Les droits et les devoirs
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Les droits et les devoirs
Association Alzheimer Suisse Les droits et les devoirs Informations à l’intention des proches de personnes atteintes de démence Glossaire Capacité de discernement Faculté de comprendre une situation donnée et de faire des choix délibérés, fondés sur son appréciation des choses. Droit de la protection de l’adulte – Autorité de protection de l’adulte Droit de la tutelle révisé, faisant partie du droit civil (art. rév. 360–456 CC). L’autorité de protection de l’adulte remplace l’autorité tutélaire. C’est une autorité interdisciplinaire spécifique. Mandat pour cause d’inaptitude Document qui permettra à une personne de charger une personne de confiance de lui fournir une assistance personnelle ou de la représenter dans les rapports juridiques avec les tiers au cas où elle deviendrait incapable de discernement. Directives anticipées du patient Document dans lequel une personne exprime ses souhaits par rapport aux traitements médicaux / soins au cas où elle deviendrait incapable de discernement, ou encore dans lequel elle désigne une personne physique qui pourra décider à sa place. Devoir de garant Devoir légal ou contractuel de protéger la santé ou la vie d’une personne de tout danger et de toute atteinte. Rédaction: Marianne Wolfensberger, lic. iur Traduction: Elisabeth Ory Graphisme: Isabel Thalmann et Doris Grüniger (www.buchundgrafik.ch) Images: Michael Uhlmann Fotografie, Klein Rodensleben et plainpicture, Hamburg © Association Alzheimer Suisse, Yverdon-les-Bains, 2012 2 Ont collaboré à la réalisation de cette brochure: Prof. Dr. iur. Hardy Landolt, LLM, avocat et notaire, Glaris (relecture scientifique) Equipe Téléphone Alzheimer L’importance du rôle des proches Il y a peu d’autres maladies au cours desquelles les proches jouent un rôle aussi important que c’est le cas avec la démence. Progressivement ils prennent en charge toujours plus de tâches que leur partenaire ou leur parent malade n’est plus en mesure d’effectuer lui-même. Ils le représentent en matière administrative, s’entretiennent avec son médecin et ses soignants et finissent peut-être par assumer l’ensemble des soins et de la surveillance de leur proche. Une question se pose à eux en permanence : Qu’est-ce que j’ai le droit de faire ? et/ou Qu’est-ce que je dois faire ? Cette brochure vise à aider les proches à trouver des réponses à ces questions et, parallèlement, à présenter les avantages des mesures personnelles anticipées, comme le mandat pour cause d’inaptitude ou les directives anticipées du patient. ! REMARQUE IMPORTANTE Les bases juridiques concernant cette thématique se trouvent dans une large mesure dans le droit de la tutelle actuellement en vigueur, mais aussi dans le droit cantonal. Avec l’entrée en vigueur du droit de la protection de l’adulte (révision du droit de la tutelle) le 1.1.2013, on disposera d’une réglementation uniforme dans l’ensemble de la Suisse. Il est tenu compte ici de cette situation transitoire, puisque la réglementation existante avant l’entrée en vigueur du nouveau droit est présentée, tout en mettant en évidence la nouvelle réglementation. 3 Questions administratives et financières ANNE-MARIE, ÉPOUSE DE JEAN: Mon mari, qui s’est toujours occupé de tout en matière financière, n’ouvre même plus les lettres de la banque, qui s’entassent simplement dans le tiroir. J’ai peur que nous perdions le contrôle de ce compte. Je crois qu’il est temps pour nous de faire quelque chose. Au fur et à mesure de l’évolution de leur maladie, les personnes atteintes de démence perdent progressivement la capacité de régler leurs affaires administratives elles-mêmes. Il se peut qu’elles perdent la vue d’ensemble des factures à payer, qu’elles oublient de remplir leur déclaration d’impôts, on qu’elles concluent des contrats inutiles et fort chers. Il est fréquent que le conjoint (ou une fille ou un fils) accomplisse une part croissante de ces tâches, jusqu’à finir par se charger seul(e) de toutes les affaires de son conjoint, respectivement de son parent. Et ce peut-être avant qu’un diagnostic de démence n’ait même été posé. Si vous vous trouvez dans