Le Code Civil Mauricien et le Droit de la Famille

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Le Code Civil Mauricien et le Droit de la Famille
LRC [Law Reform Commission of Mauritius]
Professeur Robert Louis Garron (24 Juin 2011, Salle du Conseil, Municipalité de Port Louis)
Le Code Civil Mauricien et le Droit de la Famille
Je vais vous parler aujourd’hui du droit de la famille. De la réforme du droit de la famille plus
exactement qui a eu lieu au début des années 80.
La famille, comme vous le savez, c’est le pilier le plus solide de la société, le pilier sur
lequel elle repose ; sa cohérence est essentielle à une nation, il, faut la sauvegarder quand elle est
menacée, il faut faire en sorte qu’elle vive et qu'elle soit protégée. Le Code napoléon avait pris
en compte cet impératif, mais à sa manière. La famille en tant que famille n’existait pas et c’était
le mari qui était chargé de la conduire et il avait pour ce faire tous les pouvoirs. Cette conception
de la famille est dans le droit fil des doctrines monarchiques françaises ; je vous rappelle les
paroles de Louis XIV : «L’État, c’est moi!», et là Napoléon, c’était la France… et le mari c’était
la famille. Par conséquent, dans le Code civil de l’époque, il n’y a que le mot famille qui vient
tout de suite après la France. Mais le mari est le chef de famille ; la famille en tant que telle
s'efface devant lui. Car c’est lui qui a tous les pouvoirs.
Ces pouvoirs ont été maintes fois rappelés, je ne vais pas y revenir. Ils concernaient la
direction de la famille, le pouvoir sur la femme, le pouvoir marital, et le pouvoir sur les enfants,
le pouvoir paternel. C'était ça la famille napoléonienne !
Depuis le code Napoléon, la société avait considérablement évolué. Partout. Il n'y a pas
que la société mauricienne qui avait évolué. La société, dans presque tous les Etats du monde,
avait considérablement changé depuis le début du 19ème siècle. Elle avait subi ce que l'on
appelle le vent de l'histoire, qui faisait que la femme était désormais prise en compte dans la
plupart des États, avec des droits tout aussi importants que ceux du mari. De même, l'enfant
faisait l'objet, en tant que tel, d'une certaine reconnaissance juridique. Ce vent, quand je suis
arrivé, soufflait à l'île Maurice aussi fort que les alizées : les associations féminines étaient très
actives sur le sujet, car l'île Maurice avait signé une convention en 1979 qui lui interdisait toute
discrimination à l'égard des femmes. Cette convention ne fut ratifiée qu'en 84, mais l'île Maurice
l'ayant signée, ne pouvait pas être en désaccord avec l’ONU sur la nécessité de l'émancipation de
la femme. Elle ne pouvait pas approuver à l'ONU cette émancipation et s'opposer à sa mise en
oeuvre sur le plan national.
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Telle est la première raison de l'évolution du droit mauricien. Elle venait de loin, de tous les
pays qui avaient fait des reformes depuis longtemps.
Mais, au début des années 80, il y avait une deuxième raison de réformer le droit de la
famille. Cette deuxième raison puisait sa source dans le contexte de la société mauricienne. La
pluriculture faisait qu'il y avait des familles qui étaient différentes les unes des autres. Chaque
communauté avait son type de famille et sa propre organisation de la famille. Or, la diversité de
ces familles-là n'étaient pas prises en compte par le droit car le Code civil ne reconnaissait que la
famille civile, celle du code Napoléon.
Sir Seewoosagur Ramgoolam s'était rendu compte des inconvénients qui résultaient de cet
oubli de tenir compte, dans les textes, du contexte social. Il avait donné des consignes depuis
quelques années pour que cette situation soit assainie. Pour que les mariages religieux, qui
n'avaient pas fait l'objet d'une célébration civile, ne soient plus ignorés mais validés. Car il y
avait, non seulement des hommes et des femmes mariés religieusement qui étaient considérés par
le droit comme des concubins, mais aussi des enfants qui étaient considérés comme des
« bâtards ». Lors de ma première visite à Sir Seewoosagur Ramgoolam, je me suis rendu compte
que ce qui le chagrinait le plus, ce n'était pas la distorsion entre le contexte mauricien et les
textes du Code, mais bien la situation de ces enfants. On retrouve là l'ancien docteur qui jadis
avait soigné de nombreux enfants : il ne s'inquiétait pas de la lettre des textes mais du sort des
enfants qui le chagrinait beaucoup. .
