„Was für eine poetische Erklärung,“ findet der New Yorker

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„Was für eine poetische Erklärung,“ findet der New Yorker
Festival « Aigues-Vives en Musiques »
Annette Zerpner, journaliste allemande à « Die Zeit » a passé 5 jours à Aigues-Vives.
Impressions à chaud…
« Quelle explication poétique ! », c’est ce que pense le professeur de contrebasse
new-yorkais James Vandemark en prenant son petit-déjeuner sur la terrasse. Méditatif,
il jette un regard au jardin foisonnant de ses hôtes, par-dessus le bord de sa tasse de
café. Sur le hangar de pierre, le chat de la maison somnole, pelotonné sur lui-même.
« Le mistral est responsable des rêves étranges qu’on fait ici. »
Durant la deuxième semaine d’août, le vent frais descendant du nord-ouest a surpris
par sa force les participants du festival « Aigues-Vives en Musiques ». Avant cela, il
avait tout simplement fait chaud, très chaud même, et il semblait que la musique de
chambre des 23 étudiants et de leurs professeurs avait été cuite dans un énorme four
pour être fin prête pour le concert. Et maintenant, ce vent arrive et souffle au loin toutes
les scories superflues de la musique ?
Ce serait bien. En réalité, Paulina Krauter (17 ans), de Stuttgart, et Laura van der
Heijden (16 ans), qui étudie à Londres, sont dans la Salle Marius École dès neuf heures
du matin, avec leur violon et violoncelle, et elles réfléchissent aux passages qui sont à
comprendre sur un plan symphonique dans le deuxième trio avec piano de Brahms, et
lesquels le sont sur le plan de la musique de chambre. Le directeur du festival, le
pianiste et chef d’orchestre Vladimir Stoupel souhaite écouter leurs explications avant
de les entendre poursuivre. Les jeunes filles expliquent leurs propositions, prennent des
notes sur leurs partitions, continuent à jouer. Et ceci se poursuit toute la matinée,
jusqu’à ce que Vladimir Stoupel, satisfait, libère les deux demoiselles pour la pause de
midi. Et de jeter un rapide regard sur ce qui vient d’être transcrit à la main sur le plan de
répétition, pour se préparer à l’après-midi au programme serré.
Un travail concentré sur chaque morceau de musique, voici à la fois le quotidien et le
luxe de chaque musicien professionnel. « Souvent, on arrive dans un lieu quelconque,
on doit donner un concert, on a peu de temps de répétition et rien – ni le repas, ni
l’hôtel, n’est programmé », explique la femme de Vladimir, la professeure de violon et
co-directeur artistique Judith Ingolfsson, qui, outre les répétitions du trio de Brahms,
donne des cours individuels dans le Temple. Il s’agit seulement de se concentrer sur
l’essentiel, sur la musique. Les professionnels le peuvent. Et tous les jeunes
participants au festival veulent devenir professionnels.
Avec leurs longues jambes, les étuis d’instruments roulant au sol, ils déambulent
gaiement à travers les ruelles et font penser, durant la journée, à de curieux scarabées.
Mais le soir, lors de la Folle Nuit, ils se métamorphoseront, dans leurs habits colorés et
fluides, en des créatures ailées dansant le tango sur la place à côté de l’église, et les
enfants du lieu danseront. « Derrière les hauts murs, la vie se déroule normalement.
Mais on ne s’en rend compte que lorsque le soir arrive », décrit Judith. Il y a quelques
années, elle a donné un concert soliste dans la petite église catholique sous le ciel
étoilé. Les gens du coin sont venus et ont écouté – la graine à l’origine du festival était
plantée.
Le meilleur poste d’observation du lieu est le Café de la Place. L’après-midi avant le
concert d’adieu des professeurs, Fiona Jansen, violoniste à la mère irlandaise et au
père néerlandais, chargée de deux pochettes cadeaux bleues contenant des articles de
poteries venant de la poterie du coin, se laisse tomber sur une chaise et commande un
café noisette. Les concerts des étudiants et les heures de cours individuels sont
terminés, exceptionnellement, elle a du temps aujourd’hui pour un plongeon dans la
piscine de ses hôtes, une petite promenade à vélo ou une longue sieste.
Les maux de tête avec lesquels elle a tout de même joué, le soir d’avant, une sonate
de Schumann profondément émouvante lors de l’atelier-concert dans le temple ont été
guéris par le sommeil de la nuit dernière, explique Fiona. Elle n’arrive pas à se rappeler
des rêves que le mistral a apportés. Fiona, qui a onze ans de plus que Paulina et Laura,
est actuellement dans l’orchestre symphonique de Bochum et connait déjà les hauts et
les bas de la condition de musicien : elle sait précisément ce que Vladimir Stoupel a
voulu dire lorsqu’il a donné un conseil lors de la répétition du trio de Brahms : « Si vous
décidez le matin de sortir de chez vous, ça veut dire que vous devez donner 100 pour
cent. Vous ne pouvez pas dire, ah, je suis malade. Ça n’intéresse personne. » Lors du
festival, les auditions, les contrats temporaires et les difficultés de la vie nomade
pendant les tournées sont loin, nous dit Fiona, et faire de la musique est un pur
bonheur. Le fait que Vladimir Stoupel, Judith Ingolfsson et le professeur de violoncelle
Leonid Gorokhov partagent ce point de vue a été nettement palpable lors du fantastique
concert d’adieu avec Chostakovitch et Franck.
Annette Zerpner