n’en
finissent pas d’étonner les lecteurs de
notre quotidien. De les amuser. De les agacer. De les inspirer…
Ainsi d’Igor Deperraz (Bully, Seine-Maritime), lecteur-voyageur-blogueur qui a dû
passer l’été devant son clavier (près de quarante courriels reçus en juillet-août!). «La
morale, à l’école ou dans les églises, a ceci
d’étonnant qu’elle n’est écoutée que par
celui qui la lit», ironisait-il après les propos de Vincent Peillon, le ministre de l’éducation, se proposant de réintroduire des
cours de morale. «Morale à voix basse, la
morale laïque c’est le catéchisme de la vie
quotidienne, le vivre-ensemble décliné en
programme scolaire et évalué par des professeurs normaux ou normés, dit notre lec-
teur. (…) Une litanie de bonnes intentions
prêchées par des professeurs lâchés en
plein désert, des vérités éducatives non partagées. Comme ces prêtres lançant leurs
incantations sur des fidèles bien décidés à
oublier, le porche de l’église passé, ces
injonctions de ne pas faire.»
«Désarroi ministériel pathétique», tranche Jean-Marie Baurens (Montpellier),
autre lecteur estival très prolixe. Lui ne
croit guère à la «rééducation par la laïcité » proposée par le ministre. « Il y a deux
mondes scolaires. Un mur de Berlin invisible les sépare », dit-il. D’un côté, «à part de
belles exceptions, une culture tenace,
championne de croyances ferventes, résistera crânement à la déclaration sur l’égalité stricte des sexes, à la dénonciation du
communautarisme, de la superstition ou
de la tradition». De l’autre, des établissements « peuplés d’enfants qui n’entendront rien de cette philosophie laïque trop
évidente, si ce n’est vieillotte. Même après
Courrier
Mobilité
Pourdes transportspublics
L’éditorial du Monde du 30 août « Un coup d’épée dans l’essence» souligne avec une perspicacité étonnante que la ristourne sur le prix de l’essence ne saurait être un remède, notamment parce qu’elle n’encourage
pas à la sobriété énergétique. Nous sommes bien sûr nombreux à partager cette fine analyse! Mais que fait-on si l’on est, par exemple, institutrice dans une ville moyenne, nommée dans un village perdu à 45 kilomètres de chez soi ? Ecolo dans l’âme, gagnant un peu plus de
1 500 euros net par mois, a-t-on follement envie de consommer une
essence qui va atteindre inéluctablement les 2 euros le litre ? Ici, ni
métro, ni tramway, ni bus, ni vélo possible ! Au mieux du covoiturage.
Réduire sa consommation d’essence, c’est une solution bien simple
mais malheureusement un luxe auquel de nombreux concitoyens de
zones périurbaines et rurales n’ont pas accès. Il aurait fallu depuis des
décennies investir dans les transports publics, y compris ailleurs que
dans les grandes agglomérations.
Simone Bellifa, Annecy-le-Vieux (Haute-Savoie)
Langue
Dangers du tout-anglais
On peut lire des choses extraordinaires dans Le Monde. Dans son
édition du 16 août, dans l’article
« Trois universités françaises dans
le top 100 du classement de
Shanghaï», François Garçon, enseignant-chercheur à Paris-I, proclamait que le français était « une langue morte » et d’ajouter: « C’est
blessant, mais c’est la réalité.»
Dans la même veine, le producteur Grégory Bernard publie une
tribune « Aidons le cinéma français tourné en anglais» (Le Monde
du 4 septembre) dans laquelle il
réclame que notre système d’avances sur recettes participe à ce principe. Et ce monsieur d’invoquer la
French touch de Daft Punk (…),
dont les tubes ont aussi la particularité d’être faits en anglais par
des Français. En outre, il n’oublie
pas de demander à François Hollande d’ouvrir « l’acte II de l’exception culturelle» par « l’utilisation
décomplexée de l’anglais», donnant ainsi « les moyens aux artistes, aux producteurs et aux entrepreneurs de conquérir le monde» !
Rien que cela! Pour ma part, je
vois dans le tout-anglais le moyen
le plus sûr et le plus rapide de perdre à la fois notre économie, notre
culture et notre âme, dans l’indifférence du monde.
André Ponchel, Sens (Yonne)
Rappel de la loi
Après les sportifs, les médias, le
milieu des entreprises et celui de
la banque, le monde de la mode,
de la technologie… Yamina Benguigui, ministre déléguée à la francophonie, vient de nous gratifier
d’une belle perle, en forme de trahison de la langue qu’elle a mandat de défendre. Dans une brève
déclaration (Lemonde.fr du
28août), elle nous informe, en lien
avec le prochain Sommet de la
francophonie qui se tiendra en
octobre à Kinshasa, qu’elle a reçu
«des menaces de mort par e-mail ».
