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The Long-Term Athlete Development model: Physiological evidence and application
Source: Paul Ford and al. (2011): The Long-Term Athlete Development model: Physiological evidence and
application: Physiological evidence and application, Journal of Sports Sciences
1. Introduction:
Le modèle "Long-term Athlete Development" ("LTAD model" Cf. schéma) que l'on peut traduire par
"développement de l’athlète à long terme" est déjà largement utilisé par certaines "fédérations" sportives,
notamment en Grande-Bretagne. Ce modèle, basé sur la notion de "fenêtre d'opportunité" (appelée aussi
"période sensible" ou "période critique") tâche d'établir une répartition des charges d'entraînement selon des
périodes au cours de l'enfance et de l'adolescence des sportifs afin d'en développer le potentiel en respectant
les rythmes individuels de maturation.
Le modèle LTAD définit 4 phases : la phase "fondamentale", la phase "d’entraînement à s’entraîner", la phase
"d’entraînement pour la compétition" et la phase "d’entraînement pour gagner" (Balyi et Hamilton, 2004). Ces
phases, comme les "fenêtres d’opportunité", sont liées à l’âge chronologique des athlètes. Il revient alors à
l’éducateur de prendre en compte les différences de maturation interindividuelles existantes entre les athlètes
d’un même âge.
Balyi et Hamilton (2004), à l’origine de la création de ce modèle, le présente comme un modèle "en
construction" en raison d'un manque de données empiriques et de validité scientifique. En outre, un des points
faibles du modèle reste la notion de "fenêtres d’opportunité". En effet, il n’y a aucune preuve scientifique que
le fait de ne pas exploiter ces "périodes sensibles" inhibe le développement de l’athlète ou aboutisse à une
stagnation de ses performances. Bailey et al. (2010) se demandent en fait si ces "fenêtres d’opportunité"
augmentent réellement le potentiel maximal de l’athlète ou si elles lui permettent uniquement d’accéder de
manière plus précoce à ce potentiel.
L'objectif de cette revue scientifique est d’examiner les composantes physiologiques prises en compte dans le
modèle LTAD au regard de leur entraînabilité afin de vérifier les prescriptions du modèle et d'évaluer le
concept de "fenêtres d’opportunité".
2. L’impact de la croissance et de la maturation sur la performance athlétique :
1) La condition physique :
D’un point de vue physiologique, la condition physique représente la capacité à réaliser des
mouvements fondamentaux (marche, course, saut, lancer) et des habiletés dans des tâches sportives
fondamentales (attraper, sauter,…) qui permettent à l’enfant (ou l’adulte) de pouvoir évoluer dans un
ensemble large d’activités physiques (Higgs et al., 2008).
Par exemple, les enfants ayant des difficultés dans les apprentissages moteurs montrent une moindre
condition physique, et sont moins actifs et disciplinés pendant les cours d’EPS. Ce sont également
ceux qui font le moins d’activités physiques pendant les vacances scolaires (Bouffard, Watkinson,
Thompson, Dunne et Romanow, 1996).
Le développement des habiletés motrices de base commence à la naissance et se poursuit jusqu’à 1112 ans selon la complexité du mouvement travaillé (Gabbard, 1992).
La littérature scientifique soutient, en partie, le modèle LTAD (Cf. schéma). Tout d’abord d’un point
de vue neurologique, Rabinowicz (1986) met en évidence 2 pics de maturation du cerveau pendant
l’enfance : un premier entre 6 et 8 ans et un second entre 10 et 12 ans. Si ces pics coïncident avec les
"fenêtres d’opportunité" présentées dans le modèle LTAD (Higgs et al., 2008), rien ne démontre que
ces 2 périodes offrent une plus grande sensibilité à l’entraînement. Et même si Graf et al. (2005) ont
montré qu’une intervention à long terme conduite sur des écoliers pendant 3 ans peut immédiatement
améliorer les composantes de la condition physique chez des enfants entre 6 et 9 ans, une autre étude
réalisée après une intervention d’un an sur des enfants n’a pas montré d’effet sur la condition
physique 6 ans après (Barnett et al., 2009). Si ces 2 études n'ont pas évalué l’impact de cette
intervention sur la qualité des mouvements, elles contredisent néanmoins le concept de "fenêtres
d’opportunité" du modèle LTAD qui permettrait d’améliorer la condition physique à long terme. En
outre, Donnelly (2003) suggère l’existence d’une "barrière de compétence" selon laquelle l’accès à
des habités plus relevées, spécifiques au sport pratiqué, est conditionné par l’antériorité de la
construction des mouvements fondamentaux. Nous voyons ainsi le manque de consensus existant
dans la littérature actuelle concernant les effets à long terme de l’apprentissage précoce des
mouvements fondamentaux sur l’acquisition ultérieure des habiletés spécifiques à la discipline
concernée. Enfin, plusieurs auteurs s’accordent pour souligner l’importance des consignes lors de
l’apprentissage d’habiletés et de gestes complexes (Flinchum, 1975, Gabbard, 1992).
