La déclaration d`Indépendance des Etats-Unis

Transcription

La déclaration d`Indépendance des Etats-Unis
La Déclaration
d’Indépendance
Des Etats-Unis
4 Juillet 1776
Intro
Ce 4 juillet 1776, dans une atmosphère électrique quoique unanime s’ouvre le Congrès
Général des représentants des Etats-Unis : ce jour scelle la destinée d’une nation nouvelle,
autoproclamée indépendante- une première dans l’Histoire- au travers d’un texte, la déclaration
d’indépendance des Etats-Unis.
Ce document officiel est un extrait de la Déclaration d’Indépendance des Etats-Unis
d’Amérique, proclamée le 4 juillet 1776 à Philadelphie en Pennsylvanie. Elle consacre en une
prose enflammée sa séparation définitive de la tutelle britannique et la constitution en Etats
libres et indépendants.
La déclaration est rédigée par Thomas Jefferson, né en 1743, mort en 1826, issu d’un milieu
aisé. Avocat en 1767, attiré par la vie politique et grand lecteur des philosophes, il siège à la
Chambre des bourgeois de Virginie de 1769 à 1775; puis il participe au Congrès continental, où il
est chargé à 25 ans de rédiger la Déclaration d’indépendance: le document porte sa marque et
est corrigée entre autre par Samuel Adams- né en 1735, mort en 1826 qui est considéré comme
l’un des «pères fondateurs» : né à Braintree dans le Massachusetts, appartenant à une famille
de fermiers puritains, il est diplômé de Harvard en 1755 : élu en 1771 à la Chambre coloniale
du Massachusetts, il milite en faveur de l’indépendance totale, puis convainc les délégués
d’organiser la lutte armée sous le commandement de George Washington- ou Benjamin Franklinné en 1706 à Boston, mort en 1790, élevé dans une atmosphère puritaine: imprimeur-journaliste,
franc-maçon, Franklin fonde un club qui, en 1743, devient la Société philosophique américaine,
il siège au Congrès continental qui, en 1776, adopte la Déclaration d’indépendance.
La déclaration d’indépendance trouve ses causes au terme de la guerre de Sept Ans qui
opposèrent français et anglais. En effet, la Grande Bretagne cherchait à asseoir son pouvoir dans
les treize colonies de la façade atlantique de l’Amérique du Nord, et exercer son autorité, mais
les colons américains ne l’entendaient pas ainsi… C’est de cette manière que débute un conflit
laborieux, entre guerre civile larvée, rébellion et Révolution, entre grands idéaux de liberté et
recherche de petits profits, qui menèrent à la séparation solennelle et sa justification dans cette
déclaration. Constitué d’un préambule, suivi de vingt-sept accusations et d’une conclusion,
elle se présente comme le fondement d’une nation encore à créer, et destinée à rentrer à la
postérité.
Que révèle la déclaration d’indépendance, quels sont ses buts et qui en furent ses
inspirateurs ?
Nous détaillerons d’une part les circonstances qui amenèrent à cette déclaration, en
expliquant les récriminations des colons, puis nous nous pencherons sur les influences de cette
déclaration d’indépendance, en exposant leurs aspirations et en relevant les omissions de ce
texte.
I. Une guerre, une révolution : raisons et circonstances de la déclaration
Aux origines de la Déclaration d’indépendance surviennent plusieurs actes qui, les uns
après les autres ont menés à une exaspération des colons américains. Refusant la soumission à un
« despote absolu », ils dénoncent une « longue suite d’abus » (l.17) qui les menèrent bien malgré
eux, d’après ce texte, à décréter la séparation.
