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Cabinet expert. 4 pages 04/03/2005 08:20 Page 1 La mérule Traitement préventif et curatif de la mérule un redoutable champignon destructeur d’édifices qui n’épargne pas le CALVADOS Situation en avril 2004 Percement des maçonneries pour injections dans la masse LABORATOIRE DE MYCOLOGIE RESEAU INTERUNIVERSITAIRE DE BIODIVERSITE ET BIOSURVEILLANCE U.F.R. DES SCIENCES PHARMACEUTIQUES 14032 CAEN CEDEX Dr. J.-Ph. RIOULT Tél. : 02 31 56 60 16 02 31 56 56 43 Fax : 02 31 56 60 20 [email protected] A. BOURREAU Ingénieur Conseil Expert Percement des maçonneries selon les règles de l'art, entre le plancher des combles et la panne sablière de charpente pour injection à coeur des produits fongicides. A. Bourreau-2003 Brûlage superficiel Règle absolue • Détecter les venues d’eau anormales à l’intérieur des bâtiments (fuites sur le réseau d’eau, eaux pluviales, infiltrations par le sol, eaux usées,...). Même une fuite au goutte à goutte est un risque. • Faire diagnostiquer par un spécialiste (expert ou entreprise) l’état des supports dans un large périmètre ceinturant cette venue d’eau parasite. Rue du Perron 14740 ST MANVIEU NORREY Tél. : 02 31 80 76 25 fax : 02 31 80 73 51 [email protected] • Faire réparer les fuites ou aménager des systèmes de drainage. • Faire procéder au traitement des champignons destructeurs de bois, par une entreprise spécialisée en exigeant une garantie. • Faire étudier la remise en état par un homme de l’art. Photo Mairie de Gonneville-sur-Mer - 2002 Les méfaits de ce champignon sont connus depuis plus de 200 ans, mais c’est à partir de 1990 que cette espèce a redoublé d’activité, n’épargnant pratiquement aucun canton de notre département. La mérule appartient à l’ordre des Bolétales dans lequel on trouve également les cèpes et les bolets de nos forêts. Mais, à la différence de ces champignons inoffensifs, la mérule envahit les bois employés dans les constructions et, par un processus enzymatique, dégrade la Traitement curatif fongicide à savoir Il faut savoir qu’en cas de sinistre déclaré et important dont le montant des travaux peut atteindre ou dépasser les 150 000 euros, la part réservée au traitement fongicide n’est que de 10 à 20%. Ceci veut dire qu’entre la phase de démolition et celle de reconstruction à l’identique, tous les corps de métier interviennent. Les délais d’intervention s’échelonnent sur plusieurs mois. Dans les cas graves, les propriétaires doivent quitter leur immeuble. POUR LES MACONNERIES Travaux préparatoires : Avant tout traitement, il est nécessaire de démonter tous les doublages et/ou toutes les boiseries qui recouvrent les maçonneries intérieures enduites. En général, il s’agit des plinthes, lambris, tableaux de baies revêtues de panneaux de bois. Tous les isolants, en particulier les polystyrènes doivent être déposés, ainsi que les circuits électriques et canalisations de chauffage apparents. Travaux superficiels : Il est ensuite procédé aux opérations suivantes : • Piquetage des enduits plâtre ou au mortier de ciment contaminés et purge de tout élement dissociable de la maçonnerie. • Mise à l’air libre des cavités souvent existantes dans les vieilles maçonneries dans lesquelles se trouve le mycélium de mérule, même en profondeur. • Brûlage à la flamme des maçonneries ainsi préparées dans le but de détruire toute partie du champignon étendue superficiellement. • Brossage et application d’une pulvérisation générale de produits insecticides et fongicides. Traitement dans la masse : • Après respect du temps de séchage déterminé par le spécialiste, le maçon procède alors au rebouchage de toutes les cavités mises à jour et réalise un enduit de dégrossi au mortier à base de chaux afin de bloquer les fonds s’ils sont poudreux ou peu résistants. A ce stade, tous les renforts de bois porteurs par exemple les solivages de plancher, les linteaux en bois doivent être remplacés ou traités. Il est procédé au forage de trous en biais vers le bas dans la masse des murs selon un quadrillage que définit le spécialiste en fonction de l’importance de l’attaque. La profondeur de ces trous atteint les 2/3 de l’épaisseur des murs. S’il s’agit de maçonneries appareillées, on réalise des trous dans les joints. On injecte, à la pression, du produit fongicide dans les trous ainsi préparés. Une pulvérisation finale après l’injection est faite. Après période de séchage, tous les travaux de remise en état par les corps de métiers peuvent être entrepris. Les sols contaminés sont traités de la même manière, un processus est à mettre au