Côte d`Ivoire : la dernière intervention militaire française en Afrique

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Côte d`Ivoire : la dernière intervention militaire française en Afrique
Côte d’Ivoire : la dernière intervention militaire française en Afrique
… sous drapeau français ?
En Côte d’Ivoire, deux choses sont certaines. D’une part, le Président Gbagbo est un
manipulateur qui instrumentalise la volonté des Africains, surtout des jeunes, de ne plus être
sous tutelle de l’ancien colonisateur, pour mieux servir ses objectifs politiques qui se résument à
garder le pouvoir par tous les moyens, y compris les pires comme le racisme et la xénophobie.
D’autre part, la France se trouve enlisée dans une situation politico-militaire intenable qui
illustre l’impossibilité à moyen et long terme pour les anciennes puissances coloniales d’intervenir
de manière indépendante en Afrique (sauf pour des missions d’évacuation).
L’une des conséquences de l’invasion irakienne est en effet qu’il est désormais quasi-impossible
d’intervenir légitimement hors du cadre d’une force multinationale. Même le plus farouche
opposant du « multilatéralisme », G.W. Bush, reste obligé de faire croire à une dimension
multilatérale de l’invasion américaine de l’Irak (avec la fameuse « coalition of the willing »).
Si cette condition est apparue clairement aux Français dès le début de la crise ivoirienne, et les a
conduit à demander un mandat de l’ONU pour l’intervention (l’assistance d’une force parallèle de
casques bleus), Paris découvre aujourd’hui que cette dimension multilatérale est également
nécessaire dans la mise en œuvre, sous peine de prêter le flanc aux accusations de
«néo-colonialisme ».
Bien entendu, l’inefficacité avérée du commandement de forces militaires sous commandement
onusien impose de penser à une alternative entre commandant national et commandement de
l’ONU. Dans le cas de l’Afrique, la solution est aujourd’hui évidente, et disponible : elle
s’appelle Union européenne.
La France comme le Royaume-Uni doivent désormais avoir le réflexe de systématiquement
concevoir leurs interventions en Afrique dans un cadre européen, même et surtout quand elles
sont mandatées par l’ONU. D’une part cela contribuera à renforcer très rapidement la politique
de défense commune. L’Afrique est en effet, avec les Balkans, la zone par excellence de
développement de cette politique au service de la stabilité et de la sécurité régionale. D’autre
part, elle coupera court à toutes les tentatives de politiciens locaux de couvrir leurs propres
échecs ou comportements condamnables (comme l’appel à la haine des étrangers) en utilisant le
réflexe anti-colonialiste. Par ailleurs, la dimension européenne de l’action apportera un poids
politique immense à l’intervention militaire. N’oublions pas en effet que l’UE constitue de très
loin l’essentiel des échanges économiques de l’Afrique avec le reste du monde.
Parallèlement, cette approche européenne devra systématiquement intégrer l’Union africaine
afin de permettre à cette dernière d’ici une décennie d’être en mesure d’intervenir de manière
autonome dans le type de crises que connaît le continent africain. Pour ce faire, Afrique du Sud et
Nigéria constituent sans aucun doute les deux acteurs majeurs à associer à une telle évolution.
Ces évolutions sont inévitables si les Européens, en particulier les Français, les Anglais les Belges
et les Portugais, souhaitent sérieusement aider le continent africain. Et les Africains devraient
pousser à une telle approche « européenne » car sinon les puissances individuelles risquent
d’hésiter de plus en plus à s’engager dans les opérations de maintien de la paix sur le continent
africain, par peur de se retrouver ensuite dans des problèmes politiques sérieux sur le plan
international.

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