1. « Une longue suite d’abus »
Pour mieux comprendre le ton vindicatif et militant contenus dans les propos de la
déclaration dans cet extrait, il convient de revenir aux évènements eux-mêmes : la fin de la
guerre de Sept Ans, entre 1756 et 1763 qui commença en Amérique du Nord et qui est connue en
Amérique sous le nom de guerre française et indienne déposséda la France de la majorité de ses
conquêtes du continent Nord-Américain et d’Inde au profit de la puissance britannique. Ainsi, le
Royaume Uni devint la puissance prédominante du monde occidental. Elle connut de ce fait un
énorme développement de son commerce maritime. Le roi Georges III qui monta au trône en 1760
était déterminé a exercé son autorité, empiétant sur le statut des colonies américaines. Le statut
de celles-ci se sont uniformisées vers 1750 : les chartes royales octroyées au XVIIeme siècle à des
marchands pour la Virginie, à un groupe religieux comme au Massachusetts ou à Lord Baltimore
un grand seigneur qui exerce en Maryland un pouvoir héréditaire, a laissé place à un plus strict
contrôle de la métropole : neuf colonies sur treize sont royales, et le gouverneur est nommé par
le roi, par le propriétaire s’il a conservé sa charte ou élu par l’Assemblée. Le gouverneur est à la
tête de l’exécutif, souvent entouré d’un conseil oligarchique et doit composer avec l’Assemblée.
Les sources de conflits sont fréquentes entre un gouverneur qui doit rendre des comptes au
lointain gouvernement londonien et à une assemblée locale qui se considère chacune comme une
Chambre des Communes toujours désireuse d’une plus grande autonomie.
La fin de la guerre de Sept Ans et la victoire britannique obtenue, le gouvernement
britannique entend bien reprendre sa politique de contrôle des colonies, interrompue
momentanément pendant la guerre. Les colons violent en effet les lois de navigation (Navigation
Acts) et commercent directement avec les Antilles et L’Europe, avec la complicité des
représentants locaux de l’administration : ils fraudent les taxes tant que faire se peut et refusent
tout prélèvement supplémentaire pour payer les frais encourus par les troupes britanniques. Le
Royaume Uni endetté exige alors que les lois de navigation soient scrupuleusement respectées et
que les colons alors très légèrement imposées payent une partie des coûts de défense de l’Empire :
ainsi pour augmenter ses revenus le Parlement londonien adopta en 1765 le Stamp Act (loi sur le
timbre) : c’est l’instauration du papier timbré pour tous les almanach, journaux etc.… alors que
la presse est déjà arrivé a un degré d’organisation enviable, chaque ville ou presque ayant sa
gazette. Ce papier timbré était déjà obligatoire en Angleterre depuis 1694 pour une cinquantaine
de documents et des droits semblables existaient à New York et dans le Massachusetts.
La guerre menée au nom du patriotisme britannique a paradoxalement contribué à distendre les
liens entre l’Amérique et la Métropole et les lois issues de la Métropole ont emmené bientôt les
colons à se croire sous le joug d’un « despotisme absolu » qu’il conviendrait de renverser.
Ainsi les réactions sont très vives, marquant leur hostilité : « No taxation without representation «
(« Nous ne payerons que les impôts votés par nos représentants ») : la colère des colons se fonde
sur le terrain du principe. Samuel Adams, qui prône un retour au puritanisme voit dans la loi sur
le timbre une occasion de se souligner : il anime une société secrète : « Sons of Liberty » (Les
fils de la liberté). Les violences débutent : des précepteurs du droit de timbre sont pendus, leurs
maisons sont brûlées. Tous démissionnent. Les marchands de New York bientôt suivis de ceux de
Boston et de Philadelphie décident de boycotter les marchandises anglaises. Le boycott utilisé
comme arme pour la première fois fait mouche : les experts de la trésorerie calculant dans le
même temps que les recettes rapportées sont bien trop maigres, l’impôt est levé début 1766. La
nouvelle est accueillie dans la liesse en Amérique.
Mais de nouveau, avec les lois Townshend, taxes sur le plomb, le verre, le thé, la peinture et
le papier importés d’Angleterre par les colons en 1767, ou encore avec les lois de coercitions en
1774 rebaptisés lois « intolérables » pour surveiller l’application des lois, les protestations sont
nombreuses, venant des Fils de la Liberté mais aussi des assemblées coloniales : le boycott des
produits anglais est de vigueur. Des milices se sont organisées et affrontent les armées loyalistes
et les mercenaires embauchés par l’Angleterre, tandis que le roi décrète un blocus : des violences
s’ensuivirent, tel le massacre de Boston (5 mars 1770). Les lois Townshend sont abrogées en 1770
mais une taxe sur le thé amena à Boston de jeunes colons (parmi eux on retrouve Samuel Adams,
un des premiers signataires de la Déclaration) déguisés en Indiens à aborder un bateau en mai
1773 et jeter les caisses à la mer : cet événement fut nommé la Tea Party.
