i-etre citoyen hier - circonscription de Limoges 2
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i-etre citoyen hier - circonscription de Limoges 2
ETRE CITOYEN EN FRANCE, EN EUROPE ET DANS LE MONDE… La question de la citoyenneté, et donc de l'éducation à la citoyenneté, resurgit chaque fois que la société s’interroge sur ses fondements et la pérennité du contrat social. Dans l'histoire récente de la France, on peut repérer trois moments forts de ce questionnement : - la Révolution française, avec la volonté de substituer un nouvel ordre politique et social à l'ancien Régime; - la lente stabilisation de la IIIe République qui, face à la double contestation monarchiste et socialiste, voit dans la fondation de l'Ecole laïque et républicaine le moyen d'assurer sa pérennité ; - aujourd'hui avec le renouvellement des formes d’exclusion et la montée des incivilités, symptômes d’une fragilisation du lien social et d’une interrogation sur la notion même de citoyenneté. Avant le XVIIIe siècle, on parle d'éducation morale, mais non d'éducation civique, puisque sans République il ne saurait y avoir de citoyenneté. A partir de la Révolution française et jusqu'à la première moitié du XXe siècle on parle d'éducation civique et morale : les deux éducations sont constamment associées. Aujourd'hui, l'éducation morale tend à s'estomper derrière le concept d'éducation à la citoyenneté. En deux siècles, on est donc passé d'une primauté de la dimension morale de l'éducation dont l'éducation politique ne serait qu'un complément et une conséquence à une primauté de la dimension politique, en laquelle la morale serait plus ou moins incluse. Parler de citoyenneté suppose de faire référence à la « cité », donc de territoire que l’on peut assimiler à un périmètre défini et limité à l’intérieur duquel devraient s’exercer de manière homogène et quasiment permanente les relations personnelles, sociales, économiques et culturelles. Or, notamment depuis la fin de la Deuxième Guerre Mondiale, un bouleversement majeur est apparu dans l’interdépendance des territoires, voire parfois dans la disparition pure et simple des périmètres initiaux. De surcroît plus récemment encore, nous constatons que les facteurs de mutation que constituent la mondialisation, les médias, les TIC et les réseaux font voler en éclats nos repères habituels, tant et si bien que l’on peut légitimement avancer l’idée que le territoire, le périmètre, la frontière, la norme ne sont plus de notions pertinentes permettant de rendre compte du cadre dans lequel évolue le citoyen contemporain. 1 Qu’y a-t-il de commun entre le citoyen grec et le citoyen de monde ? Peut être pas grand-chose, si ce n’est une sorte d’aspiration commune d’appartenance un peu intemporelle. I- ETRE CITOYEN HIER …. 1-A Athènes au V° siècle avant J.C. Le citoyen a deux devoirs : - défendre la Cité - obéir aux lois En cas de guerre, qu’il s’agisse d’une agression extérieure ou d’une guerre civile, tout citoyen doit porter les armes. Dans le cas d’une guerre civile le citoyen doit choisir son camp. L’abstention est impossible : c’est la loi de Solon. Pour Montaigne c’est une loi universelle car dans un conflit qui divise la Cité en deux camps on doit prendre parti. Pour être citoyen athénien il faut être né de père athénien et de mère fille d’athénien, légitimement, être libre et avoir fait son service militaire. Les mineurs, les femmes, les métèques et les esclaves ne peuvent pas être citoyen. L’homme grec jouissait d’une double vie : une vie « politique » au sein des citoyens, tous égaux, et une vie « privée » au sein de sa famille, soumise à la plus stricte inégalité. La seconde vie n’existait qu’en vue de la première. Même liées aux citoyens en tant que mères, épouses ou filles, les femmes ne sont pas des citoyennes. Elles n'ont aucun droit politique ou juridique et ne peuvent être propriétaires. Elles vivent toujours sous l'autorité d'un tuteur masculin. La cité leur fait cependant une place dans le corps civique puisqu’elles contribuent à transmettre la citoyenneté par la procréation d'enfants légitimes L'inégalité entre les femmes et les hommes paraît naturelle aux Athéniens car la femme est jugée moins parfaite que l'homme. Elle est creuse, elle