Tryo, toujours vert Nouvel album, Ladilafé

Transcription

Tryo, toujours vert Nouvel album, Ladilafé
Reggae français
Tryo, toujours vert
Nouvel album, Ladilafé
L’Hymne de nos Campagnes, France Telecom… autant de ritournelles
joyeuses qui marquèrent de façon indélébile la fin des années 90, et
propulsèrent la carrière de Guizmo, Christophe, Manu et Daniel, alias Tryo.
Plus de quinze ans plus tard, le groupe, insensible aux modes capricieuses,
continue de remplir des salles prestigieuses et de propager ses chansons
festives, tissées de sincérité et d’engagement. Aujourd’hui, ils reviennent avec
un cinquième album,Ladilafé. Rencontre avec Christophe (chant guitare,
piano) et Daniel (percussions).
RFI Musique : Le titre de votre disque Ladilafé, s’inspire de la structure de production
créée par Patricia Bonnetaud, disparue en février 2012. Un hommage pleind’émotion ?
Tryo : "Pato" pour les intimes, a signé Tryo en 1998 : elle fut la première à nous accorder sa
confiance, la première sur laquelle nous avons su compter pour nous faire connaître et nous
protéger. L’expression réunionnaise Ladilafé signifie "Elle l’a dit, elle l’a fait", mais pour nous,
c’est aussi Lady la Fée. Lorsqu’elle fut atteinte d’une grave maladie, nous avons créé, de son
vivant, cette chanson, pour l’emmener partout avec nous, dans nos cœurs et sur nos scènes…
La maladie l’a finalement emportée au terme d’une longue lutte. C’est un hommage fort,
personnel mais en même temps nous saluons une grande dame qui a beaucoup œuvré pour la
musique. Dans ce disque, nous honorons son combat, sa leçon de courage jusqu’au bout : un
hymne à la vie !
Les thèmes de ce nouveau projet portent toujours la griffe "écolo" de Tryo, entre légèreté,
côté festif et engagement :
On écrit nos chansons en solo (principalement Guizmo et Christophe), puis nous nous
retrouvons, comme en juin 2011 à La Réunion, pour confronter nos créations, nous les faire
découvrir : le baptême ! L’album résulte donc d’une somme de nos émotions individuelles et
collectives, de ce qui nous touche, nous agace et nous bouleverse. Alors, sans être donneurs de
leçons, on se retrouve parfois à voir en Tryo une tribune pour pousser des coups de gueule.
C’est le cas deBrian Wiliamson, par exemple, où nous dénonçons les dérives homophobes de
certains chantres du reggae qui prônent la tolérance. C’est le cas aussi de Marine est là où nous
fustigeons la tête du FN… Mais, aujourd’hui, il devient de plus en plus difficile d’aborder les sujets
qui fâchent de manière frontale, et cela concerne tant les chanteurs que les humoristes ou les
journalistes : la société se lisse très dangereusement.
L’évolution de la société a-t-elle aussi changé la portée de vos propos ?
Oui ! Au début, avec notre engagement "vert", on passait pour de jeunes hippies ! Maintenant,
toute la société française semble devenue "bio", et l’étiquette "écolo" est l’un des meilleurs
arguments marketing qui soit. Nous abordons ce thème dans Greenwashing. Nous parlons de la
même chose, avec un axe différent, car la société entière a changé !
Dans le titre Nous Génération, vous vous moquez aussi gentiment des "jeunes"
d’aujourd’hui… Vous êtes donc devenus des "vieux" ?
Hé hé, disons que c’est une petite revanche tendre… A l’époque, Guizmo portait la crête, ce qui
désespérait son père. Aujourd’hui, ses enfants osent la mèche devant les yeux, le jean slim taille
basse… et devinez qui écrit une chanson ?... C’est la "lutte des générations " !
D’ailleurs le son de Tryo s’électronise un peu, avec DJ Catman (alias DJ Shalom). Une
façon de vous parer d’autres couleurs ?
On a d’abord rajouté des scratchs de DJ Shalom sur Nous Génération pour un son plus urbain,
puis finalement on a adopté l’instrument (les platines) et son interprète sur une grande partie de
l’album…! On a aussi convié le violoncelle de Vincent Segal, la contrebasse de Sarah Murcia, ou
la trompette d’Ibrahim Maalouf… La signature musicale de base reste les trois voix reggaeragga-ska, mais après on la colore.
© B. Benant
Vous avez derrière vous 17 ans de carrière, 17 ans de succès. L’amitié qui vous lie est-elle,
selon vous, l’un des secrets de votre longévité ?
C’est vrai que nous sommes super potes : cette amitié va croissante, parce qu’elle se tisse de
dialogue, de respect… Comme dans un couple, on entretient la flamme. Lorsqu’adviennent des
désaccords, on s’appuie sur cet adage : de la discussion naît la lumière ! Et puis, on
essaye toujours de s’étonner mutuellement, tout en gardant la base. Surtout, on ne se met pas
de pression : on sort un album quand l’envie unanime nous prend, que nous avons plaisir à nous
retrouver après des moments où nos routes divergent… L’avantage, aussi, de notre
indépendance en terme de label etc.
Aujourd’hui vous remplissez Bercy, et pourtant, vous paraissez toujours "artisanaux",
comme
à
vos
débuts ?
Le
succès
ne
vous
est
jamais
monté à
la
tête ?
Notre public est complètement familial. Ils nous considèrent comme des artistes proches,
complices. Et puis, sortie de la parenthèse des tournées, nous avons des vies tranquilles et
complètement banales : personne ne nous reconnaît dans la rue !
A quoi va ressembler votre prochaine tournée ?
On veut un spectacle festif, enjoué et en même temps intimiste et poétique : une épopée, entre la
terre et le ciel, tournés vers la lune et les étoiles… des étoiles qui parfois disparaissent !
Tryo Ladilafé (Columbia / Sony) 2012
En tournée en France cet automne, à l'Olympia à Paris du 15 au 17 novembre 2012
Par Anne-Laure Lemancel