La maladie d`Alzheimer n`est pas un mythe mais une réalité : défis

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La maladie d`Alzheimer n`est pas un mythe mais une réalité : défis
La maladie d’Alzheimer n’est pas un mythe mais une réalité : défis pour le 21e siècle
Alzheimer’s Disease International et ses organisations membres partout au monde savent
que la maladie d’Alzheimer et les autres démences ont de graves conséquences pour les
personnes atteintes et leurs proches. Pour les personnes de plus de 60 ans, il s’agit de la
deuxième cause d’années de vie vécues avec une incapacité (Organisation mondiale de la
santé, 2004).
Le vieillissement de la population et le nombre croissant de personnes de plus de 60 ans
entraînera une augmentation importante du nombre de personnes atteintes de ces
maladies, qui devrait doubler aux 20 ans, passant de 35,6 millions en 2010 à 65,7 millions
en 2030 pour atteindre 115,4 millions en 2050 (Alzheimer's Disease International, 2009).
Le risque de maladie d’Alzheimer et de démences apparentées augmente avec l’âge. Dès
l’âge de 60 ans, l’incidence et la prévalence doublent à peu près tous les 5 ans. Ainsi, tout
comme la plupart des maladies chroniques, les démences sont liées à l’âge. Ceci ne signifie
pas qu’elles fassent partie du processus normal de vieillissement. Il ne viendrait à l’idée de
personne de prétendre que le cancer du sein ou les AVC (accidents vasculaires cérébraux),
qui pourtant sont tout aussi liés à l’âge, font partie du processus normal de vieillissement. En
fait, l’incidence de la plupart des maladies augmente avec l’âge. C’est la règle bien plus que
l’exception. Elles n’en sont pas moins de véritables maladies dont il faut s’occuper.
L’ostéoporose, les maladies de la prostate, le délirium et autres sont toutes des affections
très fréquentes chez les personnes âgées et c’est aussi le cas de la maladie d’Alzheimer et
des démences apparentées. Même chez les personnes de 80 ans et plus, ces maladies ne
touchent qu’une minorité. On comprend maintenant très bien le processus du vieillissement
normal du cerveau. Son volume diminue progressivement dès le milieu de l’adolescence. À
compter de soixante ans, on détecte une détérioration lente et progressive de certaines
fonctions cognitives. Toutefois, ceci ne limite pas la capacité de gérer les activités normales
de la vie quotidienne et est compensé par une augmentation de la sagesse, des
connaissances et de la capacité de comprendre.
La maladie d’Alzheimer et les autres formes de démences ne touchent pas que les
personnes âgées. Elles touchent aussi des personnes de 30 à 50 ans, souvent dans une
même famille. Quand la maladie d’Alzheimer touche des personnes aussi jeunes, on ne
peut certainement pas considérer qu’il s’agit de vieillissement normal.
Les démences constituent un syndrome caractérisé par un déclin anormalement rapide des
capacités cognitives, assez prononcé pour entraîner une incapacité significative, la perte
d’autonomie et un besoin de soins importants. Elles sont invariablement associées à une ou
plusieurs pathologies du cerveau, notamment des dépôts d’amyloïdes et de protéine tau
(maladie d’Alzheimer), les maladies cérébrovasculaires (démence vasculaire), les corps de
Lewy corticaux (démence à corps de Lewy) et la dégénérescence fronto-temporale
(démence fronto-temporale). Il est de plus en plus admis que, même si on observe parfois
les formes pures de ces sous-types de démences, les formes mixtes sont beaucoup plus
courantes. C’est sans doute pourquoi il n’existe aucune corrélation claire et absolue entre la
gravité de ces pathologies et la présence ou la gravité du syndrome démentiel clinique.
Évidemment, la complexité du processus pathologique et l’état partiel de nos connaissances
actuelles des interactions entre les différents éléments impliqués ne sont pas une raison
pour remettre en question leur existence. Les démences sont aussi associées à des
maladies neurologiques bien connues (par exemple la maladie de Parkinson), qui se
manifestent avant ou après l’apparition des démences ou simultanément.
La plupart des gouvernements et des systèmes de santé et d’aide sociale ne sont pas
préparés pour faire face à l’augmentation des services qui seront nécessaires pour
composer avec la croissance rapide du nombre de personnes atteintes. Au stade initial,
celles-ci auront besoin de soutien pour gérer leur vie quotidienne tout en demeurant chez
elles. À mesure que progressera la maladie, elles dépendront de plus en plus de l’aide
d’autres personnes pour manger, s’habiller et assurer leur hygiène personnelle.
Le diagnostic de maladie d’Alzheimer ou de démences apparentées est la clé qui permet
aux personnes atteintes et à leurs proches d’accéder aux mesures de soutien et aux
services dont elles ont besoin. Prétendre que ces maladies sont un mythe (Whitehouse,
2008) pourrait compromettre l’accès des ces personnes aux soins et aux traitements. La
recherche permet d’espérer qu’à l’avenir, le diagnostic puisse être posé plus tôt et de
manière plus fiable (Dubois B et al, Lancet Neurology, 2007; Reisberg et Gauthier, 2008,
Jagust et al., 2009, Petersen et Trojanowski, 2009) et que les différentes causes de
démences et leurs pathologies sous-jacentes soient mieux comprises (Aisen, 2009),
permettant de mettre au point des traitements plus efficaces et de retarder, voire prévenir
ces maladies (Khachaturian and Khachaturian, 2009). D’ici là, les traitements
pharmacologiques et psychologiques existants, dont l’efficacité a été démontrée
scientifiquement, peuvent améliorer les fonctions cognitives, faciliter la gestion des
problèmes de comportement et alléger le fardeau des aidants. Les stratégies Alzheimer
nationales récemment instaurées dans plusieurs pays à revenu élevé ciblent le diagnostic
précoce, allié à l’information, au traitement et au soutien à long terme (Conférence des
ministres australiens de la santé, 2006, Banerjee et Wittenberg, 2009, Ministère de la Santé,
2009). Une approche semblable mais plus graduelle est préconisée pour les pays à moyen
et faible revenu, à commencer par le diagnostic et la prestation de soins de santé et services
de base (Prince et al, 2009, Dias et al 2008, et références tirées du Programme mhGAP de
l’OMS).
Demandez à une personne atteinte qui ne peut plus se souvenir d’une conversation ou de la
façon d’exécuter une tâche simple si la maladie d’Alzheimer est un mythe. Ou posez la
question à un proche aidant qui assume la prise en charge d’un être cher, 7 jours sur 7,
24 heures sur 24. Demandez à un scientifiques si une pathologie, les plaques et écheveaux
neurofibrillaires qu’on retrouve dans la maladie d’Alzheimer, est un mythe, alors que
d’autres, telles que les AVC multiples ou l’accumulation de progranuline dans la démence
frontotemporale familiale ne le sont pas. Tous vous donneront la même réponse.
Partout au monde, les recherches ont démontré que la majorité des personnes atteintes ne
sont pas diagnostiquées et qu’elles et leurs proches ne reçoivent aucun soutien. Les plus
grands obstacles à l’accès aux soins de santé sont les carences de dépistage, la peur et la
stigmatisation. Sans accès à des soins, le poids des maladies de démence sera d’autant
plus grand. Les priorités mondiales sont de démystifier la maladie d’Alzheimer et les autres
formes de démences, d’en parler ouvertement et de démontrer comment on peut aider les
personnes qui en sont atteintes et leurs proches.
Daisy Acosta
Présidente d’Alzheimer’s Disease International
Bengt Winblad
Président du panel consultatif médical et
scientifique
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