Gabon Il ne faut pas banaliser la vie chère
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Gabon Il ne faut pas banaliser la vie chère
Gsm : 05 32 74 29 / 07 63 11 42 e-mail : [email protected] COMMUNIQUE DE PRESSE Libreville, le 27 juillet 2012 Face à la banalisation de la vie chère au Gabon par le Premier ministre Dans son discours de politique générale, le Premier Ministre affirmait en réponse aux interrogations des députés relatives à la rareté et au coût des denrées alimentaires que les israéliens viendraient produire des légumes au Gabon. A l’occasion de la tournée d’eux--mêmes quand la interprovinciale en cours, il décale Mouila: « Les prix baisseront d’eux production du Gabon le permettra… Il nous est impossible de bloquer les prix ». Etait-ce un discours d’homme d’affaires, ou un discours de chef du gouvernement réellement engagé à protéger le contribuable consommateur et défendre le pouvoir d’achat des ménages (mission régalienne de tout Etat républicain). Cette assertion, copie-collée de la théorie libérale de l’« autorégulation des marchés par l’équilibre entre l’offre et la demande » n’a plus cours au 21ème siècle. Les gouvernements réputés libéraux n’hésitent plus à mettre en œuvre des mécanismes de régulation susceptibles d’impacter positivement sur les marchés. L’agriculture, l’industrie, et même les banques privées bénéficient ainsi de subventions substantielles aux Etats-Unis et en Europe du nord. Le gouvernement devrait de ce fait distinguer les causes conjoncturelles des causes structurelles des hausses de prix et adopter des mesures idoines qui ne se limitent aucunement aux ajustements tarifaires dont nous sommes coutumiers au Gabon. De fait, nul n’est besoin de s’attarder sur les causes exogènes essentiellement liées à la «voracité financière » de la finance internationale. Nous rappelons simplement au Premier ministre que les solutions contre la cherté de la vie se trouvent dans le contexte actuel de la structure économique du Gabon. C’est pourquoi, après sa déclaration, nous demandons des réponses à ces quelques questions : 1. Ancien ministre de l’agriculture, peut-il dire aux gabonais où en est le plan d’urgence du développement agricole ou de sécurité alimentaire du Gabon qu’il annonçait le 25 juillet 2010? 2. Lorsque le Gabon dépense plus de 270 milliards de FCFA chaque année dans l’importation de produits alimentaires, ce qui correspond à plus de 80% des besoins de notre marché, en combien de temps pouvons-nous espérer équilibrer l’offre et la demande pour soulager les ménages ? 3. Le principe du libéralisme est-il incompatible avec la nécessité d’encadrer les interactions, les échanges entre les membres de la société ? Dans ce cas, comment se propose-t-il de coordonner les actions des agents économiques ? 4. Quel système de coordination choisit-il pour les acteurs économiques que nous sommes ? 5. Peut-il aujourd’hui soutenir que le Gabon ne devient pas un champ d’expérimentation « d’économies informelles et criminelles » décrites par Oskar LANGE, LANGE l’inventeur du socialisme de marché, depuis 1938? Un regard sur le racket organisé des importateurs, des distributeurs, des détaillants, sur la marginalisation des paysans et le pillage de ressources halieutiques accentue le dépit du consommateur qui supporte la facture de cette « faillite organisée » de notre structure économique. Depuis 2003, le dialogue social a permis d’identifier une centaine de produits de consommation courante dont les prix devaient être réglementés. Hélas, cette démarche a connu le triste sort de la forte propension du mouvement syndical à la compromission. Si non, comment comprendre que ces corps sociaux intermédiaires fortement représentés au sein des commissions de suivi de « la trêve sociale » conclue avec le gouvernement aient privilégié des primes par catégories socioprofessionnelles au détriment d’une solution globale profitable à l’ensemble des ménages. Ignoraient-ils qu’un marché étriqué comme celui du Gabon devient plus vulnérable lorsque la proportion souvent majoritaire des faibles revenus subit (par effet d’entrainement) la tendance inflationniste occasionnée par cette situation ? Ou, doit-on simplement considérer qu’ils étaient de connivence avec le gouvernement de l’époque pour tourner en dérision l’ensemble des ménages, réduits à « toucher leur salaire »? En dépit de ce saupoudrage, depuis 2007, les ménages assistent impuissants à une érosion sans précédent de leur pouvoir d’achat. Les statistiques officielles de la DGE révèlent que les gabonais consacrent 96% de leur revenu à la consommation. Ceci a pour conséquences : - Le recul de l’accès, pour une frange importante de la population, aux biens et services essentiels dont la satisfaction a valeur de droit universellement reconnu au consommateur par les Nations Unies depuis 1985 (nourriture