une telle situation en tant que proche, peut-être vous êtes-vous déjà demandé si vous avez le droit de faire tout cela, et jusqu’où vous pouvez aller dans ce domaine. Ou peut-être n’y avez-vous jamais réfléchi et vous trouvez-vous soudain dans une situation problématique; par exemple au moment où il faut vendre un appartement ou une maison, ou lorsqu’il s’agit d’affaires bancaires d’une certaine importance. Agir en l’absence de procuration ou de mandat pour cause d’inaptitude 4 Sur le plan juridique, il est vrai que les conjoints peuvent se représenter mutuellement dans le cadre d’affaires courantes de la vie de tous les jours (p.ex. pour des achats correspondant aux besoins usuels), mais guère pour des transactions plus conséquentes. Les conjoints n’ont pas non plus automatiquement, c’est-à-dire de par la loi, le droit de représenter leur partenaire qui a perdu sa capacité de discernement et qui n’est donc plus en mesure d’agir par lui-même. Sans parler des descendants qui peuvent encore moins prétendre à un tel droit. Pourtant, tant que cela ne cause pas de problèmes, on tolère actuellement assez généralement que les proches représentent leur partenaire ou leur parent atteint de démence. Une telle représentation a ses limites, puisqu’elle ne peut pas aller au-delà de la gestion du quotidien et ne permet pas, par exemple, de procéder à la vente d’une maison. Dans une telle situation, un membre de la famille ne peut pas simplement se rendre chez le notaire pour signer en lieu et place du membre de la famille incapable de discernement. Si une procuration ou un mandat pour cause d’inaptitude n’a pas été établi à temps en vue de permettre les actes juridiques pour le compte du partenaire ou du parent incapable de discernement, il faut ensuite avoir recours aux autorités de tutelle. Celles-ci désigneront alors par exemple un curateur. 5 § NOUVEAU DROIT DE LA PROTECTION DE L’ADULTE N Le no nouveau droit de la protection de l’adulte stipule expressément que le conjoint (ou le partenaire enregistré, s’agissant de couples de même sexe) a le droit d’ouvrir le courrier, de gérer le revenu et la fortune et de passer tous les actes juridiques habituellement nécessaires pour satisfaire les besoins de la personne incapable de discernement. Aucune procuration n’est donc nécessaire pour ce type d’actes, le droit du conjoint (ou partenaire enregistré) – mais pas celui des descendants – naît automatiquement. Pour des affaires qui vont au-delà de l’administration ordinaire des biens, il faut toutefois requérir le consentement de l’autorité de protection de l’adulte. 6 Les avantages des mesures personnelles anticipées MARCEL, FILS DE FRANCIS: Après l’entrée de mon père en EMS et le déménagement de ma mère chez sa sœur, nous devons vendre la maison. Par chance, mon père m’avait donné, il y a trois ans, un mandat pour cause d’inaptitude. Je peux ainsi régler cette affaire à sa place, et il n’est pas nécessaire de faire intervenir les autorités. Le conjoint, une fille, un fils ou une autre personne de confiance peuvent ainsi agir dans tous les domaines pour leur partenaire, leur parent ou leur ami, à condition qu’une procuration ou un mandat pour cause d’inaptitude leur ait été donné. Ce principe est valable selon le droit en vigueur et il est réglé expressément dans le nouveau droit de la protection de l’adulte (mandat pour cause d’inaptitude). Procuration ou mandat pour cause d’inaptitude ? Les proches au bénéfice d’une procuration (générale) « normale » sont parfois confrontés à des situations où la validité de cette procuration est contestée lorsque le donneur de procuration (p.ex. le père) est devenu incapable de discernement. Il peut donc arriver qu’une telle procuration devienne inutilisable en cas de démence. Cela est dû au fait qu’une procuration, de par la loi, devient caduque en cas d’incapacité de discernement ou de décès de celui qui l’a donnée, si rien d’autre n’a été stipulé ou ne peut être déduit de la nature des affaires. Au contraire, un mandat pour cause d’inaptitude est justement prévu pour conserver sa validité dans ce cas : le mandataire, p.ex. le fils, doit précisément pouvoir agir à la place de son père au moment (et seulement au moment) où son père est devenu incapable de discernement. 