L`ulcère de l`estomac - Test
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L`ulcère de l`estomac - Test
La cause n°1 des ulcères? UNE INFECTION BACTÉRIENNE L’Helicobacter pylori engendre gastrites, ulcères et cancers de l’estomac. HELICOBACTER PYLORI L’ulcère de l’estomac dû à une bactérie On croit encore trop souvent que le stress ou une mauvaise alimentation sont responsables de l’ulcère gastrique, alors que sa cause principale est bactérienne. Non traitée, cette maladie peut entraîner des complications mortelles. Heureusement, on sait aujourd’hui comment en venir à bout. Julie Braun - Maurice Vanbellinghen L ’ulcère ressemble à un cratère qui traverse la muqueuse de l’estomac. Il est souvent douloureux et peut entraîner de graves complications : 15 à 20 % des ulcères non traités causeraient une hémorragie (mortelle dans 5 à 10 % des cas) et 10 % une perforation (fatale dans environ 20 % des cas). En Belgique, selon l’Enquête de Santé 2013 de l’Institut Scientifique de Santé Publique, près de 3 % des adultes auraient souffert d’un ulcère au cours des 12 derniers mois. > 127 testsanté 21 Au moins 1 Belge sur 5 PORTEUR DE LA BACTÉRIE Heureusement, la plupart du temps, celle-ci n’a pas de répercussions négatives. > Ce pourcentage augmente avec l’âge (il culmine chez les 65-74 ans). Démasquer le vrai coupable L’idée court toujours que l’ulcère de l’estomac est provoqué par le stress, une mauvaise alimentation (trop de piment, trop de café, etc.), le tabac ou l’alcool. En réalité, le responsable est le plus souvent une bactérie, l’Helicobacter pylori, qui cause 90 % des ulcères du duodénum et 70 % des ulcères de l’estomac. Elle a été dénoncée dans les années 80, par deux chercheurs australiens, Robin Warren et Barry Marshall. Leur découverte leur a valu le Prix Nobel de médecine en 2005. Autrefois, l’ulcère traité réapparaissait souvent, mais depuis qu’on peut éradiquer la bactérie, on guérit définitivement de nombreux malades. Il existe encore d’autres causes à l’ulcère. La plus importante est la prise chronique d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (ibuprofène, naproxène, diclofénac ...) ou d’aspirine. Ces médicaments sont parfois pris de manière continue, les premiers en cas de douleurs chroniques, l’aspirine notamment pour réduire le risque de récidive après un infarctus. Or, ils peuvent endommager la muqueuse de l’estomac. Ils seraient à l’origine d’environ 25 % des ulcères gastriques et 5 % des ulcères du duodénum. Plus rarement, l’ulcère peut encore avoir d’autres causes: d’autres médicaments ou certaines maladies (Crohn, syndrome de Zollinger-Ellison...). De la gastrite à l’ulcère L’infection par Helicobacter pylori entraîne toujours une gastrite chronique 22 testsanté 127 (inflammation de la muqueuse). Cependant, celle-ci ne s’accompagne pas toujours de symptômes et lorsqu’ils existent, ils sont assez vagues : douleurs abdominales, brûlures d’estomac, problèmes de digestion, sensation de plein ou de ballonnement après un repas, nausées, etc. La gastrite affaiblit la muqueuse dont l’action protectrice diminue. L’acide gastrique peut alors attaquer la paroi de l’estomac et y causer un ulcère. La présence d’Helicobacter pylori augmente également les risques de cancer de l’estomac. C’est la seule bactérie reconnue comme cancérigène pour l’homme. Le cancer de l’estomac Victimes: l’estomac et le duodénum L’ulcère peut prendre place dans l’estomac (ulcère gastrique) et/ou au début de l’intestin, dans le duodénum (ulcère duodénal). LE DUODÉNUM, PLUS SOUVENT ATTEINT Les médecins parlent d’ulcère "gastroduodénal", mais dans le langage courant, comme dans cet article, on privilégie les termes "gastriques" ou "de l’estomac". Pourtant, en Europe, c’est le duodénum qui est le plus souvent affecté. estomac ulcère duodénum LES CAUSES DES ULCÈRES DU DUODÉNUM 90% helicobacter pilori 5% médicaments (AINS et aspirine) 5% autres LES CAUSES DES ULCÈRES GASTRIQUES 70% helicobacter pilori 25% 5% médicaments (AINS et aspirine) autres est rare, mais souvent difficile à traiter efficacement. En Belgique, on compte environ 1 300 cas par an, à 70 ans en moyenne. Impossible de s’en protéger Au moins un Belge sur cinq serait porteur de l’Helicobacter pylori. On ignore comment la bactérie passe d’une personne à l’autre. Il y a différentes hypothèses (par la