Pour résumer (me semble plus approprié ici), quelques preuves physiologiques étayent l’idée selon
laquelle l’entraînement basé sur la pratique régulière de mouvements fondamentaux et d’habiletés
spécifiques du sport pratiqué pendant l’enfance permet une adaptation neuromusculaire accrue.
Cependant des recherches longitudinales plus importantes sont nécessaires pour quantifier le concept
de "fenêtre d’opportunité" liée aux mouvements fondamentaux et aux habiletés spécifiques ainsi que
la répercussion de leur entraînement sur le modèle LTAD.
2) La performance aérobie :
Le développement de la filière aérobie et son impact sur la performance dépendent de la maturation du
système cardiovasculaire central et périphérique, de la croissance du système musculaire, des
capacités cellulaires, de la composition corporelle ou encore des capacités métaboliques propres à
chaque individu (Rowland, 1985). Le degré d’influence de chacun de ces facteurs sur le potentiel
aérobie varie en fonction de l’âge et de la maturation (Naughton, Farpour-Lambert, Carlson, Bradney
et Van Praagh, 2000). Par exemple, le O2max, paramètre d'évaluation du potentiel aérobie (Jones et
Carter, 200) est corrélé positivement avec la taille. (Armstrong and Welsman, 1994 ; Bouchard,
Malina and Pérusse, 1997 ; Viru et al., 1999)
D'après certains auteurs, différentes méthodes d’entraînement permettraient d’augmenter la capacité
aérobie des enfants et des adolescents (Viru et al, 1999), par exemple avec un entraînement prolongé à
haute intensité (Tolfrey, Campbell et Batterham, 1998 ; Wiliams, Armstrong et Powell, 2000).
D'autres auteurs ont mis en évidence le fait que certaines périodes au cours de la maturation de
l'individu étaient plus ou moins propices à un développement aérobie. L'hypothèse de "la gâchette"
("Trigger hypothesis" : Katch, 1983 ; Rowland, 1997) suggère ainsi une croissance exponentielle du
O2max lors du pic de croissance et de puberté (Baquet et al.,2003).
Toutefois les études divergent dans ce domaine et le développement du O2max serait maximal entre
12 et 16 ans à la fois chez les garçons et les filles pour certaines, alors que pour d'autres ce pic
apparaitrait entre 10 et 16 ans pour les filles et entre 7 et 13 ans pour les garçons (Viru et al., 1999).
En outre, la dépense énergétique des enfants et des adolescents est plus importante que celle des
adultes pour un même effort aérobie (Schepens et al., 2004) en raison des différences de taille, de
l’immaturité neuromusculaire des enfants ou encore de difficultés à délivrer l’oxygène aux muscles
concernés (Cavagna et al.1983 ). Il est donc essentiel de travailler l’économie de mouvement à partir
d’activités physiques et d’exercices tout au long de l’enfance et l’adolescence (Baquet et al., 2003).
Concernant le concept de "fenêtre d’opportunité", Naughton et al. (2000) soutiennent que les progrès
de la filière aérobie sont conditionnés par l'importance des sécrétions hormonales lors de la puberté
notamment. Un entraînement aérobie en l'absence de telles sécrétions hormonales verrait une réponse
adaptative plus faible, supportant ainsi le concept de "fenêtre d'entraînabilité". D’autres auteurs
mettent en évidence une entraînabilité optimale de la filière aérobie avant le pic de croissance avec
des progrès du O2max de 8,8% chez des filles et 10,1% chez des garçons après un entraînement
aérobie réalisé avant le pic de croissance (Rowland, 1975). Webber et al., 1976, montrent que
l’entraînabilité de la filière aérobie est optimale dans la période entourant le pic de croissance.