7 La fiche d’information de l’Association Alzheimer Suisse Procuration et directives anticipées donne des indications sur la façon de rédiger un mandat pour cause d’inaptitude et sur les réflexions à faire à cette occasion. Mentionnons ici brièvement les points essentiels: • Les personnes qui ont reçu un diagnostic de démence devraient réfléchir à temps à la façon de régler leur situation financière et leurs affaires administratives et choisir la ou les personnes qui pourront les représenter à l’avenir. • En tant que proche, il est recommandé d’aborder ce problème et de trouver une solution avec le partenaire ou le parent concerné. • Soyez dès aujourd’hui attentifs aux prescriptions de forme selon le nouveau droit de la protection de l’adulte. Ce sont les mêmes que pour un testament : un mandat pour cause d’inaptitude doit être rédigé à la main, daté et signé. Un acte authentique devant notaire est aussi possible. 8 Contestation d’affaires conclues par des personnes atteintes de démence MYRIAM, FILLE DE GILBERTE: Ma mère, qui est atteinte d’Alzheimer, a conclu un abonnement assez cher pour des livres, alors qu’elle ne peut plus lire du tout. Je m’en suis aperçue par hasard, et je me demande si je peux résilier ce contrat. Et récemment elle a fait un cadeau très généreux à une personne qu’elle connaît à peine. J’ai l’impression que quelqu’un a abusé de son état. Non seulement les personnes atteintes de démence ne sont-elles plus capables de gérer leurs affaires, mais encore leur arrive-t-il de conclure des contrats que leurs proches, dans la mesure où ils en ont connaissance, souhaiteraient annuler. S’il s’agit de contrats signés lors d’un démarchage à domicile, il est possible de les résilier par simple déclaration écrite dans les 7 jours suivant leur conclusion. Pour d’autres contrats, on doit apporter la preuve que la personne qui a conclu le contrat, donc la mère dans notre exemple, n’était pas capable de discernement au moment de la conclusion du contrat (ou éventuellement qu’un autre vice du consentement doit être pris en compte, comme une tromperie volontaire, une erreur, etc.). En tant que proche parent, vous pouvez écrire à l’autre partie au contrat, et faire valoir que votre mère n’était pas capable de discernement au moment de la conclusion du contrat. Il est utile de joindre un certificat médical à votre lettre pour prouver vos dires. Et il faut espérer que le cas puisse se régler sans l’intervention d’un juge. Si de tels incidents devaient se répéter, il faudrait envisager la possibilité d’une mise sous tutelle. Ceci tout particulièrement si la personne atteinte vit seule et qu’on ne peut pas la surveiller. 9 Procédure de tutelle ANNE ET FRANÇOIS, ENFANTS DE XAVIER: Nous ne pouvons plus rester les bras croisés alors que notre père néglige ses affaires personnelles et financières. Comme nous habitons assez loin et que nous travaillons tous les deux, nous nous demandons quels moyens il y aurait de l’aider, sans avoir à le placer tout de suite en EMS. Avec l’évolution de la maladie, les personnes atteintes de démence perdent progressivement la capacité de gérer leurs affaires financières et administratives. Il arrive alors parfois que la fortune du couple ou des parents fonde petit à petit, et que les dettes menacent. A cela s’ajoute le fait que les personnes atteintes d’une démence à un stade avancé ne sont plus en mesure de prendre soin d’elles-mêmes; à défaut d’une aide appropriée, elles en arrivent à un état de déchéance. Dans une telle situation, peut-être vous êtes-vous déjà demandé, en tant que proche, si vous pouviez mettre en œuvre des mesures qui auraient pour effet de protéger votre conjoint ou parent. Le droit de la tutelle en vigueur prévoit diverses mesures pour protéger les personnes fragilisées. La mesure la plus légère est la curatelle, qui procure une assistance en matière d’affaires administratives et/ou personnelles. La tutelle est la mesure la plus étendue, le tuteur agissant en toute chose en lieu et place de la personne sous tutelle. 