C’est donc bien une suite d’évènements notables visant par des coups de forces à asseoir le
pouvoir de la Couronne, qui exaspérèrent les colons jusqu’à l’inévitable séparation.
2. Le Congrès général
Le texte reproduit ici, reprend des extraits de la Déclaration d’Indépendance du 4 juillet
1776. Une première déclaration officielle, le 7 juin de la même année, soumise par Richard
Henry Lee au Congrès Continental au nom de la déclaration de Virginie remet trois résolutions,
la première expliquant que les « colonies fédérés sont et doivent être en droit, des Etats Libres
et Indépendants, qu’elles sont relevées de toute fidélité à la Couronne d’Angleterre et que tout
lien politique entre elle et la Grande Bretagne est et doit être complètement dissous ». C’est
la résolution d’indépendance qui fut adoptée par le Congrès Continental le 2 juillet 1776 en
raison des atermoiements de certaines colonies. C’est en quelque sorte la déclaration officielle.
La déclaration du 4 juillet qui porte le nom de Déclaration des représentants des Etats-Unis
d’Amérique réunis en Congrès Général » entérine les décisions contenues dans la résolution de
Lee et reprend dans son dernier paragraphe la résolution du 2 juillet : il est permis alors de la
considérer comme une déclaration d’indépendance dans la mesure où le Congrès renouvelle les
déclarations qu’il a faite deux jours auparavant. Mais le but principal est non ici de déclarer
l’indépendance mais d’en proclamer les raisons : c’est la justification d’un fait accompli : la
déclaration est explicite en ce sens, exprimant cette volonté dans le premier paragraphe (« le
respect du a l’opinion l’oblige à déclarer les causes qui le déterminent à la séparation » l.5/6). La
déclaration est donc une liste détaillée de 27 accusations attribués au roi et interprétés comme
sa volonté d’imposer une « tyrannie absolue » aux colonies.
Les Américains ne se considèrent avec ce texte plus comme des sujets britanniques rebelles mais
comme des citoyens d’une nation souveraine repoussant l’invasion d’une nation étrangère.
Malgré tout, la déclaration signée par les représentants des Treize colonies n’est qu’une
proclamation unilatérale d’indépendance. John Hancock le président du Conseil fut le premier à
la signer, et les autres signatures sont disposées de gauche à droite selon la place géographique
de leur Etat. Le document comporte ainsi cinquante-six signatures.
Le document signée dans la liesse et l’unanimité le 4 juillet omet que deux tiers de la
population des Treize colonies restent fidèles à la couronne britannique et au roi –parmi eux
les loyalistes qui se battent pour l’Angleterre dans les rangs desquels figure le fils de Benjamin
Franklin- ou sont au moins indifférents aux revendications des insurgés. Devant ces chiffres peut
on affirmer que la rupture était inévitable ?
3. Une rupture inévitable ?
La réalité semble quelque peu différer de l’esprit unanime de la Déclaration: les rédacteurs
ayant conscience de créer l’Histoire veulent se justifier devant le monde. Ce n’est donc pas le
récit simplement de ce qui est reproché au roi, mais une présentation de ses actes en termes
généraux, sous la forme d’une accusation destinée à dégager les colons de toute responsabilité et
faire retomber le blâme sur la Couronne. C’est une révolte contre un ordre établi, et plus que les
causes c’est surtout le présenter de manière à fournir une justification morale et légale, afin de
prouver que « révolte » n’est pas le mot juste pour qualifier l’entreprise des colons. Se révolter
contre l’ordre établi est toujours grave, et on ne peut faire admettre au monde qu’en se séparant
de la Grande Bretagne ils ne se séparaient pas d’une autorité légitime. Donc outre les griefs il
fallait une présomption fondamentale contre le système monarchique en général : une théorie
politique assignant une place à la révolte la rendant acceptable voire même méritoire. Les
rédacteurs commencent donc par formuler une philosophie politique générale dont les principes
permettent de fonder solidement l’attitude des colonies. Cette philosophie reconnaît le droit
à un peuple d’établir et de renverser son propre gouvernement, comme l’assure le deuxième
paragraphe « Nous tenons pour évidentes par elles-mêmes les vérités suivantes : (…) Toutes les
fois qu’une forme de gouvernement devient destructive de ce but, le peuple a le droit de le
changer ou de l’abolir et d’établir un nouveau gouvernement (…) il est de leur droit, il est de leur
devoir (…) de pourvoir par de nouvelles sauvegardes à leur sécurité future. »
C’est une revendication ouverte au droit de révolution : chaque fois que « le peuple » est
convaincu que l’action du gouvernement tourne à la destruction.