adéquate, vêtements, logement, soins de santé, éducation, services publics, eau et hygiène); - L’exclusion financière, le malendettement et le surendettement des ménages : Faute d’accès aux services financiers conventionnels, la ruse s’est invitée dans le crédit à la consommation par le foisonnement d’établissements informels et la 2 banalisation de pratiques hors la loi de la micro finance ; ce phénomène touche une frange importante des agents de l’Etat et des personne à revenu modeste ; - La malbouffe et la recrudescence des maladies telles l’accident cardio-vasculaire, le diabète, l’hypertension artérielle : La faible capacité financière et le déficit de surveillance des marchés contraignent les populations au suicide par la consommation de produits impropres. Le volume de produits impropres à la consommation ou dangereux saisis ces dernières années n’est que l’infime partie de ce qui inonde nos marchés. En tant qu’acteurs économiques incontournables et citoyenscitoyens-contribuables, les consommateurs du Gabon exigent le juste prix, la qualité et des échanges éthiques sur un marché où les règles sont transparentes, dans l’intérêt bien compris de tous les acteurs économiques. Le Président de SOS Consommateurs Christian R. ABIAGHE NGOMO Notes aux rédactions I. Création de 5 zones agricoles pour la sécurité alimentaire au Gabon Le Ministre de l'Agriculture, de l'Elevage et du Développement rural, Raymond Ndong Sima, a annoncé l'ensemble nsemble du territoire national, destinées à le 25 juillet la création de 5 grandes zones agricoles sur l'e assurer l'autosuffisance alimentaire du pays. Le Ministre de l'Agriculture, de l'Elevage et du Développement rural, Raymond Ndong Sima, a annoncé le 25 juillet la création de 5 grandes zones agricoles sur l'ensemble du territoire national, destinées à assurer l'autosuffisance alimentaire du pays. Cette décision, qui s'inscrit dans le cadre de la réalisation du programme de sécurité alimentaire, vise à « tourner la page des cultures de rente » grâce à de nouvelles techniques de production qui permettront d'augmenter le rendement, et au développement d'une agriculture de compétition. « Le gouvernement gabonais peut compter sur des partenaires tels que le Brésil, la Chine, Israël, le Maroc qui disposent d'une expérience avérée et peuvent soutenir la nouvelle approche agricole du pays », a assuré le Ministre Raymond Ndong Sima. La nouvelle carte agricole, élaborée en se basant sur les similitudes forêt / savane et les points communs entre chaque province, classe l'Estuaire dans une zone à part entière. Les 4 autres zones correspondent au Moyen-Ogooué / Ogooué-Maritime ; à la Ngounié / Nyanga, au Woleu-Ntem / Ogooué-Ivindo et l'Ogooué-Lolo / Haut-Ogooué. 3 Cette véritable révolution verte sera accompagnée de mesures en faveur des opérateurs économiques. Le ministère de l'Agriculture, qui dispose d'un budget de 34 milliards de francs CFA destiné aux investissements, a notamment débloqué 900 millions de francs CFA pour la création d'un fonds de garantie pour les exploitants agricoles. Une politique foncière spécifique sera également mise en place, et la formation pour le secteur agricole sera renforcée. « Nous devons bâtir une agriculture, une pêche et une aquaculture modernes, garantissant notre sécurité alimentaire », expliquait le Président Ali Bongo Ondimba dans l'axe 5 son projet de société, l'Avenir en Confiance. Assurément, le développement et la modernisation de l'agriculture sont des enjeux majeurs du pilier économique Gabon Vert. II. Les systèmes économiques Toute société est amenée à s'interroger sur le choix de ses règles de fonctionnement ou d'organisation. Trois niveaux de choix et d'organisation peuvent être distingués : 1/ Le niveau politique : quel projet de société ? Quel processus de décision collective ? Quelle place accorder aux individus ? C'est ici la question du choix d'un système politique. politique 2/ Le niveau économique : quels principes d'organisation pour produire la valeur ajoutée ? Qui doit être propriétaire des moyens de production ? Comment éviter les déséquilibres économiques ? Comment répartir la richesse créée ? C'est ici la question du choix d'un système économique. économique 3/ Le niveau instrumental : comment encadrer les interactions, les échanges entre les membres de la société ? Comment coordonner les actions des agents économiques ? C'est ici la question du choix d'un système de coordination. coordination Les notions de libéralisme et de socialisme renvoient au deux premier niveaux. Cependant, il faut faire une distinction entre la sphère politique et la sphère économique. Les notions d'économie de marché, économie planifiée renvoient, quant à elles, au dernier niveau. Remarque : on n'abordera pas ici les autres visions d'organisation politique comme l'anarchie, la dictature... a) Libéralisme