10 L'institution de mesures tutélaires ne vise pas uniquement la protection de la personne malade elle-même, elle sert aussi à protéger son entourage. Ce principe est déjà en vigueur dans la pratique d’aujourd’hui, mais le nouveau droit de la protection de l’adulte prévoit expressément qu’il y a également lieu de tenir compte des charges pesant sur la famille et les tiers ainsi que de la protection qui leur est due. § NOUVEAU DROIT DE LA PROTECTION DE L’ADULTE Contrairement au droit de la tutelle actuellement en vigueur, le nouveau droit ne prévoit plus qu’une seule institution : la curatelle. Elle sera configurée sur mesure, selon les besoins concrets de chaque cas. Le curateur peut fournir une assistance personnelle ou se charger de représenter la personne concernée dans ses rapports juridiques avec les tiers et/ou en matière de gestion de fortune. Il existera une curatelle d’accompagnement, de représentation, de coopération (pouvant être combinées entre elles) et une curatelle de portée générale. Que vous soyez membre de la famille ou proche, vous avez le droit d’annoncer une situation problématique à l’autorité compétente. Celle-ci examinera alors le cas et décidera de l’opportunité d’ordonner une mesure tutélaire (par exemple une curatelle). Contrairement à une pratique plus ancienne, la tendance est actuellement de faire en sorte que les autorités n’interviennent que lorsque c’est vraiment nécessaire. L’accent est mis sur la responsabilité personnelle et la solidarité familiale. Si la personne concernée a prévu de confier certaines tâches à un tiers (mandat pour cause d’inaptitude) ou s’il est possible de fournir d’une autre façon l’assistance nécessaire à la personne atteinte de démence, les autorités n’interviendront normalement pas. Et si une mesure doit tout de même être prise, elle sera limitée au strict nécessaire. Si l’autorité tutélaire décide d’ordonner une mesure, elle a la possibilité, mais non pas l’obligation, de confier la fonction de curateur à un membre de la famille. De façon générale, en tant que membre de la famille ou personne proche, vous avez le droit de proposer une personne pour l’exercice de cette fonction. L’autorité tiendra compte de cette proposition, dans la mesure où rien ne s’y oppose. 11 Traitements médicaux et soins JEAN VIENT DE RECEVOIR UN DIAGNOSTIC D’ALZHEIMER: Je suis content de savoir enfin d’où viennent mes problèmes. Mais j’ai l’impression que tout le monde veut prendre des décisions à ma place. Pourtant, j’ai l’impression de savoir, en tout cas pour le moment, ce qui est le mieux pour moi. Il arrive fréquemment que les membres d’une famille s’impliquent dès le début d’une maladie d’Alzheimer. Ils sont là lors du dépistage et lorsque le diagnostic est communiqué, et ils accompagnent le conjoint ou le parent malade lors de ses rendez-vous réguliers chez le médecin. Selon la situation, il peut arriver qu’ils jouent un rôle prépondérant lors des consultations. Or, il importe de partir du principe que la personne atteinte de démence, au début de la maladie du moins, est encore tout à fait capable de discernement et apte à comprendre le résultat des examens et le diagnostic. Elle est également capable d’accepter ou de refuser les mesures médicales qui lui sont proposées. Il faut donc prendre en compte son opinion. De plus, il s’agit d’appliquer également le secret médical à l’égard des membres de la famille, ce qui signifie que le diagnostic ou d’autres informations d’ordre médical ne peuvent pas être communiqués aux proches sans l’accord de la personne malade. 12 Au fil de l’évolution de la maladie, les personnes atteintes de démence perdent toutefois leur capacité de discernement, c’est-à-dire la capacité d’évaluer une situation et de prendre elles-mêmes les décisions qui s’imposent. Faute de capacité de discernement, il n’est pas possible de donner un accord valable, par exemple pour un traitement ou pour une opération. Il est donc nécessaire d’impliquer des tiers dans le processus décisionnel. Il se pose en particulier la question de savoir si des membres de la famille ou d’autres proches peuvent décider pour leur conjoint ou leur parent malade. Pour répondre à cette question, il faut, aujourd’hui encore, se référer en premier lieu à la loi cantonale. L’entrée en vigueur du nouveau droit