Le texte tend à montrer une opposition négligeable et des colons unanimes soulignant l’aspect
fédérateur et unitaire du texte : les colons ont supportés les « abus » du souverain plus longtemps
qu’humainement possible (l.14-21) : « les gouvernements établis depuis longtemps ne doivent
pas être changés pour des causes légères et passagères », ici au contraire les colons estiment les
causes intolérables et leur patience mise à rude épreuve, nécessitant de fait la rupture.
Pourtant le terme « peuple » (l. 11) ne semble pas si évident : car nombre de colons rechignent
à la séparation où même s’y opposent. En effet il est à noter la lenteur avec laquelle l’idée
d’indépendance parvint à maturité, tandis que ces idées investirent les faits et les esprits en
quelques mois. Ainsi, dans les temps qui précédèrent le conflit de nombreuses tentatives eurent
lieu pour désamorcer les tensions, telle que la « Olive Branch Petition » du 8 juillet 1775 où le
congrès vota non sans réticence un texte de l’avocat John Dickinson qui consiste en un ultime
appel à la réconciliation adressée au roi.
La pétition atteint Londres le 14 août mais le roi fit savoir qu’il refusait d’en prendre
connaissance déterminé a ne « rien entendre du Congrès illégal ». Le souverain se borne à
réaffirmer son autorité pleine et entière sur les colonies, à proclamer celles-ci en état de
rébellion, et à définir une stratégie punitive, alors même que l’opinion américaine penchait
vers une attitude de pondération et un compromis pacifique. L’annonce du recrutement de
mercenaires allemands porte un sérieux revers aux plus modérés. Il en fut de même lorsque le
gouverneur de Virginie en novembre 1775 offrit la liberté aux esclaves qui se rebelleraient contre
leur maîtres pour rejoindre l’armée britannique.
Il faut réellement souligner l’attachement des colons à la notion d’Empire britannique avant que
le désir de rompre les liens ne soit plus fort.
Ainsi, la déclaration du 4 juillet affirme liberté et égalité pour les hommes, et revendique
le pouvoir « juste et égal » de vivre séparé de toute obéissance envers la Grande Bretagne. Si
les évènements qui précédèrent la déclaration ne se produirent pas sans heurts, la rédaction de
la déclaration rédigée par Jefferson pour le Congrès Général reste empreinte de nombreuses
influences.
II. Des influences en marge de la Déclaration d’Indépendance
1. John Locke et l’affirmation des droits
La déclaration qui n’expose pas moins de 24 récriminations contre le roi expose dans son
deuxième paragraphe en termes généraux une philosophie politique démocratique. La déclaration
expose les causes de la révolution et les griefs des colons mais son but est aussi d’exprimer une
théorie de gouvernement, une théorie politique explicitement formulée.
La philosophie politique de la déclaration est universellement reconnue à la fin du XVIIème
siècle : Jefferson expliqua souvent que « la thèse selon laquelle la Déclaration ne contient pas
d’idées nouvelle est sans doute vraie. Richard Henry Lee la taxait de plagiat de Locke, mais
il ne m’incombait pas d’inventer, ni d’énoncer des idées qui n’eussent jamais été exprimées
auparavant » (in The Writings of Th. Jefferson, éd. de 1869, VII, 304). Ainsi, Jefferson aurait
seulement tenté d’exprimer l’esprit américain en harmonisant les différents courants d’idées de
l’époque, tels ceux d’Aristote, Cicéron, ou Locke. Cette philosophie est généralement tenue pour
acquise et puisque ces sentiments étaient courants en France et qu’ils se trouvaient exprimés
plus fréquemment et logiquement qu’ailleurs, on a pu penser que Jefferson et ses contemporains
ne s’étaient pas gênés pour reprendre les idées d’écrivains français ou qu’ils avaient subis
l’influence d’auteurs tels que Rousseau.