Les désaccords entre les études rendent difficile les applications pratiques pour les entraîneurs. De
nouvelles études longitudinales sont nécessaires pour déterminer l’influence de la croissance sur le
potentiel aérobie mais également la validité de la "fenêtre d’opportunité" et son influence sur le
potentiel aérobie de l’athlète à l’âge adulte. En attendant, il apparaît essentiel pour les éducateurs de
développer le potentiel aérobie des jeunes athlètes tout au long de leur enfance et de leur adolescence
(Shephard, 1992).
3) La performance anaérobie
A.
La vitesse :
Jusqu'à 10 ans, les filles et les garçons ont la même vitesse en sprint (Borms, 1986). Une première
"fenêtre d’opportunité" apparaitrait entre 5 et 7 ans (Viru et al. 1999). A partir de 12 ans les progrès
en vitesse diminuent de manière importante pour les filles (Whitall, 2003). Les filles non sportives
atteignent à cet âge leur vitesse maximale (Lee et Coladarci, 2004). Une seconde période sensible
apparait à 12 ans pour les filles et entre 12 et 15 ans chez les garçons (Borms, 1986).
L’interrelation des nombreux facteurs intervenant dans le développement de la vitesse pendant
l'enfance rend difficile l’identification précise des mécanismes responsables du gain de vitesse. Viru
et al. (1999) soutiennent le lien entre la première "fenêtre d’opportunité" (entre 5 et 7 ans) et le
développement du système nerveux central et de la coordination jusqu’à 7 ans, âge à partir duquel la
coordination des habiletés motrices locomotrices se stabilise (Whitall, 2003).
L’augmentation de la taille et de la longueur des muscles pendant l’adolescence et donc pendant la
seconde "fenêtre d’opportunité" étaye l’hypothèse de l’influence de la maturation sur le
développement de la vitesse même si aucun lien direct n'a été démontré chez des enfants de 11 à 13
ans (Butterfield and al. 2004). L’augmentation de la concentration intramusculaire en substrats et
enzymes anaérobies peut aussi expliquer le développement de la vitesse avant et pendant
l’adolescence (Eriksson, 1980). D’autres hypothèses sont également évoquées : l’architecture des
muscles et des tendons, la surface de la jonction musculo-tendineuse (Ovalle, 1987), une
augmentation jusqu'à 20 ans de la raideur du système musculo-tendineux (devenant 10 fois
supérieure à celle de l’enfant) (Lin, Brown et Walsh, 1997). Ce dernier facteur est lui-même
influencé par l’activité musculaire réflexe (Grosset, Mora, Lambertz et Perot, 2007), la co-activation
(Lambertz, Mora, Grosset et Perot, 2003), le taux de contraction (Lin et al., 1997) et la fréquence de
propagation des potentiels d’action (Whitall, 2003). L’ensemble de ces paramètres qui évoluent au
cours de l’enfance permettraient l’augmentation de la production de vitesse.
L’actuel modèle LTAD propose 2 "fenêtres d’opportunité" permettant de maximiser le gain de
vitesse pour les enfants. La première apparait entre 5 et 7 ans pour les filles et les garçons tandis que
la seconde se manifeste entre 11 et 13 ans chez les filles et 13 et 15 ans chez les garçons. Cette
différence de 2 ans entre les filles et les garçons serait due à des facteurs de maturation et plus
précisément à l’évolution hormonale aboutissant à l’hypertrophie des fibres rapides à la fois chez les
garçons et les filles (Viru et al. 1999).
Les recherches concernant l’entraînabilité de la vitesse chez les jeunes sont rares. Venturelli et al.
(2008) ont montré que le gain de vitesse était similaire chez des footballeurs préadolescents après un
entraînement de coordination ou un entraînement traditionnel de vitesse mettant ainsi en évidence la
moindre importance des facteurs de maturation par rapport aux facteurs nerveux et de coordination.
Les améliorations de la vitesse durant la période entourant le pic de croissance peuvent s’expliquer
par l’augmentation de la longueur des membres inférieurs, facteur non entraînable. Toutefois, ce
changement peut également induire des problèmes de coordination peu favorables au gain de vitesse
et responsable du phénomène de "maladresse de l’adolescent" (Beunen et Malina, 1988).