est une sorte de moindre être comparé à l'homme qui est plein et achevé. Cette opposition du plein et du vide se retrouve dans les rapports entre hommes adultes et jeunes gens. Ce que l'on pourrait appeler le sexisme grec ne recouvre donc pas exactement les catégories sexuelles modernes, mais concerne la formation des genres, quels qu’ils soient. De cette conception découle plusieurs types de discriminations repris par Aristote dans son Éthique à Nicomaque lorsqu’il distingue au sein des êtres humains des vertus spécifiques pour les hommes, les enfants, les femmes ou les esclaves. Ils n’ont pas les mêmes capacités, les mêmes devoirs, les mêmes qualités, les mêmes 2 droits, etc. La distinction des genres fait ainsi partie d'une série de discriminations plus large, qui englobe tous les aspects de la vie humaine. Les Athéniens voient la citoyenneté comme très fermée : l’attribution de la citoyenneté athénienne est extrêmement rare. 2-Dans l’Empire romain au II° siècle après JC Avec Rome la citoyenneté s’élargit. Elle est constituée d’un faisceau de droits assortis d’obligations. Mais dans l’Empire romain la citoyenneté est hiérarchisée et dépend du type de droit qui régit la cité dont on est originaire. En effet l’Empire se présente comme une mosaïque de cités aux types de statuts juridiques différents. En partant du moins prestigieux on trouve les cités pérégrines, puis les cités de droit latin et enfin les cités de droit romain. Les cités pérégrines sont étrangères au droit romain. Certaines s’administrent librement, d’autres sont soumises à un gouverneur. Elles paient un impôt, le tribut. Les cités de droit latin se rapprochent du droit romain, mais les habitants ne peuvent être éligibles à une magistrature romaine. Les cités de droit romain confèrent l’intégralité de la citoyenneté romaine. La Cité comprend une ville et un territoire d’étendue très variable. Quand les Romains ont conquis les Provinces, ils ont maintenu la citoyenneté locale : tout individu vit selon le droit de sa communauté, ce qui représente une grande variété de statuts. Mais partout esclaves, affranchis et femmes sont exclus de toute citoyenneté. La citoyenneté locale est transmise par le père et n’est pas liée à la résidence : l’installation dans une autre cité ne la supprime pas. A la différence de ce qui se passe à Athènes la citoyenneté romaine n’est pas jalousement gardée, mais au contraire constamment ouverte. Par exemple en bénéficient tous les italiens depuis les "guerres sociales", de 90-88 avant JC. Ainsi Rome, à la différence d’Athènes, a su ouvrir sa citoyenneté à tous les hommes libres descendants des peuples vaincus. Depuis Auguste, l’armée n’est plus une armée citoyenne, levée en cas de besoin, mais une armée de métier, permanente, avec service de longue durée. Elle est un moyen de promotion. II- ETRE CITOYEN AUJOURD’HUI EN FRANCE Un préalable : homme, individu, citoyen. L'article "Citoyen" de L’Encyclopédie distingue le citoyen du sujet et critique Hobbes, qui confond les deux. Le despote n'a que des sujets, alors que les 3 "citoyens" participent à l'exercice de la souveraineté. Mais pour participer il faut en être capable. Il faut donc des citoyens éduqués : l’éducation devient un droit et une nécessité. Être citoyen implique qu’on fait parti d’un corps politique, un État, qu’on a dans ce corps politique des droits, des devoirs, et donc des responsabilités. Etre un Homme, un individu ou une personne n’implique qu’une appartenance à une espèce biologique, celle de l’homo sapiens sapiens. 1-Être citoyen c’est être français. L’article 3 de la Constitution stipule que l’accès à la citoyenneté se confond avec la jouissance de la nationalité. Etre citoyen c’est être Français. Cela ne signifie pas que les étrangers n’ont pas de droits sur notre territoire. Ils jouissent de droits comme l’éducation, la protection sociale, le travail, la liberté et ils ont aussi des devoirs : paiement de l’impôt, respect de l’ordre public… La nationalité française peut résulter soit d’une attribution par filiation « jus sanguines » ou par la naissance en France « jus soli », soit d’une acquisition à la suite d’événements personnels (mariage avec un conjoint français, par exemple) ou d’une décision