les unites disparues

LES UNITES DISPARUES
Une rubrique conçue, suivie et alimentée par Bernard PALMIERI
Profil de Patrice GAUBERT
L’Auvergne,
de l’Indochine à l’Alsace
L’ancêtre
de
l’Auvergne est une
unité relativement
récente : le GC
II/9 est créé le
1er novembre 1939
en Algérie, équipé de
MS406. Bien que formé de
deux escadrilles, seule la première se voit
dotée des traditions d’une unité de chasse
de la Grande guerre, la SPA 85 et sa célèbre
« folie ». On note d’ailleurs que, à cette
époque comme en 1917-1918, le «joker»
qui forme l’insigne de l’escadrille tient dans
sa main levée une marotte, sorte de petite
tête de poupée équipée de grelots et fixée
au bout d’une tige de bois. Transformé
sur MB152 et rapatrié en métropole, il
est engagé dans la Bataille de France.
C’est pratiquement à la fin de cet épisode
guerrier que la seconde escadrille reçoit
un insigne créé par le Capitaine Delfino, le
célèbre « morietur » (« qu’il meure ») des
gladiateurs romains, un bouclier orné d’un
pousse renversé et un glaive. Un autre
projet, une tête de mort posée sur deux
tibias, ne sera pas retenue, bien que portée
sur certains appareils. Le GC II/9 initial est
finalement dissous fin 1942. L’Armée de
l’air reconstituée sous commandement allié
confie ces traditions à un nouveau GC II/9,
baptisé « Auvergne » pour la première fois,
d’août à novembre 1943 au Maroc, puis de
nouveau de septembre 1944 à fin février
1946. C’est en 1944 que le « joker » prend
une forme plus guerrière : sa marotte est
remplacée par un trident, son visage est
plus agressif. Equipé d’Airacobra,
le GC II/9 mène toutefois
de mornes missions
de surveillance
d
e
s
côtes avant de rejoindre la métropole afin
de participer cette fois à la libération de
l’Europe. Il faut attendre le 1er décembre
1950 pour voir renaître à nouveau les
traditions de l’Auvergne qui sont confiées au
nouveau GC II/9, en AFN, sur Thunderbolt.
Déployé en Indochine, à Tan-Son-Nhut mais
aussi Tourane et Nha-Trang, les pilotes et
mécaniciens vont écrire les pages les plus
glorieuses du patrimoine de l’Auvergne, sur
ce théâtre d’opérations, d’avril 1951 à 1955.
La fourragère aux couleurs de la croix de
guerre des TOE que reçoit l’unité, suite à
ses deux citations, salue ainsi les 11612
sorties offensives et les 16022 heures de vol
effectuées, ainsi que les pilotes tombés au
Photos SHD/DA
Lorsque l’EC 3/13 perd son identité héritée
du groupe de chasse « Auvergne », le 1er
août 1993, au profit de celle du groupe
FAFL « Alsace », ce sont 54 ans presque
ininterrompus de traditions qui disparaissent
avec lui.
combat. L’action de l’unité est tout entière
tournée vers l’appui feu de nos troupes
au sol, comme les 5 et 6 janvier 1954, où
ses pilotes, par leurs assauts audacieux,
dégagent de l’encerclement les fantassins
du 6e BCP à Bon-Song-Hong. L’Auvergne
en Extrême-Orient volera successivement
sur Hellcat et Bearcat, tout en changeant
de numérotation le 1er novembre 1953 :
le GC II/9 « Auvergne » fait place au GC
II/21 « Auvergne ». La période indochinoise
de l’Auvergne se termine le 1er avril 1955
: un escadron de chasse 2/9 est en cours
de création en RFA sur F-84E et devra
reprendre les traditions de l’Auvergne. Le
GC II/21 « Auvergne » de
Tourane
devient
ainsi,
du
jour au
lendemain et avec armes et bagages, le GC
II/21 « Artois », le 1er avril 1955. Auparavant,
le 1er août 1954, l’EC 1/9 « Limousin »,
totalement transformé et équipé de F-84E à
Lahr, donne naissance à l’EC 2/9, nouvelle
unité qui attend avril 1955 pour arborer les
traditions de l’Auvergne. En mai 1956, le
2/9 prend ses quartiers à Metz-Frescaty et
abandonne ses F-84E et G pour des F-84F
dès juillet, codés dans la série « F-UHBx/9Bx ». Jusqu’au 1er juillet 1965, date de sa
dissolution, l’EC 2/9 « Auvergne » prend
sa part aux missions aériennes que la
France consacre à son engagement dans
l’OTAN. Les traditions de l’Auvergne vont
finalement revivre une dernière fois sous
la forme de l’EC 3/13 « Auvergne », créé
le 1er mars 1972, à Colmar. L’unité reçoit
un appareil qui, à l’origine, n’aurait jamais
dû équiper l’armée de l’air : le Mirage 5F,
appareil d’assaut sans radar, peu adapté à
la pénétration de l’Europe de l’est. Ceux-ci
sont alors codés dans la série « F-UHSx/13Sx ». Sans non plus de capacité de
ravitaillement en vol, le Mirage 5F
condamne l’EC 3/13 aux missions
métropolitaines durant 21
ans. Son successeur,
le Mirage F1CT, ne
fournira pas non plus
aux personnels de
l’Auvergne l’occasion
de servir les intérêts de
la France à l’étranger…
La fermeture de l’EC
3/2 « Alsace »
sur
Mirage 2000C à Dijon, unité
aux prestigieuses traditions FAFL, force
l’état-major à confier celles-ci à l’EC 3/13,
le 1er août 1993. SPA 85 et « Morietur »
disparaissent brutalement du ciel alsacien,
avec la dissolution de l’EC 3/13 «Auvergne»
au profit de l’EC 3/13 « Alsace ».
Les insignes de l’Auvergne ne sont
homologués que tardivement et à titre de
régularisation : A1017 le 5 juin 1972 pour
l’écu composite de l’escadron, A1018
pour la SPA 85 et A1019 pour le
«morietur», à la même date.