tude critique doc Histoire

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tude critique doc Histoire
T ES/L
ETUDE CRITIQUE D’UN DOCUMENT (Magnard p71).
Corrigé possible :
Cette affiche a été commandée à Ph. Grach par le Gouvernement provisoire de la
République française en 1944. Ce GPRF, dont le chef est Ch. de Gaulle, a pour vocation
d’administrer la France libérée jusqu’à la mise en place des nouvelles institutions républicaines (en
octobre 1946). Cette affiche célèbre donc la Libération de la France au cours de l’année 44 (entre
juin et décembre), grâce à l’unité de son peuple.
Comment cette affiche contribue-t-elle à l’élaboration du mythe résistancialiste ? Quelles en sont
les limites ?
1. Une affiche qui montre la France victorieuse.
– Marianne, allégorie de la République française, drapée dans le drapeau tricolore, baignée par le
soleil de la Libération, soulève une pierre tombale symbolisant la période sombre pendant laquelle
l’occupant nazi a maintenu le peuple français pendant quatre ans (occupation de la France Nord en
1940 puis de toute la France à partir de 1942). Elle libère la France seule, grâce aux actions de la
Résistance intérieure - les FTP - et extérieure - les FFL-, mouvements unifiés par De Gaulle en
1943 avec le CNR), sans l’aide des Alliés : or si le GPRF s’installe en France, c’est grâce au
débarquement anglo-américain en Normandie, le 6 juin 1944. La Libération signifie aussi le retour
aux valeurs républicaines, celles des Droits de l’Homme issues des Lumières (ce que la dominante
jaune en arrière plan peut rappeler).
2. Une affiche qui montre l’unité de la France libérée.
– Derrière Marianne, le peuple français renaît à la vie ; on peut voir aux poignets des chaînes
brisées dessinant le « V » de la victoire (signe aussi de la France Libre de De Gaulle) : ces chaines
sont celles des rigueurs de l’Occupation militaire imposée par les Allemands.
- Ce peuple est amaigri, épuisé (les difficultés de ravitaillement pendant la guerre), malgré
l’allégresse de la Libération. Ainsi une image des Français unis dans les souffrances de
l’Occupation est donnée, niant la diversité des situations (le sort des Juifs, la masse des rationnés
et les profiteurs…).
3. Les limites du résistancialisme affiché.
– La Libération débarrasse le territoire national de l’occupation allemande, mais aucune allusion au
régime de Vichy qui a activement collaboré avec les nazis (collaboration d’Etat pour rendre
l’Occupation acceptable, déportation des Juifs de France, lutte contre les Résistants...).
- Ambivalence : l’auteur de l’affiche lui-même, Ph. Grach, a longtemps été le graphiste de la
propagande de Vichy, avant de se rallier à la Résistance, ce qui en fait un « vichysto-résistant » (à
l’image d’autres personnalités qui ont connu le même parcours : F. Mitterrand par exemple).
- Cette unité célébrée est toute théorique : l’épuration (sauvage puis légale) commence dès la
Libération, le PCF concurrence les gaullistes, et la France est dépendante des Alliés (économie
détruite).
- Ceci explique sans doute pourquoi l’auteur adhère au mythe résistancialiste qui s’impose dès la
Libération : pour les gaullistes, il s’agit de réconcilier les Français divisés pendant ces heures
sombres et de renvoyer l’image d’un peuple uni dans la Résistance.
Cette affiche s’inscrit clairement dans la volonté de présenter l’image d’une nation unie, malgré
les divisions de la Libération, comme l’atteste l’épuration sauvage qui conduit à la mort de près de
10 000 personnes accusées de collaboration avec l’ennemi. Cependant cette unité célébrée permet
d’éviter la guerre civile et favorise l’édification de nouvelles institutions républicaines.