des autorités françaises (naturalisation). La perte de la nationalité française peut être la conséquence d’une décision de l’autorité publique, d’un acte volontaire, d’un non-usage prolongé ou d’une déchéance a- L’attribution de la nationalité française - par filiation : le droit du sang Est Français l’enfant, légitime ou naturel dont l’un des parents au moins est Français. La filiation adoptive ne produit d’effet en matière d’attribution de la nationalité française que si l’adoption est plénière. Par ailleurs, la filiation de l’enfant n’a d’effet sur la nationalité de celui-ci que si elle est établie durant sa minorité. - par la naissance en France : le droit du sol Est Français l’enfant, légitime ou naturel, né en France lorsque l’un de ses parents au moins y est lui-même né. La simple naissance en France ne vaut attribution de la nationalité française que pour l’enfant né de parents inconnus ou apatrides, ou de parents étrangers qui ne lui transmettent pas leur nationalité. L’enfant né en France avant le 1er janvier 1994, d’un parent né sur un ancien territoire français d’outre-mer avant son accession à l’indépendance, est Français de plein droit. Il en est de même de l’enfant né en France après le 1er janvier 1963, d’un parent né en Algérie avant le 3 juillet 1962. 4 b- L’acquisition de la nationalité française - à raison de la naissance et de la résidence en France : er Depuis le 1 septembre 1998, date d’entrée en vigueur de la loi du 16 mars 1998 relative à la nationalité, qui a supprimé le régime de la manifestation de volonté institué par la loi du 22 juillet 1993, tout enfant né en France de parents étrangers acquiert la nationalité française à sa majorité si, à cette date, il a en France sa résidence et s’il a eu sa résidence habituelle en France pendant une période continue ou discontinue d’au moins cinq ans, depuis l’âge de onze ans. - à raison du mariage avec un(e) Français(e) La nationalité française est ouverte par déclaration à tout étranger ou apatride qui contracte mariage avec une personne de nationalité française. Cette déclaration est souscrite devant le juge d’instance du lieu du domicile commun des époux, après un délai de deux ans à compter du mariage, si les intéressés résident en France. - à raison de l’adoption simple ou du recueil en France L’enfant qui a fait l’objet d’une adoption simple par une personne de nationalité française peut, jusqu’à sa majorité, déclarer qu’il réclame la nationalité française, à condition de résider en France à l’époque de sa déclaration. - par naturalisation La naturalisation par décision de l’autorité publique ne peut être accordée qu’à l’étranger justifiant d’une résidence habituelle en France pendant les cinq années qui précèdent le dépôt de sa demande, sauf cas de réduction ou de suppression du stage de cinq ans prévus par le code civil. Par ailleurs, nul ne peut être naturalisé s’il n’a en France sa résidence au moment de la signature du décret de naturalisation. c- La perte de la nationalité française Elle est le plus souvent volontaire et s’effectue par déclaration ou par décision de l’autorité publique d- Les principaux textes applicables La nationalité française est régie par les articles 17 à 33-2 du code civil, par le décret n° 931362 du 30 décembre 1993 (J.O. du 31-12-1993), modifié par le décret n’98-720 du 20 août 1998 et par le décret n° 2005-25 du 14 janvier 2005, ainsi que par l’article R.321-30-1 du code de l’organisation judiciaire. Ces dispositions sont issues de la loi N° 93-933 du 22 juillet 1993 (J.O. du 23-07-1993) modifiée par la loi n° 98-170 du 16 mars 1998 (J.O. du 17-03-1998) et par la loi N° 2003-1119 du 26 novembre 2003 (J.O. du 27-11-2003). 