de la protection de l’adulte dès 2013 établira une réglementation uniforme de la situation des proches. S’il n’y a pas de dispositions anticipées BRIGITTE, FILLE DE CHARLES: Mon père n’a jamais rien voulu régler. Maintenant, c’est trop tard, sa démence est trop avancée. Il est à l’hôpital, et il est question de l’opérer du cœur. Puis-je prendre cette décision à sa place? La situation actuelle, avant l’introduction du nouveau droit de la protection de l’adulte, est assez embrouillée. Si la personne malade n’a pas désigné à temps une personne de confiance qui peut décider à sa place, c’est le droit cantonal qui régit le rôle accordé aux membres de la famille ou aux autres personnes proches du malade. 13 En règle générale, les droits des proches sont limités S’il n’est pas expressément prévu que vous puissiez, en tant que membre de la famille, décider pour votre conjoint incapable de discernement (ou pour un autre membre de votre famille), vos droits sont généralement limités: • Vous avez tout de même le droit de recevoir des informations sur l’état de santé, les traitements prévus, etc. La loi zurichoise sur les patients stipule par exemple que, s’agissant de patients incapables de discernement et n’ayant pas de représentant légal (par exemple de tuteur), les proches disposent d’un droit à l’information. On part aussi du principe que le patient accepte implicitement que les informations le concernant soient transmises à ses proches. • Par ailleurs, en tant que membre de la famille, vous devriez pouvoir être impliqué dans le processus de décision. Selon la loi zurichoise sur les patients déjà mentionnée, il est vrai que, dans le cas de patients qui n’ont pas de représentant légal, ce sont les médecins traitants qui décident dans l’intérêt des patients et en tenant compte de leur volonté présumée. Dans la mesure du possible, ils consultent toutefois les personnes proches. Cela semble en effet judicieux. En tant que proche du malade, c’est généralement vous qui êtes en mesure de transmettre les informations les plus précises sur ce qu'il aurait souhaité dans une situation particulière. C’est un aspect décisif, puisque les médecins traitants doivent se fonder sur la volonté présumée du patient si celui-ci est incapable de discernement. 14 S’il existe des dispositions anticipées avec désignation d’un représentant / d’une représentante Tout comme pour les affaires administratives et financières, il vaut mieux que les personnes atteintes de démence aient désigné à temps un proche parent ou une autre personne de confiance (un ami, par exemple) qui pourra prendre à leur place les décisions en matière de traitements médicaux et de soins. On trouvera des conseils sur la façon de rédiger des directives anticipées et sur les réflexions à mener à cet égard dans la fiche d’information de l’Association Alzheimer Suisse Procuration et directives anticipées. L’essentiel en bref: • Les personnes qui ont reçu un diagnostic de démence devraient réfléchir à temps à la personne de confiance de leur entourage qui pourrait les représenter en matière de traitements médicaux et de soins. Il est utile de prévoir également une deuxième personne, au cas où le mandataire désigné au départ ne serait pas en mesure d’agir. Les directives anticipées peuvent en outre contenir des directives particulières concernant les traitements et les soins. • En tant que proche, il est recommandé d’aborder ce problème et de trouver une solution avec le partenaire ou le parent concerné. Contrairement aux droits limités accordés aux proches par le droit en vigueur lorsqu’aucun mandat de représentation n’a été expressément donné (voir chapitre précédent), les représentants expressément désignés disposent de droits étendus. Ils peuvent exiger d’être informés de façon complète et doivent être impliqués dans la planification des traitements. Si plusieurs options de traitements sont envisageables, ils ont le droit de choisir entre ces options et leur choix doit être respecté. 