Voilà quelle était la situation lorsque j'ai commencé mon travail de réforme. Quand je suis
arrivé à l'Ile Maurice, on m'a mis tout de suite en relation avec Monsieur Venchard. J'étais là
pour le seconder. Il recevait les impulsions du gouvernement concernant la famille. Il était
chargé de leur mise en oeuvre. Moi, j'étais le technicien chargé de la rédaction des lois, de
traduire ces impulsions en termes juridiques. Même si j'exprimais, bien entendu, mon opinion sur
les choix et sur les orientations projetées. C'est comme ça que j'ai commencé ma mission.
Devant cette situation sociale déplorable, (qui était aggravée, comme vient de le rappeler
Monsieur l'Attorney General, par l'application de l'ordonnance 50-49 consacrant deux familles
légales, l'une, dans laquelle l'épouse était libre, l'autre, dans laquelle elle était soumise à son
mari), devant cette situation sociale complexe et singulière, nous avons décidé d'envisager la
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famille en elle-même. Nous avons considéré que la reforme devait, avant tout, passer par la
reconnaissance de la famille comme étant une entité juridique essentielle. Cela n'a pas été assez
aperçu à Maurice. On n'aperçoit que les mesures qui concernent les femmes et les enfants, c’està-dire le statut matrimonial et la reconnaissance des enfants. Pourtant, ce n'est pas uniquement
par ces mesures que nous avons abordé le problème. En réalité, ce que nous avons d'abord voulu
c'est la promotion de la famille elle-même avant de promouvoir certains de ses membres.
Car cette promotion - nous en parlerons dans la première partie - représente une réforme
capitale. Surtout pour les juges, qui doivent interpréter les textes. L'intérêt de la famille, nous le
verrons, qui est mentionné dans les textes des articles 212 et suivants du Code civil, est un critère
d'interprétation très important pour le juge. Donc c'est la famille en tant que telle que nous avons
reconnue et promue dans la réforme. Avec Napoléon la famille n'existait pas, à proprement
parler. Car la famille se confondait avec le mari. Aujourd'hui elle est désormais prise en compte
par le droit.
Mais la promotion de la famille n'était pas une réforme suffisante. La femme et les
enfants restaient oubliés par les textes sauf en ce qui concerne leur subordination. Il fallait donc
leur accorder des droits dans la famille comme l'avaient fait, depuis longtemps, la plupart des
Etats. Il fallait aussi les promouvoir. La promotion des membres de la famille sera vue dans la
seconde partie de mon exposé.
1ere partie - La promotion de la famille
Étant donné que certaines familles n'étaient pas reconnues, n'avaient pas de statut juridique
car elles n'avaient pas respecté les règles du Code Napoléon, il y avait donc des familles qui
existaient en marge de la législation. La première réforme qu'il fallait accomplir, c'était de faire
en sorte que ces familles accèdent si possible au statut juridique. Donc, la reconnaissance des
mariages religieux passés, de ces familles oubliées, a été la première démarche à laquelle on ait
pensé, bien que pour des raisons politiques, il n'était pas facile de l'entreprendre. La loi qui
consacre ces mariages est arrivée plus tard.
Cela répondait à la préoccupation de Sir Seewoosagur Ramgoolam.