5 2 – Droits et devoirs du citoyen. Le citoyen est "protégé" par des droits. On les trouve énumérés dans la déclaration des droits de l’homme ; ce sont l’égalité avec les autres, la liberté qu’il s’agisse de la liberté de pensée ou de se déplacer, le droit de propriété, le droit de vote… Le citoyen a aussi des devoirs, en particulier celui de payer des impôts. Mais le devoir certainement le plus lourd et le plus terrible, qui a coûté la vie à près de 2 millions d’hommes au XX° siècle, c’est la défense du territoire national. Comme "Nul n’est censé ignorer la loi" le citoyen doit se tenir informé de la Loi pour la respecter. C’est le « civisme ». a- Citoyen et pouvoir politique : la démocratie. C’est ce régime, né à Athènes au V° siècle, où le pouvoir n’est pas aux mains d’un seul mais appartient aux citoyens, que les Grecs ont appelé Démocratie. Il a connu des hauts et des bas, leur pouvoir a été confisqué par des tyrans ou leurs votes ont été achetés par les riches…comme le rappelle Juvénal dans ses Satires :"A présent que nul n’achète plus nos votes, le public a depuis longtemps banni tout soucis. Le peuple qui jadis octroyait des commandements, des consulats, des légions, et bien d’autres choses, ne se mêle plus aujourd’hui de rien et n’aspire qu’à deux choses : du pain et les jeux du cirque. " La démocratie consiste chez nous à élire un Président et des députés. C’est le principe de la démocratie représentative que précise la Constitution de 1958 dans son article 3 : "La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum." Les élus n’ont pas un mandat impératif comme c’était le cas en 1789. Une fois élus ils agissent en leur âme et conscience. S’il est prévu le recours au référendum est restrictivement défini. Il n’y a pas, comme en Suisse, de référendum d’initiative populaire Les décisions du gouvernement ne sont pas toutes soumises au Parlement, Assemblée nationale et Sénat et elles ne sont pas toutes du domaine de la loi. Les décrets, règlements et circulaires sont de la responsabilité du Gouvernement et du Président. b- Citoyen et lien social : la République Le corps politique comme un corps biologique ne vit que si les différentes cellules participent à une activité qui les dépasse. C’est pourquoi le corps politique veille à maintenir la cohésion sociale. Cela a toujours existé et tous les pouvoirs ont cherché à favoriser la cohésion, le sentiment 6 d’appartenance par l’enseignement de l’histoire, des commémorations, des symboles… Parmi les symboles qui évoquent la République citons la devise « Liberté, Egalité, Fraternité », le drapeau tricolore, l’hymne national, le buste de Marianne, la flamme du soldat inconnu … Et parmi les manifestations le 14 Juillet et son défilé, les commémorations, en particulier celle du 11 Novembre, la ranimation de la flamme au tombeau du soldat inconnu en diverses circonstances… Les commémorations, en particulier celle du 11 Novembre devant les monuments aux morts, rappellent le rôle important des guerres passées dans la lente construction géographique du territoire de la France et de notre identité. Ainsi en 1982 lors d’un Conseil des ministres qui évoquait le problème de l'enseignement de l'histoire, le président Mitterrand déclarait : « Un peuple qui n'enseigne pas son histoire est un peuple qui perd son identité ». Certes la construction de l'identité nationale peut emprunter bien d'autres voies que l'étude de l'histoire et un grand nombre de pays au patriotisme développé ont un enseignement de l’histoire réduit comme les Etats-Unis ou le Royaume Uni. La déclaration du Président Mitterrand n’est en fait que la suite de l’arrêté du 12/8/1880 sur l’enseignement de l’Histoire qui précisait que « L'histoire de France en particulier devra mettre en lumière le développement général des institutions, d'où est sortie la société moderne; elle devra inspirer le respect et l'attachement pour les principes sur lesquels cette société est fondée ». C’est ce qui définit le « citoyen par héritage ». Ce qui constitue cet héritage, c 'est la nation, l'histoire commune, le patrimoine commun, la tradition, la famille... L’ethnologie montre que les rites de passage c’est à dire l’ensemble des cérémonies qui conduisent un individu ou un groupe d’un état à un autre, de l’état d’enfant à celui d’adulte par exemple, existent depuis la nuit des temps dans toutes les collectivités. Or le passage, très important, de l’état de non-citoyen à celui de citoyen s’effectue sans autre formalité que l’inscription sur les listes électorales et la JAPD, on devient donc citoyen sans s’apercevoir de rien. c- Quelles valeurs partager? Le citoyen homme, acteur du groupe, doit toujours se préoccuper de ses obligations et des conséquences de sa décision vis-à-vis des autres. Ce qui l'institue