Son cabinet, visiblement sans plus
d’état d’âme, confirme la réception de cet «e-mail ». Madame la
Ministre, appelez les Québécois à
la rescousse, ils vous expliqueront
pourquoi ils ont inventé, parmi
tant d’autres, le très joli « courriel»
(courriel électronique) et pourquoi ils sont obligés de se battre au
quotidien, tout comme les Wallons, nombre d’Africains… pour le
respect de notre langue. Madame
la Ministre, monsieur le Président
de la République, il existe une loi,
la loi dite Tasca-Toubon, qui nous
fait obligation (entre autres) «d’uti-
avoir ôté de leurs oreilles leurs iPad et leurs
smartphones dernier cri, ces élèves n’entendront que le halètement compulsif de la
compétition scolaire, sacrifiant déjà à la
religion parentale du résultat, comme
dans le classement de Shanghaï. Leur unique totem, secret ou avoué: la mention au
bac».
Voilà le « premier prof de France» rhabillé pour l’hiver! Le « premier flic », son
collègue Manuel Valls, n’est guère mieux
loti. Ses débuts de ministre de l’intérieur
ont laissé un goût amer à Sébastien
Mazoyer, électeur PS revendiqué – et
revendicatif: « La gauche représente la
même honte que la droite: elle veut tuer
les pauvres plutôt que la pauvreté (les
Roms) avec les mêmes arguments démagos et honteux! » Termes plus mesurés
pour Hubert Bretheau, de Lavardin (Loiret-Cher), mais non moins inquiets. Et plus
concrets – ce qui est somme toute assez
logique de la part de cet élu local, ancien
président de l’association Tsigane Habitat: « Monsieur le Ministre, rappelez-vous
que nous recevons actuellement trois cents
médecins roumains pour suppléer à notre
désertification médicale, sans compter
ceux qui vont bientôt arriver. L’université
francophone de Cluj-Napoca nous en prépare des promotions de 300 par an…»
En ce qui concerne l’Elysée et Matignon, pour l’heure, chez nos lecteurs, le
terme « moral » se décline au masculin
plutôt qu’au féminin. Et il semble en berne. Témoin ce vrai-faux dialogue digne
des Dupond/Dupont. « “Où va-t-on ?” s’in-
liser la langue française et de défendre le français en tant que langue
de la République et la primauté des
termes francophones face aux
anglicismes». Merci de faire traduire ces actes de loi en pratique.
Gérard Sournia, Amboise
(Indre-et-Loire)
Logement
Etrange système
Ainsi, le logement fait partie des
priorités du nouveau gouvernement. Et des moyens y sont consacrés. A tel point que, alors que
moult annonces sont faites au
niveau national, au niveau local,
c’est-à-dire celui où se vivent
concrètement les choses,
200 agent(e)s des forces de l’ordre
expulsent manu militari les occupants d’un immeuble vide réquisitionné à Toulouse (le CREA) où
des familles en grande précarité
ont trouvé refuge, où des activités socio-éducatives se déroulent,
où du « lien social» s’élabore…
Manu militari, c’est-à-dire à
coups de Taser sur des personnes
opposant une résistance passive,
par exemple !
Bref, du social en matière de logement, oui, mais dès lors que ça
passe par les voies du système. Et
si ceux et celles qui en ont besoin
doivent attendre que ça arrive jusqu’à eux et elles, eh bien peu
importe. Un merveilleux système
qui fait que, alors que des solutions locales sont trouvées, il est
préférable de les détruire au nom
terroge un pays grognon. La gueule de bois
fait loi », constate Christian de Maussion
(Paris). « Donc, deux Français sur trois,
selon de récents sondages, sont inquiets
pour l’avenir. Il est vrai que les motifs d’inquiétude ne manquent pas… », ajoute Jacques Vuillemin, de Besançon (Doubs).
Oui, c’est vrai, « le besoin d’avenir se fait
sentir», renchérit le premier ; seulement
«la technocratie verrouille l’épicerie »…
Mais attention, prévient le second, « le
changement, ce n’est pas seulement tourner la page du sarkozysme. Ce n’est pas seulement “faire autrement”, c’est envoyer des
signaux forts aux Français et à l’Europe ».
L
es premiers « signaux forts », on l’a
vu, ont décontenancé plusieurs lecteurs. « Cela sent un peu l’improvisation, comme si dix ans d’opposition
n’avaient pas suffi pour commencer à élaborer un programme, s’agace “Jean-Paul
Morella” sur le Web. Il est vrai que prévoir
quelque chose en préservant tous les courants, en tenant compte des états d’âme
des compagnes, relève de la quadrature du
cercle…»
«Evitons les commentaires futiles!
L’omniprésidence d’un Sarkozy était-elle
plus efficace? Attendons pour juger le gouvernement», réplique « Orsu » (Web) aux
internautes, dans les réactions en ligne à
l’article « Gouvernement Ayrault: quatre
mois, cinq recadrages» (Lemonde.fr, 4septembre).
Pierre Zémor (Paris) ne dit pas autre
chose, dans la tribune qu’il a adressée au
d’une politique censée aboutir au
même résultat ! Ne serait-il pas
temps d’avoir des élu(e)s qui dans
une telle situation mettraient
leur portefeuille en jeu ?
