Disons stop à la mode du vêtement jetable

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Disons stop à la mode du vêtement jetable
PAYS :France
RUBRIQUE :Rubriques fdj
SURFACE :28 %
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PERIODICITE :Quotidien
26 novembre 2016
Disons stop à la mode du vêtement
jetable
Point de vue. Par Anne-Laure Guiheneuf, responsable de pôle étude à l'école de
commerce Audencia Nantes.
Consommer toujours plus, plus vite,
à moindre coût, tel pourrait être le
mantra d'un acheteur de vêtements
aujourd'hui. Le Huffington Post a
récemment publié des chiffres
éloquents : le monde consomme 80
milliards de vêtements neufs chaque
année, soit un marché d'1, 2 billions
de dollars ! L'industrie de la mode
est un gigantesque business. On
parle même désormais de « fast
fashion », la mode jetable.
Ce concept est un clin d'oeil aux
fast-foods que nous connaissons
tous. En moyenne, une femme
achète près de 30 kg de vêtements
par année... dont 30 % ne sont
jamais portés ! Certaines chaînes de
prêt-à-porter renouvellent leurs
collections deux fois par semaine.
Deuxième pollueur d'eau, l'industrie
du vêtement a un impact sur la
planète vraiment préoccupant. Sans
compter que les usines fabriquent en
flux tendus dans des conditions
sociales qui laissent parfois à
désirer.
Le 24 avril 2013, le Rana Plaza
s'effondrait au Bangladesh, le plus
grand drame meurtrier dans
l'industrie du textile. La tragédie a
été un électrochoc pour beaucoup de
consommateurs qui ont découvert
les conditions de fabrication de leurs
vêtements. Difficile, lorsqu'on
arpente les rayons des grands
magasins, de pouvoir imaginer
l'insalubrité, les salaires dérisoires,
les défauts de sécurité... qui règnent
dans les usines de fabrication.
Depuis, bon nombre de marques se
sont engagées à améliorer les
conditions de fabrication de leurs
produits, mais difficile de mesurer
avec précision les réelles évolutions.
Dernièrement, des réfugiés syriens,
notamment des enfants, ont été
découverts dans des ateliers de
production en Turquie, sous-traitants
de marques comme Zara, Mango ou
encore Marks et Spencer.
Aux consommateurs d'être
responsables
Face aux scandales, certaines
marques ont réagi avec plus ou
moins de sincérité dans leurs
initiatives et oeuvrent pour un
développement plus responsable. H
&M, par exemple, a déployé
depuis 2013 une politique de
collecte des vêtements en échange
de bons d'achat. Selon
l'Environmental protection agency,
sur 13 millions de tonnes de
vêtements jetés chaque année dans
le monde, seulement 15 % sont
recyclés. La marque a ainsi permis
de recycler 25 000 tonnes de
vêtements, selon leurs derniers
chiffres publiés en avril.
Une autre initiative, plus récente,
concerne la marque propre des
Galeries Lafayette sur la production
même des vêtements : une collection
écoresponsable, la « Fashion
Integrity », a été imaginée par les
équipes. La singularité de la
collection est de proposer aux clients
des vêtements issus d'une filière 100
% traçable : de la récolte de la
matière première (ici le coton)
jusqu'au magasin. Un mouvement
est en marche, les bonnes pratiques
fleurissent, mais la route est encore
longue...
Ce positionnement des marques sur
le champ de la mode responsable est
un marqueur indéniable d'une prise
de conscience et d'attentes de la part
des consommateurs. C'est à nous
aujourd'hui, clients, d'interroger nos
marques pour les pousser à aller
encore plus loin. D'où viennent vos
matières premières ? Quelles sont
les conditions de travail dans vos
usines ? Quels sont vos engagements
sociétaux ? Ne soyons pas passifs.
Et puis, bien sûr, questionnons nos
modes de consommation. Ai-je
réellement besoin de m'acheter
autant de vêtements ? Ne dois-je pas
plutôt privilégier la qualité à la
quantité ? Mettons simplement un
peu de raison dans nos achats coup
de coeur et n'attendons pas d'autres
scandales pour réagir ! ■
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