comme citoyen, c'est bien sa dimension personnelle, mais c'est aussi et d'abord son "savoir-vivre" dans un tissu social où chacun doit se soucier d'autrui. Il s'agit donc pour une société responsable de définir les règles qui régiront le comportement de chacun dans la vie collective sur des fondements établis au préalable par la collectivité elle-même et qui s'imposeront à tous ses membres. "La liberté de chacun s'arrête là où 7 commence celle des autres". La cohésion d'une société n'est pas le fruit du hasard, mais le résultat d'un postulat et l'aboutissement d'une éducation qui "fixe d'avance dans l'âme de chacun les similitudes essentielles que réclame toute vie collective" (DURKHEIM). La morale d'un seul doit être compatible avec celle de tous. La loi naturelle implique une morale publique minimale. - Liberté, égalité, fraternité Le symbole moderne en est le suffrage universel, avec son principe "un homme = une voix". L’égalité et la liberté sont des droits, la fraternité est une obligation morale. La liberté est un statut individuel alors que l’égalité et la fraternité sont des relations entre les membres d’une société…Cet ensemble de valeurs citoyennes mais aussi Responsabilité, qui apparaît comme la contrepartie nécessaire de la liberté s'incarne dans un ensemble de normes concrètes qui concernent les droits et les devoirs des citoyens, articulés les uns aux autres pour former un statut juridico-politique garanti pour l'essentiel dans le cadre d'un Etat-nation. - Le respect Le premier des respects est celui que l’on se doit à soi même. L’homme a conscience de la limite de sa vie et cette conscience entraîne naturellement le respect de la dignité humaine. Le second respect est celui que l’on doit aux autres afin d’exclure toute discrimination (croyance, race, sexe, âge etc.). Ce respect est celui du maître à l’élève qui l’accueille comme il est et espère l’améliorer au cours de l’année. - La tolérance Elle est un espace où des différences peuvent coexister sans se détruire mutuellement. La société française, comme beaucoup d’autres, est une société multiculturelle. Cette diversité bouscule la laïcité. L’échec conduit à l’intégrisme, l’intolérance et le repli sur les communautés. La tolérance est une valeur qui reconnaît la liberté et qui permet l’exercice de cette liberté. La tolérance respecte la conscience de chacun. Elle est réciproque : la tolérance appelle la tolérance. Néanmoins, elle n’est pas l’indifférence. Etre indifférent reviendrait à ne pas respecter l’autre. - L’effort, le courage, la volonté… Il s’agit de l'effort corporel ou des efforts de l'esprit comme l'effort de mémoire, l’effort de réflexion, l'effort d'imagination ou d’invention, les efforts de concentration et d’attention. Grâce à l'effort qui les maintient étroitement, liberté et volonté se consolident mutuellement. Certes toute volonté ne contient pas l'effort ainsi je peux avoir la volonté de ne rien faire 8 mais on peut penser qu’une volonté qui s'accomplit avec effort est libre. De même, toute liberté ne contient pas l'effort. La liberté qu’à la pierre de tomber est l'exemple d'une liberté sans effort, gouvernée par le principe d'inertie. d-Les changements socioculturels - Le multi culturalisme Le plus évident de ces changements est l'irruption de la multi-culturalité. Elle pose le problème des valeurs à enseigner. La querelle de la laïcité, du temps de Jules Ferry, ne portait que sur l'enseignement de la religion à l'école, non sur la morale à enseigner, qui ne faisait pas divergence. L'élargissement à d'autres cultures, en revanche, fait surgir des dissensions. - La séparation entre l’état et la nation La distinction entre éducation à la citoyenneté" et "éducation aux droits de l'homme" n’a pas posé de problèmes tant que l’Etat se confondait avec la nation. La première était une éducation à la dimension proprement politique des rapports sociaux tandis que la seconde s'inscrivait dans le cadre d'une éducation morale, c'est-à-dire de la relation de chaque individu à l'humanité dans son ensemble. Mais aujourd'hui le politique se démultiplie en d'innombrables échelons nationaux (région, état), européens (UE, conseil de l'Europe) et mondiaux (ONU, UNESCO, OMS, etc.); l’humanitaire se