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Il y a eu un deuxième aspect de la promotion de la famille. La famille en tant qu'institution
juridique était déjà reconnue dans les législations modernes de certains Etats. Certes elle était
reconnue comme une entité qui n'a pas de personnalité morale. Mais tout de même comme un
groupement cohérent qui poursuit des buts communs à tous ses membres et qui doit être envisagé
de la sorte. Indépendamment des individus qui la composent. La famille se distingue, en effet, de
l'ensemble de ses membres. L'intérêt de la famille est supérieur à l'intérêt particulier de ses
membres. Voilà l'idée qui était en gestation dans les États qui avaient fait des réformes dans le
domaine de la famille et qui s'affirmait déjà, quand je suis arrivé ici, dans les textes du droit
français notamment : la promotion de la famille en tant que telle. Le droit français avait promu la
famille. Il y avait beaucoup d'articles à l'époque qui en parlaient.
A l'Ile Maurice, on a promu la famille par la validation des mariages illégaux. Pour les
légaliser on s'est penché sur le passé, et dans la mesure où la situation n'était pas malsaine au
regard du code Napoléon, on a validé les mariages passés. On a considéré que la raison pour
laquelle certaines familles n'étaient pas respectueuses du Code civil, c'est qu'elles faisaient
prévaloir les règles de la religion, au moins dans la cérémonie, sur les règles civiles édictées par
ce Code. On a donc fait en sorte que les mariages passés soient reconnus et que les mariages à
venir ne soient pas entachés de vice. C'est pour y parvenir qu'on a décidé que la cérémonie
religieuse serait équivalente, par l'intervention d'une personne autorisée ou l'assistance du prêtre,
à la cérémonie civile prévue par le Code. La célébration religieuse vaut ainsi célébration civile
dans la mesure où les conditions de cette dernière sont respectées.
Lorsque ces conditions ne sont pas respectées, c'était le cas des mariages passés, et des
hypothétiques mariages à venir en ce qui concerne la communauté musulmane, on a cru bon,
toujours pour sauver la famille, de faire en sorte qu'il n'y ait plus de concubins et de bâtards,
c'est-à-dire de valider les mariages religieux.
Cette validation ne s'est pas faite sans la prise de certaines réserves. Ce qu'il fallait faire c'était
concilier les règles d'une religion et les principes moraux et juridiques que doivent respecter tous
les États modernes. Ainsi, dans les articles 228-1 et suivants du Code civil, qui aujourd'hui
n'existent plus - mais si vous les cherchez ils sont en filigrane - on avait clairement fixé des
limites à ne pas dépasser. Il ne fallait pas qu'à travers le mariage religieux on permette des excès,
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il fallait que le mari verse une pension quand le mariage est dissous, et que l’on ne puisse pas
déroger à l’égalité dans la succession.
Voilà le premier aspect de la promotion de la famille.
Nous en arrivons au deuxième aspect, que je vous ai signalé tout à l'heure, c'est-à-dire la
promotion de l'intérêt de la famille, de la famille napoléonienne, pas de la famille religieuse. De
la famille qui procède du Code civil.
Depuis longtemps en France et dans les États francophones qui faisaient la réforme du code,
on assistait à une appréhension de la famille tout à fait distincte de celle du Code napoléon. Alors
que la famille de ce Code se confondait jadis avec la personne de son chef, le mari, le père, la
doctrine française faisait déjà remarquer, bien avant la réforme, que la famille était une cellule
sociale, une entité fondamentale sur laquelle repose la société, et qu'il fallait la considérer en
elle-même, juridiquement, parce qu'elle avait des intérêts et des devoirs tout à fait distincts de
ceux des membres qui la composent. La plupart des collectivités organisées dont les membres
poursuivent un but commun possèdent la personnalité morale. Mais on a cru bon, en France,
comme à Maurice, de ne pas donner la personnalité morale à la famille, puisque le statut de la
famille étant d'ordre public et fortement règlementé, ça ne servait pas à grand-chose de doter
cette institution de la capacité juridique lui permettant d'agir seule et en son propre nom. Mais on
aurait pu le faire.