salive, par les selles, par vomissements ...), mais très peu de certitudes. Il n’y a donc pas de mesures avérees pour prévenir tout risque d’infection par la bactérie. La prise chronique de certains antidouleurs est la deuxième cause d’ulcères Des symptômes peu spécifiques Certains ulcères de l’estomac sont asymptomatiques, mais la plupart sont douloureux (souvent une forte sensation de brûlure), avec lourdeurs, éructations, nausées, ballonnements, crampes... Des symptômes aussi associés à d’autres problèmes de santé. Quand un médecin veut être certain qu’il s’agit d’un ulcère, il doit réaliser une gastroscopie : introduire par l’œsophage un tube permettant de visualiser l’intérieur de l’estomac et du duodénum. Par la même occasion, il peut prélever des échantillons pour analyses. Les complications d’une gastroscopie sont exceptionnelles, mais l’examen est désagréable et peut nécessiter une anesthésie (si le patient est très anxieux) qui comporte ellemême des risques. La plupart des gens présentant des troubles gastro-intestinaux ne retireraient aucun bénéfice d’une gastroscopie. Dans de nombreux cas, les plaintes gastro-intestinales peuvent être soulagées en modifiant certaines habitudes alimentaires, et éventuellement un traitement médicamenteux court pour réduire la production d’acide gastrique. Le médecin peut aussi proposer un test non invasif pour déterminer s’il y a infection par Helicobacter pylori (test respiratoire à l’urée, analyse des selles ou test sanguin). Ce n’est que dans des cas particuliers qu’il est recommandé de réaliser d’emblée une gastroscopie. Par exemple s’il y a des raisons de croire qu’il s’agit d’un cancer gastrique (notamment Autodiagnostic, mauvaise idée Des self-tests d’infection à l’Helicobacter pylori sont en vente, notamment via internet. Ils sont, pour la plupart, basés sur une analyse de sang. N’y recourez pas ! Il existe au moins trois raisons de les éviter. D’abord parce que si vous ne souffrez pas de symptômes inquiétants, il n’y a aucune raison de chercher à savoir si vous êtes infecté, la bactérie n’ayant, dans la plupart des cas, aucune conséquence négative. Ensuite, parce que si vous souffrez effectivement de symptômes inquiétants, il vaut mieux consulter un médecin. Enfin, parce que les autorités ne procèdent à aucun contrôle de ces tests et qu’on ignore donc totalement s’ils sont fiables. en cas de symptômes inquiétants chez un patient de plus de 55 ans présentant pour la première fois des troubles gastriques). Traitement médicamenteux Si des examens ont permis de déceler la présence de la bactérie, on recourt à une combinaison de médicaments : – un médicament de type inhibiteurs de la pompe à protons (IPP: oméprazole, pantoprazole, rabéprazole...) pour réduire la production d’acide gastrique et donc traiter l’ulcère; – et deux antibiotiques (par exemple, amoxicilline et clarithromycine) pour éradiquer la bactérie et éviter une récidive. Autrefois, cette thérapie était efficace dans plus de 90 % des cas. De nos jours, ce n’est plus que dans 70 % des cas. La bactérie est devenue plus résistante aux antibiotiques. En cas d’échec, on tente une autre combinaison. Lorsque les troubles gastro-intestinaux sont liés à l’utilisation chronique d’antiinflammatoires non stéroïdiens (AINS) ou d’aspirine, le patient arrête la prise lors du traitement par IPP (et antibiotiques s’il y a infection par la bactérie). Ce qu’il convient de faire pour éviter une rechute est discuté avec le médecin. Ainsi, quand la prise chronique d’AINS est nécessaire (ce qui est loin d’être toujours le cas !), on peut réduire le risque d’ulcères en prenant à long terme un IPP à titre préventif. Pas de dépistage systématique Imaginons que l’on organise un dépistage systématique de l’Helicobacter pylori. En l’éradiquant, on éviterait des ulcères, mais aussi des cancers gastriques, ce qui sauverait des vies. Cela pourrait sembler une bonne idée. Ce n’est pourtant pas le cas ! Une raison parmi d’autres ? En Europe, les cancers gastriques sont rares. On administrerait donc inutilement des antibiotiques à des dizaines de milliers de personnes. Or les antibiotiques possèdent des effets indésirables divers et on risquerait de favoriser l’émergence de souches bactériennes résistantes aux antibiotiques. Cela causerait donc plus de mal que de bien. 127 testsanté 23