politise et se trouve imbriqué avec des problèmes relevant de la citoyenneté (Rwanda, Bosnie) ; des thèmes qui autrefois ne relevaient pas de la citoyenneté, comme l'environnement et la santé, ont désormais une dimension politique. - La montée des incivilités Différent de la délinquance on constate une montée des incivilités, ces manquements à un ensemble de codes et de normes du "vivre ensemble au quotidien" dans l'espace public, qui permettent des rapports de cohabitation pacifique et confiante. C’est le non respect des règles de la vie commune dans les lieux publics (impolitesse, bruit, cigarette, ordures…) , du développement des insultes, des menaces et des dégradations. Face à ces agressions incontrôlées et imprévisibles contre les biens et les personnes, les individus, notamment les plus faibles physiquement ou socialement, se sentent démunis, dépossédés de toute maîtrise personnelle sur leur environnement social et abandonnés des pouvoirs publics. 9 III- ETRE CITOYEN EUROPÉEN L’Europe s’est construite sur une double volonté, d’une part sur celle de maintenir la paix entre les nations européennes dont les citoyens s’étaient fait la guerre trois fois en soixante dix ans et d’autre part sur la résistance face au bloc soviétique. La succession de générations n’ayant pas connu directement la guerre et la fin de l’affrontement des blocs depuis la chute du mur de Berlin, a accentué le déficit de conception démocratique originel. La réponse politico-économique apportée par la construction de l’Union Européenne, fondée dans ses premiers traités sur une logique économique de libre circulation, puis ensuite sur une monnaie unique, déborde sur la vie du simple citoyen au plan du droit et de la réglementation qu’il est contraint d’appliquer. Le Traité de Maastricht, signé en 1992, établit la "citoyenneté de l'Union". Caractérisée par des droits, des devoirs et la participation à la vie politique, elle renforce l'image et l'identité de l'Union européenne et implique davantage le citoyen dans le processus d'intégration. Aux termes de l'article 17 du Traité instituant la Communauté européenne, est citoyen de l'UE, toute personne ayant la nationalité d'un Etat membre, laquelle découle de l'application des dispositions propres à cet Etat. La citoyenneté de l'Union complète la citoyenneté nationale : elle permet au citoyen de l'Union de disposer de nouveaux droits spécifiques à la dimension transnationale de l'Union européenne, et d'élargir l'exercice de certains de ses droits au pays de l'UE dans lequel il réside ou voyage (et non plus seulement au pays dont il est ressortissant). De plus, elle se fonde sur les principes communs aux Etats membres : ceux de liberté, de démocratie, du respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que de l'Etat de droit. Ces principes sont énoncés dans le Traité d'Amsterdam, entré en vigueur le 1er mai 1999. La citoyenneté de l'Union repose sur des droits fondamentaux de l'individu et des droits spécifiques (droits favorisant la libre circulation et droits civiques) accordés au citoyen européen dans le Traité. Le Traité de Nice entré en vigueur le 1er février 2003 confirme le statut de la citoyenneté de l'Union ainsi que les droits fondamentaux. 10 1-Les droits fondamentaux Les Etats membres de l'UE défendent les droits fondamentaux et les valeurs démocratiques d'ores et déjà inscrits dans divers textes comme la Déclaration universelle des droits de l'homme (1948), la Convention européenne des droits de l'homme (1950), la Charte sociale européenne (1961) révisée en 1996, ou la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs (1989). L'Union et ses Etats membres sont donc tenus de respecter ces valeurs, les tribunaux nationaux et la Cour de justice européenne de les faire respecter. Aucun nouveau pays ne peut entrer dans l'Union européenne s'il ne respecte pas ces droits fondamentaux. Si un Etat membre y manquait d'une façon grave et systématique, l'Union pourrait lui imposer des sanctions, politiques ou économiques. L'engagement de l'Union a été répété, de façon solennelle, par la proclamation en décembre 2000 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Cette Charte regroupe en 6 chapitres (Dignité, Libertés, Egalité, Solidarité, Citoyenneté