15 En tant que représentant mandaté, vous avez aussi le droit de décider de l’éventuel arrêt d’une mesure de maintien en vie (comme par exemple l’usage d’un respirateur artificiel) dans le cas où l’on ne peut pas s’attendre à une amélioration de l’état général du patient du point de vue médical. Pour toute décision à prendre en tant que représentant dûment mandaté, vous êtes tenu de sauvegarder en toute bonne foi les intérêts de la personne que vous représentez. § NOUVEAU DROIT DE LA PROTECTION DE L’ADULTE Le nouveau droit renforce le rôle de la famille proche (ou d’autres proches). Même en l’absence de directives anticipées et de mandat pour cause d’inaptitude, les proches peuvent décider pour le membre de la famille qui n’a plus la capacité de discernement. La loi spécifie quels proches ont le droit de le représenter, et dans quel ordre. Le droit de décider incombe en premier lieu au conjoint ou au partenaire enregistré, à condition qu’il ou elle vive dans le même ménage ou qu’il ou elle lui fournisse régulièrement et personnellement de l’aide. En deuxième lieu figurent les personnes qui font ménage commun avec la personne incapable de discernement (par exemple un ou une partenaire non marié/e). En troisième position viennent les descendants, ensuite les parents, et finalement les frères et sœurs. La loi privilégie ainsi toujours les relations personnelles réelles et vécues plutôt que de simples relations juridiques. Si par exemple vous vivez en concubinage avec une personne séparée de son conjoint légal, la loi vous permet de prendre les décisions pour elle. Votre avis primera sur celui du conjoint dont cette personne est séparée, de même que sur celui de ses enfants. 16 Les droits des proches en cas de séjour en EMS LOUIS, ÉPOUX DE CHRISTINE: Ça ne va plus à la maison, ma femme devra bientôt entrer en EMS. Qui va décider du séjour en EMS et discuter avec l’établissement ? En tant que mari, est-ce que j’ai encore une influence sur ce qui se passe avec ma femme à l’EMS ? A un stade avancé de la maladie, il est possible que la prise en charge et les soins à domicile ne soient plus possibles et que l’entrée dans un EMS approprié devienne incontournable. Les proches parents peuvent être amenés à placer la personne concernée en EMS contre sa volonté. Mais cela n’est possible que dans le respect des règles de la privation de liberté à des fins d’assistance (le nouveau droit parle de placement à des fins d’assistance), si certaines conditions sont remplies et au terme d’une procédure déterminée. Cela s’applique aussi bien dans le cadre du droit actuel de la tutelle que dans le cadre du nouveau droit de la protection de l’adulte. § NOUVEAU DROIT DE LA PROTECTION DE L’ADULTE Le nouveau droit de la protection de l’adulte stipule qu’une personne qui souffre d’un trouble psychique, ou d’une déficience mentale ou d’un grave état d’abandon, peut être placée dans une institution appropriée lorsque l’aide ou le traitement nécessaire ne peuvent lui être fournis d’une autre manière. La charge que représente cette personne pour ses proches et pour des tiers et leur besoin de protection seront pris en considération dans cette décision. L’autorité de protection de l’adulte est compétente, et dans les cas urgents, un autre organisme désigné par le canton. 17 18 Habituellement, l’entrée en EMS se déroule toutefois plus ou moins sans problème, en particulier lorsque quelques éléments essentiels sont pris en compte (voir la fiche d’information de l’Association Alzheimer Suisse Préparer l’entrée en EMS). En tant que proche d’une personne qui vit en EMS, vous vous demandez peut-être quels sont vos droits et dans quelle mesure vous pouvez faire part de votre opinion aux responsables de l’EMS. La situation juridique actuelle, soit avant l’entrée en vigueur du nouveau droit de la protection de l’adulte, n’est pas uniforme. La loi sur la santé du canton de Fribourg, par exemple, prévoit que les patients puissent bénéficier de l’aide de leurs proches. L’Académie suisse des sciences médicales ASSM a édicté, dans le cadre de ses directives sur le traitement et les soins aux personnes souffrant d’un handicap, la recommandation de maintenir un contact de qualité avec les personnes de référence du patient et de toujours considérer leur expérience pour interpréter les symptômes du patient et leur connaissance intime de ses habitudes, préférences et aversions comme des