Ceci étant, vous trouvez dans certains textes, depuis que l'épouse a les mêmes droits que le
mari, des références à l'intérêt de la famille en tant que telle. Lorsque le juge doit intervenir dans
le cadre familial il doit prendre en compte l'intérêt de la famille, et lorsque les deux époux
agissent dans le cadre familial ils doivent aussi tenir compte de l'intérêt de la famille. Ils ne
doivent pas prendre des mesures qui se trouvent au-delà ou qui vont à l'encontre de l'intérêt de la
famille. Par exemple, l'article 218 qui fait référence à ce critère, dispose à ce propos, "qu'un
époux peut être autorisé par le Juge en Chambre à passer seul un acte pour lequel le concours et
le consentement de son conjoint est nécessaire si celui-ci est hors d'état de manifester sa volonté
ou si son refus n'est pas justifié par l'intérêt de la famille". Il s'agit là d'un texte général qui, en
fait, concerne presque tous les actes passés par les époux. Depuis la réforme, en effet, les époux
assurent ensemble la direction de la famille, en vertu des dispositions de l'article 213. Dès lors, la
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plupart des actes relativement importants ne peuvent être passés qu'avec le concours des deux
époux. Alors, en cas de désaccord, pour éviter la paralysie, l'article 218 permet au Juge
d'intervenir en recherchant quel est l'intérêt de la famille. L'intérêt de la famille est donc un
critère essentiel.
D'autres textes ne font pas directement référence à l'intérêt de la famille, mais les mesures
qu'ils contiennent, recèlent implicitement ce critère. C'est le cas de l'article 216 qui impose le
consentement des deux époux pour disposer des droits par lesquels est assuré le logement de la
famille. Même si ces droits appartiennent en propre à l'un des époux, ils deviennent
indisponibles, dès lors qu'ils sont affectés à l'intérêt de la famille.
Avec l'intérêt de la famille, on a, par conséquent, créé un concept nouveau. Désormais, la
famille est consacrée civilement alors qu'elle n'existait pas, en tant que telle, d'une manière
autonome qui la distingue de ses membres.
Mais la réforme n'en a pas oublié pour autant l'intérêt des membres de la famille. Car il
fallait aussi les promouvoir.
2ème partie - La promotion des membres de la famille
Il fallait promouvoir juridiquement certains membres de la famille dont les droits avaient
été négligés par le Code de Napoléon. A savoir l'épouse et les enfants. Ils n'apparaissaient qu'à
titre de subordonnés. Ils n'avaient pas de droits mais seulement des devoirs envers le mari, chef
de famille. Ils étaient soumis, l'une à la puissance maritale, les autres à la puissance paternelle.
En ce qui concerne l'épouse, la reforme a conféré un statut d’égalité entre l'homme et la
femme, et l'article 213 mentionne expressément que les époux concourent ensemble à la
direction de la famille. Ce sont les deux qui dirigent la famille : donc, voilà ce qu'a fait la
reforme : elle a donné des droits égaux aux époux, s'inspirant ainsi des réformes déjà accomplies
dans la plupart des Etats modernes.
Par le fait même, la réforme a fait surgir un problème. A deux, l'entente est nécessaire car
la majorité n'existe pas : il faut l'unanimité. Alors, en cas de désaccord, nous l'avons vu, il faut
faire appel au juge pour départager les époux. On a donc créé une sorte de ménage à trois, le
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mari, la femme et le juge. Le juge qui devient, en l'occurrence, le champion de l'intérêt commun,
c'est-à-dire de l'intérêt de la famille.