et socialisme politiques Le libéralisme politique repose sur le principe de libre choix des individus et la garantie des libertés fondamentales d'opinion, d'expression, de réunion... Le socialisme politique vise à une société égalitaire où l'intérêt général prime sur les intérêts particuliers. Libéralisme (né avec le siècle des Lumières) et socialisme (né en réaction au 19ème s.) ne sont que les prolongements modernes d'un débat ancien sur l'organisation des sociétés humaines, vieux de plus de 2000 ans. Il faut en effet revenir aux philosophes grecs antiques, dans le contexte de la fondation des Cités grecques, et à la célèbre controverse entre Platon et Aristote. • Pour Platon, c'est la société dans son ensemble qui prime (le bien commun) et non l'individu. Il s'agit de construire une société et une vie sociale harmonieuses. Or, il peut y avoir opposition, conflit entre les intérêts privés et l'intérêt collectif. Il faut alors une autorité supérieure qui veille à ce que les intérêts individuels ne nuisent pas à l'intérêt ou au bienbien-être général. général L'Etat devient tout désigné pour jouer ce rôle de régulateur et sauvegarder la cohésion de la communauté. Il doit veiller à une bonne division sociale du travail (répartition des rôles entre agriculteurs, soldats, politiques...) et l'économie est au service de tous. La construction de la société idéale est un acte 4 volontariste, donc avant tout politique. L'économie n'est pas une fin en soi mais un moyen de réaliser la société idéale. • Pour Aristote, il existe un ordre naturel harmonieux dans la Nature, qu'elle soit physique ou sociale. Cet ordre naturel (cette harmonie) ne doit surtout pas être modifié, notamment par l'autorité politique : c'est le fondement du principe de non intervention de toute autorité dans la vie sociale et économique. Cela est d'autant plus justifié que l'individu, doté d'une raison, d'une autonomie de décision et d'action, est l'élément moteur d'une société. L'objectif de l'homme est la recherche de son propre bonheur et non pas la recherche d'une vie sociale harmonieuse. Cette recherche du bonheur passe par en particulier par l'échange. Au final, la poursuite des intérêts individuels aboutit à un ordre spontané, naturel, équilibré, c'est-à-dire à l'intérêt général et au bien-être de tous. Le modèle de Platon a d'abord été qualifié de modèle administratif, administratif le socialisme n'étant que le courant récent avec des variantes (le socialisme utopique de Proudhon par exemple) et des prolongements (le communisme qui prône la disparition complète de l'Etat). Le modèle d'Aristote a été qualifié de modèle libéral. libéral Le libéralisme récent est lui même traversé par divers courants (social libéralisme, ultra libéralisme). b) Libéralisme et socialisme économiques Sur le plan économique, les choix d'organisation dépendront du choix de la posture philosophique, aristotélicienne ou platonicienne. On comprend alors les grands débats et clivages entre libéralisme et socialisme économiques : propriété privée / propriété collective, déréglementation / réglementation, privatisation / nationalisation, concurrence / monopole, liberté des prix / encadrement des prix, suppression des aides aux agents économiques / transferts sociaux de répartition, Etat-Gendarme / Etat-Providence, etc. Evidemment, les choses ne sont pas si simples dans la réalité. Ainsi des pays qui se déclarent politiquement libéraux refuseront de s'en remettre complètement au libéralisme économique ; des pays politiquement socialistes de s'en remettre totalement au socialisme économique... Deux exemples français bien connus en guise d'illustration. Vers la fin de son mandat, V. Giscard d'Estaing était qualifié de socialiste par certains courants de sa famille politique, du fait de l'explosion de la pression fiscale (due à la hausse des cotisations sociales pour financer le chômage de masse) et signe de l'intervention massive de l'Etat ; F. Mitterand s'était vu décerné le prix de meilleur économiste libéral par le Financial Times pour la déréglementation des marchés financiers et les privatisations entreprises au milieu des années 80. Ajoutons également la désormais célèbre phrase de L. Jospin au cours de la campagne présidentielle de 2001 : "Je ne suis pas socialiste"... c) Economie de marché / économie planifiée / économie de corruption On assimile, à tort, la première au libéralisme et la seconde au socialisme. Ce sont deux moyens concurrents pour coordonner les actions des agents économiques et qui peuvent être déconnectés des choix d'organisation politique et économique. Un troisième, qui existe également depuis longtemps, mérite d'être mentionné au vu de l'importance qu'il prend : l'économie de corruption. L'économie de marché (ou décentralisée) désigne une économie qui fonctionne grâce à des marchés, lieux matériels (les