Sivan Halevy
Gaffatou (Tarn)
Roms
Pour un vrai dialogue
La « une» du Monde du 2-3 septembre qui titre « Bruxelles reste
vigilant sur la question rom »
appelle de ma part le commentai-
médiateur (à lire en intégralité sur le blog
« Le Monde des lecteurs»). « Bien plus
grandes que celles des Français, les impatiences des journalistes, dans l’immédiateté de l’actualité, proposent déjà de reléguer cette normalité visée par François
Hollande, dont ils ont fait cent journées de
choux gras, au magasin des accessoires de
l’Histoire», regrette cet ancien conseiller
d’Etat. « Giscard, Mitterrand, Chirac et
Sarkozy ont raté la marche du grand dessein, rappelle Christian de Maussion. Hollande emboîte le pas de leur modération,
de leur déficit d’ambition.» Pas une raison, estime M. Zémor, pour « enterrer le
mythe de la présidence normale, une forme utilement authentique de relation
avec les citoyens, à la pédagogie mendésienne de la vérité ou au parti pris rocardien de dire la complexité des choses pour
faire appel à la lucidité des gens ».
Alors, que dire, que faire ? « Que prennent la parole tous ceux qui, dans cette
période de crise sans précédent, attendent
une pédagogie sereine du pouvoir dans
une démocratie apaisée mais menacée.»
Mais encore ? « Ce pari est tenable, à la
condition d’une exégèse plus soutenue (…)
de la part des entourages, des intellectuels, des médias, des professionnels de la
communication. (…) Il faut réhabiliter la
valeur de la gentillesse, cette force trop
tournée en dérision. » Une conclusion toute morale… p
[email protected]
Mediateur.blog.lemonde.fr
re suivant. Il devient urgent de
mettre en relation – et pourquoi
pas l’un en face de l’autre – Gérard
Chambon, adjoint au maire de
Choisy-le-Roi (Val-de-Marne) et
Viviane Reding, vice-présidente
de la Commission européenne et
commissaire à la justice: le premier pourrait expliquer à la
deuxième qu’il serait utile de simplifier – enfin – les demandes de
subventions européennes, leur
complexité amenant, comme il le
dit lui-même (et j’en ai fait person-
nellement l’expérience) bien des
demandeurs à abandonner cet
exercice épuisant ! Ce qui peut
expliquer le peu d’empressement
des collectivités territoriales à s’occuper du problème d’intégration
des Roms ! Au fait, où sont passés
les 37 milliards d’euros alloués
par la Commission européenne
au règlement du problème,
notamment en Roumanie et Bulgarie?
Georges Bernard Granger
Gilly-sur-Isère (Savoie)
Controverse du Net
Cette fois, on y est: Lemonde.fr sur Twitter (@lemondefr) a franchi, mercredi 5 septembre, le cap du million d’abonnés, confirmant sa place de
premier média d’information français sur le réseau depuis la création du
compte en mars2009. Merci à tous nos followers pour cette marque de
confiance et d’intérêt! Evacuons la rançon cruelle de ce succès: sur ce million, tous les comptes sont loin d’être actifs. Les statistiques du site Status
People établissent à 47% la part de nos followers qui seraient des faux
comptes ou des spams; des chiffres qui concernent tous les gros comptes
Twitter français, comme ceux de David Guetta (6millions d’abonnés),
Samir Nasri (1million) ou NRJ (820000). En juin, l’agence Semiocast parlait de 500millions d’utilisateurs de Twitter dans le monde. A la rédaction du Monde.fr, nous constatons depuis un an une explosion du nombre d’abonnés@lemondefr: entre 2000et 3 000 nouveaux par jour, sans
compter les followers de nos chaînes thématiques et de nos journalistes.
Cette bulle d’abonnements coïncide avec la légitimité que Twitter a acquise pour la diffusion de l’information. Le journaliste qui écrit ces lignes garde en mémoire ces moments passés à veiller sur le réseau pour alimenter
nos articles avec les derniers développements des « printemps arabes»,
de la catastrophe de Fukushima, de l’affaire DSK… « Trouver des informations via Twitter» est devenu un réflexe quasi-instinctif pour multiplier
ses sources et sa connaissance d’un sujet. Tant que les tweets sont vérifiés
et identifiés comme des sources sûres. C’est d’ailleurs cette fonction de
veille que plébiscitent beaucoup d’abonnés. Twitter ouvre aussi la voie à
de nouvelles discussions constructives : la plupart de nos journalistes y
disposent de comptes personnels, ce qui permet aux autres membres de
les interpeller, et à nous, de recueillir des précisions, des réactions, voire
des infos. Vous n’y êtes pas encore ? Venez donc nous parler sur Twitter,
nous sommes là : http://lemde.fr/OT9zJb. p
Michaël Szadkowski
n Chronique complète http://rezonances.blog.lemonde.fr/
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