Mais en réalité ni Jefferson ni les autres américains n’avaient semble-t-il lu de nombreux
ouvrages français. « Les pères de la Révolution » reçurent plutôt avant 1776 l’influence de
certains écrivains anglais, notamment John Locke que la plupart avaient assimilés. Certaines
phrases de la Déclaration ressemblent ainsi au second traité de Locke sur le gouvernement.
Jefferson fut sans doute influencé par un ouvrage qui fut le reflet fidèle de sa pensée.
Le traité de John Locke (né en 1632, mort en 1704) fut une apologie de la révolution de 1688, écrit
en réponse à un partisan des Stuart. Les écrits de John Locke entrèrent de multiples manières
dans les colonies : beaucoup d’américains étaient formés dans les universités britanniques et on
ainsi pu accéder aux textes originaux… Les rédacteurs de la déclaration reprennent la manière
d’envisager la Révolution selon laquelle ils s’apprêtent à renverser un gouvernement existant
tout en voulant se montrer assez humain pour donner l’impression d’agir à bon droit, et donner
à leurs actes un caractère respectable et méritoire. Restait donc à trouver l’argument pour une
Glorieuse Révolution. des gouvernés ») de la même façon que Locke pour justifier la révolution :
dans les deux cas, la justification accompagna la Révolution. Georges III violant les droits
fondamentaux est assimilé à une rupture de ce contrat, et de fait, ces actes entérinent d’euxmêmes la nouvelle entité politique.
Jefferson suit le mouvement qui consiste à orienter son esprit en un sens opposé à celui de
l’ordre politique tyrannique dont la théorie repose sur le droit divin reconnus aux prêtres et aux
rois de régner. L’idée que l’autorité repose sur un contrat est ancienne, c’est une manière de
limiter souvent l’autorité des Princes au Moyen-Âge : vassal et suzerain avaient des relations de
réciprocité définies de manière très contractuelles. Les vassaux sont rois, les Princes sont vassaux
d’autres personnes, et tous étaient vassaux de Dieu. Mais Locke et Jefferson avaient largement
perdus ce rapport à Dieu, préférant le terme de Nature (« les lois de la Nature », le « Dieu de
la nature », l.4, tandis que l’on retrouve aussi les termes « Créateur », « Juge suprême de
l’univers » ou « la Divine Providence » l31) : on ne peut plus découvrir la volonté de Dieu que par
une connaissance des lois de la Nature, qui étaient sans doute affirmaient Jefferson « les lois de
la Nature créées par Dieu » : depuis Copernic on tendait à croire qu’il était possible de connaître
l’esprit de Dieu avec une plus grande précision en étudiant le mécanisme de l’Univers tangible
qu’en méditant sur les paroles des Livres Religieux. On a affaire à une déification de la nature,
et John Locke joua un rôle important parmi ceux qui entreprirent d’abattre les barrières entre
monde matériel et monde spirituel : c’est la philosophie de la sensation. Locke cherchait « une
forme modifiée du contrat originel ». Pour Locke, puisque la raison est le seul guide que Dieu ait
donné aux hommes, la raison est le seul fondement d’un gouvernement juste.
2. L’émergence d’une conscience nationale
Les influences britanniques ont donc nourries la Déclaration, mais il faut de même souligner
l’influence importante d’un pamphlet, tant sur la société américaine de l’époque que sur
la Déclaration qui va proclamer l’Indépendance : le Common Sense écrit par Thomas Paine.
Débarqué à Philadelphie en novembre 1774 ce britannique de 39 ans en 1776 après avoir été
successivement valet de ferme, matelot, fabricant de corsets, comptable au Trésor, percepteur
et surveillant dans un collège, et à qui rien jusqu’alors n’a réussi rencontre à Londres Benjamin
Franklin qui lui donne une lettre de recommandations. Il arrive à Philadelphie au début de
la guerre d’Indépendance et, bien qu’Anglais, embrasse avec ardeur la cause des rebelles.