D’autres recherches essayent d’expliquer les mécanismes responsables du gain de vitesse par
l’entraînement pendant l’enfance. Le sprint augmente la concentration des substrats et enzymes
utilisés par le métabolisme anaérobie chez des enfants de 11 ans (Eriksson, 1980) et chez les
adolescents (Cadefau et al., 1990 ; Fournier et al., 1992) mais c'est une augmentation réversible et
plus faible que chez les adultes (Fournier et al., 1982). L’amplitude de cette manifestation et sa
rapide disparition après une courte période de désentraînement montrent que les facteurs
métaboliques ne suffisent pas à expliquer le gain important relevé pendant la "fenêtre d’opportunité"
durant l’enfance. Dans une étude de 6 mois menée sur de jeunes footballeurs, Gravina et al. (2008)
mettent en évidence une corrélation faible mais significative (r=0,34, P < 0,05) entre l’évolution des
performances sur sprint et la concentration de testostérone. Cette corrélation ne peut donc expliquer
à elle seule une relation entre la maturation et le développement de la vitesse.
Pour résumer, l'augmentation de la vitesse chez l’enfant dépend de multiples facteurs qui évoluent
eux-mêmes à différentes vitesses en fonction de l'individu, de son âge et de son niveau de
maturation. Par conséquent, l’entraînabilité des facteurs associés au développement de la vitesse
pendant l’enfance reste à préciser.
B.
La force
Le développement de la force musculaire est multifactoriel et sous-tendu par des facteurs nerveux,
musculaires et biomécaniques (De Ste Croix, 2008). L’interaction complexe de ces facteurs rend
difficile l’étude de la force pendant la croissance et l’enfance alors même que la force est une
composante essentielle de la performance dans de nombreuses activités. A cela s'ajoute des
difficultés méthodologiques pour mesurer la force interne et la force musculaire externe produite.
Même si les études concernant les variations de la force des membres inférieurs en fonction de l’âge
et du sexe sont fiables, il faut cependant rester prudent sur leur transfert à d’autres articulations. En
effet, le développement de la force semble être lié à la fois à une action musculaire et à une
articulation spécifique (De Ste Croix, 2008).
La force augmente chez les garçons et les filles jusqu’à environ 14 ans. A partir de cet âge, elle
commence à stagner chez les filles et augmenter fortement chez les garçons. A partir de 18 ans on
peut noter une certaine simultanéité chez les garçons et les filles. L’âge auquel la différence de force
entre les sexes apparait semble dépendant du groupe musculaire sollicité et de l’action musculaire
réalisée : les différences de force entre les sexes apparaissent plus tôt pour le haut du corps que pour
le bas du corps (Round, Jones, Honour et Nevill, 1999). L'interaction entre les facteurs contribuant à
la production de la force chez les enfants et les adolescents reste complexe. La plupart des études ont
montré que la maturation n’exerce pas un effet indépendant sur la production de la force, notamment
lorsque la stature et la masse corporelle sont prises en considération (De Ste Croix et al., 2002).
L’affirmation selon laquelle la section transverse du muscle est le paramètre le plus important dans
le développement de la force pendant l’enfance ne tient également pas au regard de l’influence
d’autres paramètres (Deighan, Armstrong et De Ste Croix, 2003 ; De Ste Croix et al., 2002). La taille
de l’enfant semble jouer un rôle clef dans le développement de la force. Elle dépendrait du pic de
croissance et de l’augmentation du bras de levier musculaire (Wood et al., 2004).