En ce qui concerne toujours la femme, il y a quand même eu une avancée considérable,
non seulement dans l'augmentation de ses pouvoirs mais aussi de ses droits. On a accordé des
droits de succession à la femme. Je dis la femme mais le texte parle de « conjoint ». C’est une
promotion considérable parce que l'épouse désormais est assimilée à un enfant dans les droits de
succession, ce qui est énorme car les enfants sont les premiers héritiers. Elle devient ainsi la
première héritière. Elle est payée sur la quotité disponible. Les enfants étant réservataires, le
problème s'est posée à Maurice : doit-on faire de la femme une héritière réservataire ? La réponse
a été non. Peut-être le législeteur a-t-il eu raison car l'histoire du droit français montre qu'on peut
avoir des méfiances quelques fois dans les successions des femmes. Nous avons eu en France,
depuis très longtemps, un édit de Michel de l'Hôpital qui date de 1520, qui témoigne de la
méfiance envers les femmes qui se remariaient. En l'occurrence, "l'édit des secondes noces". Car
elles se remariaient généralement à 15 ou 16 ans avec des veufs très âgés, et les familles de ces
veufs avaient peur des captations d'héritage. Il y avait donc cet édit, pris par un ministre de
l'époque, et qui faisait en sorte que la deuxième femme ne puisse pleinement bénéficier des
donations ou des largesses testamentaires de leur mari. J'ai retrouvé à l’île Maurice l'esprit du
16ème siècle français. On s'est méfié de la femme et on lui a accordé une part d'enfant sur la
quotité disponible. Elle n'est donc pas réservataire. Cela signifie que le mari peut tester, faire un
legs à d'autres personnes que son épouse, en puisant librement sur la quotité disponible, c'est-àdire sur la part de sa femme. Il a le droit de le faire, de déshériter son épouse. La femme ne
reçoit, par conséquent, sa part d'enfant que si le mari n'a pas testé pour la déshériter. Que si le
mari n'a pas donné des biens à d'autres personnes, non seulement par un testament, mais aussi
par une donation entre vifs. qui se trouvent comptabilisés.
Mais, en revanche, la femme est réservataire, en ce qui concerne l'usufruit sur le
logement familial. Il s'agit de l'usufruit que lui octroie, depuis la réforme, le nouvel article 768 du
Code civil. Un problème se posait à Maurice comme en France, lorsque le mari mourait avant
son épouse (ce qui est le presque toujours le cas) : la veuve était généralement chassée par les
héritiers dans la mesure où elle n'avait aucun droit sur la succession, où elle n'avait droit qu'à un
quart de l'usufruit dans le texte de Napoléon, autant dire rien du tout. Et ces femmes chassées du
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logement familial constituaient une sorte de spectacle dramatique. Lors de la réforme, on a voulu
faire en sorte que l'épouse survivante continue à vivre dans ses meubles et son logement familial.
Donc on a donné à l'épouse un droit d'usufruit sur le logement familial et les meubles meublants
qui le composent, et là, le mari ne peut pas y toucher par testament, car la femme est un héritier
réservataire… En résumé, elle est réservataire pour l'usufruit mais pas pour la part d'enfant.
En ce qui concerne maintenant toujours les personnes qui constituent la famille, il fallait aussi
promouvoir les enfants. Car dans les conventions internationales, auxquelles avait adhéré
Maurice, les droits des enfants étaient reconnus et consacrés partout dans le monde. Depuis la
réforme, on considère désormais qu'il y a l'intérêt de l'enfant, qu'il faut le respecter, et de
nombreux textes du Code civil font référence à ce nouveau critère. Ainsi, font expressément
référence à l'intérêt de l'enfant les articles 242 et 261 relatifs au divorce, 353 relatif à l'adoption
et 371-3, 372, 372-1 et 374 relatifs à l'autorité parentale,
"L'intérêt de l'enfant", c'est un nouveau critère d'application du droit de la famille, dont le
juge doit se servir. Ce critère procède de l'idée que l’enfant a droit à une éducation correcte, un
entretien confortable, à bénéficier des études lorsqu'il devient plus grand, même au-delà de la
majorité, en vertu de l'article 203 qui dispose que "les époux contractent ensemble, par le seul
fait du mariage, l'obligation de nourrir, entretenir et élever leurs enfants". Bien entendu d'ailleurs,
cet article ne se limite pas au mariage. La jurisprudence, en effet, a étendu les obligations des
époux, régies par l'article 203, à tous les parents qu'ils soient mariés ou non.
Voilà, entre autres, les reformes que nous avons faites, en introduisant, dans le droit
mauricien, des concepts nouveaux. "L'intérêt de la famille" ou "l'intérêt de l'enfant" constituent
désormais, dans le droit de la famille, des critères d'interprétation fondamentaux.
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