D’abord journaliste au Pennsylvania Magazine, il en devient le directeur en 1774 et publie
en janvier 1776 un pamphlet, Le Sens commun (Common Sense), dont il se vend en moins
de six mois plus de cent mille exemplaires. Cette brochure a le mérite de traduire en un
langage simple, aisément compréhensible par tous, les aspirations de ceux-ci à l’indépendance
économique et politique. Paine montre que leurs intérêts sont diamétralement opposés à ceux
de la métropole qui ne cherche qu’à les maintenir sous le joug en freinant ou en interdisant
son développement industriel. Persuadé qu’aucun compromis ne peut plus intervenir, il prêche
la rébellion contre l’Angleterre et la lutte ouverte pour faire triompher les droits naturels de
l’homme. En quelques semaines, le nom de Thomas Paine est partout. Le Common Sense est
une œuvre violente, exagérée : Paine incite les derniers indécis à la rébellion, traitant Georges
III de « brute royale », la réconciliation serait « une ruine », décrétant que comme on ne
peut rendre l’innocence à la prostitution, on ne peut réconcilier Angleterre et Amérique ». Le
succès est au rendez vous et on observe un glissement de l’opinion américaine. Paine, comme
Jefferson lors de la rédaction de la Déclaration ne fut pas inventeur de nouvelles idées : il n’est
pas initiateur du concept d’indépendance mais il sut au bon moment rassembler des espoirs
éparse susceptible de fédérer et convaincre le plus grand nombre par la clarté de son exposé. Il
institue une véritable conscience de la nation aux colons en décrétant combien il est nécessaire
pour eux de se séparer de l’Angleterre. Paine déclare qu’il convient d’assurer liberté et sécurité
(l.14 : « la sûreté »), que l’Homme à des droits naturels et civils absolus et inaliénables (idées
que l’on retrouve l.9). Ces idées sur le contrat civil, la liberté, la démocratie seront reprises par
Jefferson.
Une autre mention de cette conscience nationale réside dans l’usage du « Nous » (l.22),
nouvelle preuve d’une volonté d’unanimisme, ce « nous » représente la nation, une nouvelle
entité en devenir devant une communauté internationale qui comprend que cette guerre n’est
plus une guerre civile, ni une simple rébellion à mater, mais un véritable conflit où il est possible
de « conclure la paix » ou « nouer des alliances » (l.29) avec des pays pouvant tirer avantage
d’une défaite de l’Angleterre.
3. Des omissions
Il est à noter que la version définitive de la déclaration d’indépendance des Etats-Unis ne
porte pas le mot Parlement, une omission significative car les problèmes ont été soulevés non pas
par les actes du roi- qui pourtant joue un rôle prépondérant dans la Déclaration- mais par ceux
du Parlement britannique dont l’autorité fut parmi tous les sujets de controverse qui amenèrent
la révolution le point le plus vivement discuté. La déclaration en fait ni mention de sa nature
ni de ses limites sur els colonies. Cette omission est née d’une volonté bien définie : impossible
d’écrire une liste de griefs sans se référer à des lois comme celle du timbre (stamp act), l’acte
déclaratoire, ou la loi sur le port de Boston, et encore d’autres… les rédacteurs pour faire
apparaître ces mesures eurent recours a la périphrase pour éviter de nommer le Parlement qui
els a adopté. Mais le mot Parlement ne figure jamais, comme si opposant un déni à la législature
britannique les rédacteurs de la rédaction feignaient même d’oublier son nom…
De plus, autre omission, celle des droits des sujets britanniques : durant toutes les controverses
les colons protestèrent contre le prélèvement fiscal parlementaire puisqu’ils jouissaient des
droits des sujets britanniques, affirmant par là que le Parlement britannique ne peut les taxer
sans leur consentement : dix années durant, les colons ont fondés leurs argumentation sur
le thème des droits des sujets britannique. Pourtant aucune mention n’en est faite dans ce
texte. En fait, dans le premier comme dans le deuxième cas, étant engagés dans une lutte
pour l’indépendance, les colonies ne pouvaient de manière simple et convaincante engager
leur argumentation sur ce thème, ce n’était pas une manière assez éloquente de faire
appel à l’humanité, rien ne laissant penser que celle-ci manifestât un vif intérêt pour les
sujets britanniques. C’est ce qui explique l’invocation de termes plus généraux, le recours
à la doctrine des droits naturels.