Il a été prouvé que l’entraînement de la force était sûr et efficace chez les enfants dès l'âge de 5 ans,
lorsqu’il est correctement conduit et contrôlé (Christou et al., 2006). Il permet aux jeunes
d’augmenter leur force musculaire, d’améliorer leur "composition corporelle" (Sothern et al., 2000),
d’améliorer leur performance motrice (Christou et al., 2006) et de réduire le risque de blessure
(Faigebaum et al., 2009). Cependant des désaccords subsistent concernant l'amplitude des progrès :
de 5,3% (Faigebaum et al., 1999) à 87% (Faigebaum et al., 1993) pour un public non entraîné. Le
modèle LTAD soutient que l’entraînement de la force est possible à tout âge, et qu'une "fenêtre
d’opportunité" existe, pour les garçons, 12 à 18 mois après le pic de croissance et, pour les filles,
immédiatement après l’apparition des premières règles (Balyi et Hamilton, 2004). Cependant,
seulement 3 études ont examiné l’entraînabilité de la force au travers l’évolution de la maturation
des individus (Lillegard and al., 1997 ; Pfeiffer and Francis, 1986 ; Vrijens, 1978). Vrijens (1978) a
trouvé des progrès plus importants de la force des bras et des jambes après 8 semaines
d'entraînement pour un groupe post-pubère (16,8 ans) que pour un groupe pré-pubère (10,5 ans),
mais des progrès plus importants pour ces derniers au niveau du bas du dos et des abdominaux. Les
deux autres études du même type (Lillegard et al., (1997); Pfeiffer and Francis,1986) n’ont pas
trouvé de différences entre 2 groupes d’âge et de maturation différents.
Ainsi, dans le modèle LTAD, l'existence de "fenêtres d’opportunité" spécifiques à l’entraînement de
la force doit encore être démontrée notamment par des recherches s'intéressant à la charge
d’entraînement (volume, fréquence, charge et repos). Ces nouvelles données permettraient d’établir
un programme d’entraînement optimal pour le développement de la force chez les enfants et les
adolescents.
C.
La puissance
Le développement rapide de la puissance musculaire mis en évidence chez les jeunes pré-pubères de
5 et 10 ans (Branta et al., 1984) est largement attribué à l’amélioration de la coordination neuromusculaire. Une seconde amélioration de la puissance à l’apparition de la puberté chez les filles
entre 9 et 12 ans et chez les garçons entre 12 et 14 ans (Beunen, 1997) est marquée par
l’augmentation de la puissance des membres inférieurs à 14 et 15 ans (Blanksby et al., 1994). Cette
seconde augmentation de la puissance est liée à des facteurs hormonaux, musculaires et mécaniques
causés par la puberté. En mettant en parallèle la courbe d’évolution de la puissance des membres
inférieurs et celle du pic de croissance, il apparaît que cette augmentation de la puissance démarre
1,5 an avant le pic de croissance et augmente encore de 0,5 à 1 an après le pic de croissance (Beunen
et Malina, 1988). Comme pour la force musculaire, alors que l’augmentation de la puissance
musculaire peut apparaitre lors du pic de croissance, le pic de la puissance musculaire coïnciderait
davantage avec la période marquant la prise de poids maximale. Cela suggèrerait qu’à la fois
l’augmentation de la masse musculaire et l’activation des unités motrices sont fortement liées à la
puissance musculaire. De plus, l’augmentation de la longueur des jambes et de la prise de masse
corporelle, liées à la croissance de l’individu, ont été associées à l’amélioration de la hauteur atteinte
lors d’un saut vertical chez des adolescents, malgré la prise de poids associée (Buttertfield, 2004).
Comme pour les autres composantes physiques, des différences liées au sexe existent également en
ce qui concerne la puissance musculaire de la pré à la post-adolescence. Des différences plus
marquées apparaissent à l’âge de 14 ans, résultant de l’augmentation de la longueur des jambes et de
l'augmentation de volume musculaire chez les garçons (Temfemo et al., 2009). Les observations de
données transversales révèlent une différence liée au sexe pour des enfants de 7 à 11 ans lors de
hauteurs moyennes atteintes sur un saut avec départ en contre-haut (Isaacs, 1998). Butterfield et al.,
ont noté des différences de performance sur un saut vertical entre des garçons et des filles âgés de 11
à 13 ans, et ont aussi souligné que la progression des performances des garçons sur ce saut dépassait
celle des filles de 1,91cm tous les 4 mois sur une période d’entraînement de 9 mois. Des recherches
ont également montré des différences notables entre les stades de maturation sexuelle atteints et les
performances lors du test de détente verticale pour les garçons de 11 à 16 ans, à tailles et poids
égaux (Jones, Hitchen et Stratton, 2000).
