les camps et les génocides nazis
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les camps et les génocides nazis
14 LES CAMPS ET LES GÉNOCIDES NAZIS Les camps de concentration et d’extermination nazis ouvrent une terrible période. Leur souvenir demeure comme synonyme d’horreur absolue. Mais si l’histoire ne se répète pas, les hommes la font bégayer, et les « bêtes immondes » n’ont pas disparu. SPÉCIFICITÉS HITLÉRIENNES Les centres d’extermination des «fardeaux vivants» pudiquement appelés «instituts d’euthanasie» dans le cadre de la politique d’euthanasie mise en place le 1er septembre 1939 constituent une spécificité hitlérienne, Hitler ayant lui-même paraphé le document (code 14). Quant à l’expression de camp d’extermination (autre exclusivité nazie) elle apparaît en 1941. Ce qui fonde le système concentrationnaire nazi, c’est la discrimination entre la race des seigneurs (la race aryenne), les races étrangères des esclaves, les races à détruire (Juifs et Tziganes), les catégories d’individus à anéantir (asociaux, homosexuels, Témoins de Jehovah, malades mentaux, invalides, alcooliques). Les camps de concentration d’Allemagne créés en 1933 reçurent d’abord des opposants politiques, des prisonniers de droit commun, des Juifs. Pendant la guerre ils accueillirent tous les indésirables et les êtres considérés comme inférieurs (Slaves, Polonais, Russes, communistes ou non). Une douzaine de camps de concentration reçurent, compte tenu de leur dégradation des conditions de détention, le surnom de «camp de la mort lente». DÉPORTATIONS Pour alimenter les camps de concentration (puis d’extermination), les déportations furent elles-mêmes organisées. Même si l’inhumanité prévalait pour ces transports de masse, ceux-ci nécessitaient une mise au point méthodique dans laquelle excellèrent les SS. Babi Yar Le régime nazi eut un temps, après la Les 29 et 30 septembre 1941, à Babi défaite française de mai et juin 1940 l’esYar près de Kiev, des « Einsatzgruppen » poir de résoudre la question juive (débarauraient massacré 33 771 Juifs (Bedarasser l’Allemagne et l’Europe du démon rida, Le Nazisme et le génocide. Hisjuif et de la corruption sémite) en déportoire et enjeux). tant à Madagascar (colonie française ralliée à Vichy) 4 millions de Juifs en 4 ans. Les déportés devaient – cynisme bien hitlérien – se payer eux-mêmes le voyage et l’installation dans la Grande Ile. Mais le Royaume-Uni, maître de l’océan Indien, n’ayant pu être écrasé, le projet fut abandonné à la fin de 1940. L’extermination allait être privilégiée! 38 LES SOLUTIONS « D’EXTERMINATION PARTIELLE » Le 7 décembre 1941 fut instauré le système «Nuit et brouillard» par lequel certains détenus transférés en Allemagne devaient disparaître sans laisser de traces. L’objectif était de terroriser les familles et la population en faisant planer le doute sur le sort des détenus. À peu près en même temps fut conçue une autre technique d’élimination pratiquée par des commandos de la mort, « les groupes d’intervention » (Einsatzgruppen ou Einsatzkommandos). Ces unités spéciales créées au printemps de 1941 avec des SS et des policiers pour assurer «la sécurité des territoires occupés», intervenaient donc sur les arrières de la Wehrmacht et dans les territoires occupés Quelques grands camps en massacrant Juifs et indésirables, en plein air, au vu et au su des populations. Allemagne : Bergen-Belsen, BuchenAinsi, 3000 hommes spécialisés auraient wald, Dachau, Dora, Flossenbürg, Neu Bremm, Neuengamme, Orianenburg, fait environ 750000 victimes, provoquant Ravensbrück ; l’horreur au sein même des exécuteurs, Autriche : Manthausen ; Pologne : des soldats allemands, des opinions Treblinka, Chelmno, Belzec, Sobibor, et publiques. Auschwitz-Birkenau (camp de concenCette solution expéditive mais un peu tration et d’extermination qui fit le plus lente et surtout peu discrète fut abandongrand nombre de victimes). née au profit de la «solution finale». LA « SOLUTION FINALE » C’est donc dans des camps de la mort, rapide et scientifiquement conçue (dans des camps d’extermination et pas seulement de concentration) que furent pratiqués génocides, «solution finale» (Shoah) et holocauste ou anéantissement (Vernichtung). En tirant tous les profits possibles de cette matière première humaine (force de travail, expériences médicales, commerce des cadavres, récupération des vêtements, des dents en or, des cheveux, de la graisse humaine, des os broyés). Bien des industriels allemands utilisateurs de cette matière première portent par conséquent autant que les SS, la responsabilité de cette inhumanité. C’est dans le monde clos des camps sous la surveillance des SS et de leurs auxiliaires de droit commun, les Kapos, que la sous-alimentation fut savamment organisée pour soumettre les récalcitrants, faire souffrir et accroître surtout la rentabilité de l’extermination dans les chambres à gaz et les fours crématoires. Les premières chambres (au monoxyde de carbone) et les premiers fours furent imaginés pour les «instituts d’euthanasie». Mais en 1941, il fallut changer d’échelle. On conçut alors les sinistres camions à gaz, itinérants, utilisant leurs propres gaz d’échappement pour tuer dans des containers hermétiquement clos; puis de grandes chambres à gaz recevant jusqu’à 1500 personnes éliminées au cyclon B, un insecticide qui se présentait sous forme de cristaux d’acide prussique; enfin de grands fours crématoires. Le tout fonctionnait derrière les hauts murs des camps, avec le concours d’un nombre restreint de tortionnaires et de bourreaux, dans une sorte de discrète clandestinité. Qui coûta la vie à environ 6 millions de déportés! 39