et Justice), 54 articles définissant les valeurs fondamentales de l'Union européenne, ainsi que les droits civils et politiques, économiques et sociaux du citoyen européen. Les premiers articles sont consacrés à la dignité humaine, au droit à la vie, au droit à l'intégrité de la personne, à la liberté d'expression et au droit à l'objection de conscience. Le chapitre "Solidarité" innove en incorporant des droits sociaux et économiques tels le droit de grève, le droit à l'information et à la consultation des travailleurs, le droit à concilier la vie familiale et la vie professionnelle, le droit aux prestations de sécurité sociale et aux services sociaux à l'intérieur de l'Union européenne ou la protection de la santé. La Charte promeut également l'égalité entre hommes et femmes et instaure des droits comme la protection des données, l'interdiction des pratiques eugéniques et du clonage reproductif des êtres humains, les droits des enfants et des personnes âgées ou le droit à une bonne administration. 2-Un cadre de vie élargie La citoyenneté de l'Union donne aux ressortissants des Etats membres des droits et renforce la protection de leurs intérêts : - le droit de circuler, séjourner, s'installer, travailler, étudier dans les autres Etats membres, de l'Union : l'entrée dans un autre Etat membre ne peut être refusée que pour des raisons d'ordre public, de sécurité ou de santé publique, et la restriction doit être justifiée (de même que l'expulsion). 11 - le droit de voter et d'être éligible aux élections du Parlement européen et aux élections municipales dans l'Etat membre où il réside, et ce dans les mêmes conditions que les ressortissants de cet Etat. Rappelons que la France, par le Traité de Maastricht, s’est engagée à accorder le droit de vote aux étrangers de l’Union européenne pour les élections municipales, mais cet engagement n’est toujours pas tenu. - le droit de bénéficier de la protection consulaire des autorités diplomatiques d'un autre Etat membre sur le territoire d'un pays tiers (Etat n'appartenant pas à l'Union européenne), si son pays n'y est pas représenté par une ambassade ou un consulat. - le droit de pétition devant le Parlement européen et le droit de faire appel au Médiateur européen pour examiner les cas de mauvaise administration de la part des institutions et organes communautaires - le droit de non-discrimination en raison de la nationalité. En tant que gardienne du Traité, la Commission européenne veille à la bonne application de la citoyenneté et rend des rapports périodiques sur les progrès réalisés et les difficultés rencontrées. 3-Le droit à l’information Le Traité d'Amsterdam spécifie que tout citoyen de l'Union et toute personne physique ou morale ayant son siège dans un Etat membre a un droit d'accès aux documents du Parlement européen, du Conseil de l'UE et de la Commission européenne, dans la limite des raisons d'intérêt public ou privé. L'information du citoyen est considérée comme une priorité par le Parlement européen, la Commission européenne et le Gouvernement français qui se sont associés pour multiplier les campagnes d'information par voie de presse, de radio et de télévision et créer en France un réseau de Centres d'information décentralisé. En 1998, la Commission européenne a lancé le service d'information "Europe Direct", afin de mieux informer les citoyens sur les possibilités et les droits que leur offre la citoyenneté européenne. Depuis, le Parlement européen s'est joint à la Commission européenne pour renforcer ce service. L'accès se fait gratuitement, soit par Internet, soit par téléphone, via un numéro unique pour tous les Etats membres de l'Union européenne : 0800.6.7.8.9.10.11 4-Le prix de la citoyenneté européenne En 2004, la Fédération française des Maison de l'Europe (FFME) a lancé le Prix de la citoyenneté européenne. Ce prix s'adresse à tous ceux qui ont 12 réalisé des actions de terrain, menées de façon individuelle ou en groupe, qui ont favorisé un sentiment d'appartenance à l'Union européenne, par le renforcement de l'identification des citoyens à l'Union ou la prise de conscience de l'existence d'un bien commun européen. Le jury est composé de membres d'institutions européennes, de