Il faut également souligner que l’un des aspects les plus importants résultant de la maturation
sexuelle et permettant un augmentation de la puissance musculaire produite par les garçons pendant
la poussée de croissance semble être l’augmentation de la concentration des hormones androgènes
comme l’hormone de croissance, la testostérone et l’hormone thyroïdienne (Rogol, 1996, Viru et al.,
1999). Plus récemment, l’amélioration de la coordination neuromusculaire a été mise en évidence
par l’augmentation des performances sur un test de détente verticale et par la capacité d’atténuer les
forces lors de la réception (Quatman, Ford, Myer et Hewett, 2006). Parmi les sujets féminins testés,
une diminution de la performance sur le test de détente verticale et de la force de décollage a
souligné les effets contrastés (par rapport aux garçons) de la maturation sur la force explosive des
membres inférieurs.
En plus de la section transversale musculaire (Jacobs, Sjodin and Svane, 1982), les changements
neurologiques (Blinkie et Bar-Or, 1996), la coordination motrice (Isaacs, 1998), la composition des
fibres musculaires (Mero, Jaakkola et Komi, 1991) et l’expérience d’entraînement (Bencke and al.,
2002) sont les mécanismes avancés pour expliquer la moindre force musculaire explosive chez les
jeunes. Chiodera et al. (2008) ont testé un entraînement basé sur des habiletés physiques 3 fois par
semaine pendant 33 semaines chez des garçons et des filles de 6 à 10 ans. Les résultats ont révélé
une nette amélioration (6-10cm, P<0,01) sur un saut en longueur pour tout âge et chaque sexe. Ceci
laisse à penser que l’entraînement et la coordination, tout comme la croissance et les facteurs de
maturation, peuvent avoir un effet bénéfique sur l’amélioration de la puissance pendant l’enfance
chez les garçons et les filles. Les données sont néanmoins limitées en ce qui concerne les effets
combinés de la maturation et de l’entraînement sur l’évolution de la puissance des membres
inférieurs ce qui rend difficile la clarification de la notion de "fenêtre d’opportunité".
Le modèle LTAD ne donne aucune indication concernant la ou les "fenêtres d’opportunité" pour le
développement de la puissance pendant l’enfance. Peut-être parce que les "fenêtres d’opportunité"
de la force et de la vitesse sont déjà incluses dans le modèle et sont des composantes de la
production de la puissance. Cependant, étant donné l’importance de la puissance musculaire sur la
performance, il pourrait être intéressant de connaitre la période idéale pendant laquelle il faudrait
réaliser des entraînements de la puissance pendant l’enfance et l’adolescence.
3. Le modèle LTAD, les "fenêtres d’opportunité" : résumé et implications
Nous pouvons décrire ces "fenêtres" comme des périodes critiques/sensibles pour accélérer le développement
de la performance motrice par l’entraînement pendant une période de maturation définie (Guzalovsky, 1977).
Néanmoins ce concept doit être validé par de plus amples recherches. L’affirmation selon laquelle conduire un
entraînement d’une des composantes étudiée en dehors de ces "fenêtres d’opportunité" va aboutir à de
moindres résultats et pourrait être néfaste pour de futures adaptations (Zaichkowsky et al., 1980) manque de
preuves scientifiques. Les difficultés de connaissance de la charge d’entraînement chez les jeunes peuvent être
à l’origine des désaccords au sein de la littérature scientifique.
L'affirmation des auteurs du modèle LTAD selon laquelle si les jeunes athlètes n’utilisent pas les "fenêtres
d’opportunité" pour s’entraîner, ils ne parviendront pas à leur potentiel maximum est injustifiée. Encore une
fois, les entraîneurs et les coachs devraient être davantage conscients de l’importance de solliciter et
d’entraîner toutes les composantes de la condition physique et de la performance pendant l’enfance et ceci
même pendant les périodes dites "non-sensibles", principalement pour tenir compte des différences de rythme
dans la vitesse de développement des enfants et parce que toutes ces composantes sont entraînables dans une
certaine mesure (Suslov, 2002). En appliquant ceci, les entraîneurs pourront également éviter les problèmes de
spécialisation précoce et optimiser le développement de la condition physique générale des jeunes athlètes.
Enfin, même si le modèle LTAD offre un cadre clair et facile d’utilisation pour les entraîneurs, il ne faut pas
oublier que l'individualisation reste un des principes fondamentaux de l’entraînement (Norris and Smith,
2002). Ce principe est une des limites les plus importantes du modèle. Une des clefs est donc la manière avec
laquelle ce modèle est compris, interprété et utilisé par les entraîneurs.