éléments importants pour la prise de décision. Ces directives ne constituent cependant pas un droit des proches à proprement parler. § NOUVEAU DROIT DE LA PROTECTION DE L’ADULTE Le nouveau droit confère plusieurs droits aux proches de personnes incapables de discernement vivant en EMS. • Les proches, même s’ils ne sont pas spécialement mandatés dans le cadre de directives anticipées, ont le droit de conclure un contrat de soins pour la personne incapable de discernement. Le même ordre de préséance est valable que lorsqu’il s’agit des mesures médicales, (voir le paragraphe à ce sujet). • Les proches doivent être informés des éventuelles mesures de contrainte, comme par exemple des entraves à la liberté, et peuvent déposer plainte contre de telles mesures auprès de l’autorité de protection de l’adulte. • Et bien entendu, selon le nouveau droit, les proches ont le droit de décider des mesures médicales et des soins à donner à leur partenaire ou parent incapable de discernement (par analogie aux règles concernant la représentation en matière de mesures médicales). 19 Questions de responsabilité des proches NICOLE, FILLE DE WERNER: J’ai le sentiment que mon frère, qui est au bénéfice d’une procuration de mon père, en profite à son avantage. Que puis-je faire? Les proches ont des droits ainsi que des devoirs. Dans certaines situations, ils peuvent être attaqués en responsabilité s’ils ne respectent pas ces devoirs. De façon très générale, le principe est que les proches doivent défendre les intérêts de la personne qui n’a plus la capacité de discernement dans toutes les décisions qu’ils prennent pour elle. Cela concerne en particulier, mais pas uniquement, les affaires financières, pour lesquelles il arrive qu’il y ait des conflits d’intérêt. Les intérêts des personnes atteintes de démence doivent bien sûr aussi être préservés dans le cadre des décisions concernant les traitements médicaux et les soins. Les proches ne sont pas seuls à intervenir dans ce processus de décision, auquel participent également les médecins et les soignants. On peut donc parler ici d’une responsabilité partagée. Mais là aussi, l’autorité de protection de l’adulte peut intervenir si les intérêts du patient sont menacés ou si les personnes qui le représentent ont des divergences d’opinion. § NOUVEAU DROIT DE LA PROTECTION DE L’ADULTE Selon le nouveau droit, des règles strictes s’appliquent aussi bien au cas du mandat pour cause d’inaptitude qu’à celui du pouvoir de représentation du conjoint ou du partenaire enregistré. L’autorité de protection de l’adulte peut intervenir si les intérêts de la personne incapable de discernement sont menacés. 20 Responsabilité des proches ANNE-MARIE, LA FEMME DE CLAUDE: Je ne sais jamais trop dans quelle mesure je dois surveiller mon mari atteint d’Alzheimer. En tant qu’épouse, peut-on me rendre responsable si quelque chose arrive? Une question que les proches devraient se poser régulièrement est celle de leur responsabilité. En tant que proche, peut-on me tenir pour responsable si, par exemple, mon mari conduit encore sa voiture, alors qu’il n’est plus en état de le faire? Puis-je permettre à mon père d’aller se promener, bien qu’il ne soit plus très attentif et qu’il lui arrive de se perdre? Quelles précautions dois-je prendre pour que rien n’arrive à la maison, p.ex. avec la cuisinière électrique? Il faut distinguer dans ce contexte entre la responsabilité pénale (p.ex. suite à des blessures corporelles involontaires) et la responsabilité civile (prise en charge des coûts du dommage). Une responsabilité pénale ne peut exister que si le conjoint ou le proche a les devoirs d’un garant de la personne atteinte de démence. Si quelqu'un s’est spécifiquement engagé à veiller sur une personne atteinte de démence, ses devoirs vont naturellement au-delà de ceux d’un conjoint qui s’acquitte simplement de son devoir légal d’assistance conjugale. Dans le cas d’une fille qui surveille son père pour que sa mère puisse aller faire ses courses, on devrait probablement considérer que cette responsabilité existe. On ne peut toutefois s’attendre à ce que les proches soignants surveillent la personne malade minute par minute. 