point selon la nature du sol. POUR LES BOIS CONTAMINES • Tous les bois directement infestés par le champignon doivent être démontés, évacués et brûlés afin d’éviter la dissémination des spores. • Tous les bois encastrés dans la maçonnerie, par exem- ple sommier de poutre ou solive de plancher qui présentent des affaiblissements mécaniques, doivent être extraits. A ce stade, des étaiements sont à prévoir. Le menuisier ou le charpentier doit intervenir afin de remplacer, après traitement, les boiseries des portes, dormants de fenêtres et toutes les boiseries contaminées par le champignon. Les bois jugés aptes à rester en place doivent être débarrassés par bûchage, de toute depuis quand ? partie superficielle telle que l’aubier. Les bois reçoivent alors un traitement chimique en fonction de leur condition d’exposition. Le traitement en profondeur s’effectue par injection d’un où ? fongicide dans des trous préalablement percés. La fréquence de ces trous est appréciée par l’opérateur. Le traitement superficiel est effectué par badigeonnage de produit fongicide à raison de 2 à 300 g/m2. REGLE A OBSERVER : Tous les traitements ci-avant définis doivent être effectués 1 mètre au delà des zones contaminées dans toutes les directions ce qui fait souvent intervenir dans les pièces contigües à celles contaminées. bibliographie BOURREAU A. et Coll., 1997 - La Mérule : un champignon dévastateur, recrudescence en Basse-Normandie. Experts, Compagnie des Experts (Versailles), juin 1997, 35 : 24-34 RIOULT J-Ph., BOURREAU A., 2002 - Serpula lacrimans (Wulfen in Jacquin ex Fries) Schroeter : un champignon destructeur des bois ouvrés, redoutable en Basse-Normandie. Bull. Soc. Linn. Normandie (Caen), 118 : 19-25, II pl. RIOULT J-Ph., BOURREAU A., 2003 - La Mérule, un champignon destructeur des bois ouvrés. Demeure Historique - La revue des monuments historiques privés (Paris), été 2003, 149 : 14-17 AVRIL 2004 - Caen Repro Color 02 31 95 51 85 cellulose et l’hémicellulose. La pourriture brune, sèche, cassante et cubique ainsi engendrée est très caractéristique et elle provoque une perte de résistance mécanique des bois attaqués par la mérule. Ce champignon appartient à la famille des Coniophoracées et son nom latin est : Serpula lacrimans. La mérule est une espèce cosmopolite, elle est largement répandue en région tempérée, surtout dans l’hémisphère nord : • Amérique du Nord • Japon • Europe centrale et septentrionale mais on la trouve aussi en : • Australie • Nouvelle Zélande. En France, elle est présente partout mais très abondante au Nord d’une ligne Strasbourg-Bordeaux. En Basse-Normandie, plus de mille cas ont été recensés et les trois départements sont touchés. Historiquement la mérule semble n’avoir été signalée en Basse-Normandie que depuis le XIXe siècle. 1806 : “Flore du Calvados et des terrains adjacents”, H.F.A. de Roussel 1841 : Cas rencontrés à Lébisey et Vaux. 1863 : Maison à Lisieux 1884-1889-1892 : Maisons à Cherbourg-Tourlaville 1923 : Environs de Bellême 1920-1930 : Saint-Vigor-Le-Grand 1960 : Cabourg 1971 : Tragédie de Sallen 1975 : Trouville - Deauville 1980 : Granville 1980-1990 : Trun-Chambois et la région du Perche. Depuis 1990, les ravages de la mérule se multiplient dans le Calvados où l’on note de nombreux cas spectaculaires d’édifices contaminés : habitations, églises, monuments historiques, attaqués par le champignon. On citera quelques-uns d’entre-eux observés à : Bayeux, Cabourg, Caen, Courseulles, Deauville, Gonneville-sur-mer, Lisieux, MesnilClinchamp, Saint-Manvieu-Norrey, Trouville, etc... comment ? Les spores de mérule peuvent être transportées par l’homme, le vent, les insectes et se déposent sur des bois humides. D’anciens mycéliums de mérule mis en sommeil, peuvent se redévelopper si l’hygrométrie du substrat atteint 20% et si la température est voisine de 20°C. De plus, la mérule peut transporter l’eau nécessaire à son développement grâce aux cordons mycéliens qui sont de véritables tuyaux d’adduction. Ceux-ci sont souvent mis à jour lors d’opérations de dépiquetage d’enduit (ciment ou plâtre). Il ne faut pas confondre ces cordons avec des toiles d’araignées qui peuvent avoir une allure semblable. Cabinet expert. 