Il fallait simplifier la question et prouver que les droits
de l’homme avaient été bafoués de manière flagrante et indéniable. Pour mieux placer la
Révolution sous un bon jour, il était plus commode de supposer que le lien entre la Grande
Bretagne avait été assez lâche, un simple accord volontaire conclu par un peuple libre en
somme. La déclaration repose sur la présomption que les colonies s’étaient volontairement
jointes à l’Empire et qu’elles continuaient à en faire partie uniquement en vertu d’un accord
avec le roi.
Enfin, il convient de noter que le texte présenté par Jefferson qui arriva devant le Congrès le
28 juin fut amendée dans certaines parties et surtout amputée d’une clause condamnant la
traite des noirs. L’esclavage ne sera aboli que bien plus tard, car il représentait une manne
non négligeable de main d’œuvre gratuite, et certains écrivirent que le retard économique de
certaines colonies étaient dû à leur refus initial d’instituer l’esclavage (La Géorgie ne l’institua
qu’en 1750 par exemple).
Conclusion
La déclaration d’indépendance proclamée le 4 juillet 1776 à Philadelphie devant les
représentants du Congrès Général révèle la nécessité de rupture entre le continent dominé et
la puissante île européenne. Au terme d’un conflit d’abord larvé puis frontal, où l’Angleterre a
sous-estimée son adversaire américain « un être efféminé, tout à fait incapable et cependant
impatient de faire la guerre » d’après le général Murray commandant en chef au Canada,
la déclaration écrite par le jeune Thomas Jefferson et les « Pères fondateurs » proclame
au monde les raisons qui l’ont menés à notifier cette séparation. Une séparation pourtant
unilatérale, la Grande Bretagne continuant les hostilités. La déclaration aux multiples
influences qui fut signée par les représentants des Etats-Unis au fur et à mesure au cours de
l’année 1776 à su trouver un écho dans la noblesse libérale d’Europe, et trouver dans la France
un soutien déterminant malgré l’avis d’abord défavorable du jeune Louis XVI en la personne
du marquis de La Fayette, alors âgé de 19ans. Après différentes victoires des Insurgents
menés par Washington sur les loyalistes, la reddition de Yorktown marque la fin des hostilités
et la signature des traités de Paris et Versailles. Aujourd’hui encore, le 4 juillet reste une
date symbole pour les Etats-Unis, jour de l’Independence day, la fête nationale, même si la
Déclaration du 4 juillet 1776 ne constituait pas la Déclaration originale, et encore moins la date
de la reconnaissance de l’indépendance de ses anciennes colonies par la Grande Bretagne.
>> bibliographie
>> introduction
I. Une guerre, une Révolution : raisons et circonstances de la Déclaration
1- Une «Longue suite d’abus» …………………………….………………………………………………………………………………….
3- Le Congres Général. ………………………………………………………………………….……………………………….…………….
2- Une rupture inevitable? ……………………………………………………………………………………………………………………
II. Des influences en marge de la déclaration.
1- L’affirmation des droits. ……………………..…………………………….…………………………..…..…………..
2- Le Common Sense de Thomas Paine : le début d’une conscience nationale. …………....
3- Des omissions…………………………………………………………………….……………………………..……………
>> conclusion
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Encyclopédie Universalis 7, Encyclopedia Britannica, Paris, 2002
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www.archives.gov/national_archives_experience/declaration.html , Washington, 2003
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F. LEBRUN, L’Europe et le monde, XVIè - XVIIIè, collection U, Arman Colin, Paris, 2002
ALLAN NEVIS et HENRY STEEL COMAGER, America : The story of a free people, Little Brown & Co.,
Boston, 1942
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Paris, 2003
|Ouvrages Thématiques|
CARL BECKER, La déclaration d’indépendance, Collection Vent d’Ouest, Seghers, Paris, 1967
JEAN BÉRANGER et ROBERT ROUGÉ, Histoire des idées aux USA du XVIIIè siècle à nos jours, Collection
Le monde anglophone, Presses Universitaires de France, Paris, 1981
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Fayard, Paris, 1976
TOCQUEVILLE, De la démocratie en Amérique, Livres I et II, Folio Histoire, Gallimard, Paris, 1961
BERNARD VINCENT, La révolution américaine 1775-1783, tome2, Coll. Histoire Documentaire des
Etats-Unis, Presses Universitaires de Nancy, 1985

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