personnalités, d'associations et d'organismes européens. Les dossiers de candidature peuvent être téléchargés et doivent être envoyés à la FFME avant octobre. En 2004, parmi les 4 projets récompensés on note l'engagement européen de M. J. Taurisson au travers du Comité de Jumelage de Feytiat, de l'Association des communes jumelées du Limousin et de la Maison de l'Europe en Limousin Le Jury, issu du Comité de Pilotage du Prix, s'est réuni le 27 février 2007 au Parlement européen à Bruxelles et a sélectionné parmi les 47 candidatures enregistrées les lauréats de l'édition 2006 : en catégorie « individuel » : Zbigniew Piasecki – Pologne et en catégorie « organisme » : European Youth Card Association (EYCA)1 - Hongrie / PaysBas IV- ETRE CITOYENS DU MONDE « Un honnête homme n'est ni français, ni allemand, ni espagnol, il est citoyen du monde et sa patrie est partout. » Cyrano de Bergerac «Lettre contre les frondeurs » (1651) « Je ne suis ni d'Athènes, ni de Corinthe, je suis citoyen du monde ». Socrate « A moins qu'un gouvernement mondial ne soit rapidement constitué et n'entre efficacement en action, tout l'avenir de l'humanité est sombre et incertain». Winston Churchill « Le droit même de vivre ne nous est donné que si nous remplissons notre devoir de citoyens du monde. Le nationalisme n'est pas la plus haute conception. La plus haute conception est la communauté mondiale ». Gandhi 1 L’EYCA a organisé la deuxième édition du projet « Europe for a change » pour explorer les changements survenus en Europe depuis le 1er mai 2004, et célébrer la citoyenneté européenne. Cette édition s’est déroulée à travers l’Europe (Budapest, Salzburg, Limassol, Cardiff, Madrid) du 1er mai 2005 au 30 avril 2006. « Europe for a change II » a réuni des jeunes de 19 pays différents, les incitant à réfléchir activement sur la citoyenneté européenne et à en discuter entre eux dans le contexte de l’élargissement. 13 « Un monde uni ou le néant ». Albert Einstein Avec la mondialisation le citoyen perd la notion de frontière. Les NTIC amplifient ce phénomène puisqu’elles permettent de transporter à grande vitesse, de rechercher, de stocker et de traiter très facilement des informations numérisées. Dans cette révolution technologique, couplée à la mondialisation où l’espace et le temps se contractent, Internet est une création emblématique. La terre devient l’espace d’une multitude d’échanges, pas toujours licites. Qui contrôle ? L’ONU ? L’OMC ? Quel gouvernement mondial ? Se dire citoyen du monde implique, que le "monde" existe en tant qu'entité politique fondée sur la démocratie, ce qui est la justification de la citoyenneté. Si le gouvernement du monde n’existe pas encore certains l’ont anticipé. Pour cela ils ont crée, dès 1949, le Registre International des Citoyens du Monde, dont le rôle est de dénombrer ceux qui, à travers la planète, se reconnaissent citoyens du monde et veulent ce niveau de démocratie planétaire. Depuis 1949, il a enregistré environ 180.000 Citoyens du Monde dans 111 pays. Etre citoyen du monde c’est penser en terme de Planète, respecter l’environnement et promouvoir un développement durable, lutter contre les inégalités et aider les pays pauvres. La question de la citoyenneté est moins celle de sa réalité que celle de sa nature et de sa place par rapport aux autres cultures et groupes qui sollicitent notre mode de vie. L’échelon national, où nous retrouvons nos racines, l'Europe, à laquelle nous rattachent nos traditions, nos cultures et nos intérêts économiques, le monde que la mondialisation et l'humanisme universel rendent si proche, trop parfois, et qui est pourtant le théâtre de notre existence. Il ne s'agit pas d'éliminer mais d'articuler nos appartenances, nos racines, notre vouloir-vivre ensemble sur des bases communes. Étroit chemin qui s'inscrit entre le respect de l'universel des règles de la société et de la morale humaine d'une part et le respect de la souveraineté des cultures et nations traditionnelles d'autre part. Approfondir notre identité, c'est reconnaître aux autres les mêmes exigences. Alors, que faire pour créer ce vivre ensemble dans les "sociétés d'individus" (selon l'expression de N. Elias) sinon se retourner vers l'Ecole ? Jean-François NYS 14