4 pages 04/03/2005 08:22 Page 3 Développement et causes d’apparition du champignon Attaque de La mérule sur les bois ouvrés Planchers, sommiers, lambourdes, poutres, lambris, plinthes, menuiseries, meubles Description de la mérule Stade végétatif Tas de bois entreposé dans une cave et entièrement colonisé par des spores qui ont propagé la mérule, au travers des maçonneries , dans toute la maison A. Bourreau - 1996 Cordons mycéliens envahissant les maçonneries et se développant entre les couches de matériaux superposés (ici entre les couches d isolant polystyrène). Obligation est faite de démonter tous les constituants et de piqueter les murs avant traitement A l’intérieur d’une structure de bois contaminée, l’attaque commence par le développement de filaments microscopiques. Si les conditions sont favorables, ce mycélium devient aérien et forme des coussins ouateux, blancs, devenant avec le temps jaunâtres et plus tenaces. Il exsude des gouttelettes qui s’écoulent comme des larmes, d’où son nom de Serpula lacrimans. Si les conditions sont moins propices, le mycélium se réduit à un voile souple et soyeux, parfois très étendu. D’abord blanc, parfois jaune citron, il devient en vieillissant gris argent ou couleur plomb. Devant l’obstacle, les filaments forment des cordons qui quelques fois grossissent et s’allongent jusqu’à 10 m. Ils transportent l’eau et les substances nutritives qui permettent à la mérule d’attaquer les bois sains situés à distance du point contaminé. Les filaments s’infiltrent dans les plafonnages, les briques ou moellons fissurés, suivent et enrobent les fils électriques. La mérule gagne alors les pièces contiguës ou les immeubles voisins toujours par des voies cachées : derrière les plinthes ou sous les planchers. La fructification Elle apparaît lorsque le bois attaqué atteint un stade avancé de pourriture en un lieu généralement plus éclairé. La forme de ce sporophore varie selon son support. C’est le plus souvent une crêpe charnue alvéolée et plissée de couleur rouille, bordée d’une large marge blanche stérile. Ce sporophore projette dans l’environnement plusieurs milliards de spores rousses qui forment une poussière rougeâtre, caractéristique de la mérule, très visible au sol. Ces spores assurent la dissémination de l’espèce par le vent ou par l’homme (chaussures, vêtements...), de plus, elles peuvent provoquer des allergies. Action sur le bois Le bois est une structure végétale essentiellement composée de cellulose et de lignine. La mérule secrète des enzymes qui hydrolysent la cellulose tandis que la dégradation de la lignine reste limitée. Les fibres cellulosiques se dégradent, faisant per- Sporophore de Serpula lacrimans sur parquet et boiserie - A. Bourreau - 1998 dre au bois contaminé toute résistance mécanique. La rétractation du bois desséché forme des fractures suivant 3 plans perpendiculaires. Le bois, sec au toucher, se délite en poudre à la simple pression du doigt. C’est la pourriture cubique du bois. On imagine facilement les conséquences de cette action sur des poutres porteuses de planchers ou de charpentes. Dans des conditions favorables, le stade ultime de dégradation peut être atteint en quelques mois entraînant une rupture inévitable des structures. Conditions de développement Lambris en chêne entièrement contaminés par la mérule, située en face interne contre le mur A. Bourreau - 1998 Détérioration totale de la sous-face d un parquet en chêne. Détail du mycélium en coussins ouateux A. Bourreau - 2003 Détérioration complète au niveau d une plinthe. On aperçoit les cordons du mycélium Plusieurs conditions doivent être réunies pour que la mérule s’installe et prolifère dans un bâtiment, à savoir : - présence de spores, - présence de bois suffisamment humide pour être attaqué (teneur optimale en eau : 40%) - une atmosphère ambiante confinée et humide (95/99 %) et non ventilée, - une température comprise entre 5° C. et 26°C. max., la croissance est optimale à 21°C. La mérule meurt en 1/4 h à 80°C., - une obscurité relative (une lumière diffuse stimule sa fructification), - un support initial sensible à la mérule : souvent un résineux au départ mais elle attaque aussi des feuillus. Dans des conditions favorables, Serpula lacrimans progresse très vite : 12 cm par semaine, voire plus !!! En présence de spores sur des bois, la cause principale d’apparition du champignon est un apport d’eau massif. causes d’entrées d’eau à combattre - fuites des couvertures - fuites des zingueries - infiltrations aux appuis de fenêtres - fissures dans les maçonneries - mauvaise qualité des maçonneries de façade - porosité des pierres et des joints - mauvais état des tuyauteries intérieures - fuites - fortes condensations En fin de cycle du développement de la mérule, les pièces de bois attaquées ont perdu toute résistance, elles se disloquent ou s’effondrent. Infiltrations sous appui de fenêtre après enlèvement de la protection de celuici. A. Bourreau -1995