foires, le marché de Rungis, la Bourse de Paris) ou immatériels (internet) où se confrontent librement ceux qui veulent échanger, les consommateurs et les producteurs. On verra dans ce qui suit ce que recouvre la fameuse "loi de l'offre et de la demande". L'économie planifiée (ou centralisée) désigne une économie où, à partir d'un équilibre déterminé par avance, une autorité décide des comportements des agents (le niveau de leur production, de 5 leur revenu, de leur consommation, le niveau des échanges et le prix des échanges) qui assureront cet équilibre prédéterminé. Ces deux formes de coordination des agents économiques sont chacun censés remplir les trois fonctions fondamentales nécessaires au bon fonctionnement de l'économie : • La fonction d'information : que faut-il produire, consommer et épargner ? • La fonction de répartition : comment répartir la richesse créée ? • La fonction de régulation : comment faire face au déséquilibres éventuels ? Dans une économie de marché, c'est le prix qui est au cœur de la coordination. Par ses variations, les agents économiques sont informés et adapteront leurs comportements de telle sorte qu'un équilibre général, et le plus juste, s'établira dans l'économie. Dans une économie planifiée, le plan joue le rôle du prix. Il est même plus efficace que le marché car, fixant par avance l'équilibre et les comportements, il "économise" la fonction de régulation et les délais d'ajustement (les déséquilibres ne peuvent exister par définition). Voir à ce sujet l'encadré qui suit. N'oublions pas un mode particulier de coordination, qui n'a pas encore fait l'objet d'une théorie mais qui fonctionne : l'économie de corruption. corruption Connue depuis longtemps dans certaines économies d'Amérique Latine, cette forme d'économie prospère à grande vitesse depuis l'effondrement des pays de l'Est. On lira sur ce phénomène inquiétant un extrait de l'article Economies informelles et criminelles : la face cachée de la mondialisation. mondialisation L'auteur rappelle des évidences oubliées et soulève des questions fondamentales. Ainsi, la majorité de la population mondiale vit en dehors d'une économie "codifiée", de type marché ou planifiée, et vit plutôt au sein d'économies informelles ou populaires. L'économie criminelle ou mafieuse (estimée à 40 % du PIB russe...) vient perturber les économies informelles et codifiées : d'une part, la corruption et l'économie mafieuse conduit à la destruction du tissu social dans les pays pauvres et entretient la pauvreté ; d'autre part, les mouvements de capitaux incontrôlés, le problème des paradis fiscaux et le blanchiment perturbent le (déjà difficile) fonctionnement des marchés financiers "officiels". L'un des enjeux de la transformation de la Russie est d'ailleurs le risque de basculer vers une économie de corruption et de "contaminer" les économies européennes. L'auteur est pessimiste sur les évolutions des pays sous influence criminelle car il rappelle, à juste titre, que le marché de nos économies modernes ne s'est pas créé tout seul, sans un minimum d'éthique et de règles, et qu'il est sans cesse protégé des dérives qu'il génère lui-même (lois anti trusts par exemple). d) Capitalisme et socialisme réel Le capitalisme n'est pas un système économique théorique mais le système économique observé dans les économies, surtout occidentales. On tentera dans la partie 2 de le définir et de le caractériser. Mentionnons déjà la multiplicité des qualificatifs qu'on lui accole : capitalisme anglosaxon, capitalisme rhénan, capitalisme asiatique, capitalisme marchand, industriel, financier, patrimonial... De même, le terme socialisme réel a été forgé pour bien faire la différence entre le modèle et ce que l'on observait (économie chinoise, économie de l'URSS). L'ensemble des précisions faites, on peut comprendre pourquoi des économistes libéraux estiment que le capitalisme est un mauvais système et qu'il faut le réformer pour le rapprocher du modèle libéral. Pourquoi des économistes socialistes expliquent que la chute des économies des pays de l'Est était prévisible car ces économies n'étaient pas conformes au modèle socialiste (avec notamment l'existence d'une nomenklatura, caste de capitalistes déguisés). 6 Par ailleurs, on peut également comprendre l'adjonction de termes apparemment contradictoires pour désigner les économies observées. Ainsi, la France des années 50 et 60 pouvait être caractérisée d'économie de marché en partie planifiée, et capitaliste avec une dose de socialisme réel au vu du poids des entreprises publiques. L'Italie est une économie de marché, capitaliste mais qui coexiste avec l'économie de corruption. La Chine actuelle se dit politiquement socialiste et délaisse la planification pour l'économie de marché, et favorise l'émergence d'un secteur privé. Oskar LANGE, inventeur du socialisme de marché 7