21 Si dans un cas concret, on considère qu’il y a eu un manquement à la responsabilité du garant (et une culpabilité de sa part), cela peut avoir des conséquences financières pour lui. Il peut être amené à assumer les «dommages», qui peuvent découler, par exemple, du fait qu’une personne atteinte de démence se soit perdue et blessée. Il peut bien sûr aussi se produire une situation dans laquelle la personne atteinte de démence cause un dommage à une autre personne, p.ex. si elle traverse la route au feu rouge et cause un accident à un cycliste. Dans ce cas aussi, la question de la responsabilité des proches soignants peut se poser. Le principe général est toutefois qu’il n’y a pas de responsabilité dans la mesure où le conjoint (ou un autre proche) soignant a exercé sa surveillance avec le soin habituel et adéquat dans ce type de circonstances. La conduite automobile représente un cas problématique dont le potentiel de dangerosité est important. La fiche d’information de l’Association Alzheimer Suisse Conduite automobile et Alzheimer indique comment les proches peuvent agir dans ce domaine. En tant que proches, vous ne devriez pas hésiter à faire part de vos observations et de vos doutes au médecin de famille ou au spécialiste. Il est aussi possible d’informer directement l’Office de la circulation routière. Il est toutefois pratiquement exclu que, dans un cas concret, une épouse qui a laissé son mari atteint de démence prendre le volant, en dépit de ses difficultés avec la conduite, soit ensuite rendue responsable des suites d’un accident. Les proches ne devraient pas être jugés plus sévèrement que le médecin de famille qui peut faire une communication à l’Office de la circulation routière, mais n’en a pas l’obligation. De ce fait, le médecin de famille ne pourrait pas être tenu pour responsable d’un accident survenu suite à l’omission d’un tel signalement. 22 Devoir d’assistance à la parenté ROBERT, FILS DE GERTRUDE: Ma mère vit depuis des années dans un EMS; la fortune du couple a été totalement utilisée. J’ai entendu dire que les enfants, s'ils sont relativements aisés, peuvent être appelés à prendre en charge les frais de séjour en EMS. Le devoir d’assistance à la parenté ne peut être invoqué que si le parent à assister doit recourir à l’aide sociale. C’est le cas lorsque ses revenus (rentes AVS / AI plus autres revenus éventuels) et les prestations complémentaires de l’AVS / AI ne suffisent pas à couvrir ses dépenses. Selon la loi, ce sont les parents en ligne directe ascendante et descendante (enfants, parents, grands-parents) qui ont un devoir réciproque d’assistance. Le fait qu’ils doivent effectivement passer à la caisse ou non dépend de leur situation financière d’une part, mais aussi de la pratique du canton concerné et des services sociaux d’autre part. Ce n’est que dans le cas de proches parents disposant d’un revenu et d’une fortune nettement supérieurs à la moyenne (p.ex. un couple qui disposerait d’un revenu de plus de Fr. 180’000.–) qu’une participation financière est réellement envisagée. La Conférence suisse des institutions d’aide sociale CSIAS a édicté des directives à ce sujet. Autres publications sur le thème «droits et devoirs» • Fiche d’information «Procuration et directives anticipées» • Fiche d’information «Prétentions financières en cas de maladie de démence» (à télécharger sous www.alz.ch ou à commander gratuitement) 23 Association Alzheimer Suisse Rue des Pêcheurs 8E 1400 Yverdon-les-Bains Tél. 024 426 20 00 Fax 024 426 21 67 [email protected] www.alz.ch Téléphone Alzheimer: 024 426 06 06 ✁ Talon-réponse Je veux en savoir plus Envoyez-moi s.v.p.: la brochure «Conseils utiles pour les proches et les soignants» (gratuit) le bulletin «memo» (trois fois par an, gratuit) la liste complète des publications de l’Association J’aimerais devenir membre de l’Association Alzheimer Suisse membre individuel (cotisation annuelle Fr. 40.–) membre collectif (cotisation annuelle Fr. 200.–) Madame Monsieur Nom Prénom Rue, No No postal, Localité E-Mail Tél. Je suis concerné(e) (information facultative) comme malade comme proche par ma profession autre raison Envoyer à: Association Alzheimer Suisse, Rue des Pêcheurs 8E, 1400 Yverdon-les-Bains